scènes magazine molly bloom au théâtre kléber-méleau © Pascal Victor - Artcomart ISSN 1016-9415 259 / février 2014 CHF. 10.-- 7 € Théâtre Danse Théâtre L’Ombre Vous désirez ? Seule la mer Hans Christian Andersen Jacques Vincey Revue hip-hop Amos Oz – Denis Maillefer Céline Lefèvre – François Berdeaux 10 et 11 mars à 20h30 5 fév. à 19h 25 fév. à 20h Théâtre Théâtre Oblomov De Beaux Lendemains Dorian Rossel-Cie STT O’Brother Company Russel Banks – Emmanuel Meirieu 28 fév. et 1er mars à 20h30 Du 11 au 14 fév. à 20h30 forum-meyrin.ch / Théâtre Forum Meyrin, Place des Cinq-Continents 1, 1217 Meyrin Billetterie + 41 22 989 34 34 du lu au ve de 14h à 18h Oblomov © Erika Irmler Service culturel Migros Genève / Stand Info Balexert / Migros Nyon-La Combe s o m m a i r e 6 cinéma 6 8 9 10 11 12 16 16 17 18 cine die / raymond scholer cinémas du grütli / christian bernard sous la loupe : the wolf of wall street / christian bernard cinémathèque suisse en février / raymond scholer sous la loupe : nymphomaniac (volume 1) / serge lachat les films du mois / c. bernard, é. gür, s. lachat, j. roche brèves : mary queen of scots, in the name of... / serge lachat brève : the lunchbox / serge lachat brève : fanny et alexandre / christian bernard entretien : sébastien lifshitz & bambi / tuana gökçim toksöz 20 théâtre 20 21 22 23 24 26 27 28 29 comédie de genève : mission / laurence tièche comédie de genève : shitz / rosine schautz forum meyrin : oblomov / claudia cerretelli forum meyrin : de beaux lendemains & l’ombre vidy-lausanne : 2e partie de saison / nancy bruchez le poche genève : bourlinguer / laurence tièche en tournée : les deux gentilshommes de vérone / r. schautz saint-gervais genève : mémoires blessées / rosine schautz kléber-méleau : molly bloom / david verdier 30 opéra 30 32 33 34 35 36 37 38 38 39 39 40 41 41 42 43 44 46 48 49 entretien : john daszak / éric pousaz portrait : sandrine piau / françois lesueur portrait : dmitri hvorostovsky / christian wasselin entretien : carine séchaye, alias hänsel / anouk molendijk entretien : céline mellon, alias gretel / anouk molendijk new york : norma & tosca / f. fredenrich, l. darbellay mémento avignon : madama butterfly & laïka, the spacedog / f. jestin saint-étienne : ciboulette / françois jestin lyon : norma & les contes d’hoffmann / françois jestin monte-carlo : rheingold & la favorite / françois jestin marseille : orphée aux enfers / françois jestin nice : le freyschütz / françois jestin montpellier : cosi fan tutte / françois jestin milan : la traviata / gabriele bucchi zurich : fidelio & les maîtres-chanteurs / éric pousaz vienne : die zauberflöte, peter grimes, idomeneo / éric pousaz berlin : falstaff, il trovatore, cosi fan tutte, la finta giardiniera / éric pousaz londres : les vêpres siciliennes & wozzeck / éric pousaz nice : festival manca / pierre-rené serna 51 musique 51 52 53 concours de genève : palmarès / fran nyon et genève : quatuor signum / pierre jaquet genève : l’orchestre de chambre de pologne / beata zakes 259 / février 2014 54 55 56 57 58 59 60 portrait : sylviane deferne / yves allaz portrait : estelle revaz / yves allaz quatuor de genève : saison / christian bernard agenda genevois / martina diaz entretien : françois volpé & l’ocg / martine duruz portrait : lars vogt / yves allaz genève : quatuors hugo wolf, belcea et jerusalem / m. duruz 62 ailleurs 62 63 danse chronique lyonnaise & roi lear / frank langlois 63 64 65 66 bfm : mémoire de l’ombre de ken ossola / e. rüegger lausanne : béjart ballet & le mandarin / michel perret cannes : festival de danse / bertrand tappolet bonlieu annecy : rachid ouramdane & sfumato / b. tappolet 67 spectacles 67 68 69 69 spectacles onésiens / firouz-elisabeth pillet festival antigel / firouz-elisabeth pillet marionnettes de genève / firouz-elisabeth pillet théâtre am stram gram / firouz-elisabeth pillet 70 expositions 70 71 72 72 73 73 74 74 75 75 76 ferme de la chapelle : linda naeff / françoise-hélène brou cabinet d’arts graphiques : not vital / françoise-hélène brou mémento beaux-arts : france palais lumière, évian : joseph vitta - passion de collection mémento beaux-arts : ailleurs bologne : l’âge d’or de la peinture hollandaise mémento beaux-arts : suisse romande fondation de l’hermitage : le goût de diderot mémento beaux-arts : suisse alémanique fondation gianadda : beauté du corps dans l’antiquité grecque berne : germaine richier / régine kopp 79 paris 79 80 81 81 82 86 87 88 88 89 89 théâtre de la colline : le canard sauvage / frank fredenrich comédie française : psyché / julien roche maison de la culture du japon : symphonie m / s. nègre opéra de paris : le parc / stéphanie nègre opéra : puritains pur jus / pierre-rené serna sélection musicale de février / françois lesueur chronique des concerts / david verdier mémento théâtre théâtre hébertot : le roi se meurt mémento expositions atelier grognard : les peintres du paysage provençal 90 les mémentos ABONNEZ-VOUS! Découvrez chaque mois dans nos pages : L’actualité culturelle d’ici et d’ailleurs Cinéma Concerts Livres Opéra Critiques Danse Expositions Théâtre Entretien Avant-Premières Mémento Scènes Magazine - Case postale 48 - 1211 Genève 4 Tél. (022) 346.96.43 / de France +41 22 346.96.43 www.scenesmagazine.com / e-mail : [email protected] COMMANDE D’ABONNEMENT scènes magazine Nom Prénom Adresse Code Postal Localité Pays o un abonnement (10 numéros) à 80 SFrs / Europe : 120 Sfrs. / hors Europe : 140 Sfrs. o un abonnement France (10 numéros) à 70 € o un abonnement de soutien (10 numéros) à 100 SFrs à partir du N° A renvoyer à SCENES MAGAZINE CP 48 - 1211 GENEVE 4 - Suisse avec le règlement par chèque ou virement sur le CCP Scènes Magazine 12-39372-8 Date Signature EDITO direction Frank Fredenrich, Jean-Michel Olivier, Jérôme Zanetta comité de rédaction Christian Bernard, Serge Bimpage, Françoise-Hélène Brou, Laurent Darbellay, Frank Dayen, Martine Duruz, Frank Fredenrich, FirouzElisabeth Pillet, Jérôme Zanetta éditeur responsable Frank Fredenrich publicité Viviane Vuilleumier secrétaire de rédaction Julie Bauer collaborateurs Yves Allaz, Philippe Baltzer, Julie Bauer, James Berclaz-Lewis, Nancy Bruchez, Gabriele Bucchi, Claudia Cerretelli, Romeo Cini, Sarah Clar-Boson, Martina Diaz, Catherine Fuchs, Catherine Graf, Emilien Gür, Bernard Halter, Christophe Imperiali, Pierre Jaquet, François Jestin, Régine Kopp, Serge Lachat, Frank Langlois, David Leroy, François Lesueur, Anouk Molendijk, Samuel Monsalve, Michel Perret, Eric Pousaz, Stéphanie Nègre, Christine Pictet, Christine Ramel, Serene Regard, Nancy Rieben, Christophe Rime, Julien Roche, Emmanuèle Rüegger, Maya Schautz, Rosine Schautz, Raymond Scholer, Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet, Laurence Tièche Chavier, Tuana Gökçim Toksöz, David Verdier, Christian Wasselin, Beata Zakes, François Zanetta, Valérie Zuchuat maquette : Viviane Vuilleumier imprimé sur les presses de PETRUZZI - Città di Castello, Italie Qui veut perdre des millions ? u temps de Balzac et de Rossini, il était de bon ton chez les financiers, banquiers, hommes politiques ou autres privilégiés de fréquenter les coulisses des lieux de spectacles, à la recherche d'artistes complaisantes, cantatrices ou principalement danseuses. En échange de quelques rendez-vous, une certaine forme de confort était assuré aux bénéficiaires de cet intérêt, car nul ne se souciait à l'époque de retraite pour les intermittentes du spectacle : Sarah Bernhardt étant l'exemple le plus souvent cité de cette tradition particulière qui n'a guère choqué pendant plus d'un siècle. Dans l'entre-deux-guerre, sous l'impulsion sans doute d'une certaine évolution des moeurs, l'indulgence pour ce genre de comportement a progressivement disparu. Et c'est donc dès cette époque que le terme de « danseuse » a pu qualifier telle ou telle publication achetée par quelque nabab désireux de dépenser sa fortune. L'investissement était déjà risqué à l'époque, il est évident que cela ne s'est pas amélioré au siècle suivant; il est alors devenu fréquent de voir des personnalités connues et fortunées préférer s'offrir désormais... un magazine ou un journal. En France notamment, comme «nous avons des valeurs et des principes», ce qui a été confirmé récemment, les politiciens ont également fait en sorte que leur «comportement soit à chaque instant exemplaire», ce que chacun a pu constater. A Ainsi, en ce qui concerne la presse d'information, qu'il soit question de quotidiens ou d'hebdomadaires, il ne passe pas une semaine sans que des nouvelles de vente ou de rachat ne fasse l'bjet de supputations, le plus souvent sur un ton pessimiste. Ainsi, à titre d'exemple, on peut rappeler que Jeff Bezos, fondateur d'Amazon, a affirmé que « dans vingt ans les journaux imprimés sur papier auront disparus ». Si cette prédiction n'engage que son auteur, il faut tout de même rappeler que c'est lui qui vient de racheter... le Washington Post, ce qui doit tout de même causer quelques soucis à l'équipe du quotidien universellement connu depuis l'affaire du Watergate. Plus inquiétant encore concernant et la liberté de la presse, on peut noter que selon l'acheteur – voire le mécène en l'occurrence – peut souvent être une menace pour l'indépendance de la presse. Dans cette même capitale des Etats-Unis, c'est le Washington Times qui est mis gratuitement à disposition dans les hôtels, autrement dit le quotidien du Tea party financé par l'Eglise de l'Unification(sic), autrement dit la secte Moon. En France, le quotidien de Serge Dassault, le Figaro, est largement diffusé gracieusement dans les halls d'hôtels et d'aérogares, distillant à qui veut bien en profiter la prose de l'UMP. Plus près de nous, on sait que Christoph Blocher, non content de bénéficier quand il le désire de fréquents passages à la télévision alémanique, a commencé à avoir des appétits en ce qui concerne la presse écrite, avec, nul ne l'ignore, des moyens financiers considérables, les Bâlois ont été les premiers à le constater. L'achat d'une publication étant désormais quasiment sans espoir de profit, comparable en cela à un rachat de club de football, on ne peut donc qu'être sceptique quand aux motivations désintéressées d'éventuels acheteurs. En Suisse romande, un quotidien a été récemment proposé à la vente : alors, fluctuat nec mergitur ou... qui veut perdre des millions ? FF/SCENES MAGAZINE scènes magazine case postale 48 - 1211 Genève 4 Tél. (022) 346 96 43 de France 00-41-22 346 96 43 www.scenesmagazine.com e-mail : [email protected] c i n é le cinéma au jour le jour Cine Die Bilan de 2013 6 En essayant de classer les 556 films de toutes époques et provenances que j’ai visionnés en 2013, je me suis rendu compte que le cinéma m’a comblé de bonheur au moins une centaine de fois et qu’il n’est nul besoin d’écouter les Cassandre pisse-vinaigre qui annoncent régulièrement la fin du 7e Art. Est-ce à dire que je suis trop bon public ? En inspectant ma liste, vous abonderez peut-être dans ce sens-là. Et vous serez peut-être nombreux à ne pas voir vos films préférés parmi les miens. J’avoue que je n’ai pas compris l’engouement de la critique mondiale (et pas seulement hexagonale) pour La Vie d’Adèle de monsieur Kechiche, qui, après son chef-d’œuvre Vénus Noire (2010), retombe pour moi dans le travers majeur de ses premiers films : la tchatche interminable et collant à la réalité la plus banale (Abdellatif est selon certains le cinéaste de la durée). Sous prétexte d’authenticité, le cinéma doit-il être documentaire ou mourir ? Le vrai restera-til le beau, s’il est étiré en longueur ? Je vous avoue tout de suite que je n’ai jamais réussi à crocher à une série tv : est-ce pour les mêmes raisons d’allergie à la logorrhée ? To the Wonder de Terrence Malick est selon Positif une œuvre trop adulte pour séduire les foules. J’adore Olga Kurylenko et j’ai regardé ce film avec les yeux de Chimène. Pour moi, elle peut batifoler à longueur de journée sur toutes les surfaces possibles et imaginables, même sur une toile tendue à fleur de mer autour du Mont-Saint-Michel, mais cela ne fait pas un film. Et lorsque Javier Bardem entame une homélie sur l’impossibilité de l’amour devant Dieu, c’est tout simplement puéril. Bref, le côté philosophico-poétique de Malick n’a pas fonctionné cette fois-ci. m a couvre, à hauteur des petites gens, les signes avant-coureurs du nazisme, la remilitarisation de la Rhénanie, la seconde Guerre mondiale, l’occupation américaine, les années du miracle économique, puis fait un détour vers Munich, où Hermann Simon fait des études de musique entre 1960 et 1970 (histoire de se plonger dans les mouvements sociaux et révolutionnaires de l’époque) pour finir, au Hunsrück, avec la réunification de l’Allemagne et le changement de millénaire. Au total, une durée de 3131 minutes ! Avec son nouvel opus, l’octogénaire Reitz éclaire les conditions de vie des aïeux Simon à l’époque du Vormärz, lorsque le Hunsrück faisait partie du royaume de Prusse et que les paysans devaient tribut aux hobereaux locaux pour qui toute revendication libérale se devait d’être réprimée. Filmé dans un noir-blanc digital somptueux, avec des touches de couleur imbriquées pour des objets totémiques ou émotionnels (couronne de baptême, agate, louis d’or, drapeau), le film s’attache particulièrement au personnage de Jakob, fils du maréchal-ferrant Johann Simon : ce jeune autodidacte préfère l’apprentissage des langues et des civilisations au travail manuel, et entretient même une correspondance avec Alexander von Humboldt. Il rêve de l’Amazonie dont il étudie les peuplades et fait des plans sur la comète avec l’amour de sa vie, la petite Jettchen. mais c’est son frère qui épouse la belle et l’emmènera au Brésil. Déjà dans le premier Heimat, deux Brésiliens appelés Simon surgissaient à Schabbach à la recherche de leurs ancêtres. La boucle est donc bouclée. Jakob se concentrera sur autre chose, la première machine à vapeur du village, par exemple, et sur Florinchen qui sait si bien jouer du tuba. Rarement la mélancolie des occasions manquées et la nostalgie du lointain nous ont semblé aussi fortes au cinéma. Pourtant aucun distributeur suisse ne s’est intéressé à ce 4e volet. Les 10 meilleurs (par ordre alphabétique) 1. Die Andere Heimat – Chronik einer Sehnsucht (Edgar Reitz) Prodigieuse recréation d’un univers révolu, l’Allemagne rurale de 1842, lorsque la misère pré-industrielle fait mourir les enfants de diphtérie et active le désir d’émigrer. Diégétiquement, l’action se déroule dans le même village du Hunsrück, Schabbach (nom inventé par le cinéaste), où nous avons déjà pu suivre les destins de membres de la famille Simon dans trois précédentes sagas : Heimat – Eine Deutsche Chronik (1984), Die Zweite Heimat – Chronik einer Jugend (1992) et Heimat 3 – Chronik einer Zeitenwende (2004). Rappelons que leur histoire commence en 1919 avec le retour de Paul Simon, échappé des tranchées, à la forge paternelle et c 2. Django Unchained (Quentin Tarantino) En attendant 12 Years a Slave de Steve McQueen, récit ultraréaliste de la vie d’esclave sur les plantations de Louisiane, le film de notre affreux Jojo préféré s’offre comme une gifle revancharde à Hollywood qui a constamment balayé la servitude noire sous le tapis hypocrite de la bienséance. L’expédition nocturne d’un proto-KuKluxKlan qui expérimente les occultations faciales avec des sacs de jute troués vaut son pesant de jouissance et Leonardo di Caprio fait une répétition générale pour le rôle d’ordure intégrale qu’il semble affectionner ces temps-ci. 3. Gravity (Alfonso Cuaron) Le tour de force des plans séquence qui respirent dans un décor (où toute respiration hors combinaison est impossible) créé de toutes pièces à partir de térabytes pose un étalon pour les films à venir. Martin Haberscheidt et Antonia Bill dans «Die andere Heimat» a Don Johnson dans «Django Unchained» t u a l i t é c i n é m a 4. The Immigrant (James Gray) Dans cette complainte sur l’exploitation des plus faibles par les profiteurs de tous bords dans le New York du début du 20e siècle, les pourris ne sont pas ceux qu’on croit. Le proxénète est un bon patron d’entreprise et trouve sa rédemption dans l’amour pur qu’il porte à la petite Polonaise, laquelle est prête à toutes les humiliations pour sauver sa sœur poitrinaire. Les vraies ordures sont les bons catholiques, comme l’oncle des sœurs, les apôtres de la morale et les flics pourris. Gray est le dernier des romantiques. l’ouverture au fond du Pacifique est confortablement cachée aux yeux des humains. Mais allez expliquer un concept de physique à un littéraire…il bâille dès la première syllabe ! Le genre SF est suspect a priori, le genre des monstres géants à la japonaise doublement. Mais pour peu qu’on soit orienté vers le côté ludique, on peut prendre un plaisir fou à ces combats titanesques, où des quartiers entiers de Hongkong sont dévastés de façon aussi réaliste que possible et où les humains doivent conduire des robots géants pour tenir tête aux attaquants. Il n’y pas de mot en français pour awesomeness, mais Pacific Rim en est le paradigme. C’est aussi le film vers lequel semble avoir tendu tout le genre des kaiju eiga de notre enfance depuis l’ancêtre Gojira/Godzilla (1954, Ishiro Honda). Et c’est à mille lieues des infantiles Transformers (2007/11) de Michael Bay: dans Pacific Rim, la victoire n’est possible qu’à force de sacrifices. 7. Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa) Voir CINE DIE du numéro de mai 2013 8. La Vénus à la Fourrure (Roman Polanski) Voir CINE DIE du numéro de juillet-août 2013 Daniel Day-Lewis est «Lincoln» 5. Lincoln (Steven Spielberg) Dans ce film-cathédrale (je choisis le terme parce qu’il englobe à la fois le côté quasi religieux de l’entreprise et son côté Gesamtkunstwerk), Spielberg se concentre sur la dernière année de Lincoln, sur sa lutte pour faire passer le XIIIe amendement qui va abolir l’esclavage. En passant, il recrée tout l’environnement urbain, politique, civil, militaire, linguistique, mental, moral, vestimentaire, physique et psychique, en investissant chaque protagoniste (et il y en a des centaines) d’une identité propre, à un degré comme aucun film historique ne l’a fait jusqu’à maintenant. À commencer par une des plus bluffantes interprétations que Daniel Day-Lewis ait jamais données, avec une pose de la voix et de l’échine extraordinaire, communiquant instantanément la détermination, mais aussi l’inquiétude et la lassitude du président. Peut-être le meilleur film de Spielberg. 9. The Wolf of Wall Street (Martin Scorsese) En appliquant aux banquiers le même traitement halluciné et foisonnant qu’aux gangsters (Goodfellas (1990) et Casino (1995)), Scorsese met les premiers sur le même niveau que les seconds et signe son meilleur film depuis The Departed (2006). Même si le mage du pump and dump incarné par Di Caprio se donne comme jovial protecteur des intérêts de ses associés, il n’hésite pas à les trahir in fine pour échapper aux sanctions judiciaires. Nulle rédemption n’est requise pour qui ne comprend ni la notion d’amitié ni celle de la morale la plus élémentaire. Seul compte le profit fait sur le dos d’autrui. 6. Pacific Rim (Guillermo del Toro) Sur ce film pour « ados boutonneux », la critique a écrit les pires âneries : p.ex. « les kaiju seraient les descendants lointains de nos dinosaures » (Positif). Alors que leur origine est clairement signalée comme extra-terrestre : ils surgissent de ce que les physiciens appellent un « trou de ver », dont L'attaque de la maison de Ben Laden dans «Zero Dark Thirty» 10. Zero Dark Thirty (Kathryn Bigelow) A l’instar de The Hurt Locker, où elle avait étudié le travail des démineurs en Iraq avec un souci de documentariste, Bigelow décrit ici la traque et l’élimination de Ben Laden en collant autant que possible aux réalités de l’investigation et du terrain. Ce faisant, elle montre des choses désagréables qui ont fait hurler les critiques qui utilisent l’adjectif « étasunien ». Comme je ne le l’utilise pas, je n’ai qu’admiration à la fois devant le travail des enquêteurs et celui de la cinéaste. Au mois prochain Raymond Scholer Charlie Hunnam et Rinko Kikuchi dans «Pacific Rim» a c t u a l i t é 7 c i n é m a les cinémas du grütli Guillaume Brac, les frères Coen Le premier long métrage de Guillaume Brac, Tonnerre (2013), sélectionné l’été dernier à Locarno, sera dès le 5 février aux Cinémas du Grütli. L’occasion de découvrir un cinéaste attachant et subtil, déjà remarqué avec Un Monde sans femmes, moyen-métrage sorti en 2012 et disponible en DVD. 8 Un Monde sans femmes lui avait valu d’être justement rapproché du Renoir de Partie de campagne, du Rohmer de Conte d’été ou Pauline à la plage, et surtout du Rozier de Du côté d’Orouët et Maine Océan. Rien moins ! Et puis on découvrait déjà dans ce film Vincent Macaigne, excellent dans le rôle principal, que l’on retrouve dans Tonnerre. Etonnant, le parcours de Vincent Macaigne: alors qu’il poursuit depuis plus de 10 Tonnerre de Guillaume Brac. Ce n’est évidemment pas un hasard, ces films ayant en commun de chercher à dire, chacun à sa façon, les errements du cœur, de la raison et des destins propres à une génération qui cherche sa place tant mal que bien dans la France d’aujourd’hui. Première bonne surprise, on quitte pour une fois le pavé parisien pour se retrouver, en hiver, à Tonnerre (Yonne), 5000 habitants, LA province. Maxime (Vincent Macaigne), rocker intermittent dans la quarantaine, y est venu trouver refuge pour deux mois chez son père (Bernard Menez, impressionnant), ayant dû sous-louer son appartement parisien. Il est juste assez connu, grâce à un album, pour être interviewé par la jeune Mélodie, 25 ans, pour une radio locale. Maxime le Vincent Macaigne dans «Tonnerre» doux, l’hésitant, est attiré par ans une carrière de comédien, auteur et metteur Mélodie, séduite par sa gentillesse. Ils seront en scène de théâtre invité à Chaillot et Avignon, amants, passionnément. Mais l’ivresse des il se retrouve être l’acteur emblématique d’une débuts ne durera pas. Mélodie est rattrapée par nouvelle génération de cinéastes qui tous ont vu ses doutes, sa peur d’affronter (elle n’a pas osé leur premier long-métrage sélectionné d’emblée aller passer un examen), son pessimisme (“je à Cannes ou à Locarno en 2013. On le retrouve t’amuse, tu aimes bien me baiser, tu me quitteainsi tenir un rôle principal dans La Fille du 14 ras dès que tu en auras marre”) sa difficulté à juillet (Antonin Peretjatko), La Bataille de choisir entre Maxime et son ancien amant, Ivan, Solférino (Justine Triet), 2 automnes 3 hivers un footballeur dans l’équipe locale. Commence (Sébastien Betbeder) et, justement, ce très beau pour Maxime la traversée des affres de la pas- a c t u a sion et de la jalousie. Le très grand charme du film tient à la conduite buissonnière d’un récit qui prend tout son temps, se construit par petites touches rétrospectivement significatives, ne craint pas de s’égarer en toute liberté dans des détails à forte valeur documentaire mais pas vraiment nécessaires à l’avancée de l’histoire. D’ailleurs quelle histoire ? Il y en a deux en fait, finement entrelacées : celle du triangle amoureux Maxime-Mélodie-Ivan, conduite au présent, qui frôle la tragédie, et celle des rapports de Maxime et de son père, faits d’affection, mais pas seulement car il y a entre eux un passé qui ne passe pas, du côté du fils en tout cas. Ce n’est qu’aux deux-tiers du film que Maxime éclate brutalement : “tu sais que tu as détruit Maman pour une gamine qui t’a largué ensuite comme une merde ?”. L’affrontement qui suit montre un Bernard Menez comme on ne l’avait jamais vu, à mille lieues des personnages falots qu’il a trop souvent incarnés. Brac rend totalement crédible l’histoire de ces personnages sans méchanceté, simples victimes de leurs sentiments contradictoires. La fin du film, dans un magnifique retournement des sentiments de chacun, évite la tragédie vers laquelle tout semblait conduire, et suggère un ordre sous-jacent au chaos des passions. Joel et Ethan Coen On s’en voudrait de ne pas signaler, toujours en février, la rétrospective quasi complète (15 films sur 16) de l’œuvre des Coen. Aux dernières nouvelles, seul manquerait à l’appel leur premier film, Blood Simple. Occasion exceptionnelle de refaire le parcours d’une œuvre joyeusement féroce qui revisite les principaux genres du cinéma classique américain : la comédie burlesque (Arizona Junior), le film de gangsters (Miller’s Crossing), la comédie sociale matinée de fantastique (Barton Fink), … Comme l’écrit Michel Ciment, “il y a du Swift chez ces humanistes qui s’interrogent sur l’absurdité de la condition humaine dont certains représentants incarnent la stupidité à l’état pur. Il y a aussi du Kafka dans leurs intrigues labyrinthiques où le drame côtoie le burlesque.” Ce qui n’exclut pas une réelle tendresse pour les perdants (Barton Fink, A Serious Man, Inside Llewyn Davis). Christian Bernard Plus d’informations sur : www.cinemas-du-grutli.ch/ l i t é c i n é m a show, comme Jordan Belfort emballe ses interlocuteurs ? S’expliquerait alors l’impression d’être brutalement ramenés sur terre, dans la très émouvante scène finale, qui voit un Jordan Belfort d’après la chute s’adresser à un public de gens normaux, comme vous et moi, grands Dès les premières minutes de The Wolf of Wall Street on a le sentiment de absents du film jusque-là. retrouver Scorsese reprenant les formules des Affranchis ou de Casino : Comme toujours avec Scorsese, les même retour sur la trilogie fric, sexe et dope, mêmes héros inspirés de seconds rôles sont impeccables et les scènes de personnages ayant réellement existé, même montage virtuose et vitaminé, face à face sont des modèles : l’initiation de même recours à des musiques d’anthologie. Belfort par un trader plus qu’allumé (excellent Matthew McConaughey), la tentative très diplomatique de corruption d’un agent du FBI par un Et puis, rapidement, on se rend à l’éviden- le morceau. Toujours en représentation, il est, Belfort maître en suggestion, sont, entre autres, ce : la formule fonctionne toujours aussi bien et plus encore que les mafieux des films précé- de grands moments. On appréciera particulièreThe Wolf of Wall Street est digne des Affranchis dents, un acteur et un metteur en scène. Comme ment sous nos latitudes le déplacement de ou de Casino, autrement dit un grand Scorsese Scorsese en somme. Le show permanent qu’est Jordan Belfort à Genève. N’aimant pas prendre que nos petits-enfants montreront à leurs la vie des golden boys, l’étalage de tout ce que l’avion, il absorbe une quantité de qualuuds en enfants dans quelques plus de l’habituelle coke décennies. qui le mettent dans un tel Le film est une état que les hôtesses de adaptation du roman Swiss auront le plus grand autobiographique du mal à le maîtriser (à noter même nom écrit par le que leur attitude pincée trader Jordan Belfort à offre un contraste refroisa sortie de prison en dissant par rapport aux 2005. Belfort est un surtomberaux de prostituées doué de la vente, qui vues jusque-là). Quant aurait été capable de aux scènes sur fond de jetvendre des skis dans le d’eau mettant aux prises Sahara, a fortiori des Belfort et un banquier actions pourries à des genevois (Jean Dujardin clients naïfs en toute jonglant avec deux lanillégalité. Bienvenue gues), elles confirment dans le monde de la qu’il est imprudent pour finance, en tous cas un citoyen US d’amener Leonardo DiCaprio (Jordan Belfort) dans «The Wolf of Wall Street» celui des traders de Wall son argent non-déclaré en © 2013 Universal Pictures Int. Switzerland Street, où la testostérone Suisse. Last but not least, le choix des musiques, est partout, le dollar la seule valeur, et l’entuba- l’argent leur permet (fêtes, orgies, yachts, etc.) ge du client (record absolu de l’utilisation de est la matière même du film. Pour eux, l’argent- dont on sait l’importance dans les films de “fuck”) the name of the game. roi est là pour être gagné et aussitôt dépensé Scorsese, constitue, comme celui de Casino un Il y a encore et toujours, ça n’est pas nou- sans compter, transformé en signes extérieurs best of de ce qui s’est fait de mieux depuis un demi-siècle avec un accent particulier mis sur le veau, quelque chose de fascinant dans la maniè- de richesse dans un potlatch en circuit fermé. re dont Scorsese rend fascinant justement, et par Témoin de ce show, le spectateur, lui, se rock, country rock et rhythm and blues. Pas étonmoments attachant, un personnage bigger than trouve partagé entre le pur plaisir de consom- nant si on sait que la supervision musicale en a life, monstrueusement amoral, destructeur et mer ces signes de richesse pour vulgaires qu’ils été confiée à Robbie Robertson, collaborateur de auto-destructeur, à l’image du système dont il soient, et le plaisir non moins grand de partager longue date de Scorsese, figure majeure de la fait la conquête. C’est que le personnage est une réflexion sur la place de l’argent aux Etats- scène musicale américaine jusqu’à aujourd’hui, complexe, intelligent, séducteur bien sûr, impi- Unis aujourd’hui et le pouvoir dont disposent guitariste fondateur du Band, un temps groupe de toyable, généreux, fidèle en amitié, capable de ses détenteurs (Belfort en American Hero fasci- Bob Dylan, dont le concert d’adieu a été filmé trahison, contradictoire, humain donc. Il faut sant). Le spectateur est d’autant plus partie pre- par Scorsese (The Last Waltz). Indifférent au dire que ce personnage à facettes est incarné par nante de ce carnaval qu’il est habilement mis à souci de “faire époque”, il s’offre le luxe de monun Leonardo DiCaprio totalement investi et qui distance par Scorsese en un cocktail réjouissant ter la chute et l’arrestation de Belfort situées au tient là peut-être son meilleur rôle à ce jour. de cynisme et d’humour déluré (on rit beau- début des années 2000 sur Mrs. Robinson de Jordan Belfort est un personnage dont la coup) porté par la voix off de Belfort. Et si Simon and Garfunkel sorti en 1968… Christian Bernard vie consiste à convaincre, à motiver, à emporter Scorsese nous emballait avec ce show dans le sous la loupe The Wolf of Wall Street a c t u a l i t é 9 c i n é m a février à la Cinémathèque suisse Chris Marker 10 La rétrospective du seul vrai essayiste de cinéma, Chris Marker (son vrai nom est Christian-Hippolyte-François Bouche-Villeneuve), bat son plein. Sur les quelque 50 titres répertoriés, on peut en voir 22, ce qui n’est pas mal du tout. Le choix nous semble bien équilibré, d’autant plus que certains ne nous sont familiers que par ouï-dire. Incontournables : Le Joli Mai (1963), le premier mois de mai après la fin de la guerre d’Algérie, laisse parler des Parisiens qui respirent une paix et un bonheur retrouvés, conscients toutefois que la réalité n’est pas si rose : les salaires misérables, la violence policière, les inégalités persistent. Lettre de Sibérie (1958), tourné au milieu de nulle part, c’est-àdire à Iakoutsk, voit Marker fasciné par le chamanisme et sa ténacité à résister au collectivisme. Le commentaire humoristique vaut son pesant d’or. La Sixième Face du Pentagone (1968) s’attache à rendre compte « à chaud » de la marche du 21 octobre 1967 sur le Pentagone, organisée pour protester contre la guerre du Vietnam. Le film détaille les multiples visages de la contre-culture bigarrée en marche : depuis les membres du parti nazi et des partisans du Che aux anciens combattants, en passant par des hippies exorcisant le Pentagone, le trio de folk « Peter, Paul & Mary » et des célébrités comme Norman Mailer. Le Fond de l’Air est rouge (1977/1996), fait, en 3 heures épico-dialectiques, le point sur les mouvements révolutionnaires (qui ont balayé le monde dans les années soixante et septante) et leur déclin. Dans A.K. (1985), Marker se pâme devant le travail de Kurosawa pendant le tournage de Ran. Dans Sans Soleil (1983), il évoque en contrepoint l’industrialisation japonaise et le sous-développement africain. Pour tous les autres titres, prière de se rapporter au bulletin de la Cinémathèque Suisse. Après l’Apocalypse Le cycle de films post-apocalyptiques est censé accompagner l’exposition « Stalker – Expérimenter la Zone » à la Maison d’Ailleurs d’Yverdon. Si la vingtaine de films englobe un bon nombre de titres vus à satiété, depuis Le Dernier Combat (1983, Luc Besson) et Twelve Monkeys (1995, Terry Gilliam) à la trilogie Mad Max (1979-1985, George Miller) et On the Beach (1959, Stanley Kramer), il y en a quelques-uns qui n’ont strictement rien à voir avec le sujet. Il n’y a pas trace d’une apocalypse dans Black Out (1970) de Jean-Louis Roy. Peut-être que les programmateurs ont confondu avec Le Troisième Cri d’Igaal Niddam (1970), où dix personnes assurant l’entretien d’un abri atomique sont prises au piège lorsque l’alarme retentit, que les portes se ferment et que la com- munication avec l’extérieur est coupée net. On peut au moins supputer qu’il y a eu une sorte d’apocalypse. Selon imdb.com, le film de Niddam est un drame de parents qui ont des enfants atteints de fibrose cystique ! Comme quoi, il ne faut pas se fier aux oracles du web : ceci explique peut-être cela. Il n’y a pas non plus eu d’apocalypse dans Delicatessen (1990, Jeunet et Caro) : bien sûr que imdb qualifie la société bizarro-surréaliste du film de post-apocalyptique et, hop, les copieurs copient. De même, Soylent Green (1973, Richard Fleischer) et THX 1138 (1971, George Lucas) ne sont que des extrapolations du problème de la surpopulation. Ces films auraient pu être remplacés par de vrais récits post-apocalyptiques rares, comme A Boy and his Dog (1975, L.Q. Jones), Malevil (1981, Christian de Chalonge), The Ultimate Warrior (1975, Robert Clouse) ou encore Fin d’août à l’hôtel Ozone (1967, Jan Schmidt), qu’on n’a plus vus depuis belle lurette. On peut cependant savoir gré à la Cinémathèque de montrer enfin le seul space opera suisse, Cargo (2009) de Ivan Engler et Ralph Etter : mais pourquoi ce film, qui n’est jamais sorti en Suisse Romande, n’a-t-il pas droit à une avantpremière, rite événementiel tant prisé par la Cinémathèque ? Sans doute parce qu’il a déjà eu les honneurs de la télévision. On peut aussi être content que, parmi les adaptations de I am Legend de Richard Matheson, le rare The Last Man on Earth (1964, Ubaldo Ragona & Sidney Salkow) avec Vincent Price soit montré au lieu du bien connu The Omega Man (1971, Boris Sagal) avec Charlton Heston. Reste à savoir si nous sera servie la version italienne (horreur !) ou l’anglaise. Depuis que la Cinémathèque a montré dernièrement Travels with my Aunt (1972) de George Cukor (avec Maggie Smith !) en espagnol …. on s’interroge! Caveat emptor ! Avant-gardes russes et sport Pendant les JO de Sotchi, vous pouvez prendre un bain de cinéma soviétique coulé par François Albera : Il n’y a rien à jeter. Les Aventures Extraordinaires de Mister West (1924, Lev Kouléchov), satire des préjugés antisoviétiques occidentaux et La Poupée aux millions (1931, Serge Komarov) sont des comédies délicieuses, Seule (1931, Trauberg & Kozintsev) une belle histoire du dévouement d’une enseignante aux prises avec les traditions locales dans le lointain Altaï. Raymond Scholer «La Jetée» de Chris Marker a c Plus d’informations sur : www.cinematheque.ch/ t u a l i t é c i n é m a sa narration empêchent à mon goût toute pédanterie et tout intellectualisme froid, même si le dispositif empêche les envolées romantiques (cf. la fin de la première partie où Joe crie qu’elle ne ressent rien alors qu’elle croit avoir trouvé l’amour dont manquait sa sexualité). Mais il ne faut pas croire non plus que le film ne touche jamais le cœur du spectateur. Ainsi le chapitre 4 entièrement consacré à la A force de s’attendre, influencés par la rumeur, à un film pornographique, mort du père (amour et mort, forcément !) moncertains seront peut-être surpris de trouver en lieu et place un vrai projet tre parfaitement comment fonctionne le film : d’artiste et de philosophe. dans un premier temps, sur son lit d’hôpital, le père rassure sa fille (il sait philosopher et, comme médecin, il sait ce qu’est la mort pour Certains films sont précédés d’une rumeur, gré de chapitres clairement intitulés, ce qui avoir vu passer de vie à trépas de multiples d’un buzz, qui empêche de les voir pour ce donne d’entrée de jeu une dimension littéraire patients), mais dans un deuxième temps, il fait qu’ils sont. Ainsi, Nymphomaniac est tout au film avec ce que cela suppose de refus du une terrible crise d’angoisse, doit être attaché et entier soumis à un regard qui attend un film por- naturalisme. Seligman recueille ce témoignage sa fille le retrouve mort et souillé de ses déjecnographique. Lars von Trier, en vieux provoca- sans juger, essayant au contraire de persuader tions. Scène terrible dont le cinéaste modifie teur qu’il est (cf. le choix du titre !), doit s’en Joe qu’elle n’est pas mauvaise. Il occupe en encore le ton à la fin puisque Joe jouit en assisamuser et en espérer peut-être un nombre plus quelque sorte une position de psychanalyste tant à la toilette mortuaire de son père ! élevé de spectateurs. sans visée thérapeutique, commentant le récit Réaction que, dans le chapitre suivant intiOr le film, s’il est bien pornographique au qui lui est fait de remarques qui en élargissent le tulé « The Little Organ School », Seligman défisens étymologique du terme dans la mesure où propos et témoignent de son immense culture : nit comme fréquente avant de la mettre en peril montre des scènes sexuellespective. C’est dire que ment explicites, ne l’est auculoin d’offrir une pure sucnement dans ses effets : cession de performances jamais il ne vise à exciter sexuelles, le film, par le sexuellement son spectateur, dialogue avec Seligman, bien au contraire. replace le comportement On demande souvent au de Joe dans un contexte critique ou à ceux qui l’ont vu socio-politique, histos’ils ont aimé tel ou tel film. rique, musicologique et Le cinéma de Lars von Trier philosophique ! C’est échappe à ce type de jugeainsi que la multiplicament. Il s’offre comme un vrai tion des partenaires projet d’artiste (et de philosoamène à parler polyphophe) avec une mise en forme nie et à évoquer la divine Joe (Charlotte Gainsbourg) dans «Nymphomaniac - Part 1» © Ascot Elite rigoureuse, mais ne se préocmusique de Bach et cupe pas de plaire. Il est même souvent déceptif ainsi, il compare l’apprentissage de la séduction Palestrina, mais aussi à évoquer les mathémaau sortir du film pour se dévoiler dans le temps. à celui de la pêche à la mouche (mais ce qui est tiques avec la « suite » de Fibonacci… Cela vaut d’autant plus que mon commentaire dit vaut aussi comme art de fasciner le lecteur Certains trouveront cette manière de parler ne porte que sur la première partie du film. ou le spectateur), ou encore il compare les expé- de sexualité irritante d’intellectualisme. Or il ne Mais le dispositif ne devrait guère changer pour riences sexuelles de Joe à la polyphonie dont il faut jamais oublier le caractère ludique de ce la 2ème partie et ce commentaire ne devrait pas retrace l’histoire. Ainsi, il est tout esprit et elle dialogue (qui fait penser au dialogues philosoêtre radicalement modifié après visionnement est tout corps, il est théorie, elle est pratique. phiques du 18ème siècle) : jamais le film ou son de celle-ci. Ensemble, ils vont faire du récit de Joe une réalisateur ne prétend formuler des vérités, réflexion sur la sexualité, la nature, la mort. Aux encore moins LA vérité. Sinon peut-être cellePar un soirée pluvieuse et froide, un convictions initialement simplistes de Joe ci : le plaisir (quand il existe) du sexe n’est rien homme d’âge moyen, Seligman, découvre une (amour = sexe + jalousie), sa vie et Seligman sans le plaisir de parler de sexe ! femme qui gît sur le sol après avoir été visible- par son immense culture vont donner de la comSerge Lachat ment rouée de coups. Il la ramène chez lui, soi- plexité, de la subtilité. gne ses blessures et veut appeler la police, ce Le dispositif peut sembler « abstrait » et qu’elle refuse énergiquement, arguant qu’elle aride, il est au contraire très riche dans la NYMPHOMANIAC (Volume 1) de Lars von Trier est nymphomane, donc « mauvaise », comme en réflexion proposée et souvent drôle. Cet humour avec Charlotte Gainsbourg, Stellan Skarsgard, Stacy témoigne sa vie sexuelle qu’elle va raconter au constant et la légèreté avec laquelle Joe conduit Martin… sous la loupe Nymphomaniac (Volume 1) a c t u a l i t é 11 c i n é m a Les films du mois 12 Marion Cotillard et Joaquin Phoenix dans «The Immigrant» © 2013 Anne Joyce THE IMMIGRANT de James Gray, avec Marion Cotillard, Joaquin Phoenix, Jeremy Renner (USA, 2013) The Immigrant est à la fois un mélodrame confinant à la tragédie, une critique sur fond d’épopée du rêve américain, et le film d’un grand cinéaste dont la thématique récurrente est l’identité et ses clivages. On retrouve d’emblée avec The Immigrant la marque des grands mélos de l’histoire du cinéma, qu’ils soient signés Griffith, Sirk, ou Minnelli : la totale croyance du cinéaste, loin de tout calcul, à l’histoire racontée, celle de personnages archétypaux (le Méchant, la Victime) figures du Bien et du Mal, histoire de chute, de rédemption, de pardon. Mais s’agissant de James Gray, ces figures se complexifient pour progressivement laisser apparaître des identités multiples, contradictoires, comme le sont toutes les identités. A Ellis Island, porte d’entrée des immigrants venus d’Europe, Ewa Cybulska (Marion Cotillard), jeune Polonaise ayant débarqué avec sa sœur, est en difficulté. On s’apprête à lui refuser l’entrée aux Etats-Unis au prétexte qu’elle aurait eu une conduite débauchée pendant la traversée, alors que sa sœur est mise en quarantaine pour une possible tuberculose (on est dans les années 20). Bruno Weiss (Joaquin Phoenix), un proxénète habitué du lieu où il vient guetter ses proies avec la complicité d’un agent de l’immi- a gration, intervient providentiellement pour lui permettre de débarquer à New York. Manipulateur, séducteur, il apporte à Ewa l’aide que celle-ci ne trouve nulle part ailleurs (un oncle qui a déjà fait son trou refusant d’héberger une sanspapier). Grâce à lui, elle sera réconfortée, nourrie, logée. Il lui propose d’entrer dans la troupe de danseuses qu’il dirige et qui est hébergée dans un cabaret. Le prix à payer se révèle rapidement. Terrorisée par la violence dont peut soudain être capable Bruno, Ewa accepte ce qui lui apparaît être le seul moyen d’atteindre son butc: retrouver sa sœur. Mais comme on peut s’y attendre avec James Gray, les choses ne demeurent pas si simples. Bruno le manipulateur, le bonimenteur, est sincèrement amoureux de celle qu’il avilit, d’où ses soudains accès de générosité, mais aussi de jalousie. Jalousie stimulée par l’apparition d’un cousin, Orlando (Jeremy Renner), illusionniste de profession, amoureux d’Ewa qu’il veut arracher à sa situation et emmener en Californie. Leur rivalité d’un archaïsme biblique est l’occasion pour James Gray de revenir sur ce qu’il ne cesse de décrire de film en film : l’identité au sein de la famille et les ressemblances malgré lesquelles – ou à cause desquelles - frères, cousins etc. ne cessent de s’affronter. Ewa quant à elle, dépassée dans un premier temps par la violence de Bruno, s’endurcit dans sa condition et ne répond en rien à ses avances, parfaitement au clair sur le fait qu’elle ne l’utilise qu’à cause de c t u a sa sœur. Elle trouve sa force dans cette fidélité et dans la prière (magnifique Marion Cotillard filmée comme une Madone de Bellini). Cette histoire à trois finira en tragédie portant chacun audelà de lui-même dans des retournements bouleversants : pour Bruno, la conscience de sa vilenie, la volonté de réparer, l’appel du châtiment. Pour Ewa, le pardon accordé. Ainsi le rachat et le salut par la prière ou le pardon apparaissent comme l’envers du rêve américain qui ne se conquiert, le film le montre avec une force rare, que dans le rapport de force et la maîtrise des apparences, avec son cortège de contraintes, de corruption, de violence et de racisme. Tout cela est offert avec un formidable sens du détail parlant. Ainsi Bruno, chassé du cabaret avec ses filles, les propose aux passants dans Central Park comme “les filles des Morgan, des Astor…”, tandis que les candidats à l’immigration, retenus sur la sinistre Ellis Island, ont droit à un somptueux spectacle de Noël, l’Oncle Sam leur offrant d’emblée un aperçu de son savoir-faire en matière de show… Remarquable travail de reconstitution, précis et réfléchi, avec une mention particulière pour le chef-opérateur Darius Khondji dont la palette s’étend des tons chauds (le cabaret) au sépia des photos de l’époque, donnant un sentiment physique de la précarité. Les musiques elles aussi font sens dans ce film où rien n’est laissé au hasard : lorsqu’on se retrouve dans les égouts sous Central Park pour une chasse à l’homme entre Bruno et la police, scène à la limite du fantastique, des cordes wagnériennes issues de la Tétralogie (autre mélo) se font discrètement entendre. James Gray ne crée pas seulement un effet saisissant, il indique sans fausse modestie à quelle altitude il convient de situer ce film au souffle puissant. Christian Bernard L’AMOUR EST UN CRIME PARFAIT d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu, avec Mathieu Amalric, Karin Viard, Maïwenn, Sarah Forestier, Denis Podalydès… France-Suisse 2013 « Entre chien et loup » : l’expression (qui est aussi le nom d’une des sociétés de production du film !) pourrait servir de sous-titre à ce film : en effet, dès la première scène, sur une route de montagne les phares de la voiture conduite par un Marc (Mathieu Amalric) en état second vont fugacement éclairer (et ce ne sera pas la seule fois dans le film) un loup ou un chien. Un premier plan qui donne déjà la couleur du film : une l i t é c i n é m a atmosphère nocturne, presque de conte, un paysage de montagne, avec une sensation de danger imminent et une excitation sexuelle qui enivre les protagonistes. Le film est très fidèlement adapté du roman de Philippe Djian Incidences (2010) : pas une scène et pas un personnage du livre ne sont absents du film, au point que dans un premier temps je me suis demandé ce que les Larrieu avaient pu ajouter au roman. Indéniablement, l’univers des frères cinéastes et celui du romancier ont en commun un goût pour des histoires aux atmosphères troubles et sexuellement électriques, pour des personnages aux pulsions incontrôlables et pour les zones d’ombres, tout en cultivant la légèreté, le ton de la comédie et le plaisir de jouer avec les genres… Marc (Mathieu Amalric) est professeur à la Faculté des Lettres de l’Université de Lausanne. Ayant accepté sa propre faillite comme écrivain, c’est sans illusion qu’il enseigne « l’art d’écri- belle-mère de l’étudiante disparue, qui cherche à en savoir plus sur sa belle-fille, et qui lui avoue sa solitude d’épouse de militaire en mission. Coup de foudre : Marc découvre la passion dans les bras d’une femme de son âge, lui qui avait comme principe de ne jamais s’attacher et de n’avoir de relations qu’avec des étudiantes très jeunes. Malgré l’existence d’un policier chargé de l’enquête, le thriller n’intéresse pas plus les Larrieu que Djian. Ce qui semble les passionner, c’est de confronter leur(s) protagoniste(s) à deux lieux complètement différents : le lieu de travail de Marc (et là les cinéaste ont trouvé l’idéal !), le Learning Center de l’Université de Lausanne, un monument ou une plutôt une sculpture de verre, incarnation idéale d’une transparence qui se veut l’image d’un savoir académique omniscient, et la montagne qui est à la fois élan vers les blancheurs neigeuses et multiplications des versants obscurs, des zones d’ombres et des gouffres ciles. Personnage tout en failles dont vont nous parvenir quelques fragments d’un mystère familial : l’inceste avec sa sœur (et leur jalousie réciproque à l’égard de tous les autres partenaires) comme moyen de tenir face au monde après l’incendie (criminel ?) du chalet dans lequel étaient morts leurs parents… Pour cette histoire, les Larrieu ont su développer tout leur art dans le filmage des lieux et des paysages (au point de faire du Lavaux et du lac Léman des lieux où tout est possible selon la recette hitchcockienne) tout en refusant tout naturalisme au profit d’une approche somnambulique, voire surréaliste (Bunuel, Breton, Cocteau sont cités !). Leur film a beau multiplier les cadavres qui pourrissent dans les gouffres, évoquer la crise économique et la fin de la littérature comme du cinéma, il est traversé par un humour (noir) subtil qui le distingue de toute la production française contemporaine. Serge Lachat TWELVE YEARS A SLAVE avec Chiwetel Eliofor, Michael Fassbender, Paul Giamatti, Sarah Paulson, Lupita Nyong’o, Brad Pitt,… «L’amour est un crime parfait» © Vega films re », surtout à des étudiantes qu’il a la réputation de séduire avec une facilité déconcertante, ce qui lui vaut un regard sévère et soupçonneux de sa hiérarchie. Au tout début du film, il regagne avec une jeune étudiante le chalet dans la montagne qu’il partage avec sa sœur Marianne (Karin Viard, elle-même bibliothécaire à l’Université de Lausanne). Au lendemain d’une nuit d’amour qui s’annonçait torride, il découvre sans comprendre la jeune étudiante morte dans son lit. Au lieu d’avertir la police et en prenant soin de ne rien laisser soupçonner à sa sœur, il emmène le cadavre dans la montagne pour le précipiter dans un trou (sans fond ?), puis va enseigner comme si de rien n’était. Peu de temps après, il fait la rencontre d’Anna (Maïwenn) qui se présente comme la a c t u impénétrables. Mais la transparence du Learning Center est un piège : pas un cours, pas une rencontre avec un étudiant ou un collègue qui ne soit visible de tous. Avec ce que cela suppose comme surveillance de la hiérarchie et menaces pour le poste de Marc, qui donc, bien qu’il donne toujours l’impression de n’être pas concerné par ce qui lui arrive, souffre d’une paranoïa bien compréhensible au vu des secrets qu’il cache. Les Larrieu ont avec Mathieu Amalric, leur acteur fétiche, un Stradivarius pour incarner ce personnage à la fois tremblant et violent, passif et décidé, insécure et misanthrope, qui allume cigarette sur cigarette et dont les rapports avec sa hiérarchie comme avec sa sœur sont plus que diffi- a l i t Adapté de l’autobiographie éponyme de 1853 de Solomon Northup, Twelve Years a Slave est le 3ème long-métrage de l’Anglais Steve McQueen connu d’abord comme vidéaste plasticien, mais dont les 2 premiers longs-métrages ont montré qu’il est également un cinéaste de premier plan : Hunger (2009) qui évoque dans un filmage presque expérimental la grève de la faim jusqu’à la mort d’un militant de l’IRA (à l’image de celle de Bobby Sands), Shame (2011) parce qu’il offre un portrait glacé d’un « sex addict » new-yorkais. Dans les deux cas, le cinéaste semble fasciné par ce qu’un esprit humain peut infliger à son corps et il nous immerge dans cette « dérive » au gré de longs plans-séquences. Avec Twelve Years a Slave, McQueen s’attaque à un récit d’une amplitude spatiale et temporelle qui l’oblige à un cinéma plus classiquement narratif : nous sommes en effet entraînés dans la longue descente aux enfers de Northup, charpentier et violoniste, qui vit en homme libre avec sa famille au nord de New York, est piégé à Washington par des trafiquants et se retrouve esclave en Louisiane, propriété de maîtres toujours plus fous de violence raciale, avant d’être libéré grâce à l’aide d’un abolitionniste canadien. Mais la volonté du cinéaste de nous forcer à regarder et à sentir in cute ce qu’était l’esclavage au milieu du 19ème siècle l’amène à un traite- é 13 c i n é m a Chiwetel Eliofor (Salomon) dans «Twelve Years a Slave» © Ascot Elite 14 ment du temps différent de celui d’un film habituel. Même s’il ne peut plus travailler uniquement en plans-séquences, il recourt encore souvent à cette technique pour « figer » son récit et nous laisser le temps d’en mesurer l’horreur. Ainsi, pour s’être opposé à un contremaître blanc, Platt (privé de son identité dès le moment où il est esclave, Northup est appelé Platt) est pendu à une corde qui lui laisse juste la possibilité de se tenir sur la pointe des pieds. La fatigue, la terre meuble le condamnent à mourir étranglé à plus ou moins brève échéance. McQueen filme la scène en un plan-séquence qu’aucun spectateur ne pourra oublier : pendant tout le temps où, au premier plan, Platt s’efforce dans une horrible danse macabre de se tenir sur la pointe des pieds, en arrière-plan, on voit d’autres esclaves reprendre leur travail et leurs enfants rire et s’amuser, le tout dans la lumière et le décor extraordinaires de la Louisiane. La force du film (j’en suis sorti absolument bouleversé) tient dans la volonté du cinéaste de nous faire déchiffrer les rouages qui permettent à toute une société et à toute une économie de fonctionner sur l’esclavage : la Bible qui alimente les fantasmes de toute-puissance et de justice innée (et qui en même temps console les esclaves en leur promettant un monde meilleur dans l’audelà), les rapports de forces entre Blancs dont les Noirs sont toujours victimes (surtout lorsqu’ils sont confrontés à des Blancs eux-mêmes humiliés dans leur société), la capacité à nier toute humanité à la race noire qui permet toutes les outrances et surtout qui permet de considérer un Noir comme une marchandise, une propriété dont on use et abuse le plus naturellement du monde. Sans oublier bien sûr la façon de régner a en jouant de la concurrence entre esclaves, en favorisant certains esclaves au détriment des autres et en les dressant ainsi les uns contre les autres. Certains se demanderont ce qu’il y a là que nous ne sachions déjà. Je répondrai que le cinéma ne nous a pas vraiment gâtés sur ce sujet et que certaines piqûres de rappel sont toujours utiles, d’autant que McQueen ne manque pas de laisser comprendre que tout n’a pas disparu aujourd’hui de ces méthodes. Et puis, après Django Unchained de Tarantino qui, avec un sujet pas si lointain, offre surtout une distraction spectaculaire et jouissive, à performances d’acteurs au moins égales, le traitement « premier degré » de l’esclavage par McQueen me semble décidément plus en accord avec son sujet. Serge Lachat TEL PÈRE, TEL FILS de Hirokazu Kore-eda (Japon, 2013) avec Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Yoko Maki, Lily Franky, Keita Ninomiya,… Le début du film nous fait découvrir une famille de riches bourgeois tokyoïtes, les Nonomiya : le père, jeune architecte ambitieux, la mère au foyer et Keit, leur fils de 6 ans qui, trop passif, trop gentil, ne semble pas tout à fait répondre aux attentes de son père. Un père qui par ailleurs s’en occupe fort peu, trop absorbé par son travail. Un jour, on leur signale que leur fils a été échangé à la naissance et qu’ils peuvent prendre contact avec l’aut- c t u re famille pour procéder à l’échange des enfants comme le souhaite le père de Keita pour qui les liens du sang sont sacrés … Cette autre famille, de condition très modeste (le père tient un magasin de pièces détachées de matériel électrique et électronique) habite avec bonheur un minuscule appartement dans une banlieue pauvre. Le cinéaste semble vouloir jouer tout un jeu d’oppositions : luxe glacé-capharnaüm de petit commerçant, retenue des sentiments-exhubérance bruyante, discipline stricte-éducation cool, désir de régulariser la situation-refus d’envisager l’échange,… La situation et ce jeu des contrastes rappellent La Vie est un long fleuve tranquille de Chatiliez, mais Kore-eda, avec beaucoup de finesse et de tendresse pour tous ses personnages va modifier peu à peu les données et éviter ainsi la grosse farce sociale. Il évite en même temps le film à thèse, à contenu sociétal : sans occulter les graves questions que soulève la situation (le lien du sang vaut-il plus que le lien né du vivre-ensemble, est-il possible de contraindre des enfants de 6 ans à accepter de « nouveaux parents », une mère doit-elle se sentir coupable de ne pas avoir « senti » l’échange opéré, etc… ?), le cinéaste dépeint l’évolution des personnages dans le temps. En décidant de laisser aux enfants le temps de s’habituer à leur future vraie famille, en procédant à des échanges pendant les week-ends, tous se découvrent peu à peu. Ainsi les 2 mères se rapprochent, le commerçant abandonne ses rêves de devenir riche en faisant un procès à la maternité, l’architecte, en parlant avec son père, comprend mieux sa propre rigidité et ses blocages. Kore-eda joue ainsi avec beaucoup de légèreté sur différents registres : la situation douloureuse nous amène souvent au bord des larmes, mais le film multiplie les moments drôles. Et la «Tel père, tel fils» de Hirokazu Kore-eda a l i t é c i n é m a douceur et la grâce dans la manière de filmer les enfants, les ponctuations offertes par les Variations Goldberg et la fin ouverte emportent définitivement le spectateur… Serge Lachat WALKING WITH DINOSAURS de Barry Cook et Neil Nightingale Après avoir produit une série télévisuelle au succès retentissant à la fin des années nonante, le label « Walking with Dinosaurs » sort un long métrage en 3D. Durant 88 minutes, nous suivons les tribulations de Patchi, pachyrhinosaure un Dinosaurs réside dans l'auto-critique du récit oral de l'oiseau préhistorique. En effet, celui-ci effectue des commentaires sur le style ampoulé qu'il emploie, et traduit les phrases emphatiques qu'il lui arrive de formuler dans un registre de langage plus bas. Une autre source du comique lié à l'acte de narration trouve son origine dans le recours à la transgression des niveaux narratifs. Il arrive ainsi que la voix narratrice soit l'objet de disputes. Patchi essaie à un moment de prendre en main la conduite du récit, avant que l'oiseau préhistorique ne reprenne le dessus. La dimension transgressive de ces jeux sur la narration est néanmoins beaucoup moins forte «Walking with Dinosaurs» © Pathé films peu maladroit, de sa jeunesse jusqu'à l'âge adulte. Le héros, de migrations en migrations, découvre l'amour et apprend à affirmer son leadership ; à la fin du film, il deviendra le chef de son troupeau. Walking with Dinosaurs joint à l'histoire qu'il raconte une visée didactique : à l'apparition de chaque nouveau dinosaure, le nom de celui-ci apparaît à l'écran. Le mode du film est donc assez hybride : le récit est occasionnellement interrompu par la présentation des nouveaux dinosaures ; ce qui provoque autant de pauses dans la narration. Une des particularités de l'œuvre de Barry Cook et de Neil Nightingale consiste justement à jouer sur cette hybridité : le film s'affiche comme acte de narration, lequel s'interrompt fréquemment pour laisser place à des commentaires. Walking with Dinosaurs, en effet, trouve sa source dans un récit oral : le film n'est rien d'autre que la « mise en image » d'un récit fait par un corbeau à un adolescent rechignant à suivre son oncle dans une expédition paléontologique. Le corbeau, ancêtre d'Alex (un oiseau préhistorique), se métamorphose soudainement en son aïeul et se met à raconter l'histoire de Patchi. La voix de l'oiseau plane sur le film et contribue à établir la cohérence discursive du film. Un des ressorts du comique à l'œuvre dans Walking with a c t u que dans un film de fiction « traditionnel » ; ceux-ci appartiennent au genre du dessin animé et du film d'animation ; qu'on regarde n'importe quel épisode de Tex Avery pour s'en convaincre ! Emilien Gür ALEXANDRE THARAUD, LE TEMPS DÉROBÉ de Raphaëlle Aellig Régnier, avec Alexandre Tharaud, (France, 2013) A l’opposé de Bloody Daughter réalisé par Stéphanie Argerich, troisième fille de Martha, tout imprégné d’affect et du souci de se situer en tant que “fille de…”, Alexandre Tharaud, le temps dérobé est le portrait du pianiste virtuose par une cinéaste qui s’efface derrière son sujet. Son sujet ? Pas tant le portrait d’Alexandre Tharaud en tant que personne, que l’illustration très concrète de ce que le pianiste dit à un moment, “faire quelque chose de beau suppose que tellement de conditions soient réunies !”