MODALITÉS DE PRÉVENTION DE LA TRANSMISSION ET DE LA SÉLECTION DES BMR Dr Gebrael Saliba Service des Maladies Infectieuses Hotel Dieu de France [email protected] [email protected] DÉFINITION DES BMR Les bactéries multirésistantes aux antibiotiques accumulation des résistances naturelles et / ou acquises sensibles à un nombre restreint d'antibiotiques, résistantes à >3 familles d’ATB Les infections à BMR sont beaucoup plus fréquentes en réanimation que dans les autres unités d'hospitalisation Les BMR les plus fréquentes Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), VISA Pseudomonas aeruginosa Entérobactéries sécrétrices de bétalactamases à spectre étendu (EBLSE) / de Carbapénèmases Acinetobacter baumanii Entérocoques résistants à la Vancomycine (ERG) Les BMR ne sont pas plus virulentes que les bactéries non-résistantes de la même espèce PROBLÉMATIQUES DES INFECTIONS À BMR Les antibiotiques Choix limité ⇒ recours à des antibiotiques à large spectre Spectre large ⇒ déséquilibre de flore et risque de colonisation par d’autres BMR Coût ⇒ antibiotiques onéreux: une bactériémie à SARM coûte 4 fois plus cher qu’une bactériémie à SASM Retard à la mise en place d’une antibiothérapie adaptée ⇒ Aggrave le pronostic Durée de séjour augmentée en moyenne de 4 jours Augmentation de la morbidité et / ou de la mortalité Le surcoût en temps de travail (temps supplémentaire consacré à un patient porteur d’un SARM en Réa) : Pour une infirmière 16mn / j / patient Pour un médecin 10mn / j / patient en bionettoyage de la chambre, en soins techniques, en soins de nursing en consommable : matériel à usage unique, protections individuelles … TRIPLE STRATÉGIE POUR MAITRISE DES BMR Prévention de la diffusion à partir des patients/individus porteurs et/ou infectés Transmission Contrôle de la prescription des antibiotiques pour limiter la pression de sélection Sélection Mesures de prévention individuelle du risque BMR PRÉVENTION DE LA TRANSMISSION Précautions Standard Précautions Complémentaires d’Hygiène Stratégie de Dépistage QUI EST CONCERNÉ PAR LA MAITRISE DE LA DIFFUSION DES BMR ? Toute personne en contact avec le patient porteur de BMR – le Personnel de Santé Patients/résidents, médecins, infirmières, aides-soignants, agents d'entretien des locaux, rééducateurs, manipulateurs en radiologie, diététiciennes,… PERSONNEL DE SANTÉ EPICENTRE DE LA TRANSMISSION PRÉCAUTIONS « STANDARD » Hygiène des mains systématique après le retrait des gants, entre 2 patients, entre 2 activités Port de gants si risque de contact avec du sang ou tout autre produit d’origine humaine pour tout soin, lorsque les mains du soignant comportent des lésions Les gants doivent être changés entre deux patients, deux activités (1 gant = 1 soin = 1 patient) Port de surblouses, lunettes, masques si les soins ou manipulations exposent à un risque de projection ou d’aérosolisation de sang ou tout autre produit d’origine humaine (ex : aspiration, kinésithérapie, manipulation de matériel,…) Matériel souillé le matériel piquant / tranchant à usage unique est déposé immédiatement après usage dans un container adapté Ne pas recapuchonner les aiguilles, ne pas les désadapter à la main Surfaces souillées les nettoyer et les désinfecter avec un désinfectant approprié Transport de prélèvements biologiques, de linge, de matériel souillé à transporter dans un emballage étanche et fermé Si contact avec du sang ou liquide biologique après piqûre ou blessure : lavage et antisepsie au niveau de la plaie après projection sur les muqueuses (conjonctive, bouche…): rinçage abondant PRÉCAUTIONS « STANDARD » PRÉCAUTIONS « STANDARD » Doivent être une priorité absolue le socle de la prévention de la transmission croisée des microorganismes Il est clairement établi que la mauvaise observance des mesures d’hygiène est souvent la cause de l’échec de la maîtrise de la transmission croisée Bien appliquées peuvent suffire à arrêter un phénomène épidémique au sein d’un établissement de soins MOSAR évaluer l’efficacité d’un programme de prévention de la transmission croisée des BMR dans 13 services de réanimation sur une période de 3 ans Meilleure formation des professionnels de santé une augmentation de l’observance de l’hygiène des mains si cette observance atteint 80 %, le bénéfice du screening des patients à la recherche de BMR: minime Slaughter S et al. Ann Intern Med 1996; 125: 448-56 CONDITIONS NÉCESSAIRES POUR BONNE APPLICATION DES PS Mise à disposition de produits hydro-alcooliques (PHA) au plus près des soins Observance de l'hygiène des mains mesurée sur un nombre important d'observations Niveau élevé de consommation de PHA Proportion importante de recours à la friction avec PHA dans les gestes d'hygiène des mains Bon usage du port des gants Solide expertise de l'Équipe Opérationnelle d’Hygiène (EOH) et du CLIN Connaissance approfondie de l'épidémiologie microbienne, basée sur des prélèvements de dépistage PRÉCAUTIONS COMPLÉMENTAIRES D'HYGIÈNE PRÉCAUTIONS COMPLÉMENTAIRES DE CONTACT PCC Hospitalisation en chambre individuelle avec toilettes Signalisation de la situation pour tous les intervenants Soins personnalisés et regroupés par opposition aux soins en série Petit matériel dédié dans la chambre du patient Renforcement de la maitrise de l’environnement par bionettoyage PS ET PCH