Progrès en Urologie (1999), 9, 21-24 Rôle de l’informatique et du PMSI dans la gestion de l’infection nosocomiale Tristan DIDIERJEAN Clinique de Courlancy, Reims RESUME Actuellement un certain nombre de structures sont chargées dans les établissements publics comme privés de lutter contre les infections nosocomiales. C’est le cas des CLIN (Comités de lutte contre les infections nosocomiales). Le CLIN dispose à l’échelon national d’un outil informatique de traitement de l’information Epi-Info qui malgré ses qualités fonctionne encore sous DOS et ne dispose pas d’une ergonomie suffisamment attractive pour être utilisé spontanément par les différents acteurs de la lutte contre les infections nosocomiales.. Une plus grande convivialité dans la présentation permettrait sans doute de lui donner l’écho que ses possibilités sont en droit de mériter. Le P.M.S.I. ou programme de médicalisation des systèmes d’information est quant à lui un outil exploité depuis déjà quelques années, il présente l’intérêt de pouvoir drainer des données relatives aux pathologies observées dans les différentes structures hospitalières Cet outil a ses limites en ce sens que bien évidemment sa vocation première est une vocation à caractère économique et que donc les informations qui sont recueillies sont naturellement dévoyées par ce regard. En urologie le P.MSI au travers des outils qu’il utilise c’est à dire des thésaurus qu’il s’agisse de la CIM ou du CDAM sur lesquels nous reviendrons plus tard, permet sans doute de décrire la plupart des infections urologiques usuelles ainsi que de préciser la nature de ces infections mais ces précisions n’atteignent pas les exigences bactériologiques que nécessite une relation précise et fidèle des infections nosocomiales Un bon outil d’information relatif à l’exploitation de ce qui concerne les infections nosocomiales doit passer par les étapes obligées que sont : • L’information et la formation à la saisie des données • L’organisation de contrôles de qualité de ces données à l’échelle de l’établissement d’abord mais aussi au plan régional ou national. • L’utilisation d’outils modernes c’est à dire simples et à l’ergonomie aboutie, outils qui dans l’idéal devraient pouvoir importer des données déjà renseignées par d’autres biais (P.M.S.I., CLIN…) • Enfin assurer à cet outil la spécificité que méritent les problèmes liés aux infections nosocomiales , ainsi que le standard qu’impliquent des comparaisons cohérentes. INTRODUCTION portant sur des établissements d’une même région voire d’un pays tout entier. L’avènement de nouveaux outils de traitement de l’information autorise une nouvelle exploitation de données pouvant être à l’origine de développements épidémiologiques, l’informatique autorise un traitement massif de ces données Il peut donc être envisagé non seulement de recueillir l’ensemble des éléments nécessaires à leur exploitation épidémiologique au niveau d’un établissement privé ou public quel que soit sa taille, mais aussi et plus encore d’établir des recherches Cependant en pratique, pour que cette espérance puisse se concrétiser, il sera nécessaire de disposer d’un outil standard ayant les mêmes spécifications de façon à assurer une cohésion dans le pool d’informations recueillies pour une exploitation ultérieure. Cette standardisation est un point incontournable pour assurer un recueil intelligent, pertinent et surtout exploitable de tous les facteurs enregistrés. 21 OBJECTIFS ET MOYENS nomique et que donc les informat ions qui sont recueillies sont naturellement dévoyées par ce regard. En premier lieu une exploitation épidémiologique, c’est le premier des objectifs à assigner aux outils crées à cette intention. Pour cela il est essentiel de sérier la nature des éléments qui devront être enregistrés, qu’il s’agisse de la nature même des germes rencontrés ou encore d’éléments permettant de s’assurer de la nature nosocomiale des infections qui sont renseignées .Cette exploitation épidémiologique aura aussi pour fonction de savoir s’il s’agit d’une infection connue et facilement traitable ou si cette dernière est liée à un germe particulièrement virulent ou résistant aux antibiotiques. En urologie le P.MSI au travers des outils qu’il utilise c’est à dire des thésaurus qu’il s’agisse de la CIM ou du CDAM sur lesquels nous reviendrons plus tard, permet sans doute de décrire la plupart des infections urologiques usuelles ainsi que de préciser la nature de ces infections mais