. Suivant au plus près le quotidien a l i du pianiste, devant ses partitions (en lisant il joue déjà avec ses doigts), au piano, enregistrant, en voyage, dans sa loge avant le concert, la caméra enveloppante de Raphaëlle Aellig donne à appréhender la sensibilité en train de travailler, car dans cette vie tout n’est que travail, exigence et sensibilité. En lui demandant de décrire ce qu’il éprouve dans ces différentes situations, elle lui donne l’occasion de révéler un tempérament fait d’exigence donc, mais aussi de modestie et d’humour. Et à nous, l’occasion de comprendre de l’intérieur de quoi est fait le métier de virtuose, les voyages, les attentes, la solitude et, toujours, le travail. De sa biographie nous ne saurons rien, sinon, au détour d’une phrase, que sa vie n’a pas été toujours facile (il se dit entouré par des morts). Il faut entendre Alexandre Tharaud parler des pianos et de leur sonorité, grand souci des tournées. Ceux avec qui ça n’ira jamais (trop neufs, n’ayant pas vécu) ou décidément irrattrapables. La poursuite inlassable du meilleur son est affaire collective: il y a ce moment étonnant où l’on voit deux spécialistes japonais modifier mécaniquement et en temps réel la sonorité d’un piano, ou celui, en studio d’enregistrement, où il est décidé que telle note sera modifiée par la technologie. Mais cette poursuite est d’abord et avant tout celle du pianiste: le voir s’exercer, reprendre encore et encore la phrase, montre à l’évidence qu’à ce niveau d’excellence technique, l’exigence porte sur des détails qu’un auditoire normal ne perçoit pas. Il faut également entendre Alexandre Tharaud évoquer le travail de mise en condition physique d’un pianiste, les tensions musculaires à combattre, tout ce qui lui permet de faire de son corps un instrument fiable, qu’il définit lucidement comme un “corps de Sagittaire, ancrage en bas, envol en haut”. Ou encore l’entendre évoquer l’entrée en scène Alexandre Tharaud © Marco Borggreve licensed to Virgin Class t é 15 c i n é m a comme on se jette dans la lumière, le public et ses attentes sentis en une seconde selon qu’il est jeune, vieux, connaisseur ou non, et puis, parfois, le moment de grâce, de rencontre, qui ne dure pas, ce vers quoi tout ce travail tendait. Tout sonne remarquablement juste dans ces propos et, plus généralement, dans ce film d’une grande délicatesse, porté par un amour vrai de la musique. Christian Bernard MUSEUM HOURS de Jem Cohen (Autriche, USA, 2012) avec Mary Margarete O’Hara, Bobby Sommer, Ela Piplits 16 Film déroutant, Museum Hours (présenté à Locarno en 2012) mérite de retenir notre attention même s’il a bien failli l’égarer en chemin. A lire le résumé du film, on pourrait s’attendre à une histoire d’amour : venue à Vienne pour veiller sur son lit de mort une cousine qu’elle a à peine connue, une femme fait la connaissance au Kunsthistoris-ches Museum d’un gardien bienveillant et aussi seul qu’elle, qui la prend sous son aile et lui fait visiter le musée et la capitale autrichienne. D’amour il n’y aura pas, l’homme préférant les hommes, sans que cela empêche nos deux personnages de s’éprendre d’amitié. On craint un instant que nous soit contée l’histoire pathétique de deux éclopés de la vie faisant, adossés l’un à l’autre, un bout de chemin ensemble, mais il n’en Mary Margaret O'Hara dans «Museum Hours» sera rien. Le film n’est narratif que par discrètes fulgurances, et encore ces séquences, qui ne décrivent aucune tableau, le visage d’un visiteur ou les rues de véritable progression, font-elles l’objet d’un mor- Vienne, ne s’offrent pas pour autant à la contemcellement qui en désamorce le drame. Comme plation. Le montage est d’une équanimité rythdes perles attendant d’être assemblées, les plans mique confinant à la monotonie et la photogradu film paraissent juxtaposés plutôt qu’enchaînés phie laisse à désirer : si le monde est susceptible les uns aux autres ; de même que les tableaux de d’être regardé comme un tableau, comme le comBruegel, minutieusement examinés par le prota- mentaire le suggère à la fin du film, l’image goniste, se composent d’une multitude de détails terne et cadrée à la va-vite n’y invite pas vrairéunis dans un même espace-temps, de même ment. On est cependant tenté, tout au long du Museum Hours se présente-t-il comme une col- film, d’attribuer ses imperfections à une volonté lection d’images du monde défilant sans consécution. Ces images, montrant le détail d’un THE LUNCHBOX de Ritesh Batra (Inde 2013) MARY QUEEN OF SCOTS IN THE NAME OF… de Thomas Imbach (CH, 2013) de Malgoska Szumowska, Pologne (2013) Qu’est-ce qui paraît plus improbable qu’un film en costumes sur une reine d’Ecosse et de France au destin tragique réalisé par un cinéaste suisse ?! Ce film existe pourtant, réalisé avec des moyens dérisoires par rapport aux exigences du genre par Thomas Imbach. Ce cinéaste suisse alémanique (qui avait déjà adapté un texte littéraire, le Lenz de Büchner) a été fasciné par la biographie de Marie Stuart par Stephan Zweig (alors que le cinéma s’est toujours inspiré de la Marie Stuart plus romantique de Schiller). Il en a tiré un film qui fait une peinture très contemporaine de cette jeune reine qui veut vivre pleinement et non dans l’ombre d’un homme. Et qui veut jouer un rôle politique actif et réconcilier l’Angleterre et l’Ecosse, catholiques et protestants, tout en revendiquant avec beaucoup de naïveté le pouvoir au nom de son « ancienneté ». Malgré les maladresses liées au manque de moyens et à l’inégalité des acteurs, le film mérite le détour pour son intelligence, ses trouvailles artistiques et pour la performance de son actrice principale Camille Rutherford absolument stupéfiante. On m’excusera de préférer le titre anglais au français Aime et fais ce que tu veux : le film de la cinéaste polonaise tout de finesse mérite mieux qu’un impératif trop explicite ! Dans un centre pour adolescents difficiles, au fin fond de la campagne polonaise, la pratique du sport sert de défouloir sur fond d’invectives antisémites et homophobes. Seul Adam, un jeune prêtre charismatique, parvient à faire respecter quelques règles et à protéger les plus faibles. Travaillé lui-même par ses pulsions, il se défoule dans de longues courses nocturnes en forêt (sublimes travellings). Peu à peu, le film dévoile le secret d’Adam : s’il repousse les avances de la femme de son collègue, c’est moins parce qu’il a fait vœu de chasteté que parce qu’il préfère les garçons. Tombé amoureux d’un des pensionnaires, Adam finit par assumer son homosexualité et par l’avouer à sa hiérarchie… Le film de Malgoska Szumowska mérite les éloges recueillis au Festival de Berlin : la cinéaste traite son sujet avec beaucoup de finesse et de délicatesse tout en l’exposant frontalement à l’Eglise (ce qui ne manque pas de courage en Pologne) et à ses spectateurs. Sur les conseils de sa voisine plus âgée, Ila mijote de succulents plats épicés pour reconquérir son mari, plats qu’elle lui fait parvenir à son bureau dans une lunchbox. Mais le livreur se trompe de destinataire et les repas arrivent sur le bureau d’un comptable proche de la retraite, veuf, amer et misanthrope. Si le mari ne dit rien de ces repas, et pour cause, le vieil employé dit son plaisir en glissant des commentaires élogieux dans la boîte. Naît ainsi un échange de messages de plus en plus intimes, messages de plus en plus attendus et qui devraient déboucher sur la rencontre des deux épistoliers… On reconnaîtra les ingrédients de comédies classiques (The Shop around the Corner de Lubitsch ou Love actually de Curtis), mais l’intérêt de ce petit film tient surtout à ce qu’il évite la lourdeur bollywoodienne et le happy-end attendu. Et qu’en arrière-fond de cette comédie sentimentale, il offre un regard documentaire sur les rues de Bombay et sur ses habitants, sur la vie dans les bureaux et dans les appartements exigus. Un peu comme le récent Ilo Ilo le faisait à partir d’une situation plus tragique pour la société de Singapour, The Lunchbox offre une petite radiographie de la société indienne. Serge Lachat Serge Lachat Serge Lachat a c t u a l i t é c i n é m a de dérouter notre regard, de le décentrer, un peu à la manière de cette guide selon laquelle ce n’est pas Saint Paul qui occupe le centre de gravité du tableau de Bruegel représentant sa conversion, mais l’enfant sous l’arbre qui porte une armure trop grande pour lui. En ne mettant pas le drame au cœur de son film et en ne prenant pas ses personnages sous une loupe trop scrutatrice, Jem Cohen laisse le spectateur libre de naviguer à vue, quitte à le désorienter parfois et à lui faire se demander quel peut bien être ce cap que le film vise sans jamais le désigner clairement. Julien Roche LE VENT SE LEVE… IL FAUT TENTER DE VIVRE Miyazaki, plutôt tournés vers un monde débordant de rêves et d’enchantements, un monde plutôt destiné à rassurer les enfants, ce dernier film présente le monde qui entoure les protagonistes comme toujours menaçant, plein de bruits et de fureur (les diverses catastrophes, les guerres), monde dans lequel il faut pourtant tenter de vivre, c’est-à-dire à la fois de se laisser porter par le vent et d’affronter les vents contraires. Telle est la leçon de ce mélodrame peut-être moins destiné aux enfants qu’aux spectateurs adultes. Serge Lachat de Hayao Miyazaki (Japon 2013, Studio Ghibli) A TOUCH OF SIN L’histoire racontée dans ce film d’animation s’inspire de la vie d’un passionné d’aviation : Jiro Horikoshi. Le film suit cet ingénieur de la découverte de sa passion d’enfant pour les objets volants, passion née de l’observation des oiseaux (et d’une arête de poisson !) et développée par la découverte des avions de l’ingénieur italien Giovanni Caproni (déjà évoqué dans Porco rosso, mais la passion de Miyazaki lui-même pour les objets volants est lisible au travers de toute son œuvre) à la création de l’avion de combat Mitsubishi A6M 1 Zero qui donna à l’aéronavale japonaise la suprématie des airs dans le Pacifique pendant de longues années. Engagé très jeune par Mitsubishi, Horikoshi, entièrement voué à sa passion et à son devoir de rattraper le retard du Japon en matière d’aéronautique, semble ne pas prendre conscience des catastrophes qui ponctuent l’Histoire du Japon en ce début de 20ème siècle : tremblement de terre du Kantô, incendie de Tokyo, dépression économique de 1923, épidémie de tuberculose, guerres avec la Chine, la Corée, la Russie, montée de l’extrême-droite. Catastrophes que le film évoque en arrière-plan, mais aussi au gré de vraies performances de cinéma d’animation, par exemple pour les images du tremblement de terre ! Miyazaki s’est aussi inspiré pour ce film du livre Le Vent se lève (19361937) de Tatsuo Hori pour le personnage de Nahoko, la jeune femme qui souffre de pneumonie et dont Horikoshi tombe éperdument amoureux. Magie des sentiments qui permet de traverser les épisodes les plus noirs en gardant le goût ou la volonté de vivre comme le dit la seconde partie du titre (qui est, il faut le souligner, un vers du Cimetière marin de Paul Valéry plusieurs fois cité en français dans le film). Contrairement aux autres films de a c t u de Jia Zhangke Quatre histoires de Chine : un mineur se révolte contre la corruption qui règne dans son village ; un ouvrier trompe son ennui dans le crime ; la réceptionniste d'un hôtel-sauna, poussée à bout par la violence quotidienne qu'elle subit, tue deux hommes qui la traitent comme une prostituée ; un jeune garçon, après avoir accumulé les petits boulots pour survivre, se suicide. Voilà à quoi ressemble le nouveau film de Jia Zhangke, qui, à travers son exploration de la vie quotidienne du sous-prolétariat chinois, lance un appel d'alerte sur la Chine d'aujourd'hui. Le tableau que dresse le cinéaste de son pays est sans concession : misère, violence et humiliation sont le lot quotidien des quatre personnages du film. La crudité de la fresque que nous livre le réalisateur chinois est un des grands mérites du film. Bien des articles de presse évoquent la misère morale et matérielle qui fait le lot quotidien de nombreux chinois ; aucun n'en témoigne comme le fait le film de Jia Zhangke, sans détour et de façon saisissante. Pour manifester cette violence avec tant de force, la forme chorale du film semblait s'imposer. Multiplier les personnages permet au cinéaste de réaliser une œuvre sans héros. Ce ne sont pas eux que le film met au premier plan, mais plutôt l'environnement dans lequel ils évoluent, contaminé par la violence et la corruption. Le meurtre y est monnaie courante, comme en témoignent crûment les deux premières histoires: le mineur révolté assassine tous ceux qui l'ont humilié ; l'ouvrier au chômage tue sans scrupule un homme et sa femme pour voler le sac de cette dernière. L'amour semble être étranger à ce monde brutal et violent : l'ouvrier de la deuxième histoire préfère le meurtre à son a l i t «A Touch of Sin» © Filmcoopi épouse. La femme, dans cette Chine, semble d'ailleurs se réduire à un simple objet sexuel. Quand on ne supporte plus l'oppression quotidienne, il ne semble y avoir que deux solutions : tuer ou mourir. C'est cette dernière voie qu'emprunte le jeune homme de la dernière histoire, qui se jette depuis son balcon. Il y avait une culture en Chine autrefois ; il semble maintenant n'y avoir plus que des exploités et des millionnaires vulgaires. La Chine est un pays dans lequel l'homme n'a plus sa place: tel est le message alarmant que nous livre le film de Jia Zhangke. En DVD : l’intégrale (Gaumont classiques) FANNY ET ALEXANDRE En 1982 à l’âge de 59 ans Bergman nous donnait ce qui devait être son dernier film, Fanny et Alexandre, somme proustienne et viscontienne nourrie de ses souvenirs d’enfance, un chefd’œuvre. D’abord sorti à la télévision dans sa version intégrale de plus de 5 heures, il le fut en salle dans une version ramenée à 3 heures. En DVD n’existait jusqu’à maintenant que l’édition Criterion sans sous-titre français. Le récent coffret de 5 DVD Blu-ray de la Collection Gaumont classiques servira désormais de référence. A côté de la version courte soustitrée en français, on dispose enfin de la version de 5 heures restaurée numériquement, rendant justice à la splendide photo du grand chef opérateur Sven Nykvist. Les bonus comprennent un film-préface d’Olivier Assayas ainsi qu’un précieux documentaire sur le tournage du film réalisé par Bergman lui-même. L’occasion de le voir au travail, son autorité, son inépuisable énergie, la précision de ses indications. En suivant le jeune Alexandre Ekdahl de son initiation à la magie du spectacle entre lanternes magiques et théâtres de marionnettes au sein d’une famille heureuse, jusqu’à son combat, le père mort, contre le terrible Vergerus, pasteur devenu son beau-père, c’est la complexité de Bergman, à la fois artiste solaire et moraliste sévère, qui se trouve éclairée. Christian Bernard é 17 c i n é m a cinémas du grütli Rendre visible l’invisible Everybody’s Perfect invite le cinéaste français Sébastien Lifshitz à présenter son dernier documentaire, Bambi, aux Cinémas du Grütli. Un portrait fascinant d’une transsexuelle au destin romanesque, livré par un cinéaste gay de talent. Entretien téléphonique. 18 Alors que nous venons récemment d’être témoins de débordements malheureux en France suite à l’acceptation du mariage pour tous, accélérant l’heure du débat de notre côté de la frontière, pas étonnant que le festival bisannuel Everybody’s Perfect (Festival du film lesbien, gay, bisexuel, transsexuel, intersexuel, queer & alliés de Genève) invite en prélude au lancement de sa troisième édition prévue en septembre, un cinéaste qui a fait de la question LGBT, son art. Fort heureusement, d’ailleurs. Sans quoi, Bambi serait certainement tombé dans l’anonymat tout comme Les Invisibles, le précédent documentaire du cinéaste, repêché l’an passé par le cinéma Spoutnik, faute de distributeur en Suisse. La photographie comme socle Le cinéma? Au départ, Lifshitz ne s’y destinait pas. Spécialisé en photographie et peinture contemporaine, il y est arrivé par hasard. Son intérêt pour la photographie ne quitte toutefois pas le cinéaste qui collectionne depuis toujours les images amateurs - souvent des portraits d’inconnus - «dont les couples homosexuels et les gens que j’identifie comme homosexuels dans ces images». Aux Puces de Vanves à Paris, il tombe un jour sur l’album de deux vieilles dames bourgeoises aux allures de couple, une supposition qui se révèle exacte. De cet album naît l’idée du film Les Invisibles sorti en 2012 et césarisé en 2013. Et en octobre dernier, Sébastien Lifshitz publie un recueil de photos éponyme qui met en scène des couples d’aînés LGBT, réels ou imaginés, issues d’images accumulées sur une vingtaine d’années. fois lumineuses, parfois tragiques, toujours réalistes et propices au questionnement. C’est ainsi qu’avec Les Invisibles, il nous emmène à la rencontre d’homosexuels épanouis de 70 à 90 ans, hommes et femmes, en couples ou seuls, scénarisés comme des personnages de fiction. Des personnes de sorties de l’ombre pour témoigner en photos et face caméra de ce que fut leur vie entre les années 1950 et 1970, quand on ne parlait pas encore de ces minorités sexuelles. Soit, avant l’impact des revendications de 1968, et avant encore le sida des années 1980, qui « ont tout changé ». «C’était important pour moi de raconter l’homosexualité du prolétariat à la bourgeoisie, de la ville à la campagne. Je voulais vraiment essayer d’étendre le spectre social du film le plus largement possible pour sortir du cliché de l’homosexualité forcément à la ville, forcément dans des types de professions libérales et forcément douloureuse. Je voulais vraiment raconter l’homosexualité de façon démocratique» explique Lifshitz, qui pose un regard bienveillant sur les événements récents en France et se souvient que l’acceptation du Pacs avait dans un premier temps donné lieu aux mêmes types de réactions par l’opposition. Dans son nouveau moyen métrage (58 min.), Bambi (voir encadré), le cinéaste poursuit brillamment la démarche entamée dans Les Invisibles, à savoir celui d’amener à la lumière un témoignage précieux. Mais cette fois-ci, c’est celui d’une transsexuelle accomplie. Une belle façon de dissiper l’incompréhension. Propos recueillis par Tuana Gökçim Toksöz Des destins singuliers Des fictions aux documentaires, les films de Lifshitz mettent à l’honneur des personnages homosexuels (Les Corps Ouverts, Presque Rien, Plein Sud, Les Invisibles) ou transsexuelles (Wild Side et Bambi), en s’écartant avec intelligence de la militance pour révéler des trajectoires captivantes, originales et riches, par- e Marie-Pierre Pruvot, alias Bambi à la scène Bambi de Sébastien Lifshitz Née Jean-Pierre Pruvot à Alger - un sexe qu’il rejette – Marie-Pierre Pruvot deviendra Bambi, célèbre meneuse de revue au Carrousel de Paris, un cabaret de travestis. Puis encore, professeure au collège de Garges-lès-Gonesse décorée des Palmes Académiques à une époque où la différence n’était pas tolérée. Sobrement intitulé Bambi, du nom de scène de sa protagoniste Marie-Pierre Pruvot, ce documentaire primé d’un Teddy Awards à la Berlinale 2013 conjugue des images d’archive tournées par Bambi, elle-même, avec une caméra Super 8 et des images d’aujourd’hui. Pour au final, brosser le portrait sensible du destin singulier d’une transsexuelle accomplie. Aujourd’hui âgée de 78 ans, Bambi n’est pas une inconnue, contrairement aux protagonistes du film Les Invisibles dans lequel ce récit devait initialement prendre place. Avec Coccinelle (Jacqueline, Charlotte Dufresnoy), elles sont les premières et les plus célèbres transsexuelles de France. Le cinéaste dit du parcours de Bambi qu’il a «vraiment valeur d’exemple, à pleins de niveaux». Et effectivement. Car au-delà de la question pure de la transformation physique, Bambi déploie un personnage qui a su se réinventer avec brio à chaque moment important de sa vie. Et par cet aspect, le film cesse d’être un sujet propre aux genres pour devenir un témoignage de vie exemplaire, universel et bouleversant. T. G. T. Projection de Bambi aux Cinéma du Grütli, les 15 et 16 février en présence du réalisateur. n t r e t i e n [ SYMPHONIQUE ] CONCERTS DU DIMANCHE [ SYMPHONIQUE ] CONCERTS DU DIMANCHE Orchestre de Orchestre de la Haute Ecole lade Haute Ecole M usique de M usique de Genève de Genève KARL ANTON RICKENBACHER K ON DA I RRELC A TN I OTN RICKENBACHER D IRECTION Richard Strauss (1864-1949) Metamorphosen Richard Strauss (1864-1949) Olivier Messiaen (1908-1992) Metamorphosen Offrandes oubliées Olivier Messiaen (1908-1992) Gustav Mahler (1860-1911) Offrandes oubliées Mouvement symphonique (Totenfeier) Gustav Mahler (1860-1911) Mouvement symphonique (Totenfeier) 16-03-2014 16-03-2014 17 heures 17 heures Billetterie : Espace Ville de Genève Pont de la Machine 1, Maison des arts du Grütli Rue du Général-Dufour 16, Genève Tourisme Rue du Mont-Blanc 18, Cité Seniors Rue Amat 28, Victoria Hall Rue Billetterie : Espace Ville de Genève Pont ledeconcert. la Machine 1, Maison du Général-Dufour 14, une heure avant Renseignements des arts du418 Grütli Rue du Général-Dufour Tourisme Rue 0800 418 gratuit (Suisse) +41 22 41816, 36Genève 18 payant (Etranger) du Mont-Blanc 18, Cité Seniors Rue Amat 28, Victoria Hall 25.Rue Billetterie en ligne : http://billetterie-culture.ville-ge.ch Prix CHF du Général-Dufour 14,13.-, une chômeurs, heure avantétudiants, le concert.jeunes Renseignements CHF 15.-, AVS CHF CHF 10.-, 0800 418 418 gratuit (Suisse) +41 22 418CHF 36 18 payant (Etranger) 20ans/20francs CHF 8.-. Abonnements 144.et CHF 96.-. Billetterie en ligneacceptés. : http://billetterie-culture.ville-ge.ch Prix CHF 25.Chèques culture Salle équipée d’une boucle magnétique CHF 15.-, AVS CHFAccès 13.-, pour chômeurs, étudiants, jeunes CHF 10.-, pour malentendants. handicapés 20ans/20francs CHF 8.-. Abonnements CHF 144.- et CHF 96.-. Chèques culture acceptés. Salle équipée d’une boucle magnétique pour malentendants. Accès pour handicapés Jean-Marc Humm atelier de création visuelle Genève, ville de culture Genève, www.ville-geneve.ch ville de culture www.ville-geneve.ch Jean-Marc Humm atelier de création visuelle t h é â t la comédie de genève Mission Romancier, dramaturge, pamphlétaire et essayiste, David Van Reybrouck a beaucoup écrit sur l’Afrique qu’il connaît bien, et surtout sur le Congo, pays dévasté par les guerres. Il anime également des ateliers littéraires pour des auteurs de théâtre congolais. Mission lui a valu en 2008 le plus prestigieux prix flamand accordé à un auteur. 20 Il est de bon ton depuis quelques décennies de prendre ses distances avec toutes formes d’implication et d’engagement, surtout si elles revêtent l’habit catholique des missionnaires. On se méfie de cet avatar de l’impérialisme que l’on soupçonne de vouloir imposer ses valeurs occidentales. Il y a cependant un anachronisme certain à vouloir juger l’action des missionnaires du vingt-et-unième siècle à l’aune de ce qu’elle fut au moment de la colonisation. Le danger est grand de rejeter toute action des missionnaires au prétexte de rester critique et de juger sur un prétendu résultat quasi-immédiat ce qui demande un engagement au très long terme. r e improvisent, bricolent, s’adaptent. Comme dit l’un d’entre eux : « Il y a trois choses à ne jamais oublier : votre moustiquaire, votre coffret de messe et une pince pour arracher les dents ». Leurs conditions de travail et de vie sont inimaginables. Ils sont confrontés au dénuement absolu. À cela s’ajoute le déclin du pays qui a modifié les rapports humains. Contrairement à ce que l’on veut encore croire, il n’y a plus de solidarité ni de sens de la collectivité. Le néolibéralisme a brisé le Congo, amenant les individus à un égoïsme extrême. Ce qui avait commencé par une crise économique et politique est devenu une profonde crise morale. Chacun veut être chef, il n’y a plus de sens civique. Les missionnaires tentent de restaurer un sens moral et civique chez les Congolais, à défaut de leur inculquer leur propre foi. Ils s’appliquent à émanciper les gens, à guérir les blessures physiques et morales. Crise morale C’est une pièce sur la bonté, l’humilité et la patience de ces missionnaires engagés corps et âme dans un pays martyr qui vit une crise morale sans précédent. C’est le formidable comédien flamand Bruno Vanden Broecke qui apportera son humanité et son humour à ce texte pudique et vrai. Engagement Car c’est de cela qu’il s’agit, d’engagement pas seulement religieux, mais aussi artistique. L’écriture de cette pièce est une lutte, qui interroge sur la foi catholique, sur son héritage, sur des axiomes tels que l’existence de Dieu, de l’au-delà et du sens de la souffrance. Peut-on être missionnaire sans Dieu ? De même pour l’artiste, peut-il y avoir engagement sans foi, ne serait-ce que la foi dans la dignité humaine ? Cependant Mission n’est pas une pièce de théâtre politique, bien que se situant dans un contexte historique et politique. Si l’art n’est que le vecteur d’une prise de position idéologique, il devient artificiel, alors qu’il porte naturellement en lui la puissance de formulation qui permet d’aller beaucoup plus loin a Laurence Tièche, d’après une conversation de 2007 entre David Van Reybrouck et Ivo Kuyl «Mission» © Koen Broos qu’une simple prise de position sociale, et d’être plus nuancé. Mise à l’épreuve Du 4 au 7 février : Mission de David Van Reybrouck, m.e.s. Raven Ruëll. La Comédie de Genève, relâche lun, mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. 022/320.50.01 / [email protected]) Les nombreux missionnaires rencontrés par David Van Reybrouck ont vu leur foi mise à rude épreuve par la cruauté de la société congolaise. Actifs dans les écoles, les prisons, les postes de brousse, le secteur paramédical, ils c t u a l i t é t h é â t r e la comédie de genève Shitz Figure majeure du théâtre israélien contemporain, à la liberté de penser non factice, Hanokh Levin a laissé une cinquantaine de pièces. Dépassant le contexte israélien, Shitz mélange entre shit et Schatz (‘trésor’)? - apparaît d’emblée comme une critique acide, décapante, de nos morales moralisantes, en même temps qu’une caricature astringente de nos modes de consommation modernes. C’est aussi l’observation perspicace d’une humanité qui se débat avec ses désirs. Le tout saupoudré de quelques grains de mélancolie. Avec cette comédie écrite en 1975, Hervé Loichemol propose un genre de cabaret. Le travail des comédiens oscille ici entre simplicité et démesure excentrique, et montre spectaculairement comment la dureté des propos tenus aboutit à des effets plutôt comiques qui provoquent une distance critique bienvenue. Chez les Shitz, on se parle cru, sans ambages, on se bouscule, on s’empiffre, on se déteste avec entrain, on se ‘vend’ au plus offrant, on vit avec pétulance. On ne se fait pas de cadeaux, car pourquoi s’en faire quand la vie nous maltraite ? faudrait sans doute aussi parler de mon enfance en Algérie, et de la place qu’a eue mon grandpère dans ma construction imaginaire, mais c’est une autre histoire. Entretien : Hervé Loichemol Le contraire de parler pour vous, c’est ‘se taire’ ou c’est ‘écouter’ ? Quelle différence faites-vous entre l’humour juif et l’humour israélien ? Je ne suis ni juif, ni israélien, et je ne connais pas la diversité du théâtre israélien. L’humour juif ? Je ne suis pas non plus un spécialiste… Mais je reconnais, comme tout le monde, cette façon particulière de se moquer de soi-même, et qui me fait rire. La dérision, très présente chez Levin, évoque l’humour juif, mais son écriture ne se limite pas à ça. Il a pris des positions extrêmement critiques par rapport au pays où il est né, où il a vécu, positions qui sont aussi, d’abord, des positions politiques. A mon sens, il est l’héritier de Brecht, de Karl Valentin, des expressionnistes. Un peu l’héritier de Jarry, si l’on pense à Ubu, et aussi, par conséquent, l’héritier de Shakespeare, qu’il semble connaître très bien. Je feuilletais, il y a quelques jours, le Roi Lear, et j’y ai perçu des échos très nets avec Levin, par exemple dans ce que dit Edmond… Ceci dit, j’ai été très influencé par les lectures de Levinas, de Derrida, de Guénoun, je me reconnais dans un questionnement infini sur l’altérité. En fait, ce goût pour ces questions provient plutôt de ma fréquentation de certains philosophes que d’un bain culturel. Il e n t r Le langage cru au théâtre, comment le traiter ? Comme un humour de plus, une variante de la vie quotidienne ? D’habitude je m’attache à monter des textes ‘élégants’, exempts de ce type de grossièreté langagière. Mais ce langage fait pleinement partie de la vie. Je conçois que cela puisse choquer des gens, mais on a pris le parti de ne pas trop ‘charger la barque’, on traite ce vocabulaire comme une variation langagière et comme une situation de communication. Ce qui m’intéresse c’est de me demander : « qu’est-ce que ça dit de nous ? qu’est-ce que ça critique, révèle ? ». Les situations scabreuses, énormes, ‘hénaurmes’, dans cette pièce font sens. Ne serait-ce que parce qu’elles disent magnifiquement la grossièreté du monde actuel. Ecouter, sans aucune hésitation. J’aime apprendre, j’ai conservé quelque chose de l’étudiant, au sens étymologique. Être metteur en scène c’est aussi savoir écouter les comédiens, être à l’écoute de ce qu’ils disent, font, proposent, et être à l’écoute aussi de toute l’équipe qui travaille dans notre théâtre. Avec Levin, il y a beaucoup à entendre et à écouter, et pas seulement des mots. Le théâtre suppose l’écoute, donc l’ouverture. C’est une forme d’antidote au savoir constitué, massif, fossilisé. Tout simplement parce qu’il est fondé sur un doute premier : cet homme qui est sur scène, s’agit-il d’Hamlet ou du comédien qui l’interprète ? C’est un dispositif ironique qui exige une forme de croyance : il faut y croire, croire au théâtre, croire à une parole donnée, transmise, échangée sur un fond d’incertitude, puisque tout est faux. Si vous deviez donner trois épithètes qualifiant l’œuvre de Levin, ce serait… ? C’est une œuvre immense qu’on n’a pas fini de découvrir. Levin est un très, très grand auteur, qui donne de la joie. Trois adjectifs pour qualifier son œuvre? Intelligente, fine, aiguë, tranchante… e t i e «Shitz» © Marc Vanappelghem Comment avez-vous traité la partie ‘texte chanté’ dans la pièce ? Comme un récitatif, un accompagnement sonore, une respiration vocale… ? La pièce est sous-titrée pièce musicale. Les textes à chanter sont un peu comme les songs brechtiens, mais pas complètement. Chez Brecht, la partie chantée est là pour donner une respiration qui permet de prendre de la distance vis-à-vis du propos. Chez Levin, c’est plutôt, me semble-t-il, une manière d’avancer dans l’intrigue avec irrévérence et humour. Ce n’est pas prescriptif. Comme je voulais garder le côté populaire et inscrire les textes chantés dans la continuité de l’action, j’ai fait composer des musiques que les acteurs chantent a capella, sans marquer d’arrêt, un peu comme dans les Demoiselles de Rochefort, où le chant fait partie d’un quotidien ‘naturel’. J’ai donc choisi de me passer de musiciens sur le plateau, de façon à faire moins cabaret, et à apporter une singularité qui permette un genre nouveau. L’argent dans la pièce tient le rôle principal, mais de quoi est-il le nom ? L’argent est traité de manière moqueuse, en clins d’œil dans le texte de Levin, mais je n’ai pas eu envie de faire de surinterprétation. Le texte est assez malin pour se suffire à lui-même. Par contre, ce qui m’a d’emblée intéressé, c’est la question des déchets. Où sont les cadavres ? Sous la table ? Quel usage fait-on des morts, de nos morts ? Comment on ‘fabrique’ du mort ? Déchets humains, déchets de nourriture, évacuations de toutes sortes, cette pièce parle du rapport de la société à la mort et de ce que l’on peut politiquement recycler... Un cycle shakespearien de la vie. Propos recueillis par Rosine Schautz n 21 t h é â t r e est imposé comme seule vie digne. Il est hors du monde et le fait de rêver sa vie lui suffit. Il refuse de jouer le jeu qu’impose la société. Oblomov en tant que roman - a inspiré Joyce, Houellebecq, Duras et bien d’autres écrivains. Il représente le monde avant le progrès. forum meyrin Oblomov Qui est Ilia Ilitch Oblomov, cet homme pour qui l’inaction et la rêverie est la vie même ? Cet homme pour qui la position couchée est un état naturel, indépendant d’une fatigue ou d’une raison quelconque? Un rêveur ? Un dépressif ? Un mélancolique ? Un nostalgique ? Un philosophe ? Ce personnage d’une grande complexité, dont le nom est éponyme du roman dont a été créée la pièce de Dorian Rossel, a été fondateur d’un immense répertoire littéraire. Le metteur en scène a adapté ce roman phare de la littérature russe pour obtenir une création à l’image du spectateur d’aujourd’hui. Dans le roman, la vie d’Oblomov est tournée vers un passé répétitif, au rythme des mariages et des saisons, où « tous confondent les mois et l’ordre des dates ». On trouve également cette phrase très énigmatique : « Ilia Ivanovitch se tait, vaincu, et toute la société replonge dans la somnolence ». En quoi représente-t-il un personnage moderne ? Il met en exergue la question implicite que tout le monde se pose : qu’estce qui fait qu’on agit ? Pourquoi se battre, pourquoi aller dans le monde encore et toujours ? Je pars du postulat que tout le monde porte son Oblomov en soi. Stolz, un personnage dans le roman, lui dit : « Toute ta vie tu as sauvegardé tes qualités les plus précieuses. Jamais tu ne te prosterneras devant l’idole du mensonge ». Oblomov rêve sa vie, mais a-t-il tort ? C’est magnifique, de rester pur de mensonge, en quelque sorte. C’est une citation sans ironie ? Dorian Rossel, qui est Oblomov pour vous ? 22 Je pense qu’Oblomov est un homme qui préfère rêver sa vie qu’agir. Je le vois comme un poète, un anti-héros dont le combat pour ne pas faire et pour vivre d’idéaux résonne avec l’humain d’aujourd’hui qui ne sait plus pour quoi se battre, qui rêve aussi d’une société parallèle : on le constate par l’usage d’internet et des mondes virtuels qu’il propose, par exemple. Oblomov entre en résonance avec le productivisme qu’il refuse et qui nous Oui, sans doute. Je pense que c’est une citation magnifique qui parle de cet espoir qui est à l’intérieur de tous, celui de rester pur, d’avoir des valeurs désuètes mais liées au simple fait de prendre son temps de vivre et de partager. Vivre sans se trouver dans « les courants d’air » des relations inutiles. Refuser de se prosterner devant le mensonge qui est à la base de notre société. Je pense par exemple aux centrales nucléaires : nous savons à quel point c’est dangereux, mais nous voulons rester dans le mensonge pour profiter de notre confort. C’est ainsi que je lis ce personnage. Comment envisagez-vous la mise en scène ? Cela ne doit pas être facile de représenter au théâtre un personnage inactif qui rêve beaucoup seul, sans interlocuteur. J’aimerais rendre compte de la complexité des constructions identitaires. Il y aura plusieurs personnages, de la musique et de chœurs. J’aimerais laisser une lecture ouverte du personnage, car il est beaucoup de choses à la fois, bonnes et mauvaises. C’est au spectateur de faire ses réflexions sur ce personnage. Oblomov n’est pas vraiment seul, il a sa mère dans son cœur, sa femme rêvée et sa vraie femme. Même en amour, il y a le problème de l’engagement et de ses difficultés, on ne peut y échapper. Là aussi, le personnage est passionné par son idéal. Qui ne l’est pas aujourd’hui ? On aimerait tous se trouver un coussin et s’y blottir. Mais il y a une réponse, qu’Oblomov trouve : l’amour est ce qui finalement le ramène à la vie. Propos recueillis par Claudia Cerretelli Du 11 au 14 février à 20h30 : Oblomov. Dorian Rossel-Compagnie STT / O'Brother Company. Forum Meyrin (loc. 022/989.34.34) Ce spectacle sera également joué à Kléber-Méleau, Lausanne, du 15 mai au 25 mai. Dorian Rossel, photo Nelly Rodriguez e n t r e t i e n Forum Meyrin Vendredi 28 février et samedi 1er mars à 20h30 : « De beaux lendemains » de Russell Banks © DR Mercredi 5 février à 19h : « L’Ombre » d’Andersen selon Jacques Vincey photo Marc Domagec, Philippe Ramette - adagpcourtesy galerie xippas t h é â t r e théâtre de vidy, lausanne Eclectisme Au Théâtre de Vidy, la deuxième partie de saison s’annonce très riche : une programmation éclectique, élaborée par René Zahnd et Thierry Tordjman. Des affiches séduisantes présagent de beaux moments artistiques au bord de l’eau où pas moins de quatorze spectacles sont annoncés du 4 février au 31 mai. Son nouveau directeur, Vincent Baudriller, prépare la saison prochaine sur laquelle il lèvera le voile dès la mi-mai 2014, mais plusieurs spectacles, de théâtre et de danse, de Suisse et d’ailleurs, sont d’ores et déjà promis. 24 François D’Assise avec Robert Bouvier, mise en scène d’Adel Hakim, du 4 au 23 février 2014, Chapiteau. Les mots pleins de sensualité de Joseph Delteil vont s’animer dans ce spectacle sans prêche, ni message. Il s’agira d’un hymne à la liberté, celle d’un homme. Un moment de vie, fou et joyeux, entre coups de foudre et révoltes. « Robert Bouvier prête à François une naïveté d’appétit, d’allégresse, une réjouissante et presque barbare piété. L’acteur rend bien cette ivresse aux pieds nus qui vous écarquille le nez, cette frénésie de nature qui ouvre dans la prose de Delteil des abîmes parfois douloureux, toujours délicats auxquels on cède en fermant les yeux. » Le Figaro Suivra VieLLeicht de Mélissa Von Vépy, du 11 au 22 février à la Salle René Gonzalez. Mélissa Von Vépy poursuit sa recherche autour de l’aérien lié au théâtre et à la danse. Le spectacle évoque un rêve merveilleux, la pesanteur a disparu: entièrement dénué de gravité physique et d’états d’âme, le pantin vole. Puis, Cinématique, du 12 au 19 février à la Salle Charles Apothéloz, par la compagnie Adrien M/Claire B. Un radeau posé sur les flots et le voyage peut commencer. Une invitation à la rêverie, au jeu. Lignes, points, lettres, objets numériques projetés sur des surfaces planes, tissent des espaces poétiques qui épousent les corps et le geste. Laurent Fréchuret signe la mise en scène de Richard III, de William Shakespeare, du 4 au 14 mars à la Salle Charles Apothéloz. Ce monument du théâtre sera construit en dialogue avec des spectateurs tantôt voyeurs, victimes ou complices… Une tragédie fascinante sur le pouvoir, les pulsions destructrices, tyranniques et, paradoxalement, de vie qui traversent l’homme. Ou la fin d’une dynastie arrivée au terme de sa décadence. Avec notamment Dominique Pinon. Du 5 au 23 mars à La Passerelle, Bourlinguer de Blaise Cendrars avec Jean-Quentin Châtelain. « Ce texte fait partie d’un recueil qui met en scène Cendrars lui-même dans différents ports européens, de Venise à Paris Port-de-Mer (sic). Le texte de Cendrars « Gênes » m’a tout de suite frappé par l’adéquation à mon projet de départ : il y avait là une langue extraordinaire, envoûtante, musicale, écrite en spirale. » Darius Peyamiras, metteur en scène. Misterioso-119 de Koffi Kwahulé, du 11 au 30 mars, Salle René Gonzales. Enigme théâtrale, ce huis clos féminin se propose d’explorer les ressorts secrets de l’écriture et les méandres de l’esprit humain. Journal de ma nouvelle oreille de et avec Isabelle Fruchart, adaptation et mise en scène de Zabou Breitman. Du 11 au 22 mars sous le Chapiteau. « Une voix parle et c’est la mienne. J’entends ma voix. En dolby stéréo à travers les micros. J’entends ma voix. Mais alors, avant, je ne m’entendais pas ? Je vais enfin pouvoir m’écouter. C’est la première chose que je me dis ». Isabelle Fruchart. Du 18 au 23 mars, Seule la mer d’Amos Oz sera présenté à la Salle Charles Apothéloz dans une mise en scène de Denis Maillefer. Albert Danon est seul à TelAviv. Sa femme Nadia vient de mourir et son fils Rico est parti au Tibet. Bettine, une vieille amie, s’inquiète pour Albert. Surtout lorsque Dita, la petite amie de Rico, emménage chez lui. «VieLLeicht» © Christophe Raynaud de Lage a c t u a l i t é t h é â t r e Tout un monde en mutation dans un petit village d’Afrique à la veille des indépendances. Des acteurs du Mali et du Burkina Faso sont réunis par Hassane Kassi Kouyaté pour un spectacle qui s’annonce plein de vie et d’humour. Du 7 mai au 31 mai, Salle René Gonzalez, Galilée, le mécano, de Francesco Niccolini, Marco Paolini et Michela Signori. C’est avec une curiosité insatiable que Marco Paolini et Francesco Niccolini ont créé un spectacle dédié à la figure de Galilée, le père de la science moderne. «Journal de ma nouvelle oreille» © BM Palazon Auteur d’une œuvre considérable, Amos Oz est le cofondateur du mouvement La Paix maintenant et l'un des partisans les plus fervents de la solution d'un double État au conflit israélo-palestinien. Du 3 au 11 avril, Salle Charles Apothéloz, De nos jours [Notes on the Circus] de Ivan Mosjoukine Un spectacle pour surprendre, pour écouter le corps et laisser faire la tête. Un spectacle sous forme de notes, environ quatrevingts, sur le cirque qu’on avait l’impression de connaître mais qu’on n’avait jamais vu comme ça. Goldfish, par la Compagnie Inbal Pinto & Avshalom Pollak, les 4 et 5 mai, Chapiteau. Goldfish commence dans un vestiaire. Entre danse et pantomime, des petits moments de la vie quotidienne deviennent des histoires inattendues qui finissent pas exister d’ellesmêmes. c t Nancy Bruchez Programme de la saison disponible sur www.vidy.ch Kouta, d’après la trilogie de Massa Makan Diabaté, du 6 au 10 mai, Salle Ch. Apothéloz. Les demeurées de Jeanne Benameur, du 29 avril au 18 mai à La Passerelle. L’histoire touchante d’une mère et sa fille qui forment un bloc d’amour indestructible. La mère, c’est l’idiote du village. La petite, c’est Luce. Quelque chose en elle s’est arrêté. Avec une délicatesse infinie, Jeanne Benameur parle du combat des ces « demeurées » contre le reste du monde. a Et pour finir en beauté, du 21 au 31 mai à La Passerelle, A vous la nuit de et avec Habib Dembélé. Une histoire d’amitié et d’amour, de jour et de nuit, de dialogues. Goldfish © Eyal Landesman u a l i t é 25 t h é â t r e le poche genève Bourlinguer S’il est vérifié que nul n’est prophète en son pays, l’écrivain né en Suisse à la fin du 19e siècle sera néanmoins entré dans la légende littéraire avec une œuvre aussi puissante que multiforme. Longs poèmes ou plutôt prose poétique, romans, reportages, mémoires, Blaise Cendrars découvre le monde et fait de ses voyages et aventures une fiction poétique : « Toute vie n’est qu’un poème en mouvement » écrit-il dans La Prose du Transsibérien. Moins connu que ce dernier, Bourlinguer est quant à lui entré dans le vocabulaire pour évoquer le voyage aventureux. Entretien avec Darius Peyamiras. L’œuvre de Blaise Cendrars a été très peu portée à la scène ; qu’est-ce qui vous a poussé à le faire ? 