G. GUETTROT-IMBERT (1,3), A. ALFIDJA (2), E. LIPIECKA (2), I. DELEVAUX (3), M. ANDRE (3), L. CASSAGNES (2), P. CHABROT (2), A. RAVEL (2), JC PIETTE (1), O. AUMAITRE (3), L. BOYER (2) (1) Service de Médecine Interne 2, Groupe Pitié-Salpêtrière (2) Service de Radiologie B, CHU Clermont-Ferrand (3) Service de Médecine Interne, CHU Clermont-Ferrand INTRODUCTION H H H La panniculite mésentérique (PM) correspond à une inflammation chronique non spécifique du tissu mésentérique. Sa physiopathologie est mal connue : il s’agit d’une réaction non spécifique à une agression du mésentère. L’anatomopathologie distingue 3 stades évolutifs: la lipodystrophie (stade initial), la PM proprement dite et la mésentérite sclérosante ou rétractile (stade terminal). Diagnostic initialement radiologique 3 situations Abus de langage Diagnostic différentiel Idiopathique ou secondaire INTRODUCTION Certains auteurs ont rapporté l’apparition d’un pourcentage important de lymphomes dans le suivi évolutif des panniculites mésentériques (1). OBJECTIFS MATERIELS ET METHODES H H H Etude rétrospective (2000-2006). La panniculite mésentérique suspectée sur le scanner était confirmée par l’examen histologique dans tous les cas. Exclusion des PM associées à une autre pathologie. MATERIELS ET METHODES H H H H 7 patients (3 hommes, 4 femmes) Age moyen : 45 ans (37-78 ans) Antécédents de chirurgie abdominale : 3 patients (43%) 6 patients symptomatiques (86%) Fièvre : 1 patient (14%) Douleurs abdominales : 5 patients (71%) Diarrhée : 1 patient (14%) Constipation : 1 patient (14%) Perte de poids : 2 patients (28%) MATERIELS ET METHODES H Masse palpable : 2 patients (28%, dont le patient asymptomatique) H Syndrome inflammatoire : 4 patients (57%) H Un scanner abdominal était réalisé pour : CRP : 80.4 mg/L (9-310 mg/L) Douleurs abdominales : 5 patients (71%) Diarrhée et perte de poids : 1 patient (28%) Masse palpable : 2 patients (28%) RESULTATS H Diagnostic évoqué au scanner Masse unique : 4 cas (57%) Epaississement mésentérique diffus : 3 cas (43%) Signe du halo : 0 cas Pseudo capsule : 5 cas (71%), continue (1 cas), discontinue (4 cas) Zones pseudo kystiques : 2 cas (28%) RESULTATS H Diagnostic confirmé en histologie Biopsie sous scanner : 2 cas (28%) Biopsie par laparotomie (échec d’une biopsie sous scanner) : 6 cas ( 86%) Panniculite mésentérique : 4 cas (57%) Mésentérite rétractile : 3 cas (43%) EVOLUTION H Traitement médical : 5 patients (71%) H Corticoïdes : 5 patients (100%) posologie variable (10 mg-1 mg/kg/j) selon l’intensité des symptômes et les antécédents médicaux (ostéoporose ou facteurs de risque cardiovasculaires) décroissance progressive jusqu’à un plateau de 10 mg/j poursuivi au long cours. Colchicine : 1 patient (14%) Abstention thérapeutique : 2 patients (28%) car asymptomatiques 1 patient asymptomatique 1 patient : douleurs de l’hypochondre gauche de disparition spontanée avant tout traitement EVOLUTION H Suivi moyen : 46 mois (6 mois – 6 ans) H Patients tous devenus asymptomatiques H Evolution de la PM au scanner: Stabilité : 3 cas (43%) Régression : 2 cas (28%) Disparition complète : 1 cas (14%) Majoration : 1 cas ( 14%, patient non traité toujours asymptomatique) EVOLUTION Patients tous devenus asymptomatiques Evolution de la PM au scanner: Stabilité (43%) Régression (28%) Disparition complète (14%) Majoration (14%) EVOLUTION PANNICULITE MESENTERIQUE H H La panniculite mésentérique est une pathologie rare 0,6% des scanners abdominaux réalisées toutes indications confondues (2). 