Les turbulences de l’amour selon Paul Claudel

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Théâtre Vendredi2 septembre 2011
Les turbulences de l’amour selon Paul Claudel
Par Alexandre Demidoff
Les turbulences de l’amour selon Paul Claudel Julien Lambert, 27 ans, monte
avec doigté «L’Annonce faite à Marie», à l’Eglise de Choulex, dans la
campagne genevoise. Le spectacle est servi par une belle distribution où
s’illustrent Anne-Shlomit Deonna, Caroline Cons et Michel Cassagne. A voir
jusqu’à samedi
Paul Claudel (1868-1955) est une église. Il écrit comme il croit, en catholique jamais rassasié. Son verbe sent la
terre ancienne et les ciels en colère, ses phrases viennent de loin – de la Bible – et de près. Il écrit avec ses
tourments, parfois plus charnels que mystiques. L’Annonce faite à Marie, jusqu’à samedi à l’Eglise de Choulex
(GE), entre vignes et blés, respire tout cela. Le metteur en scène genevois Julien Lambert, 27 ans, fait entendre
cette Annonce, lui donne comme un éclat d’enfance, archaïque et rêveur.
Pourquoi Paul Claudel, ce poète d’un autre siècle, touche-t-il dans ce spectacle? Parce que tout y est simple et
élevé. Le prologue d’abord dans la pénombre. Par la porte de l’église, un jeune homme pénètre dans la fiction.
C’est Julien Lambert, il joue le rôle de Pierre de Craon, un bâtisseur de cathédrales atteint par la lèpre. Il avance
vers celle qui n’est pas sa promise, mais son espérance, la belle Violaine (Anne-Shlomit Deonna). Violaine doit
épouser Jacques, un paysan qu’elle aime. Mais voici qu’elle accepte le baiser de Pierre le lépreux. Ravissement,
tocsin dans les cœurs, c’est ainsi que le destin bascule chez Claudel.
L’intelligence de cette Annonce, c’est de suggérer qu’une église est un théâtre, avec des ombres qui sont des
promesses d’apparitions. C’est d’un banc que Violaine apparaît à Jacques son fiancé (David Gobet). Dans le
chœur, il professe son amour; et elle suspend son secret, cette lèpre qu’elle a épousée. Tout sera dit dans un
moment. Jacques répudiera sa promise entachée et épousera Mara (Caroline Cons), la sœur de Violaine.
Celle-ci ira vers le monde en quête de salut comme son père Anne Vercors (Michel Cassagne). Sa mère (Josette
Chanel), elle, s’éteindra.
Ainsi va L’Annonce, tantôt prière, tantôt mélodrame. Anne-Shlomit Deonna est une Violaine de cristal et ses yeux
embrumés un poème. Caroline Cons est un orage contenu, une douleur et une menace mêlée. Parfois, un chant
(Anouk Molendijk) éclairela nuit. Claudel est un murmure.
© 2011 Le Temps SA
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