A B S T R A C T S Résumés de la littérature Insuffisance mitrale asymptomatique : la quantification échocardiographique de la régurgitation est un facteur prédictif de l’évolution O Point du sujet. L’évolution clinique des insuffisances mitrales (IM) asymptomatiques est mal connue et leur traitement n’est pas codifié. But. L’objectif de cette étude a été d’apprécier la relation entre la quantification de l’IM, selon les recommandations de l’American Society of Echocardiography, et le pronostic. Patients et méthodes. L’étude a porté sur 456 patients ayant une IM pure et isolée, organique, holosystolique, au moins modérée, et asymptomatique. L’IM était en rapport avec un prolapsus mitral dans 80 % des cas. La quantification de l’IM était fondée sur le calcul de la surface de l’orifice régurgitant (SOR) et du volume régurgitant. Résultats. La survie à 5 ans chez les patients traités médicalement était de 91 ± 3 % en cas de SOR < 20 mm2, de 66 ± 6 % en cas de SOR comprise entre 20 et 39 mm2, et de 58 ± 9 % en cas de SOR ≥ 40 mm2 (p < 0,01). Les patients ayant une SOR ≥ 40 mm2 avaient une survie à 5 ans inférieure à celle attendue dans la population générale (58 ± 9 % versus 78 % ; p = 0,03). La mortalité cardiaque à 5 ans était de 3 ± 2 % en cas de SOR < 20 mm2, de 20 ± 6 % en cas de SOR comprise entre 20 et 39 mm2, et de 36 ± 9 % en cas de SOR ≥ 40 mm2 (p < 0,01). La survenue d’événements cardiaques à 5 ans (décès de cause cardiaque, insuffisance cardiaque ou apparition d’une fibrillation atriale) était de 15 ± 4 % en cas de SOR < 20 mm2, de 40 ± 7 % en cas de SOR comprise entre 20 et 39 mm2, et de 62 ± 8 % en cas de SOR ≥ 40 mm2 (p < 0,01). En analyse multidimensionnelle, les facteurs prédictifs de la survie étaient l’âge, le diabète et la SOR. Le risque de décès était plus élevé chez les patients ayant une SOR ≥ 40 mm2 que chez ceux ayant une SOR < 20 mm2 (rapport de risque à 2,9 ; p < 0,01). Il en était de même pour le risque de décès cardiaque (rapport de risque à 5,2 ; p < 0,01) et d’événements cardiaques (rapport de risque à 5,7 ; p < 0,01). Une intervention chirurgicale mitrale a été pratiquée chez 230 patients, dont 209 ont eu une plastie mitrale. En analyse multidimensionnelle, la chirurgie était associée à une réduction du risque de décès (rapport de risque à 0,28 ; p < 0,01), de la mortalité cardiaque (rapport de risque à 0,31 ; p < 0,01) et du risque d’insuffisance cardiaque (rapport de risque à 0,37 ; p < 0,01), mais à une augmentation du risque de fibrillation atriale (rapport de risque à 5,9 ; p < 0,01). Conclusion. Les patients ayant une IM asymptomatique importante avec une SOR ≥ 40 mm2 ont un risque de décès trois fois plus élevé, un risque de mortalité cardiaque cinq fois plus élevé et un risque d’événements cardiaques six fois plus élevé que ceux ayant une IM modérée. L’intervention chirurgicale améliore la survie, mais augmente le risque de fibrillation atriale. Ces résultats sont un argument important pour envisager la correction chirurgicale des IM asymptomatiques ayant une SOR ≥ 40 mm2, mais cette attitude demande à être validée par une étude clinique prospective randomisée comparant une stratégie chirurgicale précoce à une stratégie conventionnelle, d’autant que la chirurgie majore le risque de fibrillation atriale dans cette étude. Par ailleurs, une chirurgie prophylactique de l’IM chez un patient asymptomatique et sans dysfonction ventriculaire gauche ne se conçoit que si une plastie est réalisable et que le risque opératoire est faible, ainsi que le rappelle l’éditorial de C.M. Otto accompagnant l’article. B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil Quantitative determinants of the outcome of asymptomatic mitral regurgitation. Enriquez-Sarano M, Avierinos JF, Messika-Zeitoun D et al. N Engl J Med 2005;352:875-83. Combinaison de l’échocardiographie transœsophagienne et de la cardioversion transœsophagienne au moyen d’une même sonde : aspects techniques O Point du sujet. La cardioversion de la fibrillation atriale peut être réalisée selon une stratégie conventionnelle ou selon une stratégie guidée par échocardiographie transœsophagienne (ETO), comme l’a montré l’étude ACUTE. La logistique de la cardioversion guidée par ETO est parfois complexe, puisqu’elle peut nécessiter l’intervention de deux équipes différentes (échocardiographistes et rythmologues), et conduit parfois à deux procédures d’anesthésie différentes (l’une pour l’ETO et l’autre pour la