26 privilégié une partie plutôt qu’une autre ? Oui, c’est un recueil de onze récits écrits après la seconde guerre mondiale et qui portent cha- cun le nom d’un port, dont nous avons sélectionné la première partie de « Gênes » qui se passe à Naples, soit une quarantaine de pages sur les deux cents de ce récit-là. Blaise Cendrars y revient sur les traces de son enfance à Naples, vers l’âge de huit ans, et de son amour pour une petite fille dans un jardin. Il se met en scène à vingt ans, de retour dans ce jardin d’Eden pour y retrouver l’essence de sa vie. Arrivé en loques, défait, il y revit les premières sensations d’enfant, la découverte de la nature et les frémissements amoureux. L’enjeu est de rallumer le feu primordial de l’enfance pour la transformer en cendres fécondes, d’embraser sa vie pour être au cœur du monde, comme le fait l’acte d’écrire. Nous avons procédé à un montage de ces parties-là en gardant l’aspect collages. Votre collaboration avec JeanQuentin Châtelain remonte à Mars de Fritz Zorn en 1986. Que vous apporte-t-elle encore aujourd’hui ? L’envie de travailler avec Jean-Quentin Châtelain a précédé le choix du texte. Nous voulions faire un spectacle autour de la marche comme aventure philosophique, comme échappatoire au temps et à l’espace conventionnels. Nous avons lu Gustave Roud, Nicolas Bouvier bien sûr, Robert Walser. Notre choix s’est finalement arrêté sur Cendrars et plus précisément sur « Bourlinguer », surtout pour la beauté de la langue, une langue orale, musicale, une langue à dire plus qu’à lire. C’est un texte de contemplation, qui parle de quête de liberté et du mystère du monde et utilise pour cela une écriture rhapsodique, faite de collages, de réflexions, d’aventures vécues ou réinventées. Un patchwork, en quelque sorte. Chez Cendrars, l’acte de vivre et l’acte d’écrire se rencontrent dans ce que l’on nomme maintenant une autofiction, une fiction autobiographique, comme l’emblématique personnage de Suter dans L’Or. Ce comédien est un personnage. Il a la même démesure que Cendrars. L’écrivain et le comédien entrent en résonance : même monstruosité, même part cosmique. Ce sont des personnes au cœur de la poésie du monde, qui en saisissent la totalité et la complexité, qui révèlent le mystère des choses. Mais l’acteur, qui emmène l’autre dans des régions insoupçonnées, peut parfois aussi être un clown. J’ajouterai que cette aventure théâtrale n’est pas portée uniquement par Jean-Quentin Châtelain et par moi : elle se construit avec notamment Gilles Lambert à la scénographie et les collaborateurs au son et à la lumière. Propos recueillis par Laurence Tièche Du 10 février au 2 mars : Bourlinguer de Blaise Cendrars, m.e.s. Darius Peyamiras. Le PocheGenève, lun et ven à 20h30, mer-jeusam à 19h, dim à 17h, mardi relâche (rens./rés. /loc. 022/310.37.59) Bourlinguer est une œuvre très vaste. Avez-vous Jean-Quentin Chatelein © Augustin Rebetez e n t r e t i e n t h é â t r e en tournée Les deux gentilshommes de Vérone Ce spectacle, créé en mars-avril 2013 à Bruxelles, met en scène une Italie fantasmatique voire fantasmée. Imprégnée de l’amour courtois et de certains épisodes emblématiques des romans de chevalerie, cette pièce illustre le conflit de l’amour et de l’amitié - réel conflit de loyauté - qui verra la victoire de celle-ci sur celui-là. Démonstration très contemporaine car foncièrement iconoclaste pour ce XVIème siècle qui privilégiait la confession amoureuse et la virtù. Et l’honneur de la parole donnée. Argument Valentin doit quitter Vérone pour aller à la cour du duc de Milan. Son ami Protée, qui veut rester près de Julia dont il est épris, refuse de le suivre. Mais Antonio, son père, décide de l’envoyer à la cour, malgré qu’il en ait, pour parfaire son éducation. Valentin, rejoint par Protée, lui dévoile alors son amour pour Silvia, la fille du duc, et lui fait part de son projet de s’enfuir avec elle afin de lui éviter un mariage forcé. Mais Protée, subjugué lui aussi par la beauté de Silvia, dévoilera au duc sous le coup de la jalousie (encore elle…) le secret de Valentin. Ce dernier finira banni, errant dans une forêt peuplée de brigands et de hors-la-loi, et Silvia sera enfermée dans une tour. Quant à Julia, sans nouvelles de Protée donc inquiète, elle décide de se rendre à Milan sous des habits de garçon. Découvrant l’inattendu de son infortune, elle entre au service de Protée comme page… et la ‘comédie’ d’aller de l’avant, avec allant ! Les Deux Gentilshommes de Vérone est en effet une comédie de Shakespeare, celle d’ailleurs qui présente de façon exceptionnelles une liste de personnages très réduite. A noter également que c'est dans cette pièce que le poète dramaturge anglais met pour la première fois en ‘situation’ une jeune fille se déguisant en garçon. Comme le dit en préambule Robert Bouvier : « Dans cette œuvre de jeunesse, on sent un Shakespeare tout feu tout flammes, épris de liberté, de fantaisie, et de romanesque, s'a- a c t u désirs: fugue, déguisement, enlèvement, menaces... On brave les interdits, on se jette à l'aventure en pleine tempête intérieure. On s'abuse pour mieux abuser son ami ou son amour et, paniqué, on découvre soudain en soi-même un autre qu'on ne soupçonnait pas. » Amours, amitiés, fidélités bafouées, loyautés oubliées, haines des amis-confidents, jalousies, tromperies, lâchetés, émotions loufoques mais émotions de ‘gentilshommes’ : tout est déjà là dans cette œuvre rarement montée. A voir donc toutes générations confondues… Extrait PROTÉE. — Mon gracieux seigneur, ce que je vais vous révéler, les lois de l'amitié* m'ordonnent de le cacher; mais lorsque je repasse dans ma pensée toutes les gracieuses faveurs que j'ai reçues de vous, tout indigne que je suis, le sentiment du devoir m'aiguillonne à vous découvrir ce que nul autre mobile au monde n'aurait le pouvoir de m'arracher. Sachez donc, noble prince, que le seigneur Valentin, mon ami, se propose, cette nuit, d'enlever votre fille; j'ai été pris, moi en personne, pour confident du complot. … Apprenez, noble seigneur, qu'ils ont adopté un plan qui lui permettra d'escalader la chambre à coucher de votre fille, et de la descendre par une échelle de corde. Cette échelle, le jeune amant est en ce moment même allé la chercher, et il va tout à l'heure passer par ici en la portant; vous pouvez, s'il vous plaît, l'arrêter au passage. Mais, mon bon seigneur, mettez-y assez d'adresse pour que ma révélation ne soit pas soupçonnée, car c'est par amour pour vous et non par haine pour mon ami que je vous ai découvert ce projet. (sc.1, acte II). Quod erat demonstrandum alias CQFD ! Rosine Schautz «Les deux gentilshommes de Verone» © DR musant des métamorphoses qu'opère l'amour et jetant ses protagonistes passionnés dans un tourbillon de tromperies, coups de théâtre, et folles tribulations. Ses deux gentilshommes ont la fougue de la jeunesse ; il dépeint leurs idéaux et leurs rêves de conquête avec complicité et une tendresse non exempte d’humour. Son ironie, douce ou cruelle, montre sa lucidité quant à la nature humaine et ses nombreux paradoxes ». Il ajoute : « Tout est bon ici pour réaliser ses a l i t Les deux gentilshommes de Vérone de Shakespeare. Mise en scène de Robert Bouvier (reprise) Tournée : - Théâtre du Passage, Neuchâtel – les 7 et 9 février 2014 - Espace culturel Boris Vian, Les Ulis – 11 février 2014 - Théâtre de l’Octogone, Pully – 14 février 2014 - Spectacle français de Bienne – 17 février 2014 é 27 t h é â t r e rains, acteurs au sens plein du terme devenus témoins incontournables des blessures à eux imposées. saint-gervais genève Mémoires blessées Chaque année, fin janvier début février le Théâtre St-Gervais propose un cycle d’événements/spectacles autour des Mémoires blessées mettant en lumière les tragiques destins de populations ou d’individus que l’Histoire majuscule a latéralisés. Plusieurs soirées thématiques en perspective, notamment celle du mardi 4 février à ne pas manquer qui tournera autour des ‘Mémoires tsiganes’. Henriette Asséo, grande spécialiste de l’Histoire des minorités en Europe et tsiganologue émérite, y présentera avec Idit Bloch un film réalisé en 2011 Mémoires tsiganes, l’autre génocide. La projection (à 20h) sera suivie d’une conversation ouverte en présence des deux réalisatrices. L’occasion à n’en pas douter de comprendre mieux ce que recouvrent les termes souvent mal employés de ‘tsigane’, ‘rom’ voire ‘nomade’ ou ‘apatride’ qui, malgré ce que l’on aimerait croire, ne sont aucunement synonymes, n’en déplaise aux politiciens et autres commis de l’Etat chargés de régler les « problèmes » d’immigration. Spectacles : La manifestation version 2014 rassemblera cette fois encore les acteurs de cette Histoire qui, qu’on le sache ou non, qu’on se le dise ou non, concerne tout un chacun. Acteurs - et non comédiens ! – contempo- 28 * 3-15 février : Au bord du monde, mis en scène par Valentine Sergo qui ici poursuit son travail réalisé en 2011 sous le titre de Tous les chemins mènent à Meyrin, spectacle et exposition qui racontait l’histoire sociale, mais pas seulement, de cette commune. A noter que le 5 février, une rencontre avec l’équipe et un membre de l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers (ODAE) sera organisée, salle Isidore Isou (7ème étage). * 6-8 février : Testimony, récitatif (Charles Reznikoff), mis en scène par Henri Jules Julien. Il s’agit de la ‘récitation’ d’un recueil de poèmes élaborés entre 1934 et 1979 inspirés par les minutes de procès tenus de 1895 à 1915 aux USA. Chaque mot de Testimony a été prononcé devant un juge : à voir donc pour mieux entendre le tragique de la condition (in)humaine… * 11-15 février : reprise du beau spectacle Mon livre d’heures, ‘inventé’ par le Fanfareduloup Orchestra, autour de l’ami flamand de Romain Rolland, Frans Masereel, graveur pacifiste et engagé ayant collaboré à plusieurs journaux. Spectacle alliant musique, chant, histoires sans paroles, très réussi artistiquement et esthétiquement. Exposition : * 30 janvier-9 mars : La porte du non retour, déambulatoire théâtral et photographique imaginé par le canadien Philippe Ducros, auteur, metteur en cène, acteur ‘mais surtout’ grand voyageur... Quarante-neuf photos pour cheminer dans une carte de géographie cosmopolite par essence, se souvenir d’où l’on vient, et peut-être s’interroger sur la manière dont les Européens se préoccupent à géométrie variable de l’état du monde. Rosine Schautz Exposition «La porte du non-retour» photo de Philippe Ducros (Le Radeau de la Meduse) a c t u a l i t é t h é â t r e théâtre kléber-méleau Molly Bloom Œuvre-phare de la modernité littéraire du XXe siècle, Ulysse de James Joyce vaudra à son auteur toutes les peines du monde pour qu'il parvienne enfin à pouvoir le faire éditer. Pas moins de sept années de labeur auront été nécessaires pour que l'écrivain puisse aller au bout de son projet. Hormis l'extrême complexité de la langue, c'est avant tout aux passages jugés obscènes et scandaleux que la censure s'attaqua pour vouer aux gémonies l'ensemble de l'ouvrage. «Molly Bloom» ©Pascal Victor - Artcomart Ce récit relate les pérégrinations de Leopold Bloom et Stephen Dedalus à travers la ville de Dublin, lors d'une journée en apparence ordinaire mais qui prend pour modèle les épisodes mythologiques de l'Odyssée d'Homère. L'action – si le mot action a encore du sens – se déroule en conformité avec la règle classique de l'unité de temps. Leopold Bloom a passé sa journée à dériver dans Dublin, entre alcool et fréquentation des bordels. Dans les dernières pages culmine le procédé dit de courant de conscience (stream of consciousness), flux ininterrompu de paroles sur le mode du monologue intérieur. Le point du vue du personnage y est décrit comme si le lecteur avait accès directement à son processus de pensée ; voilà pour les détails techniques… Pour ce qui est du théâtre, il faut passer le seuil des a priori de complexité et d'hermétisme et plonger les yeux fermés dans un des plus extraordinaires numéro d'acteur qui ait été donné récemment sur une a c t u a l scène. Anouk Grinberg est Molly Bloom, l'épouse traînant ses souvenirs de chanteuse ratée et ses frasques d'épouse infidèle. La perspective visuelle très réaliste se limite à un décor minimal : un lit au centre de la scène avec Leopold (Antoine Régent) imposant une présence muette d'un grand corps endormi qui ignore ce qui se passe au même moment dans la tête de sa femme. Ils dorment tête-bêche depuis la mort de leur jeune enfant, chacun progressivement isolé dans un monde qui ne cesse de se rétrécir autour d'eux. Tout y passe, dans ce célèbre monologue : rancœurs sexuelles, misères d'un quotidien rongé par les habitudes, souvenirs de bonheur enfui, discours sur la religion et la politique… Redoutable défi L'épanchement mental se mêle aux flux du corps, y compris les plus honteux et les plus intimes. Ce monologue de Molly naît d'une nuit d'insomnie pendant laquelle remontent à la surface toutes les scories du passé et les médiocrités d'un présent qu'il faut bien accepter. L'idée (littéralement délirante) d'adapter au théâtre ces pages ultimes du roman de Joyce constitue pour l'interprète un défi redoutable sur le plan de la mémorisation et une mise à l'épreuve de ses capacités physiques à occuper la scène en solo une bonne heure durant. Anouk Grinberg joue merveilleusement du très paradoxal décalage entre un profil fluet, presque adolescent par son apparence, et la force tellurique qui jaillit des profondeurs du texte à travers elle. Très discrètement amplifiée, son incarnation de Molly oscille au rythme d'un implacable sismographe de mots et de sentiments. L'absence de ponctuation contraint à une apnée continue à travers laquelle scintille le labyrinthe inextricable des fils narratifs. Modulant les inflexions de sa voix haut perchée, elle joue d'une palette d'inflexions éraillées tour à tour implorante, agressive ou candide. Entre rire et larmes, on partage cette parenthèse existentielle qui s'élève progressivement vers le dénuement de la phrase et l'éclosion répétée de ce oui joyeux et libérateur, à la fois si bref et d'une immense résonance amoureuse dans la voûte céleste qui plane au-dessus d'elle. David Verdier Molly Bloom d'après Ulysse de James Joyce. Adaptation Jean Torrent, Anouk Grinberg et Blandine Masson Interprète : Anouk Grinberg et la participation d'Antoine Régent et la voix d'André Marcon. Théâtre Kléber-Méleau, Renens-Malley Jusqu’au 2 février 2014 i t é 29 o p é r aussi de la tendresse et de l'amour qui le subjuguent. Encore une fois, si l'interprète possède la résistance physique requise, ces divers moments de l'éducation du jeune Siegfried procurent une intense satisfaction à celui qui peut les rendre sensibles par le chant autant que par le jeu scénique. siegfried au grand théâtre Un rôle qui n'a rien d'effrayant... John Daszak sera Siegfried dans l'opéra éponyme de Wagner en cette fin de mois et dans les deux cycles complets que le Grand Théâtre affiche en mai. Pour lui, la Tétralogie genevoise sera une vraie première, car ce chanteur n'a encore jamais eu l'occasion d'interpréter ce rôle en représentation. Un projet avait été ébauché à Sao Paolo au Brésil, mais c'est pour finir seulement dans le Crépuscule des dieux que ce ténor a pu se frotter à un des emplois les plus lourds de tout le répertoire lyrique. 30 Beaucoup de chanteurs avouent hésiter longtemps avant d'incarner le personnage de Siegfried en scène car le rôle est long, exige de nombreuses incursions dans une tessiture relativement élevée et ne permet pas à l'interprète de se relâcher pendant les plus de trois heures et demie où il est en scène. Mais ces problèmes ne semblent pas effrayer outre mesure le futur héros wagnérien genevois. La réponse à ma première question fuse : Comment réagissez-vous face aux wagnériens qui voient en Siegfried un des emplois les plus complexes et les plus exigeants, pour ne pas dire les plus exténuants de tout le répertoire lyrique ? Je ne comprends pas tout à fait ce point de vue. Bien sûr, l'opéra est long et nécessite des réserves physiques maximales pour permettre au chanteur de tenir dans la durée. Mais Wagner sait parfaitement ce qu'il fait et ne demande rien d'impossible à ses interprètes dans ses partitions; c'est pourquoi j'apprécie énormément d'aborder ce répertoire à ce stade de ma carrière, car il ne fait aucun doute que ce sera un sommet dans ma vie de chanteur. Bien sûr, je ne peux encore rien dire de définitif sur les problèmes que pose cette musique au théâtre puisque je n'ai pas eu l'occasion de vivre l'expérience en direct dans le cadre d'une représentation commençant à 16 heures et se terminant à 23 heures! a Le Siegfried qui houspille Mime au début n'a rien à voir avec celui qui se confronte à Fafner au 2e acte puis à Wotan au début du 3e, avant de tomber sous le charme de Brünnhilde! Vocalement, les exigences sont différenciées: aux accents agressifs de la rencontre avec Mime succède le moment d'ineffable joie de la fonte de l'épée. Les Murmures de la Forêt sont un précieux moment d'introspection (c'est la première fois que Siegfried est seul après avoir découvert que Mime n'est pas son père) et chaque note doit alors être soigneusement polie, comme dans un lied où il n'y a rien de secondaire dans la ligne de chant. Face à Wotan, Siegfried n'est plus l'adolescent en révolte, mais l'homme qui ose réclamer ce qui lui est dû. Et enfin, face à Brünnhilde, c'est la découverte de la peur, mais Et où trouve-ton cette résistance physique particulière ? Un opéra wagnérien est comme un marathon. Et je sais de quoi je parle, puisque je me suis mis à la course et ai déjà couru mes premiers 42 kms récemment!... (Rire). Blague à art, tout est affaire de la gestion équilibrée des ressources et du souffle ainsi que de la compréhension de l'architecture musicale de chaque scène. Ce qui est éblouissant chez Wagner, c'est son art de poser à un moment précis la première pierre d'une structure qui ne se trouvera achevée que bien plus tard. Ainsi une esquisse du thème de l'amour de Siegfried pour Brünnhilde apparaît-il déjà dans une forme estompée lors de son dialogue avec l'oiseau à l'acte précédent! Rien n'est laissé au hasard. Et si l'on travaille, comme c'est le cas ici, avec un chef qui fait passer les considérations musicales avant la satisfaction de son ego, on découvre avec son aide les fils qui permettent de conférer leur juste place à toutes les séquences de ces vastes mouvements que sont les trois actes de l'ouvrage. On dit souvent que l'interruption dans la composition de cet ouvrage est sensible dans l'écriture de la fin du 2e acte et dans le 3e ... On sait, en effet, que Tristan et les Qu'est ce qui vous paraît alors sécurisant dans l'art de composer de Wagner ? Chacune des scènes possède son atmosphère propre et demande une approche différenciée. e John Daszak - credit Robert Workman n t r e t i e n o p é r a Maîtres-Chanteurs ont été composés pendant la longue pause que le compositeur s'est octroyée alors qu'il rédigeait le 2e acte de Siegfried. Avez-vous, comme interprète, la sensation d'aborder une écriture autre enfin d'ouvrage ? compagnie et que je me sens mieux dehors, en forêt, à me livrer à une activité physique plutôt que de faire du shopping dans une grande ville La tessiture du rôle est plus haute dans le 3e acte, et surtout dans le duo, et l'écriture fait plus souvent recours à un chromatisme qui n'aurait peut-être pas existé sous cette forme sans l'expérience de Tristan. Mais je peine à y voir le résultat d'une évolution artistique particulière; les situations dépeintes dans le 3e Je me fie au metteur en scène pour cet aspect de la question. Je ne suis pas un artiste lyrique qui fait passer le chant avant tout le reste. Pour moi, Le personnage est-il facile à cerner scéniquement ? acte sont tellement différentes de celles que l'on rencontre auparavant qu'une différenciation dans les moyens d'expression musicaux me paraît s'imposer naturellement. l'ouvrage sans se mettre en avant pour offrir au spectateur d'aujourd'hui une relecture qui fasse directement référence à notre monde contemporain. Chaque élément du texte est discuté en détail, chaque didascalie de Wagner est fidèlement reprise, mais sans pour autant la restituer dans toute sa naïveté première. Une stylisation s'impose, ne serait-ce que pour permettre au spectateur d'aujourd'hui de pénétrer sans entrave dans cet univers fantastique de conte de fées. L'esprit de la vision originale est conservé et il ne fait pour moi aucun doute que c'est bien Wagner que l'on représente ici, non un remake bâtard. Le fait d'interpréter ce rôle dans le cadre d'une mise en scène qui va aboutir à deux représentations cycliques de l'intégralité de la Tétralogie vous facilite-til la tâche? Certains voient en Siegfried un jeune homme présomptueux, tout en muscles et finalement assez peu sympathique... Il est bien sûr préférable de jouer l'œuvre comme Wagner a voulu qu'elle le soit. Par On ne peut juger sa conduite ailleurs, je n'ai pas encore vu avec les critères habituels. les deux premiers volets du N'oublions pas qu'il n'a pas eu cycle et ne peux donc rien dire une enfance normale, qu'il a sur ce qui a précédé mon été maintenu écarté de tout entrée en scène ! Je suis pourcontact avec d'autres semblatant frappé, pendant les répétibles par un Mime soucieux de tions, d'entendre les constanprotéger celui qui devait lui tes références faites par tous restituer l'or du Nibelung les artistes impliqués, techniavant de le faire disparaître. ciens compris, à ce qui a déjà Siegfried n'a pas conscience été réalisé sur le plateau et à ce qui va l'être dans deux mois des besoins des autres puislorsqu'on mettra au point le qu'il ignore leur existence et Crépuscule des dieux. A ce n'a même jamais vu de femme titre-là, il est évident que la : il se sent seul, cherche à continuité du projet sur une savoir qui est sa mère, son «Siegfried», avec Steven Humes (Fafner), John Daszak (Siegfried) et Andreas Conrad (Mime). Photo de répétition © GTG / Carole Parodi seule saison bénéficie à l'enpère; il se demande s'il existe semble de la distribution qui a d'autres gens comme lui (le nain Mime est à peine un modèle pour lui, car il une représentation d'opéra est un moment d'im- l'impression, rare sur les scènes d'opéra actuelest repoussant et retords). Sa force extraordinai- mersion dans un monde dont je ne suis qu'un les, de faire partie d'une famille avec un vaste re le rend cassant dans ses rencontres, mais cela rouage. Ce que demande un metteur en scène, je projet commun à mettre au point ! ne dit rien sur sa personnalité profonde. C'est le fais sans hésiter, pour autant, bien sûr, qu'il Propos recueillis par Eric Pousaz précisément cette ambiguïté entre ses besoins parvienne à me convaincre du bien fondé de ses inconscients et ses comportements de matamo- partis pris. Ici à Genève, le spectacle me paraît re qui font de lui un être aussi attirant. Je dois assez classique, si je peux en juger d'après ce Siegried est à l'affiche du Grand Théâtre les 30 janvier, 2 également ajouter que le personnage me semble que l'on m'a dit et d'après les décors dans les- 5 et 8 février ainsi que dans le cadre des deux représentaassez proche de ce que je suis. Je n'ai pas honte quels nous commençons à travailler. J'apprécie tions du Ring complet les 16 et 23 mai d'avouer que j'ai gardé la faculté de m'émer- énormément en MM. Dorn et Rose des artistes veiller comme un enfant, que j'aime la bonne qui entendent se mettre d'abord au service de e n t r e t i e n 31 o p é r a à l’opéra de lausanne Un talent qui séduit Sandrine Piau A cette voix limpide et ailée répond un physique délicieusement espiègle, que de nombreux metteurs en scène exploitent pour le meilleur : Jean-Pierre Vincent, Moshe et Leiser, Pierre Constant ouvrent la voie à Laurent Pelly qui la transforme en une Wanda subtilement nunuche (La Grande Duchesse de Gérolstein avec Felicity Lott au Châtelet, en dvd et en cd Virgin, dirigée par Minkowski en 2004), où encore le duo Montalvo-Hervieu pour d'inénarrables Paladins de Rameau au Châtelet en 2004 (dvd Opus arte). Sandrine Piau se consacre également à l'oratorio (Bach, Brahms, Haydn, Vivaldi..) et à la mélodie dans laquelle la pureté de son chant et la qualité de son expression font merveille. Invitée dans toute l'Europe, elle alterne aujourd'hui avec un égal bonheur les œuvres les plus variées de Haendel dont elle chantait la saison dernière Cleopatra dans le Giulio Cesare mis en scène par Laurent Pelly (Palais Garnier) et le mois dernier Morgana dans la reprise d'Alcina (Carsen toujours à Garnier) sans oublier Orlando ou Serse (cd Virgin live TCE 2004 dirigé par Christie), à Debussy avec une Mélisande très remarquée à Amsterdam en 2008 (Pier Audi avec Stéphane Degout en Pelléas), ou sa récente Sœur Constance des Dialogues des Carmélites, conservant Mozart avec cette juvénile Pamina donnée au TCE en 2011 avec JeanChristophe Spinosi dans la fosse. Après un formidable doublé Poulenc/ Haendel à Paris, Sandrine Piau sera en concert à Lausanne le 16 février accompagnée par Jérôme Corréas et Les Paladins, une belle occasion pour retrouver la voix fraîche et délicate de la soprano française, dont la carrière est un exemple de rigueur, de modestie et de surprises musicales. Portrait. 32 Comme Véronique Gens et Patricia Petibon, Sandrine Piau doit tout à la musique baroque, qui l'a vue naître, se construire et s'épanouir, puis accéder enfin à un large répertoire. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si ces trois cantatrices étaient réunies sur la scène du Théâtre des Champs-Elysées en décembre dernier pour interpréter brillamment le chef-d’œuvre de Poulenc, Dialogues des Carmélites, dans l’extraordinaire proposition scénique d’Olivier Py. Sandrine Piau comme ses consœurs n'imaginait d'ailleurs pas faire une carrière lyrique : elle commence très jeune l'étude de la harpe et se destine à cet instrument, avant d’intégrer la Maîtrise de Radio France où elle découvre l'univers de l'opéra et du chant. Rencontre déterminante Elle est rapidement admise au CNSM et travaille la harpe, la musique de chambre et l'interprétation de la musique vocale ancienne, dans la classe de William Christie qui l'initie à la musique baroque. Cette rencontre avec l'une des figures tutélaires du renouveau baroque est déterminante pour la jeune femme, qui décide de se consacrer au chant et de se confronter aux exigences de ce répertoire. Les conseils prodigués par son professeur particulier, Jacqueline Morin, vont également lui être d'une grande importance, celle-ci la préparant aux partitions qui constitueront sa carrière future, ainsi qu'à la mélodie dont elle va devenir une ardente défenseur. Ainsi préparée, la jeune Sandrine Piau participe régulièrement aux productions des Arts Florissants à Aix notamment, ce milieu extrêmement perméable la mettant en relation avec les principaux acteurs de la musique baroque et notamment Christophe Rousset qui va jouer un rôle décisif dans l'évolution de son parcours artistique. Après Rameau, a Purcell et Monteverdi, elle découvre avec passion la virtuosité italienne des opéras de Haendel auxquels sa voix lumineuse et volubile, au timbre chatoyant, s’adapte parfaitement. Sa présence dans Giulio Cesare, Tamerlano, Scipione ou Riccardo primo (enregistré pour la première fois pour L'oiseau-lyre) la hisse sans tarder parmi les spécialistes du genre. Les chefs de file baroque font bientôt appel à son talent et à ses compétences, de Philippe Herreweghe à Jean-Claude Malgoire, en passant par René Jacobs ou Fabio Biondi, qui trouvent en elle une interprète dévouée au texte, imaginative et pleine d'allégresse. Les prémonitions de son professeur ne tardent pas à s’avérer exactes ; la soprano qui refuse de se laisser « enfermer » dans un répertoire, ne va cesser de répondre aux sollicitations et aborde à partir de 1996 les opere serie de Mozart, Mitridate en particulier qu'elle donnera à Genève dans la vision de Francisco Nerin (œuvre qu'elle grave également pour Decca avec Bartoli, Dessay et Rousset en 1999, rôle d'Ismene), avant d'incarner Konstanze, Pamina puis plus tardivement Donna Anna, mais également Britten avec Le songe d'une nuit d'été (avec Carsen à Bordeaux), Strauss (Zerbinetta), Weber (Annchen) ou Massenet (Sophie dans Werther). A Lausanne Avant de la retrouver en concert à l'Opéra de Lausanne le 16 février où elle sera accompagnée par Jérôme Corréas et son ensemble Les Paladins, essayez de vous procurer les trois albums que Sandrine Piau a gravé pour Naïve (Haendel avec Rousset et Mozart avec Gottfried von der Goltz pour les airs d'opéras et « Après un rêve » avec Susan Manoff pour la mélodie française), préparation idéale pour goûter au programme intitulé « Le triomphe de l'amour » où la cantatrice interprétera des pages de Sacchini, Lully, Rameau, Charpentier, Campra et Grétry. François Lesueur 16 février à l’Opéra de Lausanne Billetterie : 021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h / en ligne : www.opera-lausanne.ch Sandrine Piau © Sandrine Expilly / Naïve c t u a l i t é o p é r a victoria hall, genève Dmitri Hvorostovsky, charmeur et sérieux Le baryton russe donnera le 24 février, à Genève, un récital comme il les affectionne, avec Ivary Ilja au piano. A l’affiche : des mélodies et romances de Rach, Tchaïkovski, Medtner et Liszt. Dmitri Hvorostovsky, c’est au choix une voix qui impressionne ou une crinière qui séduit. A moins qu’il ne s’agisse du contraire. Mais derrière le physique généreux, c’est un chanteur impitoyable avec lui-même qui se cache. Parcours classique A cinquante et quelques années (il est né en 1962 à Krasnoïarsk, en Sibérie, où il a également effectué ses études musicales), le baryton russe est depuis plus de vingt ans l’une des plus belles voix de la scène lyrique. Son parcours est classique : parents scientifiques mais épris de musique (le père joue du piano, la mère est soprano amateur), études de piano puis de chef de chœur, entrée dans la troupe de l’Opéra de Krasnoïarsk à l’âge de vingt-deux ans. Mais un prix lors du Concours Glinka lui permet de se distinguer, qui sera suivi de deux autres victoires : au Concours de Toulouse et au BBC Singer of the World Competition de Cardiff, où il devance Bryn Terfel, l’enfant du pays : « Je ne savais pas qui était Terfel jusqu’aux dernières éliminatoires, lorsque je l’ai entendu chanter Wagner. C’est seulement à ce moment-là que j’ai eu des doutes quant à mes chances de gagner le concours ». Tout aurait pu alors s’enchaîner, mais le jeune baryton fait preuve de sagesse. Il se consacre d’abord beaucoup au récital et inaugure sa carrière internationale à Nice, en 1989, avec le rôle d’Eletski dans La Dame de pique : un rôle brillant mais assez bref. Puis, très vite, les scènes du monde entier le réclament, du Staatsoper de Vienne au Metropolitan Opera de New York. a c t u Dmitri Hvorostovsky © DR De Verdi à Eugène Onéguine On a utilisé le mot crinière : il est vrai que Dmitri Hvorostovsky a été aidé par une allure de jeune premier aux cheveux blonds, vite devenus blancs, qui fait de lui un personnage reconnaissable entre tous, avec ou sans costume. Mais ne nous attardons pas sur la parure : « Indépendamment de mes bons gènes, que je bénis tous les jours, je dois, comme un sportif de haut niveau, me tenir en excellente condition. Je fais pour cela de la musculation, trois à quatre fois par semaine, où que je me trouve sur la pla- a l i t nète », explique-t-il à Thierry Guyenne pour Opéra Magazine. Une conscience de ses possibilités et un sérieux dans la préparation qui lui ont permis de chanter tour à tour les grands rôles verdiens (et l’on sait combien Verdi chérissait entre toutes la tessiture de baryton), de son tout premier Marullo dans Rigoletto, à Krasnoïarsk, en 1984, au rôle-titre du même ouvrage, en passant par Germont dans La Traviata (rôle qu’il reprendra au printemps prochain à Covent Garden) ou Posa dans Don Carlo. Iago dans Otello et le rôle-titre de Macbeth seraient prévus, paraît-il, pour les mois ou les saisons à venir. Mozart a également compté dans sa carrière, du Comte des Nozze di Figaro au rôle-titre de Don Giovanni, qu’il a cependant abandonné il y a une dizaine d’années au moment où sa voix prenait de nouvelles couleurs. Et on aurait tort, évidemment, d’oublier Eugène Onéguine, un rôle qui lui est presque naturel et qu’il a chanté avec des Tatiana aussi différentes que Renée Fleming (avec qui on peut le voir sur un dévédé enregistré au Met, sous la direction de Valery Gergiev) ou Anna Netrebko. Aujourd’hui, celui que ses amis appellent « Dima » vit à Londres mais revient régulièrement en Russie. Il ne déteste pas donner des concerts en plein air ni interpréter des chansons d’Igor Krutoy (un compositeur-interprète qui se produit volontiers avec Lara Fabian), ou encore enregistrer des chansons populaires russes (ah, l’album Dark Eyes !). La musique contemporaine ? Depuis la mort de son ami Georgi Sviridov (19151998), il en a fort peu chanté. Mais grâce à sa pratique régulière du récital, sa voix est aussi belle qu’au premier jour. Christian Wasselin 24 février au Victoria Hall à 20h (loc. Espace Ville de Genève, Grütli, Genève Tourisme, Cité Seniors, Centrale Billetterie T 0800.418.418, billetterie-culture.ville-ge.ch, Fnac) é 33 o p é r a opéra de lausanne : carine séchaye Hänsel... Au sortir de son premier jour de répétition sur le spectacle d’Hänsel et Gretel d’Humperdinck à l’Opéra de Lausanne, Carine Séchaye nous a gracieusement accordé un moment d’entretien. La mezzo-soprano d’origine genevoise, que l’on a pu admirer à de maintes reprises en Suisse, récemment dans l’Aiglon d’Honegger à Lausanne, ou encore en Frédéric dans Mignon d’Ambroise Thomas au Grand Théâtre de Genève, interprétera en février le jeune garçon légendaire. Entretien. Pouvez-vous retracer votre parcours en quelques mots, de vos études à vos débuts professionnels ? 34 J’ai étudié à Genève au Conservatoire en parallèle avec l’ESAD (Ecole Supérieur d’Art Dramatique), ce qui m’a offert à la fois une formation théâtrale et musicale. J’y ai étudié jusqu’en 2003, et ai ensuite été prise à l’Opéra Studio de Zürich, pour une formation de deux ans. À ma sortie, j’ai d’abord été engagée à l’Opéra de Lausanne dans la troupe de l’EnVol, où j’ai d’abord chanté le rôle d’Honora dans Tom Jones de Philidor, qui a donné lieu à un cd et un dvd, puis j’ai eu mon premier rôle de travesti dans Les noces de Figaro avec Cherubino. J’ai ensuite obtenu une série de contrats à Darmstadt: Nancy dans Albert Herring de Britten, ainsi que les magnifiques rôles de Mélisande de Debussy et d’Octavian (Der Rosenkavalier) de Strauss. Quels ont été les rôles qui vous ont le plus marquée ? J’ai énormément aimé chanter Octavian, qui est un rôle très long et qui demande beaucoup d’énergie physique. On touche à beaucoup de registres différents, entre la farce burlesque du travestissement et le sublime trio final. Il y eu aussi l’Aiglon d’Honegger, à l’Opéra de Lausanne, et à Tours. C’était un rôle très exigeant, j’étais véritablement habitée par cette histoire. Je dormais mal, je pensais tout le temps à ça ! Ce rôle m’a demandé une grande gestion d’énergie physique et vocale, et une grande concentration. Le fait de mourir en scène m’a marqué, comme quand j’ai chanté Mélisande. À la dernière représentation, je me suis dit que j’allais profiter au maximum d’être une dernière fois le fils de Napoléon en scène. J’ai hélas eu plein de petits incidents pendant le spectacle, dont je peux maintenant rire mais qui, sur le moment, me semblaient catastrophiques : un de mes partenaires de scène a arraché à moitié ma perruque, mon costume a craqué sur ma jambe, j’ai dû m’y reprendre à deux fois pour casser un miroir et j’ai avalé de l’eau de travers avant de monter sur scène… Dans les autres rôles que j’ai adoré chanter, il y eu Rosine (Il Barbiere di Siviglia, Rossini), la Périchole (Offenbach)… Avec quels partenaires de scènes, chefs ou metteurs en scènes avez-vous particulièrement aimé travailler ? Lorsque j’étais à l’Opéra Studio de Zürich, j’ai pu chanter des petits rôles sur scène aux côtés de grandes personnalités du chant, tels que José van Dam. J’ai été récemment très impressionnée par Diana Damrau qui était ma partenaire de scène dans Mignon d’Ambroise Thomas à Genève. Elle était enceinte et m’a épatée par son aisance scénique, sa façon de s’économiser en répétition et une fois sur scène d’être impeccable et inventive. J’ai aussi énormément aimé interpréter l’Enfant dans L’Enfant et les sortilèges de Ravel à Monaco, avec comme partenaires Béatrice Uria-Monzon, Annick Massis… Dans les chefs, je retiens notamment Alain Altinoglu, avec qui j’ai fait les Scènes de chasses de René Koering à Montpellier. Il avait une formidable énergie positive, une façon de fédérer les gens et un vrai amour des voix, on se sentait véritablement soutenus depuis la scène ! A propos d’Hänsel et Gretel, que pouvez-vous déjà nous dire de cette production lausannoise ? La mise en scène annonce une couleur dure et réaliste. On n’assistera pas à une version folklorique ! On verra une famille comme il y en a partout, et des enfants presque adolescents. Au niveau scénique, c’est la sorcière qui mènera le jeu en transformant l’espace autour des enfants, en les attirant vers elle. Par exemple, quelques plumes qu’elle plantera autour d’elle paraîtront, par jeu de lumière, des arbres pour Hänsel et Gretel. L’intervention de la vidéo permettra à l’univers de se construire autour de la sorcière. La maison de la sorcière ne sera pas en pain d’épices mais il y aura un mur d’enfants tapissé de crème pâtissière ! Je me réjouis de collaborer à nouveau avec certains de mes collègues, comme Marc Mazuir avec qui j’ai notamment fait la tournée de Carmen de l’Opéra de Lausanne au Japon, et Laurent Gay, qui a été mon chef sur le Chat Botté à Lausanne en 2009. Quels sont vos futurs projets ? Je vais encore tourner mon récital « Elle connaît la chanson ! » avec Marie-Cécile Bertheau. Nous avons un grand succès avec ce récital que nous avons déjà donné au Théâtre du Passage, au Crochetan, à Beausobre, à l’Auditorium de Dijon, au festival Amadeus de Genève… Avec Marie-Cécile, nous sommes complices et nous adaptons notre programme selon les occasions. Nous allons le reprendre le 23 février à la Vallée de Joux. Pour ce qui est de l’opéra, je me réjouis de chanter au Théâtre des Champs-Elysées La Scala di Seta de Rossini et de faire mes débuts dans le rôle de Stephano (Roméo et Juliette) à Monaco. Je peux aussi déjà annoncer que j’aborderai ma première Carmen en 2015… Propos recueillis par Anouk Molendijk Carine Séchaye, photo Barbara de Preux e n t r e t i e n o p é r a opéra de lausanne : céline mellon ... et Gretel À quelques jours des premières répétitions d’Hänsel et Gretel de Humperdinck à l’Opéra de Lausanne, nous avons pu rencontrer Céline Mellon, qui interprétera le rôle de Gretel. La jeune soprano, que l’on a pu déjà remarquer en Suisse, dans La passion selon St-Jean dirigée par Ton Koopman ou dans le rôle-titre de la Petite renarde rusée de Jana ek à Monthey, est très présente dans cette saison 13-14 de l’Opéra de Lausanne. Entretien. Comment en êtes-vous arrivée à la musique, et particulièrement au chant lyrique ? maître, d’une exigence incroyable et qui ne s’immisce pas dans nos choix, qui nous renvoie toujours à nos responsabilités. Je suis arrivée donc jeune et le cadre sublime de la Suisse, ainsi que la formation solide et complète proposée par l’école m’ont offert un cocon rassurant. J’ai été marquée notamment par l’atelier lyrique, où l’on nous apprenait la concentration et l’implication. Les projets de concerts permettaient de bien progresser et d’explorer sans trop de crainte : il faut pouvoir faire des erreurs au Conservatoire, afin de mieux se connaître et ne pas les reproduire dans le milieu professionnel. Quels ont été les projets marquants de vos années d’études ? Évidemment, la Petite Renarde Rusée, mise en scène par Cédric Dorier au Théâtre du Crochetan, mais aussi un projet Gerschwin avec Benjamin Lévy, La Passion selon St-Jean avec Ton Koopman. Suite à une masterclass avec Christa Ludwig, cette grande dame m’a choisie pour chanter le soprano solo dans la Quatrième symphonie de Mahler pour différents concerts, ce qui fut également une belle expérience. Comment avez-vous amorcé votre incursion dans le milieu Je n’arriverai pas à répondre à cette question sans mentionner le profond professionnel, après ces études ? Il y a eu une continuité entre la fin du lien entre la musique et les autres arts : Conservatoire et mes débuts profesje me suis intéressée à la musique par le sionnels : j’étais encore en dernière biais de la scène. J’ai commencé la année quand j’ai obtenu des rôles à danse vers trois ans et demi, et cela m’a l’Opéra de Lausanne. J’ai fait mes predonné un appétit immense pour la miers pas dans La Grande Duchesse de scène. Pour ce qui est de la musique à Gérolstein, en tant que soliste et chorisproprement parler, j’ai d’abord étudié le te, et ai participé à deux autres projets violoncelle durant sept ans, un instrude chœur. J’ai ensuite enchaîné avec la ment si proche de la voix. Et c’est lors Route Lyrique. J’ai interprété de cours de solfège que l’on a remarqué Barbarina dans Le Nozze di Figaro en que j’avais une voix intéressante. On juin passé, et cette saison, j’ai pu déjà m’a donc poussée à chanter dans la chanter un rôle dans Lakmé. chorale de mon collège. Mais le déclic M’attendent encore Gretel, Laura dans par rapport au chant lyrique s’est proLuisa Miller, et Berta dans Le barbier duit vers mes treize ans, lorsqu’une de Séville de Rossini. amie de la chef de chœur, Aline Gozlan, Même si les répétitions n’ont choriste à l’Opéra du Rhin, est venue pas encore commencé, que pouvezchanter devant notre chœur d’enfants à vous nous dire d’Hänsel et Gretel ? Strasbourg. Cela a été une révélation J’avais chanté des duos en allemand pour moi, dépassant le simple côté lorsque j’étais étudiante à Strasbourg, esthétique : j’ai été fascinée par la puisdonc je me réjouis beaucoup de trasance vibratoire du son. Je lui ai donc vailler cette œuvre dans son intégralité, demandé des cours de chant, et elle a pu ici en français. J’ai pu discuter avec la me transmettre sa passion en quelques metteuse en scène, Julie Beauvais : elle mois. Je me suis intéressée de près au souhaite s’éloigner de l’édulcoré du livmonde de l’opéra, car il rassemble Céline Mellon ret de Wette, traduit par Catulle beaucoup de moyens d’expressions et Mendès, et jouer ainsi sur l’étrange. Je permet à la personnalité artistique de se n’ai jamais encore travaillé avec mes futurs partenaires de scène, que je déployer. Je suis rentrée au CNR de Strasbourg à quinze ans, dans la clasconnais seulement artistiquement, et je me réjouis d’entrer dans cet unise d’Henrik Sieffert, où j’ai pu me familiariser avec le monde de la vers avec eux. musique. J’y suis restée trois ans avant de passer les admissions pour la Haute Ecole de Musique de Lausanne. Comment en êtes-vous venue à Lausanne ? Quelle a été votre expérience dans cette école ? Propos recueillis par Anouk Molendijk J’avais pu assister à une masterclass de Brigitte Balleys à Strasbourg et sa personnalité m’a conduite à auditionner à Lausanne pour étudier avec elle. Mais c’est Gary Magby qui m’a pris dans sa classe, à dix-huit ans. Cette rencontre a été extrêmement importante pour moi, j’ai pu trouver en lui un Hänsel et Gretel, du 5 au 12 février, à l’Opéra de Lausanne, dir. Laurent Gay, m.e.s Julie Beauvais, avec Carine Séchaye, Céline Mellon, Isabelle Henriquez, Marc Mazuir et Marion Grange, orchestre OCL. Information et réservation : www.opera-lausanne.ch, et +41 21 315 40 20. e n t r e t i e n 35 o p é r a metropolitan opera, new york Norma & Tosca «Tosca» avec Patricia Racette dans le rôle-titre et George Gagnidze en Scarpia à l’Acte II © Marty Sohl/Metropolitan Opera Norma 36 Quelques lances, le contexte l'exige tout comme la tenue du proconsul romain Pollione. Des costumes vaguement d'époque, sans excès de folklore. Certes, Oroveso – qu'interprète James Morris en route vers son 1000ème passage sur la scène du Met – a bien la longue barbe blanche tirée de l'imagier des druides gaulois, mais pour le reste, peu de fioritures et de détails inspirés du style péplum surchargeant la scène et souvent utilisé lors de productions du chef-d'œuvre de Bellini. Cette Norma revisitée depuis la première en 2001 avait toutes les caractéristiques des productions épurées mettant en valeur les interprètes et révélant avec pertinence les caractéristiques de l'intrigue. Et, de fait, on aura rarement vu une production de Norma aussi séduisante visuellement, notamment lors de la confrontation entre les trois principaux protagonistes lors du deuxième acte grâce à la remarquable conception scénique de John Copley avec la complicité de John Conklin. Pas de Norma, sans une grande attente au sujet de l'interprétation de « Casta diva » bien sûr et Sondra Radvanovsky n'a pas failli aux espoirs des mélomanes new yorkais en livrant une prestation émouvante qui a fait chavirer la salle, tout en enchaînant avec un second acte tout aussi réussi, mêlant puissance vocale parfaitement adaptée à la vaste salle du Met avec une capacité à faire entendre les nuances les plus subtiles de la partition bellinienne. Comparée à l'autorité dramatique de Norma, sa rivale Adalgisa n'a pas les mêmes atouts vocaux car Kate Aldrich fait plus apprécier une expressivité émouvante, tout en restant un peu en retrait dans les ensemble. D'une certaine manière, Alexandrs Antonenko propose – était-ce intentionnel ? - une conception intéressante du rôle de Pollione, par sa stature assez figé et une certaine raideur gestuelle, il apparaît comme égaré entre les deux rivales, plus anti-héros qu'autre chose même s'il affronte le rôle sans faiblesse vocale particulière. Riccardo Frezza livrait par ailleurs une direction musicale aux sonorités subtiles et séduisantes à la tête de l'Orchestre du Met. Frank Fredenrich Tosca Le mois de novembre 2013 a vu la reprise au Met de la mise en scène de Tosca par Luc Bondy, qui avait été accueillie froidement – c’est un pléonasme – lors de sa création en 2009, une partie du public new-yorkais réclamant à corps et à cris sa Tosca, celle créée par Zeffirelli en 1985, monument indigeste de kitsch où la puissance puccinienne s’estompait sous une vaine précision pittoresque. La distance temporelle a heureusement rendu justice au Suisse et à sa lecture à la fois singulière et passionnante du chef-d’œuvre de Puccini. Sans être triomphal, l’accueil réservé à sa Tosca a cette fois été tout à fait chaleureux. Les partis-pris de Bondy sont clairs : il s’agit de détacher Tosca de son decorum habituel afin de se concentrer sur les personnages, leurs relations, la violence des différentes émotions, la cruauté du destin, les tensions entre l’humain et le politique. Adieu les stucs baroques de Sant’Andrea della Valle au premier acte, les multiples décorations du Palais Farnèse au second, les créneaux du Château Saint-Ange et la vue surplombant Rome au petit matin durant l’acte final. Les décors – superbe travail de Richard Peduzzi – sont très sobres, voire épurés ; des lignes, quelques courbes, peu d’éléments inutiles. L’église ressemble à une catacombe, le palais à un lupanar, le Château Saint-Ange à un large toit romain parmi d’autres ouvrant sur un ciel tristement bleu gris. Certains détails n’en sont que plus frappants pour le spectateur : au premier acte, Scarpia ne prie pas devant une statue de la Madone mais l’enlace, tandis que le tableau peint par Cavaradossi représente bien moins une Marie-Madeleine qu’une femme désirée – ou un désir de femme. Quant à l’univers du second acte, qui voit Scarpia entouré de prostituées dans un décor des années 20-30, difficile de ne pas penser au mélange de cruauté absolue et de sexualité orgiaque de l’époque mussolinienne, voire à la République de Salò pasolinienne. Scarpia devient alors, discrètement, une sorte d’allégorie du Mal qui frappa l’Italie au XXème siècle. Enfin, le Château du Saint-Ange prend durant l’acte final une dimension très abstraite, au point que les déambulations de Cavaradossi attendant sa mort inique évoquent à la fois l’absurdité beckettienne et la spiritualité du Septième sceau bergmanien. La distribution vocale est heureusement au niveau du travail scénique. Patricia Racette compose une Tosca élégante et racée, qui exprime bien la passion jalouse de l’héroïne. George Gagnidze est un Scarpia terrifiant – même s’il est parfois un peu «en dessous» vocalement. Quant à Roberto Alagna, il lui faut un acte pour que sa voix, tout d’abord un peu métallique, trouve sa justesse et son ampleur, particulièrement impressionnantes au troisième acte. Laurent Darbellay «Norma», avec Sondra Radvanovsky dans le rôle titre, Aleksandrs Antonenko (Pollione), et Kate Aldrich (Adalgisa) © Marty Sohl/Metropolitan Opera a c t u a l i t é m é m e n t o genève Der Fliegende Holländer (LetonjaBrieger) – 1er, 3, 8 février, les 20, 22 fév. à Mulhouse Staatsoper (49/30.20.35.45.55) s Salome (Mehta-Kupfer) – 2, 5, 8, 13 février. toulouse s Aida (Mehta-Halmen) – Théâtre du Capitole 15, 19, 22 février. (05.61.63.13.13) s La Traviata (Hindoyans La Favorite (CampaMussbach) – 21, 23 février. nella-Boussard) – 6, 9, 11, s Tosca (Ranzani-Riha) – 14, 16, 19 février. 28 février. s Il Barbiere di Siviglia a m s t e rd a m (Rovetta-Berghaus) – 7 février. Opera (31.20.62.55.456) s Das Rheingold s Katia Kabanova (Rattle(Haenchen-Audi) – 7 Breth) – 1er, 6, 9, 16 février. février. s Die Walküre (HaenchenKomische Oper Audi) – 9 février. (49/30.47.99.74.00) s Siegfried (Haenchens Serse (JunghänelAudi) – 2, 11 février. Herheim) - 1er, 5, 15 février. s Götterdämmerung (Haenchen-Audi) – 5, 14 s Die Zauberflöte (Poskafévrier. Kosky) – 13, 22 février. s Hänsel und Gretel (Poska-Thannen) – 23 bruxelles Komische Oper, Berlin : Annette Seiltgen sera Fata février. La Monnaie Morgana dans «L’amour des trois oranges» s L’Ange de feu (Nanasi(32/70.23.39.39) Andrews) – 2, 16 février s Jenufa (Marlot-Hermanis) – 2, 4, 5, ro m e s L’Amour des trois oranges (Kütson7 février. Teatro dell’opera (39/06.48.16.02.55) s L’Enfant et les sortilèges/L’Heure Homoki) – 4, 8 février b a rc e l o n e espagnole (Dutoit-Pelly) – 1er, 2, 4, 6 vienne Liceu (34.934.85.99.13) février. Staatsoper (43/1514447880) s La Sonnambula (Oren-Marelli) – t u r i n s Il Barbiere di Siviglia (Garcia Calvo1er, 4, 5, 8, 9, 11, 14, 17 février. Teatro Regio (39/011.881.52.41) madrid s Madama Butterfly (Steinberg- Rennert) – 1er, 4 février. s Cavalleria rusticana / Pagliacci Teatro Real (34/90.224.48.48) Michieletto) – 1er, 4, 6 février. s Tristan und Isolde (Currentzis- s Turandot (Steinberg-Montaldo) -12, (Carignani-Ponnelle) – 2 février. Sellars) – 4, 8 février. 13, 14, 15, 16, 20, 22, 23, 25, 26, 27 s Rusalka (Belohlavek-Bechtolf) – 3, 6, 9 février. s Brokeback Mountain (Engel-von février. s Salome (Nelsons-Barlog) – 7, 10, 13 Hove) – 1er, 3, 5, 7, 9, 11 février. venise février. s Alceste (Bolton-Warlikowski) – 27 Teatro La Fenice (39/041.24.24) février. s La Traviata (Matheuz-Carsen) – 15, s Adriana Lecouvreur (Pido-McVicar) – 16, 19, 22 février. 16, 21, 23, 25, 27 février. s Manon (Chaslin-Serban) – 12, 15, l o n d re s s La Clemenza di Tito (Dantone18, 21 février. ROH (0044/207.304.4000) Hermann) – 1er février. s Don Giovanni (Luisotti-Holten) – s Il Barbiere di Siviglia (Matheuz- Theater an der Wien (43/15.88.85) s Platée (Christie-Carsen) – 17, 19, 1er, 3, 12, 14, 18, 21, 24 février. Morassi) – 20, 22, 16 février. s Manon (Villaume-Pelly) – 4 février. s Il Campiello (Romani-Trevisi) – 28 21, 24, 26, 28 février. février. s Grand Théâtre (022/418.31.30) s Siegfried (Metzmacher-Dorn) – 2, 5, 8 février. s Nabucco (Fiore-Aeschlimann) – 28 février. lausanne Opéra (021.315.40.20) s Hänsel et Gretel (Gay-Beauvais) – 5, 7, 8, 9, 12 février. zurich Opernhaus (044.268.66.66) s Cosi fan tutte (Netopil-Bechtolf) – 6, 9, 12, 16 février. s Don Carlo (Luisi-Bechtolf) – 15, 21, 23, 26 février. s Les Pécheurs de perles (FournillierHerzog) – 1er février. s Alcina (Antonini-Loy) – 2, 5, 7, 9, 16, 22, 25 février. paris Champs-Elysées (01.49.52.50.50) s Theodora (Bicket) – 10 février. s Le Villi (Carignani) – 20 février. Opéra Comique (0825.01.01.23) s Pelleas et Mélisande (LangréeBraunschweig) – 17, 19, 21, 23, 25 février. Opéra National (08.92.90.90) Bastille : s La Fanciulla del West - 1er, 4, 7, 10, 13, 16, 19, 22, 25, 28 février. s Werther (Plasson-Jacquot) – 2, 5, 9, 12 février. s Madama Butterfly (CallegariWilson) – 14, 17, 21, 24, 27 février. Garnier : s Alcina (Rousset-Carsen) – 2, 5, 7, 9, 12 février. Salle Pleyel (01.42.56.13.13) s Boris Godunov (Sokhiev) – 5 février. avignon Opéra-Théâtre (04.90.82.81.40) s L’Italiana in Algeri (Rizzi BrignoilBerloffa) – 2, 4 février. s Monsieur Choufleuri/Pomme d’api (Trottein-Mutel) – 21, 22, 23 février. lyon Opéra National (08.26.30.53.25) s Le comte Ory (Montanari-Pelly) – 21, 23, 25, 27 février. bologne Opéra (04.91.55.11.10) s Lucia di Lammermoor (GuingalBelier Garcia) – 1er, 2, 4, 5, 6 février. f l o re n c e Opéra (04.92.17.40.79) s Semele (Petrou-Peters.Messer) – 16, 18, 20 février. milan marseille nice saint-étienne Opéra-Théâtre (04.77.47.83.40) s Les Barbares (Campellone) – 14, 16 février. s t r a s b o u rg Opéra National (0825.84.14.84) a o p é r a g new york Teatro Communale (39/051.617.42.99) s Tosca (Veronesi-Abbado) – 20, 21, 22, 23, 25, 26, 27, 28 février. Teatro del Maggio musicale s Madama Butterfly (Valcuha-Ceresa) – 6, 8, 9, 11, 12, 13 février. Teatro alla scala (39/02.720.03.744) s Lucia di Lammermoor (MorandiZimmermann) – 1er, 7, 11, 14, 16, 19, 21, 23, 28 février. s Cavalleria rusticana (HardingMartone) – 8, 9 février. s Il Trovatore (Rustioni-deAna) – 15, 18, 20, 22, 25 février. e n berlin Deutsche Oper (49/30.343.84.343) s La Traviata (Korsten-Friedrich) – 8, 14 février. s Die Zauberflöte (Repusic-Krämer) – 16 février. s Il Barbiere di Siviglia (Garcia CalvoThalbach) – 22 février. s La Gioconda (Lopez CobosSanjust) – 2, 6 février. s Jenufa (Runnicles-Loy) – 9, 15, 18 février. s La Damnation de Faust (RunniclesSpuck) – 23, 27 février. s Le Nozze di Figaro (ForemnyFriedrich) – 26 février. d a Metropolitan Opera (00.1.212.362.60.00) s Die Fledermaus (Fischer-Sams) – 3, 5, 8, 11, 13, 15, 20, 22 février. s L’Elisir d’amore (Benini-Sher) – 1er février. s Madama Butterfly (AuguinMinghella) – 1er, 7 février. s Rusalka (Nézet-Séguin- Schenk) – 4, 8, 12, 15 février. s Le Prince Igor (NosedaTcherniakov) – 6, 10, 14, 17, 21, 24 février. s Werther (Altinoglu-Eyre) – 18, 22, 25, 28 février. s The Enchanted Island (SummersMcDermott) – 26 février. 37 o p é r a à avignon Butterfly / Laïka Chance exceptionnelle pour l’Opéra Grand Avignon, la chanteuse de classe internationale Ermonela Jaho y est de retour pour une Butterfly inoubliable. 