théâtre - Scènes Magazine

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molly bloom
au théâtre kléber-méleau
© Pascal Victor - Artcomart
ISSN 1016-9415
259 / février 2014
CHF. 10.-- 7 €
Théâtre
Danse
Théâtre
L’Ombre
Vous désirez ?
Seule la mer
Hans Christian Andersen
Jacques Vincey
Revue hip-hop
Amos Oz – Denis Maillefer
Céline Lefèvre – François Berdeaux
10 et 11 mars à 20h30
5 fév. à 19h
25 fév. à 20h
Théâtre
Théâtre
Oblomov
De Beaux Lendemains
Dorian Rossel-Cie STT
O’Brother Company
Russel Banks – Emmanuel Meirieu
28 fév. et 1er mars à 20h30
Du 11 au 14 fév. à 20h30
forum-meyrin.ch / Théâtre Forum Meyrin, Place des Cinq-Continents 1, 1217 Meyrin
Billetterie + 41 22 989 34 34 du lu au ve de 14h à 18h
Oblomov © Erika Irmler
Service culturel Migros Genève / Stand Info Balexert / Migros Nyon-La Combe
s o m m a i r e
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cine die / raymond scholer
cinémas du grütli / christian bernard
sous la loupe : the wolf of wall street / christian bernard
cinémathèque suisse en février / raymond scholer
sous la loupe : nymphomaniac (volume 1) / serge lachat
les films du mois / c. bernard, é. gür, s. lachat, j. roche
brèves : mary queen of scots, in the name of... / serge lachat
brève : the lunchbox / serge lachat
brève : fanny et alexandre / christian bernard
entretien : sébastien lifshitz & bambi / tuana gökçim toksöz
20 théâtre
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comédie de genève : mission / laurence tièche
comédie de genève : shitz / rosine schautz
forum meyrin : oblomov / claudia cerretelli
forum meyrin : de beaux lendemains & l’ombre
vidy-lausanne : 2e partie de saison / nancy bruchez
le poche genève : bourlinguer / laurence tièche
en tournée : les deux gentilshommes de vérone / r. schautz
saint-gervais genève : mémoires blessées / rosine schautz
kléber-méleau : molly bloom / david verdier
30 opéra
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entretien : john daszak / éric pousaz
portrait : sandrine piau / françois lesueur
portrait : dmitri hvorostovsky / christian wasselin
entretien : carine séchaye, alias hänsel / anouk molendijk
entretien : céline mellon, alias gretel / anouk molendijk
new york : norma & tosca / f. fredenrich, l. darbellay
mémento
avignon : madama butterfly & laïka, the spacedog / f. jestin
saint-étienne : ciboulette / françois jestin
lyon : norma & les contes d’hoffmann / françois jestin
monte-carlo : rheingold & la favorite / françois jestin
marseille : orphée aux enfers / françois jestin
nice : le freyschütz / françois jestin
montpellier : cosi fan tutte / françois jestin
milan : la traviata / gabriele bucchi
zurich : fidelio & les maîtres-chanteurs / éric pousaz
vienne : die zauberflöte, peter grimes, idomeneo / éric pousaz
berlin : falstaff, il trovatore, cosi fan tutte, la finta
giardiniera / éric pousaz
londres : les vêpres siciliennes & wozzeck / éric pousaz
nice : festival manca / pierre-rené serna
51 musique
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concours de genève : palmarès / fran
nyon et genève : quatuor signum / pierre jaquet
genève : l’orchestre de chambre de pologne / beata zakes
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portrait : sylviane deferne / yves allaz
portrait : estelle revaz / yves allaz
quatuor de genève : saison / christian bernard
agenda genevois / martina diaz
entretien : françois volpé & l’ocg / martine duruz
portrait : lars vogt / yves allaz
genève : quatuors hugo wolf, belcea et jerusalem / m. duruz
62 ailleurs
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63 danse
chronique lyonnaise & roi lear / frank langlois
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bfm : mémoire de l’ombre de ken ossola / e. rüegger
lausanne : béjart ballet & le mandarin / michel perret
cannes : festival de danse / bertrand tappolet
bonlieu annecy : rachid ouramdane & sfumato / b. tappolet
67 spectacles
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spectacles onésiens / firouz-elisabeth pillet
festival antigel / firouz-elisabeth pillet
marionnettes de genève / firouz-elisabeth pillet
théâtre am stram gram / firouz-elisabeth pillet
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ferme de la chapelle : linda naeff / françoise-hélène brou
cabinet d’arts graphiques : not vital / françoise-hélène brou
mémento beaux-arts : france
palais lumière, évian : joseph vitta - passion de collection
mémento beaux-arts : ailleurs
bologne : l’âge d’or de la peinture hollandaise
mémento beaux-arts : suisse romande
fondation de l’hermitage : le goût de diderot
mémento beaux-arts : suisse alémanique
fondation gianadda : beauté du corps dans l’antiquité grecque
berne : germaine richier / régine kopp
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théâtre de la colline : le canard sauvage / frank fredenrich
comédie française : psyché / julien roche
maison de la culture du japon : symphonie m / s. nègre
opéra de paris : le parc / stéphanie nègre
opéra : puritains pur jus / pierre-rené serna
sélection musicale de février / françois lesueur
chronique des concerts / david verdier
mémento théâtre
théâtre hébertot : le roi se meurt
mémento expositions
atelier grognard : les peintres du paysage provençal
90 les mémentos
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Signature
EDITO
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Frank Fredenrich, Jean-Michel Olivier,
Jérôme Zanetta
comité de rédaction
Christian Bernard, Serge Bimpage,
Françoise-Hélène Brou, Laurent
Darbellay, Frank Dayen, Martine
Duruz, Frank Fredenrich, FirouzElisabeth Pillet, Jérôme Zanetta
éditeur responsable
Frank Fredenrich
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collaborateurs
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Julie Bauer, James Berclaz-Lewis,
Nancy Bruchez, Gabriele Bucchi,
Claudia Cerretelli,
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Catherine Graf, Emilien Gür,
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Pierre Jaquet, François Jestin,
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Rosine Schautz, Raymond Scholer,
Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet,
Laurence Tièche Chavier, Tuana
Gökçim Toksöz, David Verdier,
Christian Wasselin, Beata Zakes,
François Zanetta, Valérie Zuchuat
maquette : Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
Qui veut perdre des millions ?
u temps de Balzac et de Rossini, il était de bon ton chez les financiers, banquiers, hommes politiques ou autres privilégiés de fréquenter les coulisses des lieux de spectacles, à la recherche d'artistes complaisantes, cantatrices ou principalement danseuses. En échange de
quelques rendez-vous, une certaine forme de confort était assuré aux bénéficiaires de cet intérêt, car nul ne se souciait à l'époque de retraite pour les intermittentes du spectacle : Sarah Bernhardt étant l'exemple le plus souvent cité
de cette tradition particulière qui n'a guère choqué pendant plus d'un siècle.
Dans l'entre-deux-guerre, sous l'impulsion sans doute d'une certaine évolution des moeurs, l'indulgence pour ce genre de comportement a progressivement disparu. Et c'est donc dès cette époque que le terme de « danseuse »
a pu qualifier telle ou telle publication achetée par quelque nabab désireux de
dépenser sa fortune. L'investissement était déjà risqué à l'époque, il est évident que cela ne s'est pas amélioré au siècle suivant; il est alors devenu fréquent de voir des personnalités connues et fortunées préférer s'offrir désormais... un magazine ou un journal. En France notamment, comme «nous
avons des valeurs et des principes», ce qui a été confirmé récemment, les
politiciens ont également fait en sorte que leur «comportement soit à chaque
instant exemplaire», ce que chacun a pu constater.
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Ainsi, en ce qui concerne la presse d'information, qu'il soit question de
quotidiens ou d'hebdomadaires, il ne passe pas une semaine sans que des
nouvelles de vente ou de rachat ne fasse l'bjet de supputations, le plus souvent sur un ton pessimiste. Ainsi, à titre d'exemple, on peut rappeler que Jeff
Bezos, fondateur d'Amazon, a affirmé que « dans vingt ans les journaux
imprimés sur papier auront disparus ». Si cette prédiction n'engage que son
auteur, il faut tout de même rappeler que c'est lui qui vient de racheter... le
Washington Post, ce qui doit tout de même causer quelques soucis à l'équipe
du quotidien universellement connu depuis l'affaire du Watergate. Plus
inquiétant encore concernant et la liberté de la presse, on peut noter que
selon l'acheteur – voire le mécène en l'occurrence – peut souvent être une
menace pour l'indépendance de la presse. Dans cette même capitale des
Etats-Unis, c'est le Washington Times qui est mis gratuitement à disposition
dans les hôtels, autrement dit le quotidien du Tea party financé par l'Eglise de
l'Unification(sic), autrement dit la secte Moon. En France, le quotidien de
Serge Dassault, le Figaro, est largement diffusé gracieusement dans les halls
d'hôtels et d'aérogares, distillant à qui veut bien en profiter la prose de l'UMP.
Plus près de nous, on sait que Christoph Blocher, non content de bénéficier
quand il le désire de fréquents passages à la télévision alémanique, a commencé à avoir des appétits en ce qui concerne la presse écrite, avec, nul ne l'ignore, des moyens financiers considérables, les Bâlois ont été les premiers à
le constater. L'achat d'une publication étant désormais quasiment sans espoir
de profit, comparable en cela à un rachat de club de football, on ne peut donc
qu'être sceptique quand aux motivations désintéressées d'éventuels acheteurs.
En Suisse romande, un quotidien a été récemment proposé à la vente : alors,
fluctuat nec mergitur ou... qui veut perdre des millions ?
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le cinéma au jour le jour
Cine Die
Bilan de 2013
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En essayant de classer les 556 films de toutes époques et provenances
que j’ai visionnés en 2013, je me suis rendu compte que le cinéma m’a comblé de bonheur au moins une centaine de fois et qu’il n’est nul besoin d’écouter les Cassandre pisse-vinaigre qui annoncent régulièrement la fin du 7e
Art. Est-ce à dire que je suis trop bon public ? En inspectant ma liste, vous
abonderez peut-être dans ce sens-là. Et vous serez peut-être nombreux à ne
pas voir vos films préférés parmi les miens. J’avoue que je n’ai pas compris
l’engouement de la critique mondiale (et pas seulement hexagonale) pour La
Vie d’Adèle de monsieur Kechiche, qui, après son chef-d’œuvre Vénus
Noire (2010), retombe pour moi dans le travers majeur de ses premiers
films : la tchatche interminable et collant à la réalité la plus banale
(Abdellatif est selon certains le cinéaste de la durée). Sous prétexte d’authenticité, le cinéma doit-il être documentaire ou mourir ? Le vrai restera-til le beau, s’il est étiré en longueur ? Je vous avoue tout de suite que je n’ai
jamais réussi à crocher à une série tv : est-ce pour les mêmes raisons d’allergie à la logorrhée ? To the Wonder de Terrence Malick est selon Positif
une œuvre trop adulte pour séduire les foules. J’adore Olga Kurylenko et j’ai
regardé ce film avec les yeux de Chimène. Pour moi, elle peut batifoler à
longueur de journée sur toutes les surfaces possibles et imaginables, même
sur une toile tendue à fleur de mer autour du Mont-Saint-Michel, mais cela
ne fait pas un film. Et lorsque Javier Bardem entame une homélie sur l’impossibilité de l’amour devant Dieu, c’est tout simplement puéril. Bref, le
côté philosophico-poétique de Malick n’a pas fonctionné cette fois-ci.
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couvre, à hauteur des petites gens, les signes avant-coureurs du nazisme, la
remilitarisation de la Rhénanie, la seconde Guerre mondiale, l’occupation
américaine, les années du miracle économique, puis fait un détour vers
Munich, où Hermann Simon fait des études de musique entre 1960 et 1970
(histoire de se plonger dans les mouvements sociaux et révolutionnaires de
l’époque) pour finir, au Hunsrück, avec la réunification de l’Allemagne et le
changement de millénaire. Au total, une durée de 3131 minutes ! Avec son
nouvel opus, l’octogénaire Reitz éclaire les conditions de vie des aïeux
Simon à l’époque du Vormärz, lorsque le Hunsrück faisait partie du royaume de Prusse et que les paysans devaient tribut aux hobereaux locaux pour
qui toute revendication libérale se devait d’être réprimée. Filmé dans un
noir-blanc digital somptueux, avec des touches de couleur imbriquées pour
des objets totémiques ou émotionnels (couronne de baptême, agate, louis
d’or, drapeau), le film s’attache particulièrement au personnage de Jakob,
fils du maréchal-ferrant Johann Simon : ce jeune autodidacte préfère l’apprentissage des langues et des civilisations au travail manuel, et entretient
même une correspondance avec Alexander von Humboldt. Il rêve de
l’Amazonie dont il étudie les peuplades et fait des plans sur la comète avec
l’amour de sa vie, la petite Jettchen. mais c’est son frère qui épouse la belle
et l’emmènera au Brésil. Déjà dans le premier Heimat, deux Brésiliens
appelés Simon surgissaient à Schabbach à la recherche de leurs ancêtres. La
boucle est donc bouclée. Jakob se concentrera sur autre chose, la première
machine à vapeur du village, par exemple, et sur Florinchen qui sait si bien
jouer du tuba. Rarement la mélancolie des occasions manquées et la nostalgie du lointain nous ont semblé aussi fortes au cinéma. Pourtant aucun distributeur suisse ne s’est intéressé à ce 4e volet.
Les 10 meilleurs (par ordre alphabétique)
1. Die Andere Heimat – Chronik einer Sehnsucht (Edgar Reitz)
Prodigieuse recréation d’un univers révolu, l’Allemagne rurale de
1842, lorsque la misère pré-industrielle fait mourir les enfants de diphtérie
et active le désir d’émigrer. Diégétiquement, l’action se déroule dans le
même village du Hunsrück, Schabbach (nom inventé par le cinéaste), où
nous avons déjà pu suivre les destins de membres de la famille Simon dans
trois précédentes sagas : Heimat – Eine Deutsche Chronik (1984), Die
Zweite Heimat – Chronik einer Jugend (1992) et Heimat 3 – Chronik
einer Zeitenwende (2004). Rappelons que leur histoire commence en 1919
avec le retour de Paul Simon, échappé des tranchées, à la forge paternelle et
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2. Django Unchained (Quentin Tarantino)
En attendant 12 Years a Slave de Steve McQueen, récit ultraréaliste de
la vie d’esclave sur les plantations de Louisiane, le film de notre affreux Jojo
préféré s’offre comme une gifle revancharde à Hollywood qui a constamment balayé la servitude noire sous le tapis hypocrite de la bienséance.
L’expédition nocturne d’un proto-KuKluxKlan qui expérimente les occultations faciales avec des sacs de jute troués vaut son pesant de jouissance et
Leonardo di Caprio fait une répétition générale pour le rôle d’ordure intégrale qu’il semble affectionner ces temps-ci.
3. Gravity (Alfonso Cuaron)
Le tour de force des plans séquence qui respirent dans un décor (où
toute respiration hors combinaison est impossible) créé de toutes pièces à
partir de térabytes pose un étalon pour les films à venir.
Martin Haberscheidt et Antonia Bill dans «Die andere Heimat»
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Don Johnson dans «Django Unchained»
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4. The Immigrant (James Gray)
Dans cette complainte sur l’exploitation des plus faibles par les profiteurs de tous bords dans le New York du début du 20e siècle, les pourris ne
sont pas ceux qu’on croit. Le proxénète est un bon patron d’entreprise et
trouve sa rédemption dans l’amour pur qu’il porte à la petite Polonaise,
laquelle est prête à toutes les humiliations pour sauver sa sœur poitrinaire.
Les vraies ordures sont les bons catholiques, comme l’oncle des sœurs, les
apôtres de la morale et les flics pourris. Gray est le dernier des romantiques.
l’ouverture au fond du Pacifique est confortablement cachée aux yeux des
humains. Mais allez expliquer un concept de physique à un littéraire…il
bâille dès la première syllabe ! Le genre SF est suspect a priori, le genre des
monstres géants à la japonaise doublement. Mais pour peu qu’on soit orienté vers le côté ludique, on peut prendre un plaisir fou à ces combats titanesques, où des quartiers entiers de Hongkong sont dévastés de façon aussi
réaliste que possible et où les humains doivent conduire des robots géants
pour tenir tête aux attaquants. Il n’y pas de mot en français pour awesomeness, mais Pacific Rim en est le paradigme. C’est aussi le film vers lequel
semble avoir tendu tout le genre des kaiju eiga de notre enfance depuis l’ancêtre Gojira/Godzilla (1954, Ishiro Honda). Et c’est à mille lieues des infantiles Transformers (2007/11) de Michael Bay: dans Pacific Rim, la victoire
n’est possible qu’à force de sacrifices.
7. Shokuzai (Kiyoshi Kurosawa)
Voir CINE DIE du numéro de mai 2013
8. La Vénus à la Fourrure (Roman Polanski)
Voir CINE DIE du numéro de juillet-août 2013
Daniel Day-Lewis est «Lincoln»
5. Lincoln (Steven Spielberg)
Dans ce film-cathédrale (je choisis le terme parce qu’il englobe à la fois
le côté quasi religieux de l’entreprise et son côté Gesamtkunstwerk),
Spielberg se concentre sur la dernière année de Lincoln, sur sa lutte pour
faire passer le XIIIe amendement qui va abolir l’esclavage. En passant, il
recrée tout l’environnement urbain, politique, civil, militaire, linguistique,
mental, moral, vestimentaire, physique et psychique, en investissant chaque
protagoniste (et il y en a des centaines) d’une identité propre, à un degré
comme aucun film historique ne l’a fait jusqu’à maintenant. À commencer
par une des plus bluffantes interprétations que Daniel Day-Lewis ait jamais
données, avec une pose de la voix et de l’échine extraordinaire, communiquant instantanément la détermination, mais aussi l’inquiétude et la lassitude du président. Peut-être le meilleur film de Spielberg.
9. The Wolf of Wall Street (Martin Scorsese)
En appliquant aux banquiers le même traitement halluciné et foisonnant
qu’aux gangsters (Goodfellas (1990) et Casino (1995)), Scorsese met les
premiers sur le même niveau que les seconds et signe son meilleur film
depuis The Departed (2006). Même si le mage du pump and dump incarné
par Di Caprio se donne comme jovial protecteur des intérêts de ses associés,
il n’hésite pas à les trahir in fine pour échapper aux sanctions judiciaires.
Nulle rédemption n’est requise pour qui ne comprend ni la notion d’amitié
ni celle de la morale la plus élémentaire. Seul compte le profit fait sur le dos
d’autrui.
6. Pacific Rim (Guillermo del Toro)
Sur ce film pour « ados boutonneux », la critique a écrit les pires âneries : p.ex. « les kaiju seraient les descendants lointains de nos dinosaures »
(Positif). Alors que leur origine est clairement signalée comme extra-terrestre : ils surgissent de ce que les physiciens appellent un « trou de ver », dont
L'attaque de la maison de Ben Laden dans «Zero Dark Thirty»
10. Zero Dark Thirty (Kathryn Bigelow)
A l’instar de The Hurt Locker, où elle avait étudié le travail des démineurs en Iraq avec un souci de documentariste, Bigelow décrit ici la traque
et l’élimination de Ben Laden en collant autant que possible aux réalités de
l’investigation et du terrain. Ce faisant, elle montre des choses désagréables
qui ont fait hurler les critiques qui utilisent l’adjectif « étasunien ». Comme
je ne le l’utilise pas, je n’ai qu’admiration à la fois devant le travail des
enquêteurs et celui de la cinéaste.
Au mois prochain
Raymond Scholer
Charlie Hunnam et Rinko Kikuchi dans «Pacific Rim»
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les cinémas du grütli
Guillaume Brac,
les frères Coen
Le premier long métrage de Guillaume Brac, Tonnerre (2013), sélectionné
l’été dernier à Locarno, sera dès le 5 février aux Cinémas du Grütli.
L’occasion de découvrir un cinéaste attachant et subtil, déjà remarqué
avec Un Monde sans femmes, moyen-métrage sorti en 2012 et
disponible en DVD.
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Un Monde sans femmes lui avait valu d’être justement rapproché du Renoir de Partie de
campagne, du Rohmer de Conte d’été ou
Pauline à la plage, et surtout du Rozier de Du
côté d’Orouët et Maine Océan. Rien moins ! Et
puis on découvrait déjà dans ce film Vincent
Macaigne, excellent dans le rôle principal, que
l’on retrouve dans Tonnerre.
Etonnant, le parcours de Vincent
Macaigne: alors qu’il poursuit depuis plus de 10
Tonnerre de Guillaume Brac. Ce n’est évidemment pas un hasard, ces films ayant en commun
de chercher à dire, chacun à sa façon, les errements du cœur, de la raison et des destins propres à une génération qui cherche sa place tant
mal que bien dans la France d’aujourd’hui.
Première bonne surprise, on quitte pour
une fois le pavé parisien pour se retrouver, en
hiver, à Tonnerre (Yonne), 5000 habitants, LA
province. Maxime (Vincent Macaigne), rocker
intermittent dans
la quarantaine, y
est venu trouver
refuge pour deux
mois chez son
père (Bernard
Menez, impressionnant), ayant
dû sous-louer son
appartement parisien. Il est juste
assez
connu,
grâce à un album,
pour être interviewé par la jeune
Mélodie, 25 ans,
pour une radio
locale. Maxime le
Vincent Macaigne dans «Tonnerre»
doux, l’hésitant,
est attiré par
ans une carrière de comédien, auteur et metteur Mélodie, séduite par sa gentillesse. Ils seront
en scène de théâtre invité à Chaillot et Avignon, amants, passionnément. Mais l’ivresse des
il se retrouve être l’acteur emblématique d’une débuts ne durera pas. Mélodie est rattrapée par
nouvelle génération de cinéastes qui tous ont vu ses doutes, sa peur d’affronter (elle n’a pas osé
leur premier long-métrage sélectionné d’emblée aller passer un examen), son pessimisme (“je
à Cannes ou à Locarno en 2013. On le retrouve t’amuse, tu aimes bien me baiser, tu me quitteainsi tenir un rôle principal dans La Fille du 14 ras dès que tu en auras marre”) sa difficulté à
juillet (Antonin Peretjatko), La Bataille de choisir entre Maxime et son ancien amant, Ivan,
Solférino (Justine Triet), 2 automnes 3 hivers un footballeur dans l’équipe locale. Commence
(Sébastien Betbeder) et, justement, ce très beau pour Maxime la traversée des affres de la pas-
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sion et de la jalousie.
Le très grand charme du film tient à la
conduite buissonnière d’un récit qui prend tout
son temps, se construit par petites touches
rétrospectivement significatives, ne craint pas
de s’égarer en toute liberté dans des détails à
forte valeur documentaire mais pas vraiment
nécessaires à l’avancée de l’histoire. D’ailleurs
quelle histoire ? Il y en a deux en fait, finement
entrelacées : celle du triangle amoureux
Maxime-Mélodie-Ivan, conduite au présent, qui
frôle la tragédie, et celle des rapports de
Maxime et de son père, faits d’affection, mais
pas seulement car il y a entre eux un passé qui
ne passe pas, du côté du fils en tout cas. Ce n’est
qu’aux deux-tiers du film que Maxime éclate
brutalement : “tu sais que tu as détruit Maman
pour une gamine qui t’a largué ensuite comme
une merde ?”. L’affrontement qui suit montre un
Bernard Menez comme on ne l’avait jamais vu,
à mille lieues des personnages falots qu’il a trop
souvent incarnés.
Brac rend totalement crédible l’histoire de
ces personnages sans méchanceté, simples victimes de leurs sentiments contradictoires. La fin
du film, dans un magnifique retournement des
sentiments de chacun, évite la tragédie vers
laquelle tout semblait conduire, et suggère un
ordre sous-jacent au chaos des passions.
Joel et Ethan Coen
On s’en voudrait de ne pas signaler, toujours en février, la rétrospective quasi complète
(15 films sur 16) de l’œuvre des Coen. Aux dernières nouvelles, seul manquerait à l’appel leur
premier film, Blood Simple. Occasion exceptionnelle de refaire le parcours d’une œuvre
joyeusement féroce qui revisite les principaux
genres du cinéma classique américain : la comédie burlesque (Arizona Junior), le film de
gangsters (Miller’s Crossing), la comédie sociale matinée de fantastique (Barton Fink), …
Comme l’écrit Michel Ciment, “il y a du
Swift chez ces humanistes qui s’interrogent sur
l’absurdité de la condition humaine dont certains représentants incarnent la stupidité à l’état pur. Il y a aussi du Kafka dans leurs intrigues labyrinthiques où le drame côtoie le burlesque.” Ce qui n’exclut pas une réelle tendresse pour les perdants (Barton Fink, A Serious
Man, Inside Llewyn Davis).
Christian Bernard
Plus d’informations sur : www.cinemas-du-grutli.ch/
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show, comme Jordan Belfort emballe ses interlocuteurs ? S’expliquerait alors l’impression
d’être brutalement ramenés sur terre, dans la
très émouvante scène finale, qui voit un Jordan
Belfort d’après la chute s’adresser à un public
de gens normaux, comme vous et moi, grands
Dès les premières minutes de The Wolf of Wall Street on a le sentiment de
absents du film jusque-là.
retrouver Scorsese reprenant les formules des Affranchis ou de Casino :
Comme toujours avec Scorsese, les
même retour sur la trilogie fric, sexe et dope, mêmes héros inspirés de
seconds rôles sont impeccables et les scènes de
personnages ayant réellement existé, même montage virtuose et vitaminé,
face à face sont des modèles : l’initiation de
même recours à des musiques d’anthologie.
Belfort par un trader plus qu’allumé (excellent
Matthew McConaughey), la tentative très diplomatique de corruption d’un agent du FBI par un
Et puis, rapidement, on se rend à l’éviden- le morceau. Toujours en représentation, il est, Belfort maître en suggestion, sont, entre autres,
ce : la formule fonctionne toujours aussi bien et plus encore que les mafieux des films précé- de grands moments. On appréciera particulièreThe Wolf of Wall Street est digne des Affranchis dents, un acteur et un metteur en scène. Comme ment sous nos latitudes le déplacement de
ou de Casino, autrement dit un grand Scorsese Scorsese en somme. Le show permanent qu’est Jordan Belfort à Genève. N’aimant pas prendre
que nos petits-enfants montreront à leurs la vie des golden boys, l’étalage de tout ce que l’avion, il absorbe une quantité de qualuuds en
enfants dans quelques
plus de l’habituelle coke
décennies.
qui le mettent dans un tel
Le film est une
état que les hôtesses de
adaptation du roman
Swiss auront le plus grand
autobiographique du
mal à le maîtriser (à noter
même nom écrit par le
que leur attitude pincée
trader Jordan Belfort à
offre un contraste refroisa sortie de prison en
dissant par rapport aux
2005. Belfort est un surtomberaux de prostituées
doué de la vente, qui
vues jusque-là). Quant
aurait été capable de
aux scènes sur fond de jetvendre des skis dans le
d’eau mettant aux prises
Sahara, a fortiori des
Belfort et un banquier
actions pourries à des
genevois (Jean Dujardin
clients naïfs en toute
jonglant avec deux lanillégalité. Bienvenue
gues), elles confirment
dans le monde de la
qu’il est imprudent pour
finance, en tous cas
un citoyen US d’amener
Leonardo DiCaprio (Jordan Belfort) dans «The Wolf of Wall Street»
celui des traders de Wall
son argent non-déclaré en
© 2013 Universal Pictures Int. Switzerland
Street, où la testostérone
Suisse.
