Anatomie physiologie de la peau

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La peau : introduction à la clinique
Préambule : au même titre que toute publication, l’exposé qui suit a fait l’objet d’une recherche
bibliographique pertinente. Cependant, et pour ne pas le rendre imbitable, les ouvrages ou articles
auxquels il fait référence ne sont pas cités dans le texte mais répertoriés dans le chapitre intitulé
« Bibliographie et liens utiles » et marqués d’un astérisque (*). Libre à chacun d’entre vous de les
consulter. Cet exposé n’a qu’un objectif : vous informer. Il ne s’agit aucunement d’un cours
magistral.
1- Généralités :
a. Définition :
La peau, composée approximativement de 70% d’eau, 27% de protéines, 2% de lipides et près
d’1% d’oligo-éléments, est la partie membraneuse du système tégumentaire recouvrant la majeure
partie de la surface du corps. Il s’agit de l’organe du corps humain à la fois le plus étendu et le plus
lourd (entre 4 et 10 kilos chez l’adulte, et près de 2m² de surface).
En d’autres termes, la peau est un tissu de revêtement très souple, résistant, imperméable,
constituant non seulement la couche corporelle protectrice externe (protection vis-à-vis des chocs,
agressions physiques ou chimiques, pollutions diverses, micro-organismes, rayons ultra-violets,
etc…)
mais
également
impliqué
dans
différents
processus
fondamentaux
tels
que :
la
thermorégulation, la défense immunitaire ou le métabolisme (synthèse des vitamine D, hormones,
sébum) entre autres, sans négliger son rôle dans la perception sensorielle.
b. Caractères physiques :
La superficie de la peau chez l’adulte est fonction de la taille et de la masse de ce dernier ; en
l’occurrence, il est admis que la surface cutanée d’un sujet mesurant 1.7m pour 70kg avoisine 1.7
à 1.8m².
D’aucuns considèrent que son poids équivaut approximativement à 4kg, voire bien plus si sont
inclus le pannicule adipeux et les phanères (ongles, cheveux, poils).
Son épaisseur varie selon la zone anatomique considérée, de 0.5mm (paupières, mamelon, pavillon
de l’oreille) à 2.5mm en moyenne (membres, thorax, paume), voire 4 à 5mm au niveau de la
plante des pieds.
Sa température est comprise entre 32°C et 36°C, l’extrémité distale des membres (doigts et orteils
en particulier) étant la plus froide.
La peau est étirable et élastique, « l'élasticité correspondant à la capacité de certains corps ou
objet
à
reprendre
leur
aspect
ou
leur
état
initial
après
déformation »,
à
titre
d’exemple, concomitamment aux variations morphologiques du sujet féminin pendant et après la
grossesse. Cette propriété trouve en outre toute son implication dans les plasties chirurgicales.
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2- Anatomie :
a. Morphologie :
La surface de la peau présente :
-
des pores d’où émergent les poils, et d’autres où s’ouvrent glandes sébacées et
sudoripares,
-
des sillons apparents et transversaux au niveau des plis de flexion et,
-
des crêtes visibles ou discrètes telles que les dermatoglyphes (= empreintes digitales).
b. Structure :
La peau (voir - Figure 1) est constituée de trois couches superposées que sont l’épiderme
(externe), le derme (interne) et l’hypoderme (profond).
Figure 1 : Vue tridimensionnelle schématique d’une coupe de peau.
b.1 L’épiderme :
L’épiderme est un « épithélium pavimenteux pluristratifié épais » ; en d’autres termes, l’épiderme
est un tissu de recouvrement, comprenant 5 couches successives (que sont, de la superficie vers la
profondeur, les stratums corneum, lucidum granulosum, spinosum et basal) et dont l’agencement
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des cellules, plates, lui donne l'aspect d'un pavage (voir - Figure 2). Ses principales
caractéristiques physiques sont : l’imperméabilité, la résistance et la souplesse. Son épaisseur est
sujette à variation (exemple : apparition de callosités sous l'action de traumatismes répétés).
Bien que dépourvu de vaisseaux sanguins, il n’en demeure pas moins que l’épiderme est un organe
vivant, en renouvellement permanent, dans lequel les cellules (nommées kératinocytes) vont se
transformer au fur et à mesure de leur migration depuis la couche basale (dite germinative) vers la
couche cornée (superficielle). Le cycle de vie de chaque kératinocyte dure une vingtaine de jours
au terme duquel les cellules (devenues très plates, translucides, plus ou moins amalgamées entre
elles, constituées essentiellement de kératine et désormais appelées cornéocytes), meurent et
finissent par s'éliminer au moyen d’un phénomène naturel appelé la desquamation. Ainsi, se
détache chaque jour spontanément (lors de frottements) une très fine pellicule de peau.
L’épiderme renferme d’autres types de cellules :
-
les
mélanocytes ;
répartis
dans
la
couche
basale,
ils
produisent
une
protéine,
nommée mélanine, responsable de la pigmentation (couleur) de la peau,
-
les cellules de Langerhans ; distribuées dans les couches moyennes, elles sont impliquées
dans les réactions de défense (immunologique ou phagocytaire) de l’organisme comme
dans les réactions allergiques chez les personnes présentant un terrain atopique (=
manifestations
d’hypersensibilité
immédiates
liées
à
une
prédisposition
individuelle
constitutionnelle ou héréditaire).
Enfin, notons que l'épiderme est traversé par des structures sous-jacentes d’origine dermique
(telles que les canaux excréteurs des glandes sudoripares ou sébacées et les follicules pileux
respectivement).