38 La soprano albanaise communique son émotion à fleur de peau dans ce théâtre, dont les dimensions permettent au spectateur d’apprécier dans les meilleures conditions les expressions corporelles et les pianissimi délicieux. C’est elle qui transcende le spectacle, elle est Cio-Cio-San dans tous ses aspects, séduisante envers son futur mari, tueuse lorsqu’elle menace Goro d’un couteau, puis la joie l’inonde au retour annoncé de Pinkerton, enfin elle est émouvante aux larmes à son suicide final, tremblante comme un papillon qu’on vient d’épingler. Sébastien Guèze (Pinkerton) est certes crédible scéniquement et forme un beau couple juvénile avec Jaho, mais les problèmes s’accumulent pour ce qui concerne le chant : style larmoyant en prenant systématiquement les notes par en-dessous, graves limités (le ténor baisse la tête, mais sans grande amélioration), et chaque attaque d’aigu semble un petit défi. Une fois le son engagé, la note reste stable et puissante, preuve que le potentiel est encore là, mais la technique doit être revue. Le vibrato du baryton Marc Barrard (Sharpless) est prononcé, mais convient au rôle du consul américain, tout comme le timbre de Delphine Haidan, en adéquation au rôle de la suivante Suzuki. La direction musicale d’Alain Guingal semble un peu désordonnée à la mise en route, puis trouve une certaine sérénité en vitesse de croisière, sans pouvoir parler toutefois de concentration superlative des musiciens. La reprise de la mise en scène de Mireille Larroche, donnée initialement en 2005 à Avignon et adaptée par la suite aux Chorégies d’Orange en 2007, fonctionne toujours aussi bien dans son ambiance japonisante sobrement dosée. Les petites maisons allumées pendant la nuit de veille entre les actes II et III sont du plus bel effet, et le seppuku conclusif de Butterfly qui dénoue sa ceinture tenue par son petit garçon aux yeux bandés, image d’un cordon ombilical, prend toujours autant aux tripes. Laïka, the Spacedog Laïka, The Spacedog, sur un livret de Tim Yealland et une musique de Russell Hepplewhite, a remporté la dernière édition du concours de l’Armel Opera Festival, à Szeged en Hongrie. La production de l’English Touring Opera, montée par le librettiste, a le grand avantage de la légèreté des décors, mais sans tomber nullement dans le Ermonela Jaho (Cio-Cio-San) © Cedric Delestrade/ACM Avignon a c t « bon marché ». L’œuvre d’une durée d’une petite heure alterne avec vivacité entre les scènes au domicile du jeune Mikhail, maître de Laïka, et le Cosmodrome de Baïkonour, d’où décollera – pour un aller simple – la chienne. Opéra éducatif « destiné aux enfants de 7 à 11 ans », les adultes ne s’y ennuient pas un instant et ne se sentent pas particulièrement infantilisés. Pour un effectif orchestral très réduit de 4 instrumentistes ainsi que le compositeur à la baguette et aux claviers, la musique ne sonne pas pour autant cheap, certaines parties au violoncelle étant d’ailleurs redoutables. Les chanteurs jouent avec enthousiasme, Sarah Laulan (Valentina), Abigail Kelly (Yelena / la Mère), Edward Lee (Mikhail), Nicolas Rigas (Korolev), le marionnettiste Maciek O’Shea donnant vie à Laïka. François Jestin Puccini : MADAMA BUTTERFLY – le 19 novembre 2013 Hepplewhite : LAÏKA THE SPACEDOG – le 4 décembre 2013 à l’Opéra Grand Avignon à sainte-étienne Ciboulette Montée en coproduction avec l’Opéra Comique, où elle a été représentée à Paris la saison dernière, cette Ciboulette aux grandes qualités artistiques remporte un beau succès à Saint-Etienne. Arrivant de la Salle Favart, la production de Michel Fau emplit avec aisance le plus vaste plateau du Grand Théâtre Massenet, avec une certaine économie de moyens grâce à l’utilisation de toiles peintes. Les différents lieux de l’action sont contrastés, l’intérieur en noir et blanc du I, puis le marché des Halles, la banlieue d’Aubervilliers ensuite (très campagnarde en 1867 !), jusqu’à la représentation à l’Opéra de la – devenue fameuse – Conchita Ciboulero. Les traits d’humour sont charmants et pas trop appuyés, avec un grand moment déjanté : l’apparition devant le rideau de scène entre les actes II et III de Michel Fau dans une superbe robe verte qui donne voix à une cantatrice ayant depuis bien longtemps perdu le contrôle à la fois du vibrato, de la puissance et de la justesse ! Bien moins chevrotante dans le rôle-titre, Bénédicte Tauran possède un joli timbre fruité de soprano léger, aux côtés de Julien Behr (Antonin), beau physique, et dont le jeu aux très larges gestes semble plus développé que la voix un peu étriquée aux deux extrémités du registre. Le baryton Florian Sempey (Duparquet) est superbement timbré, la ligne de chant est royalement conduite. La soprano Olivia Doray (Zénobie) et le baryton Marc Scoffoni (Roger) sont également bien en place, tout comme Guillemette Laurens et Jean-Marie Frémeau, la Mère et le Père Grenu qui assurent l’éducation de Ciboulette. Deux cerises sur le gâteau avec l’apparition furtive de Jérôme Deschamps en Directeur d’Opéra et d’Andrea Ferreol (Madame Pingret) qui remplace Bernadette Lafont, disparue depuis les représentations de l’Opéra Comique, et à qui cette soirée est dédiée. L’Orchestre Symphonique Saint-Etienne Loire assure avec entrain, sous la baguette de Laurent Touche, habituel chef du chœur de la maison. A-t-il disposé justement du temps nécessaire à la préparation des choristes ? Les décalages et faux-départs sont si prononcés qu’on pourrait se demander si le compositeur n’a pas prévu un canon ici ou là, mais ces relâchements n’entament pas la réussite générale. François Jestin Hahn : CIBOULETTE – le 29 décembre 2013 au Grand Théâtre Massenet de SaintEtienne u a l i t é o p é r a à lyon Norma / Contes d’Hoffmann Chaque saison, l’Opéra de Lyon met à son programme un ouvrage du belcanto, donné en version de concert, et c’est sur Norma que s’est porté son choix cet automne. Le titre n’est sans doute pas très original mais l’auditeur est plutôt comblé à l’issue de la soirée. Première bonne surprise, la direction musicale d’Evelino Pidò convainc plus que d’ordinaire, avec quelques choix originaux de tempi (des piani et pianissimi inattendus), de nuances, d’effets de ralentis. Les passages très sonores sont toutefois encore bien présents et certains rythmes bondissants suggèrent une Norma plus joyeuse que menaçante. Pour ce qui est de la partie vocale, deux chanteurs non annoncés dans le programme de la saison assurent joliment deux des rôles les plus importants, avec en premier lieu Elena Mosuc dans le rôle-titre qui fait preuve de musicalité et d’agilité, ses intentions sont vindicatives même si elle ne possède pas exactement le format de soprano dramatique. Puis le ténor John Osborn (Pollione) impressionne également par son abattage, le timbre est délicat, les graves sont fournis, et à l’autre extrémité il essaime parfois des petits suraigus excitants. Sonia Ganassi (Adalgisa) développe une puissance plus importante, la voix est bien soutenue et le personnage est crédible. Le timbre de la basse Enrico Iori (Oroveso) sonne en revanche souvent engorgé, même si on doit lui reconnaître une autorité bien à propos dans ses récitatifs seuls. tion est admirable – qualité commune à l’ensemble du plateau –, la tessiture est étendue, et il varie idéalement entre voix de tête, voix mixte et aigus plus vaillants. Comme à l’Opéra de Marseille en 2004, Patrizia Ciofi assume avec brio les 4 rôles de femmes : les vocalises aériennes (perchée sur sa balançoire à une hauteur de 5 ou 6 m !) d’Olympia, la ligne plus lyrique d’Antonia où elle excelle, et l’écriture plus grave de Giulietta où la soprano italienne est naturellement un soupçon moins à l’aise. Laurent Alvaro dans les 4 méchants est diabolique à souhait et capable d’une projection assez considérable ; la basse française s’applique sur la justesse, mais reste fragile sur les parties plus aigües de la partition. Angélique Noldus (La Muse / Nicklausse) n’a pas la puissance d’autres titulaires du rôle, et est parfois en difficulté pour passer la barrière de l’orchestre, mais elle a le grand mérite d’être compréhensible et son timbre est joli. Cyrille Dubois dans les rôles des 4 valets est épatant, voix très assurée, jeu débridé, il nous amuse tout en s’amusant. Peter Sidhom (Luther / Crespel) et Christophe Gay (Hermann / Schlemil) ont tous deux une remarquable diction et un timbre expressif. Le chef Philippe Forget, qui dirige la version révisée par Jean-Christophe Keck, ne se montre pas toujours aussi convaincant : l’orchestre est techniquement bien huilé, mais le rythme est souvent très lent, parfois suivi d’un effet d’accélération mais ce procédé se révèle finalement trop systématique, et tout cela manque d’espièglerie ou de petit tourbillon de folie. Les chœurs n’appellent en revanche que des éloges, en particulier les hommes qui chantent à tue-tête dans la taverne de Maître Luther. François Jestin Bellini : NORMA – le 10 novembre 2013 Offenbach : LES CONTES D’HOFFMANN – le 30 décembre 2013 à l’Opéra de Lyon à monte-carlo Rheingold / La Favorite Brillante première partie de saison à l’Opéra de MonteCarlo, avec un Or du Rhin passionnant, puis La Favorite en version de concert, avec la prise de rôle du ténor vedette Juan Diego Florez. John Osborn et Patrizia Ciofi © Jean-Pierre Maurin Offenbach est à l’affiche du spectacle de fin d’année, et ce n’est pas un de ses opéras bouffes, mais Les Contes d’Hoffmann qui sont remontés dans la production de Laurent Pelly, déjà montrée à Lyon en 2005. La mise en scène, dont il existe un témoignage filmé récent au Liceu de Barcelone début 2013 (2 DVD ERATO), baigne le plus souvent dans une pénombre inquiétante aux tons gris ou bleu nuit, avec quelques passages inspirés d’une imagerie spectaculaire ou fantastique : Olympia sur une balançoire à bascule manipulée par des machinistes invisibles (en noir sur fond noir), le Docteur Miracle et ses spirales hypnotiques, ou encore les images vidéo de la mère d’Antonia, projetées en négatif. La distribution vocale est enthousiasmante, à commencer par le ténor John Osborn dans le rôle-titre, la dic- a c t u a l La première scène du prologue wagnérien est bluffante : projection sur un voile d’avant-scène de mouvements d’eau qui ondule avec de gentilles vagues sous les cintres, quelques rochers et plantes aquatiques vus en transparence, et les Filles du Rhin qui montent et descendent suspendues par des câbles et harnais, dépliant ainsi leur longue robe à tonalités vertes. Le spectateur est tout de suite plongé dans un aquarium, cela tombe bien : la salle du Grimaldi Forum est bien implantée sous le niveau de la mer, et le Musée océanographique n’est pas très loin non plus ! Chez les dieux, un échafaudage de tubulures métalliques en fond de scène permettra un effet spectaculaire pour la transition au Nibelheim, en se rabattant à angle droit sur le plateau. Une silhouette de château pour figurer le Walhalla avec quelques valises à jardin, puis en fin d’ouvrage un arc-en-ciel est projeté sur une passerelle déployée, alors que des rayons lasers éclairent des fumées… comme en boîte de nuit dans les années 1980 ! Pour la partie musicale, on attendait avec gourmandise le chef Gianluigi Gelmetti dans ce répertoire, mais le rendez-vous n’est pas à la hauteur des espérances. Sa direction est si lente et peu démonstrative, que la musique tombe vite en panne d’énergie, i t é 39 o p é r a de conviction, d’inspiration. C’est dommage car l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo est somptueux, et par ailleurs on sait gré au chef d’apporter attention et soutien aux chanteurs. La distribution vocale est globalement très convaincante, avec la projection mordante d’Egils Silins en Wotan, et l’Alberich toujours aussi déchaîné, souffrant et agressif de Peter Sidhom. William Joyner est un Froh claironnant, Trevor Scheunemann un Donner honnête, Rodolphe Briand (Mime) est bien en place, alors que Andreas Konrad (Loge) tire parfois vers le ténor de caractère, expressif mais pas toujours complètement stable. Côté féminin, Natascha Petrinsky (Fricka), Nicola Beller Carbone (Freia) et Elzbieta Ardam (Erda) sont solides, alors que l’ensemble des trois Filles du Rhin, idéalement assorti, constitue peut-être le meilleur de la soirée : Eleonore Marguerre, Linda Sommerhage et Stine Maria Fischer. chœurs ont aussi été scrupuleusement préparés par Stefano Visconti, et contribuent à cette fête du belcanto. François Jestin Wagner : DAS RHEINGOLD – le 22 novembre 2013 à Monte-Carlo – Forum Grimaldi Donizetti : LA FAVORITE – le 15 décembre 2013 à Monte-Carlo – Auditorium Rainier III à marseille Orphée aux enfers Pour les fêtes de fin d’année à l’Opéra de Marseille, le public répond au quart de tour à la bonne humeur qui se dégage du plateau. 40 «Rheingold» © Opéra de Monte-Carlo Donnée à deux reprises à Monte-Carlo, avant une unique soirée au Théâtre des Champs-Elysées, La Favorite en version de concert aura bien tenu toutes ses promesses, à commencer par les débuts triomphaux de Juan Diego Florez dans le rôle de Fernand. Le Péruvien est clairement aujourd’hui au sommet de son art, avec tout d’abord une somptueuse conduite de la ligne vocale, en particulier une maîtrise du legato qui peut rappeler celle de son modèle Alfredo Kraus. Le volume ensuite s’est développé de manière spectaculaire, Florez n’est plus le tenorino de ses débuts en 1996, les aigus et suraigus sont projetés de façon spectaculaire. Et puis aussi la qualité du français est à présent remarquable, et il n’est nul besoin de recourir aux surtitres pendant le concert. L’articulation n’est pas aussi bonne chez Béatrice Uria-Monzon (Léonor), le timbre est velouté mais manque d’homogénéité dans le bas du registre, conséquence vraisemblable de sa nouvelle fréquentation de rôles plus aigus (dont une remarquable récente Tosca à Avignon). La mezzo française fournit toutefois une meilleure prestation que lors de son apparition dans la version italienne à Montpellier en 2008 (voir SM 207), et semble galvanisée par son brillant entourage. Jean-François Lapointe (Alphonse) impressionne fortement dans ce rôle de baryton taillé pour son instrument : diction appliquée et volume considérable sur quelques aigus. La prononciation est également un régal chez la basse Nicolas Cavallier (Balthazar), qui impose son autorité dans ce quatuor majeur. Les seconds rôles tiennent correctement leur rang, Alain Gabriel (Don Gaspar) en second ténor et Julia Novikova (Inès) aux accents slaves mais dotée d’un intéressant potentiel. Le chef canadien Jacques Lacombe est à la hauteur de l’événement, il maintient la cohérence de l’ensemble en communiquant une forte énergie, veille à ne pas couvrir les chanteurs mais sans s’interdire quelques éclatantes envolées. Les a c t La production de Claire Servais, créée à l’origine pour l’Opéra Royal de Wallonie à Liège, a déjà tourné sur plusieurs scènes, par exemple à Montpellier, puis à Avignon en 2008 (voir SM 204). La mise en scène fonctionne toujours aussi bien, elle est drôle et maintient un rythme soutenu, plein de vie. A Montpellier et Avignon, les spectateurs avaient pu apprécier le chant et la plastique irréprochable de la soprano Magali Léger en Eurydice. A Marseille, Brigitte Hool n’a rien à envier à sa consœur : sa tenue avec porte-jarretelles dans le duo de la mouche fait l’unanimité, et la voix dispose en outre de quelques réserves de puissance supplémentaire. Philippe Talbot lui donne sans anicroches la réplique en Orphée, mais c’est l’autre ténor Loïc Félix (Aristée / Pluton) qui remporte tous les suffrages à l’applaudimètre. Il chante d’une voix claire et se montre amusant sans surcharge, dès son entrée en vendeur de miel dans son véhicule 2 chevaux, ou ensuite dans la description de son pique-nique « local » : figatelli, pieds paquets, vin de Bandol… et pastis ! Marie-Ange Todorovitch est une sévère Opinion Publique, Chloé Briot une mezzo piquante en Cupidon, Jennifer Michel joue d’un fort accent allemand dans le rôle de Diane. Francis Dudziak est un autoritaire Jupiter, et même quelques solistes moins assurés vocalement – comme Franck Cassard (Mercure) ou Delia Noble (Vénus) – trouvent leur place par le jeu et le sourire. La direction de Samuel Jean est également bien dans le ton festif du spectacle, tout en gardant son sérieux et son application pour les airs aux délicieuses mélodies. François Jestin Offenbach : ORPHEE AUX ENFERS – le 3 janvier 2014 à l’Opéra de Marseille Loïc Félix et Brigitte Hool © Christian Dresse u a l i t é o p é r a à nice à montpellier Le Freyschütz Cosi fan tutte Pour marquer le 150ème anniversaire du jumelage entre les villes de Nuremberg et Nice, l’Opéra a curieusement choisi de proposer la version française du Freischütz allemand, réalisée par Hector Berlioz pour son entrée à l’Opéra de Paris en 1841. Un Cosi montpelliérain mitigé, avec quelques beaux coups d’œil mais un jeu qui ne fonctionne pas toujours, et un niveau vocal très disparate. Cosi fan tutte © Marc Ginot Le Freyschütz – Scène de la « Gorge aux loups » © Jaussein Beaucoup d’invités allemands dans la salle, dont le maire de Nuremberg, sont évidemment beaucoup plus familiers du texte original du chef-d’œuvre de l’opéra romantique composé par Carl Maria von Weber. La soprano Claudia Sorokina (Agathe) est d’ailleurs handicapée par une faible qualité de prononciation du français, alors qu’elle possède de beaux moyens et de la puissance, mais avec une gestion perfectible du souffle. Moins volumineuse, l’autre soprano Hélène Le Corre (Annette) conduit son timbre fruité de manière musicale, et on comprend le texte sans efforts. Le ténor Bernhard Berchtold (Max) s’applique sur la diction, le medium est robuste, l’aigu plus timide, Franck Ferrari (Gaspard) est appréciable dans ses récitatifs, beaucoup moins dans les parties chantées où l’aigu paraît toujours étranglé. La prestation de Stephen Bronk (Kouno) laisse assez indifférent, tandis que Lionel Lhote (Ottokar) et Thomas Dear (l’Ermite) sont très convaincants et on regrette qu’ils n’aient pas plus à chanter. Les chœurs sont enthousiastes, pas toujours d’une parfaite homogénéité, on relève plusieurs décalages sous la baguette du chef Philippe Auguin. L’orchestre est somptueux, avec un son magnifique dès l’ouverture, mais on ne sent pas de tension dramatique ; il s’agit beaucoup plus ce soir d’une belle prestation symphonique que d’un opéra qui vit dans nos oreilles. La mise en scène de Guy Montavon prend place sur un grand escalier à l’herbe verte ; de longs troncs descendent des cintres pour compléter le tableau champêtre, la maison d’Agathe est faite d’une petite ossature, et la production de fumées et de lumières violette figurent la scène de la « Gorge aux loups ». Ce dispositif scénique a l’avantage du spectaculaire, mais l’inconvénient de rendre très précautionneux les déplacements des protagonistes, par crainte de la chute. Certains solistes en arrivent par moments à regarder exclusivement leurs pieds… et on les comprend car le danger semble bien réel ! François Jestin « Faiblesse vocale » est un euphémisme pour ce qui concerne Antonio Abete (Don Alfonso) qui irrite très rapidement l’auditeur en prenant systématiquement les notes par en-dessous rendant l’impression d’une voix chevrotante qui disqualifie les duos, trios (comme le « Soave sia il vento »…), et les ensembles. C’est bien dommage car on ne peut rêver plus belles et bien chantantes Fiordiligi et Dorabella ce soir ! La soprano italienne Erika Grimaldi est une blonde Fiordiligi qui possède une large étendue vocale lui permettant de passer les écarts vertigineux du rôle, avec musicalité et sans problèmes sur les aigus de « Come scoglio ». Quant à la brune Marianne Crebassa, son timbre de mezzo est d’une rare beauté et l’ampleur qu’elle développe lui promet un avenir glorieux. A côtés de ces deux étoiles, Virgine Pochon (Despina) ne démérite pas mais manque d’un soupçon d’italianità et de vis comica dans ce rôle. Des deux fiancés, c’est le baryton qui surclasse le ténor, Andrè Schuen (Guglielmo) faisant entendre un joli grain de voix superbement timbrée, évoquant l’autorité d’un Don Giovanni. Wesley Rogers (Ferrando) est assez sonore mais émet des notes de plus en plus tendues et en force, si bien qu’on commence à s’inquiéter sérieusement pour lui en fin de 1er acte. C’est – dans la suite logique ! – l’écroulement au II, où la justesse et la technique sont en perdition dans son air difficile « Tradito, schernito », mais il maintient sa survie en dosant intelligemment en voix de tête. La direction musicale d’Alexander Shelley fait vivre le théâtre et est globalement appréciable, même si techniquement pas irréprochable : nombreux sont en effet les petits décalages avec le plateau et les attaques imprécises de l’orchestre. Enfin, la nouvelle production de Jean-Paul Scarpitta est surprenante : aucun décor sinon 3 chaises, puis 2 bancs, le summum du mobilier étant constitué d’une petite table entourée de chaises, avec sol et paroi en fond de plateau qui baignent dans un joli bleu. Quelques images sont très esthétiques, comme les choristes en noir dont les silhouettes se détachent en arrière-plan, mais à l’inverse les situations comiques tombent bien souvent à plat et finissent par traîner en longueur. François Jestin von Weber : LE FREYSCHÜTZ – le 23 novembre 2013 à l’Opéra de Nice Mozart : COSI FAN TUTTE – le 20 décembre 2013 à l’Opéra Comédie de Montpellier a c t u a l i t é 41 o p é r a ti d’académisme déconstructionniste qui cherche le sens par le contre sens, l’effet par la glose allégorique de chaque mot, tout cela sans vraiment proposer un message profond. teatro alla scala, milan La Traviata Distribution De tous les opéras de Verdi La Traviata est celui qui a été le plus souvent actualisé, bien que son intrigue soit difficilement compréhensible en dehors d’une société bourgeoise centrée sur la famille. 42 Dmitri Tcherniakov (mise en scène) est parfaitement conscient du caractère ambigu et conservateur de l’idéologie sous-jacente à cet opéra. La courtisane rejetée est réhabilitée seulement lorsqu’elle souscrit, in articulo mortis, aux valeurs de la société (Dieu, morale patriarcale, amour sacré de la famille). Cette ambiguïté appartenait à Verdi homme et artiste. Un critique a justement relevé que dans sa vie le compositeur fut plus souvent du côté du père Germont que d’Alfredo. (notamment celui du premier acte) avec des personnages-témoins qui écoutent les chanteurs (Annina, omniprésente, le valet Giuseppe). L’expression intime des sentiments et des émotions se transforme ainsi dans un discours persuasif gesticulateur, avec un résultat souvent involontairement parodique. Plutôt qu’une relecture novatrice du chef-d’œuvre de Verdi, la mise en scène nous semble un exemple inabou- Détournement Le metteur en scène russe aborde ces aspects idéologiques en détournant le sens général de l’œuvre. L’amour entre Violetta et Alfredo est présenté dès le début comme impossible, miné autant par le cynisme de la courtisane que par la carapace sociale de son amant. Aussi, Violetta n’estelle pas réintégrée dans la société grâce au sacrifice de son amour; au contraire sa mort (ici un suicide) est plutôt présentée comme le dernier acte victorieux d’une révolte contre la société et ses hypocrisies. Cette recherche d’un nouveau sens de La Traviata moyennant le renversement de l’attitude morale de la protagoniste (du sacrifice à la protestation) - amène, plus d’une fois, à des contresens ou à des non sens scéniques (par ex. tout le deuxième acte). En particulier apparaît comme incongru le constant ameublement scénique des airs Diana Damrau offre une prestation vocale magistrale. Toutes les difficultés de ce rôle sont surmontées avec une aisance technique et un sens du style qui font de sa Violetta une des meilleures de nos jours. L’«Addio del passato», en particulier, a suspendu le théâtre entier dans un moment de pure poésie. Il est dommage que la “direction d’acteurs» de Tcherniakov l’oblige parfois à des postures et des effets véristes (rires, gesticulations, étouffements) qui, loin d’exalter son art, ne font que souligner les limites de son jeu. Piotr Beczala dans le rôle d’Alfredo offre une prestation de routine, avec un chant pauvre de nuances et de couleurs. Željko Lu i est est au contraire un Germont à la voix magnifique et à l’accent noble, malgré quelques problèmes de justesse. Affublée en Klytaemnestra de salon (allure d’entremetteuse et cigare à la bouche), Mara Zampieri, célèbre Lady Macbeth et Minnie des années 80, est ici Annina, sans que personne comprenne pourquoi. En choisissant des tempi rapides et en rejetant tout envol romantique, la direction de Daniele Gatti semblerait s’inscrire dans la tradition d’un Toscanini. Malgré une certaine surexcitation rythmique, sa direction manque passablement de sens dramatique, avec tantôt des accélérations inexplicables, tantôt des ralentissements emphatiques accompagnés de sonorités presque wagnériennes (« Amami Alfredo »). Applaudissements pour tous et triomphe pour Damrau, seule lumière de cette pâle Traviata (représentation du 22 décembre 2013). Gabriele Bucchi Diana Damrau est «La Traviata», ici à l’acte III © Brescia/Amisano © Teatro alla Scala a c t u a l i t é o p é r a zurich opernhaus Fidelio Les metteurs en scène se méfient de Fidelio et tentent toujours d'extirper d'un livret jugé faible et mal structuré un message que le compositeur ne reconnaîtrait peut-être pas lui-même. Dans sa nouvelle production zurichoise, Andreas Homoki a opté pour une approche radicale en supprimant tous les textes. L'action débute par le fameux quatuor de la prison, où Leonore dévoile sa vraie identité d'épouse fidèle et courageuse au tyran qui a fait emprisonner son mari. Mais contrairement à ce qu'a mis en musique Beethoven, le coup de feu part et Leonore s'écroule dans les bras de son époux tandis qu'apeurés, Rocco et Pizarro quittent précipitamment les lieux. Alors que retentissent les dernières mesures de l'Ouverture Leonore III, Leonore se relève et se trouve progressivement enfermée dans les hauts murs de la prison qui se replient sur elle. Puis, avec l'aide de Marzelline qui chante alors son premier et unique air, elle endosse les habits d'homme qui lui permettront de pénétrer «Fidelio» dans la prison. Par la suite, © Foto T + T Fotografie / Tony Suter l'intrigue se déroule à peu près comme l'ont voulu Beethoven et son librettiste, mais l'absence de textes de liaison rend difficile la compréhension des divers coups de théâtre qui émaillent le parcours rocailleux de cette intrigue. Pourtant, ultime coup de théâtre, au moment de l'apothéose finale, le chœur quitte brusquement la scène pour laisser Florestan seul, éperdu devant la contemplation de son épouse décédée pendant que la musique n'en finit pas de fêter la beauté de la vie de couple lorsque le Bien peut triompher du Mal... Il serait à vrai dire ardu d'imaginer un final plus contraire aux intentions déclarées de Beethoven. Est-il si difficile aujourd'hui de croire encore en l'utopie d'un monde plus juste ? Les chanteurs se battent avec courage contre ces raccourcis qui leur rendent la tâche impossible, car Beethoven, dans sa partition, ne raconte rien mais dépeint d'abord des états d'âme qui sont chaque fois introduits par des séquences parlées chargées de mettre le spectateur au courant de ce qui se passe. Anja Kampe impressionne avec sa Leonore aux accents robustes, aux aigus lumineux et prenants et au médium d'une solidité à toute épreuve. Brandon Jovanovitch est à peine moins spectaculaire : son Florestan radieux passe la rampe avec une facilité presque excessive qui rend difficilement a c t u a l crédible sa vie de privations au fond d'un sinistre cachot: un brin de retenue dans les moments d'introspection auraient ici été les bienvenus. On passera rapidement sur le Pizarro au timbre éteint de Martin Gantner pour s'intéresser au couple secondaire formé par Marzelline et Jacquino, confié à une Julie Fuchs à la voix fraîche et forte et à un Mauro Peter certes plus discret mais non moins convaincant vocalement. Le Rocco de Christof Fischesser campe avec aplomb un Rocco plus juvénile que de coutume alors que le Ferrando de Ruben Drole semble tout simplement dépassé par les exigences pourtant minimes de son rôle. A la tête d'un orchestre remarquablement discipliné et d'un chœur magnifique d'engagement scénique, Fabio Luisi donne du chef-d'œuvre beethovenien une lecture survoltée mais jamais excessive dans la fourchette des nuances et des tempos choisis. (8 décembre) Les Maîtres Chanteurs de Nurembourg Pour ce deuxième et probablement dernier retour à l'affiche de cette production d’Harry Kupfer, l'Opéra de Zurich a fait les choses en grand. La distribution, où se mêlent sans friction vétérans et nouveaux venus, se compare sans autre à ce qui se fait de mieux en d'autres lieux. La direction, assurée par Sebastian Weigle de l'Opéra de Francfort, se révèle à la fois solide et inspirée tandis que la mise en scène a été retravaillée avec un souci de précision tel qu'elle paraît aussi fraîche qu'au premier jour. Après un Prélude encore chancelant, le chef imprime au spectacle un rythme soutenu qui n'a rien de précipité, certes, mais qui refuse de s'attarder sur les innombrables finesses de la partition pour concentrer son intérêt surtout sur le mouvement d'ensemble. Rarement, ces quelque quatre heures et demie de musique auront paru aussi brèves et aussi parfaitement signifiantes en chaque instant. Le rôle de Sachs était tenu par Jan-Hendrik Rootering, accouru pour prendre la relève d'un Albert Dohmen souffrant. La tâche herculéenne ne l'a jamais pris en défaut, le timbre conservant sa fraîcheur et sa force de frappe jusque dans la harangue finale. Seul une émission un rien nasale et un vibrato parfois mal maîtrisé trahissait le passage des ans... Il en va de même pour Roberto Sacca, un Walter von Stolzing au chant éblouissant mais obligé de retravailler la ligne de chant dans un quintette qui le voyait tout à coup à court d'aigus. Parmi les nouveaux venus, il n'y a que de bonnes nouvelles à annoncer : Martin Gantner fait de Beckmesser un personnage à la fois comique et attendrissant. Vocalement, il se place au plus haut niveau avec son émission soignée, son timbre remarquablement équilibré et sa ligne de chant superbe d'élégance jusque dans les moments les plus caricaturaux lors de la sérénade sous la fenêtre d'Eva ou pendant le concours final. Autre nouveau venu, Guido Jentjens est un Pogner à la voix imposante, à la fois profonde et souple tout en conservant une certaine élasticité dans l'émission qui dément le poids des ans que suggère le rôle dans l'opéra. Emma Bell en Eva séduit par son soprano large, presque trop rutilant déjà pour la jeune fille virginale qu'elle est censée incarner: mais comment bouder le plaisir procuré par un quintette aussi magistralement maîtrisé par une voix qui ne connaît absolument aucun problème de souffle ou d'intonation ? Le David de Michael Laurenz étonne aussi par la maturité et la vigueur inaltérable de son ténor qui paraît presque déplacé dans ce contexte. Mais l'intelligence du jeu scénique et le luxe de nuances de son exposé des règles du beau chant au début de l'opéra placent d'emblée cet interprète au premier rang de la génération montante actuelle. Anna Goryachova, enfin, fait sortir Maddalena de son rôle de potiche vieillissante avec son chant ardent et un physique de jeune première qui font d'elle une rivale potentiellement dangereuse pour l'héroïne. Le chœur, parfait comme à son habitude, ajoute une touche de grandeur finale à ce spectacle qu'on peut qualifier de grandiose. (16 nov.) Eric Pousaz i t é 43 o p é r a de meilleurs interprètes mozartiens qu'on aime à leur reconnaître loin à la ronde (24 novembre). à vienne Die Zauberflöte Peter Grimes La Flûte enchantée représente pour l'Opéra de Vienne ce que Carmen incarne pour les institutions parisiennes : l'essence même du répertoire, la raison d'être de la troupe. Aussi toute nouvelle version de ce chef-d'œuvre est-elle attendue ici avec une impatience mêlée de crainte : va-t-on réussir, cette fois encore, à proposer une mise en scène qui satisfasse à la fois les amateurs de grand spectacle et les intellectuels qui ne se sont toujours pas mis d'accord sur la signification de ce conte pour enfants qui place chaque adulte devant une série de charades insolubles ? 44 Patrice Caurier et Moshe Leiser n'ont satisfait aucune de ces catégories de spectateurs avec leur réalisation misérabiliste. Le décor de Christian Fenouillat est d'une laideur insurpassable : en plaçant l'intrigue dans le décor d'une usine désaffectée où les effets d'éclairages glauques se succèdent sans raison apparente, on s'attendait au moins à une remise au goût du jour des impératifs scéniques imaginées par Schikaneder. Mais rien de tout cela ne se produit: l'histoire est racontée au premier degré, avec force effets pyrotechniques pour souligner les moments de magie. Les animaux charmés par Tamino dansent comme dans un remake de film de Walt Disney, la Reine de la Nuit fait une entrée banale en dépit des projections sidérales qui l'accompagnent, les épreuves du feu et de l'eau, avec quelques fumigènes tantôt éclairés de bleu tantôt de rouge ne suscitent aucune émerveillement et font ressembler la mise en scène à une production villageoise montée par une société locale sans argent. La direction de l'orchestre, confiée à Christoph Eschenbach, dérange par son manque de consistance. Tantôt très lente, tantôt trop rapide, elle souffle le chaud et le froid sans justification dramatique et finit par couper tout l'élan dramatique que les chanteurs-acteurs essaient vainement d'imprimer à l'action scénique. La troupe réunie pour l'occasion ne comprend presque pas de chanteurs autrichiens, ce qui est tout de même un comble dans une œuvre aussi marquée par le génie du lieu. Les prononciations exotiques du dialogue rendent le texte la plupart du temps confus et finissent par inciter le spectateur à ne plus faire aucun effort de compréhension. Le chant est de bonne tenue, mais n'atteint pas les sommets d'émotion auxquels les représentations passées ont habitué les spectateurs accros de Mozart. Benjamin Bruns est un a Tamino vocalement plein de vaillance avec son timbre déjà presque trop héroïque mais néanmoins admirablement conduit. Chen Reiss incarne une Pamina au comportement et au chant empreints de noblesse mais la voix n'a rien de cette douceur lumineuse qui caractérise les grandes interprètes du rôle. Le Sarastro de Brindley Sherratt fait nettement meilleure figure avec sa base assurée et magnifiquement sonore dans la fameuse prière du 2e acte alors que Merkus Werba, avec son Papageno agile et vocalement avenant, remporte facilement tous les suffrages. Les trois dames aux voix puissantes ont de la peine à donner une teinte harmonieuse à leurs interventions, qui souffrent d'un excès d'individualisme, alors que Thomas Ebenstein surprend agréablement avec un Monostatos au chant délié et précis. L'orchestre et les choeurs ne déméritent pas, mais rendent ce soir-là assez incompréhensible la réputation Britten est né en 1913, et le centenaire de sa naissance a été fêté avec moins de constance que ceux de Verdi et Wagner. Le Staatsoper n'a même pas juger bon de proposer un nouveau titre pour enrichir son maigre répertoire consacré à la musique de ce génie anglo-saxon mais s'est contenté de reprendre une impressionnante mise de scène de Christiane Mielitz, présentée pour la première fois sur ce plateau en 1996 déjà. Avec son décor abstrait et stylisé, la production n'a pas pris une ride et se présente aujourd'hui encore sous son meilleur jour. Ben Heppner aurait dû chanter le rôle titre. Malade, il a été remplacé par Herbert Lippert, un chanteur connu ici pour ses interprétations wagnériennes et ses imparables interventions dans d'inoubliables représentations de La Chauve-souris de Strauss. Son incarnation du pêcheur solitaire s'inscrit d'emblée parmi les meilleures du moment. La voix, tranchante et acérée rend le personnage inhabituellement antipathique mais cerne au plus près le problème psychologique qui va causer sa perte. Sa longue déploration finale, chantée a cappella dans un brouillard oppressant avec un timbre d'une incroyable richesse de nuances, restera comme un des moments forts particulièrement marquants de cette soirée pourtant riche en émotions. Gun Brit Barkmin en Ellen Ford et Iain Paterson en Balstrode se révèlent à peine moins grandioses: elle confère au personnage «Die Zauberflöte» avec Valentina Nafornita (Papagena), Markus Werba (Papageno), Wiener Sängerknaben (3 Knaben) © Wiener Staatsoper / Michael Pöhn c t u a l i t é o p é r a une tranquillité radieuse qui Schœnberg Chor déchiforme un contrepoint idéal à la rent l'espace, les révolviolence contenue du héros, tantes des protagonistes dis que lui, avec son baryton s'expriment avec une épanoui, donne du capitaine violence dénudée qui contraint d'envoyer Grimes à la tord le cou aux idées mort l'image forte d'un être reçues concernant la déchiré par les exigences de beauté séraphique du l'impitoyable loi tacite de cette chant mozartien, et les petite communauté isolée qui ne commentaires de l'orsupporte pas qu'on s'éloigne des chestre, confiés ici au voies tracées. grandiose Freiburger L'impressionnante liste de Barockorchester, surchanteurs chargés de donner prennent constamment corps aux divers personnages par la tournure modersecondaires qui peuplent cet ne de leurs tournures et «Peter Grimes» avec Gun-Brit Barkmin (Ellen Orford), Herbert Lippert (Peter Grimes), Iain Paterson (Balstrode) © Wiener Staatsoper / Michael Pöhn ouvrage se révèle riche en fortes par la courbe aiguisée personnalités qui rappellent à de leurs arêtes. bon escient qu'il n'y a pas vraiment de petits comme une vamp blonde aimant les plaisirs Richard Croft incarne un Idomeneo idéal : rôles dans une bonne représentation d'opéra tan- faciles et souffrant d'une tendance compulsive la voix est claire et large mais conserve son agidis que l'orchestre et les choeurs, placés sous la aux achats de colifichets et de tenues vestimen- lité de bout en bout au point de venir à bout du direction engagée de Graeme Jenkins, offrent taires extravagantes. En mariant son fils à cette fameux air 'Fuor del mar' avec une aisance qui du langage de Britten une interprétation d'une femme superficielle, Idomeneo peut espérer stupéfie; Gaëlle Arquez charme le public avec infinie richesse de tons contrastés. Finalement, pendant un temps le détourner du complot que la mâle assurance vocale de son Idamante qui même sans nouvelle production, l'Opéra de ce dernier pourrait tramer contre lui. Mais il se fait rapidement oublier le travesti tant l'émisVienne a quand même dignement fêté cet anni- raisonne à temps, finit par comprendre qu'il lui sion, nuancée autant que racée, reste toujours versaire avec une reprise d'une telle qualité (23 faut se retirer. Après avoir désigné son fils parfaitement stable. Sophie Karthäuser, une Ilia novembre). comme successeur, il se couche lentement et légèrement plus retenue, a parfois de peine à meurt le sourire aux lèvres, tandis qu'Idamante, passer la rampe mais elle brosse du personnage dont le nouveau-né vient de pousser son pre- un portrait inhabituellement pugnace avec une Idomeneo Au Theater an der Wien, la musique de mier cri pendant le ballet final, sait déjà qu'il se voix d'un aplomb irréprochable. C'est pourtant Mozart prend une toute autre tournure grâce à trouvera dans quelques années dans la même Marlis Petersen, avec sa fulgurante Elettra, qui l'interprétations tant musicale que scénique situation que feu son père et que le dilemme bouleverse réellement le public. Le chant est qu'en propose le tandem formé de René Jacobs sera également difficile à résoudre pour lui. d'une perfection formelle incandescente, et l'exet Damiano Michieletto. L'opéra est notoireRené Jacobs, avec sa direction enflammée pressivité de chaque note fait de ses intervenment difficile à mettre en scène de nos jours, car et riche en contrastes accusés, épouse parfaite- tions des moments de théâtre chargés d'une l'intrigue tourne autour d'une improbable ven- ment le propos violent et sanglant de la mise en incroyable véhémence qui redonne tout son geance de Neptune dont les artistes modernes scène. Les plaintes du choristes de l'Arnold poids dramatique à ce personnage impitoyablene savent vraiment que faire,. ment sacrifié juste Le metteur en scène italien avant le rideau final: sa à empoigné le sujet à bras-lescène de folie, jouée et corps et en modernise résoluchantée avec une ment les prémices. Ilia et absence de retenue Idamante forment déjà un cousidérante, vaut à juste ple uni avant le lever du rideau titre à cette interprète comme en témoigne l'état avanune ovation interminacé de grossesse dans lequel se ble en fin de représentrouve la princesse troyenne. tation. Excellents, les Idomeneo projette d'écarter rôles secondaires s'intèIdamante non parce que le dieu grent parfaitement à ce de la mer le lui ordonne, mais spectacle qui fera date parce qu'il craint de trouver en dans les annales du lui un rival prêt à l'éliminer au théâtre (22 novembre). premier signe de faiblesse. Eric Pousaz Aussi jette-t-il son dévolu sur «Idomeneo» avec Richard Croft et Julien Behr © Werner Kmetitsch Elettra, qui paraît à sa cour a c t u a l i t é 45 o p é r a sur l'Avenue Unter den Linden. Le retard pris lors des travaux de réfection du bâtiment historique la contraigne pourtant à rester quelques mois encore dans le petit Schiller Theater où les mises en scène paraissent parfois trop à l'étroit. Pour ce nouveau Trouvère, Philipp Stölzl Deux des trois opéras berlinois se sont encore offert le luxe d'une nouvelle adopte un pari audacieux : il met exactement en production d'une œuvre majeure du compositeur italien avant la fin scène les didascalies du livret, quitte à rendre officielle des célébrations du bicentenaire de sa naissance. Les résultats totalement incompréhensible une action dont n'auraient pu être plus contrastés. l'absence de logique n'est pas le moindre des défauts. Le décor de Conrad Moritz Reinhardt Deutsche Oper : Falstaff pagnement orchestral relativement lourd que emplit la scène d'un grand cube blanchâtre percé C'est à Christof Loy qu'a échu l'honneur de Donald Runnicles tire d'un orchestre aux sons d'ouvertures à divers niveaux. Diverses projecproposer une nouvelle version de l'ultime chef- souvent pâteux et épais en dépit de la beauté tions permettent d'esquisser les grandes lignes du d'œuvre comique de Verdi. Comme on pouvait sonore intrinsèque de chaque épisode. Noel décor dans lequel devraient se dérouler les s'y attendre, il n'a pas pris des gants pour empoi- Bouley, un jeune baryton américain de vingt-neuf moments forts de l'action sans pourtant surchargner le sujet à bras-le-corps et en proposer une ans, ne parvient pas vraiment à faire vivre le per- ger le spectacle d'intentions. Les chanteurs sont lecture revivifiée qui, à défaut d'être vraiment sonnage car l'interprétation paraît routinière et invités à donner à voir ce qu'ils ressentent autant nouvelle, a du moins le mérite de mettre à nu les manque simplement de punch. La voix est certes qu'à jouer la comédie, comme dans un bon vieux ressorts comiques de la partition. belle et ardente, mais elle manque de panache film muet où l'exagération des mimiques servait Comme à Salzbourg au festival d'été de pour s'imposer comme le pivot de l'action au plan de substrat au texte. L'effet est finalement assez 2013, l'intrigue se déroule dans un EMS réservé musical. Michael Nagy est nettement plus à l'ai- comique mais, comme le répète le metteur en aux artistes lyriques vieillissants. Avant que le se en Ford avec son timbre large et magnifique scène dans son programme, peut-on prendre au rideau se lève, un vieux film nous montre un d'assise. Le joli ténor de Joel Prieto fait bonne sérieux de nos jours les rebondissements invraibaryton sur le retour s'essayer à l'interprétation de impression en Fenton mais sans imprimer une semblables de ce livret mal ficelé ? L'avantage de l'unique aria de Falstaff où il se remémore sa marque durable dans l'oreille. Du côté des dames, cette approche irrespectueuse est de focaliser l'atsveltesse lorsqu'il n'était encore qu'un page à la on admire le mezzo corsé de Dana Beth Miller tention sur la musique; elle rend par là-même un cour du Duc de Norfolk. Par un savant fondu- qui brosse de Mrs Quickly un portrait haut en magnifique hommage au compositeur... enchaîné, la scène s'éclaire ensuite et les person- couleurs, on apprécie le soprano virevoltant de La distribution était d'un luxe que justifiait nages du film apparaissent en chair et en os Barbara Haveman dont l'Alice Ford s'impose l'intention première de fêter dignement la réoudevant nous. Progressivement, ils entrent dans les comme une maîtresse femme au plan vocal éga- verture de la salle historique où la troupe se prorôles de l'opéra et quittent leurs habits de pen- lement et on déguste avec plaisir les accents déli- duit de coutume. Anna Netrebko s'essayait pour sionnaires pour endosser des costumes en accord cats de la Nanetta d'Elena Tsallagova qui ajoute la première fois au rôle de Leonora, et elle triomavec la période décrite par Shakespeare dans sa une note de féerie aérienne au dernier tableau phe sans peine des embûches du rôle si l'on comédie des Joyeuses Commères de Windsor. Un avec sa délicate incantation aux fées du lieu (5 excepte quelques vocalises imprécises dans ses jeu constant de références au passé et au présent déc.). deux grands airs: mais quelle voix sensuelle! oblige les spectateurs à naviguer sans cesse entre Large pleine, chaude, ronde, elle emplit sans le temps de la représentation et celui de l'action Staatsoper : Il trovatore peine le théâtre et vaut à l'artiste russe une ovaCe nouveau spectacle aurait dû marquer le tion méritée. Placido Domingo en Comte de dépeinte par le livret, ce qui permet de revigorantes associations visuelles soulignant intelligem- retour de la troupe de l'Opéra d'Etat en ses murs Luna séduit plus facilement que dans les autres rôles de baryton qu'il a rajoument la modernité du propos vertés dernièrement à son dien. Mais le procédé a ses limites immense répertoire, car ici, aussi car il empêche une totale après tout, le baryton se proimmersion dans l'univers comique file comme un digne rival du d'une soirée qui finit par paraître ténor, non comme un père trop sage et trop sérieuse tant les vengeur! Le timbre reste intentions dramaturgiques du metclair, admirablement stable teur en scène prennent le pas sur la dans l'aigu mais cotonneux construction magistrale d'un livret dans le grave, ce qui, ici, ne d'une rare perfection formelle et gênerait finalement pas trop d'une musique qui en épouse si le souffle n'était si court. chaque revirement avec une En Azucena, la jeune confondante acuité. La distribuPrudenskaya fait un véritable tion réunie pour l'occasion, sans tabac tant il est rare d'entenddémériter, peine à trouver le ton «Il Trovatore» avec Marina Prudenskaya (Azucena), Anna Netrebko (Leonora), Gaston Rivero (Manrico), Plácido Domingo (Graf Luna) © Mara Eggert re une sorcière au chant pleijuste. Cela tient d'abord à l'accom- à berlin : la fête à verdi Suite et fin... 46 a c t u a l i t é o p é r a nement assumé jusque dans ses Neuenfels dans sa nouvelle excès et constamment libre de production n'y va pas par quavibrato excessif. Séduisant par sa tre chemins: il récrit complèteclarté à la fois dynamique et percument le texte parlé (les récitatante, ce portrait de gitane rappelle tifs sont optionnels, dans ce fort opportunément que pour le cas, car une des deux versions compositeur, c'est elle qui est le signées par Mozart n 'en compersonnage central de l'ouvrage, prend point) et ajoute deux non le couple d'amoureux malheupersonnages d'acteurs vieillisreux! Gaston Rivero se bat avec sants qui philosophent sur l'acourage contre les aigus claironmour, ses conséquences sur la nants de Manrico, le trouvère renévie de tous les jours et l'imposgat, et se sort avec les honneurs sibilité dans laquelle il met les d'une soirée qu'il a sauvée en amants de mener une vie noracceptant de remplacer le titulaire male en prenant des décisions «La Finta giardiniera - Les portes de l’amour» avec Alex Penda (Arminda), Stephanie déclaré malade. A la tête d'un empreintes de bon sens. On Atanasov (Ramiro) © Ruth Waltz orchestre et d'un chœur admirablen'est en fait pas loin de l'uniment disposés, Daniel Barenboim crée la surpri- théâtre d'importance internationale et l'on peine à vers des liaisons dangereuses, même si l'explorase dans un répertoire où on ne l'attendait pas: son comprendre le sens d'une telle entreprise dans ces tion cynique des valses-hésitations sexuelles va accompagnement est précis, musclé mais sans conditions. La Fiordiligi de la Suissesse Brigitte nettement moins loin. Au final, l'opéra est donné lourdeurs ou lenteurs excessives. On n'eût pu Geller est encore celle qui tire le mieux son épin- sous un titre nouveau : Les portes de l'amour, car souhaiter mieux pour ce titre qui ne parvient tou- gle du jeu avec son soprano ductile, épanoui mais il ne s'agit rien moins que de calquer la musique jours pas à susciter auprès du public le même manquant tout de même d'agilité dans les vocali- de Mozart sur une toute autre histoire.... La disenthousiasme que Rigoletto ou La Traviata (4 ses du 'Come scoglio'... En Dorabella, Karolina tribution est composée de chanteurs jeunes et déc.). Gumos lui donne la réplique avec pertinence, beaux, parfaitement à l'aise dans ce labyrinthe mais la voix est trop ouverte dans les moments des sentiments dont personne ne ressort finaleKomische Oper : Cosi fan tutte exposés pour que l'auditeur prenne plaisir à l'en- ment indemne. Anna Siminska est une Violanta C'est une nouvelle version curieuse de Cosi tendre négocier les difficultés pourtant réduites désinvolte jusqu'à l'impertinence et négocie les fan tutte que propose l'Opéra comique de la ville. du rôle. Günter Papendell est irréprochable en longues séquences de fioritures de sa scène de L'action se déroule dans un atelier de restauration Guglielmo, ce qu'on ne saurait dire du Ferrando folie avec un aplomb qui force le respect. Avec de tableaux baroques. L'équipe de spécialistes vocalement approximatif et souvent à la peine de son beau timbre mordoré, Stephanie Atanasov, engagée pour réaliser ces travaux s'affaire autour Stefan Cifolelli. Le Don Alfonso de Sevenich dans le rôle travesti de Ramiro, atteint également de fresques endommagées par le passage des ans. n'est franchement pas à sa place ici avec son à des sommets d'émotion malgré la platitude du Parmi eux, deux couples aux relations plutôt chant débraillé et son timbre fatigué; par contre, texte de ses airs qui transforme ses plaintes en tumultueuses dans lesquels on reconnaît rapide- malgré une certaine dureté dans l'aigu, la éléments comiques d'un goût douteux. Regia ment le quatuor de base de l'opéra mozartien. Despina de Cornelia Zink parvient à se montrer à Mühlemann, une Serpetta au timbre aérien, et Lorsque le chef de l'atelier propose le fameux la hauteur des enjeux dramatiques et vocaux de Stephan Rügamer, un Podesta aux envolées pari aux deux amants certains d'avoir conquis son rôle. Même l'orchestre, dirigé par Henrik comico-lyriques à la fois élégantes et pleines de définitivement le cœur de leurs belles, ces der- Nanasi qui occupe le poste de directeur général punch, assurent aux péripéties un déroulement au niers endossent les habits des personnages des de la musique dans la maison, paraît bien trop rythme soutenu. Doglet Nurgeldiyev est par conttableaux à la restauration desquels ils travaillent prosaïque pour proposer des pistes de lecture re un Comte Belfiore plutôt pâlot, tout comme présentement, et ils reviennent sur scène en par- nouvelles qui eussent correspondu à celles que Alex Panda en Arminda et Aris Argiris en Nardo lant italien alors que leurs promises continuent à tente d'explorer Alvis Hermanis dans sa nouvelle dont les interventions restent bien en-deçà des s'exprimer dans la langue de Goethe. Les femmes production plutôt décapante (1er déc.) possibilités comiques de leurs rôles. Christopher se laissent abuser, puis, charmées, empruntent le Moulds trouve par contre toujours le ton juste même chemin et s'habillent également à l'ancien- Staatsoper: La finta giardiniera pour accompagner efficacement les chanteurs Cet ouvrage de jeunesse de Mozart nous dans l'exposé embrouillé de leurs vies sentimenne tout en passant à l'italien. Lorsque la comédie touche à sa fin (Despina est bien sûr devenue ici montre un compositeur à la recherche d'un sujet tales : sous sa direction animée, l'orchestre pétille l'éternelle femme de ménage ronchonnante!), un qui soit à la hauteur de ses ambitions artistiques et s'immisce dans l'action en faisant entendre des des couples se sépare tandis que l'autre trouve sur le plan musical. Or le livret de cette Finta voix curieusement discordantes mais parfaitedans l'échangisme une nouvelle raison d'espérer giardiniera sur lequel il a écrit sa musique est ment à leur place dans le discours déjà passableque l'avenir réserve quelques belles surprises vraiment mauvais car confus et peu plausible; il ment troublé des protagonistes (3 déc.) pour eux. Le chant n'est malheureusement pas à rend donc toute mise en scène moderne difficile Eric Pousaz la hauteur. Aucun des artistes présents sur la à réaliser sur un plateau car le public n'est plus scène ne parvient à maîtriser le langage mozar- prêt à se laisser divertir par trois heures de quitien comme il conviendrait de le faire dans un proquos d'une affligeante banalité. Hans a c t u a l i t é 47 o p é r a à londres Un autre Verdi Alors que la majorité des maisons d'opéras du monde ont fêté le bicentenaire de la naissance de Verdi en proposant de nouvelles lectures d'ouvrages-phares ou en puisant dans leurs réserves de mises en scène à succès, le Covent Garden de Londres a osé le pari de monter Les Vêpres siciliennes dans sa version française, un pari que seul l'Opéra de Francfort a osé en juin passé. 