Last but not least, le choix des musiques,
est partout, le dollar la seule valeur, et l’entuba- l’argent leur permet (fêtes, orgies, yachts, etc.)
ge du client (record absolu de l’utilisation de est la matière même du film. Pour eux, l’argent- dont on sait l’importance dans les films de
“fuck”) the name of the game.
roi est là pour être gagné et aussitôt dépensé Scorsese, constitue, comme celui de Casino un
Il y a encore et toujours, ça n’est pas nou- sans compter, transformé en signes extérieurs best of de ce qui s’est fait de mieux depuis un
demi-siècle avec un accent particulier mis sur le
veau, quelque chose de fascinant dans la maniè- de richesse dans un potlatch en circuit fermé.
re dont Scorsese rend fascinant justement, et par
Témoin de ce show, le spectateur, lui, se rock, country rock et rhythm and blues. Pas étonmoments attachant, un personnage bigger than trouve partagé entre le pur plaisir de consom- nant si on sait que la supervision musicale en a
life, monstrueusement amoral, destructeur et mer ces signes de richesse pour vulgaires qu’ils été confiée à Robbie Robertson, collaborateur de
auto-destructeur, à l’image du système dont il soient, et le plaisir non moins grand de partager longue date de Scorsese, figure majeure de la
fait la conquête. C’est que le personnage est une réflexion sur la place de l’argent aux Etats- scène musicale américaine jusqu’à aujourd’hui,
complexe, intelligent, séducteur bien sûr, impi- Unis aujourd’hui et le pouvoir dont disposent guitariste fondateur du Band, un temps groupe de
toyable, généreux, fidèle en amitié, capable de ses détenteurs (Belfort en American Hero fasci- Bob Dylan, dont le concert d’adieu a été filmé
trahison, contradictoire, humain donc. Il faut sant). Le spectateur est d’autant plus partie pre- par Scorsese (The Last Waltz). Indifférent au
dire que ce personnage à facettes est incarné par nante de ce carnaval qu’il est habilement mis à souci de “faire époque”, il s’offre le luxe de monun Leonardo DiCaprio totalement investi et qui distance par Scorsese en un cocktail réjouissant ter la chute et l’arrestation de Belfort situées au
tient là peut-être son meilleur rôle à ce jour.
de cynisme et d’humour déluré (on rit beau- début des années 2000 sur Mrs. Robinson de
Jordan Belfort est un personnage dont la coup) porté par la voix off de Belfort. Et si Simon and Garfunkel sorti en 1968…
Christian Bernard
vie consiste à convaincre, à motiver, à emporter Scorsese nous emballait avec ce show dans le
sous la loupe
The Wolf of Wall Street
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février à la
Cinémathèque suisse
Chris Marker
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La rétrospective du seul vrai essayiste de
cinéma, Chris Marker (son vrai nom est
Christian-Hippolyte-François Bouche-Villeneuve),
bat son plein. Sur les quelque 50 titres répertoriés, on peut en voir 22, ce qui n’est pas mal du
tout. Le choix nous semble bien équilibré, d’autant plus que certains ne nous sont familiers que
par ouï-dire. Incontournables : Le Joli Mai
(1963), le premier mois de mai après la fin de la
guerre d’Algérie, laisse parler des Parisiens qui
respirent une paix et un bonheur retrouvés,
conscients toutefois que la réalité n’est pas si
rose : les salaires misérables, la violence policière, les inégalités persistent. Lettre de Sibérie
(1958), tourné au milieu de nulle part, c’est-àdire à Iakoutsk, voit Marker fasciné par le chamanisme et sa ténacité à résister au collectivisme. Le commentaire humoristique vaut son
pesant d’or. La Sixième Face du Pentagone
(1968) s’attache à rendre compte « à chaud » de
la marche du 21 octobre 1967 sur le Pentagone,
organisée pour protester contre la guerre du
Vietnam. Le film détaille les multiples visages
de la contre-culture bigarrée en marche : depuis
les membres du parti nazi et des partisans du
Che aux anciens combattants, en passant par des
hippies exorcisant le Pentagone, le trio de folk
« Peter, Paul & Mary » et des célébrités comme
Norman Mailer. Le Fond de l’Air est rouge
(1977/1996), fait, en 3 heures épico-dialectiques, le point sur les mouvements révolutionnaires (qui ont balayé le monde dans les années
soixante et septante) et leur déclin. Dans A.K.
(1985), Marker se pâme devant le travail de
Kurosawa pendant le tournage de Ran. Dans
Sans Soleil (1983), il évoque en contrepoint
l’industrialisation japonaise et le sous-développement africain. Pour tous les autres titres, prière de se rapporter au bulletin de la
Cinémathèque Suisse.
Après l’Apocalypse
Le cycle de films post-apocalyptiques est
censé accompagner l’exposition « Stalker –
Expérimenter la Zone » à la Maison d’Ailleurs
d’Yverdon. Si la vingtaine de films englobe un
bon nombre de titres vus à satiété, depuis Le
Dernier Combat (1983, Luc Besson) et Twelve
Monkeys (1995, Terry Gilliam) à la trilogie
Mad Max (1979-1985, George Miller) et On
the Beach (1959, Stanley Kramer), il y en a
quelques-uns qui n’ont strictement rien à voir
avec le sujet. Il n’y a pas trace d’une apocalypse dans Black Out (1970) de Jean-Louis Roy.
Peut-être que les programmateurs ont confondu
avec Le Troisième Cri d’Igaal Niddam (1970),
où dix personnes assurant l’entretien d’un abri
atomique sont prises au piège lorsque l’alarme
retentit, que les portes se ferment et que la com-
munication avec l’extérieur est coupée net. On
peut au moins supputer qu’il y a eu une sorte
d’apocalypse. Selon imdb.com, le film de
Niddam est un drame de parents qui ont des
enfants atteints de fibrose cystique ! Comme
quoi, il ne faut pas se fier aux oracles du web :
ceci explique peut-être cela. Il n’y a pas non
plus eu d’apocalypse dans Delicatessen (1990,
Jeunet et Caro) : bien sûr que imdb qualifie la
société bizarro-surréaliste du film de post-apocalyptique et, hop, les copieurs copient. De
même, Soylent Green (1973, Richard Fleischer)
et THX 1138 (1971, George Lucas) ne sont que
des extrapolations du problème de la surpopulation. Ces films auraient pu être remplacés par de
vrais récits post-apocalyptiques rares, comme A
Boy and his Dog (1975, L.Q. Jones), Malevil
(1981, Christian de Chalonge), The Ultimate
Warrior (1975, Robert Clouse) ou encore Fin
d’août à l’hôtel Ozone (1967, Jan Schmidt),
qu’on n’a plus vus depuis belle lurette. On peut
cependant savoir gré à la Cinémathèque de
montrer enfin le seul space opera suisse, Cargo
(2009) de Ivan Engler et Ralph Etter : mais
pourquoi ce film, qui n’est jamais sorti en
Suisse Romande, n’a-t-il pas droit à une avantpremière, rite événementiel tant prisé par la
Cinémathèque ? Sans doute parce qu’il a déjà
eu les honneurs de la télévision. On peut aussi
être content que, parmi les adaptations de I am
Legend de Richard Matheson, le rare The Last
Man on Earth (1964, Ubaldo Ragona & Sidney
Salkow) avec Vincent Price soit montré au lieu
du bien connu The Omega Man (1971, Boris
Sagal) avec Charlton Heston. Reste à savoir si
nous sera servie la version italienne (horreur !)
ou l’anglaise. Depuis que la Cinémathèque a
montré dernièrement Travels with my Aunt
(1972) de George Cukor (avec Maggie Smith !)
en espagnol …. on s’interroge! Caveat emptor !
Avant-gardes russes et sport
Pendant les JO de Sotchi, vous pouvez
prendre un bain de cinéma soviétique coulé par
François Albera : Il n’y a rien à jeter. Les
Aventures Extraordinaires de Mister West
(1924, Lev Kouléchov), satire des préjugés antisoviétiques occidentaux et La Poupée aux
millions (1931, Serge Komarov) sont des comédies délicieuses, Seule (1931, Trauberg &
Kozintsev) une belle histoire du dévouement
d’une enseignante aux prises avec les traditions
locales dans le lointain Altaï.
Raymond Scholer
«La Jetée» de Chris Marker
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Plus d’informations sur : www.cinematheque.ch/
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sa narration empêchent à mon goût toute pédanterie et tout intellectualisme froid, même si le
dispositif empêche les envolées romantiques
(cf. la fin de la première partie où Joe crie qu’elle ne ressent rien alors qu’elle croit avoir trouvé
l’amour dont manquait sa sexualité).
Mais il ne faut pas croire non plus que le
film ne touche jamais le cœur du spectateur.
Ainsi le chapitre 4 entièrement consacré à la
A force de s’attendre, influencés par la rumeur, à un film pornographique,
mort du père (amour et mort, forcément !) moncertains seront peut-être surpris de trouver en lieu et place un vrai projet
tre parfaitement comment fonctionne le film :
d’artiste et de philosophe.
dans un premier temps, sur son lit d’hôpital, le
père rassure sa fille (il sait philosopher et,
comme médecin, il sait ce qu’est la mort pour
Certains films sont précédés d’une rumeur, gré de chapitres clairement intitulés, ce qui avoir vu passer de vie à trépas de multiples
d’un buzz, qui empêche de les voir pour ce donne d’entrée de jeu une dimension littéraire patients), mais dans un deuxième temps, il fait
qu’ils sont. Ainsi, Nymphomaniac est tout au film avec ce que cela suppose de refus du une terrible crise d’angoisse, doit être attaché et
entier soumis à un regard qui attend un film por- naturalisme. Seligman recueille ce témoignage sa fille le retrouve mort et souillé de ses déjecnographique. Lars von Trier, en vieux provoca- sans juger, essayant au contraire de persuader tions. Scène terrible dont le cinéaste modifie
teur qu’il est (cf. le choix du titre !), doit s’en Joe qu’elle n’est pas mauvaise. Il occupe en encore le ton à la fin puisque Joe jouit en assisamuser et en espérer peut-être un nombre plus quelque sorte une position de psychanalyste tant à la toilette mortuaire de son père !
élevé de spectateurs.
sans visée thérapeutique, commentant le récit
Réaction que, dans le chapitre suivant intiOr le film, s’il est bien pornographique au qui lui est fait de remarques qui en élargissent le tulé « The Little Organ School », Seligman défisens étymologique du terme dans la mesure où propos et témoignent de son immense culture : nit comme fréquente avant de la mettre en peril montre des scènes sexuellespective. C’est dire que
ment explicites, ne l’est auculoin d’offrir une pure sucnement dans ses effets :
cession de performances
jamais il ne vise à exciter
sexuelles, le film, par le
sexuellement son spectateur,
dialogue avec Seligman,
bien au contraire.
replace le comportement
On demande souvent au
de Joe dans un contexte
critique ou à ceux qui l’ont vu
socio-politique, histos’ils ont aimé tel ou tel film.
rique, musicologique et
Le cinéma de Lars von Trier
philosophique ! C’est
échappe à ce type de jugeainsi que la multiplicament. Il s’offre comme un vrai
tion des partenaires
projet d’artiste (et de philosoamène à parler polyphophe) avec une mise en forme
nie et à évoquer la divine
Joe (Charlotte Gainsbourg) dans «Nymphomaniac - Part 1» © Ascot Elite
rigoureuse, mais ne se préocmusique de Bach et
cupe pas de plaire. Il est même souvent déceptif ainsi, il compare l’apprentissage de la séduction Palestrina, mais aussi à évoquer les mathémaau sortir du film pour se dévoiler dans le temps. à celui de la pêche à la mouche (mais ce qui est tiques avec la « suite » de Fibonacci…
Cela vaut d’autant plus que mon commentaire dit vaut aussi comme art de fasciner le lecteur
Certains trouveront cette manière de parler
ne porte que sur la première partie du film. ou le spectateur), ou encore il compare les expé- de sexualité irritante d’intellectualisme. Or il ne
Mais le dispositif ne devrait guère changer pour riences sexuelles de Joe à la polyphonie dont il faut jamais oublier le caractère ludique de ce
la 2ème partie et ce commentaire ne devrait pas retrace l’histoire. Ainsi, il est tout esprit et elle dialogue (qui fait penser au dialogues philosoêtre radicalement modifié après visionnement est tout corps, il est théorie, elle est pratique. phiques du 18ème siècle) : jamais le film ou son
de celle-ci.
Ensemble, ils vont faire du récit de Joe une réalisateur ne prétend formuler des vérités,
réflexion sur la sexualité, la nature, la mort. Aux encore moins LA vérité. Sinon peut-être cellePar un soirée pluvieuse et froide, un convictions initialement simplistes de Joe ci : le plaisir (quand il existe) du sexe n’est rien
homme d’âge moyen, Seligman, découvre une (amour = sexe + jalousie), sa vie et Seligman sans le plaisir de parler de sexe !
femme qui gît sur le sol après avoir été visible- par son immense culture vont donner de la comSerge Lachat
ment rouée de coups. Il la ramène chez lui, soi- plexité, de la subtilité.
gne ses blessures et veut appeler la police, ce
Le dispositif peut sembler « abstrait » et
qu’elle refuse énergiquement, arguant qu’elle aride, il est au contraire très riche dans la NYMPHOMANIAC (Volume 1) de Lars von Trier
est nymphomane, donc « mauvaise », comme en réflexion proposée et souvent drôle. Cet humour avec Charlotte Gainsbourg, Stellan Skarsgard, Stacy
témoigne sa vie sexuelle qu’elle va raconter au constant et la légèreté avec laquelle Joe conduit Martin…
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Nymphomaniac
(Volume 1)
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Les films du mois
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Marion Cotillard et Joaquin Phoenix dans «The Immigrant» © 2013 Anne Joyce
THE IMMIGRANT
de James Gray, avec Marion Cotillard, Joaquin
Phoenix, Jeremy Renner (USA, 2013)
The Immigrant est à la fois un mélodrame
confinant à la tragédie, une critique sur fond d’épopée du rêve américain, et le film d’un grand
cinéaste dont la thématique récurrente est l’identité et ses clivages. On retrouve d’emblée avec
The Immigrant la marque des grands mélos de
l’histoire du cinéma, qu’ils soient signés Griffith,
Sirk, ou Minnelli : la totale croyance du cinéaste,
loin de tout calcul, à l’histoire racontée, celle de
personnages archétypaux (le Méchant, la
Victime) figures du Bien et du Mal, histoire de
chute, de rédemption, de pardon. Mais s’agissant
de James Gray, ces figures se complexifient pour
progressivement laisser apparaître des identités
multiples, contradictoires, comme le sont toutes
les identités.
A Ellis Island, porte d’entrée des immigrants venus d’Europe, Ewa Cybulska (Marion
Cotillard), jeune Polonaise ayant débarqué avec
sa sœur, est en difficulté. On s’apprête à lui refuser l’entrée aux Etats-Unis au prétexte qu’elle
aurait eu une conduite débauchée pendant la traversée, alors que sa sœur est mise en quarantaine
pour une possible tuberculose (on est dans les
années 20). Bruno Weiss (Joaquin Phoenix), un
proxénète habitué du lieu où il vient guetter ses
proies avec la complicité d’un agent de l’immi-
a
gration, intervient providentiellement pour lui
permettre de débarquer à New York. Manipulateur, séducteur, il apporte à Ewa l’aide que
celle-ci ne trouve nulle part ailleurs (un oncle qui
a déjà fait son trou refusant d’héberger une sanspapier). Grâce à lui, elle sera réconfortée, nourrie, logée. Il lui propose d’entrer dans la troupe
de danseuses qu’il dirige et qui est hébergée dans
un cabaret. Le prix à payer se révèle rapidement.
Terrorisée par la violence dont peut soudain être
capable Bruno, Ewa accepte ce qui lui apparaît
être le seul moyen d’atteindre son butc: retrouver
sa sœur. Mais comme on peut s’y attendre avec
James Gray, les choses ne demeurent pas si simples. Bruno le manipulateur, le bonimenteur, est
sincèrement amoureux de celle qu’il avilit, d’où
ses soudains accès de générosité, mais aussi de
jalousie. Jalousie stimulée par l’apparition d’un
cousin, Orlando (Jeremy Renner), illusionniste
de profession, amoureux d’Ewa qu’il veut arracher à sa situation et emmener en Californie.
Leur rivalité d’un archaïsme biblique est l’occasion pour James Gray de revenir sur ce qu’il ne
cesse de décrire de film en film : l’identité au
sein de la famille et les ressemblances malgré
lesquelles – ou à cause desquelles - frères, cousins etc. ne cessent de s’affronter. Ewa quant à
elle, dépassée dans un premier temps par la violence de Bruno, s’endurcit dans sa condition et
ne répond en rien à ses avances, parfaitement au
clair sur le fait qu’elle ne l’utilise qu’à cause de
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sa sœur. Elle trouve sa force dans cette fidélité et
dans la prière (magnifique Marion Cotillard filmée comme une Madone de Bellini). Cette histoire à trois finira en tragédie portant chacun audelà de lui-même dans des retournements bouleversants : pour Bruno, la conscience de sa vilenie, la volonté de réparer, l’appel du châtiment.
Pour Ewa, le pardon accordé. Ainsi le rachat et le
salut par la prière ou le pardon apparaissent
comme l’envers du rêve américain qui ne se
conquiert, le film le montre avec une force rare,
que dans le rapport de force et la maîtrise des
apparences, avec son cortège de contraintes, de
corruption, de violence et de racisme. Tout cela
est offert avec un formidable sens du détail parlant. Ainsi Bruno, chassé du cabaret avec ses
filles, les propose aux passants dans Central Park
comme “les filles des Morgan, des Astor…”, tandis que les candidats à l’immigration, retenus sur
la sinistre Ellis Island, ont droit à un somptueux
spectacle de Noël, l’Oncle Sam leur offrant
d’emblée un aperçu de son savoir-faire en matière de show…
Remarquable travail de reconstitution, précis et réfléchi, avec une mention particulière pour
le chef-opérateur Darius Khondji dont la palette
s’étend des tons chauds (le cabaret) au sépia des
photos de l’époque, donnant un sentiment physique de la précarité. Les musiques elles aussi
font sens dans ce film où rien n’est laissé au
hasard : lorsqu’on se retrouve dans les égouts
sous Central Park pour une chasse à l’homme
entre Bruno et la police, scène à la limite du fantastique, des cordes wagnériennes issues de la
Tétralogie (autre mélo) se font discrètement
entendre. James Gray ne crée pas seulement un
effet saisissant, il indique sans fausse modestie à
quelle altitude il convient de situer ce film au
souffle puissant.
Christian Bernard
L’AMOUR EST UN CRIME
PARFAIT
d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu, avec Mathieu
Amalric, Karin Viard, Maïwenn, Sarah Forestier,
Denis Podalydès… France-Suisse 2013
« Entre chien et loup » : l’expression (qui est
aussi le nom d’une des sociétés de production du
film !) pourrait servir de sous-titre à ce film : en
effet, dès la première scène, sur une route de
montagne les phares de la voiture conduite par un
Marc (Mathieu Amalric) en état second vont
fugacement éclairer (et ce ne sera pas la seule
fois dans le film) un loup ou un chien. Un premier plan qui donne déjà la couleur du film : une
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atmosphère nocturne, presque de conte, un paysage de montagne, avec une sensation de danger
imminent et une excitation sexuelle qui enivre les
protagonistes. Le film est très fidèlement adapté
du roman de Philippe Djian Incidences (2010) :
pas une scène et pas un personnage du livre ne
sont absents du film, au point que dans un premier temps je me suis demandé ce que les
Larrieu avaient pu ajouter au roman.
Indéniablement, l’univers des frères cinéastes et
celui du romancier ont en commun un goût pour
des histoires aux atmosphères troubles et sexuellement électriques, pour des personnages aux
pulsions incontrôlables et pour les zones d’ombres, tout en cultivant la légèreté, le ton de la
comédie et le plaisir de jouer avec les genres…
Marc (Mathieu Amalric) est professeur à la
Faculté des Lettres de l’Université de Lausanne.
Ayant accepté sa propre faillite comme écrivain,
c’est sans illusion qu’il enseigne « l’art d’écri-
belle-mère de l’étudiante disparue, qui cherche à
en savoir plus sur sa belle-fille, et qui lui avoue
sa solitude d’épouse de militaire en mission.
Coup de foudre : Marc découvre la passion dans
les bras d’une femme de son âge, lui qui avait
comme principe de ne jamais s’attacher et de n’avoir de relations qu’avec des étudiantes très jeunes. Malgré l’existence d’un policier chargé de
l’enquête, le thriller n’intéresse pas plus les
Larrieu que Djian. Ce qui semble les passionner,
c’est de confronter leur(s) protagoniste(s) à deux
lieux complètement différents : le lieu de travail
de Marc (et là les cinéaste ont trouvé l’idéal !), le
Learning Center de l’Université de Lausanne, un
monument ou une plutôt une sculpture de verre,
incarnation idéale d’une transparence qui se veut
l’image d’un savoir académique omniscient, et la
montagne qui est à la fois élan vers les blancheurs neigeuses et multiplications des versants
obscurs, des zones d’ombres et des gouffres
ciles. Personnage tout en failles dont vont nous
parvenir quelques fragments d’un mystère familial : l’inceste avec sa sœur (et leur jalousie réciproque à l’égard de tous les autres partenaires)
comme moyen de tenir face au monde après l’incendie (criminel ?) du chalet dans lequel étaient
morts leurs parents…
Pour cette histoire, les Larrieu ont su développer tout leur art dans le filmage des lieux et
des paysages (au point de faire du Lavaux et du
lac Léman des lieux où tout est possible selon la
recette hitchcockienne) tout en refusant tout
naturalisme au profit d’une approche somnambulique, voire surréaliste (Bunuel, Breton, Cocteau
sont cités !). Leur film a beau multiplier les cadavres qui pourrissent dans les gouffres, évoquer la
crise économique et la fin de la littérature comme
du cinéma, il est traversé par un humour (noir)
subtil qui le distingue de toute la production française contemporaine.
Serge Lachat
TWELVE YEARS A SLAVE
avec Chiwetel Eliofor, Michael Fassbender,
Paul Giamatti, Sarah Paulson, Lupita Nyong’o,
Brad Pitt,…
«L’amour est un crime parfait» © Vega films
re », surtout à des étudiantes qu’il a la réputation
de séduire avec une facilité déconcertante, ce qui
lui vaut un regard sévère et soupçonneux de sa
hiérarchie. Au tout début du film, il regagne avec
une jeune étudiante le chalet dans la montagne
qu’il partage avec sa sœur Marianne (Karin
Viard, elle-même bibliothécaire à l’Université de
Lausanne). Au lendemain d’une nuit d’amour qui
s’annonçait torride, il découvre sans comprendre
la jeune étudiante morte dans son lit. Au lieu d’avertir la police et en prenant soin de ne rien laisser soupçonner à sa sœur, il emmène le cadavre
dans la montagne pour le précipiter dans un trou
(sans fond ?), puis va enseigner comme si de rien
n’était. Peu de temps après, il fait la rencontre
d’Anna (Maïwenn) qui se présente comme la
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impénétrables.
Mais la transparence du Learning Center est
un piège : pas un cours, pas une rencontre avec
un étudiant ou un collègue qui ne soit visible de
tous. Avec ce que cela suppose comme surveillance de la hiérarchie et menaces pour le
poste de Marc, qui donc, bien qu’il donne toujours l’impression de n’être pas concerné par ce
qui lui arrive, souffre d’une paranoïa bien compréhensible au vu des secrets qu’il cache.
Les Larrieu ont avec Mathieu Amalric, leur
acteur fétiche, un Stradivarius pour incarner ce
personnage à la fois tremblant et violent, passif et
décidé, insécure et misanthrope, qui allume cigarette sur cigarette et dont les rapports avec sa hiérarchie comme avec sa sœur sont plus que diffi-
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Adapté de l’autobiographie éponyme de
1853 de Solomon Northup, Twelve Years a Slave
est le 3ème long-métrage de l’Anglais Steve
McQueen connu d’abord comme vidéaste plasticien, mais dont les 2 premiers longs-métrages ont
montré qu’il est également un cinéaste de premier plan : Hunger (2009) qui évoque dans un
filmage presque expérimental la grève de la faim
jusqu’à la mort d’un militant de l’IRA (à l’image
de celle de Bobby Sands), Shame (2011) parce
qu’il offre un portrait glacé d’un « sex addict »
new-yorkais. Dans les deux cas, le cinéaste semble fasciné par ce qu’un esprit humain peut infliger à son corps et il nous immerge dans cette
« dérive » au gré de longs plans-séquences.
Avec Twelve Years a Slave, McQueen s’attaque à un récit d’une amplitude spatiale et temporelle qui l’oblige à un cinéma plus classiquement narratif : nous sommes en effet entraînés
dans la longue descente aux enfers de Northup,
charpentier et violoniste, qui vit en homme libre
avec sa famille au nord de New York, est piégé à
Washington par des trafiquants et se retrouve
esclave en Louisiane, propriété de maîtres toujours plus fous de violence raciale, avant d’être
libéré grâce à l’aide d’un abolitionniste canadien.
Mais la volonté du cinéaste de nous forcer à
regarder et à sentir in cute ce qu’était l’esclavage
au milieu du 19ème siècle l’amène à un traite-
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Chiwetel Eliofor (Salomon) dans «Twelve Years a Slave» © Ascot Elite
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ment du temps différent de celui d’un film habituel. Même s’il ne peut plus travailler uniquement en plans-séquences, il recourt encore souvent à cette technique pour « figer » son récit et
nous laisser le temps d’en mesurer l’horreur.
Ainsi, pour s’être opposé à un contremaître
blanc, Platt (privé de son identité dès le moment
où il est esclave, Northup est appelé Platt) est
pendu à une corde qui lui laisse juste la possibilité de se tenir sur la pointe des pieds. La fatigue,
la terre meuble le condamnent à mourir étranglé
à plus ou moins brève échéance. McQueen filme
la scène en un plan-séquence qu’aucun spectateur ne pourra oublier : pendant tout le temps où,
au premier plan, Platt s’efforce dans une horrible
danse macabre de se tenir sur la pointe des pieds,
en arrière-plan, on voit d’autres esclaves reprendre leur travail et leurs enfants rire et s’amuser, le
tout dans la lumière et le décor extraordinaires de
la Louisiane.
La force du film (j’en suis sorti absolument
bouleversé) tient dans la volonté du cinéaste de
nous faire déchiffrer les rouages qui permettent à
toute une société et à toute une économie de
fonctionner sur l’esclavage : la Bible qui alimente les fantasmes de toute-puissance et de justice
innée (et qui en même temps console les esclaves
en leur promettant un monde meilleur dans l’audelà), les rapports de forces entre Blancs dont les
Noirs sont toujours victimes (surtout lorsqu’ils
sont confrontés à des Blancs eux-mêmes humiliés dans leur société), la capacité à nier toute
humanité à la race noire qui permet toutes les
outrances et surtout qui permet de considérer un
Noir comme une marchandise, une propriété
dont on use et abuse le plus naturellement du
monde. Sans oublier bien sûr la façon de régner
a
en jouant de la concurrence entre esclaves, en
favorisant certains esclaves au détriment des autres et en les dressant ainsi les uns contre les autres. Certains se demanderont ce qu’il y a là que
nous ne sachions déjà. Je répondrai que le cinéma ne nous a pas vraiment gâtés sur ce sujet et
que certaines piqûres de rappel sont toujours utiles, d’autant que McQueen ne manque pas de
laisser comprendre que tout n’a pas disparu
aujourd’hui de ces méthodes. Et puis, après
Django Unchained de Tarantino qui, avec un
sujet pas si lointain, offre surtout une distraction
spectaculaire et jouissive, à performances d’acteurs au moins égales, le traitement « premier
degré » de l’esclavage par McQueen me semble
décidément plus en accord avec son sujet.