0,1% sur des séries autopsiques (4). Son incidence est en augmentation peut-être en raison de l’utilisation croissante du scanner abdominal. PANNICULITE MESENTERIQUE H H H Elle atteint plus fréquemment l’homme que la femme (SR H/F : 1.9/1). Age moyen au diagnostic : 60 ans (73% entre 50 et 80 ans). Des antécédents chirurgicaux sont fréquemment retrouvés : 57% (2). CLINIQUE La moitié des patients est asymptomatique : la PM est alors diagnostiquée lors de la palpation d’une masse abdominale (30%) ou est découverte fortuitement sur un scanner réalisé pour une autre indication. H Elle peut s’accompagner de manifestations systémiques (fièvre prolongée, altération de l’état général). H Les manifestations digestives sont très variables (douleurs, rectorragies, troubles du transit). L’ascite reste exceptionnelle; toujours chyleuse, elle est secondaire à la compression du réseau lymphatique par la masse mésentérique. H Les symptômes s’installent de façon aigue ou chronique. H BIOLOGIE HLes examens biologiques ne sont pas non plus spécifiques: ils peuvent montrer un syndrome inflammatoire d’intensité variable. HDes stigmates d’entéropathie exsudative peuvent être présents (hypoprotidémie, carence multivitaminique, hypogammaglobulinémie), ce qui n’était pas le cas chez nos patients. SCANNER ABDOMINAL H La PM est visible sous la forme d’une masse unique ou multiple, d’un épaississement diffus ou rarement sous une forme pseudokystique. H Elle atteint plus fréquemment la racine du mésentère. H Elle apparait hyperdense par rapport à la graisse souscutanée (moyenne – 60 hounsfield units). H Son diamètre est variable. H H Elle concerne avant tout l’intestin grêle (2). La PM est le plus souvent orientée vers la partie gauche de l’abdomen, c’est-à-dire de la racine du mésentére vers le jéjunum (3). SCANNER ABDOMINAL H H La masse mésentérique refoule sans envahir les anses intestinales, elle englobe les vaisseaux sans les infiltrer. La prise de contraste est variable selon l’importance de l’infiltrat inflammatoire. ATTENTION: ◦ ◦ ◦ Adénopathies significatives Anomalies pancréatiques Ascite MASSE MESENTERIQUE (patiente n°5) EPAISSISSEMENT MESENTERIQUE (patient n°6) FORME PSEUDOKYSTIQUE Levy and al. Radiographics. 2006;26(1):245-64 SCANNER ABDOMINAL H H Une pseudocapsule peut être visible, continue ou discontinue. Elle n’a pas de correspondance histologique. Un signe du halo (halo hypodense autour des vaisseaux ou des ganglions) peut également être visible. Il correspond à une préservation du tissu normal mésenterique. Il n’est pas spécifique: il est décrit notamment au cours des lymphomes après chimiothérapie. PSEUDOCAPSULE Pickhardt and al. Radiographics. 2005;25(3):719-30. SIGNE DU HALO Signe du halo Horton and al. Radiographics. 2003 ;23(6):1561-7 Epaississement des anses digestives par compression de la PM TEP SCAN (18 fluorodésoxyglucose;18-FDG) Le TEP scan peut être utile au diagnostic: o D’une part, pour rechercher une fixation extra mésentérique qui serait alors en faveur d’un diagnostic différentiel. o D’autre part, certains auteurs estiment qu’il permettrait d’évaluer la réponse au traitement (l’intensité de la fixation évalue la composante inflammatoire) TEP SCAN En dehors de la fixation physiologique du cœur et de la vessie, on peut voir en regard du mésentère une hyperfixation périphérique (correspondant à un stade histologique de PM sur les biopsies faites en périphérie) et un centre fixant peu (mésentérite rétractile sur les biopsies plus centrales). Nguyen, Clin Nucl Med. 2003;28(8):670-1. MACROSCOPIE Les biopsies mésentériques peuvent être réalisées sous scanner ou au cours d’une laparotomie. H H Différentes forme sont visibles: Epaississement diffus (42%) H Masse unique (32%) ou multiple (26%) H Formes kystiques H MICROSCOPIE La microscopie permet de distinguer 3 stades évolutifs (5) MICROSCOPIE ABSENCE DE VASCULARITE JAMAIS D’ACTIVITE Lipodystrophie MITOTIQUE Panniculite mésentérique Mésentérite rétractile MICROSCOPIE Adipocytes Infiltrat inflammatoire Travées de collagène = fibrose débutante DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS H H Tout processus infiltratif (Oèdeme….) Pathologie inflammatoire intra abdominale (sigmoïdite, pancréatite