ÉDITORIAL Arrêt cardiaque : comment améliorer le pronostic ? Out of hospital cardiac arrest: how to improve the survival? C. Spaulding* U n décret autorisant l’accès public à la défibrillation a été promulgué en 2007 ; l’année suivante, la Fédération française de cardiologie (FFC) a lancé une campagne d’information du grand public sur l’arrêt cardiaque. Quelles ont été les conséquences de ces actions ? Peut-on encore aller plus loin ? Implantation des DAE : un bond en avant Plus de 3 700 défibrillateurs automatisés externes (DAE) ont été installés dans 1 850 collectivités territoriales. Ces installations ont été accompagnées de formations du grand public, au niveau des communes, des entreprises et même des écoles secondaires. Tous les acteurs médicaux et paramédicaux soulignent l’enthousiasme du public à apprendre les gestes de premiers secours. Ce progrès indiscutable ne doit cependant pas cacher le fait que le nombre de DAE installés demeure insuffisant. Par ailleurs, la mise en place d’un DAE dans une ville et le premier apprentissage du grand public n’ont d’intérêt que s’ils sont suivis de vérifications techniques programmées de l’appareil et d’une pérennisation de la formation. Une implication forte des cardiologues... La campagne lancée en 2008 par la FFC a été une réussite éclatante sur le plan de l’information au grand public et a permis une implication forte des cardiologues dans la prise en charge de l’arrêt cardiaque. Au niveau local, de nombreux cardiologues ont été sollicités par leur mairie pour planifier l’installation des DAE et l’enseignement au grand public. Sur le plan national, la Société française de cardiologie (SFC) s’est impliquée dans les recommandations du Conseil français de réanimation cardiopulmonaire (CFRC) sur l’arrêt cardiaque publiées en 2008. La présence des cardiologues a permis de rappeler l’importance de leur implication dans une pathologie où la cause est coronarienne dans 50 à 70 % des cas et où le suivi à long terme et la prévention des récidives sont réalisés le plus souvent par eux-mêmes. ... mais des délais d’intervention qui restent longs Le pronostic de l’arrêt cardiaque est essentiellement lié à la rapidité d’intervention : chaque minute supplémentaire entre l’arrêt et le début d’un massage efficace diminue les chances de survie d’environ 10 %. Or, on constate encore aujourd’hui des délais d’intervention * Service de cardiologie, hôpital Cochin, Paris. 4 | La Lettre du Cardiologue • n° 430 - décembre 2009 qui dépassent les 10 minutes, notamment en cas d’arrêt cardiaque à domicile ou dans les zones rurales. Dans un registre tenu à l’hôpital Cochin, on ne constate pas de modifications dans les délais d’intervention depuis les cinq dernières années. Il reste encore beaucoup à faire pour réduire le facteur temps, élément essentiel du pronostic. La mise en place des DAE est associée à la tenue d’un registre sur les horaires d’intervention. L’analyse de ces données pourrait permettre d’accroître l’efficacité de la chaîne de secours. Optimiser la prise en charge hospitalière L’importance de la prise en charge hospitalière cardiologique a été soulignée par les recommandations du CFRC. Les indications d’une coronarographie précoce doivent être larges pour rechercher et traiter une occlusion coronaire responsable de l’arrêt. Le cardiologue doit travailler en symbiose avec les réanimateurs tout au long de la difficile période réanimatoire. Enfin, l’évaluation rythmologique des survivants doit être minutieuse pour prévenir les récidives. Une recherche passionnante De nombreuses pistes de recherche sont actuellement explorées dans le domaine de l’arrêt cardiaque : prédisposition génétique avec étude du génotype des victimes d’arrêt cardiaque (étude CARTAGENE) ; étude du thrombus et des microparticules dans le sang coronaire pour déterminer le mécanisme de la thrombose coronaire dans l’arrêt cardiaque (étude TIDE) ; évaluation des assistances et des systèmes de massage cardiaque ; individualisation de la repolarisation précoce comme cause d’arrêt cardiaque, etc. Il faut souligner la bonne tenue des équipes françaises dans ce domaine et l’excellente collaboration entre les équipes préhospitalière et hospitalière pour faire aboutir ces projets. Conclusion 2007 et 2008 ont été des années clés dans l’éducation du grand public. L’implication de la FFC et de la SFC a été déterminante et remarquable. Pour transformer l’essai et voir une amélioration de la survie des arrêts cardiaques, cette action doit être poursuivie, renforcée et accompagnée par un travail de recherche clinique et fondamentale permettant de retrouver les causes étiologiques ou favorisantes de cette terrible affection. En attendant qu’un prochain éditorial de La Lettre du Cardiologue soit consacré à la détection des sujets à risque de mort subite par un génotypage ciblé, il faut lutter pour réduire les délais d’intervention, un facteur essentiel du pronostic de l’arrêt cardiaque. ■