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le
Sénégal
face à la
Casamance
Alors que le Sénégal jouit d’une bonne image internationale,
sa stabilité est mise à mal par le conflit qui perdure depuis 20 ans
dans le sud du pays, dans la région de Casamance.
Quels en sont les causes, enjeux et évolutions possibles ?
(d'après "le Dessous des Cartes" – déc. 2002)
Situation du Sénégal
Le Sénégal, situé en Afrique de l'Ouest, fait 220 000 km² pour 9,5 millions d'habitants.
La capitale est Dakar.
Le pays est bordé à l'ouest par l'Océan Atlantique,
au nord par la Mauritanie, à l'est par le Mali,
et au sud par la Guinée et la Guinée-Bissau.
le Voisin gambien
Le Sénégal est aussi traversé par une autre frontière, celle d'un petit pays qui s'appelle la Gambie,
et qui semble couper le Sénégal en deux.
Ce tracé est hérité des rivalités de la colonisation européenne.
Rivalités franco-anglaises au Sénégal
À partir du 16e siècle, la région du Sénégal
est dans le réseau de la traite des esclaves vers le Nouveau Monde.
Rivalités franco-anglaises au Sénégal
Portugais, Hollandais, Anglais et Français y installent des comptoirs.
Mais avec l'interruption de la traite des noirs au 19e siècle,
les Anglais ne gardent pied que dans la vallée du fleuve Gambie,
laissant de facto le Sénégal aux Français.
Des frontières issues de la colonisation
La Conférence de Berlin de 1885,
qui entérine le partage du continent africain entre puissances européennes,
confirme cette présence anglaise le long du fleuve Gambie.
C'est dans ces frontières coloniales que la colonie anglaise devient indépendante en 1965
sous le nom de Gambie.
le Sénégal, coupé en deux par la Gambie
Les conséquences de cet étrange découpage se font encore sentir aujourd'hui :
le sud Sénégal est coupé du reste du pays, et notamment de la capitale, Dakar.
De plus, cette région est longtemps restée sous influence portugaise,
n'étant que plus tard intégrée à la colonie française du Sénégal,
ce qui a accentué les particularismes.
la Répartition des religions
Les populations sénégalaises (Wolofs, Peuls, Sérères, Mandingues)
sont en majorité musulmanes.
Excepté au sud, où les Diolas sont animistes
ou pratiquent un catholicisme teinté d'animisme.
le Séparatisme en Casamance
Cette situation historique et géographique a favorisé, dans les années 1980,
l'émergence d'un mouvement séparatiste
dans la région qui s'appelle la Casamance.
la Casamance, la région la plus arrosée du pays
Sur une photo satellite, on repère Dakar,
et les grands fleuves que sont le fleuve Gambie et le fleuve Casamance.
On voit que la Casamance se situe dans une zone forestière
qui s'organise le long du fleuve,
et qui a la particularité d'être plus arrosée que le reste du Sénégal, situé dans une zone de savane.
Présentation de la Casamance
La Casamance représente environ 1/7 de la superficie du Sénégal,
presque celle de la Belgique, pour environ 1,2 millions d’habitants.
les 3 "Casamances"
En Haute Casamance, vivent des Peuls sédentarisés, agriculteurs,
qui cultivent essentiellement du coton.
En Moyenne Casamance, les Mandingues sont majoritaires, et l'agriculture est plus diversifiée :
riz, mil, arachide, coton.
les 3 "Casamances"
La Basse Casamance s'ouvre sur l'Océan Atlantique.
C'est là que vivent les Diolas, majoritaires dans la région,
qui sont à l'origine du séparatisme Casamançais.
l'Origine du séparatisme casamançais
Grâce au climat, les Diolas ont pu faire du riz la base de leur alimentation
et un élément de civilisation : le riz est un élément de puissance,
un élément sacré et d'unité, par les offrandes aux ancêtres et aux fétiches.
Les cases sont entourées par des jardins où poussent manioc, igname, patate douce, et fruits.
Les Diolas pratiquent la pêche le long de l'Atlantique.
l'Origine du séparatisme casamançais
Mais plusieurs fractures sont apparues.
L’économie traditionnelle a été modifiée
quand l'État sénégalais a introduit la culture de l'arachide,
qui a entraîné le défrichement des plateaux,
alors que les forêts ont une valeur sacrée.
la Société égalitaire des Diolas
De plus, les Diolas sont une société paysanne de type égalitaire,
qui s'oppose aux sociétés traditionnelles hiérarchisées du nord du Sénégal.