Serge Lachat
TEL PÈRE, TEL FILS
de Hirokazu Kore-eda (Japon, 2013)
avec Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Yoko
Maki, Lily Franky, Keita
Ninomiya,…
Le début du film nous fait
découvrir une famille de riches
bourgeois tokyoïtes, les Nonomiya :
le père, jeune architecte ambitieux,
la mère au foyer et Keit, leur fils de
6 ans qui, trop passif, trop gentil, ne
semble pas tout à fait répondre aux
attentes de son père. Un père qui
par ailleurs s’en occupe fort peu,
trop absorbé par son travail. Un
jour, on leur signale que leur fils a
été échangé à la naissance et qu’ils
peuvent prendre contact avec l’aut-
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re famille pour procéder à l’échange des enfants
comme le souhaite le père de Keita pour qui les
liens du sang sont sacrés …
Cette autre famille, de condition très
modeste (le père tient un magasin de pièces
détachées de matériel électrique et électronique)
habite avec bonheur un minuscule appartement
dans une banlieue pauvre. Le cinéaste semble
vouloir jouer tout un jeu d’oppositions : luxe
glacé-capharnaüm de petit commerçant, retenue
des sentiments-exhubérance bruyante, discipline stricte-éducation cool, désir de régulariser la
situation-refus d’envisager l’échange,…
La situation et ce jeu des contrastes rappellent La Vie est un long fleuve tranquille de
Chatiliez, mais Kore-eda, avec beaucoup de
finesse et de tendresse pour tous ses personnages va modifier peu à peu les données et éviter
ainsi la grosse farce sociale. Il évite en même
temps le film à thèse, à contenu sociétal : sans
occulter les graves questions que soulève la
situation (le lien du sang vaut-il plus que le lien
né du vivre-ensemble, est-il possible de
contraindre des enfants de 6 ans à accepter de
« nouveaux parents », une mère doit-elle se sentir coupable de ne pas avoir « senti » l’échange
opéré, etc… ?), le cinéaste dépeint l’évolution
des personnages dans le temps. En décidant de
laisser aux enfants le temps de s’habituer à leur
future vraie famille, en procédant à des échanges pendant les week-ends, tous se découvrent
peu à peu. Ainsi les 2 mères se rapprochent, le
commerçant abandonne ses rêves de devenir
riche en faisant un procès à la maternité, l’architecte, en parlant avec son père, comprend mieux
sa propre rigidité et ses blocages.
Kore-eda joue ainsi avec beaucoup de légèreté sur différents registres : la situation douloureuse nous amène souvent au bord des larmes,
mais le film multiplie les moments drôles. Et la
«Tel père, tel fils» de Hirokazu Kore-eda
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douceur et la grâce dans la manière de filmer les
enfants, les ponctuations offertes par les
Variations Goldberg et la fin ouverte emportent
définitivement le spectateur…
Serge Lachat
WALKING WITH DINOSAURS
de Barry Cook et Neil Nightingale
Après avoir produit une série télévisuelle au
succès retentissant à la fin des années nonante, le
label « Walking with Dinosaurs » sort un long
métrage en 3D. Durant 88 minutes, nous suivons
les tribulations de Patchi, pachyrhinosaure un
Dinosaurs réside dans l'auto-critique du récit oral
de l'oiseau préhistorique. En effet, celui-ci effectue des commentaires sur le style ampoulé qu'il
emploie, et traduit les phrases emphatiques qu'il
lui arrive de formuler dans un registre de langage
plus bas. Une autre source du comique lié à l'acte de narration trouve son origine dans le recours
à la transgression des niveaux narratifs. Il arrive
ainsi que la voix narratrice soit l'objet de disputes. Patchi essaie à un moment de prendre en
main la conduite du récit, avant que l'oiseau préhistorique ne reprenne le dessus.
La dimension transgressive de ces jeux sur
la narration est néanmoins beaucoup moins forte
«Walking with Dinosaurs» © Pathé films
peu maladroit, de sa jeunesse jusqu'à l'âge adulte. Le héros, de migrations en migrations, découvre l'amour et apprend à affirmer son leadership ;
à la fin du film, il deviendra le chef de son troupeau. Walking with Dinosaurs joint à l'histoire
qu'il raconte une visée didactique : à l'apparition
de chaque nouveau dinosaure, le nom de celui-ci
apparaît à l'écran. Le mode du film est donc assez
hybride : le récit est occasionnellement interrompu par la présentation des nouveaux dinosaures ;
ce qui provoque autant de pauses dans la narration. Une des particularités de l'œuvre de Barry
Cook et de Neil Nightingale consiste justement à
jouer sur cette hybridité : le film s'affiche comme
acte de narration, lequel s'interrompt fréquemment pour laisser place à des commentaires.
Walking with Dinosaurs, en effet, trouve sa
source dans un récit oral : le film n'est rien d'autre que la « mise en image » d'un récit fait par un
corbeau à un adolescent rechignant à suivre son
oncle dans une expédition paléontologique. Le
corbeau, ancêtre d'Alex (un oiseau préhistorique), se métamorphose soudainement en son
aïeul et se met à raconter l'histoire de Patchi. La
voix de l'oiseau plane sur le film et contribue à
établir la cohérence discursive du film. Un des
ressorts du comique à l'œuvre dans Walking with
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que dans un film de fiction « traditionnel » ;
ceux-ci appartiennent au genre du dessin animé
et du film d'animation ; qu'on regarde n'importe
quel épisode de Tex Avery pour s'en convaincre !
Emilien Gür
ALEXANDRE THARAUD, LE
TEMPS DÉROBÉ
de Raphaëlle Aellig Régnier, avec Alexandre
Tharaud, (France, 2013)
A l’opposé de Bloody Daughter
réalisé par Stéphanie Argerich, troisième fille de Martha, tout imprégné
d’affect et du souci de se situer en
tant que “fille de…”, Alexandre
Tharaud, le temps dérobé est le portrait du pianiste virtuose par une
cinéaste qui s’efface derrière son
sujet. Son sujet ? Pas tant le portrait
d’Alexandre Tharaud en tant que personne, que l’illustration très concrète
de ce que le pianiste dit à un moment,
“faire quelque chose de beau suppose que tellement de conditions soient
réunies !”.
Suivant au plus près le quotidien
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du pianiste, devant ses partitions (en lisant il joue
déjà avec ses doigts), au piano, enregistrant, en
voyage, dans sa loge avant le concert, la caméra
enveloppante de Raphaëlle Aellig donne à appréhender la sensibilité en train de travailler, car
dans cette vie tout n’est que travail, exigence et
sensibilité. En lui demandant de décrire ce qu’il
éprouve dans ces différentes situations, elle lui
donne l’occasion de révéler un tempérament fait
d’exigence donc, mais aussi de modestie et d’humour. Et à nous, l’occasion de comprendre de
l’intérieur de quoi est fait le métier de virtuose,
les voyages, les attentes, la solitude et, toujours,
le travail. De sa biographie nous ne saurons rien,
sinon, au détour d’une phrase, que sa vie n’a pas
été toujours facile (il se dit entouré par des
morts).
Il faut entendre Alexandre Tharaud parler
des pianos et de leur sonorité, grand souci des
tournées. Ceux avec qui ça n’ira jamais (trop
neufs, n’ayant pas vécu) ou décidément irrattrapables. La poursuite inlassable du meilleur son
est affaire collective: il y a ce moment étonnant
où l’on voit deux spécialistes japonais modifier
mécaniquement et en temps réel la sonorité d’un
piano, ou celui, en studio d’enregistrement, où il
est décidé que telle note sera modifiée par la
technologie. Mais cette poursuite est d’abord et
avant tout celle du pianiste: le voir s’exercer,
reprendre encore et encore la phrase, montre à
l’évidence qu’à ce niveau d’excellence technique, l’exigence porte sur des détails qu’un
auditoire normal ne perçoit pas. Il faut également
entendre Alexandre Tharaud évoquer le travail
de mise en condition physique d’un pianiste, les
tensions musculaires à combattre, tout ce qui lui
permet de faire de son corps un instrument fiable, qu’il définit lucidement comme un “corps de
Sagittaire, ancrage en bas, envol en haut”. Ou
encore l’entendre évoquer l’entrée en scène
Alexandre Tharaud
© Marco Borggreve licensed to Virgin Class
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comme on se jette dans la lumière, le public et
ses attentes sentis en une seconde selon qu’il est
jeune, vieux, connaisseur ou non, et puis, parfois,
le moment de grâce, de rencontre, qui ne dure
pas, ce vers quoi tout ce travail tendait. Tout
sonne remarquablement juste dans ces propos et,
plus généralement, dans ce film d’une grande
délicatesse, porté par un amour vrai de la
musique.
Christian Bernard
MUSEUM HOURS
de Jem Cohen (Autriche, USA, 2012) avec
Mary Margarete O’Hara, Bobby Sommer, Ela
Piplits
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Film déroutant, Museum Hours (présenté à
Locarno en 2012) mérite de retenir notre attention même s’il a bien failli l’égarer en chemin. A
lire le résumé du film, on pourrait s’attendre à
une histoire d’amour : venue à Vienne pour
veiller sur son lit de mort une cousine qu’elle a à
peine connue, une femme fait la connaissance au
Kunsthistoris-ches Museum d’un gardien bienveillant et aussi seul qu’elle, qui la prend sous
son aile et lui fait visiter le musée
et la capitale autrichienne.
D’amour il n’y aura pas, l’homme préférant les hommes, sans
que cela empêche nos deux personnages de s’éprendre d’amitié.
On craint un instant que nous soit
contée l’histoire pathétique de
deux éclopés de la vie faisant,
adossés l’un à l’autre, un bout de
chemin ensemble, mais il n’en
Mary Margaret O'Hara dans «Museum Hours»
sera rien. Le film n’est narratif
que par discrètes fulgurances, et
encore ces séquences, qui ne décrivent aucune tableau, le visage d’un visiteur ou les rues de
véritable progression, font-elles l’objet d’un mor- Vienne, ne s’offrent pas pour autant à la contemcellement qui en désamorce le drame. Comme plation. Le montage est d’une équanimité rythdes perles attendant d’être assemblées, les plans mique confinant à la monotonie et la photogradu film paraissent juxtaposés plutôt qu’enchaînés phie laisse à désirer : si le monde est susceptible
les uns aux autres ; de même que les tableaux de d’être regardé comme un tableau, comme le comBruegel, minutieusement examinés par le prota- mentaire le suggère à la fin du film, l’image
goniste, se composent d’une multitude de détails terne et cadrée à la va-vite n’y invite pas vrairéunis dans un même espace-temps, de même ment. On est cependant tenté, tout au long du
Museum Hours se présente-t-il comme une col- film, d’attribuer ses imperfections à une volonté
lection d’images du monde défilant sans consécution. Ces images, montrant le détail d’un
THE LUNCHBOX
de Ritesh Batra (Inde 2013)
MARY QUEEN OF SCOTS
IN THE NAME OF…
de Thomas Imbach (CH, 2013)
de Malgoska Szumowska, Pologne (2013)
Qu’est-ce qui paraît plus improbable qu’un
film en costumes sur une reine d’Ecosse et de
France au destin tragique réalisé par un cinéaste
suisse ?! Ce film existe pourtant, réalisé avec des
moyens dérisoires par rapport aux exigences du
genre par Thomas Imbach.
Ce cinéaste suisse alémanique (qui avait
déjà adapté un texte littéraire, le Lenz de
Büchner) a été fasciné par la biographie de Marie
Stuart par Stephan Zweig (alors que le cinéma
s’est toujours inspiré de la Marie Stuart plus
romantique de Schiller). Il en a tiré un film qui
fait une peinture très contemporaine de cette
jeune reine qui veut vivre pleinement et non dans
l’ombre d’un homme. Et qui veut jouer un rôle
politique actif et réconcilier l’Angleterre et
l’Ecosse, catholiques et protestants, tout en
revendiquant avec beaucoup de naïveté le pouvoir au nom de son « ancienneté ».
Malgré les maladresses liées au manque de
moyens et à l’inégalité des acteurs, le film mérite le détour pour son intelligence, ses trouvailles
artistiques et pour la performance de son actrice
principale Camille Rutherford absolument stupéfiante.
On m’excusera de préférer le titre anglais au
français Aime et fais ce que tu veux : le film de la
cinéaste polonaise tout de finesse mérite mieux
qu’un impératif trop explicite !
Dans un centre pour adolescents difficiles,
au fin fond de la campagne polonaise, la pratique
du sport sert de défouloir sur fond d’invectives
antisémites et homophobes. Seul Adam, un jeune
prêtre charismatique, parvient à faire respecter
quelques règles et à protéger les plus faibles.
Travaillé lui-même par ses pulsions, il se
défoule dans de longues courses nocturnes en
forêt (sublimes travellings). Peu à peu, le film
dévoile le secret d’Adam : s’il repousse les avances de la femme de son collègue, c’est moins
parce qu’il a fait vœu de chasteté que parce qu’il
préfère les garçons. Tombé amoureux d’un des
pensionnaires, Adam finit par assumer son
homosexualité et par l’avouer à sa hiérarchie…
Le film de Malgoska Szumowska mérite les
éloges recueillis au Festival de Berlin : la cinéaste traite son sujet avec beaucoup de finesse et de
délicatesse tout en l’exposant frontalement à
l’Eglise (ce qui ne manque pas de courage en
Pologne) et à ses spectateurs.
Sur les conseils de sa voisine plus âgée, Ila
mijote de succulents plats épicés pour reconquérir son mari, plats qu’elle lui fait parvenir à son
bureau dans une lunchbox. Mais le livreur se
trompe de destinataire et les repas arrivent sur le
bureau d’un comptable proche de la retraite,
veuf, amer et misanthrope.
Si le mari ne dit rien de ces repas, et pour
cause, le vieil employé dit son plaisir en glissant
des commentaires élogieux dans la boîte. Naît
ainsi un échange de messages de plus en plus
intimes, messages de plus en plus attendus et qui
devraient déboucher sur la rencontre des deux
épistoliers…
On reconnaîtra les ingrédients de comédies
classiques (The Shop around the Corner de
Lubitsch ou Love actually de Curtis), mais l’intérêt de ce petit film tient surtout à ce qu’il évite la
lourdeur bollywoodienne et le happy-end attendu. Et qu’en arrière-fond de cette comédie sentimentale, il offre un regard documentaire sur les
rues de Bombay et sur ses habitants, sur la vie
dans les bureaux et dans les appartements exigus.
Un peu comme le récent Ilo Ilo le faisait à partir
d’une situation plus tragique pour la société de
Singapour, The Lunchbox offre une petite radiographie de la société indienne.
Serge Lachat
Serge Lachat
Serge Lachat
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de dérouter notre regard, de le décentrer, un peu
à la manière de cette guide selon laquelle ce n’est
pas Saint Paul qui occupe le centre de gravité du
tableau de Bruegel représentant sa conversion,
mais l’enfant sous l’arbre qui porte une armure
trop grande pour lui. En ne mettant pas le drame
au cœur de son film et en ne prenant pas ses personnages sous une loupe trop scrutatrice, Jem
Cohen laisse le spectateur libre de naviguer à
vue, quitte à le désorienter parfois et à lui faire se
demander quel peut bien être ce cap que le film
vise sans jamais le désigner clairement.
Julien Roche
LE VENT SE LEVE… IL
FAUT TENTER DE VIVRE
Miyazaki, plutôt tournés vers un
monde débordant de rêves et
d’enchantements, un monde plutôt destiné à rassurer les enfants,
ce dernier film présente le monde
qui entoure les protagonistes
comme toujours menaçant, plein
de bruits et de fureur (les diverses
catastrophes, les guerres), monde
dans lequel il faut pourtant tenter
de vivre, c’est-à-dire à la fois de se laisser porter
par le vent et d’affronter les vents contraires.
Telle est la leçon de ce mélodrame peut-être
moins destiné aux enfants qu’aux spectateurs
adultes.
Serge Lachat
de Hayao Miyazaki (Japon 2013, Studio Ghibli)
A TOUCH OF SIN
L’histoire racontée dans ce film d’animation
s’inspire de la vie d’un passionné d’aviation : Jiro
Horikoshi. Le film suit cet ingénieur de la découverte de sa passion d’enfant pour les objets
volants, passion née de l’observation des oiseaux
(et d’une arête de poisson !) et développée par la
découverte des avions de l’ingénieur italien
Giovanni Caproni (déjà évoqué dans Porco rosso,
mais la passion de Miyazaki lui-même pour les
objets volants est lisible au travers de toute son
œuvre) à la création de l’avion de combat
Mitsubishi A6M 1 Zero qui donna à l’aéronavale
japonaise la suprématie des airs dans le Pacifique
pendant de longues années. Engagé très jeune par
Mitsubishi, Horikoshi, entièrement voué à sa
passion et à son devoir de rattraper le retard du
Japon en matière d’aéronautique, semble ne pas
prendre conscience des catastrophes qui ponctuent l’Histoire du Japon en ce début de 20ème
siècle : tremblement de terre du Kantô, incendie
de Tokyo, dépression économique de 1923, épidémie de tuberculose, guerres avec la Chine, la
Corée, la Russie, montée de l’extrême-droite.
Catastrophes que le film évoque en arrière-plan,
mais aussi au gré de vraies performances de cinéma d’animation, par exemple pour les images du
tremblement de terre ! Miyazaki s’est aussi inspiré pour ce film du livre Le Vent se lève (19361937) de Tatsuo Hori pour le personnage de
Nahoko, la jeune femme qui souffre de pneumonie et dont Horikoshi tombe éperdument amoureux. Magie des sentiments qui permet de traverser les épisodes les plus noirs en gardant le goût
ou la volonté de vivre comme le dit la seconde
partie du titre (qui est, il faut le souligner, un vers
du Cimetière marin de Paul Valéry plusieurs fois
cité en français dans le film).
Contrairement aux autres films de
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de Jia Zhangke
Quatre histoires de Chine : un mineur se
révolte contre la corruption qui règne dans son
village ; un ouvrier trompe son ennui dans le
crime ; la réceptionniste d'un hôtel-sauna, poussée à bout par la violence quotidienne qu'elle
subit, tue deux hommes qui la traitent comme
une prostituée ; un jeune garçon, après avoir
accumulé les petits boulots pour survivre, se suicide. Voilà à quoi ressemble le nouveau film de
Jia Zhangke, qui, à travers son exploration de la
vie quotidienne du sous-prolétariat chinois, lance
un appel d'alerte sur la Chine d'aujourd'hui.
Le tableau que dresse le cinéaste de son pays
est sans concession : misère, violence et humiliation sont le lot quotidien des quatre personnages
du film. La crudité de la fresque que nous livre le
réalisateur chinois est un des grands mérites du
film. Bien des articles de presse évoquent la misère morale et matérielle qui fait le lot quotidien
de nombreux chinois ; aucun n'en témoigne
comme le fait le film de Jia Zhangke, sans détour
et de façon saisissante. Pour manifester cette violence avec tant de force, la forme chorale du film
semblait s'imposer. Multiplier les personnages
permet au cinéaste de réaliser une œuvre sans
héros. Ce ne sont pas eux que le film met au premier plan, mais plutôt l'environnement dans
lequel ils évoluent, contaminé par la violence et
la corruption. Le meurtre y est monnaie courante, comme en témoignent crûment les deux premières histoires: le mineur révolté assassine tous
ceux qui l'ont humilié ; l'ouvrier au chômage tue
sans scrupule un homme et sa femme pour voler
le sac de cette dernière. L'amour semble être
étranger à ce monde brutal et violent : l'ouvrier
de la deuxième histoire préfère le meurtre à son
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«A Touch of Sin» © Filmcoopi
épouse. La femme, dans cette Chine, semble
d'ailleurs se réduire à un simple objet sexuel.
Quand on ne supporte plus l'oppression quotidienne, il ne semble y avoir que deux solutions :
tuer ou mourir. C'est cette dernière voie qu'emprunte le jeune homme de la dernière histoire,
qui se jette depuis son balcon. Il y avait une culture en Chine autrefois ; il semble maintenant n'y
avoir plus que des exploités et des millionnaires
vulgaires. La Chine est un pays dans lequel
l'homme n'a plus sa place: tel est le message alarmant que nous livre le film de Jia Zhangke.
En DVD : l’intégrale (Gaumont classiques)
FANNY ET ALEXANDRE
En 1982 à l’âge de 59 ans Bergman nous
donnait ce qui devait être son dernier film, Fanny
et Alexandre, somme proustienne et viscontienne
nourrie de ses souvenirs d’enfance, un chefd’œuvre. D’abord sorti à la télévision dans sa
version intégrale de plus de 5 heures, il le fut en
salle dans une version ramenée à 3 heures. En
DVD n’existait jusqu’à maintenant que l’édition
Criterion sans sous-titre français.
Le récent coffret de 5 DVD Blu-ray de la
Collection Gaumont classiques servira désormais
de référence. A côté de la version courte soustitrée en français, on dispose enfin de la version
de 5 heures restaurée numériquement, rendant
justice à la splendide photo du grand chef opérateur Sven Nykvist. Les bonus comprennent un
film-préface d’Olivier Assayas ainsi qu’un précieux documentaire sur le tournage du film réalisé par Bergman lui-même. L’occasion de le voir
au travail, son autorité, son inépuisable énergie,
la précision de ses indications.
En suivant le jeune Alexandre Ekdahl de son
initiation à la magie du spectacle entre lanternes
magiques et théâtres de marionnettes au sein
d’une famille heureuse, jusqu’à son combat, le
père mort, contre le terrible Vergerus, pasteur
devenu son beau-père, c’est la complexité de
Bergman, à la fois artiste solaire et moraliste
sévère, qui se trouve éclairée.
Christian Bernard
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cinémas du grütli
Rendre visible l’invisible
Everybody’s Perfect invite le cinéaste français Sébastien Lifshitz à
présenter son dernier documentaire, Bambi, aux Cinémas du Grütli. Un
portrait fascinant d’une transsexuelle au destin romanesque, livré par un
cinéaste gay de talent. Entretien téléphonique.
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Alors que nous venons récemment d’être
témoins de débordements malheureux en
France suite à l’acceptation du mariage pour
tous, accélérant l’heure du débat de notre côté
de la frontière, pas étonnant que le festival
bisannuel Everybody’s Perfect (Festival du film
lesbien, gay, bisexuel, transsexuel, intersexuel,
queer & alliés de Genève) invite en prélude au
lancement de sa troisième édition prévue en
septembre, un cinéaste qui a fait de la question
LGBT, son art. Fort heureusement, d’ailleurs.
Sans quoi, Bambi serait certainement tombé
dans l’anonymat tout comme Les Invisibles, le
précédent documentaire du cinéaste, repêché
l’an passé par le cinéma Spoutnik, faute de distributeur en Suisse.
La photographie comme socle
Le cinéma? Au départ, Lifshitz ne s’y destinait pas. Spécialisé en photographie et peinture
contemporaine, il y est arrivé par hasard. Son
intérêt pour la photographie ne quitte toutefois
pas le cinéaste qui collectionne depuis toujours
les images amateurs - souvent des portraits d’inconnus - «dont les couples homosexuels et les
gens que j’identifie comme homosexuels dans ces
images». Aux Puces de Vanves à Paris, il tombe
un jour sur l’album de deux vieilles dames bourgeoises aux allures de couple, une supposition
qui se révèle exacte. De cet album naît l’idée du
film Les Invisibles sorti en 2012 et césarisé en
2013. Et en octobre dernier, Sébastien Lifshitz
publie un recueil de photos éponyme qui met en
scène des couples d’aînés LGBT, réels ou imaginés, issues d’images accumulées sur une vingtaine d’années.
fois lumineuses, parfois tragiques, toujours
réalistes et propices au questionnement. C’est
ainsi qu’avec Les Invisibles, il nous emmène à la
rencontre d’homosexuels épanouis de 70 à 90
ans, hommes et femmes, en couples ou seuls,
scénarisés comme des personnages de fiction.
Des personnes de sorties de l’ombre pour
témoigner en photos et face caméra de ce que
fut leur vie entre les années 1950 et 1970, quand
on ne parlait pas encore de ces minorités sexuelles. Soit, avant l’impact des revendications de
1968, et avant encore le sida des années 1980,
qui « ont tout changé ». «C’était important pour
moi de raconter l’homosexualité du prolétariat
à la bourgeoisie, de la ville à la campagne. Je
voulais vraiment essayer d’étendre le spectre
social du film le plus largement possible pour
sortir du cliché de l’homosexualité forcément à
la ville, forcément dans des types de professions
libérales et forcément douloureuse. Je voulais
vraiment raconter l’homosexualité de façon
démocratique» explique Lifshitz, qui pose un
regard bienveillant sur les événements récents
en France et se souvient que l’acceptation du
Pacs avait dans un premier temps donné lieu aux
mêmes types de réactions par l’opposition.
Dans son nouveau moyen métrage (58
min.), Bambi (voir encadré), le cinéaste poursuit
brillamment la démarche entamée dans Les
Invisibles, à savoir celui d’amener à la lumière
un témoignage précieux. Mais cette fois-ci,
c’est celui d’une transsexuelle accomplie. Une
belle façon de dissiper l’incompréhension.
Propos recueillis par
Tuana Gökçim Toksöz
Des destins singuliers
Des fictions aux documentaires, les films
de Lifshitz mettent à l’honneur des personnages
homosexuels (Les Corps Ouverts, Presque
Rien, Plein Sud, Les Invisibles) ou transsexuelles (Wild Side et Bambi), en s’écartant avec
intelligence de la militance pour révéler des trajectoires captivantes, originales et riches, par-
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Marie-Pierre Pruvot, alias Bambi à la scène
Bambi de Sébastien Lifshitz
Née Jean-Pierre Pruvot à Alger - un sexe qu’il
rejette – Marie-Pierre Pruvot deviendra Bambi,
célèbre meneuse de revue au Carrousel de Paris,
un cabaret de travestis. Puis encore, professeure au
collège de Garges-lès-Gonesse décorée des
Palmes Académiques à une époque où la différence n’était pas tolérée. Sobrement intitulé Bambi,
du nom de scène de sa protagoniste Marie-Pierre
Pruvot, ce documentaire primé d’un Teddy Awards
à la Berlinale 2013 conjugue des images d’archive
tournées par Bambi, elle-même, avec une caméra
Super 8 et des images d’aujourd’hui. Pour au final,
brosser le portrait sensible du destin singulier
d’une transsexuelle accomplie. Aujourd’hui âgée
de 78 ans, Bambi n’est pas une inconnue, contrairement aux protagonistes du film Les Invisibles
dans lequel ce récit devait initialement prendre
place. Avec Coccinelle (Jacqueline, Charlotte
Dufresnoy), elles sont les premières et les plus
célèbres transsexuelles de France. Le cinéaste dit
du parcours de Bambi qu’il a «vraiment valeur
d’exemple, à pleins de niveaux». Et effectivement.
Car au-delà de la question pure de la transformation physique, Bambi déploie un personnage qui a
su se réinventer avec brio à chaque moment important de sa vie. Et par cet aspect, le film cesse d’être un sujet propre aux genres pour devenir un
témoignage de vie exemplaire, universel et bouleversant. T. G. T.
Projection de Bambi aux Cinéma du Grütli, les 15 et 16
février en présence du réalisateur.
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r
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[
SYMPHONIQUE
]
CONCERTS DU DIMANCHE
[
SYMPHONIQUE
]
CONCERTS DU DIMANCHE
Orchestre de
Orchestre
de
la Haute Ecole
lade
Haute
Ecole
M usique
de
M
usique
de Genève
de Genève
KARL ANTON
RICKENBACHER
K
ON
DA
I RRELC A
TN
I OTN
RICKENBACHER
D
IRECTION
Richard Strauss (1864-1949)
Metamorphosen
Richard Strauss (1864-1949)
Olivier Messiaen (1908-1992)
Metamorphosen
Offrandes oubliées
Olivier Messiaen (1908-1992)
Gustav
Mahler
(1860-1911)
Offrandes
oubliées
Mouvement symphonique (Totenfeier)
Gustav Mahler (1860-1911)
Mouvement symphonique (Totenfeier)
16-03-2014
16-03-2014
17 heures
17 heures
Billetterie : Espace Ville de Genève Pont de la Machine 1, Maison
des arts du Grütli Rue du Général-Dufour 16, Genève Tourisme Rue
du Mont-Blanc 18, Cité Seniors Rue Amat 28, Victoria Hall Rue
Billetterie
: Espace Ville
de Genève
Pont ledeconcert.
la Machine
1, Maison
du Général-Dufour
14, une
heure avant
Renseignements
des
arts
du418
Grütli
Rue du
Général-Dufour
Tourisme
Rue
0800
418
gratuit
(Suisse)
+41 22 41816,
36Genève
18 payant
(Etranger)
du
Mont-Blanc
18,
Cité Seniors Rue Amat 28, Victoria
Hall 25.Rue
Billetterie
en ligne
: http://billetterie-culture.ville-ge.ch
Prix CHF
du
Général-Dufour
14,13.-,
une chômeurs,
heure avantétudiants,
le concert.jeunes
Renseignements
CHF
15.-, AVS CHF
CHF 10.-,
0800
418 418 gratuit
(Suisse)
+41 22 418CHF
36 18
payant
(Etranger)
20ans/20francs
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Jean-Marc Humm atelier de création visuelle
Genève,
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Jean-Marc Humm atelier de création visuelle
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la comédie de genève
Mission
Romancier, dramaturge, pamphlétaire et essayiste, David Van Reybrouck
a beaucoup écrit sur l’Afrique qu’il connaît bien, et surtout sur le Congo,
pays dévasté par les guerres. Il anime également des ateliers littéraires pour
des auteurs de théâtre congolais. Mission lui a valu en 2008 le plus prestigieux prix flamand accordé à un auteur.