Figure 2 : La structure de l’épiderme (détails).
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b.2 Le derme :
Partie interne (sinon « profonde »), conjonctive et nourricière de la peau, le derme est situé entre
l’hypoderme (au dessous) et l’épiderme (au dessus) dont il est séparé par la membrane basale.
Composé à 80% d’eau, le derme est la couche essentielle de la peau puisqu’il renferme
respectivement :
-
les capillaires sanguins (qui apportent les nutriments et l’oxygène),
-
les vaisseaux lymphatiques (qui véhiculent les cellules de la défense immunitaire),
-
les glandes cutanées (qui sécrètent sueur et sébum), et
-
les follicules pileux (à l’origine des poils et cheveux).
Il est également le siège de nombreuses terminaisons nerveuses spécifiques impliquées dans la vie
de relation ou proprioception (toucher, pression, chaleur, douleur…) et permet l’ancrage de
muscles, dits peauciers, qui soutiennent le revêtement cutané, en particulier dans la zone du
décolleté (poitrine, cou).
Le derme octroie à la peau toute sa résistance, son élasticité et sa souplesse (au moyen de fibres
conjonctives - constituées d’élastine et de collagène - baignant dans un gel hydrophile appelé
substance fondamentale). A titre indicatif, le derme est 4 fois plus épais que l’épiderme ; il peut
atteindre près de 10mm dans le dos.
Le derme comprend 3 couches (que sont, de la superficie vers la profondeur, les stratums
papillaire, réticulaire et profond).
-
le stratum papillaire, situé juste sous l’épiderme, présente une surface irrégulière avec de
nombreux reliefs (ou papilles). Constitué d’un tissu conjonctif délicat, il est pourvu d’un
riche réseau capillaire (renfermant près de 10% du sang chez l’adulte), avec ses artérioles
terminales, ses veinules et ses jonctions artério-veineuses (dites anastomoses) impliquées
dans la thermorégulation. Cette couche du derme contient également les vaisseaux
lymphatiques ainsi que la plupart des récepteurs nerveux.
-
le stratum réticulaire représente la majeure partie du derme et est caractérisé par un
maillage de fibres conjonctives enchevêtrées enveloppant les glandes sébacées et
sudoripares, la racine des poils ou cheveux, ainsi que des cellules éparses : les fibroblastes
d’une part (chargés de synthétiser le collagène) et les macrophages et lymphocytes d’autre
part (engagés dans la défense de l’organisme).
Remarque : C’est cette même zone qui contribue à l’hydratation de la peau (par fixation des
molécules d’eau).
-
le stratum profond, enfin, assure la transition avec l’hypoderme. Sa structure fibreuse
lâche laisse apparaître quelques cellules graisseuses : les adipocytes.
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b.3 L’hypoderme :
L’hypoderme représente communément la formation la plus profonde de la peau ; il est composé
de cellules de soutien (les fibroblastes) et, en très grande partie, de cellules graisseuses (les
adipocytes). Cette originalité lui confère d’être un tissu :
-
souple et déformable,
-
isolant, dans le sens où (1) il s’insère entre la peau et les organes ou muscles sous-jacents
et (2) participe à la régulation thermique en minimisant les flux de température avec
l’extérieur, et
-
de réserve énergétique (puisque les lipides stockés dans les adipocytes peuvent être
utilisés par l’organisme, à titre d’exemple, en cas d’effort intense ou prolongé).
Remarque : L'hypoderme, dans sa constitution la plus complète, comprend 3 couches superposées
:
-
le pannicule adipeux (décrit ci-dessus), accolé à la face profonde du derme,
-
la fascia superficialis ou toile sous-cutanée, et
-
le tissu celluleux sous-cutané, qui permet à la peau de glisser sur les muscles sous-jacents.
C'est dans cet espace (entre peau et muscles) que cheminent les rameaux vasculaires et
nerveux sous-cutanés.
L’hypoderme est présent sur la quasi-totalité du corps, à l’exception des paupières, des oreilles, du
pénis et du scrotum. A l’opposé, il est particulièrement conséquent au niveau des fesses ou des
talons.
b.4 Les annexes :
Trois annexes distinctes (ou phanères) peuvent être décrites, à savoir les poils/cheveux, les
glandes cutanées et les ongles.
Concrètement, les poils sont des structures filiformes :
-
constituées de cellules cornées kératinisées imbriquées comme des tuiles,
-
avec une extrémité profonde intradermique (le bulbe) et une extrémité libre externe
(l’apex)
-
à renouvellement constant, et
-
influencées par des facteurs climatiques et hormonaux.
Compte tenu de leur nombre (une douzaine par cm²) et de leur répartition, les poils jouent un rôle
considérable dans la régulation thermique, en relation avec de minuscules muscles (les muscles
horripilateurs ou arrecteurs), qui en se contractant, hérissent le poil. La « chair de poule » n’est ni
plus ni moins que la résultante de la contraction simultanée de tous ces muscles.
Les glandes cutanées sont au nombre de deux (voir - Figure 1) :
-
les glandes sébacées sont disséminées sur toute la peau. Généralement appendues aux
follicules pileux, elles sécrètent un liquide graisseux (le sébum) qui s’écoule depuis la base
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du poil vers la surface de la peau. Ce lubrifiant, réparti de façon homogène, protège
l’épiderme et renforce son rôle imperméabilisant vis-à-vis de l’eau.
