Vousavezditaccompagner? Mots-clés:accompagnement,coaching,tutorat,compagnonnage,postures d’accompagnement,professionnalité,formation,accompagnementVAE RÉSUMÉ: L’accompagnementestunmot«valise»,déclinédemultiplefaçonsetdansdenombreuses activités,maissouventsansenconnaîtrelesfondementsdebase.Ildemeuretrèsutiliséen formationetilsemblenécessairedechercheràledéfinir. Une approche étymologique s’impose pour en extraire les postures fondatrices (initiation, quêtedusens,médiation).Ilfautégalementenchercherlescausesprofondesetenmontrer les intérêts pour mieux le définir par la suite ; autour d’un triptyque de postures voisines : « conduire/guider/escorter ». Cependant, les logiques de ces postures peuvent différencier suivantlerôledel’accompagnement,cequinécessitedesepenchersurquelquespostures spécifiquesdesaccompagnateursetdetracerlescontoursdel’accompagnement,entermes de types d’intervention (conseil, tutorat, médiation, coaching, compagnonnage…). Enfin, il peutsemblerintéressantderéaliserunfocussurl’accompagnementenformation.L’étudede l’accompagnementpassenécessairementparuneanalysedel’éthiquedel’accompagnement, quisous-tenduneprofessionnalisationdesacteursdel’accompagnement.Cemouvementse réaliseautourdeladimension«projet»,omniprésenteetfondamentalepourl’accompagné. Danslemondedelaformationetdumanagement,rarementunmotn’aétéaussiutilisé…de manièredifférenteetsansvéritablerecherchededéfinition.Pourcertainsspécialistes,ilest mêmeunterme«irritant»(Paul,2009),véritablefourre-toutauxcontoursflous.Cependant, il demeure incontournable dans le management et se décline de nombreuses manières : accompagnement de la performance, du changement, des salariés, des dirigeants… On mélange alors des postures d’action ou de remédiation mais aussi des fonctions (chargé d’accompagnement…). Le référentiel du professorat l’intègre comme compétence centrale («accompagnerlesélèvesdansleurparcoursdeformation»),tandisqueceluideconseiller principald’éducationledéclineplusspécifiquement(«accompagnerleparcoursdel’élèvesur lesplanspédagogiqueetéducatif»et«accompagnerlesélèvesdansleurformationàune citoyennetéparticipative»).Lecoachings’estégalementemparédutermedansplusieursde sesdéfinitions;ilestvucomme«unprocessusd’accompagnementdestinéàfavoriserun environnement de croissance et d’optimisation du potentiel de la personne » en situation professionnelle (Angel, Amar, 2005). De manière générale, Le terme concernerait les « travailleurs surautrui » (Dubet, 2002) maisgénèrerait de multiplessituations complexes (parce qu’humaines avant tout), tant pour les accompagnants que pour les accompagnés (Beauvais,2004). Il porte lui-même des sens différents et des formes multiples. Si ces fondementssontrelativementstablesdansletemps,l’évolutiondelasociétéaentrainéune diversificationetunfoisonnementdespratiquesd’accompagnement. Auxconfinsdedeuxtendanceslourdesdelasociété:lapertedelienssociauxetlanécessité deperformertoujoursplus;l’accompagnementdevientunenécessité.Longtempsabsente desdictionnaires,lafonctiond’accompagnementsembleseprécisermêmesidesdifférences de sens et de pratiques persistent. Dans une société marquée par une tendance à la désaffiliation,l’accompagnementpeut-ilpermettrela«reconnexion»voirelareconstruction deliensforts?Devantl’importancedespromessesmaisaussilamultiplicationdespratiques, ne faut-il pas « poser » le cadre de l’accompagnement pour en éviter les dérives ? Les professionnelsdu«care»(métiersdelapersonne)connaissentcesposturesmaispeuvent difficilementlesdéfinir.Untravaildereconceptualisationpeutalorsparaîtrenécessaire,sans oublier«d’où»vientl’accompagnement;leretourétymologiquepeutnousapporterpour comprendresonévolution. Ilseraitdoncintéressantdecernerlesfondementsdel’accompagnement,àtraversundétour étymologiqueetaussiconceptuel(1),pourévoqueretclarifierquelques«fondamentaux» deposturesetpratiquesd’accompagnement(2). 1. Etymologiedel’accompagnement:entresensprofondetconcept L’accompagnementatoujoursexistéetilestétudiédepuistrèslongtemps,enparticulierà travers les philosophes grecs et romains. Cette plongée dans les origines nous permet de rechercherlesensprofondduterme,pourmieuxencernerlesfondements.Letravailsurles mythespermetuneapprochesymboliqueetsignificative. 1.1 Figuresétymologiques:l’accompagnementvientdelanuitdestemps De nombreux écrits mythiques pourraient être convoqués ; il s’agit de se focaliser sur les principaux.MaelaPaulaentreprisdemettreenrelationles3registresdel’accompagnement (escorter/guider/conduire) avec trois auteurs majeurs (Homère/Socrate/Hippocrate). Elle constituetroiscorpuscorrespondants:l’initiatiqueavecHomère,lamaïeutiqueavecSocrate etlathérapieavecHippocrate(Paul,2014).Ons’intéresseraplusspécifiquementauxdeux premierscorpus,enparticulieràtraversl’initiation,laguidanceetlamaïeutique. 1.1.1 Lecompagnonnage(Homère):initiateuretéducateur Lepremiersensdel’accompagnementestaussileplusévident,c’estlecheminementavec quelqu’un.Maiscequelqu’unn’estpasn’importequi.C’estlecôtéinitiatiquequiressortdans cetaccompagnement.L’errancequiadusensrenvoieàlafiguredupoèteerrant,multipliant les rencontres et transmettant un message. La culture grecque renvoie également à l’éducationdujeuneparunaînéetc’estlàquel’accompagnementpeutprendreàlafoisson senssymboliquemaisaussiunepremièreacceptationpratique.Levoyageencompagniede l’initiateurpermetd’apprendreetlejeuneentretientunerelationspirituelleavecsonaîné. Onretrouvecetteapprochedanslecompagnonnage.L’associationouvrièredescompagnons dudevoiretduTourdeFrance,proposeunepédagogiedel’accompagnement,àtraversun voyageoùlejeuneouvriervadonnerdusensàsonpropreapprentissage. . Source:extraitdusitehttp://www.compagnons-du-devoir.com Lejeuneapprentidevient«aspirant»lorsqu’ilentamesonTourdeFranceetvas’attelerà concevoirun«chefd’œuvrederéception».Latransmissiondusavoir-faireparlecompagnon, véritableinitiateur,donnedusensàcetaccompagnement,autourdudevoir(j’aireçuetc’est à moi de transmettre). Le lien avec la formation et l’éducation semble évident ; plusieurs auteursderéférenceensciencesdel’éducationl’ontévoqué(Meirieu,DePeretti).Patrick Robo présente la formation accompagnante comme favorisant la transmission mais aussi l’assimilation, la mutualisation et l’humanisme. Il fait largement