Dossier : Triomphe et victoire à Rome sous la République et au

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Dossier : Triom phe et victoire à Rom e sous la République
et au début de l’Empire
Document 1 : Le triomphe de Pompée en 61 d’après Plutarque ( Vie de Pompée 45, 1 -46, 1)
45. 1 Quant au triomphe, bien qu'il fût réparti entre deux journées, le temps fut trop court pour son
importance, et l'on dut écarter du spectacle beaucoup d'objets qui avaient été préparés et qui
auraient suffi pour décorer dignement une autre pompe. 2 En tête du cortège, des écriteaux
indiquaient les pays dont Pompée triomphait, à savoir le Pont, l'Arménie, la Cappadoce, la
Paphlagonie, la Médie, la Colchide, les Ibériens, les Albans, la Syrie, la Cilicie, la Mésopotamie,
la Phénicie, la Palestine, la Judée, l'Arabie, et tous les pirates vaincus sur mer et sur terre. 3 On y
lisait que Pompée avait pris au moins mille forteresses, près de neuf cents villes, enlevé aux pirates
huit cents vaisseaux et fondé trente -neuf cités. 4 Les écriteaux disaient encore que les revenus de
l'État, qui montaient auparavant à cinquante millions de drachmes, avaient été portés par lui à
quatre-vingt -cinq millions, et qu'il apportait au trésor public, tant en numéraire qu'en objets
d'argent et d'or, vingt mille talents, sans compter les dons faits aux soldats, dont le moins avantagé
avait reçu pour sa part quinze cents drachmes. 5 Les prisonniers conduits dans le cortège furent,
outre les chefs des pirates, le fils de Tigrane l'Arménien avec sa femme et sa fille, et la femme du
roi Tigrane lui-même, Zosimè, le roi des Juifs Aristobule, la soeur, cinq enfants et des femmes
scythes de M ithridate, des otages des Albans, des Ibériens et du roi de Commagène. On voyait en
outre une foule de trophées, en nombre égal à toutes les victoires qu'il avait remportées par luimême ou par ses lieutenants. 6 Mais ce qui mettait le comble à sa gloire et qui n'était jamais arrivé
à aucun Romain, c'est qu'il célébrait son troisième triomphe sur le troisième continent :
7 d'autres sans doute avant lui avaient triomphé trois fois, mais Pompée, après avoir triomphé
d'abord de la Libye, puis de l'Europe, semblait, en triomphant en dernier lieu de l'Asie, avoir en
quelque sorte soumis par ses trois triomphes le monde entier.
46. 1 Au dire de ceux qui le comparent à Alexandre et veulent en tout le rapprocher de lui, Pompée
avait alors moins de trente-quatre ans ; mais en réalité il s'avançait vers la quarantaine.
Document 2 : César et son image monétaire
1. Denier de César
frappé en février-mars
44. Au droit : César,
tête
droite,
lauré.
Légende :
DICT
PERPETVO CAESAR.
Au revers : Vénus,
debout, tournée vers la
gauche, appuyée sur
une lance ou un sceptre,
et un bouclier à ses
pieds, tient dans sa
main
droite
une
victoire. Légende : P.
SEPVLLIVS M ACER.
1
Document 3 : le Forum d’Auguste à l’époque d’Auguste
Document 4 : La bataille d’Actium vue par Virgile : le bouclier d’Enée (Virgile, Enéide , VIII,
671-708, 714 -730)
Au milieu du bouclier s’étendait une image d’or de la mer enflée par le vent : l’onde azurée
blanchissait d’écume, et ça et là des dauphins nageant en cercle bayaient et fendaient de queues
argentées les flots bouillonnants. On découvrait en plein milieux deux flottes aux proues d’airains,
et la bataille d’Actium : vous eussiez vu toute la côte de Leucate bouillonner sous le formidable
appareil de ars, et les flots resplendir au loin des éclats de l’or. D’un côté, c’est César Auguste
entraînant au combat les Italiens, le Sénat, le peuple, les Pénates et les grands dieux. Il est debout
sur la poupe de son vaisseau. De ses tempes rayonnantes jaillissent deux flammes, et sur son front
reluit l’astre paternel. Non loin, Agrippa, favorisé des vents et des dieux, s’avance d’un air de
triomphe, à la tête de ses galères : sur son front brille, superbe trophée de guerre, la couronne
rostrale.