ces précisions n’atteignent pas les exigences bactériologiques que nécessite une relation précise et fidèle des infections nosocomiales LE CLIN Des indicateurs tels que la durée anormale d’une élévation de température, une septicémie dont le germe aura pu être identifié comme ayant un caractère de rareté, la nature même des résultats de l’antibiogramme liés à ce germe, enfin la fréquence anormale d’infections au sein d’un service ou d’un établissement, doivent pouvoir être consignés Nul n’ignore ce que sont les infections nosocomiales, cependant ce terme générique regroupe des situations naturellement différentes. L’infection nosocomiale est une infection qui se développe dans une structure hospitalière. On considère qu’une infection est hospitalière lorsqu’elle survient au minimum deux jours après l’entrée du patient dans l’établissement. Pour faire en sorte que ces données soient cohérentes, il est indispensable de mettre en œuvre un standard de saisie, ce standard implique une formation ainsi qu’une sensibilisation des personnels à l’écriture des données au sein des logiciels qui sont mis à leur disposition. Le choix de ce personnel est un point stratégique incontournable, le personnel le mieux adapté devrait être un personnel médical ou paramédical. Par ailleurs il est important de faire une distinction au sein de ces infections nosocomiales. Il y a celles liées à une infection qui survient dans un contexte hospitalier mais secondaire à un germe connu dont le traitement est parfaitement maîtrisé et qui ont un spectre de réponse antibiotique tout à fait classique. L’autre type d’infection nosocomial plus dangereux est lié à une infection à germes résistants. SITUATION ACTUELLE Les germes multi-résistants sont ceux qui sont le plus à craindre car généralement impliqués dans de lourdes morbidités et à l’origine de véritables déconvenues thérapeutiques. Actuellement un certain nombre de structures sont chargées dans les établissements publics comme privés de lutter contre les infections nosocomiales. Les comités de lutte contre les infections nosocomiales ont donc le rôle essentiel de dépister les germes responsables d’infections au sein de l’hôpital, celui de dépister les germes multi-résistants, de mettre en œuvre les moyens nécessaires à la lutte contre ces infections comme la mise au point de nouveaux protocoles de désinfection (la plus élémentaire mais aussi la plus essentielle consistant à se laver systématiquement les mains lorsque l’on prodigue des soins à un nouveau malade). C’est le cas des CLIN (Comités de Lutte contre les Infections Nosocomiales). Le CLIN dispose à l’échelon national d’un outil informatique de traitement de l’information Epi-Info qui malgré ses qualités fonctionne encore sous DOS et ne dispose pas d’une ergonomie suffisamment attractive pour être utilisé spontanément par les différents acteurs de la lutte contre les infections nosocomiales.. Une plus grande convivialité dans la présentation permettrait sans doute de lui donner l’écho que ses possibilités sont en droit de mériter. Ils doivent aussi veiller à la création des circuits d’information qui font que la découverte d’une nouvelle infection nosocomiale ( staphylocoques dorés … résistant à la méthicilline) soit connue de tous aussi bien dans le service où il fut découvert qu’au sein de l’établissement tout entier. Le P.M.S.I. ou programme de médicalisation des systèmes d’information est quant à lui un outil exploité depuis déjà quelques années, il présente l’intérêt de pouvoir drainer des données relatives aux pathologies observées dans les différentes structures hospitalières. L’information reste l’un des meilleurs garants de la prévention. Cet outil a ses limites en ce sens que bien évidemment sa vocation première est une vocation à caractère éco- 22 LE PMSI du séjour hospitalier va donc être déterminé après que le RUM ait été réparti dans l’un des 500 GHM Ces groupes ont une répartition qui bien qu’ayant un point de départ clinique relèvent de considérations économiques et leur exploitation doit impérativement tenir compte de leur finalité première. Le Programme de médicalisation des systèmes d’information est un projet à vocation économique qui s’appuie sur le recueil des pathologies et des actes concernant les patients hospitalisés ainsi que sur celui des actes pratiqués chez ces derniers. Le but de cette médicalisation est d’évaluer le coût lié à l’hospitalisation des patients au sein des