référence au tutorat mais aussiauxgroupesdepratiquesentrepairs(Robo,2001).L’Iliadeetl’Odysséereprésententdes aventures, quêtes de renommée mais aussi recherche de l’autre et d’ailleurs. Ainsi la démarche initiatique représente-t-elle une véritable quête de sens. Sa finalité est double : introduirelenovicedanslacommunautéhumaineetdanslemondedesvaleursspirituelles (Paul, 2014). L’initiation suppose donc un déplacement volontaire de « l’aspirant », qui a détectéunbesoin,unmanque. Cetaccompagnementsupposeégalementunaccompagnateur.Danslamythologie,ilprend souvent la figure du père, mais aussi du mentor. Aujourd’hui, on le définit comme une «personneservantdeconseillersageetexpérimenté»(CNRTL).Danslamythologie,Mentor estleprécepteurdeTélémaqueetamid’Ulysse.EntreMentoretTélémaques’instaureune relation de maître à disciple. Cet accompagnement va permettre le passage de l’état adolescent à adulte, avec une véritable transmission de valeurs. L’accompagnateur peut égalementêtrevucommeunpilote,laréférenceauvoyage(leplussouventmaritime)est permanentedanscetteapprocheducompagnonnage.Levoyagesupposeleretour,maisaussi l’éloignement, le franchissement d’obstacles et l’absence. Le lien avec l’éducation est prégnant, et apparaît dans de nombreux travaux (Rausis, 1993). C’est l’initiation qui va permettrel’autonomie,l’écolereprésentantunlieud’initiationsymbolique(Boutinet,1990). Pouracquérirlesavoirinitiatique,ilfautfranchiruncertainparcours,structurépardesrites maisaussidesépreuves. 1.1.2 Laquête(Ulysse):leguideenquêtedesens Lemythed’Ulysseproposeunvoyageenquêtedesens.L’odysséeprésenteladifficultédu cheminement et l’aventure qui apporte expériences et rencontres. Lorsque qu’Ulysse rencontrelessirènes,ilbouchelesoreillesdesescompagnonsavecdelacire.Cetépisode symboliselesleçonsdumaîtrequipermettentàl’initiédenepascéderauxsollicitationsetà latentation.Toutel’erranced’Ulysseapparaîtcommeuneallégoriequienseignelasagesse. Sescompagnonsviventunevéritableaventure,del’autreetdel’ailleurs(Paul,2014).Mais commeledestind’Ulysseestderentrer,onpeutconsidérerl’accompagnementcommeun processus qui suppose une finalisation, un terme. C’est ainsi que l’accompagnement, aujourd’hui, est quasiment toujours contractualisé et temporalisé (on accompagne un stagiairedurantsonannéedestage,parexemple).Cettetemporalisationnefaitpasobstacle à la transformation, même si elle peut prendre beaucoup plus de temps que le temps d’accompagnement.Celui-cipeutalorsêtreconsidérécommeuneamorceetpeutrenvoyer àcertainesproblématiquesdututorat(àquelmomentletuteurseretire-t-il?).L’aventure liéeàcettequêteestdoncuneformededécouverte,desoietdel’autre.Lafinalitéserait donclaréintégration,c’estàdirequel’initiénel’estpassimplementpourluimaisaussipour les autres. Une fois initié, il initiera les autres (voir, plus haut, le fonctionnement des compagnonsdudevoir).Cequipeutvouloirdirequeleguideaété,àunmoment,initié.On repense alors à certains secteurs professionnels où la transmission représente un valeur majeure(hautecuisine,artisanatd’art). 1.1.3 Lanaissance(Socrate):médiateuretaccoucheur Dans la philosophie platonicienne, la référence au sensible et à la symbolique féminine renvoieàlaposturemaïeutique.Littéralement,ils’agit«d’accoucher»lesnovices,c’està direaiderlanaissancespirituelle.L’accompagnementseréfèrealorsàl’artdel’accoucheur, enfaisantapparaîtrelavérité.Lapostureestdélicate,ellesupposeuneécoute,uneâmeet une résonance. L’accompagné naît ou renaît, dans un mouvement intérieur facilité par l’accompagnateur. Celui-ci est donc plutôt défini comme un médiateur qui facilite la connaissancedesoi.Socratecomparesonartàceluidesapropremère,sage-femme.Ilpose lesbasesdecettepostureparticulière,quipermetuneformedelibération.Encesens,les relationstrèsfortesentrecertainsinstituteursetleursélèves«révélés»parcemouvement, en constituent une illustration. Cette posture suppose une veille de tous les instants, une vigilance à l’autre. Le travail de maïeuticien reste donc un travail de « prise de soin », qui renvoieàl’approcheactuelledu«care»,quiconsisteà«prendresoinde»(pourassurerla vieetlacontinuitédelavie).Lanaissanceliéeàcetteposturesefaitparla«mort»dumaître, quivafaireprévaloirlafiliationrevendiquéesurlapaternitéetladépendance.L’approche socratiquepermetladécouvertepersonnelleetl’affirmationdesoi,préalableàl’autonomie. Encelalesujetsemétamorphosegrâceàun«passeur».Cettefigurealargementétéreprise parunepartiedescoaches,souventissusdumondedelapsychologie. Ces quelques figures tracent les contours de certaines formes d’accompagnement, qui les revendiquentparfois.Maisonpeutsedemandercequijustifieetgénèrel’accompagnement? 1.2 Pourquoiaccompagner?Genèseetsens Sil’ancrageétymologiquenousrenvoieàdesréalitésévidentes,onpeutchercheràallerplus loinpourcomprendrelesraisonsprofondesdudéveloppementrécentdel’accompagnement. 1.2.1 Paradoxesdel’individualisme La principale explication de l’avènement des pratiques d’accompagnement se trouve dans l’évolution de notre société. La crise, globalement, a montré la fragilité et l’érosion des instancestraditionnellesdesocialisationetlamontéedeladésaffiliation(Castel,2009).Ce processusconduitlesindividusàlamargedelasociété(Castel,1996).L’isolementsocialqui endécoulegénèreuneproblématiquegraved’exclusion.L’action,souventremarquable,des travailleurs sociaux pour accompagner ces exclus, montre la difficulté mais aussi souligne l’importancedel’accompagnement,commeprocessusde«réaffiliation».L’affaiblissement d’unesociétéd’inclusionetlacriseontpermisl’avènementdel’individualismeetlaculture del’individualité.Notresociétéseretrouveraitalors«obligée»moralement,d’accompagner les individus exclus. Cette tendance à l’individualité, c’est-à-dire à caractériser « ce qui appartientàunindividuconsidéréisolémentdanslacollectivité,lacommunautédontilfait partie » (cnrtl.fr), renvoie, paradoxalement à l’accompagnement, nécessaire pour garantir cetteindividualitémaisaussipourentraitercertainseffets(dontleseffetsperversliésaurepli sursoietàladésaffiliation). 