REVUE DE PRESSE dirigée par le Dr N. Baubion Diabète et risque d’insuffisance cardiaque : regarder au fond des yeux ! La rétinopathie diabétique (RD) est la complication microvasculaire du diabète la plus commune et la plus spécifique. Le but de cette étude prospective était d’examiner l’association entre la RD et la survenue d’une insuffisance cardiaque (IC). La population étudiée regroupait 1 021 patients souffrant d’un diabète de type 2, indemnes d’IC à l’inclusion, sans insuffisance rénale ni coronaropathie clinique. Le diagnostic d’IC était retenu à partir de comptes rendus d’hospitalisation ou de certificats de décès mentionnant l’IC en tant que cause première ou secondaire de la mort. Cent vingt-cinq patients (13 %) étaient porteurs d’une RD. Après un suivi de 9 ans, 106 cas d’IC (10 %) ont été répertoriés. La mortalité en présence d’une IC a été de 34 %. Les patients ayant une RD étaient plus souvent concernés, avec une incidence cumulée d’IC de 21,6 %, contre 8,5 % en l’absence de rétinopathie. Après prise en compte des différents facteurs de risque (âge, sexe, race, tabagisme, durée du diabète, insulinothérapie, pression artérielle, profil lipidique, etc.), la RD restait un facteur prédictif, multipliant le risque d’apparition d’une IC par un facteur supérieur à 2,5. Cette constatation demeurait après des ajustements tenant compte du contrôle glycémique, de l’athérosclérose carotide et des marqueurs biologiques de la dysfonction endothéliale. Commentaire Pour cette cohorte de patients diabétiques sans cardiopathie clinique ni insuffisance rénale, l’étude ARIC a mis en évidence une association entre RD et IC. La présence d’une RD représente un facteur prédictif de survenue d’IC, indépendamment des autres facteurs de risque. Ces résultats confortent l’hypothèse d’une contribution de la pathologie microvasculaire au développement de l’IC chez le patient diabétique. Une analyse de routine du fond d’œil est donc indispensable pour surveiller les patients diabétiques et pour évaluer leur pronostic cardiaque. La présence d’une RD, pouvant permettre la détection d’une dysfonction infraclinique ventriculaire gauche, inciterait à un suivi cardiologique attentif, et peut-être à l’indication plus précoce et plus large de traitements médicaux (bêtabloquants, inhibiteurs de l’enzyme de conversion) pour prévenir l’évolution vers l’IC clinique. Référence bibliographique Cheung N, Wang JJ, Rogers SL et al, for the ARIC (Atherosclerosis Risk In Communities) study investigators. Diabetic retinopathy and risk of heart failure. J Am Coll Cardiol 2008; 51:1573-8. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Pronostic des artériopathies périphériques : plus sévère que celui des coronaropathies ? Cette étude a comparé le devenir de patients opérés pour une artériopathie périphérique à celui de patients adressés pour une procédure d’angioplastie coronaire pour ischémie myocardique documentée, sans artériopathie périphérique connue. De janvier 1993 à juin 2006, 2 730 patients ont eu une intervention vasculaire : endartériectomie carotide (560 patients), chirurgie d’anévrysme de l’aorte abdominale (intervention programmée pour 923 patients, et réalisée en urgence pour 200) Commentaire ou revascularisation des membres inférieurs (1 047 patients). Ces patients ont été comparés à 2 730 patients coronariens dilatés appariés pour les facteurs de risque. Le critère principal Le pronostic à long terme des patients opérés d’une artériopathie périphérique est plus péjoratif de jugement était la mortalité à long terme au-delà des 30 premiers jours (suivi moyen de que celui de patients coronariens comparables 6,37 ans pour les artériopathies périphériques et de 9,17 ans pour les coronaropathies). en termes de facteurs de risque et ayant eu une En second lieu, la mortalité périopératoire (30 premiers jours) et les événements non fatals angioplastie coronaire. ont été analysés. La mortalité est en majorité reliée à des événements cérébro-cardiovasculaires (76 % des cas en Les patients artéritiques ont eu une évolution plus négative à long terme que les périopératoire et 46 % des cas à long terme). patients coronariens (hazard-ratio : 2,40). Le taux de mortalité annuelle a été respectiveCe pronostic plus péjoratif en cas d’artériopathie ment de 5,7 % et de 3 % (p < 0,001). En ce qui concerne les critères de jugement seconpériphérique opérée est sans doute la conséquence daires, 153 patients (5,6 %) sont décédés lors des 30 jours postopératoires, en majorité d’une attitude thérapeutique non optimale, ce de complications cérébro-cardiovasculaires (76 %). Par la suite, 1 353 autres patients du que semble indiquer l’insuffisance des traitements médicamenteux prescrits (bêtabloquants, groupe artériopathie périphérique (52,5 %) sont décédés au terme du suivi de 6,37 ans en antiagrégants, statines, inhibiteurs de l’enzyme moyenne. Les infarctus du myocarde étaient responsables de près de 20 % de la mortalité de conversion). à long terme des patients artéritiques. Ces résultats incitent à une prise en charge plus Lorsque l’on compare les traitements suivis par les patients, on constate que les performante des patients présentant une artériopathie périphérique. patients opérés pour artériopathie périphérique ont consommé moins de médicaments que les patients coronariens (bêtabloquants : 34 % contre 74 % ; aspirine : Référence bibliographique 40 % contre 88 % ; statines : 29 % contre 67 % ; inhibiteurs de l’enzyme de converWelten GM, Schouten O, Hoeks SE et al. Long-term prognosion : 31 % contre 57 %, etc.). sis of patients with peripheral arterial disease: a comparison in patients with coronary artery disease. J Am Coll Cardiol 2008;51:1588-96. 6 | La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil