Douleur persistante, trois mois après une entorse de la cheville Q

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S P O R T
Douleur persistante,
trois mois après une entorse de la cheville
étiquetée bénigne chez un volleyeur
l P. Le Goux*, X. Chevalier**
‰ Quels diagnostics peut-on
envisager ?
"
Les douleurs de cheville dans les
suites d’un entorse de cheville, y
compris à distance, ne sont pas rares. Tout d’abord on peut voir,
pour l’entorse du ligament latéral externe de la cheville comme
pour l’entorse du ligament latéral interne du genou, des douleurs résiduelles “cicatricielles”
du plan ligamentaire externe.
Mais la principale complication qu’il faut évoquer
devant ces douleurs traînantes de cheville est une
lésion ostéochondrale du
dôme astragalien. Lorsque le
mécanisme de l’entorse est en
inversion-flexion plantaire (cas
le plus fréquent), la lésion
ostéochondrale se situe alors
Coupe frontale.
sur la partie interne de l’astragale, du côté opposé aux lésions ligamentaires. L’examen clinique, même s’il est pauvre, doit accorder une certaine valeur
* * Rhumatologue, médecin du sport, médecin de la FFT, attaché à l’hôpital Ambroise-Paré, Boulogne.
** Chef du service de rhumatologie, hôpital Henri-Mondor, Créteil.
La Lettre du Rhumatologue - n° 297 - décembre 2003
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Un joueur de volley, amateur,
s’est fait une entorse de la cheville étiquetée bénigne (immobilisation par orthèse Air cast ) puis
a suivi une rééducation progressive pendant trois mois.
Néanmoins, une douleur de la
cheville persiste, notamment à la
reprise des entraînements.
à un gonflement intermittent
de la cheville ou à des sensations de blocage, voire d’instabilité. L’examen des amplitudes articulaires de la
tibio-astragalienne mené de
façon comparative peut parfois montrer une diminution
de la flexion dorsale ou plantaire. Il faut également pratiquer les tests d’impaction en
varus flexion dorsale et
flexion plantaire, car ils
réveillent électivement la douleur en fonction de la topographie de la lésion articulaire
et du mécanisme de survenue.
Les autres articulations du
pied doivent aussi être examinées : sous-astragalienne et
médio-pied (interligne de
Chopart et de Lisfranc).
En pratique, un autre diagnostic est possible chez un
Évaluation de la mobilité
de la tibio-astragalienne
sportif ayant des antécéen flexion et en extension.
dents d’entorse sur une
même cheville et accumulant les microtraumatismes répétés : le syndrome exostosant antérieur. À l’examen, le patient
décrit une gêne mécanique douloureuse à la face antérieure
du cou-de-pied, la flexion dorsale pouvant être limitée.
Quant au syndrome d’impaction postérieure touchant la
queue de l’astragale, il concerne surtout les footballeurs par
hypersollicitation en flexion plantaire.
‰ Quelles sont les explorations utiles ?
Le bilan radio standard doit être demandé en première
intention devant cette douleur traînante : cliché de face
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et de profil, éventuellement de face en rotation interne à
15 ° pour mieux dégager les angles ou siègent les lésions
(image de géode sous-chondrale, nécrose avec ou sans
séquestre). L’arthroscanner est à l’heure actuelle l’examen-clé en cas de doute sur une lésion du dôme astragalien : il permet d’étudier le siège et l’étendue des lésions, l’état
du cartilage articulaire, la taille et la position d’un fragment
ostéochondral ou d’un séquestre, la profondeur d’une géode...
Quant à l’IRM, cette exploration devient de plus en plus performante et montre certaines fractures, en particulier les
impactions trabéculaires sous-chondrales respectant la continuité de la corticale et ne pouvant être détectées par la tomodensitométrie. On a ainsi un itinéraire complet d’imagerie, qui
permet d’arriver au diagnostic.
‰ En présence d’une fracture du dôme de l’astragale
passée inaperçue, quelle conduite tenir ?
Le traitement dépend de l’importance de la gêne fonctionnelle et peut, si les lésions sont minimes, rester médical, à base de repos prolongé, de kinésithérapie et parfois
d’infiltrations. En cas de lésion plus gênante, avec notamment
séquestre et corps étranger intra-articulaire, on peut demander
un avis chirurgical :
– on proposera dans certains cas une simple ablation du fragment libre sous arthroscopie ;
– si la perte de substance est plus importante, on effectuera un
abord chirurgical avec curetage soigneux de la lésion suivi d’un
comblement de greffon spongieux. L’immobilisation postopératoire est alors de durée variable.
n
L ’ E S S E N T I E L
1. Quels diagnostics envisager dans les suites d’une entorse de cheville ?
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3
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douleur résiduelle du plan ligamentaire externe
lésion du dôme astragalien
syndrome exostosant antérieur
syndrome d’impaction postérieur
La principale complication qu’il faut rechercher est la lésion du dôme astragalien
2. Quels sont les examens utiles pour dépister cette complication ?
3 le bilan radio : cheville de face + profil et de face en rotation interne à 15 degrés
3 l’arthroscanner : pour une étude précise des lésions ostéochondrales du dôme astragalien
3 l’IRM : pour détecter les impactions trabéculaires sous-chondrales
3. Quelle conduite tenir devant une lésion du dôme astragalien ?
"
3 traitement médical dans un premier temps, basé sur la rééducation en cas de gêne fonctionnelle modérée
3 traitement chirurgical, en présence de corps étranger intra-articulaire entraînant des blocages de cheville
3 traitement consistant en un curetage suivi de comblement en cas de perte de substance importante
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La Lettre du Rhumatologue - n° 297 - décembre 2003
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