Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de la Technologie -- Université de SFAX – Faculté des sciences économiques et de gestion de Sfax Fascicule ( 1 ) du Cours Principes de gestion Conçu par : Samir TRIGUI Destiné aux étudiants de première année : Sciences économiques, comptables et de gestion. Chapitres 1 ; 2 ; 3 & 4 Chap. I : Les vérités du Management Chap. II : L'entreprise et son environnement Chap. III : Les manœuvres du Manager-décideur Chap. IV : La prise de décision Année universitaire : 20…. / 20… 1 Chap. I Les vérités du Management L'explosion scientifique a ouvert, avec l'accélération du progrès technique, l'ère du monde en mouvement. Dans ce monde en mouvement, l'entreprise reste la cellule vitale du corps social, mais d'un corps de plus en plus complexe, différencié et le plus souvent agité. L'homme, quant à lui, bien que sa puissance soit à l'échelle du cosmos (l'Univers considéré dans son ensemble), reste cette créature fragile qui n'a guère changé depuis des millénaires. Et pourtant, l'un et l'autre pour survivre et jouer leur rôle doivent s'adapter aux transformations qu'ils contribuent, pour une large part, à provoquer dans leur environnement. Ces transformations, dont la cause première est le progrès technique, affectent l'environnement économique, social, politique, culturel ainsi que, par contrecoup, le fonctionnement des entreprises et, plus généralement, de toutes les organisations. Bref, dans l'état de crise économique mondiale où nous sommes, aujourd'hui théoriciens et praticiens essayent de réexaminer les concepts, théories et découvertes scientifiques qui ont été élaborés et conçus pendant des époques de croissance économique. Devant la nature de l'environnement turbulent, actuellement les hommes de sciences se demandent sur la nature, le rôle et l'utilité des concepts gouvernant les activités humaines et planétaires. Basés sur des concepts et des théories, le Management et la gestion, eux non plus, n'ont pas échappé à cette phase rétroactive que les théoriciens révèlent et qui essaient d'en trouver des réponses objectives et convaincantes. 2 1. Définitions Le Management est « l'agencement dynamique des ressources et des énergies, en faisant face intelligemment à l'évolution de l'environnement et ses changements, afin qu'une organisation atteigne son objectif ». Quant à la gestion elle est définie par : « Le processus impliquant simplement la mise en œuvre d'un certain nombre de méthodes et de techniques permettant aux dirigeants de l'organisation de résoudre des problèmes qui leur sont imposés de l'extérieur par l'environnement, sans manifester une autonomie particulière à l'égard de ce même environnement. » D'après ces deux définitions on note la présence de la notion de processus qui veut dire qu’aussi bien la gestion que le management sont deux concepts dynamiques et évolutifs. Néanmoins, il ne faut jamais confondre entre les deux termes, Management vocable anglosaxon, est loin d'être la traduction du mot "Gestion". En effet, le management est la pensée en matière d'organisation et de recherche de la rationalité (organisation et systématisation de la connaissance, tentative d'établir des rapports vrais avec le monde) et de l’efficacité (processus d'évaluation des efforts déployés au sein d'une organisation visant l'atteinte d'un objectif déterminé et ce pour s'assurer de leurs bons fonctionnements) économique et sociale. Aussi le management "est une attitude d'esprit, qui accommode au meilleur style le génie propre des personnes et le simple bon sens" (G.PEDRAGLIO : " Management et Organisation"). Quant à la gestion, elle est simplement un style d'action. Elle est la concrétisation et la pratique de certains principes et méthodes managérials. Autrement dit, c'est un ensemble d'actes tendant à déclencher, suivre et contrôler le fonctionnement à court et moyen termes d'une organisation. De tous ces propos, on pourrait dire que le manager est dans un premier temps un gestionnaire (c’est-à-dire un responsable, qu'il soit un agent de maîtrise ou un directeur de service, ayant un objectif à atteindre). Autrement dit sa mission se résume dans la seule action de résoudre les problèmes efficacement compte tenu des moyens matériels et intellectuels dont il dispose à l'instant où se produisent les problèmes et ce dans le cadre de la réalisation de l'objectif global. 3 Dans un second temps, ce même responsable pour qu'il ait le qualificatif de manager il est appelé à chercher et trouver d'autres solutions meilleures à son problème pour améliorer la réalisation dans le futur : C'est un futurologue. Donc le manager est un chef, à son échelon, qu'il s'agisse de direction générale ou d'un poste de contremaître. Il a des objectifs, une responsabilité et un rôle. Bref, ce qui différencie un manager d'un gestionnaire c'est cette notion de futurologie * caractérisant la tâche du premier. ensemble des recherches qui étudient le futur et cherchent à prévoir quel sera, à un moment donné de l'avenir, l'état du monde ou d'un pays dans les domaines techniques, social, politique, économique etc... . 