-
les glandes sudoripares, de forme tubulaire pelotonnée dans leur partie profonde,
produisent la sueur, dont le rôle est de contribuer au refroidissement ou rafraichissement
du corps. Seuls les mamelons, glands pénien et clitoridien et petites lèvres en sont
dépourvus.
L’ongle est une lame cornée et élastique recouvrant la face dorsale de l’extrémité distale des doigts
et des orteils. Du point de vue morphologique, l’ongle présente une partie visible légèrement
translucide sinon blanchâtre, le corps, et une seconde cachée, la racine (voir - Figure 3). Du point
de vue structurel, 2 couches distinctes sont décrites :
-
le stratum corneum, superficiel, constitué de plusieurs strates cellulaires et
-
le stratum germinatif, profond, contigu et analogue au stratum basal de l’épiderme
adjacent.
La croissance de l’ongle est ininterrompue de la vie fœtale jusqu’à la mort.
Figure 3 : Vue dorsale (à gauche) et coupe longitudinale (à droite) d’une phalange distale.
Remarque : Les bourses synoviales appartiennent également aux annexes de la peau. Il s’agit de
petits sacs liquidiens sous-cutanés situés en regard de certaines articulations (coude, genou) pour
faciliter le glissement de la peau au cours des mouvements.
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3- Physiologie :
La peau est un organe aux fonctions diverses, dont certaines ont déjà été évoquées plus haut ;
pour rappels, la peau est un organe :
-
protecteur (physique, chimique et biologique – voir Tableau I),
-
thermorégulateur,
-
sensoriel (tact, pression, vibration, douleur, chaleur) et
-
métabolique (synthèse organique).
Protection contre les agressions
Mécaniques
Caloriques
Chimiques
Solaires / UV
++++
0
+++
++++
+++
+++
0
0
+
+++
0
0
Epiderme
Derme
Hypoderme
Tableau I : Rôle des principales structures de la peau.
A ce titre, il est essentiel de revenir sur la synthèse de certaines molécules (mélanine, carotène,
vitamine D) sans négliger les mécanismes de l’inflammation et de la cicatrisation ou les
phénomènes d’allergie.
a. Synthèses organiques :
a.1 La mélanine :
La mélanine, synthétisée à partir d’un acide aminé soufré (la tyrosine) par les mélanocytes
(cellules de la couche germinative ou stratum basal de l’épiderme), est un pigment de couleur
foncée allant du brun roussâtre au noir. L’exposition au soleil ou aux rayons ultraviolets stimule
l’activité des mélanocytes, dont la production accrue de pigments engendre le bronzage (=
mécanisme de défense de l’organisme). Les taches de rousseur ou lentigo et grains de beauté sont
produites par l’accumulation de cette protéine ou d’une substance un peu différente (la
phéomélanine, de couleur rouge ou jaune). La mélanine est présente en d’autant plus grande
quantité que la peau est foncée.
a.2 Le carotène :
Le carotène, ou plus exactement β carotène, est un pigment (dont les nuances s’échelonnent du
jaune à l’oranger) très répandu dans la nature et particulièrement abondant dans certains aliments
d’origine végétale (carotte, potirons, abricot, orange…) ou animale (jaune d’œuf). Chez l’homme, il
favorise la croissance des cellules cutanées, contribue entre autre à préserver la peau des
agressions du soleil et des risques infectieux, prévient également du vieillissement cutané et est
impliqué dans les processus de cicatrisation et d’inflammation compte tenu de ses propriétés antioxydantes. Sa carence se manifeste par un dessèchement de la peau avec atrophie des glandes
sébacées et sudoripares et un épaississement de la couche cornée de la peau (hyperkératose)
donnant à celle-ci un aspect rugueux.
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a.3 La vitamine D :
La vitamine D, dite « vitamine antirachitique » ou plus exactement vitamine D3 ou cholécalciférol,
est une substance organique liposoluble (= qui se dissout dans les graisses) synthétisée dans le
derme à partir d'un dérivé du cholestérol sous l'action des rayonnements ultraviolets B de la
lumière. La vitamine D3 a un rôle métabolique fondamental puisqu’elle:
-
facilite l'absorption intestinale du calcium et du phosphore,
-
renforce la fixation du calcium sur les os (et des dents), et par conséquence, contribue à
leur formation, croissance et renouvellement toute la vie durant, et plus spécifiquement
pendant la période de grossesse et d’allaitement,
-
régule l’équilibre phosphocalcique par réabsorption et excrétion rénale, et
-
contribue au bon fonctionnement neuromusculaire, et
-
concourt à la coagulation sanguine.
Remarque : d’aucuns considèrent que 30 minutes d’exposition quotidienne au soleil permettent la
synthèse cutanée de près de 90% des apports journaliers recommandés en vitamine D3. Les
besoins en vitamine D3 sont néanmoins difficiles à estimer car ils varient corrélativement aux
degrés d'exposition au soleil ou de pigmentation de la peau. Ils sont théoriquement nuls si
l'exposition du corps à la lumière du jour est suffisante.
b. L’inflammation :
L’inflammation est décrite comme étant l’ensemble des phénomènes réactionnels consécutifs à une
agression de tout ou partie de l’organisme par un agent pathogène. En d’autres termes,
l’inflammation est un mécanisme de défense de l’organisme (impliquée tant dans les mécanismes
de la cicatrisation que dans les réactions d’allergie). Celle-ci ne peut se dérouler que dans un tissu
vascularisé. Cliniquement, elle se traduit ordinairement par 4 symptômes que sont douleur,
rougeur, chaleur et tuméfaction.