20
Il est de bon ton depuis
quelques décennies de prendre
ses distances avec toutes formes
d’implication et d’engagement,
surtout si elles revêtent l’habit
catholique des missionnaires.
On se méfie de cet avatar de
l’impérialisme que l’on soupçonne de vouloir imposer ses
valeurs occidentales. Il y a
cependant un anachronisme certain à vouloir juger l’action des
missionnaires du vingt-et-unième siècle à l’aune de ce qu’elle fut au moment de la colonisation. Le danger est grand de
rejeter toute action des missionnaires au prétexte de rester critique et de juger sur un prétendu
résultat quasi-immédiat ce qui
demande un engagement au très
long terme.
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improvisent, bricolent, s’adaptent. Comme dit
l’un d’entre eux : « Il y a trois choses à ne
jamais oublier : votre moustiquaire, votre coffret de messe et une pince pour arracher les
dents ». Leurs conditions de travail et de vie
sont inimaginables. Ils sont confrontés au
dénuement absolu. À cela s’ajoute le déclin du
pays qui a modifié les rapports humains.
Contrairement à ce que l’on veut encore croire,
il n’y a plus de solidarité ni de sens de la collectivité. Le néolibéralisme a brisé le Congo, amenant les individus à un égoïsme extrême. Ce qui
avait commencé par une
crise économique et politique est devenu une profonde crise morale. Chacun
veut être chef, il n’y a plus
de sens civique. Les missionnaires tentent de restaurer un sens moral et civique
chez les Congolais, à défaut
de leur inculquer leur propre
foi. Ils s’appliquent à émanciper les gens, à guérir les
blessures physiques et
morales.
Crise morale
C’est une pièce sur la
bonté, l’humilité et la
patience de ces missionnaires engagés corps et âme
dans un pays martyr qui vit
une crise morale sans précédent. C’est le formidable
comédien flamand Bruno
Vanden Broecke qui apportera son humanité et son
humour à ce texte pudique
et vrai.
Engagement
Car c’est de cela qu’il s’agit, d’engagement pas seulement religieux, mais aussi artistique. L’écriture de cette pièce
est une lutte, qui interroge sur la
foi catholique, sur son héritage,
sur des axiomes tels que l’existence de Dieu, de l’au-delà et du
sens de la souffrance. Peut-on
être missionnaire sans Dieu ?
De même pour l’artiste, peut-il y avoir engagement sans foi, ne serait-ce que la foi dans la
dignité humaine ? Cependant Mission n’est pas
une pièce de théâtre politique, bien que se
situant dans un contexte historique et politique.
Si l’art n’est que le vecteur d’une prise de position idéologique, il devient artificiel, alors qu’il
porte naturellement en lui la puissance de formulation qui permet d’aller beaucoup plus loin
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Laurence Tièche,
d’après une conversation
de 2007 entre David Van
Reybrouck et Ivo Kuyl
«Mission» © Koen Broos
qu’une simple prise de position sociale, et d’être plus nuancé.
Mise à l’épreuve
Du 4 au 7 février : Mission de David Van Reybrouck,
m.e.s. Raven Ruëll. La Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim 17h (loc.
022/320.50.01 / [email protected])
Les nombreux missionnaires rencontrés
par David Van Reybrouck ont vu leur foi mise à
rude épreuve par la cruauté de la société congolaise. Actifs dans les écoles, les prisons, les postes de brousse, le secteur paramédical, ils
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la comédie de genève
Shitz
Figure majeure du théâtre israélien contemporain, à la liberté de penser
non factice, Hanokh Levin a laissé une cinquantaine de pièces.
Dépassant le contexte israélien, Shitz mélange entre shit et Schatz (‘trésor’)? - apparaît
d’emblée comme une critique acide, décapante,
de nos morales moralisantes, en même temps
qu’une caricature astringente de nos modes de
consommation modernes. C’est aussi l’observation perspicace d’une humanité qui se débat avec
ses désirs. Le tout saupoudré de quelques grains
de mélancolie. Avec cette comédie écrite en
1975, Hervé Loichemol propose un genre de
cabaret. Le travail des comédiens oscille ici entre
simplicité et démesure excentrique, et montre
spectaculairement comment la dureté des propos
tenus aboutit à des effets plutôt comiques qui
provoquent une distance critique bienvenue.
Chez les Shitz, on se parle cru, sans ambages, on
se bouscule, on s’empiffre, on se déteste avec
entrain, on se ‘vend’ au plus offrant, on vit avec
pétulance. On ne se fait pas de cadeaux, car pourquoi s’en faire quand la vie nous maltraite ?
faudrait sans doute aussi parler de mon enfance
en Algérie, et de la place qu’a eue mon grandpère dans ma construction imaginaire, mais c’est
une autre histoire.
Entretien : Hervé Loichemol
Le contraire de parler pour vous,
c’est ‘se taire’ ou c’est ‘écouter’ ?
Quelle différence faites-vous entre
l’humour juif et l’humour israélien ?
Je ne suis ni juif, ni israélien, et je ne connais pas
la diversité du théâtre israélien. L’humour juif ?
Je ne suis pas non plus un spécialiste… Mais je
reconnais, comme tout le monde, cette façon particulière de se moquer de soi-même, et qui me
fait rire. La dérision, très présente chez Levin,
évoque l’humour juif, mais son écriture ne se
limite pas à ça. Il a pris des positions extrêmement critiques par rapport au pays où il est né, où
il a vécu, positions qui sont aussi, d’abord, des
positions politiques. A mon sens, il est l’héritier
de Brecht, de Karl Valentin, des expressionnistes.
Un peu l’héritier de Jarry, si l’on pense à Ubu, et
aussi, par conséquent, l’héritier de Shakespeare,
qu’il semble connaître très bien. Je feuilletais, il
y a quelques jours, le Roi Lear, et j’y ai perçu des
échos très nets avec Levin, par exemple dans ce
que dit Edmond… Ceci dit, j’ai été très influencé
par les lectures de Levinas, de Derrida, de
Guénoun, je me reconnais dans un questionnement infini sur l’altérité. En fait, ce goût pour ces
questions provient plutôt de ma fréquentation de
certains philosophes que d’un bain culturel. Il
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Le langage cru au théâtre, comment
le traiter ? Comme un humour de plus, une
variante de la vie quotidienne ?
D’habitude je m’attache à monter des textes
‘élégants’, exempts de ce type de grossièreté
langagière. Mais ce langage fait pleinement partie de la vie. Je conçois que cela puisse choquer
des gens, mais on a pris le parti de ne pas trop
‘charger la barque’, on traite ce vocabulaire
comme une variation langagière et comme une
situation de communication. Ce qui m’intéresse
c’est de me demander : « qu’est-ce que ça dit de
nous ? qu’est-ce que ça critique, révèle ? ». Les
situations scabreuses, énormes, ‘hénaurmes’,
dans cette pièce font sens. Ne serait-ce que
parce qu’elles disent magnifiquement la grossièreté du monde actuel.
Ecouter, sans aucune hésitation. J’aime apprendre, j’ai conservé quelque chose de l’étudiant, au
sens étymologique. Être metteur en scène c’est
aussi savoir écouter les comédiens, être à l’écoute de ce qu’ils disent, font, proposent, et être à
l’écoute aussi de toute l’équipe qui travaille dans
notre théâtre. Avec Levin, il y a beaucoup à
entendre et à écouter, et pas seulement des mots.
Le théâtre suppose l’écoute, donc l’ouverture.
C’est une forme d’antidote au savoir constitué,
massif, fossilisé. Tout simplement parce qu’il est
fondé sur un doute premier : cet homme qui est
sur scène, s’agit-il d’Hamlet ou du comédien qui
l’interprète ? C’est un dispositif ironique qui
exige une forme de croyance : il faut y croire,
croire au théâtre, croire à une parole donnée,
transmise, échangée sur un fond d’incertitude,
puisque tout est faux.
Si vous deviez donner trois épithètes
qualifiant l’œuvre de Levin, ce serait… ?
C’est une œuvre immense qu’on n’a pas fini de
découvrir. Levin est un très, très grand auteur, qui
donne de la joie. Trois adjectifs pour qualifier son
œuvre? Intelligente, fine, aiguë, tranchante…
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«Shitz» © Marc Vanappelghem
Comment avez-vous traité la partie
‘texte chanté’ dans la pièce ? Comme un récitatif, un accompagnement sonore, une respiration vocale… ?
La pièce est sous-titrée pièce musicale. Les textes à chanter sont un peu comme les songs brechtiens, mais pas complètement. Chez Brecht, la
partie chantée est là pour donner une respiration
qui permet de prendre de la distance vis-à-vis du
propos. Chez Levin, c’est plutôt, me semble-t-il,
une manière d’avancer dans l’intrigue avec irrévérence et humour. Ce n’est pas prescriptif.
Comme je voulais garder le côté populaire et
inscrire les textes chantés dans la continuité de
l’action, j’ai fait composer des musiques que les
acteurs chantent a capella, sans marquer d’arrêt,
un peu comme dans les Demoiselles de
Rochefort, où le chant fait partie d’un quotidien
‘naturel’. J’ai donc choisi de me passer de musiciens sur le plateau, de façon à faire moins cabaret, et à apporter une singularité qui permette un
genre nouveau.
L’argent dans la pièce tient le rôle
principal, mais de quoi est-il le nom ?
L’argent est traité de manière moqueuse, en clins
d’œil dans le texte de Levin, mais je n’ai pas eu
envie de faire de surinterprétation. Le texte est
assez malin pour se suffire à lui-même. Par contre, ce qui m’a d’emblée intéressé, c’est la question
des déchets. Où sont les cadavres ? Sous la table ?
Quel usage fait-on des morts, de nos morts ?
Comment on ‘fabrique’ du mort ? Déchets
humains, déchets de nourriture, évacuations de
toutes sortes, cette pièce parle du rapport de la
société à la mort et de ce que l’on peut politiquement recycler... Un cycle shakespearien de la vie.
Propos recueillis par Rosine Schautz
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est imposé comme seule vie digne. Il est hors du monde et le fait de rêver
sa vie lui suffit. Il refuse de jouer le jeu qu’impose la société. Oblomov en tant que roman - a inspiré Joyce, Houellebecq, Duras et bien d’autres
écrivains. Il représente le monde avant le progrès.
forum meyrin
Oblomov
Qui est Ilia Ilitch Oblomov, cet homme pour qui
l’inaction et la rêverie est la vie même ? Cet homme
pour qui la position couchée est un état naturel,
indépendant d’une fatigue ou d’une raison quelconque?
Un rêveur ? Un dépressif ? Un mélancolique ? Un
nostalgique ? Un philosophe ?
Ce personnage d’une grande complexité, dont le nom est éponyme du
roman dont a été créée la pièce de Dorian Rossel, a été fondateur d’un
immense répertoire littéraire. Le metteur en scène a adapté ce roman phare
de la littérature russe pour obtenir une création à l’image du spectateur
d’aujourd’hui.
Dans le roman, la vie d’Oblomov est tournée vers un passé
répétitif, au rythme des mariages et des saisons, où « tous confondent
les mois et l’ordre des dates ». On trouve également cette phrase très
énigmatique : « Ilia Ivanovitch se tait, vaincu, et toute la société replonge dans la somnolence ». En quoi représente-t-il un personnage
moderne ?
Il met en exergue la question implicite que tout le monde se pose : qu’estce qui fait qu’on agit ? Pourquoi se battre, pourquoi aller dans le monde
encore et toujours ? Je pars du postulat que tout le monde porte son
Oblomov en soi. Stolz, un personnage dans le roman, lui dit : « Toute ta
vie tu as sauvegardé tes qualités les plus précieuses. Jamais tu ne te prosterneras devant l’idole du mensonge ». Oblomov rêve sa vie, mais a-t-il
tort ? C’est magnifique, de rester pur de mensonge, en quelque sorte.
C’est une citation sans ironie ?
Dorian Rossel, qui est Oblomov pour vous ?
22
Je pense qu’Oblomov est un homme qui préfère rêver sa vie qu’agir. Je le
vois comme un poète, un anti-héros dont le combat pour ne pas faire et
pour vivre d’idéaux résonne avec l’humain d’aujourd’hui qui ne sait plus
pour quoi se battre, qui rêve aussi d’une société parallèle : on le constate
par l’usage d’internet et des mondes virtuels qu’il propose, par exemple.
Oblomov entre en résonance avec le productivisme qu’il refuse et qui nous
Oui, sans doute. Je pense que c’est une citation magnifique qui parle de
cet espoir qui est à l’intérieur de tous, celui de rester pur, d’avoir des
valeurs désuètes mais liées au simple fait de prendre son temps de vivre et
de partager. Vivre sans se trouver dans « les courants d’air » des relations
inutiles. Refuser de se prosterner devant le mensonge qui est à la base de
notre société. Je pense par exemple aux centrales nucléaires : nous savons
à quel point c’est dangereux, mais nous voulons rester dans le mensonge
pour profiter de notre confort. C’est ainsi que je lis ce personnage.
Comment envisagez-vous la mise en scène ? Cela ne doit pas
être facile de représenter au théâtre un personnage inactif qui rêve
beaucoup seul, sans interlocuteur.
J’aimerais rendre compte de la complexité des constructions identitaires.
Il y aura plusieurs personnages, de la musique et de chœurs. J’aimerais
laisser une lecture ouverte du personnage, car il est beaucoup de choses à
la fois, bonnes et mauvaises. C’est au spectateur de faire ses réflexions sur
ce personnage. Oblomov n’est pas vraiment seul, il a sa mère dans son
cœur, sa femme rêvée et sa vraie femme. Même en amour, il y a le problème de l’engagement et de ses difficultés, on ne peut y échapper. Là aussi,
le personnage est passionné par son idéal. Qui ne l’est pas aujourd’hui ?
On aimerait tous se trouver un coussin et s’y blottir. Mais il y a une réponse, qu’Oblomov trouve : l’amour est ce qui finalement le ramène à la vie.
Propos recueillis par Claudia Cerretelli
Du 11 au 14 février à 20h30 : Oblomov. Dorian Rossel-Compagnie STT / O'Brother
Company. Forum Meyrin (loc. 022/989.34.34)
Ce spectacle sera également joué à Kléber-Méleau, Lausanne, du 15 mai au 25 mai.
Dorian Rossel, photo Nelly Rodriguez
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Forum Meyrin
Vendredi 28 février et samedi 1er mars à 20h30 : « De beaux lendemains » de Russell Banks
© DR
Mercredi 5 février à 19h : « L’Ombre » d’Andersen selon Jacques Vincey
photo Marc Domagec, Philippe Ramette - adagpcourtesy galerie xippas
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théâtre de vidy, lausanne
Eclectisme
Au Théâtre de Vidy, la deuxième partie de saison s’annonce très riche :
une programmation éclectique, élaborée par René Zahnd et Thierry
Tordjman. Des affiches séduisantes présagent de beaux moments
artistiques au bord de l’eau où pas moins de quatorze spectacles sont
annoncés du 4 février au 31 mai. Son nouveau directeur, Vincent
Baudriller, prépare la saison prochaine sur laquelle il lèvera le voile dès la
mi-mai 2014, mais plusieurs spectacles, de théâtre et de danse, de Suisse et
d’ailleurs, sont d’ores et déjà promis.
24
François D’Assise avec Robert Bouvier, mise
en scène d’Adel Hakim, du 4 au 23 février
2014, Chapiteau.
Les mots pleins de sensualité de Joseph
Delteil vont s’animer dans ce spectacle sans
prêche, ni message. Il s’agira d’un hymne à la
liberté, celle d’un homme. Un moment de vie,
fou et joyeux, entre coups de foudre et révoltes.
« Robert Bouvier prête à François une naïveté d’appétit, d’allégresse, une réjouissante et
presque barbare piété. L’acteur rend bien cette
ivresse aux pieds nus qui vous écarquille le nez,
cette frénésie de nature qui ouvre dans la prose
de Delteil des abîmes parfois douloureux, toujours délicats auxquels on cède en fermant les
yeux. » Le Figaro
Suivra VieLLeicht de Mélissa Von Vépy, du 11
au 22 février à la Salle René Gonzalez.
Mélissa Von Vépy poursuit sa recherche
autour de l’aérien lié au théâtre et à la danse. Le
spectacle évoque un rêve merveilleux, la pesanteur a disparu: entièrement dénué de gravité
physique et d’états d’âme, le pantin vole.
Puis, Cinématique, du 12 au 19 février à la
Salle Charles Apothéloz, par la compagnie
Adrien M/Claire B.
Un radeau posé sur les flots et le voyage
peut commencer. Une invitation à la rêverie, au
jeu. Lignes, points, lettres, objets numériques
projetés sur des surfaces planes, tissent des
espaces poétiques qui épousent les corps et le
geste.
Laurent Fréchuret signe la mise en scène de
Richard III, de William Shakespeare, du 4 au
14 mars à la Salle Charles Apothéloz.
Ce monument du théâtre sera construit en
dialogue avec des spectateurs tantôt voyeurs,
victimes ou complices… Une tragédie fascinante sur le pouvoir, les pulsions destructrices,
tyranniques et, paradoxalement, de vie qui traversent l’homme. Ou la fin d’une dynastie arrivée au terme de sa décadence.
Avec notamment Dominique Pinon.
Du 5 au 23 mars à La Passerelle, Bourlinguer
de Blaise Cendrars avec Jean-Quentin
Châtelain.
« Ce texte fait partie d’un recueil qui met
en scène Cendrars lui-même dans différents
ports européens, de Venise à Paris Port-de-Mer
(sic). Le texte de Cendrars « Gênes » m’a tout
de suite frappé par l’adéquation à mon projet de
départ : il y avait là une langue extraordinaire,
envoûtante, musicale, écrite en spirale. » Darius
Peyamiras, metteur en scène.
Misterioso-119 de Koffi Kwahulé, du 11 au 30
mars, Salle René Gonzales.
Enigme théâtrale, ce huis clos féminin se
propose d’explorer les ressorts secrets de l’écriture et les méandres de l’esprit humain.
Journal de ma nouvelle oreille de et avec
Isabelle Fruchart, adaptation et mise en scène
de Zabou Breitman. Du 11 au 22 mars sous le
Chapiteau.
« Une voix parle et c’est la
mienne. J’entends ma voix. En
dolby stéréo à travers les
micros. J’entends ma voix. Mais
alors, avant, je ne m’entendais
pas ? Je vais enfin pouvoir m’écouter. C’est la première chose
que je me dis ». Isabelle
Fruchart.
Du 18 au 23 mars, Seule la mer
d’Amos Oz sera présenté à la
Salle Charles Apothéloz dans
une mise en scène de Denis
Maillefer.
Albert Danon est seul à TelAviv. Sa femme Nadia vient de
mourir et son fils Rico est parti au
Tibet. Bettine, une vieille amie,
s’inquiète pour Albert. Surtout
lorsque Dita, la petite amie de
Rico, emménage chez lui.
«VieLLeicht» © Christophe Raynaud de Lage
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Tout un monde en mutation dans un petit village
d’Afrique à la veille des
indépendances. Des acteurs
du Mali et du Burkina Faso
sont réunis par Hassane
Kassi Kouyaté pour un spectacle qui s’annonce plein de
vie et d’humour.
Du 7 mai au 31 mai, Salle
René Gonzalez, Galilée, le
mécano, de Francesco
Niccolini, Marco Paolini et
Michela Signori.
C’est avec une curiosité
insatiable que Marco Paolini
et Francesco Niccolini ont
créé un spectacle dédié à la
figure de Galilée, le père de
la science moderne.
«Journal de ma nouvelle oreille» © BM Palazon
Auteur d’une œuvre considérable, Amos
Oz est le cofondateur du mouvement La Paix
maintenant et l'un des partisans les plus fervents
de la solution d'un double État au conflit israélo-palestinien.
Du 3 au 11 avril, Salle Charles Apothéloz, De
nos jours [Notes on the Circus] de Ivan
Mosjoukine
Un spectacle pour surprendre, pour écouter
le corps et laisser faire la
tête. Un spectacle sous forme
de notes, environ quatrevingts, sur le cirque qu’on
avait l’impression de connaître mais qu’on n’avait jamais
vu comme ça.
Goldfish, par la Compagnie Inbal Pinto &
Avshalom Pollak, les 4 et 5 mai, Chapiteau.
Goldfish commence dans un vestiaire.
Entre danse et pantomime, des petits moments
de la vie quotidienne deviennent des histoires
inattendues qui finissent pas exister d’ellesmêmes.
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Nancy Bruchez
Programme de la saison disponible sur www.vidy.ch
Kouta, d’après la trilogie de Massa Makan
Diabaté, du 6 au 10 mai, Salle Ch. Apothéloz.
Les demeurées de Jeanne
Benameur, du 29 avril au 18
mai à La Passerelle.
L’histoire
touchante
d’une mère et sa fille qui forment un bloc d’amour indestructible. La mère, c’est l’idiote du village. La petite,
c’est Luce. Quelque chose en
elle s’est arrêté. Avec une
délicatesse infinie, Jeanne
Benameur parle du combat
des ces « demeurées » contre
le reste du monde.
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Et pour finir en beauté, du 21
au 31 mai à La Passerelle, A vous la nuit de et
avec Habib Dembélé.
Une histoire d’amitié et d’amour, de jour et
de nuit, de dialogues.
Goldfish © Eyal Landesman
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le poche genève
Bourlinguer
S’il est vérifié que nul n’est prophète en son pays, l’écrivain né en Suisse
à la fin du 19e siècle sera néanmoins entré dans la légende littéraire avec
une œuvre aussi puissante que multiforme. Longs poèmes ou plutôt prose
poétique, romans, reportages, mémoires, Blaise Cendrars découvre le
monde et fait de ses voyages et aventures une fiction poétique : « Toute vie
n’est qu’un poème en mouvement » écrit-il dans La Prose du Transsibérien.
Moins connu que ce dernier, Bourlinguer est quant à lui entré dans le
vocabulaire pour évoquer le voyage aventureux. Entretien avec
Darius Peyamiras.
L’œuvre de Blaise Cendrars a été très
peu portée à la scène ; qu’est-ce qui vous a
poussé à le faire ?
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privilégié une partie plutôt qu’une autre ?
Oui, c’est un recueil de onze récits écrits après
la seconde guerre mondiale et qui portent cha-
cun le nom d’un port, dont nous avons sélectionné la première partie de « Gênes » qui se
passe à Naples, soit une quarantaine de pages
sur les deux cents de ce récit-là. Blaise Cendrars
y revient sur les traces de son enfance à Naples,
vers l’âge de huit ans, et de son amour pour une
petite fille dans un jardin. Il se met en scène à
vingt ans, de retour dans ce jardin d’Eden pour
y retrouver l’essence de sa vie. Arrivé en loques,
défait, il y revit les premières sensations d’enfant, la découverte de la nature et les frémissements amoureux. L’enjeu est de rallumer le feu
primordial de l’enfance pour la transformer en
cendres fécondes, d’embraser sa vie pour être
au cœur du monde, comme le fait l’acte d’écrire. Nous avons procédé à un montage de ces
parties-là en gardant l’aspect collages.
Votre collaboration avec JeanQuentin Châtelain remonte à Mars de Fritz
Zorn en 1986. Que vous apporte-t-elle encore aujourd’hui ?
L’envie de travailler avec
Jean-Quentin Châtelain a précédé le choix du texte. Nous
voulions faire un spectacle
autour de la marche comme
aventure
philosophique,
comme échappatoire au temps
et à l’espace conventionnels.
Nous avons lu Gustave Roud,
Nicolas Bouvier bien sûr,
Robert Walser. Notre choix
s’est finalement arrêté sur
Cendrars et plus précisément
sur « Bourlinguer », surtout
pour la beauté de la langue,
une langue orale, musicale,
une langue à dire plus qu’à
lire. C’est un texte de contemplation, qui parle de quête de
liberté et du mystère du
monde et utilise pour cela une
écriture rhapsodique, faite de
collages, de réflexions, d’aventures vécues ou réinventées. Un patchwork, en
quelque sorte. Chez Cendrars,
l’acte de vivre et l’acte d’écrire se rencontrent dans ce que
l’on nomme maintenant une
autofiction, une fiction autobiographique, comme l’emblématique personnage de
Suter dans L’Or.
Ce comédien est un personnage. Il a la même démesure que
Cendrars. L’écrivain et le
comédien entrent en résonance : même monstruosité,
même part cosmique. Ce sont
des personnes au cœur de la
poésie du monde, qui en saisissent la totalité et la complexité, qui révèlent le mystère des choses. Mais l’acteur,
qui emmène l’autre dans des
régions insoupçonnées, peut
parfois aussi être un clown.
J’ajouterai que cette aventure
théâtrale n’est pas portée uniquement par Jean-Quentin
Châtelain et par moi : elle se
construit avec notamment
Gilles Lambert à la scénographie et les collaborateurs au
son et à la lumière.
Propos recueillis par
Laurence Tièche
Du 10 février au 2 mars :
Bourlinguer de Blaise Cendrars,
m.e.s. Darius Peyamiras. Le PocheGenève, lun et ven à 20h30, mer-jeusam à 19h, dim à 17h, mardi relâche
(rens./rés. /loc. 022/310.37.59)
Bourlinguer est une
œuvre très vaste. Avez-vous
Jean-Quentin Chatelein © Augustin Rebetez
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en tournée
Les deux gentilshommes
de Vérone
Ce spectacle, créé en mars-avril 2013 à Bruxelles, met en scène une Italie
fantasmatique voire fantasmée. Imprégnée de l’amour courtois et de
certains épisodes emblématiques des romans de chevalerie, cette pièce
illustre le conflit de l’amour et de l’amitié - réel conflit de loyauté - qui
verra la victoire de celle-ci sur celui-là. Démonstration très contemporaine
car foncièrement iconoclaste pour ce XVIème siècle qui privilégiait la
confession amoureuse et la virtù. Et l’honneur de la parole donnée.
Argument
Valentin doit quitter Vérone pour
aller à la cour du duc de Milan. Son ami
Protée, qui veut rester près de Julia dont
il est épris, refuse de le suivre. Mais
Antonio, son père, décide de l’envoyer
à la cour, malgré qu’il en ait, pour parfaire son éducation. Valentin, rejoint
par Protée, lui dévoile alors son amour
pour Silvia, la fille du duc, et lui fait
part de son projet de s’enfuir avec elle
afin de lui éviter un mariage forcé.
Mais Protée, subjugué lui aussi par la
beauté de Silvia, dévoilera au duc sous
le coup de la jalousie (encore elle…) le
secret de Valentin. Ce dernier finira
banni, errant dans une forêt peuplée de
brigands et de hors-la-loi, et Silvia sera
enfermée dans une tour.
Quant à Julia, sans nouvelles de
Protée donc inquiète, elle décide de se
rendre à Milan sous des habits de garçon. Découvrant l’inattendu de son
infortune, elle entre au service de
Protée comme page… et la ‘comédie’
d’aller de l’avant, avec allant !
Les Deux Gentilshommes de
Vérone est en effet une comédie de
Shakespeare, celle d’ailleurs qui présente de
façon exceptionnelles une liste de personnages
très réduite. A noter également que c'est dans
cette pièce que le poète dramaturge anglais met
pour la première fois en ‘situation’ une jeune
fille se déguisant en garçon.