1.2.2 Ladimensionpolitiqueetinstitutionnelle L’accompagnementrevêtunevéritabledimensioninstitutionnelle,carilfaitl’objetdenormes et s’inscrit dans un cadre. Ce cadre est global, composé du système social dans lequel il s’inscrit.Enaffinant,lecontextedelarelationpeutêtresocialmaisaussimédical,éducatif, formatifetmêmecommercial.Ilsupposeunenécessairecontractualisationdelarelationqui gèrelesrèglesdelarelationmaisaussilesobjectifsduprofessionnel.Lorsdelamontéeen puissance du coaching en entreprise, il a fallu affiner le cadre et préciser les contrats, qui faisaient souvent apparaître trois parties : le coach, le coaché et le « donneur d’ordre », employeurducoachéetfinanceurducoaching.Ladimensioninstitutionnelledelacommande resteprégnanteetmontrequel’accompagnementdevientunesorte«d’obligation»,dans desorganisationsdontlesystèmearejetécertainsindividusenmarge.Letravailréaliséen matièrederéinsertionenconstitueunebelleillustration.D’abordinséré,l’individusortdu systèmeetc’estl’accompagnement,financéparlesystème,quidevraitluipermettredese réinsérer. 1.2.3 Letripleintérêtdel’accompagnement La recherche du « pourquoi » renvoie à des travaux profonds, en particulier de certains philosophes.L’approched’Habermas(Habermas,1976)présenteunréeléclairagecarilrelève un triple intérêt à l’accompagnement (technique/pratique/émancipateur). L’intérêt est d’abordtechniquecarl’accompagnementvafournirdesméthodesetdelamatière,cepeut êtrelecaspourl’accompagnementscolaire,jadiscentrésurlamatièreetaujourd’huiancré sur le relationnel et les méthodes. L’intérêt pratique s’oppose à l’intérêt technique, l’accompagnement servant ici à donner du sens à quelque chose. Une grande partie des coaches s’attache à travailler dans cette direction alors que la commande est plutôt « technique ». Au-delà des méthodes, le coaché va découvrir ce qui fait sens pour lui et travaillersurunedimensionplusspirituellecommeonpeutlevoirdansleschémadeVincent Lenhardt: Source«lesresponsablesporteursdesens»VincentLenhardt,Julhiet Les9niveauxdesenspermettentàl’individuaccompagnéd’allerdu«quoi»au«pourquoi». On aborde alors le troisième intérêt d’Habermas, celui de la fonction émancipatrice de l’accompagnement. Par la réflexivité qu’il provoque, ce processus produit du savoir et participe à la formation de l’identité de la personne accompagnée. Habermas postule que l’individu devient « réfléchissant et délibérant », grâce à l’accompagnement. Le paradoxe apparent de cette recherche d’autonomie… qui passe par l’accompagnement (c’est la conduite accompagnée qui va permettre au jeune conducteur de conduire plus vite, seul). C’est ce paradoxe d’une certaine dépendance, qui oblige l’accompagné à « compter sur l’autre»maisaussià«tenircomptedel’autre»(Paul,2014).Ainsicertainsauteursontpu démontrerquelarecherchedel’autonomieentraînaitleconformismegénéralisé(Lipovetsky, 1983).Lipovetskydénonceun«procèsdepersonnalisation»,enjoignantl’accompagnement depermettre«l’accomplissementpersonnel»etle«respectdelasingularitésubjective»de l’individu.Aufinal,onpeutsedemandersilevéritableintérêtpourl’individurésidedansla réflexivitéproposéeparl’accompagnementoula«performance»,résultatduprocessus.En celalarelation«àtrois»induiteparlecoaching(coach/coaché/donneurd’ordreprescripteur) illustre ce paradoxe. Le « prescripteur » du coaching, employeur du manager « coaché » recherche un gain à travers l’accompagnement, en termes de performance nouvelle du coaché.Mêmesilecoachingresteunerelationduale(coach/coaché)confidentielle,lanotion d’objectifsestsouventimplicite. 1.3 Tentativedeclarificationetdedéfinition 1.3.1 Approchelittérale Rechercherunedéfinitionlittéraledel’accompagnementpermetdecomprendrelaracinede l’action et ses fondements. Le dictionnaire historique de la langue française présente l’évolutionduverbeaccompagner.Onpassede«prendrecompagnon»àuneaction(«action d’accompagner »). On conjugue donc deux idées : celle d’être avec et de se déplacer en commun.C’estplutôtdesonsensfiguréqueleverbetiresavéritablesignification:cequi accompagneestcequivients’ajouter.Lesnotionsd’ajoutetdesoutienseretrouventdans l’accompagnementmusicaletmilitaire.L’idéederenforcementdevientalorsprépondérante etmontrebienladissymétriedesrôlesdanslarelationaccompagnateur/accompagné. Le préfixe « ac » marque une tendance de direction vers un but déterminé, mais aussi un «vouloir»,unallervers,unechoseentraindesefaire(Grévisse,1975).Ilyauneidéede construction de lien, lors de la relation d’accompagnement (voir, plus haut, le compagnonnage).Maispourquechacunatteignesonbut,ilfautquel’autreatteignelesien; en cela le partenariat est effectif entre accompagnateur et accompagné.Il ne peut donc y avoirégalitéentrelesprotagonistesetl’accompagnateurn’estpasneutre,ilestengagédans unemissionavecunbut.Onpeutalorspenserqu’ilnepeutyavoird’accompagnementsans projet (Beauvais, 2006). Cette approche téléologique pose la question des « accompagnements contraints » (insertion…), dans lesquels le projet n’émane pas de l’accompagné. Ledéploiementlittéralduverbesupposeuneapprocheentroisespaces: .Relationnel(êtreavec), .Temporel(enmêmetempsquelui), .Géographique(pouralleroùilva). PaulMaelaenprésentelesdéclinaisons(Paul,2014): Source:«l’accompagnement,unepostureprofessionnellespécifique»,Paul(2014) Pour résumer cette approche littérale et en reprenant les principales idées du tableau, on pourraitdirequ’accompagnerceseraitdonc«sejoindreàquelqu’un,pouraller,enmême tempsquelui,oùilva». 1.3.2 Approchesémantiqueetmétaphorique C’est la métaphore du cheminement qui structure cette approche de l’accompagnement. Celle-cisupposel’incertitudeetlesaléas.Cecheminementestspatialetsurtouttemporelet impliqueuntripleregistre(Paul,2009):conduire/guider/escorter. Source:Paul,«cequ’accompagnerveutdire»,2009 http://www.carrierologie.uqam.ca/volume09_1-2/07_paul/ Laconduite,c’estl’acted’accompagnerquelquepart.Laviséeestliéeàl’objectiffinal.On pourraitdirequec’estlemouvementquifondecetteapproche.Onsaitd’oùonpartetonvise oùl’ondoitarriver.Onpeutretrouvercetteapprochedansl’accompagnementd’uneclasse versunexamenavecpourfinalitél’obtentiondudiplôme,parexemple.Laconduiteestaussi uneformedegouvernance,quisupposeuneinfluencesurl’accompagné.Ellepeutégalement impliqueruneformededirection(donnerladirection,diriger).Lesensinitialdecoaching(le Koski,diligencehongroise)l’illustre.Ils’agitpourlecocherdechoisirlechemin,aprèsquele coachéeutprécisésonobjectif. Inévitablement, cette dimension de conduite suppose une influence exercée par l’accompagnateur. On retrouve la thématique de l’initiation vue plus haut dans l’approche mythologique(Mentor). Ledeuxièmeregistrec’estceluidelaguidance.Lerôlerelationnelestplusprononcé.Ils’agit dedélibérerensemble,sansautoritédanslarelation.Leguidevamontrerlecheminetavance «enéclaireur».Ilasouventdéjàaccomplicetrajetetc’estsonexpériencequigarantitla valeurdel’accompagnement. Letroisièmeregistreestceluidel’escorte.Ilsupposeuneprotectiondelapersonne,souvent ensituationdefaiblesse,parrapportàundangerpotentiel.Lesoutienestégalementune dimensionpalpabledel’escorte.Ilpeutêtrephysiqueet/oupsychologique.Onpeutretrouver cetteapprochedansdessituationsdereconstruction,deréparation. 