Ils sont donc plus proches des populations littorales de Guinée-Bissau et de Gambie.
l'Arrivée des populations du Nord
Dans les années 1970, des populations du nord (Wolof, Toutcouleurs, Sereres)
viennent en plus grand nombre s'installer en Casamance
pour commercer, cultiver des terres, ou travailler dans le tourisme qui se développe.
Les côtes de Casamance deviennent en effet un lieu de tourisme important,
avec des hôtels et des villages de vacances, dont le Club Med au Cap Skirring.
Peurs et représentations diolas vis à vis du Sénégal
Pour les Diolas, l'arrivée de populations venant du nord
est ressentie comme une sorte de colonialisme de l'intérieur.
Pour toutes ces raisons s'est développé chez les Diolas
un sentiment de méfiance vis-à-vis de l'État en place à Dakar,
qu'ils assimilent à un État musulman et wolof.
la Casamance, un protectorat de l'AOF ?
Pour eux, la Casamance n'a jamais fait partie de la colonie du Sénégal :
elle avait un statut de protectorat au sein de l'Afrique Occidentale Française.
Enfin, ils se sentent marginalisés à l'intérieur même du Sénégal,
notamment à cause du manque d'infrastructures.
l'Émergence d’un mouvement identitaire en Casamance
Ces revendications pour la reconnaissance de leur identité, pour plus de développement régional,
ont fait surgir dans les années 1980 un mouvement identitaire Diola,
qui prend appui sur le Mouvement des Forces Démocratiques de Casamance, le MFDC.
Ce mouvement réclame la séparation, appuyé sur un mouvement de guérilla
qui trouve appui et repli en Guinée-Bissau et en Gambie.
l'Implication des voisins de la Casamance
La Gambie, au cœur de nombreux trafics, a depuis 1994 un Président d'origine Diola.
Le pays sert de transit aux armes envoyées à la guérilla casamançaise, notamment par la Libye.
Pour la Guinée-Bissau, ancienne colonie portugaise,
c'est autant la solidarité ethnique entre Diolas que l'intérêt
qui justifie l'aide à la guérilla de Casamance.
l'Implication des voisins de la Casamance
Le MFDC se développe grâce à cette possibilité de repli en Guinée-Bissau,
utilisant des caches et des passages pour s'alimenter en armes.
le Cycle de la violence en Casamance
Le cycle de la violence politique est malheureusement connu :
attentats du MFDC, répression de l'armée sénégalaise, qui entraînent morts ou fuites de civils.
Les deux pays voisins, qui ont des populations apparentées aux Diolas,
accueillent des dizaines de milliers de réfugiés.
Sécession ou confédération ?
Ces soutiens extérieurs ont provoqué des tensions avec le Sénégal,
voire même des interventions en Guinée-Bissau.
Sécession ou confédération ?
Car le Sénégal craint la sécession de la Casamance,
ou qu'elle puisse rejoindre la Gambie et la Guinée-Bissau dans une confédération,
qui ressusciterait la fédération du Gabou, un ancien royaume du 18e siècle.
C'est là le projet des 3 B : Banjul, Bignona, Bissau.
Depuis 1991, cessez-le-feu et reprises de guerre se succèdent.
Le Sénégal jouit, d'une meilleure image internationale
depuis l'arrivée de Wade à la présidence, en mars 2000.
Wade s'est engagé sur cette question de la Casamance.
Mais la violence y est de plus en plus criminalisée :
le MFDC est impliqué dans les trafics de drogues,
qui financent en partie les revenus des rebelles ;
les rivalités au sein du mouvement
rendent difficile le choix des négociateurs ;
et cette dérive devient régionale,
car le trafic de diamants venant du Libéria transite par la Gambie
qui taxe les droits de passage.
Des bandes armées sèment la terreur parmi les civils,
ce qui rend le mouvement MFDC impopulaire parmi les Diolas,
à cause des rackets, des bastonnades,
des mines anti-personnelles qui gênent beaucoup l'agriculture.
Voilà pourquoi le conflit de la Casamance reste un casse-tête
apparemment sans solution pour Dakar,
car il s'agit tout de même de l'intégrité du territoire du Sénégal.
On a noté aussi que c'est une guerre peu médiatisée
et pourtant il n'y a pas d'interdiction particulière de filmer.
On a accès à l'information,
il n'y a pas de censure.
Alors pourquoi si peu d'images, si peu de nouvelles ?
Est-ce parce que la guerre de Casamance est
sans solution prévisible, sans enjeu, à faible intensité ?
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