Comme le dit en préambule Robert
Bouvier : « Dans cette œuvre de jeunesse, on
sent un Shakespeare tout feu tout flammes, épris
de liberté, de fantaisie, et de romanesque, s'a-
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désirs: fugue, déguisement, enlèvement, menaces... On brave les interdits, on se jette à l'aventure en pleine tempête intérieure. On s'abuse
pour mieux abuser son ami ou son amour et,
paniqué, on découvre soudain en soi-même un
autre qu'on ne soupçonnait pas. »
Amours, amitiés, fidélités bafouées, loyautés oubliées, haines des amis-confidents, jalousies, tromperies, lâchetés, émotions loufoques
mais émotions de ‘gentilshommes’ : tout est
déjà là dans cette œuvre rarement montée.
A voir donc toutes générations confondues…
Extrait
PROTÉE. — Mon gracieux seigneur, ce que
je vais vous révéler, les lois de l'amitié*
m'ordonnent de le cacher; mais lorsque
je repasse dans ma pensée toutes les gracieuses faveurs que j'ai reçues de vous,
tout indigne que je suis, le sentiment du
devoir m'aiguillonne à vous découvrir ce
que nul autre mobile au monde n'aurait
le pouvoir de m'arracher. Sachez donc,
noble prince, que le seigneur Valentin,
mon ami, se propose, cette nuit, d'enlever votre fille; j'ai été pris, moi en personne, pour confident du complot. …
Apprenez, noble seigneur, qu'ils ont
adopté un plan qui lui permettra d'escalader la chambre à coucher de votre fille,
et de la descendre par une échelle de
corde. Cette échelle, le jeune amant est
en ce moment même allé la chercher, et
il va tout à l'heure passer par ici en la
portant; vous pouvez, s'il vous plaît, l'arrêter au passage. Mais, mon bon seigneur, mettez-y assez d'adresse pour que
ma révélation ne soit pas soupçonnée,
car c'est par amour pour vous et non par
haine pour mon ami que je vous ai
découvert ce projet. (sc.1, acte II).
Quod erat demonstrandum alias
CQFD !
Rosine Schautz
«Les deux gentilshommes de Verone» © DR
musant des métamorphoses qu'opère l'amour et
jetant ses protagonistes passionnés dans un
tourbillon de tromperies, coups de théâtre, et
folles tribulations. Ses deux gentilshommes ont
la fougue de la jeunesse ; il dépeint leurs idéaux
et leurs rêves de conquête avec complicité et
une tendresse non exempte d’humour. Son ironie, douce ou cruelle, montre sa lucidité quant à
la nature humaine et ses nombreux paradoxes ».
Il ajoute : « Tout est bon ici pour réaliser ses
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Les deux gentilshommes de Vérone de Shakespeare. Mise
en scène de Robert Bouvier (reprise)
Tournée :
- Théâtre du Passage, Neuchâtel – les 7 et 9 février 2014
- Espace culturel Boris Vian, Les Ulis – 11 février 2014
- Théâtre de l’Octogone, Pully – 14 février 2014
- Spectacle français de Bienne – 17 février 2014
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rains, acteurs au sens plein du terme devenus témoins incontournables des
blessures à eux imposées.
saint-gervais genève
Mémoires
blessées
Chaque année, fin janvier début février le Théâtre
St-Gervais propose un cycle d’événements/spectacles
autour des Mémoires blessées mettant en lumière les
tragiques destins de populations ou d’individus que
l’Histoire majuscule a latéralisés.
Plusieurs soirées thématiques en perspective, notamment celle du
mardi 4 février à ne pas manquer qui tournera autour des ‘Mémoires tsiganes’. Henriette Asséo, grande spécialiste de l’Histoire des minorités en
Europe et tsiganologue émérite, y présentera avec Idit Bloch un film réalisé en 2011 Mémoires tsiganes, l’autre génocide. La projection (à 20h) sera
suivie d’une conversation ouverte en présence des deux réalisatrices.
L’occasion à n’en pas douter de comprendre mieux ce que recouvrent les
termes souvent mal employés de ‘tsigane’, ‘rom’ voire ‘nomade’ ou ‘apatride’ qui, malgré ce que l’on aimerait croire, ne sont aucunement synonymes, n’en déplaise aux politiciens et autres commis de l’Etat chargés de
régler les « problèmes » d’immigration.
Spectacles :
La manifestation version 2014 rassemblera cette fois encore les
acteurs de cette Histoire qui, qu’on le sache ou non, qu’on se le dise ou
non, concerne tout un chacun. Acteurs - et non comédiens ! – contempo-
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* 3-15 février : Au bord du monde, mis en scène par Valentine Sergo qui
ici poursuit son travail réalisé en 2011 sous le titre de Tous les chemins
mènent à Meyrin, spectacle et exposition qui racontait
l’histoire sociale, mais pas seulement, de cette commune.
A noter que le 5 février, une rencontre avec l’équipe et un
membre de l’Observatoire romand du droit d’asile et des
étrangers (ODAE) sera organisée, salle Isidore Isou (7ème
étage).
* 6-8 février : Testimony, récitatif (Charles Reznikoff),
mis en scène par Henri Jules Julien. Il s’agit de la ‘récitation’ d’un recueil de poèmes élaborés entre 1934 et 1979
inspirés par les minutes de procès tenus de 1895 à 1915
aux USA. Chaque mot de Testimony a été prononcé devant
un juge : à voir donc pour mieux entendre le tragique de la
condition (in)humaine…
* 11-15 février : reprise du beau spectacle Mon livre
d’heures, ‘inventé’ par le Fanfareduloup Orchestra, autour
de l’ami flamand de Romain Rolland, Frans Masereel, graveur pacifiste et engagé ayant collaboré à plusieurs journaux. Spectacle alliant musique, chant, histoires sans paroles, très réussi artistiquement et esthétiquement.
Exposition :
* 30 janvier-9 mars : La porte du non retour, déambulatoire théâtral et photographique imaginé par le canadien
Philippe Ducros, auteur, metteur en cène, acteur ‘mais surtout’ grand voyageur... Quarante-neuf photos pour cheminer dans une carte de géographie cosmopolite par essence,
se souvenir d’où l’on vient, et peut-être s’interroger sur la
manière dont les Européens se préoccupent à géométrie
variable de l’état du monde.
Rosine Schautz
Exposition «La porte du non-retour»
photo de Philippe Ducros (Le Radeau de la Meduse)
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théâtre kléber-méleau
Molly Bloom
Œuvre-phare de la modernité littéraire du XXe siècle,
Ulysse de James Joyce vaudra à son auteur toutes les
peines du monde pour qu'il parvienne enfin à pouvoir
le faire éditer. Pas moins de sept années de labeur
auront été nécessaires pour que l'écrivain puisse aller
au bout de son projet. Hormis l'extrême complexité de
la langue, c'est avant tout aux passages jugés obscènes
et scandaleux que la censure s'attaqua pour vouer aux
gémonies l'ensemble de l'ouvrage.
«Molly Bloom» ©Pascal Victor - Artcomart
Ce récit relate les pérégrinations de Leopold Bloom et Stephen
Dedalus à travers la ville de Dublin, lors d'une journée en apparence ordinaire mais qui prend pour modèle les épisodes mythologiques de l'Odyssée
d'Homère. L'action – si le mot action a encore du sens – se déroule en
conformité avec la règle classique de l'unité de temps. Leopold Bloom a
passé sa journée à dériver dans Dublin, entre alcool et fréquentation des
bordels. Dans les dernières pages culmine le procédé dit de courant de
conscience (stream of consciousness), flux ininterrompu de paroles sur le
mode du monologue intérieur. Le point du vue du personnage y est décrit
comme si le lecteur avait accès directement à son processus de pensée ;
voilà pour les détails techniques…
Pour ce qui est du théâtre, il faut passer le seuil des a priori de complexité et d'hermétisme et plonger les yeux fermés dans un des plus
extraordinaires numéro d'acteur qui ait été donné récemment sur une
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scène. Anouk Grinberg est Molly Bloom, l'épouse traînant ses souvenirs
de chanteuse ratée et ses frasques d'épouse infidèle. La perspective visuelle très réaliste se limite à un décor minimal : un lit au centre de la scène
avec Leopold (Antoine Régent) imposant une présence muette d'un grand
corps endormi qui ignore ce qui se passe au même moment dans la tête de
sa femme. Ils dorment tête-bêche depuis la mort de leur jeune enfant, chacun progressivement isolé dans un monde qui ne cesse de se rétrécir autour
d'eux. Tout y passe, dans ce célèbre monologue : rancœurs sexuelles, misères d'un quotidien rongé par les habitudes, souvenirs de bonheur enfui,
discours sur la religion et la politique…
Redoutable défi
L'épanchement mental se mêle aux flux du corps, y compris les plus
honteux et les plus intimes. Ce monologue de Molly naît d'une nuit d'insomnie pendant laquelle remontent à la surface toutes les scories du passé
et les médiocrités d'un présent qu'il faut bien accepter. L'idée (littéralement délirante) d'adapter au théâtre
ces pages ultimes du roman de
Joyce constitue pour l'interprète un
défi redoutable sur le plan de la
mémorisation et une mise à l'épreuve de ses capacités physiques à
occuper la scène en solo une bonne
heure durant. Anouk Grinberg joue
merveilleusement du très paradoxal
décalage entre un profil fluet,
presque adolescent par son apparence, et la force tellurique qui
jaillit des profondeurs du texte à
travers elle. Très discrètement
amplifiée, son incarnation de
Molly oscille au rythme d'un
implacable sismographe de mots et
de sentiments. L'absence de ponctuation contraint à une apnée continue à travers laquelle scintille le
labyrinthe inextricable des fils narratifs. Modulant les inflexions de sa
voix haut perchée, elle joue d'une
palette d'inflexions éraillées tour à
tour implorante, agressive ou candide. Entre rire et larmes, on partage cette parenthèse existentielle qui s'élève progressivement vers le dénuement de la phrase et l'éclosion répétée
de ce oui joyeux et libérateur, à la fois si bref et d'une immense résonance
amoureuse dans la voûte céleste qui plane au-dessus d'elle.
David Verdier
Molly Bloom d'après Ulysse de James Joyce.
Adaptation Jean Torrent, Anouk Grinberg et Blandine Masson
Interprète : Anouk Grinberg et la participation d'Antoine Régent et la voix d'André
Marcon.
Théâtre Kléber-Méleau, Renens-Malley
Jusqu’au 2 février 2014
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aussi de la tendresse et de l'amour qui le subjuguent. Encore une fois, si l'interprète possède la
résistance physique requise, ces divers moments
de l'éducation du jeune Siegfried procurent une
intense satisfaction à celui qui peut les rendre
sensibles par le chant autant que par le jeu scénique.
siegfried au grand théâtre
Un rôle qui n'a rien
d'effrayant...
John Daszak sera Siegfried dans l'opéra éponyme de Wagner en cette fin de
mois et dans les deux cycles complets que le Grand Théâtre affiche en mai. Pour
lui, la Tétralogie genevoise sera une vraie première, car ce chanteur n'a encore
jamais eu l'occasion d'interpréter ce rôle en représentation. Un projet avait été
ébauché à Sao Paolo au Brésil, mais c'est pour finir seulement dans le
Crépuscule des dieux que ce ténor a pu se frotter à un des emplois les plus
lourds de tout le répertoire lyrique.
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Beaucoup de chanteurs avouent hésiter
longtemps avant d'incarner le personnage de
Siegfried en scène car le rôle est long, exige de
nombreuses incursions dans une tessiture relativement élevée et ne permet pas à l'interprète de
se relâcher pendant les plus de trois heures et
demie où il est en scène. Mais ces problèmes ne
semblent pas effrayer outre mesure le futur
héros wagnérien genevois. La réponse à ma première question fuse :
Comment réagissez-vous face aux
wagnériens qui voient en Siegfried un des
emplois les plus complexes et les plus exigeants, pour ne pas dire les plus exténuants
de tout le répertoire lyrique ?
Je ne comprends pas tout à fait ce point de vue.
Bien sûr, l'opéra est long et nécessite des réserves physiques maximales pour permettre au
chanteur de tenir dans la durée. Mais Wagner
sait parfaitement ce qu'il fait et ne demande rien
d'impossible à ses interprètes dans ses partitions; c'est pourquoi j'apprécie énormément d'aborder ce répertoire à ce stade de ma carrière,
car il ne fait aucun doute que ce sera un sommet
dans ma vie de chanteur. Bien sûr, je ne peux
encore rien dire de définitif sur les problèmes
que pose cette musique au théâtre puisque je
n'ai pas eu l'occasion de vivre l'expérience en
direct dans le cadre d'une représentation commençant à 16 heures et se terminant à 23 heures!
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Le Siegfried qui houspille Mime au début n'a
rien à voir avec celui qui se confronte à Fafner
au 2e acte puis à Wotan au début du 3e, avant de
tomber sous le charme de Brünnhilde!
Vocalement, les exigences sont différenciées:
aux accents agressifs de la rencontre avec Mime
succède le moment d'ineffable joie de la fonte
de l'épée. Les Murmures de la Forêt sont un précieux moment d'introspection (c'est la première
fois que Siegfried est seul après avoir découvert
que Mime n'est pas son père) et chaque note
doit alors être soigneusement polie, comme
dans un lied où il n'y a rien de secondaire dans
la ligne de chant. Face à Wotan, Siegfried n'est
plus l'adolescent en révolte, mais l'homme qui
ose réclamer ce qui lui est dû. Et enfin, face à
Brünnhilde, c'est la découverte de la peur, mais
Et où trouve-ton cette résistance physique particulière ?
Un opéra wagnérien est comme un marathon. Et
je sais de quoi je parle, puisque je me suis mis à
la course et ai déjà couru mes premiers 42 kms
récemment!... (Rire). Blague à art, tout est affaire de la gestion équilibrée des ressources et du
souffle ainsi que de la compréhension de l'architecture musicale de chaque scène. Ce qui est
éblouissant chez Wagner, c'est son art de poser
à un moment précis la première pierre d'une
structure qui ne se trouvera achevée que bien
plus tard. Ainsi une esquisse du thème de l'amour de Siegfried pour Brünnhilde apparaît-il
déjà dans une forme estompée lors de son dialogue avec l'oiseau à l'acte précédent! Rien n'est
laissé au hasard. Et si l'on travaille, comme c'est
le cas ici, avec un chef qui fait passer les considérations musicales avant la satisfaction de son
ego, on découvre avec son aide les fils qui permettent de conférer leur juste place à toutes les
séquences de ces vastes mouvements que sont
les trois actes de l'ouvrage.
On dit souvent que l'interruption
dans la composition de cet ouvrage est sensible dans l'écriture de la fin du 2e acte et dans
le 3e ... On sait, en effet, que Tristan et les
Qu'est ce qui vous paraît alors sécurisant dans l'art de composer de Wagner ?
Chacune des scènes possède son atmosphère
propre et demande une approche différenciée.
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John Daszak - credit Robert Workman
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Maîtres-Chanteurs ont été composés pendant
la longue pause que le compositeur s'est
octroyée alors qu'il rédigeait le 2e acte de
Siegfried. Avez-vous, comme interprète, la
sensation d'aborder une écriture autre enfin
d'ouvrage ?
compagnie et que je me sens mieux dehors, en
forêt, à me livrer à une activité physique plutôt
que de faire du shopping dans une grande ville
La tessiture du rôle est plus haute dans le 3e
acte, et surtout dans le duo, et l'écriture fait plus
souvent recours à un chromatisme qui n'aurait
peut-être pas existé sous cette
forme sans l'expérience de
Tristan. Mais je peine à y voir
le résultat d'une évolution
artistique particulière; les
situations dépeintes dans le 3e
Je me fie au metteur en scène pour cet aspect de
la question. Je ne suis pas un artiste lyrique qui
fait passer le chant avant tout le reste. Pour moi,
Le personnage est-il facile à cerner
scéniquement ?
acte sont tellement différentes
de celles que l'on rencontre
auparavant qu'une différenciation dans les moyens d'expression musicaux me paraît s'imposer naturellement.
l'ouvrage sans se mettre en avant pour offrir au
spectateur d'aujourd'hui une relecture qui fasse
directement référence à notre monde contemporain. Chaque élément du texte est discuté en
détail, chaque didascalie de Wagner est fidèlement reprise, mais sans pour autant la restituer
dans toute sa naïveté première. Une stylisation
s'impose, ne serait-ce que pour permettre au
spectateur d'aujourd'hui de pénétrer sans entrave dans cet univers fantastique
de conte de fées. L'esprit de la
vision originale est conservé
et il ne fait pour moi aucun
doute que c'est bien Wagner
que l'on représente ici, non un
remake bâtard.
Le fait d'interpréter
ce rôle dans le cadre d'une
mise en scène qui va aboutir
à deux représentations
cycliques de l'intégralité de
la Tétralogie vous facilite-til la tâche?
Certains voient en
Siegfried un jeune homme
présomptueux, tout en muscles et finalement assez peu
sympathique...
Il est bien sûr préférable de
jouer l'œuvre comme Wagner
a voulu qu'elle le soit. Par
On ne peut juger sa conduite
ailleurs, je n'ai pas encore vu
avec les critères habituels.
les deux premiers volets du
N'oublions pas qu'il n'a pas eu
cycle et ne peux donc rien dire
une enfance normale, qu'il a
sur ce qui a précédé mon
été maintenu écarté de tout
entrée en scène ! Je suis pourcontact avec d'autres semblatant frappé, pendant les répétibles par un Mime soucieux de
tions, d'entendre les constanprotéger celui qui devait lui
tes références faites par tous
restituer l'or du Nibelung
les artistes impliqués, techniavant de le faire disparaître.
ciens compris, à ce qui a déjà
Siegfried n'a pas conscience
été réalisé sur le plateau et à
ce
qui va l'être dans deux mois
des besoins des autres puislorsqu'on
mettra au point le
qu'il ignore leur existence et
Crépuscule des dieux. A ce
n'a même jamais vu de femme
titre-là, il est évident que la
: il se sent seul, cherche à
continuité du projet sur une
savoir qui est sa mère, son
«Siegfried», avec Steven Humes (Fafner), John Daszak (Siegfried) et Andreas Conrad
(Mime). Photo de répétition © GTG / Carole Parodi
seule saison bénéficie à l'enpère; il se demande s'il existe
semble de la distribution qui a
d'autres gens comme lui (le
nain Mime est à peine un modèle pour lui, car il une représentation d'opéra est un moment d'im- l'impression, rare sur les scènes d'opéra actuelest repoussant et retords). Sa force extraordinai- mersion dans un monde dont je ne suis qu'un les, de faire partie d'une famille avec un vaste
re le rend cassant dans ses rencontres, mais cela rouage. Ce que demande un metteur en scène, je projet commun à mettre au point !
ne dit rien sur sa personnalité profonde. C'est le fais sans hésiter, pour autant, bien sûr, qu'il
Propos recueillis par Eric Pousaz
précisément cette ambiguïté entre ses besoins parvienne à me convaincre du bien fondé de ses
inconscients et ses comportements de matamo- partis pris. Ici à Genève, le spectacle me paraît
re qui font de lui un être aussi attirant. Je dois assez classique, si je peux en juger d'après ce Siegried est à l'affiche du Grand Théâtre les 30 janvier, 2
également ajouter que le personnage me semble que l'on m'a dit et d'après les décors dans les- 5 et 8 février ainsi que dans le cadre des deux représentaassez proche de ce que je suis. Je n'ai pas honte quels nous commençons à travailler. J'apprécie tions du Ring complet les 16 et 23 mai
d'avouer que j'ai gardé la faculté de m'émer- énormément en MM. Dorn et Rose des artistes
veiller comme un enfant, que j'aime la bonne qui entendent se mettre d'abord au service de
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à l’opéra de lausanne
Un talent qui séduit
Sandrine Piau
A cette voix limpide et ailée répond un
physique délicieusement espiègle, que de nombreux metteurs en scène exploitent pour le
meilleur : Jean-Pierre Vincent, Moshe et Leiser,
Pierre Constant ouvrent la voie à Laurent Pelly
qui la transforme en une Wanda subtilement
nunuche (La Grande Duchesse de Gérolstein
avec Felicity Lott au Châtelet, en dvd et en cd
Virgin, dirigée par Minkowski en 2004), où
encore le duo Montalvo-Hervieu pour d'inénarrables Paladins de Rameau au Châtelet en 2004
(dvd Opus arte). Sandrine Piau se consacre également à l'oratorio (Bach, Brahms, Haydn,
Vivaldi..) et à la mélodie dans laquelle la pureté
de son chant et la qualité de son expression font
merveille. Invitée dans toute l'Europe, elle alterne aujourd'hui avec un égal bonheur les œuvres
les plus variées de Haendel dont elle chantait la
saison dernière Cleopatra dans le Giulio Cesare
mis en scène par Laurent Pelly (Palais Garnier)
et le mois dernier Morgana dans la reprise
d'Alcina (Carsen toujours à Garnier) sans
oublier Orlando ou Serse (cd Virgin live TCE
2004 dirigé par Christie), à Debussy avec une
Mélisande très remarquée à Amsterdam en 2008
(Pier Audi avec Stéphane Degout en Pelléas), ou
sa récente Sœur Constance des Dialogues des
Carmélites, conservant Mozart avec cette juvénile Pamina donnée au TCE en 2011 avec JeanChristophe Spinosi dans la fosse.
Après un formidable doublé Poulenc/ Haendel à Paris, Sandrine Piau sera en
concert à Lausanne le 16 février accompagnée par Jérôme Corréas et Les
Paladins, une belle occasion pour retrouver la voix fraîche et délicate de la
soprano française, dont la carrière est un exemple de rigueur, de modestie
et de surprises musicales. Portrait.
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Comme Véronique Gens et Patricia
Petibon, Sandrine Piau doit tout à la musique
baroque, qui l'a vue naître, se construire et s'épanouir, puis accéder enfin à un large répertoire. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si ces trois
cantatrices étaient réunies sur la scène du
Théâtre des Champs-Elysées en décembre dernier pour interpréter brillamment le chef-d’œuvre de Poulenc, Dialogues des Carmélites, dans
l’extraordinaire proposition scénique d’Olivier
Py. Sandrine Piau comme ses consœurs n'imaginait d'ailleurs pas faire une carrière lyrique : elle
commence très jeune l'étude de la harpe et se
destine à cet instrument, avant d’intégrer la
Maîtrise de Radio France où elle découvre l'univers de l'opéra et du chant.
Rencontre déterminante
Elle est rapidement admise au CNSM et travaille la harpe, la musique de chambre et l'interprétation de la musique vocale ancienne, dans la
classe de William Christie qui l'initie à la
musique baroque. Cette rencontre avec l'une des
figures tutélaires du renouveau baroque est déterminante pour la jeune femme, qui décide de se
consacrer au chant et de se confronter aux exigences de ce répertoire. Les conseils prodigués
par son professeur particulier,
Jacqueline Morin, vont également
lui être d'une grande importance,
celle-ci la préparant aux partitions
qui constitueront sa carrière future,
ainsi qu'à la mélodie dont elle va
devenir une ardente défenseur.
Ainsi préparée, la jeune Sandrine
Piau participe régulièrement aux
productions des Arts Florissants à
Aix notamment, ce milieu extrêmement perméable la mettant en relation avec les principaux acteurs de
la musique baroque et notamment
Christophe Rousset qui va jouer un
rôle décisif dans l'évolution de son
parcours artistique. Après Rameau,
a
Purcell et Monteverdi, elle découvre avec passion
la virtuosité italienne des opéras de Haendel auxquels sa voix lumineuse et volubile, au timbre
chatoyant, s’adapte parfaitement. Sa présence
dans Giulio Cesare, Tamerlano, Scipione ou
Riccardo primo (enregistré pour la première fois
pour L'oiseau-lyre) la hisse sans tarder parmi les
spécialistes du genre. Les chefs de file baroque
font bientôt appel à son talent et à ses compétences, de Philippe Herreweghe à Jean-Claude
Malgoire, en passant par René Jacobs ou Fabio
Biondi, qui trouvent en elle une interprète
dévouée au texte, imaginative et pleine d'allégresse. Les prémonitions de son professeur ne
tardent pas à s’avérer exactes ; la soprano qui
refuse de se laisser « enfermer » dans un répertoire, ne va cesser de répondre aux sollicitations
et aborde à partir de 1996 les opere serie de
Mozart, Mitridate en particulier qu'elle donnera à
Genève dans la vision de Francisco Nerin (œuvre
qu'elle grave également pour Decca avec Bartoli,
Dessay et Rousset en 1999, rôle d'Ismene), avant
d'incarner Konstanze, Pamina puis plus tardivement Donna Anna, mais également Britten avec
Le songe d'une nuit d'été (avec Carsen à
Bordeaux), Strauss (Zerbinetta), Weber
(Annchen) ou Massenet (Sophie dans Werther).
A Lausanne
Avant de la retrouver en concert à l'Opéra
de Lausanne le 16 février où elle sera accompagnée par Jérôme Corréas et son ensemble Les
Paladins, essayez de vous procurer les trois
albums que Sandrine Piau a gravé pour Naïve
(Haendel avec Rousset et Mozart
avec Gottfried von der Goltz pour
les airs d'opéras et « Après un
rêve » avec Susan Manoff pour la
mélodie française), préparation
idéale pour goûter au programme
intitulé « Le triomphe de l'amour »
où la cantatrice interprétera des
pages de Sacchini, Lully, Rameau,
Charpentier, Campra et Grétry.
François Lesueur
16 février à l’Opéra de Lausanne
Billetterie : 021/315.40.20, lun-ven de 12h
à 18h / en ligne : www.opera-lausanne.ch
Sandrine Piau © Sandrine Expilly / Naïve
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victoria hall, genève
Dmitri Hvorostovsky,
charmeur et sérieux
Le baryton russe donnera le 24 février, à Genève, un récital comme il les
affectionne, avec Ivary Ilja au piano. A l’affiche : des mélodies et romances de
Rach, Tchaïkovski, Medtner et Liszt.
Dmitri Hvorostovsky, c’est au
choix une voix qui impressionne ou une
crinière qui séduit. A moins qu’il ne
s’agisse du contraire. Mais derrière le
physique généreux, c’est un chanteur
impitoyable avec lui-même qui se
cache.
Parcours classique
A cinquante et quelques années (il
est né en 1962 à Krasnoïarsk, en Sibérie,
où il a également effectué ses études
musicales), le baryton russe est depuis
plus de vingt ans l’une des plus belles
voix de la scène lyrique. Son parcours
est classique : parents scientifiques mais
épris de musique (le père joue du piano,
la mère est soprano amateur), études de
piano puis de chef de chœur, entrée dans
la troupe de l’Opéra de Krasnoïarsk à
l’âge de vingt-deux ans. Mais un prix
lors du Concours Glinka lui permet de se
distinguer, qui sera suivi de deux autres
victoires : au Concours de Toulouse et au
BBC Singer of the World Competition
de Cardiff, où il devance Bryn Terfel,
l’enfant du pays : « Je ne savais pas qui
était Terfel jusqu’aux dernières éliminatoires, lorsque je l’ai entendu chanter Wagner.
C’est seulement à ce moment-là que j’ai eu des
doutes quant à mes chances de gagner le
concours ».
Tout aurait pu alors s’enchaîner, mais le
jeune baryton fait preuve de sagesse. Il se
consacre d’abord beaucoup au récital et inaugure sa carrière internationale à Nice, en 1989,
avec le rôle d’Eletski dans La Dame de pique :
un rôle brillant mais assez bref. Puis, très vite,
les scènes du monde entier le réclament, du
Staatsoper de Vienne au Metropolitan Opera de
New York.
