Première ES Partie 2 – Modifier le génotype pour contrôler le phénotype Fiche #20 – Dérives possibles de la médecine prédictive Document 12.1 – Le diagnostic préimplantatoire Document 12.2 - M. Plachot, « Contracept. Fert. Sex. », 1994. Document 12.3 Gérard Courtois. Le M onde, 20 mai 1994 Document 12.4 Proposrecueillis par Nathalie Levisalles. Sciences et Av enir, n° 513 (nov. 89) Document 12.5 Avis du Comité Consultatif National d'Éthique pour les sciences de la vie et de la santé (France). Médecine/Sciences, 1993. Document 12.6 - C. Vincent. Le M onde, Dossiers et doc um ents, n' 209, avril 1993. Document 12.7 ProposduProfesseur Mattéi recueillispar Jean-YvesNau et FranckNouchi. Le Monde, mardi 12octobre 1993. Document 12.8 Interview de James Watson (prix Nobel). Courrier de I'UNESCO, oct. 93. Des problèmes éthiques liés à de nouvelles techniques de diagnostic prénatal Le diagnostic préimplantatoire (ou DPI) est réalisé sur des embryons de trois jours obtenus par fécondation in vitro ou recueillis par lavage utérin. L'embryon comprend alors 6 à 10 cellules enfermées dans la zone pellucide. Une de ces cellules est aspirée par une micropipette de diamètre convenable ; cela ne perturbe pas le développement de l'embryon qui reste en culture et sera implanté si le diagnostic réalisé sur la cellule prélevée est favorable. Il est possible de rechercher sur la biopsie cellulaire le sexe (pour ne réimplanter que des embryons femelles si le couple risque de transmettre une anomalie récessive liée au sexe) ; la présence d'un gène autosomal récessif à l'état homozygote (mucoviscidose par exemple) ; d'éventuelles anomalies chromosomiques, la détection se faisant de plus en plus grâce à des techniques d'hybridation avec des sondes spécifiques de tel ou tel chromosome. Dans le rapport remis au Premier Ministre par le Comité Consultatif National d'Éthique (CMI) en novembre 1993, il est mentionné concernant le DPI : Il convient de remarquer qu'il est faux de prétendre que le DPI puisse être un substitut du diagnostic prénatal dont il n'offre pas les mêmes garanties scientifiques ou médicales. Si cette technique était indiquée dans certains cas exce ptionnels, elle devrait alors être réalisée dans des conditions précises et dans un seul centre national de référence choisi pour sa compétence et faisant l‘ ’objet d'un suivi. La mission souligne également qu'il est donc indispensable d'organiser la pratique de cette ' technique qui s améliorera évidemment dans l'avenir. Le diagnostic préimplantatoire souligne également la tendance actuelle qui conduit à juger de plus en plus tôt la « qualité potentielle » d 'un humain sur son seul patrimoine génétique. » « En dépit de ses craintes d'entrouvrir la porte à des pratiques d'eugénisme, le Sénat s'est rallié à la volonté de l'Assemblée d'autoriser, à titre exceptionnel, les diagnostics préimplantatoires sur les embryons in vitro.Cette technique, encore balbutiante, est destinée à identifier les embryons qui pourraient être atteints d'une maladie génétique particulièrement grave, reconnue comme incurable, et d'éviter, par conséquent, leur implantation. Toutefois, ce geste de bonne volonté à l'égard des députés est sérieusement tempéré par les conditions nouvelles introdu ites par le Sénat. Un amendement de Claude Huriet précise, en effet, que « le diagnostic ne peut être effectué que lorsqu’a été préalablement et précisément identifiée, chez un parent ou l’un des parents, l'anomalie ou les anomalies responsables d'une telle maladie ». Quant au diagnostic lui -même, « il ne peut avoir d'autre objet que de rechercher des moyens de prévention et de traitement », ce qui exclut, en principe, les risques qu'il y soit recouru par convenance personnelle. » Un entretien avec jean Dausset Sc. et A. : — Quels sont les dangers de la thérapie génique ? J. D. — Il faut bien distinguer le traitement par les gènes de la modification des gènes. Le premier consiste à greffer un gène dans une cellule non reproductrice d'un malade. Quant au second, je m'élève avec vigueur, tout au moins en l'état actuel de nos connaissances, contre toute modification des gènes d'une cellule reproductrice (spermatozoïde, ovule ou embryon de quelques cellules), car alors la modification serait héréditaire. Je précise « en l'état actuel de nos connaissances » parce qu'on n'a pas le droit de fermer définitivement la porte à une technique qui pourrait un jo ur être utile à l'humanité. AVISSURL'APPLICATIONDESPROCÉDÉS DE THÉRAPIE GÉNIQUE SOMATIQUE La thérapie génique somatique peut être définie comme l'utilisation de gènes en tant que médicaments destinés à traiter des maladies héréditaires ouacquises