48 L'ouvrage a été composé entre la trilogie formée du Trouvère, de Rigoletto et de La Traviata, et des titres aussi célèbres qu'Un Bal masqué ou Simon Boccanegra. Pourtant, jusqu'à aujourd'hui, ce grand opéra en cinq actes ne s'est pas imposé durablement au répertoire et reste le plus méconnu des chefs-d'œuvre de la maturité du compositeur italien. La nouvelle production du Royal Opera de Londres rend presque compréhensible ce dédain des directeurs de théâtre. L'œuvre est lourde; elle nécessite non seulement un quatuor de solistes imposant capable d'affronter des rôles d'une lourdeur et d'une difficulté technique exceptionnelles, mais exige aussi l'engagement d'un ballet et d'un chœur renforcé; pour ajouter à ces difficultés, les nombreux changements de lieux prévus dans le livret impliquent la mise en place d'une production qui ne peut qu'être onéreuse. Enfin, avec près de quatre heures de musique, l'ouvrage compte parmi les plus longs de Verdi: seul Don Carlos fait mieux en terme de durée!... Néanmoins l'effort se justifie amplement tant la musique est grandiose et innovante, même si elle reste encore fortement marquée au sceau du style pompeux cher au grand opéra à la française. La mise à l'affiche de ce titre a remporté un succès sans précédent sur la scène londonienne. Pas un seul siège ne restait disponible pour cette huitième représentation de la série, et l'on peut espérer qu'une prochaine reprise du titre permettra à un public encore plus nombreux de juger sur pièce une œuvre dont on a trop vite dit qu'elle ne correspondait plus au goût du jour. Une mise en scène innovante Le metteur en scène norvégien Stefan Herheim est d'avis que l'histoire du soulèvement des Siciliens contre l'occupant français à la fin du XIIIe siècle ne correspond plus à grand a chose pour le public actuel. Dans son nouveau spectacle, il fait jouer l'intrigue sur la scène et dans les coulisses de l'Opéra de Paris en plein XIXe siècle. Pendant les préparatifs d'une représentation, les ballerines sont surprises en plein travail par une équipe de soldats qui ne prend pas de gants pour obtenir d'elles les satisfactions escomptées. Le monde des arts devient ainsi celui des victimes de l'oppression (les Siciliens du livret), alors que celui des occupants est incarné par le public qui vient au théâtre dans le seul but de se détendre en versant une larme furtive sur le destin tragique des héros des ouvrages mis à l'affiche. La révolte finale permet au artistes incompris et méprisés) mais ne propose pas de pistes de réflexion. Il a du moins le mérite de se dérouler dans un décor grandiose qui se transforme constamment en nous faisant passer sans baisser de rideau de la salle de répétitions du ballet à l'auditorium lui-même, constitué de trois rangs de balcons, de quelques loges et d'une scène d'une profondeur inattendue. Pour rendre la dimension onirique encore plus présente, le décorateur Philipp Fürhofer s'amuse à faire passer constamment de gauche à droite l'espace scénique ou la salle de façon que le public perd rapidement tout repère visuel et se laisse porter par une extravagance scénique qui compte parmi les plus spectaculaires qui se puissent imaginer. La distribution ne comprend aucun nom d'interprète italien mais accomplit néanmoins un sans-fautes dans ce parcours semé d'embûches de tous ordres. Michael Volle fait grande impression dans la figure tyrannique de Guy de Montfort à qui il prête une voix robuste mais riche d'une incroyable fourchette de nuances. Bryan Hymel, qui incarne son fils tiraillé entre les impératifs de son amour filial et ses engagements politiques qui le rendent ennemi de son père, fait étalage d'une voix magnifique d'éclat, mais manifestant une tendance marquée au cri en fin de parcours. Erwin Schrott trouve en «Les Vêpres siciliennes» © Cooper personnel artistique du théâtre de se débarrasser de ceux qui tentent de l'asservir, le massacre de l'oppresseur étant à interpréter comme un acte de liberté artistique recouvrée. On l'aura compris: ce spectacle se présente comme une rêverie sur un thème connu (le public inculte mais riche est ici opposé aux c t u a Procida un rôle qui lui permet de mettre en valeur sa prodigieuse voix de basse, au détriment parfois, il est vrai, de la précision dans l'intonation. La voix solaire, chaleureuse et veloutée de Lianna Haroutounian convient idéalement au personnage d'Hélène dont elle brosse un portrait probant sauf lorsqu'il s'agit de faire l i t é o p é r a chœur et le non moins impressionnant orchestre de la maison dans un parcours verdien sans faute qui ferait honneur aux plus grands théâtres de la Péninsule (11 novembre). Wozzeck Simon Keenlyside est «Wozzeck» © Catherine Ashmore preuve d'une virtuosité presque exhibitionniste comme dans le fameux Boléro du 5e acte où elle atteint alors visiblement les limites des possibilités techniques de son timbre plutôt lyrique. Antonio Pappano dirige avec passion un opéra qui lui tient à cœur: sa direction tour à tour emportée ou fervente entraîne le prodigieux Changement radical d'atmosphère le lendemain soir avec Wozzeck d'Alban Berg. La réalisation scénique de Keith Warner est à peine moins spectaculaire que celle des Vêpres siciliennes vue le soir précédent. Dans le décor de laboratoire médical d'une blancheur aveuglante de Stefanos Lazaridis, le metteur en scène anglais montre la descente aux enfers du personnage central comme une lente immersion dans l'univers déshumanisé qui le rejette. Au fur et à mesure que le drame progresse, l'espace semble perdre sa structure et son équilibre: l'action se joue alors tantôt sur le plateau, tantôt en dessous avec un immense miroir en toile de fond qui permet au spectateur de suivre les fils de l'intrigue en perspective aérienne, comme s'il voyait s'agiter ce petit monde au travers des lentilles d'un microscope. La scène finale où Wozzeck s'immerge dans un aquarium empli d'eau teintée de sang sous le regard indifférent et comme absent de son fils compte sans conteste au nombre des images les plus fortes Clôture Manca, le Festival international des musiques d’aujourd’hui établi sur la Côte-d’Azur, en est déjà à sa 34e édition. Remarquable longévité ! Le thème de cette édition, “ Le Rayon vert ”, fait référence à un phénomène optique particulier et à la légende qui l’accompagne, et se veut sa traduction en musique. Ou quand l’imaginaire tente de rejoindre la réalité. Du 19 novembre au 1er décembre, créations et manifestations inusitées ont ainsi empli d’effluves sonores les lieux les plus variés de Nice et de ses environs. Le concert de clôture prend place dans l’acoustique impeccable de l’Auditorium Rainier III de Monaco, avec l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo et un programme éclectique à l’image du festival. Se succèdent ainsi Jeu de Cartes de Stravinsky, Redshift (autre référence optique – ici les clichés obtenus au moyen de télescopes), création mondiale due au compositeur russe Vladimir Tarnopolski, le Deuxième Concerto pour piano de Prokofiev et la Rapsodie espagnole de Ravel. Autant de pages de facture et de nature différentes, propres à mettre en exergue les vertus de duc- a c t u tilité et de malléabilité de la phalange monégasque. Car c’est à un festival sonore que l’on assiste ! D’entrée frappe l’homogénéité, la virtuosité contrôlée et la vigueur des timbres, dans un Stravinsky qui n’est pourtant que pièges pour les cent vingt instrumentistes réunis. Ravel confirme, par un envol souverain, le même niveau d’excellence (oublions un petit écueil passager du pianissimo des cuivres à la fin de Habanera). Prokofiev est plus sage, côté orchestral, mais laisse au soliste, Martin Helmchen, la part belle : dans un jeu perlé et percutant, des emportements d’un magnifique élan. La pièce de Tarnopolski constitue une autre aventure, qui associe un traitement électronique dans un alliage de couleurs scintillantes, au sein a l i t qui se puissent imaginer sur une scène d'opéra. La distribution est d'une homogénéité remarquable. Simon Keenlyside a su faire sien le rôle du soldat torturé; la voix n'est jamais agressive, et c'est précisément par sa douceur et la tendresse de ses inflexions qu'il rend encore plus insupportable la situation de cette victime qui assassine le seul être qu'il ait aimé pour retrouver une partie de sa dignité. A Karita Mattila, une Marie voluptueuse au chant d'une opulence inhabituelle, s'opposent les coassements agressifs du Docteur de John Tomlinson et les glapissements apeurés du Capitaine de Gerhard Siegel. Endrik Wottrich, un TambourMajor aux accents idéalement arrogants, et John Easterlin, un Andres aux intonations empreintes de commisération, complètent idéalement ce tableau musical inégalable de la misère humaine. A la tête d'un orchestre admirablement disposé, Mark Elder radiographie la partition de Berg à la fois pour en tirer les stridences les plus modernes et pour en rechercher les racines musicales dans un postromantisme sur lequel le compositeur tire ici un trait définitif (12 novembre). Eric Pousaz d’un long crescendo-descrescendo-crescendo. Une façon d’esthétique postspectrale, qui ne serait pas follement originale, mais à laquelle on peut succomber. Sans retenir toutefois, au bout du compte, le sentiment d’être confronté à la création d’une œuvre immortelle. Nous n’avons encore Dima Slobodeniouk rien dit du chef, Dima © Marco Slobodeniouk, pour le garBorggreve der pour la bonne bouche. Car si l’orchestre délivre une souplesse confondante, il la doit à la maîtrise consommée de la direction qui la sous-tend. Précision des gestes, assurance des tempos, cisèlement du détail et rigueur du souffle : ces qualités indéfectiblement conjuguées signent la matière d’une compétence rare. On comprend alors l’hommage des instrumentistes, notable et assez exceptionnel, au moment de l’un des saluts, refusant de se lever pour laisser seul au chef le recueil des bravos. Pierre-René Serna é 49 OPÉRA JEUNE PUBLIC DÈS 7 ANS VERSION FRANÇAISE PLACES CHF 15.– À 48.– MIGROS- L-CLAS E R U T L U C T N E POUR-C 014 au Saison 2013/2 SICS Victoria Hall Jeudi 13 mars 2014 à 20 h ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL Kent Nagano (direction) Marc-André Hamelin (piano) Richard Wagner Prélude de l’opéra «Parsifal» David Philip Hefti* Création mondiale Commande Migros-Pour-cent-culturel-Classics Franz Liszt Concerto pour piano Nº 2 Hector Berlioz Symphonie fantastique 5, 7, 8, 9, 12 FÉVRIER *Compositeur suisses Billetterie: Service culturel Migros Genève, Rue du Prince 7, Tél. 022 319 61 11 Stand Info Balexert et Migros Nyon-La Combe. www.culturel-migros-geneve.ch WWW.OPERA-LAUSANNE.CH T 021 315 40 20 SIDNEY BECHET Organisation: Service culturel Migros Genève www.culturel-migros-geneve.ch www.migros-pour-cent-culturel-classics.ch Théâtre des Marionnettes de Genève SWISS YERBA BUENA CREOLE RICE JAZZ BAND VENDREDI 14 & SAMEDI 15 MARS — 20h DIMANCHE 16 MARS —15h SALLE DES FÊTES DU LIGNON Place du Lignon 16 — Vernier NOTA BÉBÉS LES FOURBERIES DE SCAPIN Adultes, ados 7 février au 14 février 2014 Le plus célèbre valet du théâtre révèle la comédie humaine. Service de la culture — 022 306 07 80 www.vernier.ch/billetterie De 1 à 3 ans 17 février au 2 mars 2014 Promenade musicale et poétique sur le fil. tmg es nnett mario Rue Rodo 3 – Genève 022 807 31 07 www.marionnettes.ch m u s i q u e concours de genève Palmarès 2013 Le Prix de composition 2013 a été décerné au Sud-Coréen Kwang Ho Cho (26 ans) pour son œuvre, Pneuma. Le public a été conquis par la candidate japonaise Chikako Yamanaka (30 ans), lui attribuant non seulement le Prix du public, mais aussi le Prix Jeune public. Le sujet du Prix de composition 2013 était une « œuvre pour flûte solo et petit ensemble de cinq instruments ». Cinq candidats venant de l’Italie, du Corée du Sud et du Japon ont été sélectionnés comme finalistes. Leurs œuvres ont été interprétées lors de la Chikako Yamanaka, prix du public & prix jeune public © Anne-Laure Lechat finale publique - qui a eu lieu le dimanche 1er décembre 2013 au Studio ErnsestAnsermet - par l’Ensemble Contrechamps, sous la direction de Gregory Charette, avec les flûtistes Felix Renggli et Sylvia Careddu. L’œuvre lauréate, à savoir Pneuma, sera la pièce imposée pour la demi-finale du concours de flûe en 2014. C’est donc le Sud-Coréen Kwang Ho Cho qui a remporté l’adhésion du jury grâce à son œuvre « Pneuma » pour flûte solo et ensemble (clarinette, violon, violoncelle, percussions et piano). Son œuvre a été interprétée par Felix Renggli. Quant à « Uminari », l’œuvre pour flûte solo et ensemble (hautbois, clarinette, violoncelle, percussion et piano) composée par la Japonaise Chikako Yamanaka, elle a été jouée par la flûtiste Silvia Careddu (Premier Prix en 2001). Kwang Ho Cho, laureat du Prix de composition 2013 © Anne-Laure Lechat a c t u a l i t é 51 m u s i q u e le quatuor signum à nyon et genève Des archets engagés «Signum», en latin, signifie «empreinte»; trois jeunes Allemands et un Sud-Africain sont en train d'imprimer leur marque sur le paysage musical. Fondé en 1994, l'ensemble est dans sa forme actuelle depuis 2007. Les artistes, qui se produiront en février 2014, ont mené brillamment à bien leurs études et ont, surtout, bénéficié des conseils des Quatuors Alban Berg, Artemis et Melos. Ils ont aussi beaucoup échangé d'idées et d'expériences musicales avec des musiciens aussi variés que György Kurtág, Walter Levin, Alfred Brendel, Leon Fleisher ou Jörg Widmann. Pour mener à bien leur carrière, ils bénéficient de l'appui de la «Fondation Bayer» et du «Programme 3» de la BBC. Comment tous ces échanges et parrainages se traduisent-ils sur le plan musical ? 52 Une musique investie Une écoute immédiate perçoit très vite une immense énergie et un fort engagement. Pour ces artistes, la musique, de chambre par surcroît, ne saurait être un aimable divertissement pour personnes de la bonne société ! Les archets s'engagent à fond dans une théâtralisation forte, mais jamais vulgaire. La musique se doit d'être bien investie, avec un tempo élevé si nécessaire. Dans des entretiens accordés à la presse allemande, les concertistes insistent sur « l'importance de la bonne impulsion, au bon moment ». La pointe d'humour sait aussi se manifester quand il le faut. Ces chambristes savent éviter de se prendre trop au sérieux, et les seize cordes ne versent nullement dans l'esbroufe ou la facilité. Tout est soigneusement et précisément mis en place. Le chant de l'ensemble est le résultat d'une longue maturation, produite par les artistes lors de leurs répétitions: tout est discuté, soigneusement pensé, prévu, et les artistes assurent y consacrer tout le temps nécessaire. Pour ces musiciens, le respect mutuel est, d'après leurs dires - et leur jeu le confirme - une vertu absolument cardinale. Pour résumer trop brièvement le tout, les mauvaises langues diraient qu'ils ne sont pas Germains pour rien ! Mais il paraît beaucoup plus opportun de prétendre que les concertistes impriment de manière très pensée leur marque - pour reprendre le nom qu'ils se sont donné - à leur partition. Les moments plus recueillis sont intensément lyriques, et le mélomane peut associer ces exécutants à l'univers romantique au sens original du terme : fort, tourmenté, sombre, riche de sentiments qui se bousculent. Résumant l'impression que donnent ces musiciens, Wolfgang Rihm, un compositeur contemporain à l'esthétique exigeante, a déclaré à propos de l'interprétation de son difficile Quatuor n° 9 : « C’est une grande joie que de pouvoir entendre leur interprétation sérieuse et énergique, leur précision poétique. Ce sont exactement les qualités dont a besoin l’interprétation de mon quatuor. » L'aspect expérimental de certaines pages contemporaines est également audacieusement mis en avant, comme en témoigne la mise en musique implacable et impeccable des cinq quatuors à cordes de Jörg Widman, des opus à l'esthétique accidentée et étrange, voire inquiétante par moments. Une discographie contrastée Parus chez Capriccio, les disques témoignent d'un désir évident de féconder les époques en les opposant. L'auditeur trouvera aussi bien des pages de Mozart et Beethoven, que des partitions de Berg, Bartók ou Schnittke. Dans leur art, les interprètes s'attachent à mettre en évidence la modernité des portées du passé, quitte à les dépoussiérer avec force; mais - quand ils ne se transforment pas en explorateurs des portées d'aujourd'hui - ils mettent également en évidence, dans les styles plus récents, toutes les dettes envers les prédécesseurs. Pierre Jaquet Kerstin Dill, premier violon / Annette Walther, second violon / Xandi van Dijk, alto / Thomas Schmitz, violoncelle Nyon, Salle de la Colombière, le 9 février à 11h15 Conservatoire de Genève, le 10 février à 20h Programme: Haydn: Quatuor en ré mineur op.76 N°2, "Les Quintes" / Schnittke: Quatuor N°3 / Dvorak: Quatuor N°13 en sol majeur, op.106 B.192 Quatuor Signum a c t u a l i t é m u s i q u e victoria hall genève Une qualité à exporter ! L’Orchestre de Chambre de Pologne est né en 1972, au sein de l'Opéra de Chambre de Varsovie, sous la direction du chef Jerzy Maksymiuk. Formation jeune et dynamique, l'ensemble s’émancipe rapidement et sort des frontières de la Pologne, alors communiste, pour conquérir le public étranger. bout de son archet le Sinfonia Varsovia - connu encore aujourd'hui sous son ancien nom d'Orchestre de Chambre de Pologne - le 13 février prochain à Genève. Outre les multiples apparitions sur scène et de nombreux enregistrements, l’orchestre s’investit dans des festivals et crée, en 2000, une fondation dont le but est de promouvoir de jeunes artistes et des compositeurs polonais. Une fois par année, la phalange offre à sa ville-capitale de résidence un festival sur mesure, pour le plus grand plaisir de ses compatriotes et des mélomanes étrangers. A Genève En février prochain, la formation symphonique se présentera devant le public genevois avec une palette d’opus qui auront pour principal protagoniste le violon. Et pas n’importe lequel: il s’agit du Stradivarius de Maxime Vengerov ! Les fans de ce toucheà-tout doivent être heureux de le retrouver en forme après un arrêt forcé de presque quatre ans. Ce concert sera également un clin d’œil vers le passé : la véritable carrière de ce musicien russe passionné a débuté à l’âge de 10 ans, quand il a remporté le prestigieux Concours Wieniawski en… Pologne, à Poznan... Beata Zakes Orchestre de Chambre de Pologne / Sinfonia Varsovia En 1984, une rencontre change la destinée de l'OCP: le maestro Yehudi Menuhin accepte une invitation à diriger ces instrumentistes à l'effectif jusque-là resserré, qui, pour l’occasion, s’élargit à 40 musiciens. Les transmissions radiophoniques et télévisées de ces concerts rencontrent un accueil tellement enthousiaste que le maestro signe quelque temps après un contrat, en tant que chef invité, avec l'OCP qui vient de prendre un nouveau nom : Sinfonia Varsovia. En 1996, pour célébrer le 80e anniversaire de Sir Menuhin, l’ensemble enregistre avec lui une intégrale des symphonies de Beethoven et une seconde, de Schubert. Une série de 65 concerts suit, dans le monde entier, la même année. Une autre collaboration enrichissante débute en 1997, avec le compositeur et chef polonais Krzysztof Penderecki. Ensemble, ils a c t u créent de nombreuses œuvres du maestro et gravent plusieurs CDs. Sinfonia Varsovia a notamment accompagné ce musicien phare lors de son apparition au 15e Festival de Musique à Colmar en 2003, année de son 70e anniversaire. Un parcours sans faute Une préparation méticuleuse et un répertoire presque illimité sont les principaux atouts de la formation; elle a fait le tour du monde sous la baguette de chefs réputés, polonais et étrangers, tels que Witold Lutoslawski, Claudio Abbado, Rafael Frübeck de Burgos, Mstislav Rostropovich, Bruno Weil ou encore Marc Minkowski (directeur musical depuis 2008). Auprès de ce groupe orchestral, des solistes de grande renommée ont toujours pu compter sur un accompagnement de qualité. Parmi eux, il y a Maxime Vengerov, le même qui guidera du a l i t Victoria Hall. Jeudi 13 février 2014 à 20 h Service culturel Migros Genève Tél.: +41 (0) 22 319 61 11 Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour violon Nº 4 en ré majeur, K. 218 Concerto pour violon Nº 5 en la majeur, K. 219 Piotr Ilitch Tchaïkovsky Sérénade mélancolique en si bémol mineur, op. 26 «Souvenir d’un lieu cher», op. 42 Valse-Scherzo en ut majeur, op. 34 (arrangement de David Walter) Camille Saint-Saëns Havanaise en mi majeur pour violon et orchestre, op. 83 Introduction et Rondo capriccioso en la mineur pour violon et orchestre, op. 28 é 53 m u s i q u e portrait Les CDs du label Doron Music Sylviane Deferne Deux disques, publiés coup sur coup par Doron Music, mettent en valeur le talent de la pianiste Sylviane Deferne, bien connue comme concertiste et enseignante en classe professionnelle à la Haute Ecole de Musique de Genève. Deux concertos de jeunesse de Mendelssohn, l’un pour piano, l’autre pour violon, tous deux avec orchestre à cordes, figurent sur le premier CD. Le second, en tout point admirable, réunit des pages méconnues, bien que d’une grande valeur musicale, d’Isaac Albeniz et du Padre Antonio Soler. 54 Née à Genève, où ses études au Conservatoire ont été couronnées d’un 1er prix de virtuosité avec distinction, Sylviane Deferne, également finaliste du concours Clara Haskil, obtient, au début de son activité professionnelle, entre autres distinctions, le 1er prix, attribué à l’unanimité, du Concours Frank Martin, aux Pays-Bas. Commence alors une carrière de soliste qui la conduit à se produire en Europe aussi bien qu’en Asie et aux USA. Chargée de cours à l’Université de Montréal, elle choisit de s’établir au Canada, tout en donnant des cours d’interprétation dans divers pays d’Europe et d’Asie, en Corée et au Japon. De retour en Suisse en 1996, Sylviane Deferne enseigne le piano au Conservatoire de Neuchâtel, puis, à partir de 2008, à la HEM de sa ville natale, tout en faisant partie du jury de divers concours. Un autre CD, édité en 2009, unit Karol Szymanowski et Frédéric Chopin . Publié en 2010 sous le label REM, un CD Discographie sélective Au Québec, Sylviane Deferne a enregistré plusieurs disques de musique de chambre en compagnie de la violoniste montréalaise Anne Robert. Paru en 2001 sous l’étiquette CBC, la Sonate en sol mineur, op.23, de Louis Vierne est une page négligée, à tort, du répertoire de la première moitié du XXe siècle. La 3e Sonate en la majeur du Breton Guy Ropartz renferme elle aussi de belles idées musicales, bien mises en valeur par le duo Robert-Deferne. Un Thème et variations pour piano et violon datant de 1932, d’Olivier Messiaen, complète intelligemment le CD. a Sylviane Deferne. Photo © Sebastien Goyon consacré à trois sonates pour violon et piano, respectivement de Gabriel Pierné, Charles Tournemire et César Franck, est particulièrement bienvenu, les sonates de Pierné et de Tournemire, fort belles au demeurant, apparaissant comme des raretés discographiques. On ne saurait oublier un fameux disque Decca, où Sylviane Deferne et Pascal Rogé rivalisent de brio dans un étincelant Concerto pour 2 pianos de Francis Poulenc, avec l’OSM (Montréal) conduit par Charles Dutoit. c t u a Faisant partie depuis 2007 du trio CERESIO, avec Anthony Flint au violon et Johann Sebastian Paetsch au violoncelle, Sylviane Deferne enregistre avec eux les deux grands Trios avec piano de Mendelssohn, plus - une première – le Trio en do mineur (1822), fruit précoce de la douzième année du jeune Félix. Datant des années montréalaises (1995/96), mais édité par Doron en 2012, l’album « The Last Rose of Summer » associe des pièces de Félix Mendelssohn (dont les Variations sérieuses) à une œuvre de sa sœur Fanny, une Sonate en do mineur qui ne manque pas d’intérêt. C’est aussi le cas de l’album « Chants de l’aube », autour de Robert Schumann, avec notamment 3 Préludes et Fugues composés par Clara. Enfin il y a les deux CDs de parution récente. L’un consacré à deux concertos du jeune Mendelssohn, celui en la mineur pour piano, et celui en ré mineur pour violon, réalisé avec le concours de l’Orchestre de Chambre de Toulouse et le violoniste Gilles Colliard. L’autre, « El Duende », sorti en mars 2013, d’une grande originalité et bénéficiant d’une superbe prise de son du Berlinois Johannes Kammann, est consacré à deux Catalans qu’un siècle sépare, le Padre Antonio Soler (17291783) et Isaac Albeniz (1860-1909) Les pages d’Albeniz datent des dernières années de la vie du compositeur et sont donc contemporaines d’Ibéria, son chefd’œuvre. Elles puisent au source d’un folklore imaginaire. Pour deux d’entre elles, Azulejos et Navarra, inachevées à la mort d’Albeniz, Sylviane Deferne a opté pour des partitions complétées à son intention par le Neuchâtelois JeanPhilippe Bauermeister. Elles sont suivies de 4 Mélodies de 1909, adaptées pour piano seul également par J.-Ph. Bauermeister. Cinq brillantes Sonates du Padre Soler complètent le disque, sous le signe du Duende, terme intraduisible désignant une sorte d’envoûtement qui se dégage du flamenco. Le duende est « comme un flot de sang, ami des vents chargés de sable », selon Federico Garcia Lorca. Yves Allaz l i t é m u s i q u e portrait Estelle Revaz Le dimanche 16 février prochain, la jeune violoncelliste Estelle Revaz jouera le Concerto en ré de Joseph Haydn, avec l’Orchestre des Pays de Savoie conduit par Nicolas Chalvin, au Theâtre du Martolet à St-Maurice, dans le cadre du Festival des Scènes valaisannes 2014. Au même programme figurent la 2e symphonie d’Arthur Honegger, la 59e dite « Le feu » de Haydn, ainsi que la Sérénade pour cordes No 2, datant de 1981, du compositeur franco- libanais Bechara El Koury. Née à Salvan en 1989, Estelle Revaz entreprend l’étude du violoncelle dès l’âe de 6 ans au Conservatoire de Sion, puis au Conservatoire de région de Boulogne, sa famille s’étant pour un temps installée à Paris. Elle poursuit ensuite ses études au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, et obtient à 15 ans le1er Prix de la Fondazione Antonio Salieri di Legnano, à Salzburg, ce qui lui permet d’entreprendre sa première tournée de soliste en Italie, en Récompenses Cumulant dès lors, cachets, prix et bourses, la jeune violoncelliste commence à vivre de son art. En été 2011, le St-Prex Classics lui ouvre ses portes dans le cadre des invitations à de jeunes talents. Elle y revient l’année suivante pour y jouer, en compagnie de Gautier Capucon, un concerto pour 2 violoncelles de Vivaldi. En avril 2012, Estelle Revaz est invitée à Estelle Revaz © Markus Hoffmann Allemagne et en Hollande. Elle fait à Cologne une rencontre d’une importance déterminante, celle de la violoncelliste Maria Kliegel, qui, lors d’une master class, l’invite à passer une année dans cette ville, où Estelle finira par s’établir. Aujourd’hui encore, elle bénéficie régulièrement des conseils de Maria Kliegel, pédagogue dont elle se sent très proche. « Elle m’épaule, c’est mon maîre », confiera-t-elle à la Tribune de Genève en juin 2012. a c t u passer trois semaines en Argentine et donne des récitals à Mendoza et à Buenos Aires. Au printemps de la meme année, le prix de la Fondation Patino de la Ville de Genève lui permet de passer six mois à la Cité des Arts, à Paris. Elle tire profit de ce séjour au bord de la Seine pour approfondir le répertoire francais du tournant du XXe siècle. a l i t Estelle Revaz dit de son instrument : « C’est mon compagnon de tous les jours. Je joue du matin au soir, cinq heures minimum, voire huit heures quand je prépare un concert » (TdG du 14.06.12) Son instrument ? Un Fiorini que lui ont prêté deux mécènes suisses. La jeune femme ne cache pas son vif intérêt pour la musique contemporaine. En avril 2013, elle joue à Delémont et à Bâle le concerto PRANAM IV que Jean-Luc Darbellay avait écrit pour Siegfried Palm en 1995. Elle est accompagnée par l’Orchestre symphonique du Jura, sous la direction de Facundo Agudin. Un chef qui ne tarit pas d’éloges à son égard : « Son jeu est noble, son timbre est intense et mystérieux, son phrasé est sensible et réactif. Estelle est une musicienne intègre, douée de courage artistique et d’un grand potentiel. » Concerts Les auditeurs d’Espace 2 n’auront pas manqué d’entendre Estelle Revaz en compagnie du pianiste Francois Killian et du violoniste Oleg Kastiv dans des Trios de Haydn et de Mendelssohn, le 7 septembre dernier au Théâtre du Crochetan, dans le cadre de la Schubertiade à Monthey. Plus récemment, en décembre, Estelle Revaz a été la violoncelliste solo du Triple concerto de Beethoven au Victoria Hall de Genève, et a joué des concertos de Vivaldi et de C.Ph.E. Bach à la Fondation Gianadda à Martigny. En janvier 2014, le dimanche 19, elle a été l’hôte du Studio Ansermet, à Genève, pour un concert diffusé en direct sur les ondes d’Espace 2, puis le 23 en Allemagne, à Cologne, et le 26 à la Vallée de Joux, au Lieu. Le 1er février, elle sera à Vers-l’Eglise, au Festival Musique et Neige, le samedi 15 à Annecy et le lendemain dimanche 16 à 17 heures, au Martolet, à St-Maurice. Le 23 à Mulhouse, le 25 à Berne, elle jouera PRANAM II de Darbellay, avec le Ludus Ensemble. Un agenda déjà bien rempli pour cette artiste de 24 ans dont le répertoire ne cesse de s’enrichir et la valeur de s’affirmer. Yves Allaz 16 février : Guerre et Paix. Orchestre des Pays de Savoie, dir. Nicolas Chalvin, Estelle Revaz, violoncelle (Honegger, Haydn, El Khoury). Théâtre du Martolet (infos.+33 (0)4.79.33.42.71) é 55 m u s i q u e saison 2014 du quatuor de genève au mah Mozart en fil rouge Après un tour d’Europe des écoles nationales l’année dernière, le Quatuor de Genève a construit sa cinquième saison de musique de chambre autour d’un compositeur, comme il l’avait proposé avec Schumann en 2010, Brahms en 2011, Schubert en 2012. 56 Venir les écouter le dimanche matin à la Salle des Armures du Musée d’Art et d’Histoire, comme nous le faisons depuis 5 ans, montre à l’évidence la capacité de l’ensemble à renforcer ses points forts au fil du temps : toujours plus d’écoute entre les quatre complices et d’attention à maintenir l’équilibre entre les instruments dans un dialogue entre égaux. André Wanders, le violoncelliste de l’ensemble, détaille pour Scènes Magazine le programme de la saison 2014. Pourquoi Mozart cette année ? Parce que Mozart c’est la force vitale, un amoureux de la vie dans toutes ses expressions. Dans ses opéras évidemment, mais le sentiment d’être devant le théâtre de la vie s’éprouve tout autant dans sa musique de chambre. Certains thèmes sont tellement expressifs qu’on imagine voir apparaître des personnages. Il nous arrive d’ailleurs souvent, lorsque nous travaillons un passage, d’utiliser l’image d’un personnage pour préciser entre nous le caractère musical que nous souhaitons obtenir. Et puis, la musique ainsi données des œuvres avec tour à tour piano, flûte, hautbois, alto et clarinette. Par ailleurs nous invitons pour la 3e fois le Quatuor Schumann : aux côtés de Christian Favre (piano), de Christoph Schiller (alto) et de François Guye (violoncelle), le public pourra découvrir Frédéric Angleraux, nouveau violon de l’ensemble. Vous produirez-vous ailleurs en 2014 ? de chambre de Mozart recèle de véritables chefs-d’œuvre ! C’est un régal que de pouvoir en jouer plusieurs au fil d’une même saison... Pour l’instant, deux concerts sont programmés ce printemps. Le 16 mars au Théâtre du Crochetan à Monthey dans un programme praguois (Mozart, Janacek, Dvorak), et le 13 avril dans le cadre du Festival Vernier Classique avec des oeuvres de Haydn, Janacek et Dvorak. A part un concert 100% Mozart, vous panachez vos programmes Propos recueillis par Christian Bernard Oui, nous associons à Mozart une œuvre du XIXe ou du XXe siècle, permettant de faire ressortir des contrastes ou des prolongements. Le Quintette de Dvorak rappelle Prague et l’amour que Mozart avait pour cette ville et son public si mélomane, qui le lui rendait bien. Nous rapprochons le Quatuor des “Dissonances” du Quatuor de Debussy si coloré. Ou le Divertimento K 563 du Quatuor avec piano no2 de Fauré, deux œuvres de la maturité des compositeurs. Quant au Quintette avec clarinette, sublime de sérénité, il sera confronté à cet autre sommet qu’est le 3e Quatuor “Razumovsky” de Beethoven. Vous avez invité, comme à l’accoutumée, d’autres musiciens Nous aimons effectivement le mariage des timbres, donner à entendre d’autres instruments, et bien sûr le partage avec les musiciens qui nous font l’amitié de participer à notre saison. Seront DIMANCHE 9 FÉVRIER, 11 heures QUATUOR DE GENÈVE avec Didier Puntos, piano Mozart : Quatuor avec piano K 478 Dvorak : Quintette avec piano opus 81 DIMANCHE 30 MARS, 11 heures QUATUOR SCHUMANN (ensemble invité) Christian Favre, piano Frédéric Angleraux, violon Christoph Schiller, alto François Guye, violoncelle Mozart : Divertimento pour trio à cordes K 563 Fauré : Quatuor avec piano no 2, opus 45 DIMANCHE 18 MAI, 11 heures QUATUOR DE GENÈVE avec Sarah Rumer, flûte Vincent Gay-Balmaz, hautbois Catherine Soris, alto Mozart : Quatuor avec flûte K 285 Quatuor avec hautbois K 370 Quintette à deux altos K 516 DIMANCHE 21 SEPTEMBRE, 11 heures QUATUOR DE GENÈVE Mozart : Quatuor à cordes K 465 « Dissonances » Debussy : Quatuor à cordes Quatuor de Genève : François Payet-Labonne et Sidonie Bougamont, violons, Emmanuel Morel, alto et André Wanders, violoncelle e n t r e DIMANCHE 2 NOVEMBRE, 11 heures QUATUOR DE GENÈVE avec Camillo Battistello, clarinette Beethoven: Quatuor à cordes no 9, opus 59 « Razumovsky » no 3 Mozart: Quintette avec clarinette K 581 t i e n m u s i q u e Conservatoire Populaire de Musique, Danse et Théâtre. scènes de février Agenda genevois La Tétralogie se poursuit au Grand Théâtre de Genève, du 2 au 8 février, avec Siegfried, mis en scène par Dieter Dorn et dirigé dans la fosse par Ingo Metzmacher. Par la suite, les amateurs de ballet seront comblés, puisque deux rendez-vous sont pris. Tout d’abord, le 4 février, dans cette même salle, les Saisons russes du XXIe siècle reconstituent les ballets de Diaghilev (et notamment le célèbre Schéhérazade de Rimski-Korsakov). Puis du, 12 au 20 février au Bâtiment des Forces motrices, Mémoire de l’ombre de Ken Ossola sera à découvrir : le ballet du Grand Théâtre dansera sur des musiques de Mahler. Les 28 février, 1er, 2, 4 6, 7, 8 et 10 mars, Nabucco de Verdi sera à l’affiche du Grand Théâtre; John Fiore sera à la direction musicale, et la mise en scène sera l’œuvre de Roland Aeschlimann. Concerto pour piano de Mozart, des œuvres orchestrales de Respighi. L’Orchestre de Chambre de Genève nous emmènera le 27 février, depuis le Bâtiment des Forces Motrices jusqu’à Londres, avec des œuvres anglaises de Haydn. Le voyage se poursuivra en Roumanie - avec la complicité des pianistes Ufuk et Bahar Dördüncü et des percussionnistes François Volpé et Sébastien Cordier -, grâce aux Danses populaires roumaines de Bartók, avec une escale offerte par la Sonate pour deux pianos, deux percussions et orchestre. Maxim Vengerov sera de retour à Genève avec l’Orchestre de Chambre de Pologne, le 13 février Ufuk & Bahar Dorduncu Côté symphonique, l’Orchestre de la Suisse Romande proposera une soirée le 12 février avec Lars Vogt au piano, qui interprétera le Concerto pour piano et orchestre de Grieg. Neeme Järvi dirigera en outre la Symphonie No 3 de Brahms. Ceux qui seraient occupés ce soir-là pourront réentendre les mêmes œuvres et les mêmes interprètes pour la Saint-Valentin, toujours au Victoria Hall. Aucune excuse ne sera en revanche acceptée pour manquer le concert dirigé par Charles Dutoit, le 19 février, toujours au Victoria Hall et avec la même formation. Accompagné par le pianiste Louis Lortie, il dirigera, hormis le 22e a c t u Le mois s’annonce dense pour les amateurs de musique de chambre, grâce à la venue de trois quatuors renommés au Conservatoire de Musique de Genève. D’abord, le Quatuor Hugo Wolf interprétera le Quatuor No 14 de Beethoven ainsi que le Quintette à cordes de Schubert, grâce au renfort du violoncelliste Xavier Philipps. Le 14 février, c’est au tour du Quatuor Belcea de jouer des œuvres de Purcell, Britten et Beethoven. Enfin, le 25 février, le Quatuor Jerusalem viendra dans la cité du bout du lac pour que résonnent des quatuors de Haydn, Smetana et Ravel. Notons enfin une journée Dissonances le 25 février, avec l’intégrale des concertos pour violon et orchestre de Mozart qui seront interprétés au Victoria Hall de Genève. Toujours au chapitre des quatuors, notons la venue du Quatuor Signum le 10 février au Conservatoire, dans le cadre de la série Temps & Musique avec, au programme, des œuvres de Haydn, Schnittke et Dvorak. PhilipGlass et Tim Fain © Brian Hall prochain, dans le cadre des concerts Migrospour-cent-culturel. Le programme, dense, propose les quatrième et cinquième concertos pour violon de Mozart, ainsi que des compositions de Tchaïkovski et Saint-Saëns. Le 24 février, le baryton Dmitri Hvorostovsky offrira un récital au Victoria Hall avec des romances et des mélodies de Rachmaninov, Tchaïkovksi, Mednter et Liszt. Contrechamps s’intéressera pour sa part les 11 et 12 février à la voix contemporaine, avec un concert organisé le premier soir au Studio ErnestAnsermet, puis une conférence le lendemain au a l i t A signaler également dans le cadre du Festival Antigel, un événement : la venue au Victoria Hall du compositeur et pianiste Philip Glass, accompagné pour l’occasion par le violoniste Tim Fain, qui interpréteront lors de cette soirée les œuvres les plus récentes du compositeur. Toujours dans le cadre d’Antigel, Antoine Marguier sera aux commandes du Conservatoire de Musique de Genève Orchestra le 8 février, pour une interprétation de la Belle et la Bête à la salle des Fêtes du Lignon, avec la participation de la soprano Sophie Graf. Martina Díaz é 57 m u s i q u e bâtiment des forces motrices Aimez-vous Bartok ? Aimez-vous Bartok ? C’est ce qu’espère en tout cas l’Orchestre de Chambre de Genève, qui propose le 27 février au BFM la célèbre Sonate pour deux pianos et percussion de Bela Bartok, dans la version qui inclut l’orchestre. Entretien avec François Volpé, percussionniste. 58 François Volpé et Sébastien Cordier aux percussions, Bahar et Ufuk Dorduncu aux pianos, ont déjà joué cette œuvre à plusieurs reprises. C’est une pièce majeure du répertoire des percussionnistes : en musique de chambre, tous les étudiants avancés la travaillent dans les conservatoires. Bartok fut le premier à opter pour la confrontation rare de ces deux familles instrumentales : il exploite le côté percussif du piano et utilise des instruments d’orchestre (timbales, grosse caisse, caisses claires, xylophone, tam-tam, triangle, cymbales) en les adaptant à une œuvre de musique de chambre. Passionné par la musique folklorique, il était instinctivement attiré par la percussion, le plus ancien des instruments avec la voix. La création de la Sonate eut lieu à Bâle en janvier 1938, quelques mois après sa composition à Budapest, avec aux pianos Bartok lui-même et sa femme. Il existe un enregistrement, peu convaincant pour François Volpé, mais utile. Peu de temps après, la « sonate » devient « concerto » puisque le compositeur lui ajoute l’orchestre. Ce dernier sonne en fait comme une prolongation du quatuor : François Volpé imagine le groupe de solistes comme une comète, en noir et blanc, dont la queue serait représentée par l’orchestre, qui prolonge le discours et apporte la couleur. Orchestres divers Grâce à son expérience au sein de phalanges diverses, François Volpé nous donne une idée plus précise du rôle à assumer. Dans un orchestre symphonique comme l’OSR, celui qui n’est pas le timbalier doit jouer de tous les e instruments, claviers compris. C’est une tâche particulièrement stressante car il s’agit de ne manquer aucune intervention. La preuve c’est que chez les Wiener Philharmoniker, il existe une prime de stress ! Dans un orchestre de chambre comme L’OCG, le timbalier est véritablement le moteur de l’ensemble : la participation est importante, François Volpé (photo MK/Urbain/FV) le rythme essentiel. Il se sert de timbales baroques, accordées, dont les peaux sont d’origine animale et dont le son est sec, incisif. Contrechamps de son côté offre des possibilités illimitées. La musique du XXe et XXIe siècles constitue l’apothéose de la percussion, le bonheur total ! Il est même arrivé à François Volpé de jouer de la perceuse ou du marteau enclume. Bien sûr il faut aussi savoir négocier avec les compositeurs qui, n’étant pas percussionnistes, ne se rendent pas compte des limites n t r e à ne pas dépasser. Stefano Gervasoni par exemple avait désespérément besoin d’instruments capables d’imiter le train, le tram, l’aboiement d’un chien ! Il a fallu pendant des heures, pour quelques notes, construire ces instruments et trouver comment les pratiquer !! Autre exemple, Ferneyhough. Ses partitions sont souvent injouables, bien que, prise séparément, chaque mesure est possible. Il sait parfaitement que les musiciens n’y arriveront pas. 60%, c’est déjà bien, pense-t-il ! Tous les compositeurs cependant ne parlent pas de leur création en cours. Ivan Fedele a écrit une pièce pour Contrechamps et n’est venu qu’à la générale pour donner quelques brèves indications. L’OCG aujourd’hui Arie van Beek a succédé, on le sait, à David Greilsammer. Les bonnes idées n’ont pas manqué à ce dernier : il a mis en place une saison de musique de chambre, ce qui est bon pour la motivation personnelle des musiciens, a délocalisé bien des concerts dans des lieux insolites, a exploré des répertoires variés, a su prendre des risques. Pianiste avant tout, il lui manquait encore un peu d’expérience en tant que chef. Ce n’est pas le cas d’Arie van Beek : son maniement de la baguette est extraordinaire de même que sa connaissance du répertoire et son talent d’organisateur. De plus, à la fois chaleureux et exigeant, il sait mettre à l’aise les instrumentistes, tout en leur demandant le meilleur d’eux-mêmes. D’après des propos recueillis par Martine Duruz 27.2. : Concert de soirée No. 4. De Londres à Bâle. L’OCG, dir. Arie Van Beek, Ufuk & Bahar Dördüncü, pianos, Francois Volpé & Sébastien Cordier, percussions (Haydn, Bartók). Bâtiment des Forces motrices à 20h Location :022/807.17.90, [email protected] ou www.ticketportal.com t i e n m u s i q u e portrait Lars Vogt Le pianiste Lars Vogt sera en février le soliste des concerts d’abonnement de l’Orchestre de la Suisse romande, le mercredi 12 et le vendredi 14 à Genève, le jeudi 13 à Lausanne. Il interprétera, sous la conduite de Neeme Järvi, un de ses chevaux de bataille, le Concerto en la mineur d’Edouard Grieg. Au même programme figure un autre chef-d’œuvre du répertoire, la Symphonie No 3 en fa majeur de Johannes Brahms. Né à Düren, en Rhénanie-Westphalie, en 1970, Lars Vogt commence le piano à 6 ans, avant de devenir successivement élève de Ruth Weiss à Aachen et de Karl-Heinz Kümmerling à Hanovre. Un maître vénéré, décédé en 2012, dont Lars Vogt prendra la succession au poste de professeur au Conservatoire de musique de Lars Vogt est invité dans tous les grands festivals, à Edimbourg comme à Lucerne, à Salzbourg comme à La Roque-d’Anthéron ou Verbier. En juin 1998, il fonde avec des amis son propre festival de musique de chambre « Spannungen - Musik im Kraftwerk », une manifestation qui a lieu chaque été à Heimbach, au violoncelle, il joue à Paris, Berlin, Salzbourg et Zurich. Il accomplit une tournée en Chine, se produit à Tokyo avec le NHK Symphony et Roger Norrington, à Amsterdam et Londres avec le Royal Concertgebouw et Mariss Jansons, à Berlin et Vienne avec le Deutsches Symphonie Orchester et Tugan Sokhiev. En janvier dernier, il interprétait le 27e concerto pour piano de Mozart à Birmingham avec Andris Nelsons, puis le Concerto en la mineur de Grieg à Glasgow et Aberdeen avec le BBC Scottisch Symphony et Donald Runnicles, ainsi que le 24e concerto de Mozart à Gateshead, en conduisant du piano la Royal Northern Sinfonia. Le 6 février à Rotterdam, le 8 à Amsterdam, il joue le 2e concerto de Chostakovitch avec Stéphane Denève et l’Orchestre philharmonique de Rotterdam … puis vient à Genève pour les concerts de l’OSR. Et la liste des concerts donnés et à venir pour la seule saison en cours est loin d’être exhaustive ! Ajoutons que Lars Vogt était aussi l’hôte du Philharmonique de Radio France à la salle Pleyel l’automne dernier, et qu’il sera de retour à Paris le 12 mars, au Théâtre des Champs Elysées, en compagnie de Christian Thielemann et de la Staatskapelle de Dresde, pour le 4e concerto de Beethoven. Discographie récente Lars Vogt © Aline Paley cette ville, tout en menant en parallèle une intense activité de concertiste à travers le monde. La carrière de Lars Vogt démarre sur les chapeaux de roue en 1990, après l’obtention d’un 2e prix au concours de Leeds, et le début d’une collaboration régulière avec Simon Rattle, alors chef du City of Birmingham Symphony Orchestra, avec qui il enregistre en 1992 déjà, pour EMI, les concertos de Grieg et de Schumann. Cette collaboration se poursuivra à Berlin, puisque Lars Vogt devient en 2003/4 le premier « pianiste en résidence » des Berliner Philharmoniker. Apprécié pour son respect scrupuleux des partitions et son absolue maîtrise du clavier, a c t u dans une usine hydro-électrique de style Art Nouveau construite en 1904. La saison 13/14 La saison 2013/14 s’avère particulièrement riche pour Lars Vogt, qui va continuer de développer son nouveau rôle de chef à partir du piano avec des formations comme l’ensemble baroque allemand Arte del Mondo, l’orchestre de chambre de Cologne et celui de Zurich, dont il est cette année le « pianiste en résidence ». Lars Vogt donne des concerts en Amérique du Nord, avec les orchstres de Boston et de St Louis, et en duo avec le violoniste Christian Tetzlaff. En trio, avec Christian et Tanja Tetzlaff a l i t Lars Vogt a enregistré pendant une vingtaine d’années une quinzaine de CDs pour EMI, en solo, en musique de chambre ou avec orchestre. Chez Berlin Classics paraissent en 2010 la Sonate de Liszt et la Fantaisie op.17 de Schumann et chez Oehms les concertos No 20 et 23 de Mozart, avec Ivor Bolton et l’orchestre du Mozarteum de Salzbourg. Cavi-Music publie en 2011 les 2 sonates op.120 de Brahms, avec l’altiste Rachel Roberts, ainsi que le Trio No 2 de Chostakovitch, avec Christian et Tanja Tetzlaff. En 2013, le même éditeur fait paraître un CD très original, comportant des œuvres de Lili et Nadia Boulanger, Debussy et le Trio (1933) de Paul Hindemith. Ondine enfin édite en 2013 deux CDs du duo Tetzlaff-Vogt : trois sonates pour violon et piano de Mozart, et les deux de Robert Schumann. Yves Allaz Location pour les concerts des 12 et 14 fév. au Victoria Hall à 20h et celui du 13 à 20h15 au Théâtre de Beaulieu : [email protected], www.osr.ch + divers points de vente é 59 m u s i q u e les grands interprètes au conservatoire Trois quatuors de grande qualité Caecilia présente en février les quatuors Hugo Wolf (le 3), Belcea (le 14) et Jérusalem (le 25), au Conservatoire à 20h. Le Quatuor Hugo Wolf, composé de Sébastien Gürtler, Régis Bringolf, Thomas Selditz (qui a remplacé en juin 2013 Gertrud Weinmeister) et Florian Berner, recourra à la participation de Xavier Phillips, violoncelle, duquel ils ne sauraient se passer dans l’interprétation du quintette en ut majeur op.163 de Schubert qu’ils exécuteront à la suite du quatuor No 14 en ut dièse mineur op.131 de Beethoven. Ce quatuor, constitué à Vienne en 1993 et formé par des professeurs tels que le Quatuor Alban Berg, des membres du Quatuor Amadeus, et Walter Levin du Quatuor LaSalle, a remporté en 1995 déjà le 1er prix du concours de Crémone. Ils ont reçu également le Prix européen de Musique de Chambre et le Prix spécial de l’Orchestre 60 Philharmonique de Vienne. En 20 ans les musiciens se sont produits dans plus de 25 pays, dans les salles les plus prestigieuses. Ils sont les dédicataires de nombreuses œuvres contemporaines dont ils ont assuré la création. Résultat de leur intérêt pour le jazz, ils ont gravé en 2009 un CD, Other People, en collaboration avec John Taylor (piano) et Kenny Wheeler (trompette). Collaboration aussi avec Bernarda Fink lors de tournées européennes consacrées à l’adaptation pour quatuor et mezzo-soprano de l’Italienisches Liederbuch de Wolf. Quant à leur discographie elle implique Haydn, Beethoven, Schubert, Brahms, Dvorak, Ravel, Ligeti, Mittler et bien sûr Hugo Wolf. Ils ont choisi Wagner, Webern et Berg pour leur dernier enregistrement. Quatuor Belcea C’est de Grande Bretagne que nous vient le Quatuor Belcea, mais ses membres ne sont pas pour autant originaires de ce pays : la violoniste Corina Belcea est Roumaine et l’altiste Krzysztof Chorzelski est Polonais. Ils sont tous deux membres fondateurs de cette formation qui a vu le jour en 1994 au Royal College of Music de Londres. Le second violoniste, Axel Schalcher, et le violoncelliste Antoine Lederlin sont Français. Une diversité qui leur ouvre bien des horizons dans le choix de leur répertoire, tant dans le domaine classique que contemporain. Les salles les mieux cotées leur réservent toujours un accueil enthousiaste, qu’ils soient seuls ou accompagnés de partenaires réguliers comme Piotr Anderszewski, Martin Fröst, Valentin Erben, Ian Bostridge et Matthias Goerne. Le Quatuor Belcea a créé récemment une fondation dont le but est de soutenir et de coacher les jeunes quatuors à cordes ainsi que d’encourager la composition d’œuvres destinées à être créées par leurs soins. Leur discographie est importante : Schubert, Brahms, Mozart, Debussy, Ravel, Dutilleux, entre autres, plus tous les quatuors de Bartok, Britten et Beethoven, ce dernier enregistrement ayant obtenu l’ECHO Klassik Award. quatuor hugo wolf©hwq 2013-photo annamaria kowalsky a c t u a l i t é Belcea Quartet © Ronald Knapp multiplient et leur carrière internationale est lancée. Leurs enregistrements sont nombreux et récompensés par de multiples prix. En 2010 Amihai Grosz est engagé par le Philharmonique de Berlin, et donc remplacé par Ori Kam, altiste renommé et habitué à collaborer avec les célébrités (Barenboim, Boulez, Stern, Zukerman, Perlman, Pahud…) Au programme du 25 février : le quatuor No 78 en si bémol majeur de Haydn ; le quatuor No 1 de Smetana et le quatuor en fa majeur de Ravel. Martine Duruz Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info Balexert, Migros Nyon-La Combe) - 3 février : Quatuor Hugo Wolf & Xavier Phillips, violoncelle. - 14 février : Quatuor Belcea. - 25 février : Quatuor de Jérusalem. Ils joueront à Genève des Fantaisies de Purcell, le quatuor No 2 en ut majeur de Britten et le quatuor No 7 en fa majeur de Beethoven. Quatuor Jerusalem Alexander Pavlovsky, Sergei Bresler, Amihai Grosz et Kyril Zlotnikov ont fait connaissance en 1993 lors de leurs études à l’Académie Rubin de Jérusalem. Remarqués par le directeur, ils ont été dirigés vers le grand pédagogue Avi Abramovitch, qui leur a dévoilé les secrets de la technique et de l’interprétation du quatuor à cordes. Quatre ans plus tard le Quatuor Jerusalem remporte le premier prix du concours Schubert de Graz. Dès lors les invitations se Quatuor Jerusalem © Felix Broede a c t u a l i t é 61 a i l l e u s Brèves de février à Lyon lyon : chronique de spectacle vivant Opéra de Lyon : Le conte Ory de Rossini ; mise en scène de Laurent Pelly ; direction musicale de Stefano Montanari (du 21 février au 5 mars) Roi Lear [04 69 85 54 54 ; www.opera-lyon.com] À Villeurbanne, le Théâtre National Populaire ouvre 2014 avec un Roi Lear total, que Christian Schiaretti embrasse largement, sans idéologie préalable. 