Les causes de l’inflammation peuvent être exogènes (physiques, chimiques, virales, infectieuses)
ou endogènes (trophiques, dégénératives, immunologiques, métaboliques) à titre d’exemple.
L’inflammation comporte invariablement des phénomènes vasomoteurs (rougeur, œdème), puis
cellulaires (réactions et migration des globules blancs) et enfin tissulaires (organisation,
prolifération des fibroblastes, cicatrisation). En outre, elle met en jeu des phénomènes
biochimiques que nous n’aborderons pas dans ce chapitre.
La première phase du processus inflammatoire (ou phase exsudative : voir paragraphe 3-c.1)
consiste à isoler, capturer et/ou éliminer d’emblée l’agent pathogène responsable de la
mortification cellulaire ou tissulaire, et ce, concomitamment à la congestion locale des capillaires
sanguins. Celle-ci se traduit
-
par une vasoconstriction rapide (= diminution du calibre) des vaisseaux sanguins pour
favoriser l’hémostase, puis
-
par une vasodilatation dont la conséquence est une diminution du débit sanguin.
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Ce ralentissement du courant circulatoire favorise la diapédèse, c’est-à-dire la mobilisation et la
migration spécifique des globules blancs (les leucocytes), par chimiotactisme (= attraction
chimique), à travers les parois vasculaires et en direction du foyer lésionnel. Parmi ces leucocytes,
-
les polynucléaires : au même titre que les macrophages, ils ont un rôle d’ingestion et de
digestion (= phagocytose) de l’agent pathogène et des débris cellulaires, quels qu’ils
soient, et
-
les lymphocytes et plasmocytes : ils participent à la réponse immune, spécifique de
l'antigène (= substance étrangère à l’organisme et reconnue comme telle).
Remarque : Les agents chimiotactiques sont des molécules produites par les tissus altérés, les
bactéries et par les leucocytes déjà présents dans le foyer inflammatoire.
En fait, le foyer inflammatoire s'enrichit rapidement en cellules provenant du sang mais également
du tissu conjonctif local (fibroblastes, cellules endothéliales, mastocytes et macrophages résidents)
qui vont, pour certaines, se multiplier (fibroblastes, lymphocytes, cellules endothéliales, et à un
moindre degré macrophages) et d’autres, se transformer ou se différencier.
L'évolution du processus inflammatoire se fait souvent vers une cicatrisation complète, sans
séquelle, c'est-à-dire avec restitution ad integrum des tissus préexistants.
c. La cicatrisation :
Lorsque la continuité de l’enveloppe cutanée est rompue, en cas de coupure ou de brûlure par
exemple, la peau est alors en mesure de pallier, seule, ces lésions localisées au moyen de
processus de réparation et de régénération qui lui sont propres ; ce phénomène biologique naturel,
appelé cicatrisation, reste toutefois soumis à de nombreux facteurs. En l’occurrence, la rapidité et
la qualité de la cicatrisation d'une plaie dépendent :
-
de l'état général du sujet lui-même,
-
de l'étiologie de la lésion (c’est-à-dire de son origine : traumatique, inflammatoire,
infectieuse, allergique, tumorale, parasitaire, voire iatrogène ou thérapeutique, … sinon
inconnue, à titre d’exemple),
-
de la profondeur et de la localisation de la plaie, ainsi que
-
de la survenue simultanée ou non d'une infection.
Remarque : dans des conditions normales de cicatrisation, une plaie superficielle est résorbée sous
huitaine. Il n’y a cependant pas de règle générale concernant la qualité ou la rapidité de
cicatrisation compte tenu de l’ensemble des facteurs énoncés plus haut. Ainsi, la guérison sera
d’autant plus :
-
efficiente que les bords (berges ou lèvres) de la plaie sont nets, contigus et propres, en
l’absence de perte tissulaire significative ou de tout corps étranger,
-
compromise en cas d’infection, œdème, hématome, troubles de la circulation, malnutrition,
carences, ou de présence de débris dans la lésion. Il convient également de citer ici
certains médicaments tels que les anticoagulants (les plus connus étant l'héparine et ses
dérivés et les anti-vitamines K).
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La cicatrisation d'une plaie se déroule en trois étapes. Chacune de ces phases est caractérisée par
des activités cellulaires déterminées (spécifiques, interdépendantes et ordonnées) de durée et
d’intensité variables.
c.1 Phase exsudative ou phase de détersion :
Quelle que soit la plaie, la cicatrisation commence systématiquement et dans les meilleurs délais
par :
-
une vasoconstriction rapide des vaisseaux sanguins par contraction de leurs fibres
musculaires,
-
l’extravasation (= libération) d’éléments sanguins, notamment
les plaquettes, qui
s’agrègent et adhèrent à la paroi vasculaire pour former le caillot,
-
l'apparition de phénomènes inflammatoires précoces qui déclenchent la migration et
l’activation de différentes cellules de défense de l’organisme (les globules blancs) sur le site
de la lésion.
Parmi ces cellules, les granulocytes et les macrophages ont une fonction détersive (ou détergente)
non spécifique, et les lymphocytes, une action anti-infectieuse.
Cette phase permet donc la coagulation du sang, l’élimination des débris tissulaires, la lutte antiinfectieuse et finalement la stimulation des fibroblastes (cellules du derme responsables de la
reconstruction) par les macrophages, ce qui marque le passage à la phase de granulation.