1.3.3 Desapprochesauxlogiquesdifférentes:lecasdel’accompagnementVAE Onpeutalorssedemanderquelleapprochefavorisersuivantlebutdel’accompagnement. Certains auteurs démontrent que plusieurs approches peuvent convenir à un même objet d’accompagnement mais que leur logique reste différente. L’accompagnement VAE peut servird’illustrationàcette«opposition»entredeuxapprochesdel’accompagnement. L’accompagnateur VAE est constamment partagé entre la posture de guidage et celle d’accompagnement.Silesdeuxprésententuneviséecommune:«permettrelafinalisation deladémarchedeVAE»;elleslefontdemanièredifférente,avecparfoisdevéritablesdébats parmilesprofessionnelssurlapostureàadopteretseslimites. Bien souvent le guidage est utilisé dans une démarche plutôt normalisée, dans un but de réussite de la VAE (obtention du diplôme) qui répond principalement à un objectif d’employabilité.L’accompagnementrenvoieplutôtànedémarchehumaniste,marquéepar larencontre,quipermetàl’accompagnédetrouversespropresressources,afind’assumer lesbouleversementsidentitairesliésàladémarchedeVAE. Leguidagesupposeunprocessus,avecundiagnosticpréalable,quiplacel’accompagnateur VAEensituationdesachantexpert.C’estparfoisunexpertdudiplômequiréalisecettetâche. Le guidage suppose surtout une évaluation permanente à travers une « correction » des travaux de l’accompagné. Le guide repère les écarts qui pourraient gêner l’obtention du diplômeouplacerlecandidatdansunesituationdélicatevis-à-visdujury.Encelaleguidesuit unesortedenormeimplicite(surlaformeetlefondattendusd’undossierdeVAEmaisaussi delaprestationoraleducandidat).Lamanipulationduréférentieldudiplômevagénérerdes «bonnespratiques»,àchargepourleguidedelescontrôler.Certainsjuryssontmêmeallés jusqu’à publier des rapports de jury VAE, avec des injonctions et conseils à l’usage des candidatsetaccompagnateurs,pourfavoriserlaréussite(rapportdejuryduDEES,diplôme d’éducateurspécialisé)parexemple. Après avoir présenté quelques éléments permettant de définir une notion aux contours multiples, on peut chercher à mieux la cerner à travers la façon dont elle est exercée. Les postures et pratiques d’accompagnement nous permettent de montrer comment les professionnelsdel’accompagnementlepratiquent.Ilpeutêtreintéressantdes’appuyersur quelquesfiguresdel’accompagnement,enparticulierdanslechampdel’éducation. 2. Posturesetpratiquesd’accompagnement 2.1 Desposturesd’accompagnement 2.1.1 Letriptyquedel’accompagnement Dansl’approche«entriptyque»dePaulMaela(vueplushaut),nousavonspudécouvrirles troislogiquesquisous-tendentl’accompagnement(conduire/guider/escorter). Dans ce triptyque, les trois registres sont apparemment différents, avec une pluralité d’activitésetde«jeux»possibles.Enréalité,ilsserecoupent,commeledémontreleschéma suivantoùl’onpeuts’intéresserauxzonesderecoupement: VEILLER SUR ESCORTER GUIDER ACCOMPAGNER SURVEILLER EVEILLER CONDUIRE Source:SchémaréaliséparStéphaneJacquet,àpartirdestravauxdeMaelaPaul,2013 Enreprenantcetteapproche,onpeutestimerquel’accompagnateur,quiagitdanschaque registre,présenteunobjectifdifférent(TardifBourgoin,2016): .Conduire,supposeuneviséedeperformance; .Guider,impliqueuneapprocheplutôttransitionnelle; .Escorter,placel’accompagnementdansunedynamiqueexistentielle. Entreconduiteetguidance:«éveiller». Silaconduitesupposeuncertain«dirigisme»,alorsquelaguidanceimpliquelacollaboration, les deux se retrouvent dans une finalité « d’éveil » de l’accompagné. Qu’il soit élève ou patient, l’accompagné va bénéficier de l’humanisme et du professionnalisme de l’accompagnateur,pours’éleverdanssaquêtedesens(voirl’approchedeLenhardt,vueplus haut). L’éveil est particulièrement présent dans le compagnonnage, à travers l’initiation provoquée par la quête mais aussi grâce à l’action du compagnon, véritable initiateur «éveilleur»del’aspirant. Entreconduiteetescorte:«surveiller». L’escorteimpliqueuneprotectionquivients’ajouteràlaconduite.Onobtientalorsune«sur» veillance, avec l’idée que l’accompagné est en situation de faiblesse potentielle ou réelle. Certainesformesdetutoratthérapeutiquesillustrentparfaitementcetteapproche.Le«sur» veillant est particulièrement vigilant, car l’état de l’accompagné mais aussi le contexte, le justifient. Entreguidanceetescorte:«veillersur». Le guide n’est pas directif, ce qui n’empêche pas la vigilance, liée à différence entre les protagonistesdelarelation.Le«veillantsur»,utilisesonexpérienceetsaconnaissancedu processus, ainsi que son vécu pour guider en protégeant. Certaines formes de tutorats peuventbienillustrercettedualité.Lamissiondututeurestd’aiderle«tutoré»àgrandir maisaussideveillersursondéveloppement,carilprésentelescompétencesetqualitéspour le faire, il a été choisi (et parfois formé pour). Il est très souvent passé par le même cheminementetasuprendredurecul. 