établissements hospitaliers. INFECTIONS NOSOCOMIALES EN UROLOGIE Du fait même du caractère économique de ce programme les données recueillies sont dévoyées et ne peuvent que difficilement faire l’objet d’exploitations épidémiologiques. Pour ce qui est des infections nosocomiales le PMSI dispose de ce qui est développé essentiellement au sein de la CIM. En effet, le chapitre 1 est consacré à l’ensemble des infections. On peut y retrouver les germes classiques, les infections connues : Staphylocoques dorés, E.Coli, candidoses et… Mais bien que leur description soit relativement précise la détermination des espèces bactériennes au sens scientifique c’est à dire bactériologique du terme n’y est pas vraiment reflété. A fortiori il semble encore plus difficile de pouvoir en extrapoler des conduites thérapeutiques ou préventives. Cependant l’outil est là et est déjà suffisamment riche de possibilités pour que l’on cherche à mieux l’exploiter. Par ailleurs un chapitre entier est consacré aux affections urologiques Cependant si ce chapitre est suffisamment exhaustif pour une classification économique, il ne pourra probablement pas satisfaire le regard du spécialiste. Parmi ces codes un nombre encore trop important (Terminés en .8) font référence à des pathologies non classées ailleurs et constituent un fourre-tout impropre à satisfaire la rigueur scientifique nécessaire à une exploitation statistique des données. PMSI RAPPEL Le P.MSI dérive d’un projet dont les premières pierres furent posées il y a quelques années aux états unis. En France ce programme s’appuie sur les outils nécessaires à la classification des pathologies, ainsi que ceux indispensables pour évaluer l’activité thérapeutique réalisée au sein des Hôpitaux.. La CIM (Classification Internationale des maladies) et le CDAM (catalogue des actes médicaux) en sont les pierres angulaires. Le résumé d’unité médicale sorte de micro synthèse de l’hospitalisation du patient au travers du diagnostic principal (codé en CIM10) des diagnostics associés (comorbidités codées également en CIM10) et des actes (CDAM) conduit au travers d’une moulinette à la détermination d’un GHM ou Groupe homogène de malades auquel est affecté un poids économique sous la forme d’un pool de points ISA. [il y a actuellement plus de 500 GHM répartis eux-mêmes en 24 CMD (catégories majeures de diagnostics)]. Pour ce qui est du CDAM, si la plupart des actes pratiqués en urologie y sont précisés, ces actes ne sont répertoriés que dans le domaine de l’urologie interventionelle. Pour les moyens thérapeutiques médicaux, cette classification pêche par ses insuffisances. FAIBLESSES DU PMSI DANS LA LUTTE CONTRE LES INFECTIONS NOSOCOMIALES Les faiblesses de l’outil que constitue le P.MSI. découlent directement de ce que l’on vient de voir: La CIM 10 est composée de 21 Chapitres, les codes utilisés font référence au travers d’une lettre à un secteur couvrant une spécialité et les différentes pathologies relatives à cette spécialité sont représentées par 3 chiffres qui sont plus liés aux pathologies évoquées. • D’abord la CIM ne présente pas de codes qui réponde à une identification scientifique au sens bactériologique des germes responsables d’infections. • Il n’y a pas non plus de codes témoignant des résistances particulières de ces germes aux infections Parallèlement à la CIM dans laquelle il existe un chapitre entier relatif aux infections ainsi qu’un chapitre se rapportant aux problèmes urologiques le CDAM ou catalogue des actes médicaux en est un peu le contrepoint sur le plan des conduites thérapeutiques . Le point ISA (Index synthétique d’activité) déterminé par le GHM est une sorte de monnaie dont la valeur varie selon les régions, il est calculé en se référant à des études faisant appel à la comptabilité analytique d’un certain nombre d’établissements précurseurs. Le coût • Le catalogue des actes médicaux ne permet pas d’assurer un codage précis des prescriptions médicales survenant au moment de l’hospitalisation des patients • Enfin pour que les données puissent être exploitées, il serait impératif de commencer par sensibiliser les personnes participant à l’enregistrement des résumés médicaux à l’importance d’épisodes infectieux qui naturellement passent au second plan des coûts 23 lorsque le patient hospitalisé a subi (par exemple) une intervention chirurgicale importante.. • L’utilisation d’outils modernes c’est à dire simples et à l’ergonomie aboutie, outi ls qui dans l’idéal