Remarque : Comme indiqué plus haut, les signes cliniques de l’inflammation sont le gonflement, la
rougeur, la douleur, et la chaleur.
c.2 Phase de prolifération ou phase de granulation :
Les fibroblastes évoqués plus haut infiltrent, c’est-à-dire pénètrent, la matrice provisoire formée
par le caillot et la transforment en un « gel » filamenteux riche en protéines de soutien (comme le
collagène et la fibronectine) et en sucres (tel que l’acide hyaluronique). Dans le même temps, de
nouveaux petits vaisseaux capillaires apparaissent (c’est la néoangiogénèse) et progressent dans
cette matrice pour assurer la nutrition du tissu nouvellement formé à partir des cellules du derme.
Ceux-ci présentent, à la surface de la plaie, un aspect de granulation rouge vif. Grâce à ce
mécanisme, le tissu manquant est remplacé progressivement.
Remarque : Les signes cliniques de la granulation sont la diminution rapide et progressive du
gonflement, de la rougeur et de la douleur. Au cours de cette phase, qui dure approximativement 4
jours, le tissu de granulation voit sa couleur passer du rouge vif au rose.
c.3 Phase d’épithélialisation :
Elle débute par la migration centripète (vers le centre) des kératinocytes (cellules du stratum basal
de l’épiderme) à partir des berges de la plaie. Simultanément, la plaie se rétracte sous l’action des
myofibroblastes, des cellules spécifiques, moitié cellule musculaire, moitié fibroblaste.
La
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prolifération des kératinocytes forme alors une couche basale d’épithélialisation qui finit par
recouvrir intégralement la surface libre de la blessure. La formation d’une multicouche, la
différenciation des kératinocytes et la colonisation de l’épiderme par les mélanocytes et les cellules
de Langerhans restituent à la peau son aspect originel et ses caractéristiques habituelles.
Remarque : Le remodelage est un processus qui peut s’échelonner de 6 à 10 jours dans des
conditions normales de cicatrisation, à plusieurs mois chez certains sujets (escarres, ulcères de
jambes). Lorsqu’une blessure est circonscrite aux couches les plus superficielles de la peau
(épiderme), cette lésion, appelée érosion, peut guérir sans laisser la moindre marque. A l’opposé,
si la plaie est plus profonde et atteint le derme, la guérison s'accompagne habituellement d'une
cicatrice fibreuse, les cellules cutanées détruites ayant été remplacées par du tissu conjonctif. La
qualité du tissu cicatriciel est jugée à son aspect, sa couleur, son élasticité et sa résistance, voire
sa pilosité.
d. L’allergie :
L’allergie désigne toute manifestation pathologique (= réaction anormale excessive) de l’organisme
provoquée par une substance exogène (= l’allergène) à laquelle il est/devient particulièrement
sensible.
Schématiquement, l’enveloppe cutanée et les muqueuses (= tissu épithélial humide tapissant
certains conduits ou orifices de l’organisme) respectivement protègent le corps du milieu extérieur.
La réaction allergique (de siège cutané, respiratoire ou digestif entre autres) ne survient qu’en cas
de rupture de cette barrière physiologique ; la rupture de l’immunité dite « passive » peut
provoquer, selon les situations, diverses réponses que sont les réactions :
-
immédiates,
-
cytotoxiques,
-
immunes complexes, et
-
retardées.
Compte tenu du fait qu’elles sont les plus fréquemment observées, nous n’aborderons dans ce
chapitre que les réactions allergiques immédiates et retardées, les autres formes étant très
certainement mésestimées.
d.1 L’allergie immédiate :
L'allergie immédiate fait appel à une réponse physiologique en deux étapes :
-
la phase de sensibilisation : elle correspond au premier contact de l'allergène avec les
cellules du système immunitaire. L’allergène, qui est au demeurant une molécule dont
certaines séquences protéiques (les antigènes) indiquent à l’organisme son origine
exogène, est reconnue en tant que tel par les cellules du système immunitaire (les
lymphocytes B) et induit la production d’anticorps typiques (= Ig E) de la part de ces
dernières. Les Ig E ainsi synthétisées sont alors dispersées dans tout l’organisme au moyen
de la circulation sanguine et se fixent sur deux types de cellules en particulier : les
mastocytes (cutanés et muqueux) et les basophiles (circulants).
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Remarque : cette phase peut durer de quelques jours à plusieurs années.
-
la phase de déclenchement : elle correspond au second contact avec l’allergène ; celuici, en étant capté par les Ig E présentes à la surface des mastocytes et des basophiles,
induit
la synthèse
et
la libération de
molécules
extrêmement délétères et pro-
inflammatoires (telle que l’histamine) responsables de la plupart des symptômes de
l’allergie, qui attirent des globules blancs (les polynucléaires éosinophiles – voir paragraphe
3-b) en masse dans le tissu lésé et les activent. Cette réponse physiologique « en
cascade », douée d’auto-amplification et d’auto-entretien, est responsable de la réaction
d'hypersensibilité.
d.2 L’allergie retardée :
Contrairement
à
l’allergie
immédiate,
elle
ne
repose
aucunement
sur
le
complexe
antigène/anticorps mais fait appel à une réponse cellulaire séquentielle. Traitons cette dernière au
travers d’un exemple : un produit chimique quelconque est appliqué sur la peau.