2.1.2 Pluralitédesposturesetdesanalyses Dansunpremiertemps,onpeutchercherà«lister»lespratiquesd’accompagnement,mais il est indispensable de les classer. Maela Paul propose de les « classer » dans une carte perceptuelleenchoisissantdeuxaxes: - Dusensàl’approchetechnique; - Deladynamiquederéflexionàcelled’action. Ellerépertorieainsineufpratiquesd’accompagnementpourlespositionnersurcettecarte: Source:MaelaPaul,l’accompagnementunepostureprofessionnellespécifique,l’Harmattan(2014) Sans rentrer dans les détails, on peut constater certaines pratiques « opposées » diamétralement: Lecounselling(couplagesens/réflexion)versuslecoaching(couplagetechnique/action); Le mentorat (couplage sens/action) versus la médiation sociale (couplage technique/réflexion). Ces postures sont à la fois plurielles et opposées bien qu’inter-reliées. Pour mieux le comprendre,ilfautrevenirauxtriptyquesdedépart:Conduire/escorter/guider. L’opposition traduit deux sortes de regards différents par rapport à l’accompagné. «Conduire»renvoieàuneviséeindividuellequis’appuiesurunesituationdésiréelorsque «escorter»partd’unesituation-problème.Leregardesticiceluidel’expert,dumaîtrequi saitcommentescorter(etaussipourquoilefaire).Lalogiquederisquequitransparaitrend l’escorté fragile et très dépendant du « maître » qui va user de son expertise pour l’accompagner à bon port. L’expert peut devenir alors un facilitateur en recherchant une certaineactiondel’accompagné(versl’autonomie),lorsquel’expertreste«celuiquisait», apportantlessolutionsauproblèmedel’accompagné. Lementoratsuscited’ailleursuncertainnombred’interrogations,quantaupositionnement del’accompagnateur. Danslafamilledecemot,dontlesprincipauxancêtreslatinssontmens(«intelligence»,« pensée»)etmentior(«mentir»),«mandarin»(enAsie)altéréparleportugaismandar,« ordonner,commander».C’estunempruntaumalaismantari,lui-mêmeempruntéausanskrit mantrin, « conseiller d’Etat » ; un mantra, est un conseil, une formule sacrée, une prière brahmanique»,expliquelesiteassociatifProjetBabel.Onpeutdoncseretrouverdansune forme de prescription de la part du mentor, à suivre absolument par la personne accompagnée. Ce qui explique encore mieux pourquoi il s’oppose à la médiation sociale, réaliséeens’adaptantàl’accompagné,enfonctiondesonapproche,desonproblème. Laguidances’opposeégalementàl’escorteparsonfondementmême.Laguidances’appuie sur le sens donné à l’accompagnement lorsque l’escorte se réfère au problème et à sa résolution.Onpeutainsidissocierdeuxformesdetutoratspédagogiques:letutoratexercé par certains conseillers pédagogiques basé sur la guidance et la recherche du sens et de l’autonomie;etletutoratplusintrusif,basésurlarésolutiond’unproblème.Cedernierpeut résulterd’unecommandeexplicite,danslecasd’unemisesoustutellepédagogique,avecune problématique à résoudre, avec l’aide du tuteur. Cette « guidance de la situation » est forcément singulière (Cifali, 2009) et peut s’inscrire dans une approche « clinique » de l’activité. Les trois registres placent l’accompagnateur à un endroit différent par rapport à l’accompagné: « Conduire » suppose qu’on se place au-dessus ou en arrière (pour intimer un ordre de direction); « Guider » implique un placement en avant ou à côté, pour mieux aider l’accompagné à trouversonchemin; « Escorter » nécessite un placement de proximité, « en entourant » l’accompagné pour le préserver. Demême,cestroislogiquespeuventconduireàdesfiguresdifférentes,principalementau nombredetrois: - Lepasseur,quifacilitelepassaged’unétat/endroitàunautre; - L’interprète,qui«lit»unesituationetladécodepourl’accompagné; - L’intervenant-expert,quiapportesonexpertisepourrésoudreleproblèmeprincipal del’accompagné. Danslaréalité,lesposturesetfiguresnesontpasfigéesetrésultentd’un«bricolage»,avec unetechniqueimprovisée,adaptéesauxcirconstances(Levi-Strauss,in«lapenséesauvage», 1962).Lapostureestainsipolymorphe,fédérantunediversitédelogiquesdansunmêmebut: accompagnerl’autre. Entermesd’analysedel’accompagnement,onpeutchoisirtroisaxesdetravail(Pastré,1999), pourchercheràconstruirelesensliéàl’activitéd’accompagnement: - L’axedidactique; - L’axeclinique; - L’axepsychodynamique. L’axedidactiquereposesuruneanalysedutravailenvuededévelopperdescompétences (Pastré,1999).L’accompagnateurdésireuxdeprogresserdanssonaccompagnementpourra, paruntravaild’analysedepratique,décrypterle«conceptpragmatique»quisous-tendsa pratique. Le débriefing constitue l’outil principal pour mettre en mots cette pratique. Cependant, cette approche ne semble efficace qu’avec des accompagnateurs chevronnés, disposés à prendre le recul nécessaire et à accepter qu’une partie du travail demeure implicite. L’axe clinique est utilisé par le courant de la clinique de l’activité (Clot, en particulier). La démarche remet l’accompagnateur au cœur de son activité et de sa propre analyse. L’approche clinique se révèle particulièrement intéressante lors de la transmission par un accompagnateur chevronné à un accompagnateur novice. Le sens se construit en tenant comptedelarelationentretenueaveclesautresetdesinteractionsmisenœuvredansce travail.Lasituationidéaleestreprésentéeparunbinômed’accompagnateurs,ensituationde travailavecunepersonneaccompagnée,etquidécryptent,entempsréel,leuractivité.Elle supposeunaccompagnateurchevronnéforméàcetteapprocheetcapabled’un«retoursur soi»précisetpertinent.L’utilisationdelavidéoapporteun«plus»,pournerienperdredu «geste»etdespratiquesprofessionnelles. L’axepsychodynamiqueétudielesstratégiesmisesenœuvreparlesaccompagnateurspour ne pas être affectés par les pathologies, notamment les stratégies défensives. Ce courant montrequ’ilexistedeuxtypesdejugementscomplémentairessurletravail:lejugementde beautéetlejugementd’utilité.Lesjugementsdebeautépermettentdesesituerparrapport aux « règles de l’art » et de s’intégrer à une communauté d’appartenance. Ils peuvent répondre à la question suivante : « mon accompagnement présente–t-il toutes les caractéristiquesattenduesparlesprofessionnelsdusecteur?».Pourlesjugementsd’utilité, on recherche l’utilité du professionnel (sociale, technique…). Ils peuvent répondre à la question:«monaccompagnementapporte-t-ilquelquechose?». Enfin, on peut également considérer que l’accompagnement est au cœur d’un système et adopteruneapprocheplutôtsystémique. Cetteapprochemodéliseletravaild’accompagnementsousformedesystème(Clénet,2005). Onpartdesjugementsdetravailpourconstruireunsystèmeavecdesprocéduresquisont soumises à discussion, au sein du collectif de professionnels. On stabilisera certaines procédures et on en rejettera d’autres (Dejours, 2003). Le travail en mode « groupe de projet»,préalableàl’élaborationd’unréférentielprofessionneletdesformationsafférentes, estunbonexempled’approchesystémiquepréalable.Onvachercheràrecenserlespratiques etàlesrapprocher,pourenextrairelesélémentscommunsettrouverunfilconducteur. Les différentes tentatives pour stabiliser le référentiel du coaching sont parties de cette