aigue…) Les données cliniques, l’échographie et/ou le scanner abdominal permettent d’évoquer ces diagnostics. H H Néoplasies (en particulier liposarcome) Lymphomes La présence d’adénopathies, d’ascite; des fixations extramésentériques au TEP scan évoquent ces diagnostics. DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS H Infections H Lipome (tuberculose, Whipple) L’IDR à la tuberculine, des adénopathies, une atteinte pulmonaire, une diarrhée peuvent faire évoquer ces diagnostics. H Seules les biopsies mésentériques (avec coloration de Zielh et PAS, PCR Trophyréma Whipplei et immunomarquage) permettent d’affirmer le diagnostic de PM ou révèlent un diagnostic diférentiel. PANNICULITES SECONDAIRES On parle de PM scondaire lorsqu’une pathologie associée est retrouvée (qu’un lien de causalité soit ou non clairement établi !) H H H H H Sarcoïdose Lupus systémique Polychondrite Maladie de Horton …… PANNICULITE IDIOPATHIQUE Le scanner abdominal évoque le diagnostic de PM. L’histologie le confirme ou non. Lorsqu’une autre pathologie est associée, on parle de PM secondaire. La PM idiopathique est donc un diagnostic histologique d’exclusion. FIBROSE MULTIFOCALE La PM peut s’intègrer dans une pathologie systémique: la fibrose multifocale, en effet plusieurs cas sont rapportés d’association de PM avec: Fibrose rétropéritonéale Thyroïdite de Riedel Pseudotumeur inflammatoire orbitaire Cholangite sclérosante 33% de marquage IgG4 sur 12 coupes de PM (6) Des . études sont nécessaires pour évaluer de façon plus précise le pourcentage de PM dans la fibrose multifocale TRAITEMENT H Seules les formes symptomatiques doivent être traitées Association corticoïdes, colchicine La dose et la durée de la corticothérapie varie en fonction des comorbidités et restent, tout comme la durée, à l’appréciation du prescripteur) H Essai : immunosuppresseurs, progestérone, tamoxiféne, thalidomide sans grande efficacité Peu d’intérêt de la chirurgie souvent incomplète et sans bénéfice sauf exception Elle permet cependant l’accès au diagnostic. PRONOSTIC H H H Bon pronostic Poussées/rémissions Complications: H Compression Lymphatique Vasculaire: ischémie, perforation digestive H Evolution H vers la fibrose (= mésentérite rétractile)? Absence de corrélation entre l’évolution clinique et radiologique PRONOSTIC Une surveillance régulière clinique et scannographique reste nécessaire La durée et le rythme ne sont pas codifiés: pour notre part, les patients sont vus en consultation tous les 6 mois et l’imagerie est renouvelée de façon annuelle. PRONOSTIC Dans la série de Kipfer, sont apparus 8 lymphomes et 8 cancers ( 53 cas, suivi variant de 2 semaines à 16 ans) dans des délais pas toujours précisés mais parfois très courts (2 mois) faisant suspecter la présence du lymphome au moment du diagnostic de la PM (1). Un pourcentage aussi élevé n’a jamais été retrouvé dans les autres séries publiées. Les cas cliniques rapportant la découverte d’un lymphome dans le suivi des PM concernent dans la majorité des cas, des aspects radiologiques de PM non confirmés par l’histologie (= diagnostic différentiel) CONCLUSION H H H H H Diverses pathologies (souvent malignes) peuvent mimer une panniculite mésentérique au scanner. Une vérification histologique est donc impérative. Seuls les patients symptomatiques nécessitent un traitement. Celui-ci repose sur la corticothérapie. La durée de la surveillance est mal connue. De plus amples études sont nécessaires afin d’infirmer ou de confirmer un lien entre PM et lymphome. BIBLIOGRAPHIE (1) (2) (3) (4) (5) (6) Kipfer and al. Ann Inter Med, 1974; 80(5):5828. Daskalogiannaki and al. Am J Roentgenol. 2000; 174(2):427-31. Genereau and al. Dig Dis Sci. 1996; 41(4):684-8. Duerloo and al. Eur J Radiol. 2001; 38(2):160-2. Sabaté and al. Am J Surg Pathol. 1997; 21(4):392-8. Akram and al. Clin Gastroenterol Hepatol. 2007; 5(5):589-96