-
premier contact avec l’allergène : celui-ci est immédiatement capté par les cellules de
l’épiderme et plus particulièrement par les cellules de Langerhans, lesquelles migrent à
travers la peau en direction des ganglions lymphatiques satellites (= locaux) où elles
présentent l’allergène aux cellules du système immunitaire, les lymphocytes T. Une fois la
reconnaissance de l’allergène établie débute la production massive de lymphocytes T
spécifiques appelés cellules mémoires, qui vont coloniser les différents ganglions de
l'organisme, circulant de l’un à l’autre dans un état de veille. Le sujet est désormais
sensibilisé.
-
deuxième exposition épidermique : kératinocytes, macrophages et cellules de Langerhans
fixent à nouveau l’allergène : la présentation de ce dernier aux cellules mémoires induit
leur multiplication et leur activation (production de médiateurs inflammatoires). Des
lymphocytes T spécifiques et aspécifiques affluent en masse sur la zone concernée (=
infiltration) pour tenter d’éliminer l’agent pathogène. Apparaissent alors un œdème, une
vasodilatation des capillaires et des lésions vésiculeuses intradermiques locales, en général
sous 48 à 72 heures. C’est ce laps de temps qui caractérise l’allergie retardée.
Remarque : De nombreux facteurs concourent à la sensibilisation de l’organisme par l’allergène,
notamment la température, l’humidité, la prédisposition héréditaire et les irritations cutanées
(antécédentes ou concomitantes).
4- Pathologies :
La partie de la Médecine qui étudie et traite les maladies de la peau, des muqueuses voisines et
des phanères est la dermatologie.
Parmi toutes les affections cutanées existantes (ou dermatoses), nous n’aborderons que celles qui
vous concernent et vous ont amené(e)s à consulter ces pages, à savoir les dermatites:
-
de contact allergique (ou eczéma de contact allergique),
-
de contact irritant… entre autres.
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Ces dermatoses peuvent trouver leur origine dans un contexte professionnel ou être aggravées par
l’exercice même de cette activité.
Remarque : D’aucuns estiment qu’elles représentent approximativement un tiers des maladies
professionnelles (en Europe et Amérique du Nord) et près de 10% des consultations dans les
services/cabinets de dermatologie.
a. La dermatite de contact irritant (DCI) :
Parmi les dermatites de contact, la DCI est la forme la plus courante, bien qu’elle passe souvent
inaperçue. Elle est habituellement considérée comme étant une réaction non immunologique et non
spécifique de la peau à un agent irritant, après un ou plusieurs contacts directs et ce,
indépendamment de toute prédisposition individuelle. Ainsi, lorsque l’irritation, quelle qu’elle soit,
provoque des dommages épidermiques, les mécanismes naturels de défense immunitaire
aspécifiques entrent en jeu et induisent une inflammation au niveau du tissu lésé. Cette réponse de
l’organisme à un élément préjudiciable conduit à la guérison mais ne lui confère cependant pas une
protection de longue durée.
Différents types de DCI peuvent être décrits, corrélativement:
-
aux caractéristiques intrinsèques (physiques, chimiques ou organiques…) de l’irritant luimême,
-
aux facteurs externes, favorisants ou aggravants qui en sont la cause (concentration,
fréquence, température, humidité, occlusion…),
-
à la nature de l’activité (atteinte individuelle ou collective),
-
à la zone cutanée incriminée et
-
au sujet lui-même (état de la peau, antécédents, sexe, âge…).
a.1 Etiologie :
L’étiologie est l’étude ou la recherche des causes d’une maladie dont le diagnostic repose sur une
anamnèse (= interrogatoire) particulièrement rigoureuse. Ainsi, il convient d’insister sur les
antécédents personnels, la date et les circonstances de survenue de la lésion, l’aspect initial de
cette dernière, sa topographie, son évolution spontanée (résorption, aggravation), le traitement
entrepris et ses conséquences. Il est en outre capital d’examiner tout le tégument, la découverte
d’autres affections, parfois plus spécifiques, contribuant à préciser le diagnostic.
En l’occurrence, dans le cadre des DCI, il apparaît que les atteintes et microtraumatismes cutanés
résultent pratiquement toujours :
-
d’une action mécanique sur la peau (frottements, pression, vibrations, pénétration itérative
ou non de corps étrangers),
-
d’une exposition chronique à la chaleur (associée à une forte transpiration), au froid, au
vent et/ou à l’humidité,
-
d’une exposition fréquente à certains spectres lumineux ou aux radiations ionisantes,
-
de la projection accidentelle de produits chimiques corrosifs (comme l’acide chlorhydrique,
l’acide sulfurique, la soude, la potasse ou l’ammoniaque à titre d’exemple),
13
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-
de l’utilisation régulière de savons, parfums, cosmétiques, détergents, désinfectants,
solvants, huiles de coupe, voire
-
de la présence d’agents microbiens (bactéries, virus) ou animaux (acariens, cercaires).
Reste qu’un autre aspect, plus subjectif, doit également être mis en avant : il s’agit de l’irritation
sensorielle, qui se manifeste sous forme de sensation d’urticaire, brûlure ou démangeaison, en
l’absence de tout signe clinique ou histologique ostentatoire et dont le seuil d’apparition varie d’un
sujet à l’autre.
a.2 Aspects cliniques :
Les symptômes différent selon d’un stade à l’autre.