Signalisation systématique Respectueuse du patient et aisément reconnue par l'ensemble du personnel du service Permet l'information de l'ensemble des personnels hospitaliers Contribue à garantir la continuité des mesures d'isolement Adéquation du ratio personnel-patient POLITIQUE SPÉCIFIQUE DE MAÎTRISE DE LA TRANSMISSION CROISÉE “STRATÉGIE DE DÉPISTAGE” Recommandé de mettre en place une surveillance épidémiologique des agents infectieux mesurer régulièrement l’incidence des micro-organismes à partir des prélèvements cliniques Adaptée à chaque secteur de soins La situation épidémiologique d’un service ou d’un secteur peut justifier une stratégie spécifique de dépistage Privilégier le dépistage des agents infectieux « à haut potentiel de transmission croisée » dont les BMR agents où la transmission croisée joue un rôle essentiel Le dépistage BMR utile à la mise en œuvre des précautions complémentaires de type contact STRATÉGIE DE DÉPISTAGE L'intérêt du dépistage systématique est d'identifier les patients colonisés permettre de mettre en oeuvre précocement les mesures d'isolement spécifiques augmenter la sensibilité de la détection sensibiliser l'équipe soignante orienter le choix de l'antibiothérapie en cas de présomption d'infection STRATÉGIE DE DÉPISTAGE Cibles du Dépistage SARM EBLSE Acinetobacter baumanii Pseudomonas aeruginosa ERG Clostridium difficile STRATÉGIE DE DÉPISTAGE DÉCONTAMINATION MICROBIENNE Décontamination de SARM Utiliser la décontamination à visée individuelle chez le patient porteur de SARM à haut risque d’infection les dialysés chroniques les porteurs de cathéter central de longue durée Les greffés Discutable en pré-chirurgie élective Ne pas recourir aux antibiotiques utilisables dans les traitements par voie systémique pour l’éradication du portage de SARM Lorsqu’il a été décidé de procéder à l’éradication du portage de SARM, il est recommandé: d’utiliser en première intention la mupirocine par application nasale d’associer des toilettes du patient avec un savon antiseptique à la décontamination nasale Décontamination des entérobactéries productrices d’une bêtalactamase à spectre étendu (EBLSE) sur la base des données actuelles, l’éradication du portage digestif d’EBLSE Non recommandée sauf en cas d’épidémie PRÉVENTION DE LA SELECTION DES BMR DONNÉES SUR PRESCRIPTIONS D’ANTIBIOTIQUES COMMUNAUTÉ Am J Med 2006;119:S53-61 JAMA 1997;278:875 Br Med J 1997:315:1211 Arch Intern Med 2003;163:601 DONNÉES SUR PRESCRIPTIONS D’ANTIBIOTIQUES HÔPITAL 50 - 75% patients se présentant aux Urgences reçoivent des antibiotiques 71% des patients admis ≥ 48h reçoivent des antibiotiques Jusqu’à 99% de ces prescriptions peuvent être inadéquates Am J Med 2006;119:S53-61 JAMA 1997;278:875 Br Med J 1997:315:1211 Arch Intern Med 2003;163:601 CAMPAGNE DU CDC ET DU ECDC POUR LUTTER CONTRE LA RÉSISTANCE BACTERIENNE AU SEIN DES INSTITUTIONS DE SOINS 12 ÉTAPES POUR PRÉVENIR LA RÉSISTANCE BACTERIENNE Break the chain Isolate the pathogen Stop treatment when cured Know when to say “no” to vanco Treat infection, not colonization Treat infection, not contamination Use local data Practice antimicrobial control Access the experts Target the pathogen Get the catheters out Vaccinate Prevent Transmission (Infection Control) Use Antimicrobials Wisely (Prudent Use) Diagnose & Treat Effectively Prevent Infections ANTIBIOPROPHYLAXIE Diminue le taux des infections nosocomiales post-opératoires Permet de diminuer la consommation des antibiotiques notamment ceux à larges spectres Molécules adaptées à l’écologie locale Remise à jour régulière Modalité majeure de diminution de la pression de sélection MESURES DE PRÉVENTION INDIVIDUELLE DU RISQUE BMR CHEZ UN PATIENT PORTEUR DE BMR Minimiser le risque de passage d’un simple état de colonisation vers l’infection Enlever les cathéters et dispositifs invasifs non utiles persistance du portage de BMR, portes d’entrée ou des facteurs de risque d’infection Limiter l’exposition de ces patients aux antibiotiques non utiles, de façon à ce que les BMR ne deviennent pas encore plus résistantes Dans les cas où une antibiothérapie est requise, le choix des molécules nécessite un avis spécialisé, afin d’optimiser le traitement et de limiter l’émergence de mutants résistants Antibiotic Stewardship Choix des molécules Désescalade thérapeutique Shift à la voir orale Arrêt du traitement à temps Respecter les protocoles d’antibioprophylaxie en chirurgie et médecine interventionnelle adaptés en fonction de l’écologie locale CHEZ UN PATIENT PORTEUR DE BMR Ne pas aboutir à une perte de chance pour les patients porteurs de BMR il a été montré par plusieurs études les patients placés en PCC sont l’objet de moins de contact et d’attention par les professionnels de santé sont plus stressés et sont exposés à davantage d’erreurs médicamenteuses et d’effets secondaires Une information médicale sur les raisons de la mise en place des PCC, ainsi que l’explicitation des mesures d’hygiène mises en place est indispensable Idéalement, le patient doit être un acteur de la prévention du risque infectieux intrinsèque et du risque de transmission croisée des microorganismes par la maîtrise par lui-même de l’hygiène des mains MERCI Dr Gebrael Saliba Service des Maladies Infectieuses Hotel Dieu de France [email protected] [email protected]