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Dmitri Hvorostovsky © DR
De Verdi à Eugène Onéguine
On a utilisé le mot crinière : il est vrai que
Dmitri Hvorostovsky a été aidé par une allure de
jeune premier aux cheveux blonds, vite devenus
blancs, qui fait de lui un personnage reconnaissable entre tous, avec ou sans costume. Mais ne
nous attardons pas sur la parure :
« Indépendamment de mes bons gènes, que je
bénis tous les jours, je dois, comme un sportif de
haut niveau, me tenir en excellente condition. Je
fais pour cela de la musculation, trois à quatre
fois par semaine, où que je me trouve sur la pla-
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nète », explique-t-il à Thierry Guyenne pour
Opéra Magazine. Une conscience de ses possibilités et un sérieux dans la préparation qui lui
ont permis de chanter tour à tour les grands
rôles verdiens (et l’on sait combien Verdi chérissait entre toutes la tessiture de baryton), de
son tout premier Marullo dans Rigoletto, à
Krasnoïarsk, en 1984, au rôle-titre du même
ouvrage, en passant par Germont dans La
Traviata (rôle qu’il reprendra au printemps prochain à Covent Garden) ou Posa dans Don
Carlo. Iago dans Otello et le rôle-titre de
Macbeth seraient prévus, paraît-il, pour les mois
ou les saisons à venir.
Mozart a également compté
dans sa carrière, du Comte des
Nozze di Figaro au rôle-titre de
Don Giovanni, qu’il a cependant
abandonné il y a une dizaine d’années au moment où sa voix prenait
de nouvelles couleurs. Et on aurait
tort, évidemment, d’oublier
Eugène Onéguine, un rôle qui lui
est presque naturel et qu’il a chanté avec des Tatiana aussi différentes que Renée Fleming (avec qui
on peut le voir sur un dévédé enregistré au Met, sous la direction de
Valery Gergiev) ou Anna
Netrebko.
Aujourd’hui, celui que ses
amis appellent « Dima » vit à
Londres mais revient régulièrement en Russie. Il ne déteste pas
donner des concerts en plein air ni
interpréter des chansons d’Igor
Krutoy (un compositeur-interprète
qui se produit volontiers avec Lara
Fabian), ou encore enregistrer des
chansons populaires russes (ah,
l’album Dark Eyes !). La musique
contemporaine ? Depuis la mort de
son ami Georgi Sviridov (19151998), il en a fort peu chanté. Mais grâce à sa
pratique régulière du récital, sa voix est aussi
belle qu’au premier jour.
Christian Wasselin
24 février au Victoria Hall à 20h (loc. Espace Ville de
Genève, Grütli, Genève Tourisme, Cité Seniors, Centrale
Billetterie T 0800.418.418, billetterie-culture.ville-ge.ch,
Fnac)
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opéra de lausanne : carine séchaye
Hänsel...
Au sortir de son premier jour de répétition sur le spectacle
d’Hänsel et Gretel d’Humperdinck à l’Opéra de Lausanne,
Carine Séchaye nous a gracieusement accordé un moment
d’entretien. La mezzo-soprano d’origine genevoise, que
l’on a pu admirer à de maintes reprises en Suisse,
récemment dans l’Aiglon d’Honegger à Lausanne, ou
encore en Frédéric dans Mignon d’Ambroise Thomas au
Grand Théâtre de Genève, interprétera en février le jeune
garçon légendaire. Entretien.
Pouvez-vous retracer votre parcours en quelques mots, de vos
études à vos débuts professionnels ?
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J’ai étudié à Genève au Conservatoire en parallèle avec l’ESAD (Ecole
Supérieur d’Art Dramatique), ce qui m’a offert à la fois une formation
théâtrale et musicale. J’y ai étudié jusqu’en 2003, et ai ensuite été prise à
l’Opéra Studio de Zürich, pour une formation de deux ans. À ma sortie,
j’ai d’abord été engagée à l’Opéra de Lausanne dans la troupe de l’EnVol,
où j’ai d’abord chanté le rôle d’Honora dans Tom Jones de Philidor, qui a
donné lieu à un cd et un dvd, puis j’ai eu mon premier rôle de travesti dans
Les noces de Figaro avec Cherubino. J’ai ensuite obtenu une série de
contrats à Darmstadt: Nancy dans Albert Herring de Britten, ainsi que les
magnifiques rôles de Mélisande de Debussy et d’Octavian (Der
Rosenkavalier) de Strauss.
Quels ont été les rôles qui vous ont le plus marquée ?
J’ai énormément aimé chanter Octavian, qui est un rôle très long et qui
demande beaucoup d’énergie physique. On touche à beaucoup de registres différents, entre la farce burlesque du travestissement et le sublime trio
final. Il y eu aussi l’Aiglon d’Honegger, à l’Opéra de Lausanne, et à Tours.
C’était un rôle très exigeant, j’étais véritablement habitée par cette histoire. Je dormais mal, je pensais tout le temps à ça ! Ce rôle m’a demandé
une grande gestion d’énergie physique et vocale, et une grande concentration. Le fait de mourir en scène m’a marqué, comme quand j’ai chanté
Mélisande. À la dernière représentation, je me suis dit que j’allais profiter
au maximum d’être une dernière fois le fils de Napoléon en scène. J’ai
hélas eu plein de petits incidents pendant le spectacle, dont je peux maintenant rire mais qui, sur le moment, me semblaient catastrophiques : un de
mes partenaires de scène a arraché à moitié ma perruque, mon costume a
craqué sur ma jambe, j’ai dû m’y reprendre à deux fois pour casser un
miroir et j’ai avalé de l’eau de travers avant de monter sur scène… Dans
les autres rôles que j’ai adoré chanter, il y eu Rosine (Il Barbiere di
Siviglia, Rossini), la Périchole (Offenbach)…
Avec quels partenaires de scènes, chefs ou metteurs en scènes
avez-vous particulièrement aimé travailler ?
Lorsque j’étais à l’Opéra Studio de Zürich, j’ai pu chanter des petits rôles
sur scène aux côtés de grandes personnalités du chant, tels que José van
Dam. J’ai été récemment très impressionnée par Diana Damrau qui était
ma partenaire de scène dans Mignon d’Ambroise Thomas à Genève. Elle
était enceinte et m’a épatée par son aisance scénique, sa façon de s’économiser en répétition et une fois sur scène d’être impeccable et inventive. J’ai
aussi énormément aimé interpréter l’Enfant dans L’Enfant et les sortilèges
de Ravel à Monaco, avec comme partenaires Béatrice Uria-Monzon,
Annick Massis… Dans les chefs, je retiens notamment Alain Altinoglu,
avec qui j’ai fait les Scènes de chasses de René Koering à Montpellier. Il
avait une formidable énergie positive, une façon de fédérer les gens et un
vrai amour des voix, on se sentait véritablement soutenus depuis la scène !
A propos d’Hänsel et Gretel, que pouvez-vous déjà nous dire de
cette production lausannoise ?
La mise en scène annonce une couleur dure et réaliste. On n’assistera pas
à une version folklorique ! On verra une famille comme il y en a partout,
et des enfants presque adolescents. Au niveau scénique, c’est la sorcière
qui mènera le jeu en transformant l’espace autour des enfants, en les attirant vers elle. Par exemple, quelques plumes qu’elle plantera autour d’elle paraîtront, par jeu de lumière, des arbres pour Hänsel et Gretel.
L’intervention de la vidéo permettra à l’univers de se construire autour de
la sorcière. La maison de la sorcière ne sera pas en pain d’épices mais il y
aura un mur d’enfants tapissé de crème pâtissière ! Je me réjouis de collaborer à nouveau avec certains de mes collègues, comme Marc Mazuir avec
qui j’ai notamment fait la tournée de Carmen de l’Opéra de Lausanne au
Japon, et Laurent Gay, qui a été mon chef sur le Chat Botté à Lausanne en
2009.
Quels sont vos futurs projets ?
Je vais encore tourner mon récital « Elle connaît la chanson ! » avec Marie-Cécile Bertheau. Nous avons un grand succès avec ce récital que nous avons déjà donné au Théâtre du
Passage, au Crochetan, à Beausobre, à l’Auditorium de Dijon,
au festival Amadeus de Genève… Avec Marie-Cécile, nous
sommes complices et nous adaptons notre programme selon
les occasions. Nous allons le reprendre le 23 février à la Vallée
de Joux. Pour ce qui est de l’opéra, je me réjouis de chanter au
Théâtre des Champs-Elysées La Scala di Seta de Rossini et de
faire mes débuts dans le rôle de Stephano (Roméo et Juliette)
à Monaco. Je peux aussi déjà annoncer que j’aborderai ma
première Carmen en 2015…
Propos recueillis par Anouk Molendijk
Carine Séchaye, photo Barbara de Preux
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opéra de lausanne : céline mellon
... et Gretel
À quelques jours des premières répétitions d’Hänsel et
Gretel de Humperdinck à l’Opéra de Lausanne, nous avons
pu rencontrer Céline Mellon, qui interprétera le rôle de
Gretel. La jeune soprano, que l’on a pu déjà remarquer en
Suisse, dans La passion selon St-Jean dirigée par Ton
Koopman ou dans le rôle-titre de la Petite renarde rusée de
Jana ek à Monthey, est très présente dans cette saison
13-14 de l’Opéra de Lausanne. Entretien.
Comment en êtes-vous arrivée à la musique, et particulièrement au chant lyrique ?
maître, d’une exigence incroyable et qui ne s’immisce pas dans nos choix,
qui nous renvoie toujours à nos responsabilités. Je suis arrivée donc jeune
et le cadre sublime de la Suisse, ainsi que la formation solide et complète
proposée par l’école m’ont offert un cocon rassurant. J’ai été marquée
notamment par l’atelier lyrique, où l’on nous apprenait la concentration et
l’implication. Les projets de concerts permettaient de bien progresser et
d’explorer sans trop de crainte : il faut pouvoir faire des erreurs au
Conservatoire, afin de mieux se connaître et ne pas les reproduire dans le
milieu professionnel.
Quels ont été les projets marquants de vos années d’études ?
Évidemment, la Petite Renarde Rusée, mise en scène par Cédric Dorier au
Théâtre du Crochetan, mais aussi un projet Gerschwin avec Benjamin
Lévy, La Passion selon St-Jean avec Ton Koopman. Suite à une masterclass avec Christa Ludwig, cette grande dame m’a choisie pour chanter le
soprano solo dans la Quatrième symphonie de Mahler pour différents
concerts, ce qui fut également une belle expérience.
Comment avez-vous amorcé votre incursion dans le milieu
Je n’arriverai pas à répondre à cette question sans mentionner le profond professionnel, après ces études ?
Il y a eu une continuité entre la fin du
lien entre la musique et les autres arts :
Conservatoire et mes débuts profesje me suis intéressée à la musique par le
sionnels : j’étais encore en dernière
biais de la scène. J’ai commencé la
année quand j’ai obtenu des rôles à
danse vers trois ans et demi, et cela m’a
l’Opéra de Lausanne. J’ai fait mes predonné un appétit immense pour la
miers pas dans La Grande Duchesse de
scène. Pour ce qui est de la musique à
Gérolstein, en tant que soliste et chorisproprement parler, j’ai d’abord étudié le
te, et ai participé à deux autres projets
violoncelle durant sept ans, un instrude chœur. J’ai ensuite enchaîné avec la
ment si proche de la voix. Et c’est lors
Route Lyrique. J’ai interprété
de cours de solfège que l’on a remarqué
Barbarina dans Le Nozze di Figaro en
que j’avais une voix intéressante. On
juin passé, et cette saison, j’ai pu déjà
m’a donc poussée à chanter dans la
chanter un rôle dans Lakmé.
chorale de mon collège. Mais le déclic
M’attendent encore Gretel, Laura dans
par rapport au chant lyrique s’est proLuisa Miller, et Berta dans Le barbier
duit vers mes treize ans, lorsqu’une
de Séville de Rossini.
amie de la chef de chœur, Aline Gozlan,
Même si les répétitions n’ont
choriste à l’Opéra du Rhin, est venue
pas
encore
commencé, que pouvezchanter devant notre chœur d’enfants à
vous
nous
dire
d’Hänsel et Gretel ?
Strasbourg. Cela a été une révélation
J’avais
chanté
des
duos en allemand
pour moi, dépassant le simple côté
lorsque
j’étais
étudiante
à Strasbourg,
esthétique : j’ai été fascinée par la puisdonc
je
me
réjouis
beaucoup
de trasance vibratoire du son. Je lui ai donc
vailler
cette
œuvre
dans
son
intégralité,
demandé des cours de chant, et elle a pu
ici en français. J’ai pu discuter avec la
me transmettre sa passion en quelques
metteuse
en scène, Julie Beauvais : elle
mois. Je me suis intéressée de près au
souhaite
s’éloigner
de l’édulcoré du livmonde de l’opéra, car il rassemble
Céline
Mellon
ret
de
Wette,
traduit
par Catulle
beaucoup de moyens d’expressions et
Mendès,
et
jouer
ainsi
sur
l’étrange. Je
permet à la personnalité artistique de se
n’ai
jamais
encore
travaillé
avec
mes
futurs
partenaires
de
scène,
que je
déployer. Je suis rentrée au CNR de Strasbourg à quinze ans, dans la clasconnais
seulement
artistiquement,
et
je
me
réjouis
d’entrer
dans
cet
unise d’Henrik Sieffert, où j’ai pu me familiariser avec le monde de la
vers
avec
eux.
musique. J’y suis restée trois ans avant de passer les admissions pour la
Haute Ecole de Musique de Lausanne.
Comment en êtes-vous venue à Lausanne ? Quelle a été votre
expérience dans cette école ?
Propos recueillis par Anouk Molendijk
J’avais pu assister à une masterclass de Brigitte Balleys à Strasbourg et sa
personnalité m’a conduite à auditionner à Lausanne pour étudier avec elle.
Mais c’est Gary Magby qui m’a pris dans sa classe, à dix-huit ans. Cette
rencontre a été extrêmement importante pour moi, j’ai pu trouver en lui un
Hänsel et Gretel, du 5 au 12 février, à l’Opéra de Lausanne, dir. Laurent Gay, m.e.s Julie
Beauvais, avec Carine Séchaye, Céline Mellon, Isabelle Henriquez, Marc Mazuir et
Marion Grange, orchestre OCL. Information et réservation : www.opera-lausanne.ch, et
+41 21 315 40 20.
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metropolitan opera, new york
Norma
& Tosca
«Tosca» avec Patricia Racette dans le rôle-titre et George Gagnidze en Scarpia
à l’Acte II © Marty Sohl/Metropolitan Opera
Norma
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Quelques lances, le contexte l'exige tout comme la tenue du proconsul
romain Pollione. Des costumes vaguement d'époque, sans excès de folklore.
Certes, Oroveso – qu'interprète James Morris en route vers son 1000ème
passage sur la scène du Met – a bien la longue barbe blanche tirée de l'imagier des druides gaulois, mais pour le reste, peu de fioritures et de détails
inspirés du style péplum surchargeant la scène et souvent utilisé lors de productions du chef-d'œuvre de Bellini. Cette Norma revisitée depuis la première en 2001 avait toutes les caractéristiques des productions épurées mettant en valeur les interprètes et révélant avec pertinence les caractéristiques
de l'intrigue. Et, de fait, on aura rarement vu une production de Norma aussi
séduisante visuellement, notamment lors de la confrontation entre les trois
principaux protagonistes lors du deuxième acte grâce à la remarquable
conception scénique de John Copley avec la complicité de John Conklin. Pas
de Norma, sans une grande attente au sujet de l'interprétation de « Casta
diva » bien sûr et Sondra Radvanovsky n'a pas failli aux espoirs des mélomanes new yorkais en livrant une prestation émouvante qui a fait chavirer la
salle, tout en enchaînant avec un second acte tout aussi réussi, mêlant puissance vocale parfaitement adaptée à la vaste salle du Met avec une capacité
à faire entendre les nuances les plus subtiles de la partition bellinienne.
Comparée à l'autorité dramatique de Norma, sa rivale Adalgisa n'a pas les
mêmes atouts vocaux car Kate Aldrich fait plus apprécier une expressivité
émouvante, tout en restant un peu en retrait dans les ensemble. D'une certaine manière, Alexandrs Antonenko propose – était-ce intentionnel ? - une
conception intéressante du rôle de Pollione, par sa stature assez figé et une
certaine raideur gestuelle, il apparaît comme égaré entre les deux rivales,
plus anti-héros qu'autre chose même s'il affronte le rôle sans faiblesse vocale particulière. Riccardo Frezza livrait par ailleurs une direction musicale
aux sonorités subtiles et séduisantes à la tête de l'Orchestre du Met.
Frank Fredenrich
Tosca
Le mois de novembre 2013 a vu la reprise au Met de la mise en scène
de Tosca par Luc Bondy, qui avait été accueillie froidement – c’est un pléonasme – lors de sa création en 2009, une partie du public new-yorkais réclamant à corps et à cris sa Tosca, celle créée par Zeffirelli en 1985, monument
indigeste de kitsch où la puissance puccinienne s’estompait sous une vaine
précision pittoresque. La distance temporelle a heureusement rendu justice
au Suisse et à sa lecture à la fois singulière et passionnante du chef-d’œuvre de Puccini. Sans être triomphal, l’accueil réservé à sa Tosca a cette fois
été tout à fait chaleureux.
Les partis-pris de Bondy sont clairs : il s’agit de détacher Tosca de son
decorum habituel afin de se concentrer sur les personnages, leurs relations,
la violence des différentes émotions, la cruauté du destin, les tensions entre
l’humain et le politique. Adieu les stucs baroques de Sant’Andrea della Valle
au premier acte, les multiples décorations du Palais Farnèse au second, les
créneaux du Château Saint-Ange et la vue surplombant Rome au petit matin
durant l’acte final. Les décors – superbe travail de Richard Peduzzi – sont
très sobres, voire épurés ; des lignes, quelques courbes, peu d’éléments
inutiles. L’église ressemble à une catacombe, le palais à un lupanar, le
Château Saint-Ange à un large toit romain parmi d’autres ouvrant sur un ciel
tristement bleu gris.
Certains détails n’en sont que plus frappants pour le spectateur : au premier acte, Scarpia ne prie pas devant une statue de la Madone mais l’enlace, tandis que le tableau peint par Cavaradossi représente bien moins une
Marie-Madeleine qu’une femme désirée – ou un désir de femme. Quant à
l’univers du second acte, qui voit Scarpia entouré de prostituées dans un
décor des années 20-30, difficile de ne pas penser au mélange de cruauté
absolue et de sexualité orgiaque de l’époque mussolinienne, voire à la
République de Salò pasolinienne. Scarpia devient alors, discrètement, une
sorte d’allégorie du Mal qui frappa l’Italie au XXème siècle. Enfin, le
Château du Saint-Ange prend durant l’acte final une dimension très abstraite, au point que les déambulations de Cavaradossi attendant sa mort inique
évoquent à la fois l’absurdité beckettienne et la spiritualité du Septième
sceau bergmanien.
La distribution vocale est heureusement au niveau du travail scénique.
Patricia Racette compose une Tosca élégante et racée, qui exprime bien la
passion jalouse de l’héroïne. George Gagnidze est un Scarpia terrifiant –
même s’il est parfois un peu «en dessous» vocalement. Quant à Roberto
Alagna, il lui faut un acte pour que sa voix, tout d’abord un peu métallique,
trouve sa justesse et son ampleur, particulièrement impressionnantes au troisième acte.
Laurent Darbellay
«Norma», avec Sondra Radvanovsky dans le rôle titre, Aleksandrs Antonenko
(Pollione), et Kate Aldrich (Adalgisa) © Marty Sohl/Metropolitan Opera
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genève
Der
Fliegende
Holländer
(LetonjaBrieger) – 1er, 3, 8 février,
les 20, 22 fév. à Mulhouse
Staatsoper
(49/30.20.35.45.55)
s Salome (Mehta-Kupfer)
– 2, 5, 8, 13 février.
toulouse
s Aida (Mehta-Halmen) –
Théâtre du Capitole
15, 19, 22 février.
(05.61.63.13.13)
s La Traviata (Hindoyans La Favorite (CampaMussbach) – 21, 23 février.
nella-Boussard) – 6, 9, 11,
s Tosca (Ranzani-Riha) –
14, 16, 19 février.
28 février.
s Il Barbiere di Siviglia
a m s t e rd a m
(Rovetta-Berghaus) – 7
février.
Opera (31.20.62.55.456)
s
Das
Rheingold
s Katia Kabanova (Rattle(Haenchen-Audi) – 7
Breth) – 1er, 6, 9, 16
février.
février.
s Die Walküre (HaenchenKomische Oper
Audi) – 9 février.
(49/30.47.99.74.00)
s Siegfried (Haenchens Serse (JunghänelAudi) – 2, 11 février.
Herheim) - 1er, 5, 15
février.
s
Götterdämmerung
(Haenchen-Audi) – 5, 14
s Die Zauberflöte (Poskafévrier.
Kosky) – 13, 22 février.
s Hänsel und Gretel
(Poska-Thannen) – 23
bruxelles
Komische Oper, Berlin : Annette Seiltgen sera Fata
février.
La Monnaie
Morgana dans «L’amour des trois oranges»
s L’Ange de feu (Nanasi(32/70.23.39.39)
Andrews) – 2, 16 février
s Jenufa (Marlot-Hermanis) – 2, 4, 5, ro m e
s L’Amour des trois oranges (Kütson7 février.
Teatro dell’opera (39/06.48.16.02.55)
s L’Enfant et les sortilèges/L’Heure Homoki) – 4, 8 février
b a rc e l o n e
espagnole (Dutoit-Pelly) – 1er, 2, 4, 6
vienne
Liceu (34.934.85.99.13)
février.
Staatsoper (43/1514447880)
s La Sonnambula (Oren-Marelli) – t u r i n
s Il Barbiere di Siviglia (Garcia Calvo1er, 4, 5, 8, 9, 11, 14, 17 février.
Teatro Regio (39/011.881.52.41)
madrid
s Madama Butterfly (Steinberg- Rennert) – 1er, 4 février.
s Cavalleria rusticana / Pagliacci
Teatro Real (34/90.224.48.48)
Michieletto) – 1er, 4, 6 février.
s Tristan und Isolde (Currentzis- s Turandot (Steinberg-Montaldo) -12, (Carignani-Ponnelle) – 2 février.
Sellars) – 4, 8 février.
13, 14, 15, 16, 20, 22, 23, 25, 26, 27 s Rusalka (Belohlavek-Bechtolf) – 3,
6, 9 février.
s Brokeback Mountain (Engel-von février.
s
Salome (Nelsons-Barlog) – 7, 10, 13
Hove) – 1er, 3, 5, 7, 9, 11 février.
venise
février.
s Alceste (Bolton-Warlikowski) – 27 Teatro La Fenice (39/041.24.24)
février.
s La Traviata (Matheuz-Carsen) – 15, s Adriana Lecouvreur (Pido-McVicar)
– 16, 19, 22 février.
16, 21, 23, 25, 27 février.
s
Manon (Chaslin-Serban) – 12, 15,
l o n d re s
s La Clemenza di Tito (Dantone18, 21 février.
ROH (0044/207.304.4000)
Hermann) – 1er février.
s Don Giovanni (Luisotti-Holten) –
s Il Barbiere di Siviglia (Matheuz- Theater an der Wien (43/15.88.85)
s Platée (Christie-Carsen) – 17, 19,
1er, 3, 12, 14, 18, 21, 24 février.
Morassi) – 20, 22, 16 février.
s Manon (Villaume-Pelly) – 4 février.
s Il Campiello (Romani-Trevisi) – 28 21, 24, 26, 28 février.
février.
s
Grand Théâtre (022/418.31.30)
s Siegfried (Metzmacher-Dorn) – 2, 5,
8 février.
s Nabucco (Fiore-Aeschlimann) – 28
février.
lausanne
Opéra (021.315.40.20)
s Hänsel et Gretel (Gay-Beauvais) –
5, 7, 8, 9, 12 février.
zurich
Opernhaus (044.268.66.66)
s Cosi fan tutte (Netopil-Bechtolf) –
6, 9, 12, 16 février.
s Don Carlo (Luisi-Bechtolf) – 15, 21,
23, 26 février.
s Les Pécheurs de perles (FournillierHerzog) – 1er février.
s Alcina (Antonini-Loy) – 2, 5, 7, 9,
16, 22, 25 février.
paris
Champs-Elysées (01.49.52.50.50)
s Theodora (Bicket) – 10 février.
s Le Villi (Carignani) – 20 février.
Opéra Comique (0825.01.01.23)
s Pelleas et Mélisande (LangréeBraunschweig) – 17, 19, 21, 23, 25
février.
Opéra National (08.92.90.90)
Bastille :
s La Fanciulla del West - 1er, 4, 7, 10,
13, 16, 19, 22, 25, 28 février.
s Werther (Plasson-Jacquot) – 2, 5, 9,
12 février.
s Madama Butterfly (CallegariWilson) – 14, 17, 21, 24, 27 février.
Garnier :
s Alcina (Rousset-Carsen) – 2, 5, 7, 9,
12 février.
Salle Pleyel (01.42.56.13.13)
s Boris Godunov (Sokhiev) – 5 février.
avignon
Opéra-Théâtre (04.90.82.81.40)
s L’Italiana in Algeri (Rizzi BrignoilBerloffa) – 2, 4 février.
s Monsieur Choufleuri/Pomme d’api
(Trottein-Mutel) – 21, 22, 23 février.
lyon
Opéra National (08.26.30.53.25)
s Le comte Ory (Montanari-Pelly) –
21, 23, 25, 27 février.
bologne
Opéra (04.91.55.11.10)
s Lucia di Lammermoor (GuingalBelier Garcia) – 1er, 2, 4, 5, 6 février.
f l o re n c e
Opéra (04.92.17.40.79)
s Semele (Petrou-Peters.Messer) –
16, 18, 20 février.
milan
marseille
nice
saint-étienne
Opéra-Théâtre (04.77.47.83.40)
s Les Barbares (Campellone) – 14, 16
février.
s t r a s b o u rg
Opéra National (0825.84.14.84)
a
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g
new york
Teatro Communale (39/051.617.42.99)
s Tosca (Veronesi-Abbado) – 20, 21,
22, 23, 25, 26, 27, 28 février.
Teatro del Maggio musicale
s Madama Butterfly (Valcuha-Ceresa)
– 6, 8, 9, 11, 12, 13 février.
Teatro alla scala (39/02.720.03.744)
s Lucia di Lammermoor (MorandiZimmermann) – 1er, 7, 11, 14, 16, 19,
21, 23, 28 février.
s Cavalleria rusticana (HardingMartone) – 8, 9 février.
s Il Trovatore (Rustioni-deAna) – 15,
18, 20, 22, 25 février.
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n
berlin
Deutsche Oper (49/30.343.84.343)
s La Traviata (Korsten-Friedrich) – 8,
14 février.
s Die Zauberflöte (Repusic-Krämer) –
16 février.
s Il Barbiere di Siviglia (Garcia CalvoThalbach) – 22 février.
s La Gioconda (Lopez CobosSanjust) – 2, 6 février.
s Jenufa (Runnicles-Loy) – 9, 15, 18
février.
s La Damnation de Faust (RunniclesSpuck) – 23, 27 février.
s Le Nozze di Figaro (ForemnyFriedrich) – 26 février.
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Metropolitan Opera
(00.1.212.362.60.00)
s Die Fledermaus (Fischer-Sams) – 3,
5, 8, 11, 13, 15, 20, 22 février.
s L’Elisir d’amore (Benini-Sher) – 1er
février.
s Madama Butterfly (AuguinMinghella) – 1er, 7 février.
s Rusalka (Nézet-Séguin- Schenk) –
4, 8, 12, 15 février.
s Le Prince Igor (NosedaTcherniakov) – 6, 10, 14, 17, 21, 24
février.
s Werther (Altinoglu-Eyre) – 18, 22,
25, 28 février.
s The Enchanted Island (SummersMcDermott) – 26 février.
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à avignon
Butterfly / Laïka
Chance exceptionnelle pour l’Opéra Grand Avignon, la
chanteuse de classe internationale Ermonela Jaho y est de
retour pour une Butterfly inoubliable.
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La soprano albanaise communique son émotion à fleur de peau dans ce
théâtre, dont les dimensions permettent au spectateur d’apprécier dans les
meilleures conditions les expressions corporelles et les pianissimi délicieux.
