Classe de 1ère S 1 Une petite histoire de l’électricité 1 – De la nature de l’électricité aux grandeurs électriques L’électricité est un mouvement de particules chargées : des électrons dans les métaux des fils électriques, des ions dans les solutions électrolytiques. Ces particules chargées sont mises en mouvement sous l’action d’une différence de potentiel (ou d.d.p. exprimée en volts), un peu comme de l’eau tombe d’une chute (on parle dans ce cas, en mécanique, d’une variation d’énergie potentielle de pesanteur). Exemple : la formation de l’éclair et du tonnerre. Lors d’un orage, les mouvements de masses d’air entraînent des phénomènes d’électrisation qui peuvent conduire à la modification de l’état électrique des protagonistes. Cet état électrique est défini en tout point par ce qu’on appelle son potentiel électrique V. En particulier, le sol et les nuages peuvent ne pas être dans le même état électrique, c’est-à-dire avoir la même valeur de potentiel V : on dit dans ce cas qu’il existe une différence de potentiel ou tension entre le sol et les nuages. Cette d.d.p. est évaluée en volts (symbole : V) à l’aide, par exemple, d’un voltmètre. Nuage : potentiel Vnuage Tension ou ddp Usol-nuage = Vsol – Vnuage Sol : potentiel Vsol Lorsque cette différence de potentiel devient suffisante (champ voisin de 15 000 V par mètre), l’air devient conducteur d’électricité et un éclair se forme : il va permettre de rétablir l’équilibre électrique entre le sol et les nuages par transfert d’électrons (ou courant électrique). Cet éclair est visible car la décharge électrique surchauffe les gaz sur son passage (jusqu’à 30 000°C) et les ionise : l’ionisation des gaz provoque l’émission lumineuse dont la couleur dépend fortement de l’humidité de l’air ambiant (blanc par air sec, rouge par air humide, bleu par temps de grêle). Le tonnerre entendu est en fait une onde acoustique résultant de la brusque dilatation de l’air surchauffé par l’arc électrique. Au laboratoire ou à la maison, où l’on a besoin d’électricité continue (piles par exemple), la différence de potentiel est assurée par un générateur, dont le rôle est de mettre les particules chargées en mouvement en maintenant ses deux bornes (borne + et borne –) à des potentiels électriques différents : l’un des potentiels est supérieur à l’autre, comme le haut de la chute d’eau est à altitude plus élevée que le bas. La borne de potentiel supérieur est indiquée (+), l’autre est indiquée (–). En fait, la borne (+) présente un excès de charges (+) par rapport à la borne (–), et si les deux bornes sont reliées par un conducteur électrique (fil, circuit électrique, solution électrolytique), les particules chargées vont circuler entre les deux bornes afin d’essayer de rétablir l’équilibre entre les bornes (+) et (–). Par convention, le potentiel électrique de la Terre est nul ; il sert de référence pour déterminer le potentiel, positif ou négatif, des autres points. Conséquence : on ne connaît pas le potentiel électrique d’un point ; on a seulement accès à la différence de potentiel entre ce point et un autre. On parle aussi de la tension entre deux points. Quelques tensions courantes : Orage : 100 millions de volts (0,1 GV ou 100 MV) Expériences d’électrostatique : 400 000 volts (400 kV) Tension de secteur EDF : 230 V Batteries de véhicules légers : 12 V 2 Piles : 1,5 V Electronique : quelques millivolts (mV) Pour la suite, nous considérerons la conduction dans le métal, à l’aide d’électrons. Lorsque le conducteur métallique est soumis à une différence de potentiel, ses électrons se mettent en mouvement et forment un courant électrique ; ce mouvement se caractérise par un flux d’électrons appelé intensité du courant électrique, notée I et définie par dq I dt où dq représente la charge électrique (en coulombs C) qui traverse la section unité du conducteur pendant la durée dt (en secondes s). L’intensité I s’exprime en ampères (A), unité équivalente au C.s-1. C’est un peu comme le débit de la chute d’eau (même si cette analogie soulève quelques problèmes) : l’intensité est une mesure du débit de charges électriques dans le circuit. 2 – De la mesure des grandeurs électriques Compte tenu de sa définition, la tension UAB = VA – VB entre les points A et B se mesure à l’aide d’un voltmètre qui se place en dérivation sur la portion AB de circuit à analyser : on mesure la différence de potentiel entre les deux points ou bornes considérées. En revanche, l’intensité I du courant électrique se mesure à l’aide d’un ampèremètre qui se place en série au point du circuit à analyser : pour compter les électrons, et en déduire la charge qui traverse la section de circuit à chaque seconde. Sur les schémas, les représentations sont les suivantes. A B I UAB = VA – VB Par convention, l’intensité I se déplace en sens inverse des électrons dans le circuit : ces derniers se déplaçant de la borne – du générateur vers sa borne + (à l’extérieur du générateur), le sens du courant est indiqué de la borne + du générateur vers sa borne – à l’extérieur du générateur. L’intensité I du courant est une grandeur algébrique : elle peut être positive ou négative ; dans ce dernier cas, cela signifie que le sens réel du courant est inversé. Si l’indication de l’ampèremètre est + COM négative, cela signifie que l’intensité I A circule dans le sens inverse de celui indiqué sur le schéma. La ddp indiquée pointe sur le point dont le potentiel est le premier : on mesure ici VA – VB = UAB car la flèche pointe sur A. Tout comme l’intensité I, la tension UAB est une grandeur algébrique. De manière habituelle, cependant, on se débrouille pour qu’elle soit positive, en respectant les conventions suivantes. Le sens réel du courant étant tout d’abord établi (soit I > 0, donc) ; il existe alors deux conventions, En convention récepteur, aux bornes d’un appareil récepteur (exemple : conducteur ohmique), la tension UAB est positive si elle est en sens opposé à l’intensité A B I récepteur UAB > 0 Justification : le récepteur reçoit des électrons sur sa borne B, dont le potentiel est donc plus fait que celui de la borne A. Ainsi, UAB = VA–VB > 0. 