approche,pouraboutiràdesréférentielsassezexigeantsdéontologiquementmaisaussiassez « larges » techniquement, pour englober les différentes formes de coaching. La société françaisedecoaching(SFC),undestroissyndicatsmajeursdecoaches,adopteuneapproche systèmeintéressante,sur3plans,pourenvisagerlecoachingdanssonensemble: Source:http://www.sfcoach.org/ Danscetteapprochesystémique,onnesefocalisepassurlapratique,quin’estqu’unaxe d’analyse ; mais on travaille également sur le cadre et l’identité, qui sont des éléments importantslorsdel’analysedel’activitéducoach.Cecipeutaussiexpliquerlagrandevariété de situations de coaching et la difficulté à règlementer la profession et à structurer des formationsdehautniveau(typemaster). Une même fonction d’accompagnement peut, volontairement, nécessiter l’adoption de différentes postures, comme nous l’avons démontré dans le schéma suivant : Source:S.Jacquet,pourlemémoiredeconseillerVAEdel’IRIS,2015 J’aivolontairementdéfinil’accompagnementVAEcommeunensembledeposturesd’abord techniques(expertiseetorientation),quiconduisentàunglissementversdesposturesplus « humaines », à mesure qu’on se rapproche de la soutenance du livret de VAE, pour le candidat. Certains pensent même qu’il serait impossible de cumuler, pour un même accompagnateur, les différentes postures. J’ai, personnellement, cherché à démontrer le contraire dans ce mémoire (validé par le jury). Certains experts de la question sont allés jusqu’à définir l’accompagnement VAE comme « un nouveau métier de la formation des adultes»(Pinte,2009). On peut se demander alors si l’accompagnement ne présente pas une dimension nécessairementformative. 2.1.3 L’accompagnateur-formateur Accompagner s’inscrit dans un double processus formatif (Charlier et Biémard, 2012). Les situations formatives déployées lors de l’accompagnement favorisent le développement professionnel de l’accompagné mais aussi de l’accompagnateur. Celui-ci propose des reformulations,construitunsenspartagéetproduitdesélémentsdeformation.Parexemple, lesgrillesd’analysedepratiquecrééesparletuteurd’enseignant,deviennentdeséléments deformationlorsqu’ilvalesprésenterauprofesseurstagiaire,enjustifiantleurcontenuet leurcontenant. Sil’accompagnementconstitueleprocessusd’émergencedessavoirsetdel’expériencedes accompagnés, l’information produite lors de cette relation participe également au développementprofessionneldel’accompagné.Encela,l’accompagnementrevêtunevisée formativequinouspermetdeplacerl’accompagnateurdansunelogiquedeformateur. On peut également postuler que le formateur est nécessairement accompagnateur car sa relationaveclegrouped’apprenantsesttemporaliséeets’inscritdansunevisée(certificative, depréparation,d’insertion…).Certainschampsdel’accompagnementsedéfendentd’adopter une démarche de formation, mais la demande est bien souvent implicite de la part de l’accompagné.Ainsi,l’accompagnementVAEquiconsisteàaiderl’accompagnéàmettreen motssonexpérienceprofessionnelle;passepardesmomentsformatifsoùl’accompagnateur formeaucadredelaVAE(respectdesdossiers,desélémentsàfournir,desdélaisàtenir…) maisaussiaufonddudossier(qualitédelarédaction,clartédespropos,certainsélémentsde présentationdel’organisationoudel’emploi…). L’accompagnementpeutaussiêtrevucommeunefacilitationdesapprentissagesautonomes. En cela l’accompagnateur, paradoxalement, chemine avec l’accompagné censé devenir autonome. L’apparente contradiction facilite la construction de sens pour les deux protagonistes.Letutoratpédagogiqueillustrebienceparadoxe.Lacommandeestcomplexe, le«conseillerpédagogique-tuteur»englobedeuxfonctionsdansunemêmemission.Ilest conseillerettuteur.C’estdanslafonctionfinaledeformateurquel’apparentparadoxede cette mission va se dissoudre. La création récente du CAFFA (certification d’aptitude aux fonctions de formateur académique) reprend le vocable de formateur pour préparer aux missions de formateur académique mais aussi de tuteur pédagogique. En effet, les deux situationsdetravailsontpossibleslorsdel’examenduCAFFA(unemiseensituationcomme formateuroucommetuteurd’enseignant).Enfin,denombreusesrecherchessurletutorat ontaffirmélecaractèrenécessairementformateurdecetterelationtuteur/tutoré(Mahlaoui, 2014). La transmission des savoirs issus de la pratique se fait alors par un triple processus (MahlaouietLorent,2016): - Contractualisation; - Appropriation; - Évaluation. Ilestintéressantdevoirquel’évaluationconstitueuneactivitéintégréeàl’accompagnement. Mêmesielleplaceletuteurdansunesituationparfoisdifficile;elledoitêtreclarifiéedèsle début et l’accompagnement peut alors insister sur la nécessité d’une autoévaluation de l’accompagné,préalableàl’évaluationparletuteur(leplussouventuneco-évaluation).Cette évaluation pourrait être menée avec des outils établis en commun (grille commune), pour éviterdechercheràfairecorrespondrel’accompagnéàunprofilageétabliaupréalable;ce quidemeureledangerd’unenormalisationexcessive.Nepaschercherànormaliseràl’excès doitpermettreauxacteursdeprendredureculpourdéfinirplutôtunedimensionetuncadre éthiques. 2.2 Uneéthiquedel’accompagnement 2.2.1 Uneexigenceéthique L’un des socles de l’accompagnement est la responsabilité. C’est en considérant l’autre en tant que sujet autonome, qu’on peut le considérer comme sujet responsable. La responsabilitéconstituealorsun«apriori»quiconcernetoutêtredigned’humanité(Atlan, 2002).Acettecondition,lecadredel’accompagnementpeutsemettreenplace.Encela,on peutparlerd’exigencepréalablequiplacel’accompagnateurenresponsabilité(del’autre,de l’accompagnement).Pourmeneruneaction«sensée»(Paul,2006),ondoits’appuyersurdes principesquelaquestiondel’autrejustifie.Ilyabienexigenceéthiquepourquelesrapports soientauthentiques.Ondépasselesimplerespectdelanorme(ordrevisible)pourentrerdans unrespectmutuelaccompagnateur/accompagné(ordrecaché).L’éthiquedevientuneréalité collective(Atlan,1986)quiporte,paressence,lamarquedel’autre. Ilpeutêtrenécessairedeseconformeràuncodededéontologieouunechartepourposer les conditions de l’accompagnement. Les tentatives de réglementation du coaching ont commencé par énoncer des chartes et codes, afin de donner aux coachés la possibilité de «trier»leurscoachesetd’éviterlesopportunistesquiutilisentletermeenlegalvaudant. Onpeutvoir,danscetextraitducodededéontologiedelasociétéfrançaisedecoaching,que