62 r Dans l’idéale traduction d’Yves Bonnefoy (Folio-Gallimard), le concret des corps, du langage et des matériaux (un océan de glèbe, gisante puis précipitée des cintres) le dispute à l’onirisme (les voyages mentaux de Lear approchent Une saison en enfer de Rimbaud). Tout de bois clair, le décor est simple : un sol circulaire que, en sa moitié profonde, borde un haut mur percé de trois strates d’huis ; au cœur, une trappe. Christian Schiaretti sait brasser des foules (ici, 25 comédiens) où, pourtant, chacun a son chemin. Le résultat, épique, exhale une multiplicité de sentiments et d’idées, au point que Roi Lear rassemble tout l’art de Shakespeare, même comique. Au début, Lear est un Merlin qui, bientôt, rejoint Jérôme, Antoine ou Job. Dans ce spectacle dont la mélancolie est le héros poisseux, le trajet de Lear se découvre à mesure qu’il s’invente ; le rideau tombé, il demeure inexpliqué, bouleversant. La distribution est exemplaire. Et, dans le rôle-titre, Serge Merlin, frêle allumette, regorge d’inextinguibles forces ; tout à la fois incarné et fantomatique, il offre un travail vocal ahurissant, qui assemble vers et prose en un continuum rythmé et coloré. Comment ne pas penser à Philoctète, en 2009, dans cette même salle, avec le regretté Laurent Terzieff ? À Villeurbanane comme bientôt à Nancy, Paris et Dunkerque, ne manquez pas ce Roi Lear d’exception. Jusqu’au 15 février Auditorium de Lyon / Orchestre national de Lyon : Schnittke, Prokofiev (Concerto pour violon n°2) et Chostakovitch (Symphonie n°5), par Vadim Repin (violon), Leonard Slatkine (direction), les 13 et 15 février. Et Mozart (Concerto pour piano n°23) et Mahler (Symphonie n°4), par Bertrand Chamayou (piano), Leonard Slatkine (direction), les 20 et 22 février. [04 78 03 30 00 ; www.tnp-villeurbanne.com] [04 78 95 95 95 ; www.auditorium-lyon.com] Autre richesse lyonnaise : l’exposition Joseph Cornell et les surréalistes, au Musée des beauxarts de Lyon. Plasticien autodidacte, Joseph Cornell (1903-1972) fit du surréalisme sans le savoir, avant que, en 1931, à New York, il ne découvrît la « maison-mère » française. Loin de toute inflexion politique, il demeura pur poète et enferma ses rêveries dans des boîtes et des vitrines, mi-magie, mi-Nature morte. Un troublant et doux parfum d’enfance nimbe un univers captivant (avec des films tout aussi inventifs), que complètent d’admirables Calder, Chirico, Dali, Ernst ou Magritte et des réalisations de Breton ou Éluard. À ne surtout pas manquer. Jusqu’au 10 février Maison de la danse : Don Quichotte du Trocadéro de José Montalvo (19 au 23 février). Et Tragédie, d’Olivier Dubois (26 et 27 février) [04 78 03 30 00 ; www.mba-lyon.fr] [04 72 78 18 18 ; www.maisondeladanse.com] «Don Quichotte du Trocadero» © Patrick Berger Frank Langlois Théâtre national populaire : Le triomphe de l’amour de Marivaux ; mise en scène de Michel Raskine (jusqu’au 21 février). Et Britannicus de Racine ; mise en scène de Jean-Louis Martinelli (du 21 février au 2 mars) [04 78 03 30 00 ; www.tnp-villeurbanne.com] «Le Roi Lear» Théâtre des Célestins : Kiss & Cry, pièce collective (dont Michèle-Anne De Mey), Jaco Van Dormael (mise-en-scène) [jusqu’au 6 février]. Et Une heure et dix-huit minutes, pièce documentaire d’Elena Gremina (Russie), Cécile AuxireMarmouget (mise en scène) [du 13 au 26 février]. [04 72 77 40 00 ; www.celestins-lyon.org] Théâtre de la Renaissance : An old Monk par Josse de Pauw et Kris Defoort [6 et 7 février] a c t u a l i t é d a n s e bâtiment des forces motrices, genève « En danse, il faut que ça bouge » Le chorégraphe genevois Ken Ossola n’est pas un adepte de la « non-danse » à la mode, pour notre plus grand bonheur ! Il est invité par Philippe Cohen, directeur du Ballet du Grand Théâtre de Genève, à créer sa troisième chorégraphie pour la compagnie genevoise. Mémoire de l’ombre, sur des partitions de Gustav Mahler, sera donné au Bâtiment des Forces Motrices du 12 au 20 février 2014. Genève peut être fière de son chorégraphe. Ken Ossola, la quarantaine passée, a commencé sa formation de danseur à l’école de danse de Beatriz Consuelo. Il a ensuite été engagé dans la prestigieuse compagnie Nederland Dans Theater, d’abord chez les juniors, puis dans la compagnie dirigée par Ji í Kylián, l’un des plus grands chorégraphes de notre époque. Pour Philippe Cohen, Ken Ossola est « un orfèvre … (qui) sculpte les corps des danseurs dans une apparente fragilité ». Nous avons posé trois questions au chorégraphe, entre deux répétitions. Quel est votre rapport avec l’œuvre de Mahler ? Avez-vous vu les chorégraphies de John Neumeier qui est considéré comme le chorégraphe de Mahler ? Je n’ai pas vu les ballets de Neumeier parce que je ne voulais pas être influencé. Ma découverte de l’œuvre de Mahler est assez récente. J’ai commencé à faire une sélection cet été. Il y aura des mouvements des symphonies nos. 2, 6 et 9, Ken Ossola © Gregory Batardon des extraits des Chants du compagnon errant et du Chant de la terre. J’ai un rapport particulier avec cette œuvre qui met en musique un poème chinois et j’ai des racines asiatiques, coréennes. Le ballet finira par le célèbre Adagietto de la 5e symphonie (rendu célèbre par Visconti pour son film Mort à Venise). Le ballet durera une heure vingt, n’est-ce pas un peu long ? Et pourquoi Mémoire de l’ombre ? Ce sera peut-être long, mais ce sera un beau spectacle. Il y aura aussi les décors de Nicolas Musin, qui a fait un travail magnifique. Et Philippe Cohen m’a soutenu et encouragé. Il a une grande expérience, je peux compter sur lui. Mémoire de l’ombre est un hommage à la danse classique et à Ji í Kylián. J’ai été inspiré par son esthétique. Cela marque, 10 ans au NDT! C’est votre troisième chorégraphie pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève. Comment définiriez-vous cette compagnie ? C’est une compagnie très ouverte à des chorégraphes de styles très différents. C’est un plaisir pour moi de travailler avec elle. Elle a de l’énergie et un grand potentiel, elle est généreuse et possède une grande ouverture d’esprit. Propos recueillis par Emmanuèle Rüegger Mémoire de l'ombre, musique de Gustav Mahler, chor. Ken Ossola, création du Ballet du Grand Théâtre, dir. Philippe Cohen. BFM à 19h30, dim à 15h Billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/ Dates : me 12 fev - 19:30 / je 13 fev - 19:30 / ve 14 fev - 19:30 / sa 15 fev - 19:30 / di 16 fev - 15:00 / ma 18 fev - 19:30 / me 19 fev - 19:30 / je 20 fev - 19:30 «Mémoire de l’ombre» © Gregory Batardon e n t r e t i e n 63 d a n s e le béjart ballet à l’opéra de lausanne Un Mandarin choc ! Après le Sacre du printemps en décembre, le public pourra découvrir ou redécouvrir un autre ballet phare de Maurice Béjart ce mois de février à l’Opéra de Lausanne, le Mandarin Merveilleux de Béla Bartok. 64 «Le Mandarin merveilleux» © Philippe Pache Arrivé en 1987 dans la capitale vaudoise, Béjart avait alors déjà créé la majeure partie de ses œuvres. Sa verve créatrice va lentement se tarir mais avec quelques brillantes exception dont ce fantastique Mandarin Merveilleux donné en première à la Salle Métropole en décembre 1992, certainement la plus belle œuvre de sa période lausannoise. Petit retour en arrière Béla Bartok compose son ballet-pantomime en un acte à la sortie de la première guerre mondiale en 1918. Mais il faudra attendre 8 ans, soit 1926, pour que l’œuvre soit montée sur une scène à Cologne. Et c’est un scandale énorme. Les représentations sont rapidement suspendues puis interdites. Il faut dire que l’argument, d’une forte charge érotique, avait tout pour choquer à l’époque. Dans un quartier sordide d’une ville, une jeune fille est contrainte par trois voyous de se prostituer pour appâter des hommes de passage et les dépouiller. Première brève expérience avec un vieux monsieur puis un a jeune désargenté et enfin avec un mandarin excité qui se jette sur elle. Molesté puis violemment frappé, il agonise dans les bras de la jeune fille en continuant ardemment de la désirer ! Deux ans plus tard le compositeur décide de transformer sa musique en une suite pour orchestre (comme Stravinski avec son Oiseau de feu) et c’est cette mouture qui sera dorénavant utilisée au fil des ans par les dizaines de chorégraphes qui en proposeront leurs propres productions, bien souvent édulcorées par rapport à la trame originale. La partition éclaire parfaitement la violence du sujet et définit rigoureusement le contour des différents personnages avec plusieurs ensembles d’instruments. Pour sa version, absolument fidèle au découpage de Bartok, Maurice Béjart replace l’œuvre dans le contexte Europe centrale de la période entre deux guerres. Il s’inspire librement du cinéma expressionniste allemand de Fritz Lang et surtout de deux œuvres phares : M. le Maudit et Metropolis. Il confie le rôle de la c t u a jeune fille à un garçon travesti, axe central du ballet et clin d’œil au robot androgyne de Metropolis ainsi qu’aux cabarets berlinois de la même époque. La danse de la jeune fille devient ici une danse de mort et c’est elle qui manipule tout le monde. Tout se joue alors sur l’ambiguïté sexuelle qui donne une dimension nouvelle au ballet, encore non explorée jusque-là. A la création, c’est le danseur belge Koen Onzia qui l’incarnait d’une façon magistrale et époustouflante ! Et le Mandarin entre sur scène à bicyclette déguisé en chinois époque maoïste avec bleu de travail, casquette et étoile rouge. Notons aussi que l’œuvre est entrée au répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris en 2003. De Béjart encore, reprise du Manteau d’après une œuvre de Gogol et qui date de 1999, ainsi qu’un pas de deux Liebe und Tot sur un lied de Mahler. Ce dernier opus a été créé à Tokyo au Théâtre Bunka Kalkan en 2002 et pas encore donné à Lausanne dans son intégralité. Dernier volet de la soirée : une création mondiale de Tony Fabre, Histoire d’Eux, librement inspirée de Didon et Enée, le chef-d’œuvre de Henry Purcell. Tony Fabre, malheureusement disparu à l’âge de 49 ans en décembre dernier, a été danseur au Ballet du XXe siècle puis au BBL avant de rejoindre la Compagnie Nationale de Danse à Madrid de Nacho Duhato. Il a créé plusieurs ballets à Madrid et c’est le troisième pour le BBL. On se souvient d’Empreinte vu en 2012 , bel hommage aux traces que laisse un grand chorégraphe à son danseur. Il avait terminé sa chorégraphie juste à temps et ainsi le BBL pourra lui rendre un dernier hommage. Michel Perret Du 20 au 23 février, Béjart Ballet Lausanne : Le Manteau, chor. Maurice Béjart - Histoire d’eux, chor. Tony Fabre Liebe unt Tot, chor. Maurice Béjart - Le Mandarin merveilleux, chor. Maurice Béjart Opéra de Lausanne, les 20 et 21 à 20h, le 22 à 19h, le 23 à 15h Location : 021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h / en ligne et infos : www.opera-lausanne.ch l i t é dans e Tableaux vivants festival de danse de cannes Poèmes chorégraphiques et visuels En invitant Système Castafiore et Virgilio Senni, le directeur artistique du Festival de danse de Cannes, Frédéric Flamand, parachève sa dernière édition sur deux points d’orgues mêlant considérations eschatologiques, philosophiques à des visées d’installation plasticienne croisant pertinemment l’expression dansée. Danse mémorielle Sur le plateau, une femme, Renée, erre au sein de limbes situées entre plusieurs panneaux coulissant accueillant des projections de VJing (équations, plans, paysages indéterminées du micro au macrocosme) qui savent néanmoins se faire discrètes. Arpentage sensoriel et flottant au plus intime de la mémoire rapatriant paysages et furtifs fragments de récits incongrus autour du « mourir », ce huis clos campant dans l’au-delà sert de prélude dramaturgique au Royaume d’Hadès. Agitée d’une grammaire corporelle tissée de gestes sémaphoriques et de parcours erratiques, la figure de proue du surréaliste Renée en botaniste dans les plans hyperboles signé par la Compagnie française Système Castafiore se remémore les derniers instants d’une vie sur terre. Dans cet entre-deux incertain, des réminiscences fantomales de la vie terrestre surgissent. Ainsi ce personnage gavroche ondoyant en sinuosités et rapatriant tant le souvenir des grandes heures du burlesque à la Tati que la geste hiphop structurant et déstructurant son anatomie, strate après strate. L’opus convoque aussi, en projection vidéo, la figure du physicien américain Oppenheimer, co-inventeur de la bombe atomique et féru de la Bhagavad-Gita en ses lamentations sur les conséquences de la guerre. Plastiquement réussi et bordé d’effluves sonores d’aurores boréales, atmosphériques, comme Karl Biscuit en a le fabuleux secret depuis les années 80, l’opus cosigné du tandem Karl Biscuit-Marcia Barcellos vaut par une forme accomplie de mimographie alliant le texte amplifié et le mouvement de manière tour à tour synchrone et déphasée. Cette partition se a c t u fige par stases successives découpant spatialement et géométriquement ses poses. Lesquelles, silhouettées dans une semi pénombre, ont la semblance de papiers découpés. On retient moins les technologies de projections convoquées que cette manière indécidable de ciseler des danses furtives mais d’une grande netteté. Un trio d’interprètes aux visages recouverts d’une toison laineuse bouclée et de lunettes de «Renée...» par Système Castafiore soleil parvient à faire dériver des figures de street dance vers des airs de suspension étranges comme harponnées par des forces mystérieuses. Cette production fait son miel de symboles et allégories pour délier une mémoire du vivant jouant à la fois de l’agitation moléculaire, reptilienne que du corps de Renée surmonté, un temps, d’un agencement arborescent de fleurs violacées et carmins, topographie botanique du titre oblige. a l i t Dire que l’énigmatique De Anima, créée en 2012 pour la Biennale de Venise par le chorégraphe et plasticien florentin Virgilio Sieni, alignant les tableaux scéniques en forme de statuaires de groupe, s’inspire du magnum opus dû à Aristote, n’est probablement pas superflu. Le plus poète des philosophes de la Grèce antique y livre ses réflexions sur les principes moteurs et du vivant jusque dans son mouvement même, sa psychologie et son traité des passions. Un à un, les danseurs s’avancent pour mettre un disque vinyle sur une platine, introduisant et interrompant des compositions iconiques de l’histoire de la musique classique, du ballet, du jazz et de l’électro ambiant. Le son étant amplifié jusqu’à forer loin dans les paysages kinesthésiques intérieurs du spectateur, les levers et baisser d’aguilles créent une rhapsode incisive. Par les corps en suspension dans l’air modulant le retour en arrière ou l’arrêt sur image, de micro-récits s’enclenchent en faisant glisser comme au gré d’un diaporama une aventure historique humaine, en puisant dans des moments picturaux et sculpturaux forts ou moins connus de l’histoire de l’art. Des figures enténébrées d’un Giambattista Tiepolo à des arlequins ou Pierrots lunaires, en passant par les clowns et funambules chers à Picasso et Léger. L’artiste transalpin a l’art d’accommoder les techniques de l’improvisation, les ressorts et mécanisme du théâtre et la poésie de haïkus pour sa série de tableaux mouvants qui ne déplairait pas à son compatriote plasticien de plateau, Romeo Castellucci. Le fantastique Drumming ciselé par Anne Teresa De Keersmaeker fait, lui, d’une unique phrase chorégraphique, une myriade de possibles distillés dans le temps et l’espace avec croisements et ellipses travaillant des danseurs vêtus d’un habit blanc aux lignes fluides. La partition Drumming, composée par l’Américain Steve Reich en 1971, propose donc un seul modèle rythmique, de quelques secondes, dessin originel de cette oeuvre pour percussions. Mais l’ensemble « est soumis à des changements de phase, de hauteur du son et de timbre », selon le compositeur. Le retour de la musique sur un cycle identique ouvre sur des courses tranchantes et fluides ainsi que des oscillations anatomiques d’une élégance racée. Le geste semble toujours s’y compléter par son effacement en puissance. Bertrand Tappolet é 65 d a n s e rachid ouramdane à bonlieu annecy Dérives climatiques Pour Sfumato, le chorégraphe Rachid Ouramdane s’est mis en chemin d’interrogations auprès de quelques victimes chinoises des changements et dérèglement climatiques. Entre fumerolles, déluge tropical et musique sérielle, l’artiste livre une pièce chorégraphique atmosphérique, plasticienne, hantée de mouvements en ruptures, suspendus, et de tourbillons orageux. 66 Dans le noir amniotique avant un arrièregoût de cendres apocalyptiques environnementales, la voix off précise le paysage : « La taïga court. Comme en Afrique australe. Comme les poissons des grands lacs. Comme dans le Tanganyika. Coraux. Mangroves. Les glaciers fondent. L’eau monte. La taïga court. » Le texte est de Sonia Chiambretto, dont le travail dramaturgique se base sur le recueil de témoignages autour de la migration, la langue, les frontières, l’identité. Et son art alchimique, graphique des signes qui cristallisent en peu de mots ce que la paysage cache au plus profond de ses reliefs tourmentés, balafrés par un développement utilitariste sans conscience d’une humanité sacrifiée, oubliée. Contre nature Même ce qui est contre nature se rattache à la nature. Baignant dans une brume électrique respirant autant l’encens de prières adressées à une divinité dans un mouvement de transe que la terre fumant de sa sécheresse, une danseuse tourne inlassablement sur elle-même, en réalisant un déplacement elliptique. Un mouvement perpétuel spiralé qui déracine. Mais il suggère que résister c’est tenir, survivre, une simple parade vitale, un réflexe dans ce bras, ici tendu à l’horizontale, là replié, encadrant le visage. Une vision en centrifugeuse de vies aléatoires dérivant et résistant entre désir d’ailleurs et réalité d’exil forcé face à un environnement qui prend péril de partout. Posé en bordure, un piano étagé en échos ambient, minimalistes et lyriques, et une voix féminine se coulant en cris animaliers chuintés. Elle se déploie dans les parages chromatiques et chamaniques de la « diva des dépossédés », Diamanda Galás. Le tout fait cascader les corps, avant de les agencer par segments. Plus avant, le « portraitiste chorégraphique » que se veut Ouramdane filme des visages plissés de paysans chinois qui témoignent de vies déplacées de force. Ils sont immenses et cadrés aux pourtours des yeux, au plus près d’une peau a déclinée de l’écorce au paysage. Ils racontent un exode voulu par le gouvernement vers des terres arides plantées de tentes précaires avec un accès problématique à l’eau. Toujours à la lisière sans cesse déplacée et interrogée entre documentaire et fiction, le chorégraphe a déjà passé, entre autres, les états de corps de suppliciés torturés dans Des témoins ordinaires. Un opus qui se fait le sismographe sensible sans voyeurisme de trouble des corps, leur déséquilibre. Mais il a aussi parcouru avec Exposition universelle les esthétiques propagandistes liées à la corporalité. Sur le plateau, sept interprètes se relaient en solitudes giacomettiennes pour donner une forme à ce mouvement climatique déréglant existences et anatomies. Elles sont comme douchés dans un dispositif scénique pouvant évoquer dans son enveloppe pluvieuse coulant des cintres, une installation signée Nam June Paik ou une chorégraphie de Guilherme Bothelo (Moving a perhaps), les corps font de leurs sillages incertains, gerbes et giclures aquatiques au cœur d’un sfumato, cette singulière technique de peinture chère à Léonard de Vinci, Andrea del Sarto et Corrège, qui estompe les contours, et fond les ombres comme une fumée, en multipliant les couches. D’où l’impression de volume et d'évanescence, un modelé vaporeux que relaie parfaitement la musique favorisant l’échelonnement des corps dans l’atmosphère et les gradations que soulignent la lumière. La hiérarchisation calme et mystérieuse de ses plans scéniques, transforment par instants le monde de Sfumato en tableaux successifs d’installation plasticienne esthétisante. Plus de corps-à-corps exacerbés qui c t u a trahissent le délitement des relations humaines sous les assauts de la misère. La chute et la recomposition hip hop du corps retrouvant une verticalité inversée, le mouvement de dervichetourneuse, ici, s’imposent. Se tuilent figements, rigidités parfaites ou surprenantes constructions acrobatiques, contorsions et déplacements à genoux comme compas ou boussole erratique. Noire ironie Traduites ou non par des marches tamisant l’espace de Sfumato, les migrations climatiques recouvrent en réalité nombre de situations différentes et complexes. Les populations fuient des événements climatiques extrêmes et soudains (ouragans, tempêtes, inondations) ou des dégradations progressives et lentes des écosystèmes (sécheresse, montée des eaux). Sfumato se délie non sans une noire ironie d’eau-forte chez un chorégraphe sensible à l’historicité de la danse. «Sfumato» © Jacques Hoepffner Ainsi ce ballet solitaire tramé moins de claquettes endiablées que d’un tap dance désillusionné décliné en mouvements allant se déréglant. Et poursuivi sur une rive sonore de terre déployée en proscenium boisé. Ce, au rythme du légendaire Singin’ in the Rain de Gene Kelly, et sa félicité sous la pluie, chant entonné a capella et au sec par un danseur, hébété, essoré, comme en bout de course, enchaînant ses glissandos au bord du gouffre. A l’ère des réfugiés climatiques, des pas métronomiques de la comédie musicale originelle, ne semble subsister que le fantôme grotesque, doloriste, d’une danse comico-acrobatique. Bertrand Tappolet Sfumato. Bonlieu Annecy. 13 au 15 février 2014. Rens. : www.bonlieu-annecy.com l i t é s p e c t a c l e s spectacles onésiens L’amour au menu Poursuite en février d’une association qui a déjé fourni aux spectateurs onésiens son lot de plaisir. Cette fois, l’amour sera au cœur du débat, et c’est le philosophe français Luc Ferry qui ... Art-en-Ciel et les Spectacles Onésiens ont débuté leur collaboration en 2008 avec une passionnante conférence musicale, Mozart et les étoiles, racontée par le conférencier Hubert Reeves, qui était venu nous parler d’étoiles, de philosophie, d’existentialisme. Après Piazzola, quatre saisons de tango, le nouveau concertspectacle imaginé par Isabelle Meyer - âme et directrice de ces productions pluridisciplinaires – traitera de l’amour… et s’intitule Le Violon de Cupidon. «Là où les Anciens cherchaient plutôt une sagesse cosmique, une sagesse du monde, nos contemporains sont davantage en quête d’une sagesse de l’amour fondée sur une nouvelle conception de la transcendance. » (p. 169). L’amour, raconté par le philosophe Luc Ferry et illustré par un répertoire musical français inspiré des mythes amoureux dans la littérature. Voilà le programme de cette conférence musicale, illustrée musicalement par Isabelle Meyer et l’Orchestre Art-en-ciel. Ce répertoire musical français comprend des œuvres de : Saint-Saens, la Muse et le Poète ; Chausson, poème composé sur Le Chant de l’amour triomphant de Tourguéniev; Massenet, Méditation de Thaïs ; Shchedrin / Bizet, suite sur des airs de Carmen, composée sur une nouvelle de Mérimée. matériel en termes de sécurité, de soin, d'espérance et de qualité de vie, il semblerait que l'on ait perdu sur le front de la consolation spirituelle, du sens et des valeurs : «Commençons par écarter une confusion, qui pour être fréquente, hypothèque d’entrée de jeu toute compréhension de la notion de spiritualité la laïque. » (p. 344) De sorte que le pessimisme, auquel l'ère du soupçon et de la critique nous conduit, ne Le jeune public, dès quatre ans, retrouve le 2 et le 5 février un petit pachyderme qui a enthousiasmé bien des générations, Babar et Ferdinand. Luc Ferry peut - en toute cohérence - jamais être complet. Optimisme impossible, mais pessimisme improbable, voilà la clé ou plutôt le verrou de bien des débats actuels. Un des grands mérites du livre de Luc Ferry est de permettre aux lec- La conférence est basée sur l’ouvrage du philosophe, La Révolution de l’Amour (époque qui marque la victoire du matérialisme : disparition des repères, fin des grands idéaux, triomphe du confort étroit, règne de la consommation, apothéose de l'égoïsme, etc. Ce jugement est paradoxal, car il nous installe dans l'idée que tout va à la fois de mieux en mieux et de pis en pis. Si, d'un côté, on a gagné comme jamais sur le front du confort a c t teurs de sortir de ce désarroi. Son livre pose ainsi les jalons d'un optimisme lucide, une spiritualité laïque met en lumière plusieurs dynamiques de notre monde actuel. Si l'amour depuis toujours, met du sens dans nos vies, l'union amoureuse librement choisie a remplacé, depuis un bon demi-siècle, les valeurs familiales traditionnelles. Avec la mondialisation que nous vivons actuellement, la logique de la compétition globale s'impose partout. Plus les valeurs traditionnelles s'effon-drent, plus nous sommes dans le manque et plus nous sommes en proie à un confusionnisme : « C’est une évidence qui crève les yeux : c’est l’amour qui met du sens dans nos vies. Pour ceux que nous aimons, nous serions prêts à tout. » (p. 533) Avec Luc Ferry, (conférencier), Isabelle Meyer (violon) et l’Ensemble Art-en-ciel, (orchestre), Gérard Diggelmann, collaboration artistique. Pour le public qui souhaite se détendre en musique uniquement, il sera comblé par Youn Sun Nah, chanteuse jazz sud-coréenne qui déborde d’énergie et enthousiasme la planète entière. Soprano lyrique, vocaliste virtuose et improvisatrice géniale, elle fascine son auditoire. A découvrir le 13 février (COMPLET). La programmation de février se termine avec une touche d’humour, un one-man-show de Cédric Chapuis (texte et jeu), dans une mise en scène de Stéphane Batlle. Ce seul en scène pour un batteur virtuose et comédien a été élu révélation du Off au Festival d’Avignon 2011. L’histoire est celle d’un gamin différent des au-tres, dont le monde n’existe qu’à travers les rythmes et les battements de mesure. Un spectacle tout public dès 10 ans. F. Pillet Article élaboré sur la base de l’ouvrage La Révolution de l’Amour, de Luc Ferry, paru aux Editions J’ai lu, 2012. Cédric Chappuis © photolosa u a l i t é 67 s p e c t a c l e festation iconoclaste, pittoresque et insolite ! Les responsables du festival espèrent voir affluer des renforts à leurs côtés pour soutenir leur manifestation. Ambitieux, le Festival Antigel a, dès ses débuts, souhaiter surprendre et explorer. Durant la quinzaine artistique proposée, le public est convié à découvrir et redécouvrir son territoire. Les spectacles ont lieu dans des espaces conventionnels tels que des salles de spectacles ou des salles communales. Parmi les communes genève Festival Antigel Les Genevois avaient connaissance du festival Anti-brouillard, spécifique au quartier de Saint-Jean. En 2011 a vu le jour la première édition du Festival Antigel dont la quatrième édition se déroulera du 1er février au dimanche 16 février 2014. 68 Derrière cette appellation de saison qui intrigue, se trouve une solide équipe mue par l’envie de créer un concept culturel novateur et original : créer un festival des Communes genevoises, de plus en plus impliquées dans le festival. A l’heure des communautarismes de plus en plus virulents, le nom du festival, Antigel, fait résonner un double sens : faire fi de la saison hivernale par des propositions variées de danse et musique ; et briser la glace entre les particularités de chacun pour se mettre à l’unisson dans la grande messe fraternelle de l’art. Nguyen et Sarah Ludi pour ne citer qu’eux. Pittoresque et insolite, ainsi s’affirme le Festival Antigel ! Persuadés que les pôles culturels sont amenés à se mêler davantage à l’avenir, que les banlieues et campagnes genevoises devront créer un dialogue neuf avec le centre urbain, le Festival Antigel mise sur la pollinisation artistique L’équipe du festival, menée par la présiden- du territoire genevois. Dès Le 13 février à Plan-les-Ouates : «Al menos dos caras», la première chorégraphie de SharonFridman © Vojtech BRTNICKY édition, onze Communes – dont Bernex, complices de la manifestation, les habitués de la Carouge, Collonge-Bellerive, vie culturelle genevoise reconnaîtront des lieux Confignon, Cressy, Lancy, enclins à soutenir et promouvoir la culture sous Meyrin, Onex, Plan-les-Ouates, toutes ses formes. Cependant, fidèle à son esprit se sont ralliées au festival. Au d’originalité, le Festival se tiendra aussi dans fil des ans, la liste s’est allongée des espaces non conventionnels comme un cen; Vernier s’est rapidement enga- tre sportif, un terrain de foot, une piscine, une gée aux côtés de Genève, per- patinoire, un parking, une église, un vivarium, mettant de projeter le Festival un stade de rugby, un dépôt de trams ou des Antigel dans la réalité. allées d’immeuble. Le leitmotiv du festival Antigel se résume Le 8 février au Centre communal de Genthod : Special Acoustic Show d’Adam Green © DR en deux syllabes : migrer ! Antidote à la moroHalte à la morosité Cette année, le festival se rend au Moulin sité hivernale et aux frimas : se munir de son ticte Anne Biéler et la directrice, administration et Rouge avec Yan Duyvendak, à Cartigny pour ket d’entrée ou de sa carte de festivalier et parcoordination, Thuy-San Dinh, le festival affiche une Promenade au Moulin-de-Vert. L’artiste courir, au gré des envies et au fil de la multituson originalité au fil des éditions. Pour 2014, en sud-africaine Anthea Moys défie quant à elle les de de spectacles proposés, les diverses proposiréponse à l’hiver glacial qu’on nous prédit, clubs des Communes genevoises. Le public tions de la grille des programmes, en se laissant Antigel rétorque avec une armée d’artistes. pourra monter sur scène en participant à Atlas porté par l’ardent souffle artistique. D’abord en musique avec Philip Glass, Agnes Genève d’Ana Borralho & João Galante. Afin Vous hésitez encore à quitter votre antre Obel, Cody Chesnutt, Suzanne Vega, d’éviter la dispersion, le noyau du festival sera calfeutrée … Vous voilà convaincus ! Pour les Trentemøller, Temples, Connan Mockasin, Jay- placé devant La Gravière, dans l’Igloo qui sera détails quant aux lieux, heures et spécificités de Jay Johanson, Adam Green, Junip,Tamikrest, le lieu de rencontres pour les apéros, les afters et chaque proposition, rendez-vous sur le site du Son Lux, Thee Silver Mt. Zion Memorial entre les deux. Tous les jeudis, vendredis et festival, au visuel coloré très accueillant ! Orchestra, Kaki King, Keaton Henson, Forest samedis, de 18h à 5h, retrouvez une programFirouz-Elisabeth Pillet Swords, William Fitzsimmons, John the mation musicale riche avec de nombreux Dj’s, www.antigel.ch Conqueror & Dorian Wood, puis en mouvement des groupes, un concours scène découverte en avec Pierre Droulers, François Chaignaud, Eisa plus des blind tests et des quizz musicaux. Jocson, Sharon Fridman, Yan Duyvendak, Anne L’équipe du festival consolide cette mani- a c t u a l i t é s p e c t a c l e napolitains, les marionnettes défilent comme autant de miroirs aux amertumes du valet le plus célèbre de l´histoire du théâtre. La partition musicale baroque, elle, jouée sur le plateau par un claveciniste. les marionnettes de genève Les Fourberies de Scapin Molière sera l’hôte du Théâtre des Marionnettes en février, l’occasion de se rafraîchir la mémoire au sujet de ce gredin farceur qu’est Scapin. Pour les plus petits, le menu sera composé de musique et d’un curieux inventaire... Du 7 au 14 février 2014, le Théâtre des Marionnettes accueille à nouveau la Compagnie Emilie Valentin pour Les Fourberies de Scapin. Valet rusé, fourbe, Scapin décide d´aider de ses stratagèmes deux jeunes amoureux dont les paternels font le projet d´un mariage loin d´être à l´avantage de tous. Et cette union semble à des années lumières de celle que leur dicte leur amour passionné. Sur scène, le comédien et manipulateur virtuose Jean Sclavis fait vivre les protagonistes moliéresques avec une force suggestive étonnante. De taille presque humaine, ces marionnettes donnent à cette farce des allures de comédie dramatique sociale et métaphy- sique. Jean Sclavis est seul au milieu de huit marionnettes à taille humaine pour nous ces Fourberies. Entre innocence et insolence le comédien s’empare du texte – légèrement réduit – de Molière, et réalise une performance qui met en lumière la solitude métaphysique du personnage de Scapin. Une séduisante proposition visuelle d’Emilie Valantin qui renoue avec l’esprit original du texte, celui de la farce, et qui dépoussière une certaine tradition moliéresque. Voix modulées des huit personnages, registres variés, chants fuselés : le comédien excelle dans l´un des plus grands succès posthumes de Molière. Visages inspirés de figures de saints Du 17 février au 2 mars, le tout jeune public pourra découvrir le nouveau spectacle de Guy Jutard, Nota bébés qui sera interprété par la comédienne et violoniste Sandrine Girard. Sur quelques fils, tendus comme des cordes à linge, la comédienne accroche une étonnante lessive : des petits bonshommes, des chats, des chiens, une pomme, un soleil, une voiture... Avec facétie, tantôt elle organise délicatement cet inventaire à la Prévert, tantôt elle en change le rangement. Ainsi la pomme s´enfuit dans la voiture de peur d´être croquée, et le chat porte le soleil sur son dos. Ces petits récits musicaux, détournements enjoués du quotidien, nous disent le bonheur d´être au monde. Ils formeront une subtile partition que la comédienne déchiffrera, animera et illustrera des mélodies de son violon de manière fort poétique. F. Pillet http://www.marionnettes.ch/ Théâtre Am Stram Gram Le Théâtre Amstragram propose, du 4 au 9 février, une expérience unique et insolite, Cinématique, un spectacle de la Compagnie AM-CB, à la croisée des arts numériques, du jonglage et de la danse contemporaine. Projetés sur des surfaces planes qui tissent des liens poétiques, ce spectacle anime les espaces flous de l'enfance, ses images en mouvement, ses secrets, sa soif de liberté. Le mercredi 26 février, ASG propose Les Yeux bandés, un théâtre sensoriel qui revisite Le Petit Chaperon rouge avec drôlerie et intelligence pendant quarante minutes, faisant la part belle au texte et aux quatre sens. Invités à prendre place sur l'une des chaises disposées dans cet espace, vous serez priés de vous bander les yeux. Sans le regard, place aux sons, aux parfums et aux saveurs. F. Pillet «Les Fourberies de Scapin» photo F. Jean a c t u a l i t é 69 e x p o s i t i o n s ferme de la chapelle Linda Naeff L’exposition de la Ferme de la Chapelle rend hommage à Linda Naeff, une artiste genevoise hors normes qui, du haut de ses quatre-vingt-huit ans, continue à peindre, dessiner, assembler, sculpter quotidiennement, avec toutes sortes de matériaux et entassant ses créations dans son appartement qui déborde aujourd’hui de plus de quatre mille œuvres. La présentation monographique qui lui est consacrée correspond aussi à une récente tendance de l’art contemporain qui s’ouvre désormais aux arts dits « singuliers ». 70 Cette tendance s’est d’ailleurs brillamment confirmée lors de la dernière Biennale de Venise où un bon tiers des artistes présentés dans l’exposition internationale appartenait au domaine de l’art brut. Ce phénomène s’explique aussi par une évolution du marché qui amène quelques bons collectionneurs à s’intéresser à ce genre, ceux-ci estimant que l’art contemporain n’a pas assez de relation avec le sensible et l’imaginaire. On ne s’étonnera donc pas que les marchands d’art jettent leur dévolu sur ce nouveau filon. enfance et sa vie d’adulte, Linda se tourne vers l’écriture et l’expression plastique à soixante ans, elle y a pris goût et déclare : «Peindre est pour moi une vraie thérapie». Son style puise dans sa dramaturgie personnelle et ses œuvres sont à lire comme autant d’épisodes qui s’organisent en saynètes auxquelles elle rajoute souvent du texte. Si textes et images sont complémentaires, ils gardent néanmoins une part de mystère et d’indicible. Entre chaos et logique, les obsessions répétitives de l’artiste se déclinent sur une diversité infinie de supports: boîtes, nappes cirées, lattes de lit, bouts de bois, emballages divers. Corps et visages, souvent le sien, constituent le principal motif des représentations ; ses personnages sont par ailleurs fréquemment enfermés dans des cages, des boîtes ou formellement inscrits dans des espaces cloisonnés se superposant ou se juxtaposant, tels des bas-reliefs médiévaux ou des planches de BD. Mouvances une œuvre de Linda Naeff Née le 22 février 1926 à Bagnolet dans la région parisienne, de parents suisses exilés en France, Linda Naeff est la seconde d’une fratrie de cinq filles. Elle se sentira marquée par le chiffre deux ; souvent appelée « la seconde» durant son enfance, elle signe encore ses œuvres «LMII» (Linda, matricule II). Meurtrie par des événements malheureux survenus dans son a Comment définir la production de Linda Naeff ? La notion d’art brut peut certes nous aider, mais si cette appellation (inventée par le peintre français Jean Dubuffet qui l’aurait employée pour la première fois dans une let-tre qu'il adressa au peintre suisse René Auberjonois le 28 août 1945) est bien devenue une catégorie artistique, il faut cependant préciser que l’art brut n’est pas un mouvement historique mais plutôt un genre intemporel, composé d’univers personnels découverts par hasard, bien souvent contre le gré de leurs auteurs voire post mortem. Face à l’impossibilité de cerner ce type d’expression dans une définition stylistique absolue et par nécessité d’actualiser des œuvres qui ne se limitent pas à une époque donnée, on a vu apparaître toutes sortes de nouvelles étiquettes : art populaire, art naïf, art singulier, art cru, création franche, art hors-les-normes, art singulier etc… Linda c t u a Naeff s’inscrit dans une zone particulière de ces mouvances et pour mieux la situer, nous devons par exemple l’exclure de l’ensemble des créateurs à inspiration médiumnique et psychopathologique qui, la plupart du temps, vit en milieu psychiatrique fermé et qui n’aspire pas à communiquer. La production de Linda Naeff correspond à une troisième composante d’inspiration: celle des marginaux. Linda est surtout une révoltée, peut-être une anarchiste, qui évolue de façon indépendante et s’exprime librement con-tre le conditionnement imposé par la société, la famille, la religion, la politique, l’économie, bref contre toute sortes de règles et conventions qui l’ont personnellement fait souffrir et qu’elle a décidé, à un moment de sa vie, de dénoncer à travers ses représentations. Ses œuvres pour autant, attention aux amalgames, ne relèvent pas d’une contre-culture, mais bien de l’expression d’un Moi spontané et archétypal, irréductible à quelque embrigadement idéologique que ce soit. Coupés du marché, les artistes singuliers ne peignent pas pour montrer ou vendre, les exposer peut paradoxalement les déstabiliser et les angoisser. Linda ayant présenté quelques toiles au Museum Im Lagerhaus de St-Gall, en 2008, a déclaré à ce moment: «J’espère qu’ils ne me les rendront pas, je les ai déjà remplacées. J’ai fait des copies. Je ne supporte pas le manque. » Elle ne supporte pas non plus de vendre ses œuvres ou de les donner. «C’est comme si je cédais une part de moi.» On l’aura compris, la médiatisation ou la marchandisation de l’art singulier n’est pas sans danger pour l’intéressé, Michel Thévoz écrit à ce propos : « (ils) ne veulent rien recevoir de la culture, rien lui donner ; ils n’aspirent pas à communiquer, en tout cas pas selon les procédures marchandes et publicitaires. » (l’Art brut, psychose et médiumnité, 1990). Dès lors, la mission de l’exposant devrait idéalement veiller à ne pas pervertir ces caractéristiques essentielles qui contribuent à créer des univers aussi fantastiques et poétiques que sombres ou inquiétants. Peutêtre, le moyen approprié pour conserver, exposer et commercialiser cette altérité est-il encore à inventer ? Françoise-Hélène Brou L’Enigme Linda Naeff, jusqu’ au 9 février 2014, Galerie Ferme de la Chapelle, Grand-Lancy, Genève. www.fermedelachapelle l i t é expos ition cabinet d’arts graphiques, genève Not Vital, Tanter L’exposition consacrée à Not Vital au Cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire dévoile une sensibilité toujours tanter, «entre» en romanche, un terme soulignant la réputation nomade de l’artiste qui vit depuis des années entre plusieurs continents. Déjà connu à Genève pour avoir exposé à la galerie Guy Bärtschi, c’est pourtant la première fois qu’une institution de la Ville lui dédie une exposition personnelle. Né en 1948, Not Vital est originaire de Sent un village situé en Basse-Engadine. Ses premières œuvres remontent aux années 1980 et, depuis, sa renommée ne cesse de s’accroître au point de figurer parmi les artistes suisses les plus exposés dans des galeries ou des institutions de premier plan, suisses ou étrangères. Ce succès est dû à l’originalité et à la cohérence de son œuvre qui s’enracine dans le creuset de son Engadine natale tout en déployant des thématiques universelles. Plus connu pour ses sculptures, Not Vital consacre cependant une part importante de son énergie à la création d’œuvres sur papier, estampes, dessins ou multiples et, plus récemment, à la peinture. Habitué à changer de pays, de langues, de techniques et de matériaux, Not Vital a développé une expression polymorphe. En Egypte, il sculpte des têtes de chameaux, chez les Touaregs il travaille l’argent, au Bhoutan le papier, à Murano le verre, à Carrare le marbre, en Chine l’acier, au Niger il construit une école, puis une maison pour regarder le coucher de soleil, une autre pour regarder la lune, en Indonésie sur l’île de Florès il construit une maison pour admirer le soleil se coucher sur les volcans. Ainsi au gré de ses pérégrinations et au contact des artisans et des traditions, savantes ou populaires, Not Vital a-t-il créé un ensemble d'œuvres mêlant les pré- occupations intellectuelles à l'intégrité matérielle. Une démarche que l’on pourrait qualifier d’anthropologique, car centrée sur l’intégration de l’homme dans la nature, l’environnement et la culture. Des plus humbles aux plus sophistiqués, les médiums qu’il utilise participent activement à la création d’espaces spécifiques ; par exemple la pure blancheur des cimes neigeuses peut se traduire soit par le dépouillement monochrome d’une gravure ou d’un dessin, soit par la noblesse du marbre ou la translucidité du verre. Oscillant entre austérité et préciosité, mais jouant aussi sur les décalages d’échelles, ses sculptures ou architectures ouvrent des espaces suscitant trouble et étonnement. Elles déclenchent ensuite un mouvement immobile vers un voyage intérieur, propice à renouer avec des sensations, des images, des souvenirs enfouis dans nos mémoires. L’exposition du Cabinet des arts graphiques illustre la polyvalence et le nomadisme de l’artiste : l’aquatinte The Kiss (1996) renvoie aux voyages de Not Vital au Niger ; la sculpture en acier Model for House in Flores (2013), constitue une pièce témoin d’une architecture réalisée en Indonésie ; Mias Muntognas (Mes montagnes, 2000) établissent un lien direct avec le paysage qu’il voit de sa chambre à coucher, en Engadine, Not Vital «Sled», 2002 Marbre de Carrare, 93 x 38 x 27 cm Collection de l'artiste © Not Vital mais sous la forme de petits chefs-d’œuvre de verre soufflé exécutés par un maître verrier de Murano ; la luge en marbre Sled (2002) suggère les jeux de l’enfance. Y figurent aussi une série de « portraits » qu’il a fait de lui-même ou de ses parents où, loin de recourir à la facilité naturaliste, Not Vital représente ces figures familières par le biais d’associations chiffrées ou métaphoriques. Notons, in fine, la dimension accordée au code de la langue dans les travaux de Not Vital. Qu’elle se manifeste dans le titre de ses œuvres ou qu’elle intervienne directement dans le corps de la composition, cette présence concourt à superposer des images aux signes de la langue, une conjugaison d’encodages propre à générer une forme de « rébus » activant à la fois les registres linguistique et iconique. Je pense en particulier à la sculpture en bronze intitulée Untiteld (Fuck you, 1992). Cette pièce représente une ramure de cerf, une sorte de trophée de chasse, dont les bois forment à chacune de leurs extrêmités une lettre, lesquelles rassemblées produisent l’énoncé « Fuck you ». Il s’agit précisément du type de trouble et d’étonnement auquel le spectateur est confronté face à une œuvre de Not Vital, à lui de décoder le message ! Françoise-Hélène Brou « NOT VITAL, Tanter », jusqu’au 13 avril 2014. Cabinet d'arts graphiques, du Musée d’art et d’histoire de Genève. Not Vital «Mias Muntognas (Mes montagnes)», 2000 Verre de Murano diam. env. 15 cm chacun. Collection particuliere © Not Vital a c t u a l i t é 71 expos itions FRANCE en franc e Musée de l’Ancien Évêché : Paroles de palette. Diodore Rahoult (1819-1874). Jusqu’au 1er avril. Garnier et l’Exposition internationale de 1914. Jusqu’à fin mars. l Vincent, 1746-1816, un peintre entre Fragonard et David. Du 8 février au 11 mai. Marseille Annemasse Centre de la Vieille Charité : Pontoise Villa du Parc : La République - medio Le Havre Musée d’Art moderne André Visages, Picasso, Magritte, Warhol. Musée Tavet-Delacour : Albert l l tutissimus ibis. Jusqu’au 22 mars. Annecy La Turbine-CCSTI : Les doigts dans l le cerveau. Jusqu’au 30 mars. Carcassone Musée des Beaux-Arts de l Carcassonne : Corot dans la lumière du Nord. Du 21 février au 21 mai. Chambéry Musée des Beaux-Arts : Pierre l Leloup. Jusqu’au 24 février. l l Malraux : Le siècle d’or de la peinture danoise : une collection française. Du 8 février au 11 mai. Lens Le Louvre : Les Etrusques et la l Méditerranée. La cité de Cerveteri. Jusqu’au 10 mars. Voir le Sacré. Jusqu’au 21 avril. Du 21 février au 22 juin. l Musée Cantini : La collection : Picasso, Matisse, Giacometti, Bacon…. Jusqu’au 15 février Metz Centre Pompidou-Metz : Hans l Oppenheim. Rétrospective. Du 15 février au 1er juin. Richter. La traversée du siècle. Jusqu’au 24 février. Paparazzi ! Photographes, stars et artistes. Du 26 février au 9 juin. l Frac-Lorraine : Christian Waldvogel. Vision périphérique. Jusqu’au 9 février l l Renoir, Vuillard : la Collection Arkas. Juqu’au 30 mars Wurtemberg : Jules-Emile Zingg à Perros-Guirec. Voyage japonisant d’un peintre montbéliardais en Bretagne (1914-1930). Jusqu’au 23 mars. Lille Musée d’Art moderne : Meret l Marquet. Les bords de Seine, de Paris à la côte normande. Jusqu’au 16 février St.Paul de Vence Fondation Maeght : « Djamel l Tatah » - Monographie. Jusqu’au 16 mars Sèvres Musée de la Céramique : l Picasso céramiste et la Méditerranée. Jusqu’au 19 mai Strasbourg Evian Montéliard Musée d’Art Moderne et Palais Lumière : Joseph Vitta - Lodève Musée de Lodève : Bonnard, Musée du château des ducs de Contemporain : Doré & Friends. Du l l Passion de collection. Du 15 février au 1er juin. Grenoble Lyon Bibliothèque d’étude et d’inforMusée des beaux-arts : Joseph l 72 mation : Paroles de palette. Diodore Rahoult (1819-1874). Jusqu’au 1er avril l Cornell et les Surréalistes à New York. Jusqu’au 10 février. Tony Montpellier Musée Fabre : François-André 21 février au 25 mai. Valenciennes Musée des Beaux-Arts : l Constant Moyaux (1835-1911). Jusqu’au 23 mars. l Palais Lumière, Evian Joseph Vitta - Passion de collection Joseph Vitta (1860-1942) est une personnalité d’exception qui a marqué son époque en mettant sa fortune et son énergie au service de l'art. Il est un collectionneur important à la charnière du XIXe et du XXe siècle, quoique son nom soit bien oublié de nos jours, y compris des spécialistes de l’histoire des collections. Collectionneur, commanditaire, donateur et mécène de Rodin, son existence est liée à la volonté de rassembler une collection prestigieuse, de contribuer à l’épanouissement des arts décoratifs et d’œuvrer autant à sa postérité qu’à celle de ses artistes préférés : Chéret, Delacroix, Bracquemond, Charpentier, Besnard et Rodin. Il avait ainsi réuni en deux décennies plus d’un millier d’objets particulièrement variés. La découverte de ce personnage méconnu et l’idée d’étudier sa collection puis d’en présenter des éléments au Palais Lumière, a pris forme durant l’été 2009. D’autant plus que la villa La Sapinière, construite à Evian pour la famille Vitta par l’architecte Jean-Camille Formigé à la fin du XIXe siècle, a bénéficié de l’apport de nombreux artistes dans la décoration intérieure et extérieure : Félix Bracquemond, Jules Chéret, Alexandre Charpentier, Albert Besnard, Auguste Rodin et Alexandre Falguière. Ainsi, l’exposition Joseph Vitta présentera des objets aussi divers que des bustes antiques, des tableaux italiens du XVIIIe siècle, plusieurs dessins de Delacroix et de Ingres, un bronze, une pierre, des vases et des dessins de Rodin, des pastels et gouaches de Chéret, des œuvres de Bracquemond et de Besnard enfin des peintures japonaises de Hokusaï, des peintures chinoises et un extraordinaire rouleau en soie de 16 m de long du peintre Xu Yang représentant une visite d’inspection en Chine du Sud vers 1750 de l’empereur Quien-Long. . A voir du 15 février au 1er juin 2014 Jules Cheret «La baronne Vitta», étude pour un portrait. Huile sur toile. Collection Musee des Beaux Arts, Nice © Ville de Nice, photo Muriel Anssens a g e n d a expos itions en europe Palazzo Fava, Bologne « La Jeune fille à la perle » «La jeune fille à la perle» peinte par Vermeer, de même que «La Joconde» de Leonard de Vinci ou «Le Cri» de Munch, est unanimement reconnue comme une des trois œuvres d’art les plus aimées et les plus reproduites au monde. Durant quelques semaines, le chef-d’œuvre de Vermeer sera en Italie, plus précisément à Bologne au Palazzo Fava. Ce sera indiscutablement la “star“ d’une exposition raffinée consacrée à l’Age d’or de la peinture hollandaise. Une occasion historique d’admirer en Italie de célèbres peintures hollandaises. «La jeune fille à la perle» évoque la beauté et le mystère, et depuis cinq siècles son visage continue à ensorceler ceux qui ont la possibilité de l’admirer pour “de vrai“ ou de le découvrir à travers les romans ou le film dont la belle jeune fille au couvre-chef couleur de ciel a été, contre sa volonté, la protagoniste. Ce ne sera toutefois pas le seul chef-d’œuvre de Vermeer exposé, puisqu’il sera flanqué de «Diane et ses nymphéas», une grande huile du maître; de plus, il sera accompagné d’une quarantaine d’œuvres, également en provenance du Mauritshuis (Cabinet royal de peintres Mauritshuis) de La Haye, toutes de grande qualité. Le visiteur pourra ainsi admirer des œuvres de Rembrandt, Frans Hals, Ter Borch, Claesz, Van Goyen, Van Honthorst, Hobbema, Van Ruisdael, ... soit à peu près tous les principaux protagonistes de l’Age d’or hollandais. Jan Vermeer, «La jeune fille à la perle», vers 1665 Huile sur toile, 44,5 x 39 cm. L’Aia, Royal Picture Gallery Mauritshuis AILLEURS Karlsruhe Staatliche Kunsthalle : Fragonard. perle». L’Age d’or de la peinture hollandaise. Du 8 février au 25 mai. Londres British Museum : Au-delà de Bologne Palazzo Fava : «La Jeune fille à la l Bruxelles Palais des Beaux-Arts : Zurbarán. l Maître de l’âge d’or espagnol. Jusqu’au 25 mai. Michaël Borremans. Du 22 février au 3 août Ferrare Palazzo dei Diamanti : Matisse. La l silhouette. La force de la ligne, l’émotion des couleurs. Du 22 février au 15 juin Florence Galleria del Costume : Le chal peau entre art et extravagance. Jusqu’au 18 mai. l Villa Bardini : Photographies de 1975 à 2013. Jusqu’au 16 mars. Forli Musée San Domenico : Liberty. l Un style pour l’Italie moderne. Du 1er février au 15 juin. a g l Poésie et passion & Fragonard, dessins. Jusqu’au 23 février. l l’Eldorado. Pouvoir et or dans l’ancienne Colombie. Jusqu’au 23 mars. Hommes sages de l'est. Les traditions zoroastriennes en Perse et au-delà. Jusqu’au 27 avril. l Courtauld Gallery : Un dialogue avec la nature. Paysages romantiques de Grande-Bretagne et d’Allemagne. Jusqu’au 27 avril. l Estorick Collection of Modern Italian Art : Giorgio de Chirico Mythe and Mystère. Du 19 février au 11 mai l National Gallery : Etrange beauté - maîtres de la Renaissance allemande. Du 19 février au 11 mai l Queen’s Gallery, Buckingham Palace : Castiglione, génie perdu. Jusqu’au 16 mars. l Royal Academy : Francis Bowyer. Jusqu’au 10 février. John Carter RA. Jusqu’au 16 février. l Tate Modern : Paul Klee - Making Visible. Jusqu’au 9 mars. e n . A voir du 8 février au 25 mai 2014 l Victoria & Albert Museum : L’art perdu de l’écriture. Jusqu’au 30 juin. Dessins britanniques - De 1600 à nos jours. Jusqu’au 13 avril Venezia : Carlo Saraceni 1579-1620. Un Vénitien entre Rome et l’Europe. Jusqu’au 2 mars. l nordique. Böcklin, Klimt, Munch et la peinture italienne. Du 22 février au 21 juin. Rovigo Madrid Palazzo Roverella : L’obsession Musée du Prado : Velazquez. Les l derniers portraits. Jusqu’au 9 février. Les Furies. De Titien à Ribera. Jusqu’au 4 mai. l Musée Thyssen-Bornemisza : Cézanne. Du 4 février au 18 avril. Darío de Regoyos (1857-1913). Du 18 