3 En convention générateur, aux bornes d’un appareil générateur, la tension UAB est positive si elle est dans le même sens que l’intensité A B I générateur UAB > 0 Justification : d’après le sens de I, on en déduit que B est la borne + du générateur alors que A est la borne – : par conséquent, VA < VB et UAB = VA – VB < 0 ; c’est bien UBA qui est positive. 3 – Interprétations énergétiques En TP, nous avons amorcé la réflexion en traçant les caractéristiques de différents dipôles. Ces courbes donnant la tension à leurs bornes en fonction de l’intensité du courant qui les traverse permet de décrire tous les points de fonctionnement possibles des dipôles en régime continu (on parle de caractéristique statique). L’expérience conduit à considérer deux types de composants, les générateurs et les récepteurs, selon le rôle qu’ils remplissent dans les applications courantes. Dans ces deux cas, les caractéristiques ont une attitude similaire d’un dipôle à l’autre. U U 0 I Caractéristique d’un générateur C’est une droite affine décroissante en convention générateur 0 I Caractéristique d’un récepteur C’est une droite affine croissante en convention récepteur Vers une première interprétation de ces caractéristiques Un générateur est limité dans la puissance qu’il peut fournir : c’est pourquoi lorsque l’intensité I augmente, la tension U diminue. Il vient même un moment où le générateur peut se « mettre à genou » : la tension finit par s’effondrer et s’annuler pour une intensité limite. Un récepteur peut a priori recevoir une puissance de plus en plus grande, puisque U = f(I) est croissante ; cependant, cette droite trouve une limite pour laquelle nous sortons du fonctionnement linéaire du composant et nous entrons dans un domaine critique dans lequel l’intégrité du récepteur est mise en jeu. Modélisation des caractéristiques L’équation des caractéristiques obtenues U = f(I) peut se mettre sous la forme U = E – rI pour un générateur où E représente la force électromotrice (ou f.é.m.), exprimée en volts, et r la résistance interne (en ) du générateur, qui sont respectivement l’ordonnée à l’origine et l’opposé de la pente de la droite obtenue. U = E’ + r’I pour un récepteur où E’ représente la force contre-électromotrice (ou f.c.é.m.), exprimée en volts, et r’ la résistance interne (en ) du récepteur, qui sont respectivement l’ordonnée à l’origine et la pente de la droite obtenue. Remarque On comprend le sens de la résistance interne d’un composant : inéluctable, elle explique la dissipation inhérente à tout composant, dite par effet Joule, et conduit à l’échauffement du composant. 4 Pour ce qui est de la notion de f.é.m. ou f.c.é.m., c’est moins clair : un générateur joue le rôle de « pompe à électrons » et la tension qui est maintenue entre ses bornes – sans prendre en compte la résistance interne ici - joue donc un rôle électro-moteur. Un récepteur qui n’est pas ohmique pur présente en outre la propriété de s’opposer à la force électromotrice du générateur : par exemple, lorsqu’un moteur tourne, il y a un phénomène magnétique qui développe une différence de potentiel qui tente à s'opposer à la tension d'alimentation ; on l'appelle force contre-électromotrice. On peut maintenant proposer les modèles électrocinétiques suivants. U I U – + I G M U U – I + I – + r’ r E –rI GENERATEUR r’ I E’ RECEPTEUR On vérifie bien, pour le générateur, U = E – rI et pour le récepteur U = E’ + r’I. Remarquer le sens de I dans les deux cas, en accord avec les conventions. Aspects énergétiques Calculons les puissances aux bornes de chaque appareil. Pour le générateur, P = U I = EI – rI² Le terme EI représente la puissance totale fournie par la source énergétique qui alimente le générateur : elle peut être d’origine électrique (secteur), chimique (pile), mécanique (dynamo) … et est bien liée à la force électromotrice E. Le terme rI² représente la puissance dissipée par effet Joule au sein du générateur. P représente la puissance fournie au reste du circuit. En effet, si l’on part de la puissance apportée par la source EI et qu’on y soustrait la puissance dissipée par effet Joule rI², on obtient bien la puissance qu’il reste pour alimenter le circuit auquel est branché le générateur. Pour le récepteur, P = E’ I + r’I² Le terme E’I représente la puissance utilisée par le récepteur pour remplir sa fonction : d’ordre mécanique pour un moteur, d’ordre chimique pour un électrolyseur, etc… Le terme r’I² représente la puissance dissipée par effet Joule dans le récepteur. P représente la puissance totale reçue par le récepteur. En effet, cette puissance se répartit en puissance utilisée effectivement par le récepteur pour une conversion liée à son rôle et une puissance dissipée inévitablement par effet Joule. Remarque : les considérations de puissances sont ici plus simples à mettre en œuvre quel celles d’énergie ; toutefois, rappelons que les mêmes bilans peuvent être établis en terme d’énergies en multipliant chaque puissance par la durée t.