C’est elle qui transcende le spectacle, elle est Cio-Cio-San dans tous ses
aspects, séduisante envers son futur mari, tueuse lorsqu’elle menace Goro
d’un couteau, puis la joie l’inonde au retour annoncé de Pinkerton, enfin elle
est émouvante aux larmes à son suicide final, tremblante comme un papillon
qu’on vient d’épingler. Sébastien Guèze (Pinkerton) est certes crédible scéniquement et forme un beau couple juvénile avec Jaho, mais les problèmes s’accumulent pour ce qui concerne le chant : style larmoyant en prenant systématiquement les notes par en-dessous, graves limités (le ténor baisse la tête, mais
sans grande amélioration), et chaque attaque d’aigu semble un petit défi. Une
fois le son engagé, la note reste stable et puissante, preuve que le potentiel est
encore là, mais la technique doit être revue. Le vibrato du baryton Marc
Barrard (Sharpless) est prononcé, mais convient au rôle du consul américain,
tout comme le timbre de Delphine Haidan, en adéquation au rôle de la suivante Suzuki. La direction musicale d’Alain Guingal semble un peu désordonnée
à la mise en route, puis trouve une certaine sérénité en vitesse de croisière,
sans pouvoir parler toutefois de concentration superlative des musiciens. La
reprise de la mise en scène de Mireille Larroche, donnée initialement en
2005 à Avignon et adaptée par la suite aux Chorégies d’Orange en 2007,
fonctionne toujours aussi bien dans son ambiance japonisante sobrement
dosée. Les petites maisons
allumées pendant la nuit de
veille entre les actes II et III
sont du plus bel effet, et le
seppuku conclusif de
Butterfly qui dénoue sa ceinture tenue par son petit garçon
aux yeux bandés, image d’un
cordon ombilical, prend toujours autant aux tripes.
Laïka, the Spacedog
Laïka, The Spacedog, sur
un livret de Tim Yealland et
une musique de Russell
Hepplewhite, a remporté la
dernière édition du concours
de l’Armel Opera Festival, à
Szeged en Hongrie. La production de l’English Touring
Opera, montée par le librettiste, a le grand avantage de la
légèreté des décors, mais sans
tomber nullement dans le
Ermonela Jaho (Cio-Cio-San)
© Cedric Delestrade/ACM Avignon
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« bon marché ». L’œuvre d’une durée d’une petite heure alterne avec vivacité entre les scènes au domicile du jeune Mikhail, maître de Laïka, et le
Cosmodrome de Baïkonour, d’où décollera – pour un aller simple – la chienne. Opéra éducatif « destiné aux enfants de 7 à 11 ans », les adultes ne s’y
ennuient pas un instant et ne se sentent pas particulièrement infantilisés. Pour
un effectif orchestral très réduit de 4 instrumentistes ainsi que le compositeur
à la baguette et aux claviers, la musique ne sonne pas pour autant cheap, certaines parties au violoncelle étant d’ailleurs redoutables. Les chanteurs jouent
avec enthousiasme, Sarah Laulan (Valentina), Abigail Kelly (Yelena / la
Mère), Edward Lee (Mikhail), Nicolas Rigas (Korolev), le marionnettiste
Maciek O’Shea donnant vie à Laïka.
François Jestin
Puccini : MADAMA BUTTERFLY – le 19 novembre 2013
Hepplewhite : LAÏKA THE SPACEDOG – le 4 décembre 2013 à l’Opéra Grand Avignon
à sainte-étienne
Ciboulette
Montée en coproduction avec l’Opéra Comique, où elle
a été représentée à Paris la saison dernière, cette Ciboulette
aux grandes qualités artistiques remporte un beau succès à
Saint-Etienne.
Arrivant de la Salle Favart, la production de Michel Fau emplit avec
aisance le plus vaste plateau du Grand Théâtre Massenet, avec une certaine
économie de moyens grâce à l’utilisation de toiles peintes. Les différents
lieux de l’action sont contrastés, l’intérieur en noir et blanc du I, puis le marché des Halles, la banlieue d’Aubervilliers ensuite (très campagnarde en
1867 !), jusqu’à la représentation à l’Opéra de la – devenue fameuse –
Conchita Ciboulero. Les traits d’humour sont charmants et pas trop
appuyés, avec un grand moment déjanté : l’apparition devant le rideau de
scène entre les actes II et III de Michel Fau dans une superbe robe verte qui
donne voix à une cantatrice ayant depuis bien longtemps perdu le contrôle à
la fois du vibrato, de la puissance et de la justesse ! Bien moins chevrotante
dans le rôle-titre, Bénédicte Tauran possède un joli timbre fruité de soprano
léger, aux côtés de Julien Behr (Antonin), beau physique, et dont le jeu aux
très larges gestes semble plus développé que la voix un peu étriquée aux
deux extrémités du registre. Le baryton Florian Sempey (Duparquet) est
superbement timbré, la ligne de chant est royalement conduite. La soprano
Olivia Doray (Zénobie) et le baryton Marc Scoffoni (Roger) sont également
bien en place, tout comme Guillemette Laurens et Jean-Marie Frémeau, la
Mère et le Père Grenu qui assurent l’éducation de Ciboulette. Deux cerises
sur le gâteau avec l’apparition furtive de Jérôme Deschamps en Directeur
d’Opéra et d’Andrea Ferreol (Madame Pingret) qui remplace Bernadette
Lafont, disparue depuis les représentations de l’Opéra Comique, et à qui
cette soirée est dédiée. L’Orchestre Symphonique Saint-Etienne Loire assure avec entrain, sous la baguette de Laurent Touche, habituel chef du chœur
de la maison. A-t-il disposé justement du temps nécessaire à la préparation
des choristes ? Les décalages et faux-départs sont si prononcés qu’on pourrait se demander si le compositeur n’a pas prévu un canon ici ou là, mais ces
relâchements n’entament pas la réussite générale.
François Jestin
Hahn : CIBOULETTE – le 29 décembre 2013 au Grand Théâtre Massenet de SaintEtienne
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à lyon
Norma / Contes
d’Hoffmann
Chaque saison, l’Opéra de Lyon met à son programme un
ouvrage du belcanto, donné en version de concert, et c’est
sur Norma que s’est porté son choix cet automne.
Le titre n’est sans doute pas très original mais l’auditeur est plutôt comblé à l’issue de la soirée. Première bonne surprise, la direction musicale
d’Evelino Pidò convainc plus que d’ordinaire, avec quelques choix originaux de tempi (des piani et pianissimi inattendus), de nuances, d’effets de
ralentis. Les passages très sonores sont toutefois encore bien présents et certains rythmes bondissants suggèrent une Norma plus joyeuse que menaçante. Pour ce qui est de la partie vocale, deux chanteurs non annoncés dans le
programme de la saison assurent joliment deux des rôles les plus importants,
avec en premier lieu Elena Mosuc dans le rôle-titre qui fait preuve de musicalité et d’agilité, ses intentions sont vindicatives même si elle ne possède
pas exactement le format de soprano dramatique. Puis le ténor John Osborn
(Pollione) impressionne également par son abattage, le timbre est délicat, les
graves sont fournis, et à l’autre extrémité il essaime parfois des petits suraigus excitants. Sonia Ganassi (Adalgisa) développe une puissance plus
importante, la voix est bien soutenue et le personnage est crédible. Le timbre
de la basse Enrico Iori (Oroveso) sonne en revanche souvent engorgé, même
si on doit lui reconnaître une autorité bien à propos dans ses récitatifs seuls.
tion est admirable – qualité commune à l’ensemble du plateau –, la tessiture est étendue, et il varie idéalement entre voix de tête, voix mixte et aigus
plus vaillants. Comme à l’Opéra de Marseille en 2004, Patrizia Ciofi assume avec brio les 4 rôles de femmes : les vocalises aériennes (perchée sur sa
balançoire à une hauteur de 5 ou 6 m !) d’Olympia, la ligne plus lyrique
d’Antonia où elle excelle, et l’écriture plus grave de Giulietta où la soprano
italienne est naturellement un soupçon moins à l’aise. Laurent Alvaro dans
les 4 méchants est diabolique à souhait et capable d’une projection assez
considérable ; la basse française s’applique sur la justesse, mais reste fragile sur les parties plus aigües de la partition. Angélique Noldus (La Muse /
Nicklausse) n’a pas la puissance d’autres titulaires du rôle, et est parfois en
difficulté pour passer la barrière de l’orchestre, mais elle a le grand mérite
d’être compréhensible et son timbre est joli. Cyrille Dubois dans les rôles
des 4 valets est épatant, voix très assurée, jeu débridé, il nous amuse tout en
s’amusant. Peter Sidhom (Luther / Crespel) et Christophe Gay (Hermann /
Schlemil) ont tous deux une remarquable diction et un timbre expressif. Le
chef Philippe Forget, qui dirige la version révisée par Jean-Christophe Keck,
ne se montre pas toujours aussi convaincant : l’orchestre est techniquement
bien huilé, mais le rythme est souvent très lent, parfois suivi d’un effet d’accélération mais ce procédé se révèle finalement trop systématique, et tout
cela manque d’espièglerie ou de petit tourbillon de folie. Les chœurs n’appellent en revanche que des éloges, en particulier les hommes qui chantent
à tue-tête dans la taverne de Maître Luther.
François Jestin
Bellini : NORMA – le 10 novembre 2013
Offenbach : LES CONTES D’HOFFMANN – le 30 décembre 2013 à l’Opéra de Lyon
à monte-carlo
Rheingold / La Favorite
Brillante première partie de saison à l’Opéra de MonteCarlo, avec un Or du Rhin passionnant, puis La Favorite en
version de concert, avec la prise de rôle du ténor
vedette Juan Diego Florez.
John Osborn et Patrizia Ciofi © Jean-Pierre Maurin
Offenbach est à l’affiche du spectacle de fin d’année, et ce n’est pas un
de ses opéras bouffes, mais Les Contes d’Hoffmann qui sont remontés dans
la production de Laurent Pelly, déjà montrée à Lyon en 2005. La mise en
scène, dont il existe un témoignage filmé récent au Liceu de Barcelone
début 2013 (2 DVD ERATO), baigne le plus souvent dans une pénombre
inquiétante aux tons gris ou bleu nuit, avec quelques passages inspirés d’une
imagerie spectaculaire ou fantastique : Olympia sur une balançoire à bascule manipulée par des machinistes invisibles (en noir sur fond noir), le
Docteur Miracle et ses spirales hypnotiques, ou encore les images vidéo de
la mère d’Antonia, projetées en négatif. La distribution vocale est enthousiasmante, à commencer par le ténor John Osborn dans le rôle-titre, la dic-
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La première scène du prologue wagnérien est bluffante : projection sur
un voile d’avant-scène de mouvements d’eau qui ondule avec de gentilles
vagues sous les cintres, quelques rochers et plantes aquatiques vus en
transparence, et les Filles du Rhin qui montent et descendent suspendues par
des câbles et harnais, dépliant ainsi leur longue robe à tonalités vertes. Le
spectateur est tout de suite plongé dans un aquarium, cela tombe bien : la
salle du Grimaldi Forum est bien implantée sous le niveau de la mer, et le
Musée océanographique n’est pas très loin non plus ! Chez les dieux, un
échafaudage de tubulures métalliques en fond de scène permettra un effet
spectaculaire pour la transition au Nibelheim, en se rabattant à angle droit
sur le plateau. Une silhouette de château pour figurer le Walhalla avec
quelques valises à jardin, puis en fin d’ouvrage un arc-en-ciel est projeté sur
une passerelle déployée, alors que des rayons lasers éclairent des fumées…
comme en boîte de nuit dans les années 1980 ! Pour la partie musicale, on
attendait avec gourmandise le chef Gianluigi Gelmetti dans ce répertoire,
mais le rendez-vous n’est pas à la hauteur des espérances. Sa direction est si
lente et peu démonstrative, que la musique tombe vite en panne d’énergie,
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de conviction, d’inspiration. C’est dommage car l’Orchestre
Philharmonique de Monte-Carlo est somptueux, et par ailleurs on sait gré au
chef d’apporter attention et soutien aux chanteurs. La distribution vocale est
globalement très convaincante, avec la projection mordante d’Egils Silins en
Wotan, et l’Alberich toujours aussi déchaîné, souffrant et agressif de Peter
Sidhom. William Joyner est un Froh claironnant, Trevor Scheunemann un
Donner honnête, Rodolphe Briand (Mime) est bien en place, alors que
Andreas Konrad (Loge) tire parfois vers le ténor de caractère, expressif mais
pas toujours complètement stable. Côté féminin, Natascha Petrinsky
(Fricka), Nicola Beller Carbone (Freia) et Elzbieta Ardam (Erda) sont solides, alors que l’ensemble des trois Filles du Rhin, idéalement assorti, constitue peut-être le meilleur de la soirée : Eleonore Marguerre, Linda
Sommerhage et Stine Maria Fischer.
chœurs ont aussi été scrupuleusement préparés par Stefano Visconti, et
contribuent à cette fête du belcanto.
François Jestin
Wagner : DAS RHEINGOLD – le 22 novembre 2013 à Monte-Carlo – Forum Grimaldi
Donizetti : LA FAVORITE – le 15 décembre 2013 à Monte-Carlo – Auditorium Rainier III
à marseille
Orphée aux enfers
Pour les fêtes de fin d’année à l’Opéra de Marseille, le
public répond au quart de tour à la bonne humeur qui se
dégage du plateau.
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«Rheingold» © Opéra de Monte-Carlo
Donnée à deux reprises à Monte-Carlo, avant une unique soirée au
Théâtre des Champs-Elysées, La Favorite en version de concert aura bien
tenu toutes ses promesses, à commencer par les débuts triomphaux de
Juan Diego Florez dans le rôle de Fernand. Le Péruvien est clairement
aujourd’hui au sommet de son art, avec tout d’abord une somptueuse
conduite de la ligne vocale, en particulier une maîtrise du legato qui peut
rappeler celle de son modèle Alfredo Kraus. Le volume ensuite s’est développé de manière spectaculaire, Florez n’est plus le tenorino de ses débuts
en 1996, les aigus et suraigus sont projetés de façon spectaculaire. Et puis
aussi la qualité du français est à présent remarquable, et il n’est nul besoin
de recourir aux surtitres pendant le concert. L’articulation n’est pas aussi
bonne chez Béatrice Uria-Monzon (Léonor), le timbre est velouté mais
manque d’homogénéité dans le bas du registre, conséquence vraisemblable de sa nouvelle fréquentation de rôles plus aigus (dont une remarquable
récente Tosca à Avignon). La mezzo française fournit toutefois une
meilleure prestation que lors de son apparition dans la version italienne à
Montpellier en 2008 (voir SM 207), et semble galvanisée par son brillant
entourage. Jean-François Lapointe (Alphonse) impressionne fortement
dans ce rôle de baryton taillé pour son instrument : diction appliquée et
volume considérable sur quelques aigus. La prononciation est également
un régal chez la basse Nicolas Cavallier (Balthazar), qui impose son autorité dans ce quatuor majeur. Les seconds rôles tiennent correctement leur
rang, Alain Gabriel (Don Gaspar) en second ténor et Julia Novikova (Inès)
aux accents slaves mais dotée d’un intéressant potentiel. Le chef canadien
Jacques Lacombe est à la hauteur de l’événement, il maintient la cohérence de l’ensemble en communiquant une forte énergie, veille à ne pas couvrir les chanteurs mais sans s’interdire quelques éclatantes envolées. Les
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La production de Claire Servais, créée à l’origine pour l’Opéra Royal
de Wallonie à Liège, a déjà tourné sur plusieurs scènes, par exemple à
Montpellier, puis à Avignon en 2008 (voir SM 204). La mise en scène fonctionne toujours aussi bien, elle est drôle et maintient un rythme soutenu,
plein de vie. A Montpellier et Avignon, les spectateurs avaient pu apprécier
le chant et la plastique irréprochable de la soprano Magali Léger en
Eurydice. A Marseille, Brigitte Hool n’a rien à envier à sa consœur : sa tenue
avec porte-jarretelles dans le duo de la mouche fait l’unanimité, et la voix
dispose en outre de quelques réserves de puissance supplémentaire. Philippe
Talbot lui donne sans anicroches la réplique en Orphée, mais c’est l’autre
ténor Loïc Félix (Aristée / Pluton) qui remporte tous les suffrages à l’applaudimètre. Il chante d’une voix claire et se montre amusant sans surcharge, dès
son entrée en vendeur de miel dans son véhicule 2 chevaux, ou ensuite dans
la description de son pique-nique « local » : figatelli, pieds paquets, vin de
Bandol… et pastis ! Marie-Ange Todorovitch est une sévère Opinion
Publique, Chloé Briot une mezzo piquante en Cupidon, Jennifer Michel joue
d’un fort accent allemand dans le rôle de Diane. Francis Dudziak est un
autoritaire Jupiter, et même quelques solistes moins assurés vocalement –
comme Franck Cassard (Mercure) ou Delia Noble (Vénus) – trouvent leur
place par le jeu et le sourire. La direction de Samuel Jean est également bien
dans le ton festif du spectacle, tout en gardant son sérieux et son application
pour les airs aux délicieuses mélodies.
François Jestin
Offenbach : ORPHEE AUX ENFERS – le 3 janvier 2014 à l’Opéra de Marseille
Loïc Félix et Brigitte Hool © Christian Dresse
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à nice
à montpellier
Le Freyschütz
Cosi fan tutte
Pour marquer le 150ème anniversaire du jumelage entre
les villes de Nuremberg et Nice, l’Opéra a curieusement
choisi de proposer la version française du Freischütz
allemand, réalisée par Hector Berlioz pour son entrée à
l’Opéra de Paris en 1841.
Un Cosi montpelliérain mitigé, avec quelques beaux coups
d’œil mais un jeu qui ne fonctionne pas toujours, et un
niveau vocal très disparate.
Cosi fan tutte © Marc Ginot
Le Freyschütz – Scène de la « Gorge aux loups » © Jaussein
Beaucoup d’invités allemands dans la salle, dont le maire de Nuremberg,
sont évidemment beaucoup plus familiers du texte original du chef-d’œuvre
de l’opéra romantique composé par Carl Maria von Weber. La soprano
Claudia Sorokina (Agathe) est d’ailleurs handicapée par une faible qualité de
prononciation du français, alors qu’elle possède de beaux moyens et de la
puissance, mais avec une gestion perfectible du souffle. Moins volumineuse,
l’autre soprano Hélène Le Corre (Annette) conduit son timbre fruité de manière musicale, et on comprend le texte sans efforts. Le ténor Bernhard Berchtold
(Max) s’applique sur la diction, le medium est robuste, l’aigu plus timide,
Franck Ferrari (Gaspard) est appréciable dans ses récitatifs, beaucoup moins
dans les parties chantées où l’aigu paraît toujours étranglé. La prestation de
Stephen Bronk (Kouno) laisse assez indifférent, tandis que Lionel Lhote
(Ottokar) et Thomas Dear (l’Ermite) sont très convaincants et on regrette
qu’ils n’aient pas plus à chanter. Les chœurs sont enthousiastes, pas toujours
d’une parfaite homogénéité, on relève plusieurs décalages sous la baguette du
chef Philippe Auguin. L’orchestre est somptueux, avec un son magnifique dès
l’ouverture, mais on ne sent pas de tension dramatique ; il s’agit beaucoup plus
ce soir d’une belle prestation symphonique que d’un opéra qui vit dans nos
oreilles. La mise en scène de Guy Montavon prend place sur un grand escalier
à l’herbe verte ; de longs troncs descendent des cintres pour compléter le
tableau champêtre, la maison d’Agathe est faite d’une petite ossature, et la
production de fumées et de lumières violette figurent la scène de la « Gorge
aux loups ». Ce dispositif scénique a l’avantage du spectaculaire, mais l’inconvénient de rendre très précautionneux les déplacements des protagonistes, par
crainte de la chute. Certains solistes en arrivent par moments à regarder exclusivement leurs pieds… et on les comprend car le danger semble bien réel !
François Jestin
« Faiblesse vocale » est un euphémisme pour ce qui concerne Antonio
Abete (Don Alfonso) qui irrite très rapidement l’auditeur en prenant systématiquement les notes par en-dessous rendant l’impression d’une voix chevrotante qui disqualifie les duos, trios (comme le « Soave sia il vento »…),
et les ensembles. C’est bien dommage car on ne peut rêver plus belles et
bien chantantes Fiordiligi et Dorabella ce soir ! La soprano italienne Erika
Grimaldi est une blonde Fiordiligi qui possède une large étendue vocale lui
permettant de passer les écarts vertigineux du rôle, avec musicalité et sans
problèmes sur les aigus de « Come scoglio ». Quant à la brune Marianne
Crebassa, son timbre de mezzo est d’une rare beauté et l’ampleur qu’elle
développe lui promet un avenir glorieux. A côtés de ces deux étoiles, Virgine
Pochon (Despina) ne démérite pas mais manque d’un soupçon d’italianità et
de vis comica dans ce rôle. Des deux fiancés, c’est le baryton qui surclasse
le ténor, Andrè Schuen (Guglielmo) faisant entendre un joli grain de voix
superbement timbrée, évoquant l’autorité d’un Don Giovanni. Wesley
Rogers (Ferrando) est assez sonore mais émet des notes de plus en plus tendues et en force, si bien qu’on commence à s’inquiéter sérieusement pour lui
en fin de 1er acte. C’est – dans la suite logique ! – l’écroulement au II, où
la justesse et la technique sont en perdition dans son air difficile « Tradito,
schernito », mais il maintient sa survie en dosant intelligemment en voix de
tête. La direction musicale d’Alexander Shelley fait vivre le théâtre et est
globalement appréciable, même si techniquement pas irréprochable : nombreux sont en effet les petits décalages avec le plateau et les attaques imprécises de l’orchestre. Enfin, la nouvelle production de Jean-Paul Scarpitta est
surprenante : aucun décor sinon 3 chaises, puis 2 bancs, le summum du
mobilier étant constitué d’une petite table entourée de chaises, avec sol et
paroi en fond de plateau qui baignent dans un joli bleu. Quelques images
sont très esthétiques, comme les choristes en noir dont les silhouettes se
détachent en arrière-plan, mais à l’inverse les situations comiques tombent
bien souvent à plat et finissent par traîner en longueur.
François Jestin
von Weber : LE FREYSCHÜTZ – le 23 novembre 2013 à l’Opéra de Nice
Mozart : COSI FAN TUTTE – le 20 décembre 2013 à l’Opéra Comédie de Montpellier
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ti d’académisme déconstructionniste qui cherche le sens par le contre sens, l’effet par la glose
allégorique de chaque mot, tout cela sans vraiment proposer un message profond.
teatro alla scala, milan
La Traviata
Distribution
De tous les opéras de Verdi La Traviata est celui qui a été le plus souvent
actualisé, bien que son intrigue soit difficilement compréhensible en dehors
d’une société bourgeoise centrée sur la famille.
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Dmitri Tcherniakov (mise en scène) est
parfaitement conscient du caractère ambigu et
conservateur de l’idéologie sous-jacente à cet
opéra. La courtisane rejetée est réhabilitée seulement lorsqu’elle souscrit, in articulo mortis,
aux valeurs de la société (Dieu, morale patriarcale, amour sacré de la famille). Cette ambiguïté appartenait à Verdi homme et artiste. Un critique a justement relevé que dans sa vie le compositeur fut plus souvent du
côté du père Germont que
d’Alfredo.
(notamment celui du premier acte) avec des personnages-témoins qui écoutent les chanteurs
(Annina, omniprésente, le valet Giuseppe).
L’expression intime des sentiments et des émotions se transforme ainsi dans un discours persuasif gesticulateur, avec un résultat souvent
involontairement parodique. Plutôt qu’une
relecture novatrice du chef-d’œuvre de Verdi, la
mise en scène nous semble un exemple inabou-
Détournement
Le metteur en scène russe
aborde ces aspects idéologiques en détournant le sens
général de l’œuvre. L’amour
entre Violetta et Alfredo est
présenté dès le début comme
impossible, miné autant par le
cynisme de la courtisane que
par la carapace sociale de son
amant. Aussi, Violetta n’estelle pas réintégrée dans la
société grâce au sacrifice de
son amour; au contraire sa
mort (ici un suicide) est plutôt
présentée comme le dernier
acte victorieux d’une révolte
contre la société et ses hypocrisies.
Cette recherche d’un
nouveau sens de La Traviata moyennant le renversement de
l’attitude morale de la protagoniste (du sacrifice à la protestation) - amène, plus d’une
fois, à des contresens ou à des
non sens scéniques (par ex.
tout le deuxième acte). En
particulier apparaît comme
incongru le constant ameublement scénique des airs
Diana Damrau offre une prestation vocale
magistrale. Toutes les difficultés de ce rôle sont
surmontées avec une aisance technique et un
sens du style qui font de sa Violetta une des
meilleures de nos jours. L’«Addio del passato»,
en particulier, a suspendu le théâtre entier dans
un moment de pure poésie. Il est dommage que
la “direction d’acteurs» de Tcherniakov l’oblige
parfois à des postures et des effets véristes
(rires, gesticulations, étouffements) qui, loin
d’exalter son art, ne font que souligner les limites de son jeu. Piotr Beczala dans le rôle
d’Alfredo offre une prestation de routine, avec
un chant pauvre de nuances et de couleurs. Željko Lu i est est au contraire un Germont à la voix
magnifique et à l’accent
noble, malgré quelques problèmes de justesse. Affublée
en Klytaemnestra de salon
(allure d’entremetteuse et
cigare à la bouche), Mara
Zampieri, célèbre Lady
Macbeth et Minnie des années
80, est ici Annina, sans que
personne comprenne pourquoi.
En choisissant des tempi
rapides et en rejetant tout
envol romantique, la direction
de Daniele Gatti semblerait
s’inscrire dans la tradition
d’un Toscanini. Malgré une
certaine surexcitation rythmique, sa direction manque
passablement de sens dramatique, avec tantôt des accélérations inexplicables, tantôt
des ralentissements emphatiques accompagnés de sonorités presque wagnériennes
(« Amami Alfredo »).
Applaudissements pour
tous et triomphe pour
Damrau, seule lumière de
cette pâle Traviata (représentation du 22 décembre 2013).
Gabriele Bucchi
Diana Damrau est «La Traviata», ici à l’acte III
© Brescia/Amisano © Teatro alla Scala
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zurich opernhaus
Fidelio
Les metteurs en scène se méfient de Fidelio et tentent
toujours d'extirper d'un livret jugé faible et mal
structuré un message que le compositeur ne
reconnaîtrait peut-être pas lui-même.
Dans sa nouvelle production zurichoise, Andreas Homoki a opté pour
une approche radicale en supprimant tous les textes. L'action débute par le
fameux quatuor de la prison, où Leonore dévoile sa vraie identité d'épouse
fidèle et courageuse au tyran qui a fait emprisonner son mari. Mais contrairement à ce qu'a mis en
musique Beethoven, le
coup de feu part et
Leonore s'écroule dans les
bras de son époux tandis
qu'apeurés, Rocco et
Pizarro quittent précipitamment les lieux. Alors
que retentissent les dernières mesures de l'Ouverture
Leonore III, Leonore se
relève et se trouve progressivement enfermée
dans les hauts murs de la
prison qui se replient sur
elle. Puis, avec l'aide de
Marzelline qui chante
alors son premier et
unique air, elle endosse les
habits d'homme qui lui
permettront de pénétrer
«Fidelio»
dans la prison. Par la suite,
© Foto T + T Fotografie / Tony Suter
l'intrigue se déroule à peu
près comme l'ont voulu Beethoven et son librettiste, mais l'absence de textes de liaison rend difficile la compréhension des divers coups de théâtre qui
émaillent le parcours rocailleux de cette intrigue. Pourtant, ultime coup de
théâtre, au moment de l'apothéose finale, le chœur quitte brusquement la
scène pour laisser Florestan seul, éperdu devant la contemplation de son
épouse décédée pendant que la musique n'en finit pas de fêter la beauté de
la vie de couple lorsque le Bien peut triompher du Mal... Il serait à vrai dire
ardu d'imaginer un final plus contraire aux intentions déclarées de
Beethoven. Est-il si difficile aujourd'hui de croire encore en l'utopie d'un
monde plus juste ?