cardioversion). La possibilité de cardioversion électrique par voie transœsophagienne, utilisant une électrode 6 œsophagienne et une électrode placée sur la paroi thoracique, a été rapportée il y a plus de 10 ans mais n’a pas connu de développement important en raison de son caractère semi-invasif. But. L’objectif de cette étude a été de rapporter une expérience préliminaire utilisant une sonde d’ETO modifiée permettant la réalisation simultanée de l’ETO et de la cardioversion transœsophagienne. Patients et méthodes. Le matériel utilisé était une sonde d’ETO modifiée par l’adjonction de deux électrodes en titane de 110 mm2, placées à l’extrémité distale de la sonde près du capteur ultraLa Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 A sonore, connectées entre elles, et reliées à un câble de connexion enroulé autour du corps de la sonde d’ETO et pouvant être adapté à un défibrillateur standard. L’autre électrode de défibrillation était placée sur la paroi antérieure du thorax. Le corps de la sonde d’ETO était recouvert d’un revêtement en caoutchouc siliconé, isolant le câble de connexion et régularisant la surface de la sonde. Une étude de tolérance a été réalisée chez quatre chiens qui ont reçu un choc électrique de 50 à 100 J, et dont l’examen macroscopique et microscopique de l’œsophage n’a montré aucune lésion significative au décours de la procédure. Une étude clinique a ensuite été réalisée chez 26 patients indemnes de pathologie œsophagienne et anticoagulés efficacement, qui ont reçu un choc biphasique transœsophagien de 20 à 50 J. Une ETO a été réalisée juste avant la cardioversion et durant les 5 minutes suivantes. Résultats. Aucun des 26 patients n’avait de thrombus intra-atrial. La cardioversion a été efficace chez 92 % des patients, avec une énergie moyenne de 42 J. Après cardioversion, on notait une augmentation du contraste spontané et une baisse des vitesses de vidange de l’auricule gauche témoignant d’une sidération atriale. Il n’y a eu ni complication œsophagienne, ni élévation de la créatine phosphokinase. B S T R A C T S Conclusion. Le couplage de l’ETO et de la cardioversion au moyen d’une sonde d’ETO modifiée semble une procédure fiable et efficace. Ses avantages potentiels sont multiples : limitation des procédures d’anesthésie, utilisation d’un faible niveau d’énergie limitant le risque de brûlure cutanée et d’élévation de la créatine phosphokinase, possibilité d’analyse de la sidération atriale et de l’hémodynamique au décours immédiat de la cardioversion. L’avenir pourrait être à l’utilisation d’une housse contenant électrodes et câble de connexion dans laquelle serait introduite la sonde d’ETO, ce qui éviterait d’avoir une sonde spécifiquement modifiée pour cette utilisation. Le caractère préliminaire de cette expérience demande à ce que ses conclusions soient confirmées ; la réalisation d’une étude multicentrique est donc souhaitable. B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil Combined transesophageal echocardiography and transesophageal cardioversion probe: technical aspects. Kronzon I, Tunick PA, Scholten MF, Kerber RE, Roelandt JRTC. J Am Soc Echocardiogr 2005;18:213-5. Alcoolisation septale et myectomie : importance des troubles conductifs avant procédures O Cette étude réalisée à la Mayo Clinic analyse l’impact des troubles préalables de la conduction en cas d’indication de procédure de réduction septale (alcoolisation ou myectomie) pour des cardiomyopathies obstructives (gradient > 50 mmHg au repos ou sous provocation) symptomatiques et réfractaires au traitement médical. De 1999 à 2003, sur 58 patients ayant eu une alcoolisation septale, 21 (36 %) ont développé un bloc de branche droit (BBD) après l’alcoolisation (aucun patient n’a constitué de bloc de branche gauche [BBG]). Six patients (12 %) ont dû être appareillés, avec mise en place d’un pacemaker permanentpour bloc complet : trois de ces patients avaient un BBG avant l’alcoolisation. La présence d’un BBG avant l’alcoolisation représente le seul facteur indépendant prédictif de recours au pace-maker permanent pour bloc complet dans les suites de la procédure. Parmi les 117 patients opérés (myectomie septale), 47 (40 %) ont développé un BBG postopératoire. Aucun n’a présenté un BBD après la myectomie. Quatre d’entre eux (3 %) ont dû être appareillés pour bloc complet : trois de ces patients avaient un BBD avant la chirurgie ; et, parmi les cinq patients présentant un BBD avant la chirurgie, trois