2. Objet et vocation du MANAGEMENT L'objet (cause, motif d'une action) du management est exactement la réalisation des objectifs dans les meilleures conditions. Quant à la vocation (penchant, aptitude spéciale pour un genre de vie, une profession) de ce dernier, elle est l'organisation du changement et de l'évolution. 3. But du MANAGEMENT Il se résume dans la création d'un système aussi bien programmé que celui du corps humain. Tout système naturel vivant utilise des centaines de fois chaque jour des procédés semblables, aussi bien dans son fonctionnement interne qu'en interaction, avec le milieu, et il le fait automatiquement. Cependant, le fait crucial est l'existence d'une sorte de processus naturel chez les humains capables d'exécuter, à travers une série de processus programmés, tout un vaste éventail d'opérations, permettant ainsi au système de fonctionner et de s'adapter à son environnement. Le rôle de la direction d'une firme devrait donc être celui de développer et de mettre en œuvre une série d'étapes et d'opérations semblables à celles qu'accomplit le système humain (prise de conscience du problème, recueil d'informations, etc...) pour permettre d'atteindre les objectifs optimaux. 4. Domaines d'application et étendue du MANAGEMENT Le management s'étend bien au-delà du monde des affaires (entreprise) et concerne les organisations les plus diverses, fusent-elles gouvernementales, militaires ou religieuses. Quel que soient le type d'organisation, le genre d'activité, le lieu géographique, l'état du développement du pays, les 4 gestionnaires ont toujours pour tâche de prévoir, planifier, organiser et de communiquer leurs objectifs avant de mesurer les résultats obtenus par leurs subordonnés. Le management, s'il a pris naissance dans l'entreprise industrielle qui a permis d'en faire à la fois une science et un art, utilisant tout un ensemble de techniques de plus en plus perfectionnées, n'est plus l'apanage de l'entreprise. Il n'est plus, simplement, l'affaire du business. Il s'impose dans toutes les formes d'activité qui, au sein de notre société, mettent en œuvre sous des formes diverses des ressources limitées en dépit de leur abondance, pour contribuer au bien-être et au développement social. Il et donc devenu une discipline universelle, mais encore faut-il l'adapter aux caractéristiques des diverses institutions dans lesquelles il doit être appliqué. Or, jusqu'ici, on a fait très peu pour adapter les sains principes du management, et ses bonnes techniques aux caractéristiques des diverses institutions dans lesquelles il devient de plus en plus indispensable. 5. MANAGEMENT : Science ou art ? Tout d’abord, nous devrions nous demander sur la nature du sens que nous donnerions au mot « Science ». (Ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits susceptibles d'une généralisation). (Larousse) Si nous voulons dire par-là des vérités générales susceptibles d'être appliquées sous une forme rigide (quel que soit le moment ou le niveau dans l'organisation) à tous les phénomènes relatifs à une entreprise, alors le Management n'est sûrement pas une science, pas plus que ne l'est aucune discipline dans le domaine du comportement. Rien de ce qui a trait aux êtres humains ne peut être science exacte. Le compromis, le relativisme et même l'irrationalité font et feront toujours partie de la gestion de toute organisation. Pour qu'il en fût autrement, il faudrait que les hommes devinssent des sortes de robots, au comportement tout à fait prévisible. En revanche, la gestion n'est pas uniquement un art. Il existe un corps de connaissances concrètes généralement applicables d'un bout à l'autre de la structure organisationnelle. Les principes de comptabilité, de budget, de gestion de stock et de programmation linéaire sont universels. Ils sont tout aussi applicables à l'entreprise de l'artisan, qu'à une firme de l'envergure de Général Motors, quel que soit le pays où elle fonctionne. Le Management est donc à la fois une science et un art . * 5 La science énonce la théorie qui permet de comprendre comment fonctionne une entreprise ; l'art consiste à savoir comment se servir de la théorie dans un environnement donné. L'art sans la théorie fait penser au sorcier qui guérit une maladie sans avoir fait des études de médecine. Il peut réussir dans certains cas, mais dans d'autres provoquera la catastrophe, par ignorance des principes qui gouvernent les fonctions du corps. La théorie sans la capacité de s'en servir est tout aussi inutile. Tel l'étudiant en gestion, tout frais émoulu de l'Université, à la tête bien pleine, mais sans efficacité pratique puisqu'il n'a pas encore acquis la technique pour l'appliquer. « Le Management intègre en effet toutes les notions dégagées depuis quelques décennies par l'organisation scientifique du travail, par la gestion rationnelle, par la direction et le gouvernement efficace des collectivités humaines. » (Le Management par T.T. PATERSON ). 