De l’autre côté est Antoine, vainqueur des peuples de l’Aurore et de ceux de la mer Rouge. Il
traîne avec lui ses alliés barbares, mille étendards variés, l’Egypte, les forces de l’Orient, les
Bactriens, venus des confins de la terre. Une Egyptienne (ô sacrilège !), son épouse, le suit.
Tous s’élancent ensemble, et la mer, que soulèvent les rames, écume sous l’airain des
proues aux triples pointes. Ils cinglent au large. […] L’étoupe enflammée, le fer ailé des flèches,
2
volent de part et d’autre. Un carnage nouveau rougit les champs de Neptune. La reine, au milieu de
sa flotte, anime ses soldats des sons du sistre égyptien, et ne voit pas derrière elle les deux serpents
qui l’attendent. Tous les dieux monstrueux de sa patrie, et à leur tête l’aboyant Anubis, se sont
armés pour lutter contre Neptune, Vénus et Minerve. Au fort de la mêlée, Mars bardé de fer paraît
déchaînant ses fureurs. Des cieux descendent les cruelles furies, et la Discorde, heureuse, étale sa
robe déchirée, et marche à grands pas. Bellone la suit armée d’un fouet ensanglanté. Apollon, des
auteurs d’Actium, regarde le combat et bande son arc. Frappés de terreur, l’Egyptien, l’Indien,
l’Arabe, le Sabéen, tous ont tourné le dos. On voit la reine elle-même, implorant les vents, fuir à
toutes voiles [… ] Mais César, trois fois triomphant, entrait porté sur son char dans les murs de
Rome et, payant aux dieux de l’Italie l’immortel tribut de ses vœux, consacrait dans la Ville trois
cents des plus vastes temples. Rome tout entière retentissait des cris de joie, du bruit des jeux, des
applaudissements de la foule. Dans tous les temples, ce ne sont qu’autels dressés, chœurs de dames
romaines ; partout, devant les autels, des taureaux immolés jonchent la terre de leurs dépouilles
sanglantes. Assis sur le seuil éblouissant de marbre et d’albâtre du temple d’Apollon, César
recueille les présents des peuples, et en décore les superbes portiques du dieu. On voit s’avancer la
longue file des nations vaincues, aussi diverses par leur langage que par leurs vêtements et leurs
armes. Ici, Vulcain avait représenté les Nomades et les Africains à la robe flottante ; là, les
Lélèges, les Cariens et les Gélons qui portent l’arc. L’Euphrate soumis coulait plus mollement. On
voyait les Morins venus des extrémités de la terre, le Rhin aux deux bras, les Dahes jusqu’alors
indomptés et l’Araxe indigné du Pont qui l’enchaîne. Telles étaient les merveilles reproduites sur
ce bouclier, présent de sa mère. Enée les admire.
Document 5 : monnaies d’Octavien et d’Auguste
RIC 265a, Denier
d’Octavien, 29-27 av.
J.-C.
5a
RIC 264, Denier
d’Octavien, 29-27 av.
J.-C.
5b
3
6. Revers d’une monnaie
d’Auguste frappée par
l’atelier de Lyon. Autel de
Lyon. Légende : ROM ET
AVG.
5c
Document 6 : Le triomphe de Tibère en 12 ap. J.-C. : gobelet en argent de Boscoreale
Document 7 : Claude en Bretagne d’après Suétone
(1) Il ne fit qu'une seule expédition militaire, et elle fut peu considérable. (2) Le sénat lui avait décerné
les ornements du triomphe. Mais, trouvant que c'était trop peu pour la majesté de son rang, il voulut un
triomphe complet, et choisit pour le champ de ses exploits la Bretagne, qui n'avait pas été attaquée
depuis Jules César, et qui se soulevait à l'occasion de quelques transfuges qu'on n'avait pas rendus. (3)
Il s'embarqua à Ostie ; mais il faillit être deux fois submergé par un vent impétueux sur la côte de
Ligurie, et près des îles Stoechades. (4) Aussi vint-il par terre de Marseille à Gésoriacum où il opéra
son passage. Là, sans combat et sans effusion de sang, il reçut en très peu de jours la soumission de
l'île, revint à Rome six mois après son départ, et triompha avec le plus grand appareil. (5) Il permit aux
gouverneurs de provinces, et même à quelques exilés, de venir à Rome jouir de ce spectacle, et plaça
sur le faîte du palais, parmi les dépouilles de l'ennemi, une couronne navale à côté de la couronne
civique, comme un monument de son trajet et, pour ainsi dire, de sa victoire sur l'océan. (6) Sa femme
Messaline accompagna dans une voiture le char du vainqueur. Plusieurs Romains, qui avaient mérité
dans cette guerre les ornements du triomphe, le suivaient à pied, couverts d'une robe prétexte. M.