sans modifier l'hérédité des malades. Le traitement peut porter sur des cellules prélevées chez les malades, cultivées hors de l'organisme (ex vivo)et dans lesquelles un gène dont on espère un effet thérapeutique a été introduit. Ces cellules ainsi « génétiquement modifiées » sont ensuite retransplantées chez les malades. C'està ce type de thérapie génique que le Comité Consultatif Nationald'Éthique a donné un avis favorable, le 13 décembre 1990, indiquant cependant qu'il convenait « de limiter les possibilités de thérapie génique aux seules cellules somatiques, et d'interdire formellement toute tentative de modification délibérée du génome des cellules germinales et toute thérapie génique comportantle risque d'une telle modification.Dans cetesprit,il convientd'interdire le transfert de gènes par des vecteurs viraux dans l'embryon humain du fait des risques d'atteinte des cellules germinales.Dans le domaine des maladies héréditaires,les recherches de thérapiegéniquene doiventêtre envisagées que pour desmaladies résultantd'une anomalie concernantun seul gène (maladies monogéniques),etentraînantunepathologieparticulièrementgrave ». Le « serpent » de l'eugénisme En 1927, Carrie Buck était stérilisée contre sa volonté. « Troisgénérations d'imbéciles,cela suffit » avait conclu le juge américain Oliver Wendell Holmes, chargé de l'affaire. Quelques années plus tôt - Carrie avait dix-sept ans — était née sa fille illégitime. Celle-ci avait été placée dans une institution pour déficients mentaux, comme sa mère et comme sa grand-mère. La première, Carrie Buck tombait sous le coup de la loi édictée dans l'Etat de Virginie, qui prévoyait la stérilisation — seule « thérapeutique génétique » alors accessible — de toute personne socialement indésirable. Dans les années qui suivirent, plus de la moitié des États d'Amérique votèrent des lois similaires, qui furent appliquées, estime-t-on aujourd'hui, à environ 50 000 personnes. Le 14 juillet 1933, les nazis promulguaient la « loi sur la prévention de la transmission des maladieshéréditaires »,quipermettait la stérilisation forcée « dans les cas de débilitémentale innée,de schizophrénie,de troublesmentaux cycliques (maniaco-dépressifs),d'épilepsie,dedanse deSaint-Guy,de cécité ou desurditéhéréditaires,dedéformationscorporelles gravesetd'alcoolismegrave ».De 1933 à 1939, les médecins et les juges des « tribunaux de santé héréditaire » appliquèrent leur loi à près de 400 000 personnes, avant d'être mobilisés pour la mise à mort de ceux qu'on devait, avant la guerre, stériliser. Particulièrement forte dans la première partie du siècle, l’emprise des théories eugénistes aboutissait ainsi aux atrocités et aux pires perversions du régime hitlérien, la « purification de la race ». Un demi-siècle plus tard, la génétique a trouvé d'autres ressources. Si de nombreux obstacles freinent encore la thérapie génique appliquée aux cellules germinales, la plupart des spécialistes s'accordent à penser que, tôt ou tard, à l'aube du XXI° siècle, les connaissances seront réunies pour tenter la correction de tares héréditaires graves sur des cellules reproductrices ou embryo nnaires. Autrement dit, pour modifier l'espèce humaine, et cette fois de façon irréversible. « - Selon vous, qu'est -ce que l'eugénisme ? — Il y a, schématiquement, l'eugénisme passif et l'eugénisme actif. L'eugénisme passif, c'est supprimer tout ce qui n'est pas conforme à des normes définies ; l'eugénisme actif, c'est favoriser ce qui va dans le sens de l'amélioration de l'espèce. L'une et l'autre de ces démarches sont éminemment condamnables lorsqu'elles sont appliquées au niveau collectif. Tout autre est la démarche individuelle du couple qui a déjà eu deux enfants atteints de mucoviscidose et qui souhaite avoir un troisième enfant. Il y a des situations qui font appel à la fois à la responsabilité et à la compassion. » «— Existe-t-il des raisons de craindre l'usage qui pourrait être fait de la génétique ? — Bien sûr. Je pense qu'il nous faut encore élaborer des lois qui rendent les informations génétiques confidentielles. Je n'aimerais pas que le premier venu ait le droit d'aller fourrer son nez dans mon ADN. Et personne ne devrait avoir à montrer son ADN pour obtenir un emploi !… II faudra des lois pour protéger les gens dans le inonde du travail. Au même titre que pour les dossiers médicaux, qui ne devraient pas être dans le domaine public. Mais cela devient difficile maintenant que l'on a commencé à demander aux politiciens de montrer le leur !… L'exp érience seule nous enseignera quelle voie suivre. Je pense, quant à moi, qu'on ne doit révéler ce genre de choses qu'en cas d'absolue nécessité. »