Le stade aigu, comme son nom l’indique, est inhérent à une exposition unique à l’agent irritant
(égratignure, griffure, coupure, piqûre, brûlure, agression chimique ou organique…). Il se distingue
par le développement de macules ou de placards érythémateux (= taches rouge vif de dimension
variable à surface granitée), prurigineux (= qui démangent), voire brûlants, d’où se détachent
parfois des squames (lamelles épidermiques) et circonscrits de façon très précise à la région
accidentée. L’examen de cette dernière révèle parfois un soulèvement localisé de l’épiderme
consécutivement à la présence de « petites billes » solides (les papules) ou liquides (les vésicules)
dans la couche superficielle du derme. Celles-ci sont amenées à disparaître graduellement. En fait,
lorsque les vésicules éclatent, elles libèrent une sérosité qui suinte à la surface de la peau et
aboutit à la formation de croûtes, laquelle précède la guérison des lésions nécrotiques sans laisser
de cicatrice.
Quoiqu’il en soit, dans tous les cas, la DCI est restreinte aux lieux du traumatisme et son pronostic
est habituellement favorable. Les irritations cutanées légères et de relativement courte durée ne
laissent aucune marque significative, les lésions de la couche cornée de l’épiderme étant
rapidement comblées.
A l’opposé, si le contact avec l’agent irritant perdure et ne permet pas à la peau de cicatriser, la
DCI évolue vers une conformation persistante ou chronique (dite également cumulative). La
dermatose d’usure correspond à la forme de DCI dont le nombre de cas déclarés est en constante
évolution. Dans ce cas, c’est la nature répétitive du contact avec l’agent irritant (pourtant incapable
isolément de provoquer la moindre altération) qui conduit à la longue à l’épuisement des capacités
régénératrices de la peau, lequel se manifeste par l’apparition d’érosion et de rhagades (=
crevasses) entre autres.
La DCI chronique a pour symptômes des placards érythémateux vaguement prurigineux, une
sécheresse excessive de la peau avec une fine desquamation, une rugosité marquée des lésions
avec présence de crevasses profondes et douloureuses, voire une hyperkératose réactionnelle ou
une acanthose (= épaississements cutanés localisés dus à la multiplication aberrante de certaines
cellules), quand ce n’est une pulpite avec disparition des empreintes digitales (voir – Figure 4).
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En résumé, il importe de retenir que les symptômes de la DCI persistante ne surviennent pas
immédiatement après le premier contact mais consécutivement à maintes expositions et qu’ils ne
sont que l’expression d’une inflammation chronique non spécifique, en l’absence de tout processus
allergique.
Figure 4 : Phase érythémato-squameuse d’une dermatite irritative chronique.
Remarque : Des complications peuvent toutefois survenir, comme l’apparition d’un eczéma de
contact allergique suite à une pénétration plus aisée des allergènes vers le derme, ou une
surinfection microbienne ou mycosique puisque les récidives d’eczéma et le passage à la chronicité
fragilisent la peau et la rendent plus sensibles aux traumatismes physiques et chimiques.
a.3 Traitement :
Il consiste en l’application strictement locale de crèmes de soin, d’onguents ou de corticoïdes en
relation avec le degré d’inflammation des lésions et de sécheresse de la peau.
b. La dermatite de contact allergique (DCA) :
La DCA est une réaction immunologique cellulaire, spécifique, adaptative, fondée sur une
sensibilisation préalable de l’organisme ; la sensibilisation de la peau provient de contacts répétés
avec certaines substances exogènes (les antigènes) qui parviennent à pénétrer l’épiderme et
acquièrent des propriétés allergisantes une fois combinées avec les protéines cutanées (voir
paragraphe 3-d). Les allergènes sont le plus souvent des composés chimiques actifs (de faible
poids moléculaire), qui, lors du contact avec les lymphocytes T sensibilisés (cellules mémoires)
provoquent une réaction eczémateuse allergique après quelques heures ou quelques jours
(réaction tardive : 12 à 48 heures après l’utilisation du produit suspect).
b.1 Etiologie :
La DCA survient à la suite de contacts itératifs du sujet avec des substances potentiellement
allergisantes. Plusieurs facteurs peuvent contribuer à la sensibilisation par l’allergène notamment
sa nature, sa source, la durée et la fréquence de l’exposition, la surface épidermique concernée,
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l’augmentation de la température, l’humidité, les prédispositions individuelles, et les irritations
cutanées précédentes ou concomitantes.
b.2 Aspects cliniques :
La DCA se caractérise histologiquement par une spongiose épidermique (= œdème péri-cellulaire)
dont les symptômes différent d’un stade à l’autre (aigu, sec ou lichénifié).
L’eczéma aigu révèle des placards érythémateux congestifs, à bords émiettés et mal délimités, et
parsemés de nombreuses vésicules de petite taille ; ces dernières laissent sourdre un liquide
séreux plus ou moins abondant, qui en séchant, forme des croûtes. Les érosions créées par la
rupture des vésicules peuvent confluer en de vastes nappes dénudées.
Remarque : Au stade subaigu, les papules prédominent, les lésions s’assèchent peu à peu et les
érythèmes sont habituellement recouverts de squames et de petites croûtes.
L’eczéma sec présente apparemment les mêmes signes cliniques, à l’exception des vésicules,
quasiment absentes dans ce cas.
L’évolution vers la chronicité traduit l’incapacité de l’organisme à lutter efficacement contre
l’allergène : elle se manifeste par l’apparition de placards grisâtres, violacés ou rose pâle assez
bien circonscrits, d’aspect grossier (lichénification), secs et prurigineux. Le tégument est épaissi,
infiltré, strié (car sillonné par un quadrillage dû à un grattage intense), voire parcouru de crevasses
douloureuses plus ou moins profondes (voir – Figure 5).