l’accentestmissurlaresponsabilitéetlapostureducoach(pasd’influence). Source:SFCoach,codededéontologie,version2011 Lesautresprofessionsdel’accompagnementdoiventtoutespouvoirseréféreràuncodeou, aumoins,àunréférentieldecompétencesquiinsistesurladimensionéthique.Ainsi,dansle référentieldescompétencesdesmétiersduprofessoratetdel’éducationonpeuttrouverles compétencessuivantes: Source:référentieldesmétiersduprofessoratetdel’éducation,BOdu25/07/13 Lecadredonnéparlesprincipesfondamentauxdusystèmeéducatifetlepartagedesvaleurs delaRépubliqueinscriventlesmétiersduprofessoratetdel’éducationdanscettenécessaire dimensionéthique. D’autresformesd’accompagnementsedoiventégalement(mêmesansenavoirl’obligation) demettreenplacecettedimension,sibesoinàtraversunecharteinséréeaucontrat.Cepeut êtrelecasdansl’accompagnementVAE: Source:Charted’accompagnementVAE,StéphaneJacquet,2015 L’éthiquedel’accompagnementseconçoitégalementcommeuneformederesponsabilité, maispasseulementdel’accompagnateur.L’accompagnéresteresponsabledeseschoixetde sesactes(Beauvais,2003).Ilestégalementresponsabledel’usagequ’ilchoisitdefairedu cadred’accompagnement.Doncl’accompagnateurdoitfavoriserlesconditionssusceptibles d’élucider le cadre (Beauvais). On pourrait même parler de « méta-responsabilité », car l’accompagnateurdevient«responsablemêmedelaresponsabilitéd’autrui»(Levinas,1982). C’estlaresponsabilitédemettrel’autre«enprojet»etellesupposeunemiseendistance. Cettemiseendistancefaitl’objetdenombreuxtravauxchezleschercheurs,enparticulier dansledomaineducoachingmaisaussidututoratetdel’accompagnementdeformation.Si l’onrecherchelalibertéetl’actionenpleineconsciencedel’accompagné,alorsilfaudrasavoir «seretenir»(M.Serres,1991)etconstammentsemettreàdistance.Cettemiseendistance supposeuneposturedélicatecarl’accompagnateurdoit«s’engager,sanss’yperdre»(Ciffali). Ilfautêtreàlafoisdedansetdehors,enestompantlerapportdepouvoirliéauxrôles(le tuteur doit évaluer l’accompagné…). Cette éthique de l’accompagnement s’associe nécessairementàdesvaleurshumaines:bienveillanceetrespect,enparticulier.Lavolonté de vouloir considérer l’aspect technique et méthodologique de l’accompagnement comme fondamental,risquedeminorerlerôledel’éthiquedansladémarched’accompagnement. Chaque accompagnement étant différent, on ne peut alors modéliser cette « mise en distance ». Pour favoriser le cheminement de l’autre, il est nécessaire de ne pas avoir de certitude;c’estle«doute»quivapermettred’enclencherlediscourséthique(Fortin,1995). Certainsauteursproposentalorsdepréciserlecadreéthiqueendéfinissantuncontratavec desobjectifsclarifiés(c’estlecasducoaching)etenprécisantcertainesconditionsdebasede l’accompagnement(confidentialité,bienveillance,transparence).Au-delàdecettedémarche éthique, on peut même dire que l’accompagnement suppose une responsabilité sociale (Serreau, 2013), nécessaire au fonctionnement de toute collectivité. Les structures d’accompagnement l’ont compris, multipliant les chartes d’éthique (comme en école d’ingénieur depuis 2010), ce qui apporte un appareillage éthique plus solide à l’accompagnementdeformation. . 2.2.2 Unenécessaireprofessionnalisation Comme prolongement de la question éthique, se pose celle de la nécessaire professionnalisation de l’accompagnement. Les dérives du coaching, profession non règlementée,ontfaitémergerlanécessitédeposeruncadreetderationaliserlespratiques pour éviter des effets pervers (comme la manipulation de l’autre ou la très grande dépendanceliéeaurapportimposépar«l’accompagnateur»). Dansuntravailderecherchepourl’obtentionduD.U.coachingdel’universitédeParis2,nous avonsdénoncélesdérivesliéesàlaposturede«gourou»imposéeparcertains,abusantde la faiblesse de l’autre et de ses doutes. L’utilisation habile et détournée de certaines techniques de communication interpersonnelle (PNL et analyse transactionnelle, en particulier),souscouvertde«développementpersonnel»afaitémergerquelques«super coaches»aucomportementdommageablepourlaprofessionquipeineàs’imposeruncadre. Cependant,lesprofessions«del’autre»secaractérisentparungrandhumanismeetune nécessairesubjectivisationquirendentdifficileslaprofessionnalisationetlarationalisation. L’accompagnateurdéveloppeuncertainnombredecompétencesquipeuventdonnerlieuà lamiseenplaced’unréférentiel.Lecadreduconseileninsertionprofessionnelleaétéposéà traverslacréationd’untitreprofessionneldeniveauIII,auRNCP;auréférentielprofessionnel bâtiautourde4activitéset15compétencesclés: Source : Extrait du RAP du titre professionnel de conseiller en insertion professionnelle, version2012 Onremarquequel’activitéd’accompagnement,ausensstrict,estformaliséeàtraversune des 4 activités et 4 compétences, dont celle de l’analyse de pratique, essentielle dans les métiers«del’autre».Professionnalisercettefonctionapermisd’engloberunensemblede compétencesautourdel’accompagnement,favorisantletravaildesuividel’accompagnépar uninterlocuteurunique. La même approche est perceptible dans une autre fonction d’accompagnement, celle de l’accompagnementàlavalidationdesacquisdel’expérience(VAE). Une des 4 activités prévues au référentiel professionnel de « conseiller VAE » concerne l’accompagnement: Source:ExtraitduréférentielRNCPdudiplômedeconseillerVAE Cetteactivitésedéclineencompétencesquijustifientunaccompagnementassezcadréet global.Onpartdel’ingénierieetonvajusqu’àl’évaluationdel’accompagnement.Onpourrait leformaliserparun«rubanpédagogique»,réaliséàpartirdelanormeAFNORX50-269,pour enfixerlescontours(S.Jacquet,2015): C’estdoncenamontquesejouelaconstructiondutyped’accompagnement,ens’adaptant aucandidatetgrâceàuneanalyseassezfinedumarché.Parcetteapproche«globale»,je chercheàélargirlescontoursdel’accompagnementVAE,quireste«cantonné»àuneétape dansleréférentieldudiplômedeconseillerVAE: Source:Vial,référentieldesacteursdelaVAE,2007 L’étape 1 (orientation) et l’étape 3 (suivi), nous semble intégrables dans une démarche «large»d’accompagnement.Cetteapprocheglobaleestcritiquéeparcertainsexpertsqui préfèrent«découper»lesétapesentreplusieursfonctionsetexpertises.Nouspensonsque celapeutnuireausuividucandidatetnousaffirmonsqu’unmêmeinterlocuteurpeutposer