février au 1er juin Milan Galleria Gruppo Credito Valtellinese : Franco Grignani. Jusqu’au 15 mars l Stuttgart Staatsgalerie : Brueghel, Rubens, l Ruisdael. Trésors de la collection Hohenbuchau. Jusqu’au 23 février. Venise Peggy Guggenheim Collection: l Themes & Variations. The Empire of Light. Du 1er février au 14 avril. Padoue Vérone Musée du Diocèse : Les couleurs du Palazzo della Gran Guardia : l l sacré. Festival international d’illustration. Jusqu’au 2 juin. Vers Monet. Le paysage du XVIIe au XXe siècle. Jusqu’au 9 février l l Escher. Paradoxes graphiques entre arts et géométrie. Jusqu’au 23 mars. Baselitz. Jusqu’au 23 février. En couleur ! Bois gravés en clair-obscur de la Renaissance de la collection de Baselitz et de l’Albertina. Jusqu’au 16 février Reggio Emilia Vienne Palazzo Magnani : L’énigme Albertina Museum (Albertinapl.) Rome Museo Nazionale del Palazzo di l d a 73 expos itions Genève Art & Public (Bains 37) Claude l 74 Hermann. Jusqu’au 21 février. l Bibliothèque d’art et d’archéologie (Promenade du Pin) Les livres de photographes - Un musée de papier pour l’image. Jusqu’au 31 mai. l Blancpain Art Contemporain (Maraîchers 63) Jérôme Leuba, Yves Mettler. Jusqu’au 15 mars. l Cabinet d’Arts graphiques (Promenade du Pin 5) Not Vital. Jusqu’au 13 avril. l Centre d'Art Contemporain (Vieux-Grenadiers 10) Robert Overby & Nicole Miller. Jusqu’au 27 avril. l Centre de la Photographie (Bains 28) Max Regenberg & Emmanuelle Bayart. Jusqu’au 23 mars. l Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle) Linda Naeff. Jusqu’au 9 février. l Fondation Bodmer (Cologny) Wagner ou l’opéra hors de soi. Jusqu’au 23 février l Gagosian Gallery (Longemalle 19) Rachel Whiteread. Jusqu’au 22 mars. l Galerie Bärtschi (rte des Jeunes 43) Cornelia Parker. Jusqu’au 21 mars. l Galerie S. Bertrand (Simplon 16) Yarisal & Kublitz. Jusqu’au 8 février. Sam Kaprielov. Du 27 février au 5 avril. l Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Kira Weber. Jusqu’au 1er mars. l Galerie Anton Meier (Athénée 2) Gaspare O. Melcher. Jusqu’au 8 février. l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers 9) Pierre Schwerzmann / Skopia et Boabooks. Jusqu’au 1er mars. l Maison Tavel (Puits-St-Pierre 6) Qu’as-tu appris à l’école ? La Criée a 25 ans. Jusqu’au 16 mars. l Mamco (Vieux-Granadiers 10) Cycle Des Histoires sans fin, séquence printemps 2014. Du 12 février au 18 mai. l Milkshake Agency (24, Montbrillant) Eun Yeoung Lee. Jusqu’au 16 février. Simone Holliger. Du 25 février au 25 mars. l Musée Ariana (Av. Paix 10) Jean Fontaine - En fer sur terre. Jusqu’au 16 février l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Konrad Witz et Genève les volets restaurés de la cathédrale St.Pierre. Jusqu’au 23 février. Corps et Esprits. Regards croisés sur la Méditerranée antique. Jusqu’au 27 avril. en Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin 10) Découvrez les Baga. Jusqu’au 30 mars. l Musée Rath (pl. Neuve) Héros antiques. La tapisserie flamande face à l’archéologie. Jusqu’au 2 mars. l Musée de la Réforme (Maison Mallet) Enfer ou paradis, aux sources de la caricature. Jusqu’au 16 février. l Red Zone Arts (r. Bains 40) UkiyoE - Images d’un monde qui passe. Jusqu’au 1er mars. l Saint-Gervais Genève (r. Temple) La porte du non-retour, une exposition de Philippe Ducros. Jusqu’au 9 mars l Villa Bernasconi (8, rte Gd-Lancy) Dans le cadre du Festival Antigel : Un temps sur mesure - Esther Ferrer, La Ribot, Olga de Soto, Olga Mesa & Francisco Ruiz de Infante. Du 5 février au 23 mars. l Lausanne Collection de l’Art brut (Bergières l 11) Véhicules. Jusqu’au 27 avril l Fondation de l’Hermitage (2, rte s uis s e Signal) Le goût de Diderot. Greuze, Chardin, Falconet, David.... Du 7 février au 1er juin l Galerie Humus (Terreaux 18 bis) Jean Fontaine. Jusqu’au 15 février l Mudac (pl. Cathédrale 6) Mastering Design & No Name Design - Franco Clivio. Jusqu’au 9 février l Musée cantonal des beaux-arts (pl. Riponne) Giacometti, Marini, Richier. La figure tourmentée. Jusqu’au 27 avril. l Musée de l’Elysée (Elysée 18) Philippe Halsman, Etonnez-moi !. Jusqu’au 11 mai. Lens / Crans Fondation Pierre Arnaud : l Divisionnisme. Jusqu’au 22 avril. Martigny Fondation Pierre Gianadda : l Méditerranée. Photographies des années 50 de Léonard Gianadda. Jusqu’au 9 février. l Fondation Louis Moret (Barrières 33) Jean Scheurer - Zone grise. Du 16 février au 24 mars. l Le Manoir de la Ville : L'Esprit de la Montagne. Jusqu’au 23 février Bulle Neuchâtel Musée gruérien : DressCode - Le Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut l vêtement dans les collections fribourgeoises, 1800-1930. Jusqu’au 2 mars. Fribourg Musée d’art et d’histoire : l DressCode - Le vêtement dans les collections fribourgeoises, 1800-1930. Jusqu’au 2 mars. l 74) Balades avec le Minotaure. Jusqu’au 9 mars. l Laténium (Hauterive) Fleurs des Pharaons. Jusqu’au 2 mars 2014. l Musée d'art et d'histoire (espl. Léopold-Robert 1) Argent - Jeux Enjeux. Jusqu’au 31 août. Fondation de l’Hermitage, Lausanne Le goût de Diderot Dans le cadre des célébrations du tricentenaire de la naissance de Denis Diderot (1713-1784), la Fondation de l’Hermitage a le plaisir de proposer une exposition d’envergure consacrée au célèbre philosophe français, et en particulier à sa relation à l’art. Pour l’occasion, une sélection exceptionnelle de peintures, sculptures, gravures et dessins a pu être réunie; des œuvres que Diderot a pu admirer au Louvre à l’occasion des Salons – expositions temporaires organisées par l’Académie royale de peinture et de sculpture – et qu’il a commentés dans ses comptes rendus rédigés entre 1759 à 1781. Ces textes, d’une liberté de ton remarquable, marquent l’émergence de la critique d’art telle qu’on la connaît aujourd’hui. Ils témoignent de la culture artistique initiale de Diderot, mais aussi et surtout de l’évolution de son goût, de son regard et de son esthétique, à mesure que le philosophe fréquente les œuvres de son temps. L’exposition met également en lumière l’impact de ses écrits sur le monde de l’art. Claude Joseph Vernet «La bergère des Alpes», après 1770 huile sur toile, 119,5 x 80 cm. Musée des Beaux-Arts, Tours © Musée des Beaux-Arts, Tours / P. Boyer Montlouis a g e . A voir du 7 février au 1er juin n d a expos itions en res. Jusqu’au 18 mai. Fondation Gianadda, Martigny Bienne PhotoforumPasqu’Art La Beauté du corps dans l'Antiquité grecque Dans une salle de la Fondation, il sera possible de contempler les deux magnifiques statues découvertes à Martigny le 6 juillet 2011, dans le quartier des Morasses. C’est au pied d’un mur, que sont mis au jour deux torses masculins en marbre, d’époque romaine, alignés sur le dos, et placés là intentionnellement, vers la fin de la période romaine, après avoir été mutilés. Provenant du bassin méditerraneen oriental, ces statues devaient orner une salle d’un complexe thermal. Selon Francois Wiblé, archéologue cantonal, ces sculptures font partie des plus belles trouvailles archéologiques jamais effectuées en Suisse. A ces deux pièces exceptionnelles s’ajoute une statuette de marbre de Vénus, réplique de l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle, également trouvée à Martigny. . A voir du 21 février au 9 juin 2014 Prangins Musée national suisse : «Swiss l Press Photo 13». Jusqu’au 2 mars. Romont VitroMusée : Le monde sous l verre de Fride WirtlWalser. Jusqu’au 20 avril. Vevey Alimentarium : Délices d’artisl tes. L’Imaginaire dévoilé des natures mortes. Jusqu’au 30 avril. l Musée Jenisch : Pierrette Bloch une rétrospective. Jusqu’au 28 févr. l Musée suisse de l’Appareil photographique (Grand Place) Maxim ou la colorisation. Jusqu’au 9 mars OUTRE SARINE Bâle Antikenmuseum l Basel (St. Alban-Graben 5) Comment être un homme? Le sexe fort dans l'anti- a g quité. Jusqu’au 30 mars. l Fondation Beyeler (Riehen) Odilon Redon. Du 2 février au 18 mai. l Kunsthalle : Ross Birrell et David Harding – Winter Line. Jusqu’au 23 mars. Rita Ponce de León – Endless openness produces circles. Du 2 février au 30 mars. l Kunstmuseum (St. Alban-Graben 16) Jakob Christoph Miville (17861836). Jusqu’au 16 février. Les masques intriguées - James Ensor. Du musée royal d'Anvers et dans les collections suisses. Du 16 février au 25 mai. l Museum für Gegenwartskunst (St. Alban-Rheinweg 60) Everytime you think of me, I die, a little. The Memento Mori by Andy Warhol and Douglas Gordon. Jusqu’au 9 février. l Musée des Cultures (Münsterpl. 20) Ara. Jusqu’au l Cartoonmuseum (St. AlbanVorstadt 28) Les Aventures de la Ligne claire. L'affaire Herr G. & Co. Jusqu’au 9 mars. l HMB - Museum für Musik / Im e n Lohnhof (Im Lohnhof 9) pop@bâle. La musique pop et rock depuis les années 1950. Jusqu’au 29 juin. l Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Objets ludiques. L'Art des possibilités. Du 19 février au 11 mai. l Spielzeug Welten Museum : Marilyn privée: l'être humain derrière le concept Monroe. Jusqu’au 6 avril. Berne Centre Paul Klee (Monument im l Fruchtland 3) Entre «Brücke» et «Blauer Reiter». Hanna Bekker vom Rath, promotrice de l'art moderne. Jusqu’au 23 mars. Paul Klee – Vie et Œuvre. Jusqu’au 30 mars. l Galerie TH13 (Theaterplatz 13) «Imaginary Club» par Olivier Sieber. Jusqu’au 23 février. l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr. 8-12) Rétrospective Germaine Richier. Jusqu’au 6 avril. Hieronymus Grimm (1733-1794), illustrateur et caricaturiste. Jusqu’au 21 avril. Markus Raetz. Estampes et sculptu- d : Beat Schweizer & Thomas Kneubühler. Jusqu’au 20 avril l La Fondation Gianadda collabore avec le British Museum pour présenter une exposition centrée sur l’Antiquité gréco-romaine. Une manière de rappeler le passé gallo-romain de Martigny, et surtout de célébrer la beauté du corps. Dix thèmes seront à l’honneur et permettront au visiteur de se documenter sur la beauté des corps féminins et masculins, le sport, la naissance, le mariage et la mort, l’amour et le désir, des thèmes richement documentés par des pièces archéologiques. «Vénus» en marbre, réplique de l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle s uis s e a Warth Kunstmuseum Thurgau : Joseph l Kosuth. L’existence et le monde. Jusqu’au 24 août. Weil / Rhein Vitra Design Museum : Lightopia. l Jusqu’au 16 mars. Visiona by Panton. Jusqu’au 1er juin. Winterthur Fotomuseum (Grüzenstr. 44) l James Welling - Autographe. Jusqu’au 16 février. l Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) Emil Schulthess – rétrospective. Jusqu’au 23 février. l Kunstmuseum (Museumstr. 52) Gerhard Richter - Lignes et verre. Jusqu’au 20 avril. Gerhard Richter Travaux sur papier de la collection. Jusqu’au 27 juillet. l Museum Oskar Reinhart (Stadthausstr. 6) Les peintres de Winterthur à travers les siècles. Jusqu’au 1er juin. l Villa Flora (Tösstalstr. 44) Chefsd’œuvre de la collection Hahnloser / Jaeggli : Bonnard, Van gogh, Vallotton.... Du 19 février au 27 avril. Zurich Haus Konstruktiv : Zurich Art l Prize. Adrián Villar Rojas – Films Before Revolution. Jusqu’au 2 fév. l Kunsthalle : Lutz Bacher. Jusqu’au 2 février. Tobias Madison. Du 2 février au 24 mars. l Kunsthaus (Heimpl.1) L’Expressionnisme allemand et la France. Du 7 février au 11 mai. Alberto Giacometti. Du 28 février au 25 mai. l Landesmuseum : Charlemagne et la Suisse. Jusqu’au 2 février. l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Henry van de Velde – Intérieurs. Du 28 février au 1er juin. l Museum für Gestaltung (Austellungsstr. 60) Galerie : Vintage – Design with a History. Jusqu’au 6 avril. Halle : Affiches d'artistes japonais - Fleurs de cerisier et ascétisme. Du 12 février au 25 mai. l Museum Rietberg (Gablerstr. 15) Art de la Côte d’Ivoire. Du 14 février au 1er juin. Baldaquins pour la déesse. Art textile en Inde. Jusqu’au 13 avril. 75 expos ition berne : germaine richier L’Ouragane La rétrospective que le musée des Beaux-Arts de Berne consacre à Germaine Richier (1902-1959) est un merveilleux hommage à une artiste qui, comme d’autres femmes artistes de cette époque, Meret Oppenheim ou Louise Bourgeois, a dû s’affirmer dans un univers à domination masculine. 76 Jusqu’à présent, seuls quelques collectionneurs ou experts avaient compris la signification exceptionnelle de son œuvre, et sa place comme plasticienne qui contribue à un nouvel expressionnisme. Certes, l’artiste a eu de son vivant plusieurs grandes expositions, dont plusieurs en Suisse (Kunsthalle de Bâle en 1944 et 1954, de Berne en 1946, Kunsthaus de Zurich) mais aussi à Paris (Musée national d’art moderne), New York (Museum of Modern Art), Londres ou Venise. Depuis sa mort prématurée en 1959, quelques trop rares rétrospectives ont eu lieu : en 1996, à la Fondation Maeght de Saint-Paul de Vence et en 2006, à la Collection Guggenheim de Venise. En programmant cette exposition rétrospective, articulée en sept sections, le directeur du musée des Beaux-Arts Matthias Frehner a eu une belle intuition, remettant sur le devant de la scène une des figures pionnières de l’avant-garde du XXe siècle. Une aubaine pour les amateurs d’art qui peuvent ainsi reconsidérer pleinement cette artiste. Deux commissaires l’ont rejoint dans son projet : Jean-Louis Prat déjà en charge de l’exposition à la Fondation Maeght et Daniel Spanke, historien d’art allemand attaché au musée des Beaux-Arts de Berne. n’entre plus dans une esthétique normative, même si les formes reproduisent des figures et des corps humains. Ce « classique sans classicisme » enseigné par Bourdelle sera son viatique, que le maître lui serinera sans cesse par cet adage : « c’est très bien d’employer un compas mais il faut que tu puisses le faire mentir ». Son œuvre sans concession, faites de sculptures déchirées, s’inscrit dans cette recherche exigeante, qui lui vaudra très vite une reconnaissance internationale. La deuxième section consacrée au divin dans l’humain présente des œuvres clefs de l’artiste dont Le Crapaud (1940) mais surtout Buste du Christ, une version en ciment (1931) ainsi qu’un petit bronze du Christ d’Assy (1950). Une œuvre qui lui avait été commandée pour l’église d’Assy en Haute-Savoie et qui, une fois réalisée, déplut à la communauté catholique et dut être retirée, pour ne rejoindre son emplacement que vingt ans plus, en 1971. Une tête abîmée et maltraitée du Christ, mais pas encore déformée Interroger la réalité Lorsqu’elle s’installe à Paris en 1926, quittant son Languedoc natal, Germaine Richier va travailler dans l’atelier d’Antoine Bourdelle, où elle rencontre aussi Alberto Giacometti. Mais, à la différence de celui-ci, qui avait une approche minimaliste de la figure humaine et dont les conceptions finirent par s’imposer comme les seules nouvelles formulations valables, Germaine Richier a une manière kafkaïenne d’interroger la réalité, qui marquera le terme d’une évolution réaliste et expressive amorcée par Rodin. Le parcours de l’exposition est construit autour des thèmes structurant l’œuvre de Germaine Richier. La tradition de la figure tout d’abord, passage obligé pour les sculpteurs, s’intéresse aux années de formation de l’artiste. Celles que l’artiste passe d’abord (1920-1926), à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier dans l’atelier de Louis-Jacques Guigues, élève de Rodin, puis dans l’atelier d’Antoine Bourdelle, de 1927 jusqu’à la mort de l’artiste. Elle reconnaît s’y être initiée à la « rude école du buste ». Au total 26 bustes ont été conservés, auxquels l’artiste accordait peu d’importance mais qui prouvent sa maîtrise du travail technique. Son Torse II (1941) montre un corps qui a l’air cassé au niveau des jambes et de la tête. Pour le tenir droit, elle prolonge les jambes par des tiges, donnant ainsi une forme abstraite qui annonce les fils de fer tendus des sculptures ultérieures. Lorsqu’elle crée en 1945 L’Homme qui marche, ce n’est pas une conscience de soi humaine qu’elle affirme, ne cherchant pas à représenter le beau idéal de l’être humain. Aucune posture triomphale mais une démarche pénible, freinée par la pesanteur naturelle, avec les genoux pliés et le dos arrondi. La forme a c t Germaine Richier «L’Ouragane», (Die Sturmfrau) 1948/49 Bronze, 179 x 71 x 47 cm. Collection famille Germaine Richier © 2013 photo Brassai, coll. F. Guiter © 2013 / 2014 Estate BrassaI – RMN © 2013, ProLitteris, Zurich comme elle le fera ultérieurement et qui n’est pas sans rappeler les représentations du Christ profanées par les iconoclastes. Tout entière tournée vers l’humain, Germaine Richier est souvent considérée comme une représentante de l’existentialisme, ramenant l’homme à sa contingence et lui rappelant les limites de son existence. Avec une technique de réseaux linéaires utilisée par l’artiste, qui peut être mis en regard avec l’œu-vre Pope II (1951) de Francis Bacon enfermant son personnage dans une cage de lignes qui définit l’espace. Les tensions de fil n’imposent pas au corps un espace préexistant et défini puisque, comme dans le jeu des ficelles, où un fil tendu entre les doigts permet de composer d’infinies formes, l’artiste se sert du fil sert u a l i t é pour rattacher avant tout les mains et les pieds dans des figures comme L’Araignée I (1946), Le Griffu (1952) ou La Fourmi (1953). Mais Germaine Richier se sentait aussi proche du surréalisme. Comme eux, elle s’intéresse à la part cachée de l’homme dont témoignent ses hommes de la nuit, ses mantes, et ses êtres hybrides associant des femmes à des amphores semblant être sortis de cet inconscient. Elle est toutefois moins obnubilée que les surréalistes par les procédés d’automatisme psychique que par la quête des sources mythiques. Elle réunit des choses qui n’ont rien en commun dans le monde réel, comme dans L’Homme-Forêt (1945), réalisé à partir d’un tronc de bois pour la partie supérieure du corps, auquel elle rajoute des parties modelées, ne polissant presque pas les surfaces obtenant ainsi un effet déchiré comme une écorce. Un procédé d’assemblage surréaliste comme le pratiquait aussi Picasso. La force de la nature Pour l’artiste, la nature est une force qui impacte l’être humain, le dépasse et l’oblige de relativiser. En quoi, l’exposition nous la présente comme une pionnière des idées écologiques en art. Cette relation à la nature est traitée dans une des étapes du parcours. On sait que dans son atelier s’empilaient toutes sortes de pierres, d’insectes, de bois, d’herbes. Des objets qui sont autant des sources d’inspiration que des éléments entrant dans ses sculptures. La vérité de la nature n’est pas seulement beauté pour l’artiste mais inclut également le bizarre, le laid, l’inquiétant. La sculpture n’étant plus pour elle un objet de décoration. C’est avec La Sauterelle (1944) que Germaine Richier inaugure la série des insectes, des animaux moins majestueux que les chevaux, les lions ou les aigles que l’art antique combinait volontiers en hybrides. Par la fusion organique de fragments d’animaux, de plantes, d’êtres humains naissent les plus étranges organismes. La Sauterelle, avec ses distorsions, ses doigts et jambes étendus, sa tête pointue évoque la tension d’un insecte mais aussi l’étrangeté du monstre. Ses hybrides semblent avoir été saisis au moment de la métamorphose. Germaine Richier n’a eu de cesse d’emprunter de nouvelles voies ou d’expérimenter de nouvelles techniques. Comme utiliser la couleur pour ses sculptures, faisant alors intervenir des amis peintres comme Zao Wou-Ki ou Hans Hartung, ou envelopper de plâtre des fils de chanvre trempés dans de la cire pour certains de ses moulages, remplaçant parfois même le bronze comme matériau de fonte par du plomb qu’elle verse ensuite dans des creusets en seiche. Pour clore le parcours, qui correspond aussi à la fin de la vie de l’artiste, la section intitulée “Germaine Richier et le jeu de la vie“ présente deux versions en bronze de L’Echiquier, une petite de 1955 et une autre plus grande de 1959. Qu’on soit roi, fou ou dame nous sommes tous des pièces de l’échiquier et faisons partie du jeu. La sculpture de Germaine Richier reflète dans ses signes l’image de l’homme de la philosophie existentialiste, la menace que chacun exerce sur l’autre. Le bourreau et la victime malaxés dans le même corps et ses créations plastiques sont en fin de compte une contribution au nouvel expressionisme après 1945. Son œuvre ne retourne plus en arrière mais anticipe la nouvelle figuration des grands peintres sauvages de notre temps, le Suisse Martin Disler ou les Allemands Georg Baselitz ou Anselm Kiefer. « La sculpture n’est jamais frivole, écrit Jean-Louis Prat dans son introduction du catalogue, le sculpteur sait bien qu’il laisse un signe tangible pour le futur et que rien ne lui sera pardonné… ce qu’il a déterminé, voulu, laissera à l’évidence des traces ». Régine Kopp Jusqu’au 6 avril 2014 www.kunstmuseumbern.ch Du 9 mai au 24 août 2014 : Kunsthalle Mannheim (Allemagne) a c t u a l NOUVELLE PRODUCTION D R A M M A L I R I C O E N 4 PA R T I E S NABUCCO GIUSEPPE VERDI DIRECTION MUSICALE JOHN FIORE MISE EN SCÈNE, DÉCORS & COSTUMES ROLAND AESCHLIMANN N A B U C O D O N O S O R F R A N C O VA S S A L L O ROMAN BURDENKO I S M A E L E L E O N A R D O C A PA L B O ZACCARIA ROBERTO SCANDIUZZI MARCO SPOTTI ABIGAILLE CSILLA BOROSS ELIZABETH BLANCKE-BIGGS FENENA AHLIMA MHAMDI L E G R A N D - P R Ê T R E D E B A A L K H A C H I K M AT E V O S Y A N ANNA ELISA CENNI CHŒUR DU GRAND THÉÂTRE DIRECTION CHING-LIEN WU ORCHESTRE DE LA SUISSE ROMANDE 28.2>10.3.2014 i t é SAISON1314 WWW.GENEVEOPERA.CH +41(0)22 322 5050 N O U V E A U E N S U I S S E CIEPR &HQWUH,QWHUQDWLRQDOG (WXGHGHOD3pGDJRJLH5pVRQQDQFH 0DVWHUFODVV z PIANO z z CHANT z z',5(&7,21'·25&+(675(z z ENSEMBLE DE MUSIQUE DE CHAMBRE z z IMPROVISATION z Masterclass de piano avec la pianiste Elizabeth Sombart zGXMHXGLDXOXQGLDYULO zGXPHUFUHGLDXGLPDQFKHDRW zGXPHUFUHGLDXGLPDQFKHQRYHPEUH Masterclass d'improvisation au piano avec le pianiste de blues Fabrice Eulry zGXYHQGUHGLDXOXQGLPDUV zGXPDUGLDXYHQGUHGLGpFHPEUH Masterclass de chant avec le contre-ténor Vincent Aguettant zGXYHQGUHGLDXOXQGLPDL zGXPHUFUHGLDXGLPDQFKHDRW zGXYHQGUHGLDXOXQGLQRYHPEUH Masterclass de musique de chambre avec le chef d'orchestre Jordi Mora zGXOXQGLDXYHQGUHGLMXLQ Masterclass de direction d'orchestre avec les chefs d'orchestre Jordi Mora et Diego Miguel Urzanqui zGXOXQGLDXGLPDQFKHDRW La pédagogie Résonnance, phénoménologie du son et du geste HVW O·pWXGH GX IRQFWLRQQHPHQW GHV PXVFOHV GH O·XWLOLVDWLRQGXGLDSKUDJPHHWGHODUHVSLUDWLRQGDQVOHMHXRXODYRL[(OOHpWXGLHDXVVLO·XQLILFDWLRQGXSKUDVpPXVLFDOSDU OHJHVWHHWOHVRXIIOH /H&,(35HWOD)RQGDWLRQ5pVRQQDQFHGpYHORSSHQWGHVSDUWHQDULDWVDYHFSOXVLHXUVXQLYHUVLWpVHWFRQVHUYDWRLUHVHXURSpHQV INSCRIPTIONS : 5HPSOLUOHIRUPXODLUHRQOLQHYLDOHVLWHZZZUHVRQQDQFHRUJFLHSU INFORMATIONS :7pO²LQIR#UHVRQQDQFHRUJ²¬ZZZUHVRQQDQFHRUJ )RQGDWLRQ5pVRQQDQFH²&,(35 p a r i s mènera les protagonistes vers une issue dramatique. Ibsen met le doigt sur la fragilité et les faiblesses des uns et des autres, sur un ton permettant d’entrevoir des références à Kierkegaard ou Schopenhauer et laissant, on s’en doute, peu de place à l'espoir. Tout en contenant une charge évidente contre les préjugés et conformismes de l'époque, notamment dans le rapport à l'argent, un autre sujet de prédilection de l'auteur, la pièce est surtout marquée du sceau d'un pessimisme que souligne le destin tragique de la seule figure innocente de la pièce, une adolescente. au théâtre de la colline Le Canard sauvage Chez ces gens-là, on ne vit pas, on triche... C'est bien du côté de Jacques Brel que l'on pourrait trouver un soustitre pour Le Canard sauvage d'Ibsen, à moins que le propos ne concerne en fin de compte une grande partie de l'œuvre du dramaturge norvégien. Une distribution homogène La production que propose Stéphane Braunschweig, à la fois adaptateur de la pertinente traduction d'Eloi Recoing, metteur en scène et scénographe, est conforme visuellement à ce que l'on connaît de son travail, à savoir notamment le souci d'éviter toute référence naturaliste pour ce qui est des éléments scénographiques. De fait, la pièce est jouée dans une pièce unique dont les murs sont des panneaux de bois et le décor se compose d'un simple canapé-lit, d'une table et de quelques chaises. Dans cet espace minimaliste, les comédiens sont mis en valeur, la distribution se révélant homogène, à commencer par le protagoniste central de la pièce, Hjalmar dont Rodolphe Congé fait un portrait nuancé, passant de manière crédible d'une sorte de mélancolie tchekhovienne à un emportement pathétique. Dans un registre difficile, celui consistant à interpréter une adolescente de quatorze ans, Suzanne Aubert impose sans aucune mièvrerie une Hedwig en tous points convaincante, alors que le jeu tout en intériorité de Claude Duparfait donne à la recherche de « vérité » de Gregers «Le Canard sauvage» © Elisabeth Carecchio une tonalité faisant frémir à Chez ces gens-là, il y a Werle, le patriarche enrichi, son fils Gregers juste titre. Chloé Réjon, en épouse cherchant à protéger sa vie de famille, investi d’une mission rédemptrice, le vieil Ekdal, l’ancien associé - ou Christophe Brault en médecin désillusionné mais lucide sont également complice ? - de Werle qui avait été condamné au bagne pour avoir vendu excellents et Luce Mouchel (en gouvernante opportuniste), Charlie Nelson du bois d’une forêt appartenant à l’Etat qui vit dans la maison de son fils, (en vieillard déshonoré) et Thierry Paret ne déparent nullement l'ensemble le tourmenté et irrésolu Hjalmar et de sa femme Gina qui fut servante - et dans un style de jeu plus attendu. Mais quelle curieuse idée d'avoir fait le un peu plus - chez Werle, ainsi qu’une adolescente, Hedvig (“son père choix au début de la pièce d'un dialogue entre Gregers présent sur scène et n’est pas son père, mais son père ne le sait pas“). Six personnages pour un son père Werle interprété par Jean-Marie Winling... filmé ! huis clos sans concession et à l’issue fatale.... Frank Fredenrich Fragilité et faiblesse Sombre comme les journées de décembre dans un fjörd, la pièce écrite en 1884 et créée au début de l'année suivante présente un tableau de personnages marqués par d'insurmontables contradictions, ni bons ni mauvais, vivant dans une atmosphère dans laquelle le mensonge et les non-dits règnent en maître jusqu'à l'apparition d'une sorte d'ange exterminateur qui a c t u a l Théâtre de la Colline (rés. 01.44.62.52.52) Le canard sauvage de Henrik Ibsen, m.e.s. Stéphane Braunschweig, jusqu’au 15 février. i t é 79 p a r i s Comédie-Française Psyché Des pièces de Molière, Psyché n’est certes pas la plus connue. On peut découvrir cette rareté à la Comédie-Française, qui ne l’avait plus donnée depuis 1962 (dans une version abrégée, et depuis 1862 dans son intégralité). 80 Cette pièce, réputée immontable, dura cinq heures lorsqu’elle fut donnée en 1671, commandée par le Roi à l’occasion de la réouverture de la salle des Machines du palais des Tuileries. Ne disposant que de quelques semaines pour l’écrire, Molière s’adjoignit les services de Corneille, qui composa 1’100 vers, tandis que Quinault signait les paroles chantées et Lully la musique. Psyché est en effet une pièce de théâtre et un ballet, et comporte des parties chantées. Véronique Vella a relevé le défi consistant à mettre en scène ce divertissement royal, en pratiquant des coupes et en remaniant entièrement les partitions. Sans atteindre le faste de la représentation donnée au Roi-Soleil, la Comédie-Française a mis les moyens pour redonner vie à cette pièce tombée dans l’oubli. Mais cette débauche de beaux décors et de beaux costumes ne suffit pas à faire oublier la relative insipidité de la pièce. dre intérêt pour cette pièce, éprouve un sentiment de vanité en laissant son regard errer sur ce déploiement de pompe. Le même ennui fait qu’on en vient rapidement à prendre en grippe certains comédiens dont le jeu, faisant pourtant merveille lorsque le texte est bon, n’apparaît plus dans ce contexte que comme un métier sans âme. L’interprétation des deux rôles principaux, Psyché et l’Amour (Françoise Gillard et Benjamin Jungers), manque particulièrement de sel. Restent quelques belles scènes, comme celle où le père de Psyché (Laurent Natrella) ne parvient pas à se consoler de la perte imminente de sa fille, ou celle mettant aux prises Vénus et son fils, qui relancent notre intérêt de manière ponctuelle sans parvenir à dissiper la fadeur de l’ensemble. En voici le sujet : Vénus, irritée que la beauté éblouissante de Psyché lui fasse de l’ombre, décide de se venger. Son fils l’Amour qu’elle envoie séduire et perdre la jeune mortelle tombera amoureux d’elle, contraignant Vénus à le châtier à son tour. Cette histoire empruntée à la mythologie grecque, il aurait été trop facile de la tourner en dérision. Véronique Vella ne le fait pas, mais elle n’en fait pas grand-chose non plus, si bien que le spectateur, peinant à concevoir le moin- Julien Roche Psyché Comédie-Française Jusqu’au 4 mars 2014 «Psyché» © Brigitte Enguerand a c t u a l i t é p maison de la culture du japon a r i s opéra de paris, salle garnier Symphonie M Le Parc Acteur underground du Japon des années 60, Akaji Maro se forme au butô auprès de l’un de ses fondateurs, Tatsumi Hijikata, puis monte sa propre compagnie, Dairakudakan en 1972. Son nouveau ballet, Symphonie M, était présenté à la Maison de la culture du Japon du 21 au 30 novembre 2013. Reprenant le thème du Livre des morts tibétains, Akaji Maro nous offre sa vision des quarante neuf jours qui suivent la mort et précédent la réincarnation. Créé en 1994, Le Parc est le premier ballet d’Angelin Preljocaj pour le Ballet de l’Opéra de Paris. Le chorégraphe prend comme thème le jeu de la séduction dans la société française du 18ème siècle. Le Parc a été repris à Garnier du 7 au 31 décembre. Dans un jardin à la française, un groupe d’hommes et de femmes s’amusent. Badinage, libertinage, l’austérité de la fin du règne de Louis XIV est oubliée, l’air du temps est à la légèreté. A ce jeu, un homme et une femme vont se faire prendre. Quand elle apparaît sur scène, pas de doute, Isabelle Ciaravola est une grande dame, une reine, I.Ciaravola dans «Le Parc» Photo A Poupeney une héroïne cornélienne, écartelée entre le devoir et la passion. Si elle participe aux jeux de ses amies, aux chaises musicales, à colin-maillard, elle garde ses distances. Son trouble va naître au contact de Stéphane Bullion. Le danseur étoile donne à son personnage la couleur du libertin torturé qui va succomber à l’amour sincère. Le jardin est le théâtre du drame de la passion, de sa naissance au milieu des amis qui s’amusent, jusqu’au duo final où l’héroïne s’abandonne définitivement dans les bras du héros. Les scènes sont entrecoupées par l’apparition des jardiniers, à la danse très contemporaine, qui évoluent sur une création sonore de Goran Vejvoda alors que c’est Mozart qui accompagne le ballet. Les danseurs prennent un plaisir évident à interpréter ces variations autours de la séduction. La société du 18ème siècle, à cent lieues de la révolution, apporte un délicieux vent de liberté, bien agréable dans le contexte de crise actuel. Un être flottant dans l’éther tel un oiseau dans le ciel, un corps libéré de l’attraction terrestre… Cette première vision nous frappe quand se lève le rideau. La musique, la 5ème symphonie de Mahler, est régulièrement interrompue par de longs moments de silence. Ces éléments nous font prendre conscience de la nouvelle dimension spatiale et temporelle dans laquelle nous sommes projetés. Sur scène, ce qui se déroule n’a jamais aussi peu mérité le nom de repos éternel. Le défunt, incarné par Akaji Maro, va en effet connaître la tentation de femelles lubriques, «Symphonie M» Photo Junichi Matsuda les persécutions d’une cohorte de mâles sadiques puis l’agression d’un monstre à demi fossilisé. Après ces créatures infernales, l’épreuve la plus dure va être d’affronter son passé qui refait surface. La mort serait donc cela, l’angoisse et le désespoir, les remords qui minent la conscience, avant de connaître la dernière asphyxie, la chute sidérale qui mène à la lumière éblouissante, la porte vers une nouvelle vie, le droit de rejouer la partie. Cette porte marque particulièrement pour nous le retour à une certaine légèreté, en même temps qu’à la matérialité. Encadré par des maîtres de cérémonie aussi grotesques qu’inquiétants, Akaji Maro incarne avec une force fascinante le mort, dans cette danse très théâtrale. Qu’il soit en caleçon ou vêtu d’une somptueuse robe émeraude, il réussit à faire passer les émotions poignantes que son personnage ressent. Les tableaux à la scénographie très esthétisante, faite de miroirs, de bois, de cordes et de sables sont incroyablement prenants. Symphonie M est un fascinant voyage dans l’au-delà. Stéphanie Nègre La danse en février L’Opéra de Paris propose du 21 février au 13 mars un programme consacré à deux œuvres méconnues du répertoire du 20ème s., Mademoiselle Julie de Birgit Cullberg qui fait son entrée au répertoire et Fall river legend d’Agnès de Mille. Le Théâtre de la ville accueille, du 26 février au 6 mars, So Blue, création de Louise Lecavalier qui fut une des danseuses fétiches de la compagnie canadienne La la la human step d’Edouard Lock. Perfection de Bud Blumenthal, création qui mêle danse et vidéo, sera à l’affiche du Théâtre national de Chaillot du 11 au 14 février. L’Opéra de Massy présente le 13 février, Inferno, d’Emiliano Pellisari, Stéphanie Nègre Après le Théâtre de la Ville en mai 2013, le Théâtre des Gémeaux présente, les 16, 17 et 18 mai 2014, Umusuna de la compagnie de butô Sankai Juku. Cette compagnie est dirigée par Ushio Amagatsu, ancien élève d’Akaji Maro. a c t u a l i t é inspiré de la Divine comédie de Dante. Le Saint Petersbourg Ballet Theatre sera au Palais des congrès avec Le Lac des cygnes les 4, 5 et 9 février avec Irina Kolesnikova du St. Petersbourg Ballet Theatre et Vadim Muntagirov de l’English National Ballet, Don Quichote le 6 février avec Daniil Simkin, de l’American Ballet Theatre, et Yana Salenko du Ballet de l’Opéra de Berlin, La Bayadère les 7 et 8 février avec Anna Tikomirova du Ballet du Bolchoi et Vadim Muntagirov. Toujours au Palais des Congrès, le Moscou Ballet Theatre présentera du 14 au 23 février Romeo et Juliette avec dans le rôle de Juliette, la danseuse étoile du Bolchoi, Evguenia Obraztsova. Stéphanie Nègre 81 p a r i s opéra Dialogues acerbes Puritains pur jus Excellente production, que celle de Dialogues des Carmélites au Théâtre des Champs-Élysées. Tout se conjugue pour une soirée réussie, de l’interprétation musicale à la mise en scène. Cette dernière revient à Olivier Py. Décidément, Py et Pelly forment actuellement le duo obligé des nouvelles productions lyriques marquantes à Paris ! Avec trois mises en scène chacun depuis la rentrée de la saison. Match nul ! Mais Py l’emporte, incontestablement, pour la valeur de la prestation. Ainsi de ces Dialogues, nimbés de symboliques sur fond de murs noirs coulissants, dans une animation d’une juste évocation. La mort de la Mère prieure, à la fin du premier acte, est à cet égard éloquente : sur un lit vertical, offert comme un tableau suspendu, crûment éclairé. Vocalement, il n’est aussi que de louer le plateau réuni. Patricia Petibon incarne le rôle principal avec une ferveur de chaque instant. Sabine Devielle (remplaçant de dernière minute Anne-Catherine Gillet, elle-même remplaçant Sandrine Piau), lui donne une belle réplique, dans un chant plus léger, mais tout aussi prenant. Et ainsi du reste de la distribution : Véronique Gens, Rosalind Plowright, Topi Lehtipuu, Philippe Rouillon. Seule Sophie Koch dénote, avec ces notes outrées dont elle s’est fait une spécialité. Mais les uns et les au-tres avec une ardeur, une justesse de projection, qui sait éviter toute mièvrerie. Il en est de même de l’Orchestre Philharmonia, avec ses timbres francs sous la battue d’un Jérémie Rhorer plus précis qu’à son accoutumée. Si la soirée semble s’éterniser, on le doit à l’œuvre, ses dialogues constamment en récitatifs qui tournent à vide et son inspiration musicale chiche. L’opéra de Poulenc est ici pourtant servi on ne peut mieux. Les Puritains viennent à la Bastille. Ce n’est que justice, pour cet opéra parmi les plus inspirés de Bellini, trop peu fréquent sur les scènes, et qui fut en outre créé à Paris (en 1835). Encore faut-il des chanteurs qui savent le porter ! Contrat rempli. 82 A la Bastille : «Les Puritains» avec Dmitry Korchak (Lord Arturo Talbot), Maria Agresta (Elvira), Michele Pertusi (Sir Giorgio) et Andreea Soare (Enrichetta di Francia) © Opéra national de Paris/ Andrea Messana Les deux rôles principaux, d’Elvira et d’Arturo, sont à cet égard bien distribués. Si ce n’est que Maria Agresta et Dmitry Kochak nécessitent l’un et l’autre un moment d’échauffement. Moment assez court pour la première, avec quelques cris de départ peu mélodieux, mais vite compensés d’un magnifique phrasé qui rend toute la douleur étreignante des sublimes épanchements belliniens. Le second met beaucoup plus de temps, avec une voix trop longtemps étirée et rêche, mais se rattrape ardemment dans les tout aussi sublimes pages finales qui lui reviennent. Mariusz Kwiecien, pour sa part, suit une similaire courbe ascendante, qui le voit enfin défendre en bel canto de baryton son personnage de Forth. Mais n’oublions pas Luca Lombardo, pour Roberton, ténor dont on ne vante pas assez les mérites, d’une assurance de legato que bien des vedettes du gosier pourraient lui envier. La mise en scène ?… Disons qu’elle ne gêne pas, ni ne gâche notre plaisir (vocal). On sait gré à Laurent Pelly d’avoir su, cette fois, éviter les gags et la dérision facile. Cette histoire romantique à souhait (d’après Scott), est donc prise au premier degré : costumes crypto d’époque a (romantique), jolis mouvements d’ensemble et poses convenues. Parfaitement en place et approprié, mais sans ne rien bouleverser. De son côté la direction musicale de Michele Mariotti, jeune spécialiste de ce type de répertoire, sait allier raffinements et tensions, à partir de la récente édition critique de la partition. Une soirée tout en séductions. Au Théâtre des Champs-Elysées : «Dialogues des Carmélites» © Vincent Pontet-WikiSpectacle c t u a l i t é p a r i s re combien le reste de l’opéra languit. Il n’empêche que Christopher Purves, Barbara Hanningan et Iestyn Davies sont des voix excellemment adaptées, que l’Orchestre philharmonique de Radio France, sous la direction de George Benjamin soi-même, est à son affaire comme rarement, que la mise en scène de Katie Mitchell peut convaincre ; dans son décor de maison décrépie et mal bâtie – pour qui s’y connaît un tant soit peu en architecture – et ses outrances gestuelles. Mystères amusants A l’Opéra-Comique : «Manfred» © Julien Etienne Manfred et Written C’est une gageure que de vouloir monter Manfred de Schumann. Car d’action, il n’est pas vraiment question, sinon d’une succession de tableaux contemplatifs ou fantasmagoriques, dits par des récitants à partir du poème alambiqué de Byron, dont les courtes séquences musicales qui s’intercalent sont censées restituer l’obsession. Mais l’œuvre est des plus rares au concert ou à la scène, et la splendide musique justifie tout. L’Opéra-Comique a donc été bien inspiré de tenter l’aventure. Si ce n’est qu’il a fallu faire la part des choses, avec un texte déclamé, originellement en allemand, traduit pour la circonstance, mais aussi simplifié. Dans ces conditions, le comédien Pascal Rénéric s’en sort avec les honneurs, dans une diction claire et articulée, comme sa partenaire Astrid Bas. Diction toutefois déparée d’une importune sonorisation, inutile, dans l’excellente acoustique de la salle, et préjudiciable à l’équilibre sonore général (surtout dans les moments de mélodrame, ou parlé sur fond instrumental). Sous la direction d’Emmanuel Krivine, la Chambre Philharmonique délivre de belles couleurs, après la mauvaise impression d’une ouverture (la page la plus célèbre de la partition) brutalement cognée. Les chanteurs solistes et le chœur les Éléments se révèlent pareillement en phase. La conception de Georges Lavaudant trouve à illustrer cette suite de scènes sans effet scénique, dans une appropriée obscurité, zébrée de projections énigmatiques et peuplée de personnages tout aussi ténébreux, propice aux rêves et à leurs fantômes. a c t u Créé lors du Festival d’Aix 2012, Written on Skin fait un tabac à l’Opéra-Comique. Bien que l’on puisse s’interroger sur ce triomphe, assez télécommandé. Puisqu’il a été dit à satiété qu’il s’agissait du (centième ?) plus bel opéra depuis Wozzeck !… Eh bien non ! Ce serait même, pour nous qui n’étions pas à Aix, une déception – pour qui connaît quelque peu les autres œuvres de Benjamin, dont son opéra de chambre Little Hill. Œuvres mieux constituées et pensées. À l’évidence, la grande forme, pour son second opéra, ne lui convient pas ; s’ébrouant entre interminable et vite insupportable récitatif à la Pelléas (ou Wozzeck) et de ponctuelles belles sonorités d’orchestre. Le petit moment – trois secondes – où enfin les chanteurs poussent la note ensemble, un brévissime trio, suffit à démontrer par le plaisir qu’il procu- Sous l’égide du Palazzetto Bru Zane, les Mystères d’Isis renaissent Salle Pleyel le temps d’un concert. De quoi s’agit-il ?… En l’espèce, d’un arrangement de la Flûte enchantée créé en 1801, dû à un certain Lachnith, compositeur d’origine tchèque, et Morel de Chédeville, librettiste. Il fallait bien, à l’époque à Paris, présenter un opéra en français, où en outre les dialogues parlés étaient exclus. Mais dans ce cas, c’est à un galimatias que l’on assiste. De la Flûte enchantée restent divers passages, transposés, écourtés, transformés, mis sens dessus dessous… S’ajoutent d’autres pages de Mozart, puisées à Don Giovanni, les Noces de Figaro ou la Clémence de Titus, elles aussi jetées au petit bonheur et subissant un sort comparable. Viennent aussi les récitatifs, d’une lourdeur à faire pleurer les tombes, et quelques passages inconnus (de Lachnith ?), assez ternes. Quant au texte, il aligne les poncifs, un langage pauvrichon et une histoire abracadabrante où par comparaison le livret même de Schikaneder en devient limpide… On s’étonne au début, pour ensuite s’amu- A l’Opéra-Comique : «Written on skin» avec Barbara Hannigan et Christopher Purves © Julienne Etienne a l i t é 83 p a r i ser franchement la soirée passant. Il n’empêche que l’on ne peut que saluer le méritoire travail de reconstitution de la partition. Que louer les interprètes, pour leur courage et à l’occasion leur prestation. Sébastien Droy livre le style de chant français qu’on lui connaît (pour Isménor, alias Tamino), Jean Teitgen et Tassis Christoyannis donnent leurs rôles sans faillir (Bochoris, alias Papageno, et Zarastro). Les voix féminines sont plus incertaines individuellement (Chantal Santon-Jeffery, prenant place il est vrai de Sandrine Piau déclarée forfait), mais s’acquittent bien des parties d’ensemble. Le Chœur de la Radio flamande est parfait. Le Concert spirituel, après quelques flottements initiaux, vibre de tous ses timbres sous la battue énergique de Diego Fasolis (remplaçant Hervé Niquet, souffrant). Bref, un beau travail ! Mais un effort presque inutile… s gée dans son découpage et sa trame. Pauvre Offenbach ! qui ne voit jamais, ou quasiment, ses ouvrages donnés tels quels. L’ensemble est toutefois bien fait, avec quelques tournures drôles, chez des troufions d’opérette revus par le théâtre de Boulevard. Le metteur en scène Philippe Béziat en rajoute un peu, mais le public semble ravi. C’est l’essentiel. Isabelle Druet campe une pétulante Grande Duchesse, quand David Ghilardi, François Rougier et À l’Opéra-Comique, c’est l’Orchestre philharmonique de Radio France qui fait le détour, pour un programme réunissant l’Inachevée de Schubert, le 22e Concerto pour piano de Mozart et la 6e de Sibelius. Ou une montée en puissance, passant par un Mozart transcendant sous les doigts du prodigieux Jonathan Biss, et une symphonie de Sibelius au plus haut de son mystère sous la battue innervée de Thomas Dausgaard. ... et Danaïdes 84 Toujours dans le cadre de sa réhabilitation d’opéras français célèbres en leur temps mais depuis lors oubliés, la saison Bru Zane se poursuit avec les Danaïdes. C’est autrement mieux venu, et plus essentiel, que les Mystères d’Isis ; pour la force d’un opéra, signé Salieri, qui a marqué son époque (l’après Gluck, dont on trouve la trace). Lors du concert à l’Opéra royal Versailles, Christophe Rousset officie, dans des tempos judicieusement exacerbés, avec la verve et l’ardeur qui siéent. Ses Talens Lyriques sont sans reproche, d’un bel élan d’ensemble vite communicatif. On serait plus réservé pour les Chantres du Centre de musique baroque de Versailles, leurs voix aigrelettes et à l’occasion décalées, prenant toutefois davantage consistance dans les saisissantes scènes finales. Judith van Wanroij n’évite pas toujours les excès, dans sa caractérisation de la tragique Hypermnestre, avec quelques notes tirées, mais demeure une vive incarnation. La palme du beau chant revient à Philippe Talbot, délicieux ténor élégiaque pour Lyncée, le héros fragile et malheureux, et à Tassis Christoyannis, sombre à souhait pour Danaüs, le méchant de cette ténébreuse histoire. Et le public de réserver un triomphe final, amplement mérité. Petite Grande Duchesse L’Athénée présente, avec la complicité de la compagnie les Brigands, la Grande Duchesse. Ou un spectacle d’après Offenbach et sa Grande Duchesse de Géroldstein. D’après… car il s’agit d’un arrangement, pour petit ensemble instrumental, d’une œuvre elle-même arran- a A l’Athénée : «La Grande Duchesse» © Claire Besse Emmanuelle Goizé lui donnent réplique avec un bagout de circonstance. Les uns et les autres avec des voix assurées et un jeu scénique qui l’est autant. Direction musicale sans histoire de Christophe Grapperon. Roméo et Sibelius Valery Gergiev et l’Orchestre symphonique de Londres, accompagné de son Chœur et des Guildhal Singers, font le déplacement Salle Pleyel pour Roméo et Juliette. D’emblée frappe l’intensité, une ferveur quasi mystique. Gergiev est le démiurge de Berlioz ! Cette intensité ne se relâchera jamais, des dispersions les plus subtiles, des emportements les plus endiablés, des déchaînements abrupts aux silences lourds de profondeurs. Le chœur participe de la même véhémence que l’orchestre, comme les solistes. Olga Borodina délivre un legato que l’on n’aurait pas cru d’elle, sauf pour deux notes malencontreusement criées ; Keneth Tarver dispense une délicate voix de ténor fluide ; et Evgeny Nikitin s’acquitte de sa partie de basse, sans réellement en posséder la tessiture, avec ardeur. Un moment de fusion, entre les interprètes, l’assistance et l’œuvre. c t u a Poulenc et Holmès Poulenc, pour les cinquante ans de sa disparition, est également célébré à l’Amphithéâtre de la Bastille par les soins de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris. Ses mélodies sont à l’honneur, en compagnie de celles de deux de ses acolytes : Barber et le rare Louis Durey. Tiago Matos, João Pedro Cabral, Olga Seliverstova, Élodie Hache, jeunes talents vocaux qu’il n’est plus besoin de présenter, tirent le meilleur. Les pianistes Adria Grácia Gálvez et Jorge Giménez, les jeunes solistes instrumentaux issu de l’Orchestre-Atelier OstinatO, ne sont pas en reste de talents. Au Temple du Luxembourg, c’est à une autre célébration que l’auditoire, choisi, est confronté : Augusta Holmès. Cette compositrice (1847-1903), amie de Liszt et de Franck, a laissé un nom dans l’Histoire de la musique. Mais ses œuvres beaucoup moins, qui ne sont quasiment jamais interprétées. L’occasion était donc inespérée, d’entendre enfin ses mélodies, précieuses ou fortes (le cycle Conte de fées) et un extrait de sa magnifique cantate, Lutèce, par les voix appropriées d’Aurélie Loilier, Jeanne de Lartigue, Xénia d’Ambrosio, Alexander Swan l i t é p a r i s et L’Oiseleur des Longchamps, accompagnées du piano de Yoan Héreau. Lakmé au-delà des clochettes Lakmé ne s’était pas vu à Paris depuis une vingtaine d’années. Son retour à l’OpéraComique, dans une coproduction inaugurée en octobre à l’Opéra de Lausanne, fait un triomphe. Mérité. La mise en scène de Lilo Baur se contente d’une simple évocation, assez juste au reste. Mais c’est l’interprétation qui soulève le public. Et au premier chef, pour le rôle-titre, Sabine Devieilhe, à la coloratoure ardente et aux aigus joliment filés. À croire que le rôle a été écrit pour elle ! Mais son partenaire, Frédéric Antoun, lui ravirait presque la vedette, avec une voix de ténor léger ferme dans tous les registres. Le reste de la distribution, dont Élodie Méchain, Paul Gay, Jean-Sébastien Brou, Antoine Normand et Hanna Schaer, n’est pas en reste, parfaitement en adéquation avec ses personnages et ses tessitures. Le chœur Accentus délivre nuances et vaillance quand il faut. Alors que les instruments d’époque de l’orchestre les Siècles sonnent merveilleusement. La battue de fouillée de François-Xavier Roth rend justice à une partition qui comporte d’autres joyaux que ses “ clochettes ” (la fin aux voix savamment entremêlées du deuxième acte, par exemple), dans un tempo enlevé qui évite une déliquescence dans laquelle l’exotisme de carton-pâte de l’opéra de Delibes pourrait facilement risquer de tomber. Einstein fait son retour Einstein on the Beach remplit jusqu’au dernier strapontin du Châtelet (associé pour l’occasion au Festival d’Automne). Car c’est un ouvrage mythique, on le sait. Depuis certain beau soir de 1976 à Avignon, l’opéra de Philip A l’Opéra-Comique : «Lakme» © Pierre Grosbois Glass et Robert Wilson n’a cessé de faire référence à travers différents points de la planète théâtrale. Sa dernière reprise en France date de 1992 à la MC93 de Bobigny, où nous l’avions vu avec un temps de retard. Le temps a donc passé. Mais l’œuvre n’a jamais si bien vieilli ! Désormais, c’est un sentiment de beauté générale qui émane. Y compris pour la musique de Glass, dans cette fameuse esthétique répétitive dont on a pu lui faire grief, mais devenue incantatoire et qui recèle des vertus insoupçonnées. Le sommet à cet égard revient à l’Intermède 3, dans une polyphonie chorale d’une virtuosité confondante. La conception de Wilson porte les caractères de son signataire : des lumières crûment magnifiques, une gestuelle au millimètre, des poses hiératiques, un ordonnancement quasi militaire dans sa rigueur d’automates. Le tout, et ses quatre heures dix de représentation (sans entracte !), tient du cérémonial, d’une communion collective, pour peu qu’on y entre sans trop de réserves. Il y aurait bien quelques passages à vide : comme les longs solos de saxophone, de synthétiseur et de la soprano (Hai-Ting Chinn), sans autre décor qu’une barre lumineuse ; ou les deux scènes réservées au ballet, le point faible du spectacle, dans la chorégraphie de Lucinda Childs avec ses danses tournoyantes depuis lors mille fois vues. Mais on garde gravées les images des deux splendides scènes du “ Procès ” ou de celle de la “ Space machine ” finale, soutenue par le clignotement de mille ampoules. Puisqu’il s’agit d’un travail éminemment léché, depuis les choristes, les musiciens du Philip Glass Ensemble, sous la direction de Michael Riesman, et chacun des intervenants, comédien, chanteur, figurant ou danseur. Catone et Curtis Catone in Utica est présenté en version de concert au Théâtre des Champs-Élysées. Ou plutôt, les deux derniers actes de l’opéra de Vivaldi, qui sont seuls restés, et un pasticcio (comme on disait à l’époque) pour un premier acte reconstitué d’après d’autres pages du “ Prêtre roux ”. Et de fait, l’intérêt musical prend mieux consistance passé ce premier acte, avec des arias d’une inspiration mélodique foisonnante. L’interprétation y est pour beaucoup, qui réunit un bouquet de voix féminines, et internationales, de premier choix : Caitlin Hulcup (remplaçant Roberta Mameli), la puissante Ann Hallenberg, Sonia Prina, Ana Quintans et la toute jeune Nerea Berraondo (et petite révélation, avec son timbre d’alto comme il est peu). Colin Balzer, seul chanteur masculin, peine dans les aigus, tout en remplaçant dignement Topi Lehtipuu prévu. Alors que, face à son vibrant ensemble Il Complesso Barocco, Alan Curtis démontre la maîtrise qu’on lui connaît (trop peu célébrée par les médias). Pierre-René Serna Théâtre du Châtelet : «Einstein on the Beach» (Reprise de la production de Philip Glass / Robert Wilson) © Marie-Noëlle Robert a c t u a l i t é 85 p a r i s Chronique musicale de février 2014 86 A partir du 1er février, saluons l'entrée au répertoire de l'Opéra National de Paris du chef-d'œuvre de Puccini La Fanciulla del West, dans la production signée Nikolaus Lehnhoff et dirigée par Carlo Rizzi avec dans le rôle titre Nina Stemme (Minnie) - personnage dans lequel elle vient de remporter un beau succès à Vienne avec Jonas