Reste qu’à tout moment, l’eczéma peut se surinfecter : le suintement change d’aspect et devient
purulent alors que les croutes qui recouvrent les placards érythémateux s’épaississent et
jaunissent. Cette métamorphose définit l’eczéma impétigineux.
Figure 5 : Eczéma de contact allergique des mains kératinosique et fissulaire (à gauche) et
impétigineux (à droite).
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Remarque : Lorsque le sujet est particulièrement sensible à l’allergène, des foyers de dissémination
peuvent apparaître à distance du foyer originel. A la réponse immunitaire orchestrée par les
lymphocytes T s’ajoute celle initiée par les lymphocytes B : l’antigène résorbé est alors transporté
par voie lymphatique ou sanguine dans des territoires cutanés plus ou moins éloignés où il
déclenche une réaction antigène/anticorps.
b.3 Traitement :
Il repose sur un diagnostic différentiel qui consiste à identifier l’allergène au moyen d’une enquête
souvent longue et de tests épicutanés ciblés.
L’enquête a pour but de recueillir des informations essentielles à la prise en charge du sujet
[antécédents personnels d’eczéma de contact, date et circonstances de survenue de la lésion,
aspect initial de cette dernière, topographie, évolution spontanée vers la résorption ou
l’aggravation, chronologie des poussées, activités professionnelles et de loisir, matériels ou
produits utilisés, contexte environnemental, changements d’occupation, habillement, utilisation de
topiques (= médicaments agissant localement) pour traiter l’eczéma lors de son apparition]. La
coopération du médecin du travail est souvent nécessaire pour mieux appréhender les risques réels
auxquels est exposé le salarié (visite du lieu de travail).
Les tests épicutanés ont pour but d’isoler le ou les allergènes incriminés expérimentalement, c’està-dire en collant sur la peau des timbres imprégnés avec lesdites substances, à une concentration
normale. Les timbres sont retirés après 48 heures d’application et la réaction cutanée à l’antigène
est évaluée à l’aide d’une grille de lecture parfaitement codifiée, à la 10 ème minute, puis à la 72ème
heure, voire à la 96ème heure. Le test est positif lorsqu’apparaît un eczéma miniature sous la
forme :
-
d’un simple érythème dans sa configuration la plus modeste (+) sinon
-
d’un érythème infiltré vésiculo-bulleux en cas d’hypersensibilité (++++).
Ces tests sont nécessaires pour objectiver une hypersensibilité de type retardé à un allergène
déterminé et d’établir si l’épiderme contient des anticorps spécifiques. Ils permettent également
d’identifier les poly-sensibilisations fréquentes chez les sujets présentant des lésions chroniques.
Leur négativité est l’un des critères diagnostiques d’une DCI.
Le traitement des eczémas de contact allergique repose systématiquement (sinon en priorité) sur
l’éviction des allergènes responsables. Seules l’éradication de ces substances nocives et la
corticothérapie locale concourent à guérir rapidement la DCA, sous réserve :
-
que l’allergène ait pu être identifié et éliminé (cela passe parfois par le respect de règles
strictes
d’hygiène
et
de
protection,
un
changement
radical
d’activité,
voire
une
réorientation professionnelle), et
-
que la zone cutanée nécrosée ne soit pas infectée (la prescription simultanée d’une
antibiothérapie par voie orale contraint à espacer les applications de topiques et retarde
d’autant la convalescence).
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Remarque : La corticothérapie n’est que suspensive si le contact avec l’allergène persiste. Par
ailleurs, dans le cadre de l’activité professionnelle, la DCA peut faire l’objet d’une déclaration de
maladie professionnelle ou d’accident du travail. Charge au corps médical de reconnaître l’existence
d’une exposition professionnelle et d’évaluer si cette dernière représente une cause ou un facteur
aggravant. L’argument essentiel en faveur d’une DCA d’origine professionnelle est la positivité des
tests épicutanés à une substance retrouvée dans l’environnement professionnel, mais testée à une
concentration non irritante.
b.4 Tableau II - Critères distinctifs entre DCI et DCA :
Circonstances
DCI
DCA
Immédiate, après 1er contact
Retardée (après 48 heures)
consécutivement à une
d’apparition
seconde exposition
Mécanismes
Non allergique
Allergique
Réponse immunitaire
Non spécifique
Spécifique à l’antigène
Lymphocytes B, mastocytes,
Cellules de Langerhans,
basophiles, polynucléaires
Lymphocytes T, macrophages
Sanguine
Lymphatique et sanguine
Sensation de brûlure
Prurit / démangeaison
Plaques érythémateuses ou
Œdème important, éruption
érythémato-squameuses
vésiculeuse et suintante
rarement vésiculeuse,
(eczéma aigu) ou sèche
crevasses fréquentes
(eczéma chronique),
Cellules impliquées
Voie empruntée
Symptômes subjectifs
Aspects cliniques
épaississement de la peau
Contours de la lésion
Nets, circonscrits à la zone de
Emiettés, débordant au-delà
contact
du point d’impact
Rouge vif
Rose pâle à grisâtre
Jamais
Possible, avec apparition de
Couleur de la plaie
Dissémination
lésions à distance
Tests épicutanés
Epidémiologie
Négatifs
Positifs
Atteinte individuelle
Atteinte collective
Remarque : Au niveau des mains, seul un examen dermatologique rigoureux permet de discriminer
DCI,
DCA,
dermatite
hyperkératosique
palmaire,
psoriasis,
dermatite
atopique,
eczéma
nummulaire, pulpite idiopathique, dysidrose, ou encore mycose cutanée.
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