lesbasesd’uneapproched’accompagnementpluscentréesurl’Humain. Au-delàmêmedelaquestiondelaprofessionnalisationseposecelledelaprofessionnalitéde l’accompagnateur,ausensdeladéfinitiondeFrançoisAballéa(1992):«expertisecomplexe etcomposite,encadréeparunsystèmederéférences,valeursetnormes,demiseenœuvre». Il s’agit donc plus de se poser la question de l’expertise de l’accompagnateur, sur laquelle reposecetteprofessionnalité.Celui-ciestun«expertdel’humain»,capabled’accompagner avec«humanité»,avec«l’humilitéd’unepersonnequisaitcombienunparcourspeutêtre tortueux…»(Serreau,2013).L’expertenaccompagnementseraalorsceluiquipeututiliserun appuiméthodologiquechoisietdiversifié(etsurtoutpasprescritetmodélisé),enadmettant la « diversité des différences » ; pour garder sa capacité à expérimenter et à s’ouvrir à l’imprévu. L’humain étant complexe, l’expert en accompagnement saura gérer cette complexité en se gardant de prescrire et en partant de la personne pour proposer une véritable«ingénieriedel’accompagnement». 2.2.3 Accompagnementetprojet L’accompagnement est nécessairement relié à un projet. Le but recherché constituant la dimensionfinaledeladéfinition,accompagnersignifiealorsquel’Hommedoitêtreconsidéré comme«sujetautonome,responsableetprojectif»(Beauvais,2004).Le«projectif»donne dusensauréeletsupposeune«priseenprojet»(Liiceanu,1994)delui-mêmeetparluimême.Lecadragedel’accompagnementetl’éthiquequiendécouleconstituentalorsune nécessitédansladynamiquerelationnelleentreaccompagnateuretaccompagné.Ils’agitde placerdes«pointsfixes»dansletempsetl’espace,favorisantlaconstruction. En tant que pratique sociale, l’accompagnement peut être appréhendé à trois niveaux (Beauvais,2006): - Micro:celuidesacteurs,oùsemettentenplacentlesrelationsetlesposturesde facilitation; - Méso:celuidel’organisation,oùsedéfinitlafonctiond’accompagnement; - Macro : celui de l’institution, là où se conçoivent et se décident les logiques d’accompagnement. Lespostures,nonprescrites,sontmisesenplaceauniveaumicro.C’estauniveaumacroque lecadrepeutêtre«normalisé».Onpeutainsiinstitutionnaliserl’accompagnement,cequi peutpasserparlacréationd’un«corps»d’accompagnateursavecunprocessusdéfini(c’est lecaspourlestuteursàl’EducationNationale). L’accompagnement du projet est générateur d’intérêts et source de motivations. C’est l’expériencedel’autonomiequifacilitelamotivationenfavorisantl’intégrationdesobjectifs, leurinternalisation,donclaperformance(DecietRyan,2006).Ils’agitalorsderespectertrois besoinsfondamentauxassociésàlamotivation:l’autonomie,lacompétenceetlarelation. L’accompagnateurviseàmontreràl’accompagnésacapacitéàagir.Onpeutmêmedépasser lanotiondecompétencepourparlerde«capabilité»ausensdu«pouvoiragir». Pourallerplusloinencoresurlaquestiondelamotivation,l’accompagnateurdoitfavoriserla recherchedusensetdudéveloppementdel’identitédelapersonne.Sil’accompagnécherche àatteindredesobjectifsquifontsenspourlui,l’accompagnateursedoitderéaliserune«mise en perspective » et de faciliter l’explication nécessitée par cette construction identitaire. Proposerdusensc’estaussiaiderl’accompagneràprendredureculparrapportàsonprojet, maisaussi,àlafois,«garantirunchemin»et«ouvrirsurdeshorizons».Ilfautdonctoujours que l’accompagnateur puisse rappeler le cadre et les options choisies, tout en intégrant l’incertitudeetlesautresscenariipossibles. En conclusion, nous avons pu revenir sur le difficile exercice de définition de l’accompagnement, qui reste nécessairement composite et fortement marqué par son étymologieetparcequelapratiqueenafaitaujourd’hui.Onpeutdoncpenserquesiles fondamentaux vont demeurer (en particulier l’éthique et les postures de base), le côté professionnelpeutsedévelopper,enparticulierlaprofessionnalitédesaccompagnateurs.Car il n’est pas nécessaire de constituer une profession, pour faire preuve de professionnalité. Ainsi l’expertise de certains accompagnateurs, dans les différents champs de l’accompagnement pourrait favoriser la professionnalisation (des coaches ou des accompagnateursVAE,enparticulier)decertainsaccompagnateursenquêted’uneidentité commune.Ceciposeraitlesbasesd’éventuelsréférentielsprofessionnels,permettantainside clarifierl’offredeformationpourles«apprentis»accompagnateurs.Ilestbienentenduque ces formations ne constitueraient alors qu’un préalable, à compléter par une nécessaire « expérience de l’autre » ; ce qui demeure un élément identitaire fondamental des «travailleurssurautrui».Onpourraitégalementchercheràdépasserlasimpleapprochepar lescompétencespoursetournerversuneapprocheparlescapabilités(ausensdu«pouvoir agir»)pourmieuxdéfinirlescontoursdel’accompagnement. Bibliographiedebase: PaulM.,l’accompagnementunepostureprofessionnellespécifique,L’Harmattan, (2014) PaulM.,(2002).«L’Accompagnement:unenébuleuse»,inL’accompagnement danstoussesétats,EducationPermanente,n°153-2002-4. RoboPatrick:formationaccompagnanteetcompagnonnage,LeNouvel Educateur,Mai2001 http://probo.free.fr/accompagnement/ecrits_accompagnement.htm RausisPhilippe-Emmanuel,l’initiation,éditionsduCerf,1993 BoutinetJean-Pierre:Penserl’accompagnementadulte,PUF2015 Cifali,M.&Bourassa,M.&Théberge,M.(éds),Cliniquesactuellesde l’accompagnement,Paris,L’Harmattan,2009 SerreauYann:accompagnerlapersonneenformation,Dunod,201 Tourette-TurgisC.,(1996).Lecounseling:théorieetpratique,Paris:PUF LestienneChristian,DubruillePierre,«L'accompagnementdansunesociétéàla recherchedesens»,Savoirs2/2009 VialM.,Caparros-MencacciN.,L’accompagnementprofessionnel?Bruxelles,De BoeckSupérieur,«Pédagogiesendéveloppement»,2007,340pages. Sitographie: CNDPpourl’ESEN:Undiaporamaassezclair: http://www.cndp.fr/crdp-dijon/IMG/pdf_Diaporama_APP_-_PANORAMA__ESEN_BROCHON_6_octobre_2010_-_pour_PDF.pdf L’accompagnement,définitions,formesetdérives:untravailprécis,sur l’accompagnementéducatif,réaliséparJCGuérin,IGEN: http://www.educationetdevenir.fr/IMG/pdf/L_accompagnement_educatif_dispo sitif_supplementaire_ou_pratique_d_avenir_JC_Guerin-_cahier_E_D_no_6__decembre_2009.pdf Unebibliographiesurl’aidepersonnalisée: http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Accompagnement_personnalise/63 /6/bibliographie-accompagnement-personnalise_276636.pdf Lapageconsacréeàl’accompagnementsurlesitedel’ARFTFLV: http://www.arftlv.org/recherche/recherche?q=accompagnement