Kaufmann -, Claudio Sgura (Jack Rance), Marco Berti (Dick), Roman Sadnik (Nick) et Andrea Mastroni (Ashby), l'Orchestre et Chœur de l’Opéra National de Paris, dernière le 28. En alternance à partir du 14 février et jusqu'au 12 mars, un autre pilier puccinien Madama Butterfly, spectacle conçu il y a longtemps déjà par Bob Wilson : cette fois le rôle de la fameuse geisha sera tenu par Svetla Vassileva qui sera entourée par Teodor Ilincai (Pinkerton), Cornelia Oncioiu (Suzuki) et Gabriele Viviani (Sharpless), l'orchestre de l'opéra étant placé sous la direction de Daniele Gallegari. Le 3 février dans le cadre de « Convergence », récital du baryton Michael Nagy accompagné par le pianiste Gerold Huber : au programme Schubert, Mahler, Ives, Schönberg et Eisler et le 6, place à la soprano Françoise Masset accompagnée par Dana Ciocarlie (Milhaud, Ravel, Honegger). Le TCE propose le 10 février, Theodora de Haendel, un oratorio en trois actes dirigé par Harry Bicket avec Rosemary Joshua (Theodora), Sarah Connolly (Irene), Andrew Kennedy (Septimius), Tim Mead (Didymus) et Neal Davies (Valens), avec les membres de The English Concert. Les 11 et 13, Gala Monteverdi interprété par une pléiade d’artistes dont Rolando Villazón, Magdalena Kožená, Topi Lehtipuu et Katherine Watson dirigée par Emmanuelle Haïm et Le Concert d’Astrée. Concert Puccini le 20 février avec Le Villi, opéra en deux actes de 1884 de Belgique placé sous la baguette de Gareth Jones (« Héros Légendaires » de Wagner et Mozart) dans le cadre du cycle Grandes Voix, le 15 Anja Kampe et Gary Lehman étant attendus pour un concert Wagner (extraits de Tristan und Isolde et Die Walküre) avec le National de Lille dirigé par Jean-Claude Casadessus. Du 17 au 25 février reprise de la merveilleuse production de Pelléas et Mélisande de Debussy réalisée en 2010 par Stéphane Braunschweig avec Louis Langrée dans la fosse avec l'Orchestre des Champs-Élysées. Comme en 2010 le baryton Phillip Addis incarnera Pelléas et Karen Vourc'h sera Mélisande, en compagnie de Laurent Alvaro (Golaud), Jérôme Varnier (Arkel), Sylvie Brunet (Geneviève). Sophie Karthäuser chantera des lieder de Schubert et de Schumann ainsi que des mélodies de Honegger, Poulenc, Satie et Chabier avec le pianiste Eugène Asti le 8 février au Théâtre des Abbesses. Au Théâtre du Palais Royal, récital de Max-Emmanuel Cencic le 10 (Rossini, Donizetti, Mozart), au piano Masuko Otsuka, et de Waltraud Meier le 24 avec Joseph Breinl au piano. A la Cité de la Musique, concert Haendel (Dixit dominus) et Purcell (Didon et Enée) le 21 proposé par Simone Kermes et l'ensemble Musica Aeterna dirigé par Theodor Currentzis. Enfin le 10 février, la Salle Gaveau affiche « La Passion Lemieux » avec la contralto Marie Nicole Lemieux rejointe par le pianiste Daniel Blumenthal pour un programme où l'on pourra entendre des pages signées Ravel, Weil, Schubert, Barber, Poulenc, Brahms, Offenbach, Tchaïkovsky, De Falla… Ailleurs en France : A Nice du 16 au 20 février, nouvelle production de Semele de Haendel réalisée par Jakob Peters-Messer et dirigée George Petou. «Pelléas et Mélisande» en 2010 © Elisabeth Carecchio pour l’Opéra-Comique que dirigera Paolo Carignani avec Ermonela Jaho (Anna), Thiago Arancam (Roberto), Dimitri Platanias (Guglielmo), Marcello Scuderi (récitant), l'Orchestre National de France, œuvre précédée par des airs extraits de I Pagliacci, Andrea Chénier, Loreley, Francesca da Rimini. Comme toujours la Salle Pleyel proposera tout au long du mois de février d'ambitieux concerts et notamment le 5 une version concertante de Boris Godounov qui réunira Ferrucio Furlanetto, Ain Anger, Anastasia Kalagina, Garry Magee, le Chœur Orfeon Donostiarra et le National du Capitole de Toulouse dirigé par Tugan Sokhiev. Le 6 Sandrine Piau, Sara Mingardo, Werner Güra et Christopher Purves dirigés par Laurence Equilbey interpréteront le Miserere de Zelenka et le Requiem de Mozart. Le 8 le baryton Bryn Terfel sera en concert avec l'Orchestre National a c t «Dialogues des Carmélites» © Vincent Pontet-WikiSpectacle Vu et entendu : Au Théâtre des Cjamps-Elysées, parcours sans faute pour les Dialogues des Carmélites de Poulenc réalisés par un Olivier Py transfiguré (après un ratage absolu à Bastille dans Aïda), un chef décidément passionnant, Jérémie Rhorer et une distribution parfaite : Patricia Petibon se surpassant en Blanche, Véronique Gens admirable Lidoine, Sophie Koch altière Mère Marie et Rosalind Plowright bouleversante Croissy. François Lesueur u a l i t é p chronique des concerts Tout un monde lointain Un Järvi chasse l'autre. C'est à Kristian, fils de Neeme et frère de Paavo qu'il revient de diriger cette étonnante soirée latino-américaine à la tête de l'orchestre de Paris. Les accents exotiques de Danzón n°2, du Mexicain Arturo Márquez se mêlent à une nostalgie sensuelle de bon aloi. Donné en création française, le Concerto Nazareth, pour guitare et orchestre de Paulo Aragão, en hommage au compositeur brésilien emblématique Ernesto Nazareth, est ici interprété par le dédicataire Yamandu Costa, Brésilien lui aussi. Aux côtés de son compatriote accordéoniste Alessandro Bebê Kramer, il conclut la première partie par deux bis d'une virtuosité redoutable : Bachbaridade de Costa, puis «Pixinguinha», le premier des Retratos de Radamés Gnattali. La très hollywoodienne Troisième Symphonie de Copland occupait à elle seule la seconde partie du programme. Cette partition n'avait pas fait son retour dans le répertoire de l'orchestre depuis un concert donné par le compositeur peu avant sa disparition. Célébration de la victoire des alliés, elle se présente sous la forme d'une immense fresque sonore et colorée dans laquelle circulent des thèmes folkloriques. Toujours à Pleyel, on pouvait également écouter la suite de l'intégrale des symphonies et concertos de Chostakovitch sous la baguette de Valery Gergiev. L'orchestre du Mariinsky enchaîne à un train d'enfer les représentations, répétant même une heure avant chaque concert pour quelques ultimes raccords. La 9e symphonie (qui valut l'opprobre de la caste dirigeante au compositeur) brille d'une lumière sombre inédite, principalement dans les échanges cordes-bois et la manière éminemment russe de tenir les thèmes. Le Concerto pour piano et trompette fait dialoguer les doigts d'acier du jeune Daniil Trifonov et la virtuosité lumineuse de Timur Martynov. Le martèlement rythmique fait de cette musique une luxuriante mécanique sonore que rien ne semble arrêter. La bouleversante 4e symphonie concluait un programme déjà très riche en émotions. La combinaison des timbres et la force expressive du propos conduisent à une inexorable progression vers un abîme méditatif. Le public ne s'y trompe pas et manifeste vigoureusement son enthousiasme. Le concert suivant associait la 14e et la 5e Symphonie – puissant contraste entre une œuvre quasi liturgique, regroupant des textes chantés d'Apollinaire, Lorca ou Rilke et la jubilation rutilante d'une musique plus libérée. Les solistes de la première partie ne sont pas tous du même niveau, à commencer par un Mikhail Petrenko décidément bien terne, largement supplanté par le lyrisme éperdu de Veronika Djoeva. Gergiev trouve dans le final de la 5e symphonie un façon très personnelle de traduire l'énergie des musiciens en une marche en avant que rien ne semble arrêter. Elliott Carter sous les ors du Palais Garnier… symbole insolite et remarquable de l'hommage rendu par les musiciens de l'orchestre de l'Opéra de Paris à cette immense figure de la création contemporaine. Le violoncelliste Alexis Descharmes a imaginé ce salon musical dominical sans entracte, en associant une dizaine de pièces représentatives de la musique de chambre du compositeur américain avec des extraits de l'excellent documen- a c t u a l a r i s taire de Frank Scheffer (Elliott Carter : A Labyrinth of Time). Cette option offre l'avantage de présenter à un public pas forcément aguerri un portrait très détaillé à travers des œuvres représentatives des différentes périodes de création de Carter. La réalisation technique sans faille est d'autant plus remarquable que ce répertoire est loin de constituer l'ordinaire de ces musiciens. Didactique tant dans la forme que dans le contenu, le programme mêle œuvres de jeunesse et de la maturité du compositeur récemment disparu. Agenda chargé pour le quatuor Diotima. Après Sao Paulo, Berlin, Edimburgh en passant par Alexis Descharmes Huddersfield, les quatre musiciens © Philippe Gontier posent leurs valises au Théâtre des Bouffes du Nord. Le programme présente trois univers fondamentalement différents et complémentaires : Berg, Schubert et Pesson. L'opus 3 du premier alterne des espaces-temps tantôt en expansion, tantôt resserrés, avec des alliages de timbres interlopes d'une densité peu commune. Vingt ans après Respirez, ne respirez plus, Gérard Pesson revient à l'écriture pour quatuor avec Farrago, troisième opus du genre. On retrouve sans surprise derrière le trompe-l'œil furieusement dilettante, un métier aguerri et la maîtrise absolue d'une palette d'effets. Les modes de jeu alternent fragmentations et affects dans une stratification fragile d'impacts sensitifs qui sollicitent l'écoute d'un bout à l'autre de la pièce. Aux côtés de la violoncelliste Anne Gastinel, les Diotima concluent la soirée avec le Quintette à cordes de Schubert. Dès les premières notes, on a la confirmation d'une adéquation avec cet univers pictural et littéraire. Quelques tensions parasites dans les changements de registres surgissent çà et là dans l'allegro initial mais la plénitude suspendue de l'adagio est, elle, proprement stupéfiante. La lumière diffuse et les alliages de timbres fluctuent au gré des interventions du Goffriller d'Anne Gastinel, dont la sonorité de grand orgue finit par noyer l'équilibre général à de nombreuses reprises. Avec l'allegretto furibond, la concentration finit par l'emporter et les lignes se resserrent fort heureusement. Sans être pleinement convaincant, on ne pourra donc pas rester insensible à cette proposition hors des sentiers battus. Voyageons à présent vers un tout autre univers à présent. Un titre mystérieux (Wisshhh) sert de carte de visite pour pénétrer dans l'univers subtil de la Compagnie Caryatides. Danse et voix se mêlent l'une à l'autre dans un effleurement sensuel avec, en trame de fond, les sensations liées au quatre éléments. C'est dans le cadre des concerts jeune public, organisés par l'Opéra de Paris, que se déroule ce moment de grâce pour petits et grands. Le hautecontre Mathieu Jedrazac nous guide de la voix et du violon alto dans un monde alternativement minéral,végétal, aquatique et aérien, reconstitué à l'aide de projections vidéos. Evguenia Chtchelkova et Lionel Bègue évoluent en contrepoint chorégraphié sous forme de deux soli et deux duos en lien étroit avec la respiration et les textures du matériau pictural. Entre souffle suspendu et rugosité terrienne, le corps des danseurs devient à son tour une toile où se déploie la palette de sentiments et d'émotions. Un vrai grand moment de poésie. David Verdier i t é 87 p 88 a r ANTOINE (01.43.38.74.62) u Fabrice Luchini lit Céline : Voyage au bout de la nuit ( la banlieue ) - jusqu’au 12 mars ATELIER (loc. 01.46.06.49.24) u Savannah Bay de Marguerite Duras - m.e.s. Didier Bezace - du 4 février au 9 mars u Le Square de Marguerite Duras m.e.s. Didier Bezace - du 11 février au 9 mars u Marguerite et le Président de Marguerite Duras - m.e.s. Didier Bezace - du 12 février au 9 mars BOUFFES DU NORD (loc. 01.46.07.34.50) u La Maison de Bernarda Alba de Federico García Lorca - m.e.s. Carole Lorang - du 7 au 15 février CARTOUCHERIE - LA TEMPÊTE (loc. 01.43.28.36.36) u Homme pour homme de Bertolt Brecht - m.e.s. Clément Poirée - jusqu’au 16 février u Corps étrangers de Stéphanie Marchais - m.e.s. Thibault Rossigneux - jusqu’au 16 février CHAILLOT (01.53.65.30.00) u Nancy. Interview de Claude Bardouil - du 4 au 8 février u Kabaret warszawski - m.e.s. Krzysztof Warlikowski - du 7 au 14 février COLLINE (rés. 01.44.62.52.52) u Le canard sauvage de Henrik Ibsen m.e.s. Stéphane Braunschweig - jusqu’au 15 février. u Re-Walden d’après «Walden ou la Vie dans les bois» de Henry David Thoreau - m.e.s. Jean-François Peyret - jusqu’au 15 février. COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES (01.53.23.99.19) u Ensemble et séparément de Françoise Dorin - m.e.s. Stéphane Hillel - avec Jean Piat et Marthe Villalonga - jusqu’au 13 avril COMÉDIE FRANÇAISE SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15) u Dom Juan ou le festin de pierre de Molière - m.e.s. Jean-Pierre Vincent - jusqu’au 9 février u Antigone de Jean Anouilh - m.e.s. Marc Paquien - jusqu’au 2 mars u Psyché de Molière - m.e.s. Véronique Vella - jusqu’au 4 mars i s u Candide de Voltaire - m.e.s. Emmanuel Daumas - jusqu’au 16 février u Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare - m.e.s. Muriel MayetteHoltz - du 8 février au 15 juin u Un chapeau de paille d’Italie d’Eugène Labiche - m.e.s. Giorgio Barberio Corsetti - du 21 février au 13 avril u Andromaque de Jean Racine m.e.s. Muriel Mayette-Holtz - du 28 février au 31 mai STUDIO-THÉÂTRE (01.44.58.98.98) u Candide de Voltaire - m.e.s. Emmanuel daumas - jusqu’au 16 février VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00) u Triptyque du naufrage : Lampedusa Snow de et m.e.s. Lina Prosa - jusqu’au 4 février u Triptyque du naufrage : Lampedusa Beach de et m.e.s. Lina Prosa - du 1er au 3 février u Triptyque du naufrage : Lampedusa Way de et m.e.s. Lina Prosa - du 1er au 5 février u La visite de la vieille dame de Dürrenmatt - m.e.s. Christophe Lidon - du 19 février au 30 mars GUICHET MONTPARNASSE (01.43.27.88.61) u Lettre d'une inconnue de Stefan Zweig - m.e.s. William Malatrat - jusqu’au 5 avril HÉBERTOT (01.43.87.23.23) u Des fleurs pour Algernon de Daniel Jeyes, Gérard Sibleyras - m.e.s. Anne Kessler - du 7 février au 30 mars u Le Roi se meurt d’Eugène Ionesco m.e.s. Georges Werler - avec Michel Bouquet, Juliette Carré - du 26 février au 30 mars. LE MONFORT (www.lemonfort.fr) u Blue Jeans - marionnettes avec Yeung Faï - du 4 au 15 février. MUSÉE DU LOUVRE Robert Wilson / Living Rooms, jusqu’au 17 février ODÉON EUROPE (01.44.85.40.40) u Les Fausses Confidences de Marivaux, avec Isabelle Huppert m.e.s. Luc Bondy - jusqu’au 23 mars. RANELAGH (loc. 01.42.88.64.44) u Comtesse de Ségur née Rostopchine de Joëlle Fossier - m.e.s. Pascal Vitiello - avec Bérengère Dautun - jusqu’au 30 mars. RIVE GAUCHE (01.43.35.32.31) u La trahison d'Einstein de ÉricEmmanuel Schmitt - m.e.s. Steve Suissa - avec Francis Huster et JeanClaude Dreyfus - jusqu’au 30 mars ROND-POINT (0.892.701.603) u Clôture de l'amour de et m.e.s. Pascal Rambert - du 22 février au 2 mars FESTIVAL LES CHIENS DE NAVARRE : u Une raclette - création collective m.e.s. Jean-Christophe Meurisse - du 5 au 16 février u Regarde le lustre et articule - création collective - m.e.s. JeanChristophe Meurisse - du 8 février au 2 mars u Nous avons les machines - création collective - m.e.s. Jean-Christophe Meurisse - du 19 février au 2 mars THÉÂTRE LABORATOIRE (01.43.40.79.53) u L’Adieu à l’automne d’après Jon Fosse - m.e.s. Elizabeth Czerczuk création musicale Matthieu Vonin jusqu’au 16 mars. Théâtre Hébertot Le Roi se meurt Il y avait dans un pays imaginaire un vieux roi qui croyait tenir dans son poing un pouvoir éternel. Puis un jour, tout bascule dans l’anarchie et dans l’horreur. Le roi doit alors accepter l’inéluctable, le grand rendez-vous avec la mort. Mais va-t-il mourir ? Lors de 50 représentations exceptionnelles, Michel Bouquet reprend le rôle principal du «Roi se meurt» d’Eugène Ionesco, un rôle dans lequel il s’est illustré à maintes reprises, et grâce auquel il a remporté deux Molières, dont celui du meilleur acteur en 2005. Il sera accompagné sur scène par la comédienne Juliette Carré. La mise en scène est signée Georges Werler. Michel Bouquet dans «Le Roi se meurt» lors d’une tournée hors Paris © Bernard Richebé . Du 26 février au 30 mars Réservation en ligne sur : http://theatrehebertot.com/accueil / tél. 01.43.76.23.23 a c t u a l i t é b e a u x - a r t s Atelier Grognard, Rueil-Malmaison Les peintres du paysage provençal La Ville de Rueil-Malmaison poursuit sa programmation artistique autour des grands courants picturaux et présente à l’Atelier Grognard un ensemble d’œuvres d’artistes de l’École de Marseille. Ces artistes, attirés par la lumière et la chaleur du Midi, originaires de Provence ou d’autres régions, ont pour noms Félix Ziem, Adolphe Monticelli, mais aussi Charles Camoin, Auguste Chabaud, ou encore Paul Signac, Henri Manguin et Raoul Dufy... Le paysage a pris une part capitale dans la révolution plastique du XIXe siècle, et le paysage provençal a agi comme un facteur stimulant sur les peintres qui se sont établis dans cette contrée. Si leur création jouit d’une reconnaissance universelle, l’œuvre des artistes qui les ont précédés en Provence est singulièrement méconnue L’exposition comprend une centaine de pièces, provenant en majorité du Musée Regards de Provence, à Marseille, et du Musée de l’Annonciade, à SaintTropez. Son but est de mettre en évidence les expériences et les innovations de l’école de Marseille et d’analyser son influence prépondérante sur la représentation du paysage au milieu du XIXe siècle. Paul Guiguou «Paysans devant la Saint-Victoire», 1867 Huile sur toile, 55 x 80 cm. Collection Fondation Regards de Provence Atelier Grognard Rueil Malmaison l LES PEINTRES DU PAYSAGE PROVENÇAL – jusqu’au 17 mars. Bibliothèque Nationale l VERDI, WAGNER ET L’OPÉRA DE PARIS – jusqu’au 16 mars. Centre culturel suisse l JULIEN CHARRIÈRE – jusqu’au 23 février l OLIVIER MOSSET – jusqu’au 30 mars. l AUGUSTIN REBETEZ – Du 28 février au 30 mars. Centre Pompidou l LE SURRÉALISME ET L’OBJET – jusqu’au 3 mars l CLAUDE SIMON, photographe – jusqu’au 10 mars. l DONATION FLORENCE ET DANIEL GUERLAN, œuvres sur papier – jusqu’au 31 mars. Cité de l’Architecture l 1925, QUANT L’ART DÉCO SÉDUIT LE MONDE – jusqu’au 17 février. Fondation Cartier pour l’art contemporain l AMÉRICA LATINA 1960-2013, photographies – jusqu’au 6 avril Grand Palais l RAYMOND DEPARDON. Un moment si doux – jusqu’au 10 février a g Hôtel de Ville l BRASSAÏ, pour l’amour de Paris – jusqu’au 8 mars. Institut du Monde arabe l « VOUÉS À ISHTAR. SYRIE, JANVIER 1934, ANDRÉ PARROT DÉCOUVRE MARI » – jusqu’au 4 mai Jeu de Paume l ROBERT ADAM - L’endroit où nous vivons – du 11 février au 18 mai l MATHIEU PERNOT - La Traversée – du 11 février au 18 mai La Maison Rouge l IL ME FAUT TOUT OUBLIER - Berlinde de Bruyckere et Philippe Vandenberg – du 13 février au 11 mai l L’ASILE DES PHOTOGRAPHIES Mathieu Pernot et Philippe Artières – du 13 février au 11 mai Musée d’art moderne l DECORUM. Tapisseries et tapis d’artistes – jusqu’au 9 février l SERGE POLIAKOFF. Le rêve des formes – jusqu’au 23 février l ZENG FANZHI – jusqu’au 16 février Musée des arts décoratifs l DANS LA LIGNE DE MIRE, SCÈNES DU BIJOU CONTEMPORAIN EN FRANCE – jusqu’au 2 mars l SECRETS DE LA LAQUE FRANÇAISE : LE VERNIS MARTIN – du 13 février e n . A voir jusqu’au 17 mars 2014 au 8 juin. Musée Carnavalet l ROMAN D’UNE GARDE-ROBE, de la Belle Époque aux années 30 – jusqu’au 16 mars Musée Cognacq-Jay l FEUILLES D'HISTOIRES, vie quotidienne et grands événements à travers l'éventail en France (XVIIIe s) – jusqu’au 9 mars Musée Dapper l INITIÉS, BASSIN DU CONGO & MASQUES DE ROMUALD HAZOUMÈ – jusqu’au 6 juillet Musée Eugène Delacroix l DELACROIX EN HÉRITAGE. Coll. Étienne Moreau-Nélaton – du 11 décembre au 17 mars. Musée du Louvre l LE FONDS PHOTOGRAPHIQUE DES ANTIQUAIRE GEORGES JOSEPH DEMOTTE ET LUCIEN DEMOTTE – jusqu’au 25 mars. l NEW FRONTIER III - Portraits anglo-américains à l’heure de la Révolution – jusqu’au 28 avril l LE CIEL EST PAR-DESSOUS LE TOIT… Dessins pour les plafonds parisiens du Grand Siècle – du 20 février au 19 mai Musée Maillol l ETRUSQUES. Un hymne à la vie – d a jusqu’au 9 février l SERGE POLIAKOFF. Gouaches de 1948 à 1969 – jusqu’au 9 février Musée Marmottan-Monet l LES IMPRESSIONNISTES EN PRIVE. 100 chefs-d’œuvre de collectionneurs – du 13 février au 6 juillet Musée d’Orsay l GUSTAVE DORÉ (1832-1883). L’imaginaire au pouvoir – du 11 février au 11 mai Musée Rodin l RODIN, la lumière de l’antique – jusqu’au 16 février Musée de la Vie Romantique l ESQUISSES PEINTES DE L’ÉPOQUE ROMANTIQUE – jusqu’au 2 février Musée Zadkine l VOYAGE DANS L'ANCIENNE RUSSIE – jusqu’au 13 avril Petit de Tokyo l L’ÉTAT DU CIEL [partie 1] – du 14 février au 7 septembre. Pinacothèque l GOYA ET LA MODERNITÉ – jusqu’au 16 mars l LA DYNASTIE BRUEGHEL – jusqu’au 16 mars l CHU TEH-CHUN, LES CHEMINS DE L'ABSTRACTION – jusqu’au 16 mars 89 m é m e n t o GENEVE concerts 90 u 1.2. : AHMAD JAMAL piano, avec REGINALD VEAL basse, HERLIN RILEY batterie, MANOLO BADRENA percussion. Victoria Hall à 20h30 (loc. Ticketcorner, T 0900 800 800, La Poste, Manor, CFF, Globus, Centre Balexert, La Praille, Fnac) u 3.2. : Les Grands Interprètes. QUATUOR HUGO WOLF & XAVIER PHILLIPS, violoncelle. Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info Balexert, Migros Nyon-La Combe) u 9.2. : QUATUOR DE GENÈVE & DIDIER PUNTOS, piano (Mozart - Quatuor avec piano K 478 & Dvorak Quintette avec piano opus 81). Musée d’Art et d’Histoire, salle des Armures, à 11h u 10.2. : Temps & Musique. QUATUOR SIGNUM (Haydn, Schnittke, Dvořák). Conservatoire de Genève à 20h (billetterie : Service culturel Migros, Migros Nyon-La Combe, Balexert) u 11.2. : LA VOIX : PRÉSENCE - ABSENCE 2. Jamilia Jazylbekova, voix, Brice Pauset, Gertraud Mariam Zotter, récitants, Élèves des écoles primaires, Ensemble Contrechamps, dir. Michael Wendeberg (Barden, Jazylbekova, Lachen-mann). Studio Ernest-Ansermet à 20h / 19h : présentation avec Jamilia Jazylbekova (billetterie ouverte 45 min. avant le concert / ou rés. sur : www.contrechamps.ch/reserver) u 12.2. : Série Grands Classiques. OSR, dir. Neeme Järvi, LARS VOGT, piano (Brahms, Grieg). Victoria Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 / E-mail: [email protected]) u 13.2. : Migros-pour-cent-culturelclassics. ORCHESTRE DE CHAMBRE DE POLOGNE, dir. et violon MAXIM VENGEROV (Mozart, Tchaïkovski). Victoria Hall à 20h (loc. SCM 022/319.61.11) u 14.2. : Série Répertoire. OSR, dir. Neeme Järvi, LARS VOGT, piano (Brahms, Grieg). Victoria Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 / [email protected]) u 14.2. : Les Grands Interprètes. QUATUOR BELCEA. Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info Balexert, Migros Nyon-La Combe) u 19.2. : Série Symphonie. OSR, dir. Charles Dutoit, LOUIS LORTIE, piano (Mozart, Respighi). Victoria Hall à 20h (Tél. 022/807.00.00 / [email protected]) u Dimanche 23.2. : Amarcordes. CONCERT FORMATION (Haydn Boccherini - quatuors et quintettes). Moulin en Clarens 17h (réservation sur http://www.amarcordes.ch/) u 25.2. : Les Dissonances. DAVID GRIMAL, violon, JULIA GALLEGO, flûte, ALEXANDRE GATTET, hautbois, BRICE PAUSET, clavecin. (Mozart). Victoria Hall à 15h et 20h (loc. Espace Ville de Genève, Grütli, Genève Tourisme, Cité Seniors, Centrale Billetterie T 0800 418 418, Service culturel Migros Genève) u 25.2. : Les Grands Interprètes. QUATUOR DE JÉRUSALEM. Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info Balexert, Migros Nyon-La Combe) u 27.2. : Concert de soirée No. 4. DE LONDRES À BÂLE. L’OCG, dir. Arie Van Beek, Ufuk & Bahar Dördüncü, pianos, Francois Volpé & Sébastien Cordier, percussions (Haydn, Bartók). BFM à 20h (loc. 022/807.17.90 / [email protected] ou www.ticketportal.com) u 28.2. : Les vendredis de l’ethno. XHEMALI BERISHA ET SKAROS. Musique grecque et albanaise. AMR-Sud des Alpes à 21h30 (prélocation au 022/716.56.30) FESTIVAL ANTIGEL du 1er au 16 février (billetterie : Fnac, Service culturel Migros, Petzi ou Gelatomania 022/901-13.00 /[email protected]) u 1.2. : DORIAN WOOD. Le Chat Noir à 20h30 u 3.2. : Le compositeur PHILIP GLASS & le violoniste TIM FAIN (œuvres les plus récentes de Philip Glass). Victoria Hall à 20h30 u 6.2. : AGNES OBEL. Victoria Hall à 20h30 u 6.2. : SUZANNE VEGA. Temple de Chêne-Bougeries à 20h30 u 7.2. : JAY-JAY JOHANSON, pop. Salle des fêtes du Lignon à 20h30 u 7.2. : KEATON HENSON, folk-pop. Temple de Chêne-Bougeries à 20h30 u 8.2. : ADAM GREEN, Special Acoustic Show. Centre communal de Genthod à 20h30 u 15.2. : TAMIKREST, musique du désert. MàD à 20h30 théâtre u Jusqu’au 2.2. : POUR UN OUI OU POUR UN NON de Nathalie Sarraute, m.e.s. René Loyon, accueil. Théâtre des Amis (rens. 022/342.28.74) u Jusqu’au 2.2. : L’ENTÊTEMENT de a g Rafael Spregelburd, m.e.s. F. Polier. Le Grütli, sam à 19h, dim à 18h ([email protected] / 022/888.44.88) u Jusqu’au 2.2. : JE SUIS LE VENT de Jon Fosse. création par la Cie De nuit comme de jour, m.e.s. Guillaume Béguin. Théâtre du Loup, sam à 19h, dim à 17h (rés. 022/301.31.00) u Jusqu’au 2.2. : COUCOU ! NOUS SOMMES TOUS DES PETITS SUISSES DADAÏSTES, studio d’action théâtrale. Opéra futurible/dadaïste. Le Galpon (rés. au 022/321.21.76 au plus tard 2 h avant le début de l’événement - mail : [email protected]) u Jusqu’au 2.2. : DIAGNOSTIC : HAMLET inspiré de Shakespeare, m.e.s. María Castillo, création. Théâtre Alchimic, sam et dim à 19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros) u Jusqu’au 2.2. : CHARLES-EDOUARD, PAYEZ-VOUS ENFIN UN BANQUIER! de et par Lionel Rudaz, m.e.s. Gaspard Boesch. Au Casino-Théâtre, sam à 19h, dim à 17h (rés. 022/793.54.45 ou [email protected]) u Jusqu’au 2.2. : RÉCITS DE FEMMES de Dario Fo et Franca Rame, m.e.s. Patrick Mohr, Michele Millner, Naïma Arlaud. La Comédie de Genève, sam 19h, dim 17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected]) u Jusqu’au 9.2. : LE MALADE IMAGINAIRE de Molière, m.e.s. Jean Liermier. Théâtre de Carouge, Salle FrançoisSimon, mar, mer, jeu et sam à 19h / ven à 20h / dim à 17h (billetterie : 022/343.43.43 - [email protected]) u Jusqu’au 16.2. : UN AVENIR HEUREUX de Manon Pulver, m.e.s. Nathalie Cuenet. Le Grütli, à 20h, dim à 18h. Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88) u Jusqu’au 16.2. : LE RÉVIZOR d’après Nicolas Gogol, m.e.s. Evelyne Castellino. Par les arTpenteurs. Théâtre de la Parfumerie, ma-je-ve à 19h, me-sa-di à 17h (rés. 022/341.21.21) u Du 3 au 15.2. : Off. AU BORD DU MONDE par Valentine Sergo. Théâtre Saint-Gervais, Salle Isidore Isou, 7ème étage - L’Atelier, mar-jeu-sam à 20h30, lun-mer-ven à 19h (loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch) u 4.2. : LE BONHEUR d’Eric Assous. Théâtre du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com) u 4, 5, 7, 8, 9.2. : CINÉMATIQUE, de et avec Adrien Mondot, dès 7 ans. Théâtre Am Stram Gram, mar + ven à 19h, mer à 15h, sam + dim à 17h (Loc. 022/735.79.24 et Service Culturel Migros) u Du 4 au 7.2. : MISSION de David Victoria Hall David Grimal La série Classiques Alternances accueille le violoniste français David Grimal et l’ensemble Dissonances pour une soirée consacrée à l’Intégrale des concertos pour violon et orchestre de Mozart. Pour ce projet un peu particulier, David Grimal est aidé par Brice Pauset qui sera au clavecin pour y interpréter un continuo de sa composition, dans le style de Mozart, ainsi que des cadences. Quant à l’orchestre, il sera de taille assez réduite, avec des vents David Grimal © Gilles Abegg anciens. Pour David Grimal, Mozart est un mélange de complexité et de simplicité. A constater “sur pièce“ lors de cette soirée sous forme de laboratoire musical. . Mardi 25 février 2014 à 15h et 20h Location : Service culturel Migros et Espace Ville de Genève, Grütli, ... e n d a m Temple Saint-Gervais Genève Gli Angeli Lors de son concert de février, l’ensemble Gli Angeli poursuivra son Intégrale des Cantates de Bach avec les pièces BWV 55, 58, 170. Cette soirée sera également l’occasion de mettre en valeur les voix uniques et rares à Genève de Carlos Mena et de Hans-Jörg Mammel, dans deux des plus célèbres cantates pour voix seule de l’œuvre du Cantor. Hans Jörg Mammel . Lundi 10 février 2014, 20h00 Billetterie Service culturel Migros A noter que ce concert sera également donné le dimanche 9 février à 17h à la Chapelle Notre-Dame de Compassion, Bulle (loc. Société des Concerts de la Ville de Bulle) Van Reybrouck, m.e.s. Raven Ruëll. La Comédie de Genève, relâche lun, mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected]) u Du 6 au 8.2. : Off. TESTIMONY RÉCITATIF d’après Testimony, recitative de Charles Reznikoff, Henri Jules Julien. Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, 2ème sous-sol grande salle, jeu-sam à 19h, ven à 20h30 (loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch) u Du 7 au 14.2. : LES FOURBERIES DE SCAPIN de Jean Sclavis, m.e.s. Emilie Valantin, adultes et ados. Théâtre des Marionnettes à 19h, dim à 17h (rés. 022/807.31.07) u Du 7 au 16.2. : L'INTERROGATOIRE de Jacques Chessex, m.e.s. Laurent Gachoud. Théâtre Alchimic, mar et ven à 20h30; mer, jeu, sam et dim à 19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros) u Du 7 au 22.2. : C'EST DÉJÀ DEMAIN.4. Jeunes comédiens / jeunes compagnies. Le 7 à 20h et le 8 à 19h : 1. COUVRE-FEUX de Didier-Georges Gabily, création, m.e.s. Ludovic Chazaud. / Le 15 à 19h et le 16 à 17h: 2. ABYMES # VOLET 1 par Audrey Cavelius. / Le 21 à 20h et le 22 à 19h: 3. VIENNOISERIES d’après Mademoiselle Else de Arthur Schnitzler, m.e.s. Dorothée Thébert et Lola Riccaboni, reprise. Théâtre du Loup (rés. 022/301.31.00) u Du 10.2. au 2.3. : BOURLINGUER de Blaise Cendrars, m.e.s. Darius Peyamiras. Le Poche-Genève, lun et ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim à 17h, mardi relâche (rens./rés. /loc. 022/310.37.59) a g u 11 et 12.2. : 13 À TABLE, avec Jean Leduc, Yann Papin, m.e.s. Pierre Palmade. Théâtre du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com) u Du 11 au 15.2. : Off. MON LIVRE D'HEURES à partir de Frans Masereel, La Fanfareduloup Orchestra. Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, 2ème sous-sol grande salle, mar-jeu-sam à 19h, mer-ven à 20h30, dim 1.6. à 18h (loc. 022/908.20.20 ou www.saintgervais.ch) u Du 11 au 16.2. : CABARET LEVIN #2 de Hanokh Lein, m.e.s. Hervé Loichemol et Nalini Menamkat. La Comédie de Genève, relâche lun, mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected]) u du 12.2. au 9.3. : LES POÈTES MAUDITS - BAUDELAIRE, VERLAINE ET RIMBAUD. Conception, m.e.s. et jeu : Alain Carré. Théâtre du Crève-Cœur, Cologny (rés. 022/786.86.00) u Du 13 au 23.2. : TRANSMISSION par Christophe Jaquet. Théâtre de l’Usine (rés. 022/328.08.18 ou www.theatredelusine.ch) u Du 17.2. au 2.3. : NOTA BÉBÉS de et m.e.s. Guy Jutard, de 1 à 3 ans. Théâtre des Marionnettes, nombreuses séances de 20 min. (rés. 022/807.31.07) u Du 18.2. au 2.3. : PORTRAIT JENS VAN DAELE. Danse et musique avec Jens Van Daele et l’Ensemble Batida. Le Galpon (rés. au 022/321.21.76 au plus tard 2 heures avant le début de l’événement mail: [email protected]) u dimanche 19.2. : Les Théâtrales. LE REPAS DES FAUVES de Vahé Katcha, e n é m e m.e.s. Julien Sibre. Par la Cie Minus et Cortex. BFM à 17h (Rés. 022/364.30.30 ou Fnac) u Du 25.2. au 8.3. : MADEMOISELLE ELSE par tg STAN - Ingmar Bergmann. Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch) u Du 25.2. au 8.3. : APRÈS LA RÉPÉTITION par tg STAN - Ingmar Bergmann. Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch) u Du 25.2. au 8.3. : SCÈNE DE LA VIE CONJUGALE par tg STAN - Ingmar Bergmann. Théâtre Saint-Gervais, Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc. 022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch) u Du 25.2. au 23.3. : LE BRUIT DU MONDE par la Paradoxe Compagnie, m.e.s. Yves Pinguely, création. Théâtre des Amis (rens. 022/342.28.74) u Du 26.2. au 2.3. LE COMBAT ORDINAIRE de Manu Larcenet, Compagnie L'outil de la ressemblance, m.e.s. Robert Sandoz. Théâtre du Loup, mar+jeu+sam à 19h, mer+ven à 20h, dim à 17h (rés. 022/301.31.00) u Du 26.2. au 5.3. : GUERRE ET PAIX de Léon Tolstoi, m.e.s. Piotr Fomenko. Théâtre de Carouge, Salle François-Simon, à 19h tous les soirs (billetterie : 022/343.43.43 [email protected]) u 26.2. : Midi Théâtre! - FOYER MODERNE !, conception Aurélie Cuttat et Pascale Güdel. Espaces "bar" de la Petite et de la Grande salle à 12h (rés. sur www.grutli.ch) u Du 28.2. au 15.3. : ANDROMAQUE 10 - 43 d'après Jean Racine, m.e.s. Kristian Frédric. Le Grütli, Grande salle (sous-sol), mar-jeu-sam à 19h, mer-ven à 20h, dim à 18h. Relâche lun ([email protected] / 022/888.44.88) opéra u 2, 5, 8.2. : SIEGFRIED de Wagner, OSR, dir. Ingo Metzmacher, m.e.s. Dieter Dorn. Grand Théâtre à 18h, dim à 15h (loc. 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/) u 8.2. : Festival Antigel. CONSERVATOIRE DE MUSIQUE DE GENÈVE ORCHESTRA, dir Antoine Marguier, avec la soprano SOPHIE GRAF (La Belle et la Bête). Salle des fêtes du Lignon à 15h et 17h d a n t o u 24.2. : DMITRI HVOROSTOVSKY, récital de romances et mélodies de Rachmaninov, Tchaïkovski, Medtner et Liszt. Avec Ivary Ilja au piano. Victoria Hall à 20h (loc. Espace Ville de Genève, Grütli, Genève Tourisme, Cité Seniors, Centrale Billetterie T 0800 418 418, billetterie-culture.ville-ge.ch, Fnac) u 28.2. et 1, 2, 4, 6, 7, 8, 10.3. : NABUCCO de Giuseppe Verdi, OSR, dir. John Fiore, m.e.s. Roland Aeschlimann. Grand Théâtre à 19h30, dim à 15h (billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/) danse u 4.2. : SAISONS DES BALLETS RUSSES : SHÉHÉRAZADE, LES SYLPHIDES ET DANSES POLOVTSIENNES de Michel Fokine, Ballet du Kremlin de Moscou. BFM à 19h30 (billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/) u 13.2. : LA BAYADÈRE. Par le Saint Petersbourg Ballet Théâtre. Théâtre du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com) u 12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 20.2. : MÉMOIRE DE L'OMBRE de Gustav Mahler, chor. Ken Ossola, création du Ballet du Grand Théâtre, dir. Philippe Cohen. BFM à 19h30, dim à 15h (billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/) FESTIVAL ANTIGEL Loc. : Fnac, Service culturel Migros, Petzi ou Gelatomania 022/901-13.00 /[email protected] u 4 et 5.2. : SOLEILS, chor. Pierre Droulers. Salle des fêtes du Lignon à 20h30 u 6, 7, 8 et 9.2. : ALL INSTRUMENTS, chor. et conception Sarah Ludi. ADC-Salle des Eaux-Vives à 21h, le 8 à 19h, le 9 à 18h u 11 et 12.2. : DEATH OF THE POLE DANCER, suivi de MACHO DANCER, chor. Eisa Jocson. Undertown, Meyrin, à 21h u 12, 13 et et 14.2. : IDIOM 3, hip-hop avec Rafaël Smadja, Menad Benhaça et Tsipatron. Point Favre, ChêneBourg, à 21h, le 13 à 19h u 13.2. : AL MENOS DOS CARAS, chor. Sharon Fridman. Espace Vélodrome, Plan-les-Ouates à 20h divers u 6.2. : MESSMER, LE FASCINATEUR. Théâtre du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com) u 15 et 16.2. : La saison des P’tits 91 m é m Loups. MISTER GIGI, par Nathalie Athlan. Théâtre du Loup. Matinée à 11h, suivi d’un brunch. Après-midi à 15h, avec goûter. Dès 2 ans (rés. 022/301.31.00) u 15 et 16.2. : Festival Antigel. DUMY MOYI, un spectacle conçu par François Chaignaud. Musée Ariana, le 15 à 19h, 21h et 23h / le 16 à 17h, 19h et 20h30 u 26.2. : Laboratoire spontané. LES YEUX BANDÉS de Jean-Claude Grumberg, m.e.s. Julien George, création, dès 8 ans. Théâtre Am Stram Gram à 19h (Loc. 022/735.79.24 et Service Culturel Migros) LAUSANNE concerts 92 u 9.2. : Les Concerts J.S. Bach de Lutry. ENSEMBLE LUCERAM avec RAFFAELLA MILANESI, soprano, dir. Hélène Schmidt (Vivaldi, Haendel, Scarlatti). Temple de Lutry à 17h (Billets : Hug Musique, Grand-Pont 4, ou à l'entrée du Temple dès 16h le jour du concert / rés. Point I, Quai Gustave Doret, 1095 Lutry, Tél. 021 791 47 65) u 13.2. : OSR, dir. Neeme Järvi, LARS e n t VOGT, piano (Brahms, Grieg). Théâtre de Beaulieu à 20h15 (Tél. 022/807.00.00 / [email protected] ou chez Passion Musique) u 20.2. : OSR, dir. Charles Dutoit, LOUIS LORTIE, piano (Mozart, Respighi). Théâtre de Beaulieu à 20h15 (Tél. 022/807.00.00 / [email protected] ou Passion Musique) théâtre u Jusqu’au 2.2. : DOGUGAESHI de et m.e.s. Basil Twist. Vidy-Lausanne, salle René Gonzalez, à 19h30, dim à 18h30, lun relâche (loc. 021/619.45.45) u Jusqu’au 2.2. : IMMORTELS de et m.e.s. Nasser Djemaï. Vidy-Lausanne, salle Charles-Apothéloz, mar-mer-jeusam à 19h, ven à 20h30, dim 2.2. à 18h30 (loc. 021/619.45.45) u Jusqu’au 2.2. : WESTERN DRAMEDIES, création collective par la 28B Company. L’Arsenic, ma, je, sa 19h / me, ve 20h30 / di 18h (021/625.11.36, [email protected] ) u Jusqu’au 2.2. : MOLLY BLOOM avec Anouk Grimberg – Production CICTThéâtre des Bouffes du Nord. Théâtre Kléber-Méleau, me/je/sa à 19h, ve à 20h30, di 18h (rés. 021/625.84.29) L’Arsenic 7 minutes de terreur «7 minutes de terreur» Le spectacle de la Compagnie Yan Duyvendak propose une réflexion sur la communication, plus précisément sur les images télévisuelles et mentales, sur les codes sociaux en vigueur dans notre vie, dont l’effet tend à influencer grandement notre perception de la réalité, voire à la fausser. Le propos, bien au-delà de la vaine parodie, joue avec l’humour et la mélancolie, assaisonné d’une touche de sérieux et de dérision. . du 13 au 15 février 2014 Réservation : 021/625.11.36 ou [email protected] a g o u Jusqu’au 16.2. : LA PETITE FILLE AUX ALLUMETTES d'Andersen, m.e.s. Julie Annen, dès 6 ans. Le petit théâtre, me à 17h / sa et di à 14h et 17h (rés. www.lepetittheatre.ch) u Du 4 au 23.2. : FRANÇOIS D’ASSISE d’après Joseph Delteil, m.e.s. Adel Hakim. Chapiteau Vidy-L, mar-merjeu-sam à 20h30, ven à 19h, dim à 17h (loc. 021/619.45.45) u 6 et 7.2. : RÉCRÉATION d'après Robert Walser, m.e.s. Danielle Bré. La Grange de Dorigny, ma-je-sa à 19h / me-ve à 20h30 / di à 17h (rés. 021/692.21.24) u Du 11 au 22.2. : VIELLEICHT de Mélissa Von Vépy. Vidy-Lausanne, salle Rene Gonzalez, à 19h30 (loc. 021/619.45.45) u Du 11.2. au 2.3. : L’ANNIVERSAIRE d’Harold Pinter, m.e.s. Jean-Gabriel Chobaz. Pour les 30 ans du Théâtre du Projecteur. Pulloff théâtres, mer + ven à 20h, mar, jeu + sam à 19h, dim à 18h (réservations 021/311.44.22 ou www.pulloff.ch) u Du 12 au 19.2. : CINÉMATIQUE par la Compagnie Adrien M/Claire B. VidyLausanne, salle Charles Apothéloz, à 19h, ven à 20h30, dim à 17h30, lun relâche (rés. 021/619.45.45 www.billetterie-vidy.ch) u 13, 14 et 16.2. : LAPIDÉE de Jean Naguel. Compagnie Paradoxe, m.e.s. Jean Chollet. Espace culturel des Terreaux, jeu à 19h, ven à 20h, dim à 17h (loc. http://www.terreaux.org/) u Du 13 au 15.2. : 7 MINUTES DE TERREUR par Yan Duyvendak et Nicole Borgeat, création. L’Arsenic, je, sa 20h30 / ve 19h ([email protected] / 021/625.11.36) u 20 et 21.2. : PRÉLUDE À L'AGONIE, m.e.s. Sophie Perez et Xavier Boussiron. L’Arsenic, je 19h / ve 20h30 ([email protected] / 021/625.11.36) u Du 27.2. au 8.3. : YVONNE, PRINCESSE DE BOURGOGNE de Witold Gombrowicz, m.e.s. Genevière Guhl. La Grange de Dorigny, ma-je-sa à 19h / me-ve à 20h30 / di à 17h (rés. 021/692.21.24) danse u Du 4 au 9.2. : SHIVER, chor. Nicole Seiler, création. L’Arsenic, ma, je, sa 19h / me, ve 20h30 / di 18h ([email protected] / 021/625.11.36) u Du 12 au 16.2. : STRESS BIOLOGY, chor. Corinne Rochet et Nicholas Pettit, création. L’Arsenic, me, ve 20h30 / je, sa 19h / di 18h ([email protected] / 021/625.11.36) u Du 20 au 23.2. : BÉJART BALLET e n LAUSANNE : LE MANDARIN MERVEILLEUX, chor. Maurice Béjart. Opéra de Lausanne (loc. 021/315.40.20, lunven de 12h à 18h / en ligne et infos : www.opera-lausanne.ch) opéra u 5, 7, 8, 9, 12.2. : HÄNSEL ET GRETEL d'après les Frères Grimm. Orchestre de Chambre de Lausanne, Maîtrise du Conservatoire de Lausanne dir. Laurent Gay, m.e.s. Julie Beauvais. Opéra de Lausanne (Billetterie : 021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h / en ligne : www.opera-lausanne.ch) u 16.2. : SANDRINE PIAU & LES PALADINS, dir. et clavecin Jérôme Correas. Opéra de Lausanne (Billetterie : 021/315.40.20 / en ligne : www.opera-lausanne.ch) u 19.2. : Midi-récitals - Artistes des MOUSQUETAIRES AU COUVENT. Salle de l'Opéra de Lausanne à 12h15 (billets sur place). AILLEURS annecy BONLIEU SCÈNE NATIONALE aux Haras d’Annecy, sauf mention contraire (rens./rés. 04.50.33.44.11 / [email protected]) u 7.2. Musée-château : TRIO CHAUSSON, Philippe Talec, violon, Antoine Landowski, violoncelle, et Boris de Larochelambert, piano u 8.2. : LES MÈRES DE FAMILLE SE CACHENT POUR MOURIR par Constance et Jérémy Ferrari, Humour u 12.2. Espace Malraux, Chambéry : TABAC ROUGE de James Thierrée u 13 et 14.2. : LAAROUSSA de et avec Elma et Sofiane Ouissi, danse u 13 et 14.2. : SFUMATO de et chor. Rachid Ouramdane, danse u Du 25 au 27.2. : LA FAUSSE SUIVANTE OU LE FOURBE PUNI de Marivaux, m.e.s. Nadia Vonderheyden annemasse RELAIS CHÂTEAU-ROUGE à 20h30 sauf mention contraire (loc. +33/450.43.24.24) u 1.2. : IBRAHIM MAALOUF, Jazz u 6 et 7.2. : SOLONELY de, m.e.s. et avec Thomas Guerry et Camille Rocailleux, danse u 7 et 8.2. : LES CHEVALIERS de Guillaume Bailliart u 11 et 12.2. : INNOCENCE de Howard Barker, m.e.s. Howard Barker et Gerrard McArthur d a m u 14.2. : PETER VON POEHL et MÉLISSA LAVEAUX, pop folk / Blues rock u 15.2. : UN CHIEN DANS LA TÊTE de Stéphane Jaubertie, m.e.s. Olivier Letellier u 19.2. : BRASS’ ATTITUDE - Namascae Brass u Du 25 au 27.2. : LA PREUVE PAR L’AUTRE, chor. Bouba Landrille Tchouda, Anne Nguyen, Farid Berki, danse fribourg THÉÂTRE EQUILIBRE à 20h (billetterie : Fribourg Tourisme 026/350.11.00 / [email protected]) u 1.2. : LE ROI SE MEURT d'Eugène Ionesco, m.e.s. Georges Werler u 13.2. : ROMÉO ET JULIETTE, dir. et chor. Thierry Malandain, danse u 15.2. : JE SUIS VIEUX (PAS BEAUCOUP MAIS DÉJÀ) de et avec Frédéric Recrosio, m.e.s. Jean-Luc Barbezat u 20 et 21.2. : LE MALADE IMAGINAIRE de Molière, m.e.s. Jean Liermier u 26.2. : PLAN B, chor. Aurélien Bory, m.e.s. Phil Soltanoff, danse givisiez THÉÂTRE DES OSSES (rés. 026/469.70.00) u Du 9.2. au 23.3. : RIDEAU! de et m.e.s. Gisèle Sallin u 13 et 14.2. : L'ANNÉE DE LA BALEINE de et avec Jacques Michel, m.e.s. Véronique Ros de la Grange, Cie Où Sommes-Nous, Genève. Théâtre Alambic, Hôtel-de-Ville 4, à 19h30 (rés./loc. 027/722.94.22) meyrin FORUM MEYRIN à 20h30 sauf mention contraire (loc. 022/989.34.34) u 5.2. à 19h : L'OMBRE d'Andersen, m.e.s. Jacques Vincey u Du 11 au 14.2. : OBLOMOV. Dorian Rossel-Compagnie STT / O'Brother Company u 25.2. : VOUS DÉSIREZ?, revue hiphop - Précédé de Ma leçon de hiphop, par Céline Lefèvre - François Berdeaux u 28.2. et 1.3. : DE BEAUX LENDEMAINS de Russell Banks, m.e.s. Emmanuel Meirieu, Cie Bloc Opératoire monthey THÉÂTRE DU CROCHETAN à 20h (loc. 024/471.62.67) u 12.2. Festival Scènes Valaisannes : FRÉDÉRIC RECROSIO, m.e.s. Jean-Luc Barbezat u 26 et 27.2. <: COMME S'IL EN PLEUVAIT de Sébastien Thiéry, m.e.s. Bernard Murat é m lon, Haute Ecole de Musique de Genève (Akshelyan, Prokofiev, Dvorak). Temple du Bas, Neuchâtel (infos.+33 (0)4.79.33.42.71) u 7 et 9.2. : LES DEUX GENTILSHOMMES DE VÉRONE de Shakespeare, par la Compagnie du Passage u 9.2. : LA COURSE AUX CHANSONS de Marie Nimier, m.e.s. Elizabeth Macocco u Du 11 au 16.2. : MARC DONNETMONAY TRANSMET SA JOIE, m.e.s. JeanLuc Barbezat u 15 et 16.2. : LES DÉSAXÉS : SEA, SAX & FUN, de et m.e.s. Philippe Martz u 20.2. : GRACIAS PIAZZOLLA par Maria de la Paz THÉÂTRE DU POMMIER (tél. 032/725.05.05) u 5 et 6.2. à 20h : CLOSER de Patrick Marber, par Le Poche-Genève, m.e.s. Françoise Courvoisier. u 11.2. à 20h : ALDJIA LA FEMME DIVISÉE de Jacques Probst, m.e.s. Christian Vez u 14.2. à 20h30 : ROUND MIDNIGHT par la Cie Le Trio Classic Plus - Sofia de Salis, flûte; Katja Avdeeva, piano; Vladimir Virok-Stoletov, violoncelle u 22 et 23.2. à 20h30 : OLD WINE IN NEW BOTTLES par la Cie Les Chemins la chaux-fds montreux ARC EN SCÈNES. CENTRE NEUCHÂTELOIS DES ARTS VIVANTS sauf mention contraire (loc. 032/967.60.50 ou www.arcenscenes.ch/) u 1.2. : MÜNCHENER KAMMER-ORCHESTER, dir. Alexander Liebreich, VILDE FRANG, violon (Rossini, Mendelssohn). Salle de Musique à 20h15 u 6 et 7.2. TPR : LE COMBAT ORDINAIRE de M. Larcenet, m.e.s. R.Sandoz u 7.2. : PIOTR ANDERSZEWSKI, piano (Bach). Salle de Musique à 20h15 u 13.2. : LE MALADE IMAGINAIRE de Molière, m.e.s. Jean Liermier u 15.2. TPR : PIERRE À PIERRE de Tian Gombau, m.e.s. Rosa Diaz u 19.2. : LE VOYAGE DE PENAZAR de et m.e.s. François Cervantes u 20.2. : ORCHESTRE DE CHAMBRE DE BÂLE, dir. Giovanni Antonini, SOL GABETTA, violoncelle (Mozart, Schumann). Salle de Musique à 20h15 martigny FONDATION GIANADDA à 20 h, dim à 17 h sauf mention contraire (loc. 027/722.39.78) u 2.2. : I SOLISTI VENETI, dir. Claudio Scimone a g e n t o de Traverse - B. Minder, flûtes traversières et électroniques; F. Eichelberger, clavicorde électro acoustique et organetto; M. Amiguet, flûtes traversières et électroniques; W. Daiss, tape-guitare et archiluth nyon USINE À GAZ sauf mention contraire (loc. 022/361.44.04) u 1.2. : ROCIO MÁRQUEZ, Concert assis, Flamenco u 9.2. : Les Matinales. QUATUOR SIGNUM (Haydn, Dvořák). Grande salle de la Colombière à 11h15 (billetterie : Service culturel Migros, Migros Nyon-La Combe, Stand Info Balexert) onex SPECTACLES ONÉSIENS, salle communale à 20h30 (loc. 022/879.59.99 ou SCM 022/319.61.11) u 2 et 5.2. : Récrés-spectacle. BABAR ET FERDINAND, Magie et musique u 11.2. : LE VIOLON DE CUPIDON, Concert conférence avec Luc Ferry, Isabelle Meyer, Mirella-VadevaRuaux et l’ensemble Art-en-ciel En tournée, puis à Genève Le combat ordinaire u 15.2. : NOLWENN LEROY, Tour de l'Eau. Auditorium Stravinski, 20h15 morges THÉÂTRE DE BEAUSOBRE à 20h (loc. 024/471.62.67) u 1er et 2.2. : MUMMENSHANZ 4 KIDS u 4.2. : OPERETTA de et m.e.s. Jordi Purtí, dir. David Costa u 5.2. : LA ROSE TATOUÉE de Tennessee Williams, m.e.s. Benoît Lavigne u 6 et 7.2. : FRÉDÉRIC RECROSIO u 9.2. : ALDEBERT, jeune public u 11.2. : LES GRANDS MOYENS de Stéphane Belaïsch et Thomas Perrier, m.e.s. Arthur Jugnot et David Roussel u 12 et 13.2. : HIER EST UN AUTRE JOUR de Sylvain Meyniac et Jean-François Cros, m.e.s. Eric Civanyan u 18 et 19.2. : MICHAEL GREGORIO neuchâtel THÉÂTRE DU PASSAGE. A 20h, di à 17h (loc. 032/717.79.07) u 2.2. : AU-DELÀ DES FRONTIÈRES. Orchestre des Pays de Savoie, dir. Nicolas Chalvin, TEDI PAPAVRAMI, vio- e n «Le combat ordinaire» © Guillaume Perret La Compagnie L’outil de la ressemblance repart en tournée avec son spectacle «Le combat ordinaire» - tiré de la bande dessinée de Manu Larcenet parue aux éditions Dargaud. C’est l’histoire du photographe Marco, une histoire qui nous propose une réflexion unique sur le passage à l'âge adulte, l'acceptation de soi et notre rapport au monde. Des escales sont agendées dans plusieurs théâtres de Suisse romande, avant que le périple ne se termine au théâtre du Loup. . 6 et 7 février 2014 au TPR de La Chaux-de-Fonds . 11 février 2014 au Théâtre de Vevey . 13 février 2014 au CO2 de Bulle . 20 février 2014 à l'Usine à Gaz de Nyon . du 26 février au 2 mars 2014 au Théâtre du Loup à Genève d a 93 m é m u 13.2. : YOUN SUN NAH, Jazz u 27.2. : UNE VIE SUR MESURE, de et avec Cédric Chappuis plan/ouates ESPACE VÉLODROME, sauf avis contraire (loc. 022/888.64.60) u 7.2. : PIERRE LAPOINTE, Concert u 13.2. : AL MENOS DOS CARAS par la Compagnie Sharon Fridman, Danse u 26.2. La Julienne : CABAN par le Theater De Spiegel, Ballade musicale pully n t st-julien u 4.2. : CAMILLE CLAUDEL, CORRESPONDANCES, m.e.s. Audrey Lamarque et Françoise Sliwka. L’Arande à 20h (rés. au +33 (0)4.50.75.07.54) st-maurice u 16.2. : GUERRE ET PAIX. Orchestre des Pays de Savoie, dir. Nicolas Chalvin, ESTELLE REVAZ, violoncelle (Honegger, Haydn, El Khoury). Théâtre du Martolet (infos.+33 (0)4.79.33.42.71) sierre LES HALLES à 19h30 (rés./loc. 027/722.94.22) u Du 19.2. au 1.3. : SEULE LA MER, de Amos Oz par le Théâtre en Flammes, m.e.s. Denis Maillefer. Création en résidence sion THÉÂTRE DE VALÈRE à 20h15, sauf mention contraire (loc. 027/323.45.61) u 5.2. : OPERETTA par le Cor de teatrem, m.e.s. Jordi Purtí SAISON 2013—2014 94 L’OCTOGONE, à 20h30 sauf mention contraire (loc. 021/721.36.20) u 6 et 7.2. : SOLOGRAPHIES, chor. Katarzyna Gdaniec et Marco Cantalupo, création, Danse u 13.2. : ERIK TRUFFAZ & ENKI BILAL, Concert Graphique u 14.2. : LES DEUX GENTILSHOMMES de Vérone de Shakespeare, m.e.s. Robert Bouvier, Théâtre u 18.2. Pour l'Art et le Lutrin : CYCLE 2 – TRIO NOTA BENE avec SHMUEL ASHKENASI et NABUKO IMAI (Rachmaninov, Dohnanyi, Schubert) u 20.2. : 3 LITS POUR 8 d'Alan Ayckbourn, m.e.s. Jean-Luc Moreau e JANVIER JE 23 – L’INSOLENCE DU PRINTEMPS de Marie Fourquet danse/théâtre DI 26 – TANGO SENSATIONS ME 29, JE 30 & VE 31 – JE SUIS VIEUX (PAS BEAUCOUP MAIS DÉJÀ) de Frédéric Recrosio Humour FÉVRIER ME 5 – OPERETTA par Corteatre Humour Musical VE 14 – VIVRE EST INCURABLE, C’EST MOURIR QUI PIQUE UN PEU par Noël Antonini MA 18 – LUNE AIR de Julien Cottereau Clown moderne JE 27 – PUSH UP de Roland Schimmelpfennig o u 14.2. : VIVRE EST INCURABLE, C'EST MOURIR QUI PIQUE UN PEU de et par Noël Antonini, m.e.s. Michèle Guigon u 18.2. : LUNE AIR de Julien Cottereau, m.e.s. Fane Desrues u 27.2. : PUSH UP de Roland Schimmelpfennig, m.e.s. Virginie Fouchault inspirée de Wolf Erlbruch. Par la Cie La Bocca della Luna. Église SteClaire, je 19h | ve-sa 20h | di 17h30 (rés. au 021 923 74 50) u 21.2. : ANAÏS RENCONTRE MALCOLM BRAFF, jazz, dès 12 ans u 22.2. : Midi, Théâtre! / TRACER LA VOIE, guide pratique par les Compagnies Frakt et Barbiturik thonon-évian villars s/glâne MAISON DES ARTS, ESPACE MAURICE NOVARINA à 20h30, sauf mention contraire (loc. 04.50.71.39.47 ou en ligne : billetterie.mal-thonon.org) u 3 et 4.2. / Espace des Ursules : HAUT DE GAMME par le Sagliocco Ensemble, m.e.s. Anne-Sophie Erichsen. Horaire : lun 3 à 14h30 / mar 4 à 14h30 et 19h u 8.2. / Grange au Lac à 20h, Evian : MANU KATCHÉ, Jazz u 11.2. / Publier-Amphion, Cité de l’eau à 20h : RÉCITAL À 40 par le Centre Chorégraphik Pôle Pik, dir. Mourad Merzouki u 11.2. / Publier-Amphion, Cité de l’eau à 20h : THOMAS FERSEN u 18.2. / Théâtre du Casino, Evian : BABX u 20.2. / Théâtre du Casino, Evian : ALEX BEAUPAIN u 25.2. / Théâtre du Casino, Evian : ARTAUD – BARRAULT d'Antonin Artaud et Jean-Louis Barrault, m.e.s. Denis Guénon u 27 et 28.2. / Espace Tully : P.P. LES P'TITS CAILLOUX par la Compagnie Loba, m.e.s. Anne Marcel. Horaire : jeu 27 à 14h30 / ven 28 à 14h30 et 19h u 28.2. / Grange au Lac à 20h, Evian : BRAD MEHLDAN TRIO, Jazz vevey THÉÂTRE. À 19h30, dim à 17h sauf mention contraire (rés. 021/925.94.94 ou L@billetterie) u 6.2. : Arts & Lettres. BAHAR ET UFUK DÖRNDÜNCÜ (Adams Schubert - Reich - Brahms) u 7.2. : OPERETTA de et m.e.s. Jordi Purti, dès 12 ans u 8.2. : L'ÉTUDIANTE ET MONSIEUR HENRI d'Yvan Calbérac, m.e.s. José Paul, dès 14 ans u 11.2. : LE COMBAT ORDINAIRE de Manu Larcenet, m.e.s. Robert Sandoz, dès 14 ans u 16.2. : PIERRE À PIERRE de et m.e.s. Rosa Díaz, El teatre de l'Home Dibuixat, dès 2 ans u 21 et 22.2. : Oriental-Vevey. LE GRAND POURQUOI, performancespectacle tout public, librement a g e ESPACE NUITHONIE, Salle Mummenschanz à 20h (loc. Fribourg Tourisme 026/350.11.00 / [email protected]) Nuithonie: 026 407 51 51 u Du 6 au 8.2. : MÄNNER STÜCK, dir. Et chor. Karine Jost, Tanztheater Karine Jost u Du 12 au 15.2. : CABARETS DES VILAINES de Nathalie Sabato, m.e.s. Valérie Bovet u 14 et 15.2. : ESPACE SCHENGEN de et m.e.s. Laura de Weck u 21 et 22.2. : CINÉMATIQUE, chor. Adrien Mondot, danse u 27 et 28.2. : AU RYTHME DE BÉNARÈS, Priscilla Brülhart Gauri et Fanny Marquet Meera, danse yverdon THÉÂTRE BENNO BESSON sauf mention contraire (loc. 024/423.65.84) u 1.2. : Soirée slam u 6.2. : LA ROSE TATOUÉE de Tennessee Williams, m.e.s. Benoît Lavigne u 11.2. : LORENZO SOULÈS, piano (NN) u 13.2. : SEULE LA MER d'Amos Oz, m.e.s. Denis Maillefer u 18.2. : LA TRATÉGIE COMIQUE, m.e.s. Eve Bonfanti u 20.2. : DU VENT… DES FANTÔMES par la Fabrique imaginaire u 21.2. : AU BORD DE L'EAU par la Fabrique imaginaire THÉÂTRE DE L’ECHANDOLE (loc. 024/423.65.84 ou 024/423.65.89 une heure avant le spectacle) u Du 6 au 8.2. : CAMUS & SCHMUTZ, humour u 15 et 16.2. à 14h et 17h : LE GRAND POURQUOI d'après Wolf Erlbruch, m.e.s. Muriel Imbach u 21.2. : BARBOUZE DE CHEZ FIOR, Anick Rody et Camille Stoll, violon, Laurence Crevoisier, alto, Sara Oswald, violoncelle n d a BOURLINGUER DE BLAISE CENDRARS MISE EN SCÈNE DARIUS PEYAMIRAS AVEC JEAN-QUENTIN CHÂTELAIN ÉQUIPE ARTISTIQUE JONAS BÜHLER GILLES LAMBERT, MICHEL ZÜRCHER COPRODUCTION THÉÂTRE VIDY-LAUSANNE / LE POCHE GENÈVE / COMPAGNIE ARGOS* THÉÂTRE ET LE SOUTIEN DU DÉPARTEMENT DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE DU CANTON DE GENÈVE & LA FONDATION CASINO BARRIÈRE MONTREUX THÉÂTRE LE POCHE www.lepoche.ch / 022 310 37 59 / location Service culturel Migros 10 FÉVRIER > 2 MARS 2014 CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE / PHOTOGRAPHIE AUGUSTIN REBETEZ LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE) LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD) PARTENAIRES MEDIAS : LEPROGRAMME.CH & NOUVELLES av ecetun gr and A ) (Histoire extrd’amour aordinaires fantastiques (Récits ) Olivia Csiky-Trnka, comédienne Jean-Quentin Châtelain, comédien