6. Les conditions d'efficacité du MANAGEMENT Quatre caractéristiques paraissent fondamentales : 1/ La première condition d’efficacité du management est de comprendre les changements socioculturels qui sont en train de se produire dans notre société. 2/ La seconde est de développer la capacité de communiquer au sein de cette société caractérisée par le développement de l'information. 3/ La troisième est de s'habituer à penser en termes de " systèmes", d'avoir cette vue globale indispensable pour comprendre le fonctionnement des organisations en constante interaction avec l'environnement. 4/ Enfin, la quatrième condition d’efficacité est l'élargissement de nos horizons, aussi bien dans l'espace que dans le temps. Plus le changement accélère son rythme, Plus s'étend la portée de nos décisions, dans l'espace dans une économie qui est planétaire, dans le temps en raison de la nature des transformations qu'elles apportent à l'environnement, plus il nous faut regarder loin. Et cette vision doit être à la fois globale et prospective. 7. Rôle du MANAGEMENT Non seulement, le Management est un concept élaboré visant la recherche de l’efficacité mais encore il se trouve socialement placé dans une position nouvelle qui, le distinguant de l'élément capital et de l’élément travail, nous permet de faire échapper l'économie à une relation duale. Les relations duales sont des relations qui se bloquent. Ainsi, dans la relation autoritaire père enfant, maître - élève, on parvient à un blocage, c'est pourquoi il est préférable de tenter une relation en triade : père - enfant- élève. De même, si l'on a une relation hiérarchique entre le capital et le travail du type : le capital commande, le travail obéit, on parvient un jour ou l'autre à un blocage. A partir du moment où l'on parvient à une relation économique plus élaborée comme : Capital – Management - Travail, 6 les liens deviennent à la fois plus complexes et plus souples tandis que la relation sociale peut devenir de son côté, plus vivante et plus souple. Or, le problème moderne est justement de permettre à l'homme de se dégager d'un sentiment d'impuissance d'écrasement, devant des forces qu'il ne peut même plus distinguer. Conclusion Toutes ces réflexions sur le concept de Management peuvent paraître bien théoriques, bien intellectuelles aux praticiens pressés par le temps, par une grève, par une facture impayée ou par une démission. Mais qu’est-ce que le Management sinon le recul, « la distanciation » par rapport à la réalité et un visioning touchant des fois l’utopie ? Est-ce que le Management n’est pas une quête humaine de quelques sillons se faufilant entre la raison et la folie ? Un vrai manager, c’est celui qui évite de gagner les guerres après les défaites et accorde plus de temps à la réflexion. Et ceci lui permettra de s’efforcer à séparer l’essentiel du secondaire, à déléguer aux autres un pouvoir qui risque de lui s’échapper. Beaucoup de réflexions avant d’agir, n’est-ce pas, ce que l’on demande en fait à un manager ? Du bon sens, de l’audace, de l’intuition, du goût de l’expérimentation, de l’innovation, du respect des priorités morales et du pragmatisme, voilà, exactement ce qu’il faut pour être qualifié de manager. Le Management est une réalité scientifique, mais ce qui compte, c’est l’homme qui le met en pratique. Convenons enfin, que les managers qui rassemblent en eux les quelques traits du portrait-robot que nous avions sus-indiqué sont des personnages que l’on rencontre rarement. Ainsi décrit, le Management se présente comme « remède miracle » aux maladies et aux maux des systèmes économiques et des gouvernements des organisations. Alors la question qui se pose : avec la présence d’un tel médicament, pourquoi l’économie universelle, jusqu’à aujourd’hui, n’arrive pas à résoudre tous ses problèmes ? Autrement dit, quelles sont les limites du Management ? Une réponse évidente à une telle question est que tout simplement, le Management avec tous ses principes et tout son arsenal technique et conceptuel n’est finalement qu’une œuvre humaine. Et l’homme, comme tout le monde le sait, est incapable de tout concevoir, de tout imaginer , bref de tout résoudre. Pour cette raison en sciences économiques et en sciences managériales, les spécialistes raisonnent en termes d’optimum, de rationalité limitée et de relativité. L’absolu, le parfait, le complet et le juste sont des adjectifs divins et non humains. 7