Crassus Frugi, qui obtenait cet honneur pour la seconde fois, montait un cheval caparaçonné et portait
un vêtement brodé de palmes.
4
Document 8 : Claude et la Bretagne d’après un denier de Claude
RIC 45v, Denier de
Claude (49-50 ap. J.-C.).
Au droit : TI(berius)
CLAVD(ius) CAESAR
AVG(ustus) P(ontifex)
M(aximus) TR(ibunicia)
P(otestate) VIIII
IMP(erator) XVI.
Pontifex Maximus : grand pontife ; Tribunicia Potestate VIIII: dans sa 9e
puissance tribunicienne ; Imp XVI : revêtu de sa 16e salutation impériale.
Au revers : DE
BRITANNI(A) (sur la
Bretagne)
Document 9 : Le « néronisme » (Dion Cassius, Histoire romaine , LXI, 20-21)
« Quand il entra à Rome, un secteur de la muraille fut détruit et une partie des portes enfoncée,
parce que quelqu'un assura que ces deux pratiques étaient habituelles lors du retour des vainqueurs
couronnés aux jeux. Entrèrent d'abord des hommes portant les couronnes qu'il avait gagnées. puis
d'autres qui brandissaient sur des lances des panneaux de bois mentionnant le nom des jeux, le
type de concours et l'assurance que Néron César était le premier Romain à les avoir remportés
depuis le début du monde. Ensuite venait le vainqueur lui-même sur un char triomphal, celui dans
lequel Auguste avait autrefois célébré ses nombreuses victoires ; il était vêtu d'un vêtement de
pourpre couvert de paillettes d'or, couronné d'une guirlande d'olivier sauvage, et tenait dans sa
main le laurier pythien. À ses côtés dans le véhicule conduisait Diodore le joueur de lyre. Ayant
traversé le Cirque et le Forum dans cet équipage, en compagnie des soldats, des chevaliers et du
Sénat, il monta vers le Capitole et de là gagna le Palais. La ville était décorée de guirlandes,
illuminée de lumiéres et imprégnée d'encens, tandis que toute la population, les sénateurs eux mêmes les plus forts de tous, criaient en chœur : « Salut. Vainqueur Olympique ! Salut, Vainqueur
Pithyque ! Auguste ! Auguste ! Salut à Néron, notre Hercule ! Salut à Néron, notre Apollon ! Le
seul Vainqueur de la periodos, le seul depuis le début des temps ! Auguste ! Auguste ! Oh, Voix
divine ! Bénis sommes-nous de t'entendre. » Je pourrais certainement user de circonlocutions, mais
pourquoi ne pas rapporter leurs paroles véritables ? Les expressions qu'ils utilisaient n'enlaidissent
pas mon histoire ; bien plus, le fait de n'avoir rien dissimulé de leurs mots lui confère un ornement
supplémentaire.
Ayant fini ces cérémonies, il annonça une série de courses de chars, et, portant dans le
Cirque ces couronnes avec celles qu'il avait gagnées par ses victoires dans les courses de chars, il
les plaça autour de l'obélisque égyptien. Leur nombre s'élevait à mille huit cent huit. Ayant ainsi
fait, il apparut en aurige. Alors, un certain Larcius, un Lydien, s'approcha et lui proposa un million
de sesterces s'il acceptait de jouer de la lyre pour eux. Néron, pourtant, ne voulut pas prendre cet
argent, dédaignant de faire quoi que ce soit pour un salaire (quoique Tigellin le ramassa, pour prix
de ne pas mettre Larcius à mort), mais il apparut cependant au théâtre et non seulement joua de la
lyre, mais joua aussi dans une tragédie. (Quant aux concours équestres, il ne manqua jamais d'y
participer.) Parfois, il se laissait volontairement battre, pour rendre plus crédibles les nombreuses
victoires qu'il remportait. »
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