devraient pouvoir importer des données déjà renseignées par d’autres biais (P.M.S.I., CLIN…) Les moyens nécessaires à la réalisation d’un outil performant se doivent donc d’éviter les carences précédemment décrites et tout particulièrement celles du P.M.S.I: • Enfin assurer à cet outil la spécificité que méritent les problèmes liés aux infections nosocomiales , ainsi que le standard qu’impliquent des comparaisons cohérentes. • Il faudra bien entendu disposer de systèmes de codage qui rendent compte avec précision de la nature bactériologique des germes responsables d’infections nosocomiales REFERENCES • Il devra par ailleurs permettre de rendre compte des particularités de ces germes quant à leur résistance aux antibiotiques 1. BAUD R, LOVIS C, RASSINOUX AM, SCHERRE JR : Tendances en traitement du langage naturel. In : Informatique et Santé. Paris, Springer-Verlag 1996, P111-119 • Il est aussi nécessaire que l’on retrouve la trace des antibiotiques prescrits et que l’on ait des indicateurs de leur efficacité thérapeutique 2. FAUD RH, LOVIS C, ALPAY L, RASSINOUS AM, SCHERRRER JR, NOWLAN A, RECTOR A : Modelling for natural language understanding. In : Safran C (ed) Proceedings SCAMC, 1993. New York : Mac GrawHill, 1993, 289-293 • Enfin et c’est sans doute le point le plus important il est impératif de sensibiliser les différents acteurs du traitement des patients au caractère incontournable de la saisie des informations relatives à ces infections hospitalières. 3. BOUCHER C, EMPEREUR F, KOHLER R : Eluating a computerized tool for coding patient information. JAMIA 1998, Symposium supplément 185-189 4. CIMINO JJ, CLAYTON PD, HRIPCSAK G, JOHNSON SB : Knowledge-based approaches to the maintenance of a large controlled medical terminology. J Am Med Informatics. Assoc 1994, l (l) 35-50 LES STRATÉGIES POSSIBLES POUR METTRE AU POINT UN TEL OUTIL NE SONT PAS EXCLUSIVES LES UNES DES AUTRES 5. CIMINO JJ : Coding systems in health care Meth Inform Med, 1996, 35, 273-284 6. Classification Statistique internationale des Maladies et des problèmes de santé connexes . Dixième révision. Volume 1 à 3. Organisation Mondiale de la Santé (OMS) Genève 1993 • Améliorer les outils existants pour les rendre performants • Pour ce qui est du P.M.S.I. envisager la création d’extensions aux codes de la CIM pour rendre compte de résistances aux antibiotiques. Générer d’autre extensions pour rendre l’identification des germes plus précise. 7. DEGOULET P, FIESCHI M Informatique Médicale. Masson, Paris 1996 8. DELAMARRE D, BURGUN A, SEKA LP, LE BEUX A Automated coding of patient discharge summaries using conceptual graphs. Meth Inform Med 1995, 34, 345-351 • Enrichir le CDAM de codes de prescriptions antibiotiques. 9. Extension de la CIM 10 pour la version 5 de la fonction groupage. Perans, Octobre 1997 • Améliorer les outils déjà existant et utilisés par les CLIN pour que leur ergonomie devienne intuitive et que leur prise en main permette d’en exploiter pleinement la richesse. 10. KOHLER F, MAYEUX D, LOMBRAIL P, MUSSE JP Apport de l’informatique pour l’aide au codage de l’information médicale dans le cadre du PMSI. Gestions Hospital 1990, 29 9, 662-666 11. LANDAIS P, JAIS JP, FRUTIGER P Sémantique des classifications et nomenclatures. In : Informatique et Santé. SpringerVerlag 1989, 211-22 • Créer des ponts entre les informations recueillies par différents outils pour faire en sorte que ces dernières soient totalement exhaustives. 12. MC CRAY AT, NELSON SI : The representation of meaning in the UMLS. Meth Infom Med 1995, 34, 193-201 CONCLUSION 13. MEDICAL SUBJECT HEADINGS SECTION OF THE NATIONAL LIBRARY OF MEDICINE National Technical Information Service Springfield Virginia, 1988 Un bon outil d’information relatif à l’exploitation de ce qui concerne les infections nosocomiales doit passer par les étapes obligées que sont : 14. PAVILLON G, MAGUIN P : La dixième revision de la classification internationale des maladies. Rev Epidem et Santé Publ 1993, 41 : 253-255 • L’information et la formation à la saisie des données 15. SAGER N, LYMAN M ? NBAN NT, TICKL : Medical language processing : applications in patient data representation and automatic encodin. Meth Inform Med 1995 : 3, 104-146 • L’organisation de contrôles de qualité de ces données à l’échelle de l’établissement d’abord mais aussi au plan régional ou national. 16. SPYNS P Natural language processing in medicine : an overview Meth Inform Med 1996, 35, 285-301 24