ont nécessité la mise en place d’un pacemaker permanent. Conclusion. Les troubles de la conduction font partie des complications reconnues après une intervention de réduction septale. La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 L’alcoolisation septale et la myectomie concernent des territoires anatomiques septaux différents, ce qui explique que les voies de conduction à risque soient différentes selon que l’on choisisse l’alcoolisation (tissu septal adjacent de la branche droite) ou la myectomie (tissu septal adjacent de la branche gauche). Ainsi, les sujets porteurs d’un BBG sont à plus haut risque de bloc complet après alcoolisation ; à l’inverse, ce sont les sujets porteurs d’un BBD qui sont plus concernés par cette complication en cas de myectomie. La présence d’un bloc de branche sur l’électrocardiogramme de base peut aider à identifier les sujets à risque avant d’intervenir, et guider le choix de la procédure pour éviter au mieux la pose d’un pacemaker permanent pour bloc complet après la réduction septale. À noter par ailleurs qu’il est recommandé d’effectuer un monitoring ECG pendant au moins 72 heures après une procédure de réduction septale. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Alcohol septal ablation versus surgical septal myectomy. Comparison of effects on atrioventricular conduction tissue. Taljera DR, Nishimura RA, Edwards WD et al. J Am Coll Cardiol 2004;44:2329-32. 7 A B S T R A C T S Perméabilité à long terme des pontages aorto-coronaires par greffons veineux saphènes ou par artère mammaire interne gauche O Le VA Cooperative Studies Trial s’est intéressé au devenir à long terme des pontages aorto-coronaires (PAC). Ce travail a recueilli les données concernant la perméabilité à 10 ans de greffons veineux saphènes (1 074 patients) et de pontages réalisés en utilisant l’artère mammaire interne gauche (457 patients). Les interventions de PAC ont eu lieu entre juillet 1983 et septembre 1988. Cinq cent vingt-trois patients sont décédés avant l’opacification des greffons à 10 ans. À 10 ans, le taux de perméabilité est de 61 % pour les pontages veineux et de 85 % pour les pontages mammaires (p < 0,001). En cas de perméabilité affirmée à 7 jours de l’intervention, les greffons ont respectivement 68 % et 88 % de chance d’être toujours perméables à 10 ans. Pour les greffons veineux, la perméabilité à 10 ans est meilleure quand l’artère pontée est l’interventriculaire antérieure (IVA) : 69 % (p < 0,001), contre 56 % pour la coronaire droite et 58 % pour le réseau circonflexe. Les pontages mammaires-IVA ont une perméabilité à 10 ans de 85 %. Le diamètre du vaisseau ponté est également un critère important : s’il est supérieur à 2 mm, la perméabilité des pontages veineux à 10 ans atteint 88 %, contre 55 % en cas de diamètre inférieur (p < 0,001). Les autres facteurs qui interviennent dans la perméabilité au long cours des greffons sont la prise d’aspirine, l’âge, le taux de cholestérol sanguin et la classe fonctionnelle. Conclusion. Les résultats de cette étude concernent de fait des patients pontés lors des années 1980, période où l’utilisation du matériel veineux était plus habituelle et où la réalisation de PAC en “tout artériel” n’existait pas. Ils ont le mérite de réactualiser des données concernant les patients opérés à cette période et que nous sommes amenés à surveiller cardiologiquement. Comme on pouvait s’y attendre, la perméabilité des pontages réalisés avec l’artère mammaire interne gauche est meilleure à 10 ans que celle des pontages veineux saphènes. Cependant, la différence entre ces deux modalités d’intervention apparaît moins importante que celle qui était classiquement reconnue (40 % à 50 % pour les pontages veineux, et 90 % à 95 % pour les pontages mammaires internes gauches). La localisation du pontage sur l’IVA et une artère coronaire pontée de bon calibre (> 2 mm) sont des facteurs de meilleure perméabilité des pontages veineux à 10 ans. Par ailleurs, ces résultats confirment l’intérêt d’une prescription d’aspirine au long cours, ainsi que l’importance du contrôle des dyslipidémies. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Long-term patency of saphenous vein and left internal mammary artery grafts after coronary artery bypass surgery. Results from a department of Veterans Affairs Cooperative Study. Goldman S, Zadina K, Moritz T et al., for the VA Cooperative Study Group J Am Coll Cardiol 2004;44:2149-56. Atacand bandeau, p. 8