Les chanteurs se battent avec courage contre ces raccourcis qui leur
rendent la tâche impossible, car Beethoven, dans sa partition, ne raconte rien
mais dépeint d'abord des états d'âme qui sont chaque fois introduits par des
séquences parlées chargées de mettre le spectateur au courant de ce qui se
passe. Anja Kampe impressionne avec sa Leonore aux accents robustes, aux
aigus lumineux et prenants et au médium d'une solidité à toute épreuve.
Brandon Jovanovitch est à peine moins spectaculaire : son Florestan radieux
passe la rampe avec une facilité presque excessive qui rend difficilement
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crédible sa vie de privations au fond d'un sinistre cachot: un brin de retenue
dans les moments d'introspection auraient ici été les bienvenus. On passera
rapidement sur le Pizarro au timbre éteint de Martin Gantner pour s'intéresser au couple secondaire formé par Marzelline et Jacquino, confié à une
Julie Fuchs à la voix fraîche et forte et à un Mauro Peter certes plus discret
mais non moins convaincant vocalement. Le Rocco de Christof Fischesser
campe avec aplomb un Rocco plus juvénile que de coutume alors que le
Ferrando de Ruben Drole semble tout simplement dépassé par les exigences
pourtant minimes de son rôle. A la tête d'un orchestre remarquablement discipliné et d'un chœur magnifique d'engagement scénique, Fabio Luisi donne
du chef-d'œuvre beethovenien une lecture survoltée mais jamais excessive
dans la fourchette des nuances et des tempos choisis. (8 décembre)
Les Maîtres Chanteurs de Nurembourg
Pour ce deuxième et probablement dernier retour à l'affiche de cette
production d’Harry Kupfer, l'Opéra de Zurich a fait les choses en grand. La
distribution, où se mêlent sans friction vétérans et nouveaux venus, se compare sans autre à ce qui se fait de mieux en d'autres lieux. La direction, assurée par Sebastian Weigle de l'Opéra de Francfort, se révèle à la fois solide et
inspirée tandis que la mise en scène a été retravaillée avec un souci de précision tel qu'elle paraît aussi fraîche qu'au premier jour. Après un Prélude
encore chancelant, le chef imprime au spectacle un rythme soutenu qui n'a
rien de précipité, certes, mais qui refuse de s'attarder sur les innombrables
finesses de la partition pour concentrer son intérêt surtout sur le mouvement
d'ensemble. Rarement, ces quelque quatre heures et demie de musique
auront paru aussi brèves et aussi parfaitement signifiantes en chaque
instant. Le rôle de Sachs était tenu par Jan-Hendrik Rootering, accouru pour
prendre la relève d'un Albert Dohmen souffrant. La tâche herculéenne ne l'a
jamais pris en défaut, le timbre conservant sa fraîcheur et sa force de frappe
jusque dans la harangue finale. Seul une émission un rien nasale et un vibrato parfois mal maîtrisé trahissait le passage des ans... Il en va de même pour
Roberto Sacca, un Walter von Stolzing au chant éblouissant mais obligé de
retravailler la ligne de chant dans un quintette qui le voyait tout à coup à
court d'aigus. Parmi les nouveaux venus, il n'y a que de bonnes nouvelles à
annoncer : Martin Gantner fait de Beckmesser un personnage à la fois
comique et attendrissant. Vocalement, il se place au plus haut niveau avec
son émission soignée, son timbre remarquablement équilibré et sa ligne de
chant superbe d'élégance jusque dans les moments les plus caricaturaux lors
de la sérénade sous la fenêtre d'Eva ou pendant le concours final. Autre nouveau venu, Guido Jentjens est un Pogner à la voix imposante, à la fois profonde et souple tout en conservant une certaine élasticité dans l'émission qui
dément le poids des ans que suggère le rôle dans l'opéra. Emma Bell en Eva
séduit par son soprano large, presque trop rutilant déjà pour la jeune fille
virginale qu'elle est censée incarner: mais comment bouder le plaisir procuré par un quintette aussi magistralement maîtrisé par une voix qui ne connaît
absolument aucun problème de souffle ou d'intonation ? Le David de
Michael Laurenz étonne aussi par la maturité et la vigueur inaltérable de son
ténor qui paraît presque déplacé dans ce contexte. Mais l'intelligence du jeu
scénique et le luxe de nuances de son exposé des règles du beau chant au
début de l'opéra placent d'emblée cet interprète au premier rang de la génération montante actuelle. Anna Goryachova, enfin, fait sortir Maddalena de
son rôle de potiche vieillissante avec son chant ardent et un physique de
jeune première qui font d'elle une rivale potentiellement dangereuse pour
l'héroïne. Le chœur, parfait comme à son habitude, ajoute une touche de
grandeur finale à ce spectacle qu'on peut qualifier de grandiose. (16 nov.)
Eric Pousaz
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de meilleurs interprètes mozartiens qu'on aime
à leur reconnaître loin à la ronde (24 novembre).
à vienne
Die Zauberflöte
Peter Grimes
La Flûte enchantée représente pour l'Opéra de Vienne ce que Carmen
incarne pour les institutions parisiennes : l'essence même du répertoire, la
raison d'être de la troupe. Aussi toute nouvelle version de ce chef-d'œuvre
est-elle attendue ici avec une impatience mêlée de crainte : va-t-on réussir,
cette fois encore, à proposer une mise en scène qui satisfasse à la fois les
amateurs de grand spectacle et les intellectuels qui ne se sont toujours pas
mis d'accord sur la signification de ce conte pour enfants qui place chaque
adulte devant une série de charades insolubles ?
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Patrice Caurier et Moshe Leiser n'ont satisfait aucune de ces catégories de spectateurs avec
leur réalisation misérabiliste. Le décor de
Christian Fenouillat est d'une laideur insurpassable : en plaçant l'intrigue dans le décor d'une
usine désaffectée où les effets d'éclairages
glauques se succèdent sans raison apparente, on
s'attendait au moins à une remise au goût du
jour des impératifs scéniques imaginées par
Schikaneder. Mais rien de tout cela ne se produit: l'histoire est racontée au premier degré,
avec force effets pyrotechniques pour souligner
les moments de magie. Les animaux charmés
par Tamino dansent comme dans un remake de
film de Walt Disney, la Reine de la Nuit fait une
entrée banale en dépit des projections sidérales
qui l'accompagnent, les épreuves du feu et de
l'eau, avec quelques fumigènes tantôt éclairés
de bleu tantôt de rouge ne suscitent aucune
émerveillement et font ressembler la mise en
scène à une production villageoise montée par
une société locale sans argent.
La direction de l'orchestre, confiée à
Christoph Eschenbach, dérange par son manque
de consistance. Tantôt très lente, tantôt trop
rapide, elle souffle le chaud et le froid sans justification dramatique et finit par couper tout l'élan dramatique que les chanteurs-acteurs
essaient vainement d'imprimer à l'action scénique. La troupe réunie pour l'occasion ne comprend presque pas de chanteurs autrichiens, ce
qui est tout de même un comble dans une œuvre
aussi marquée par le génie du lieu. Les prononciations exotiques du dialogue rendent le texte
la plupart du temps confus et finissent par inciter le spectateur à ne plus faire aucun effort de
compréhension.
Le chant est de bonne tenue, mais n'atteint
pas les sommets d'émotion auxquels les représentations passées ont habitué les spectateurs
accros de Mozart. Benjamin Bruns est un
a
Tamino vocalement plein de vaillance avec son
timbre déjà presque trop héroïque mais néanmoins admirablement conduit. Chen Reiss
incarne une Pamina au comportement et au
chant empreints de noblesse mais la voix n'a
rien de cette douceur lumineuse qui caractérise
les grandes interprètes du rôle. Le Sarastro de
Brindley Sherratt fait nettement meilleure figure avec sa base assurée et magnifiquement
sonore dans la fameuse prière du 2e acte alors
que Merkus Werba, avec son Papageno agile et
vocalement avenant, remporte facilement tous
les suffrages. Les trois dames aux voix puissantes ont de la peine à donner une teinte harmonieuse à leurs interventions, qui souffrent d'un
excès d'individualisme, alors que Thomas
Ebenstein surprend agréablement avec un
Monostatos au chant délié et précis. L'orchestre
et les choeurs ne déméritent pas, mais rendent
ce soir-là assez incompréhensible la réputation
Britten est né en 1913, et le centenaire de sa
naissance a été fêté avec moins de constance
que ceux de Verdi et Wagner. Le Staatsoper n'a
même pas juger bon de proposer un nouveau
titre pour enrichir son maigre répertoire consacré à la musique de ce génie anglo-saxon mais
s'est contenté de reprendre une impressionnante
mise de scène de Christiane Mielitz, présentée
pour la première fois sur ce plateau en 1996
déjà. Avec son décor abstrait et stylisé, la production n'a pas pris une ride et se présente
aujourd'hui encore sous son meilleur jour.
Ben Heppner aurait dû chanter le rôle titre.
Malade, il a été remplacé par Herbert Lippert,
un chanteur connu ici pour ses interprétations
wagnériennes et ses imparables interventions
dans d'inoubliables représentations de La
Chauve-souris de Strauss. Son incarnation du
pêcheur solitaire s'inscrit d'emblée parmi les
meilleures du moment. La voix, tranchante et
acérée rend le personnage inhabituellement
antipathique mais cerne au plus près le problème psychologique qui va causer sa perte. Sa
longue déploration finale, chantée a cappella
dans un brouillard oppressant avec un timbre
d'une incroyable richesse de nuances, restera
comme un des moments forts particulièrement
marquants de cette soirée pourtant riche en
émotions. Gun Brit Barkmin en Ellen Ford et
Iain Paterson en Balstrode se révèlent à peine
moins grandioses: elle confère au personnage
«Die Zauberflöte» avec Valentina Nafornita (Papagena), Markus Werba (Papageno),
Wiener Sängerknaben (3 Knaben)
© Wiener Staatsoper / Michael Pöhn
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une tranquillité radieuse qui
Schœnberg Chor déchiforme un contrepoint idéal à la
rent l'espace, les révolviolence contenue du héros, tantes des protagonistes
dis que lui, avec son baryton
s'expriment avec une
épanoui, donne du capitaine
violence dénudée qui
contraint d'envoyer Grimes à la
tord le cou aux idées
mort l'image forte d'un être
reçues concernant la
déchiré par les exigences de
beauté séraphique du
l'impitoyable loi tacite de cette
chant mozartien, et les
petite communauté isolée qui ne
commentaires de l'orsupporte pas qu'on s'éloigne des
chestre, confiés ici au
voies tracées.
grandiose Freiburger
L'impressionnante liste de
Barockorchester, surchanteurs chargés de donner
prennent constamment
corps aux divers personnages
par la tournure modersecondaires qui peuplent cet
ne de leurs tournures et
«Peter Grimes» avec Gun-Brit Barkmin (Ellen Orford), Herbert Lippert (Peter Grimes),
Iain Paterson (Balstrode) © Wiener Staatsoper / Michael Pöhn
ouvrage se révèle riche en fortes
par la courbe aiguisée
personnalités qui rappellent à
de leurs arêtes.
bon escient qu'il n'y a pas vraiment de petits comme une vamp blonde aimant les plaisirs
Richard Croft incarne un Idomeneo idéal :
rôles dans une bonne représentation d'opéra tan- faciles et souffrant d'une tendance compulsive la voix est claire et large mais conserve son agidis que l'orchestre et les choeurs, placés sous la aux achats de colifichets et de tenues vestimen- lité de bout en bout au point de venir à bout du
direction engagée de Graeme Jenkins, offrent taires extravagantes. En mariant son fils à cette fameux air 'Fuor del mar' avec une aisance qui
du langage de Britten une interprétation d'une femme superficielle, Idomeneo peut espérer stupéfie; Gaëlle Arquez charme le public avec
infinie richesse de tons contrastés. Finalement, pendant un temps le détourner du complot que la mâle assurance vocale de son Idamante qui
même sans nouvelle production, l'Opéra de ce dernier pourrait tramer contre lui. Mais il se fait rapidement oublier le travesti tant l'émisVienne a quand même dignement fêté cet anni- raisonne à temps, finit par comprendre qu'il lui sion, nuancée autant que racée, reste toujours
versaire avec une reprise d'une telle qualité (23 faut se retirer. Après avoir désigné son fils parfaitement stable. Sophie Karthäuser, une Ilia
novembre).
comme successeur, il se couche lentement et légèrement plus retenue, a parfois de peine à
meurt le sourire aux lèvres, tandis qu'Idamante, passer la rampe mais elle brosse du personnage
dont le nouveau-né vient de pousser son pre- un portrait inhabituellement pugnace avec une
Idomeneo
Au Theater an der Wien, la musique de mier cri pendant le ballet final, sait déjà qu'il se voix d'un aplomb irréprochable. C'est pourtant
Mozart prend une toute autre tournure grâce à trouvera dans quelques années dans la même Marlis Petersen, avec sa fulgurante Elettra, qui
l'interprétations tant musicale que scénique situation que feu son père et que le dilemme bouleverse réellement le public. Le chant est
qu'en propose le tandem formé de René Jacobs sera également difficile à résoudre pour lui.
d'une perfection formelle incandescente, et l'exet Damiano Michieletto. L'opéra est notoireRené Jacobs, avec sa direction enflammée pressivité de chaque note fait de ses intervenment difficile à mettre en scène de nos jours, car et riche en contrastes accusés, épouse parfaite- tions des moments de théâtre chargés d'une
l'intrigue tourne autour d'une improbable ven- ment le propos violent et sanglant de la mise en incroyable véhémence qui redonne tout son
geance de Neptune dont les artistes modernes scène. Les plaintes du choristes de l'Arnold poids dramatique à ce personnage impitoyablene savent vraiment que faire,.
ment sacrifié juste
Le metteur en scène italien
avant le rideau final: sa
à empoigné le sujet à bras-lescène de folie, jouée et
corps et en modernise résoluchantée avec une
ment les prémices. Ilia et
absence de retenue
Idamante forment déjà un cousidérante, vaut à juste
ple uni avant le lever du rideau
titre à cette interprète
comme en témoigne l'état avanune ovation interminacé de grossesse dans lequel se
ble en fin de représentrouve la princesse troyenne.
tation. Excellents, les
Idomeneo projette d'écarter
rôles secondaires s'intèIdamante non parce que le dieu
grent parfaitement à ce
de la mer le lui ordonne, mais
spectacle qui fera date
parce qu'il craint de trouver en
dans les annales du
lui un rival prêt à l'éliminer au
théâtre (22 novembre).
premier signe de faiblesse.
Eric Pousaz
Aussi jette-t-il son dévolu sur
«Idomeneo» avec Richard Croft et Julien Behr © Werner Kmetitsch
Elettra, qui paraît à sa cour
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sur l'Avenue Unter den Linden. Le retard pris lors
des travaux de réfection du bâtiment historique la
contraigne pourtant à rester quelques mois encore dans le petit Schiller Theater où les mises en
scène paraissent parfois trop à l'étroit.
Pour ce nouveau Trouvère, Philipp Stölzl
Deux des trois opéras berlinois se sont encore offert le luxe d'une nouvelle
adopte un pari audacieux : il met exactement en
production d'une œuvre majeure du compositeur italien avant la fin
scène les didascalies du livret, quitte à rendre
officielle des célébrations du bicentenaire de sa naissance. Les résultats
totalement incompréhensible une action dont
n'auraient pu être plus contrastés.
l'absence de logique n'est pas le moindre des
défauts. Le décor de Conrad Moritz Reinhardt
Deutsche Oper : Falstaff
pagnement orchestral relativement lourd que emplit la scène d'un grand cube blanchâtre percé
C'est à Christof Loy qu'a échu l'honneur de Donald Runnicles tire d'un orchestre aux sons d'ouvertures à divers niveaux. Diverses projecproposer une nouvelle version de l'ultime chef- souvent pâteux et épais en dépit de la beauté tions permettent d'esquisser les grandes lignes du
d'œuvre comique de Verdi. Comme on pouvait sonore intrinsèque de chaque épisode. Noel décor dans lequel devraient se dérouler les
s'y attendre, il n'a pas pris des gants pour empoi- Bouley, un jeune baryton américain de vingt-neuf moments forts de l'action sans pourtant surchargner le sujet à bras-le-corps et en proposer une ans, ne parvient pas vraiment à faire vivre le per- ger le spectacle d'intentions. Les chanteurs sont
lecture revivifiée qui, à défaut d'être vraiment sonnage car l'interprétation paraît routinière et invités à donner à voir ce qu'ils ressentent autant
nouvelle, a du moins le mérite de mettre à nu les manque simplement de punch. La voix est certes qu'à jouer la comédie, comme dans un bon vieux
ressorts comiques de la partition.
belle et ardente, mais elle manque de panache film muet où l'exagération des mimiques servait
Comme à Salzbourg au festival d'été de pour s'imposer comme le pivot de l'action au plan de substrat au texte. L'effet est finalement assez
2013, l'intrigue se déroule dans un EMS réservé musical. Michael Nagy est nettement plus à l'ai- comique mais, comme le répète le metteur en
aux artistes lyriques vieillissants. Avant que le se en Ford avec son timbre large et magnifique scène dans son programme, peut-on prendre au
rideau se lève, un vieux film nous montre un d'assise. Le joli ténor de Joel Prieto fait bonne sérieux de nos jours les rebondissements invraibaryton sur le retour s'essayer à l'interprétation de impression en Fenton mais sans imprimer une semblables de ce livret mal ficelé ? L'avantage de
l'unique aria de Falstaff où il se remémore sa marque durable dans l'oreille. Du côté des dames, cette approche irrespectueuse est de focaliser l'atsveltesse lorsqu'il n'était encore qu'un page à la on admire le mezzo corsé de Dana Beth Miller tention sur la musique; elle rend par là-même un
cour du Duc de Norfolk. Par un savant fondu- qui brosse de Mrs Quickly un portrait haut en magnifique hommage au compositeur...
enchaîné, la scène s'éclaire ensuite et les person- couleurs, on apprécie le soprano virevoltant de
La distribution était d'un luxe que justifiait
nages du film apparaissent en chair et en os Barbara Haveman dont l'Alice Ford s'impose l'intention première de fêter dignement la réoudevant nous. Progressivement, ils entrent dans les comme une maîtresse femme au plan vocal éga- verture de la salle historique où la troupe se prorôles de l'opéra et quittent leurs habits de pen- lement et on déguste avec plaisir les accents déli- duit de coutume. Anna Netrebko s'essayait pour
sionnaires pour endosser des costumes en accord cats de la Nanetta d'Elena Tsallagova qui ajoute la première fois au rôle de Leonora, et elle triomavec la période décrite par Shakespeare dans sa une note de féerie aérienne au dernier tableau phe sans peine des embûches du rôle si l'on
comédie des Joyeuses Commères de Windsor. Un avec sa délicate incantation aux fées du lieu (5 excepte quelques vocalises imprécises dans ses
jeu constant de références au passé et au présent déc.).
deux grands airs: mais quelle voix sensuelle!
oblige les spectateurs à naviguer sans cesse entre
Large pleine, chaude, ronde, elle emplit sans
le temps de la représentation et celui de l'action Staatsoper : Il trovatore
peine le théâtre et vaut à l'artiste russe une ovaCe nouveau spectacle aurait dû marquer le tion méritée. Placido Domingo en Comte de
dépeinte par le livret, ce qui permet de revigorantes associations visuelles soulignant intelligem- retour de la troupe de l'Opéra d'Etat en ses murs Luna séduit plus facilement que dans les autres
rôles de baryton qu'il a rajoument la modernité du propos vertés dernièrement à son
dien. Mais le procédé a ses limites
immense répertoire, car ici,
aussi car il empêche une totale
après tout, le baryton se proimmersion dans l'univers comique
file comme un digne rival du
d'une soirée qui finit par paraître
ténor, non comme un père
trop sage et trop sérieuse tant les
vengeur! Le timbre reste
intentions dramaturgiques du metclair, admirablement stable
teur en scène prennent le pas sur la
dans l'aigu mais cotonneux
construction magistrale d'un livret
dans le grave, ce qui, ici, ne
d'une rare perfection formelle et
gênerait finalement pas trop
d'une musique qui en épouse
si le souffle n'était si court.
chaque revirement avec une
En Azucena, la jeune
confondante acuité. La distribuPrudenskaya fait un véritable
tion réunie pour l'occasion, sans
tabac tant il est rare d'entenddémériter, peine à trouver le ton
«Il Trovatore» avec Marina Prudenskaya (Azucena), Anna Netrebko (Leonora), Gaston
Rivero (Manrico), Plácido Domingo (Graf Luna) © Mara Eggert
re une sorcière au chant pleijuste. Cela tient d'abord à l'accom-
à berlin : la fête à verdi
Suite et fin...
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nement assumé jusque dans ses
Neuenfels dans sa nouvelle
excès et constamment libre de
production n'y va pas par quavibrato excessif. Séduisant par sa
tre chemins: il récrit complèteclarté à la fois dynamique et percument le texte parlé (les récitatante, ce portrait de gitane rappelle
tifs sont optionnels, dans ce
fort opportunément que pour le
cas, car une des deux versions
compositeur, c'est elle qui est le
signées par Mozart n 'en compersonnage central de l'ouvrage,
prend point) et ajoute deux
non le couple d'amoureux malheupersonnages d'acteurs vieillisreux! Gaston Rivero se bat avec
sants qui philosophent sur l'acourage contre les aigus claironmour, ses conséquences sur la
nants de Manrico, le trouvère renévie de tous les jours et l'imposgat, et se sort avec les honneurs
sibilité dans laquelle il met les
d'une soirée qu'il a sauvée en
amants de mener une vie noracceptant de remplacer le titulaire
male en prenant des décisions
«La Finta giardiniera - Les portes de l’amour» avec Alex Penda (Arminda), Stephanie
déclaré malade. A la tête d'un
empreintes de bon sens. On
Atanasov (Ramiro) © Ruth Waltz
orchestre et d'un chœur admirablen'est en fait pas loin de l'uniment disposés, Daniel Barenboim crée la surpri- théâtre d'importance internationale et l'on peine à vers des liaisons dangereuses, même si l'explorase dans un répertoire où on ne l'attendait pas: son comprendre le sens d'une telle entreprise dans ces tion cynique des valses-hésitations sexuelles va
accompagnement est précis, musclé mais sans conditions. La Fiordiligi de la Suissesse Brigitte nettement moins loin. Au final, l'opéra est donné
lourdeurs ou lenteurs excessives. On n'eût pu Geller est encore celle qui tire le mieux son épin- sous un titre nouveau : Les portes de l'amour, car
souhaiter mieux pour ce titre qui ne parvient tou- gle du jeu avec son soprano ductile, épanoui mais il ne s'agit rien moins que de calquer la musique
jours pas à susciter auprès du public le même manquant tout de même d'agilité dans les vocali- de Mozart sur une toute autre histoire.... La disenthousiasme que Rigoletto ou La Traviata (4 ses du 'Come scoglio'... En Dorabella, Karolina tribution est composée de chanteurs jeunes et
déc.).
Gumos lui donne la réplique avec pertinence, beaux, parfaitement à l'aise dans ce labyrinthe
mais la voix est trop ouverte dans les moments des sentiments dont personne ne ressort finaleKomische Oper : Cosi fan tutte exposés pour que l'auditeur prenne plaisir à l'en- ment indemne. Anna Siminska est une Violanta
C'est une nouvelle version curieuse de Cosi tendre négocier les difficultés pourtant réduites désinvolte jusqu'à l'impertinence et négocie les
fan tutte que propose l'Opéra comique de la ville. du rôle. Günter Papendell est irréprochable en longues séquences de fioritures de sa scène de
L'action se déroule dans un atelier de restauration Guglielmo, ce qu'on ne saurait dire du Ferrando folie avec un aplomb qui force le respect. Avec
de tableaux baroques. L'équipe de spécialistes vocalement approximatif et souvent à la peine de son beau timbre mordoré, Stephanie Atanasov,
engagée pour réaliser ces travaux s'affaire autour Stefan Cifolelli. Le Don Alfonso de Sevenich dans le rôle travesti de Ramiro, atteint également
de fresques endommagées par le passage des ans. n'est franchement pas à sa place ici avec son à des sommets d'émotion malgré la platitude du
Parmi eux, deux couples aux relations plutôt chant débraillé et son timbre fatigué; par contre, texte de ses airs qui transforme ses plaintes en
tumultueuses dans lesquels on reconnaît rapide- malgré une certaine dureté dans l'aigu, la éléments comiques d'un goût douteux. Regia
ment le quatuor de base de l'opéra mozartien. Despina de Cornelia Zink parvient à se montrer à Mühlemann, une Serpetta au timbre aérien, et
Lorsque le chef de l'atelier propose le fameux la hauteur des enjeux dramatiques et vocaux de Stephan Rügamer, un Podesta aux envolées
pari aux deux amants certains d'avoir conquis son rôle. Même l'orchestre, dirigé par Henrik comico-lyriques à la fois élégantes et pleines de
définitivement le cœur de leurs belles, ces der- Nanasi qui occupe le poste de directeur général punch, assurent aux péripéties un déroulement au
niers endossent les habits des personnages des de la musique dans la maison, paraît bien trop rythme soutenu. Doglet Nurgeldiyev est par conttableaux à la restauration desquels ils travaillent prosaïque pour proposer des pistes de lecture re un Comte Belfiore plutôt pâlot, tout comme
présentement, et ils reviennent sur scène en par- nouvelles qui eussent correspondu à celles que Alex Panda en Arminda et Aris Argiris en Nardo
lant italien alors que leurs promises continuent à tente d'explorer Alvis Hermanis dans sa nouvelle dont les interventions restent bien en-deçà des
s'exprimer dans la langue de Goethe. Les femmes production plutôt décapante (1er déc.)
possibilités comiques de leurs rôles. Christopher
se laissent abuser, puis, charmées, empruntent le
Moulds trouve par contre toujours le ton juste
même chemin et s'habillent également à l'ancien- Staatsoper: La finta giardiniera
pour accompagner efficacement les chanteurs
Cet ouvrage de jeunesse de Mozart nous dans l'exposé embrouillé de leurs vies sentimenne tout en passant à l'italien. Lorsque la comédie
touche à sa fin (Despina est bien sûr devenue ici montre un compositeur à la recherche d'un sujet tales : sous sa direction animée, l'orchestre pétille
l'éternelle femme de ménage ronchonnante!), un qui soit à la hauteur de ses ambitions artistiques et s'immisce dans l'action en faisant entendre des
des couples se sépare tandis que l'autre trouve sur le plan musical. Or le livret de cette Finta voix curieusement discordantes mais parfaitedans l'échangisme une nouvelle raison d'espérer giardiniera sur lequel il a écrit sa musique est ment à leur place dans le discours déjà passableque l'avenir réserve quelques belles surprises vraiment mauvais car confus et peu plausible; il ment troublé des protagonistes (3 déc.)
pour eux. Le chant n'est malheureusement pas à rend donc toute mise en scène moderne difficile
Eric Pousaz
la hauteur. Aucun des artistes présents sur la à réaliser sur un plateau car le public n'est plus
scène ne parvient à maîtriser le langage mozar- prêt à se laisser divertir par trois heures de quitien comme il conviendrait de le faire dans un proquos d'une affligeante banalité. Hans
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à londres
Un autre Verdi
Alors que la majorité des maisons d'opéras du monde ont fêté le
bicentenaire de la naissance de Verdi en proposant de nouvelles lectures
d'ouvrages-phares ou en puisant dans leurs réserves de mises en scène à
succès, le Covent Garden de Londres a osé le pari de monter Les Vêpres
siciliennes dans sa version française, un pari que seul l'Opéra de
Francfort a osé en juin passé.
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L'ouvrage a été composé entre la trilogie
formée du Trouvère, de Rigoletto et de La
Traviata, et des titres aussi célèbres qu'Un Bal
masqué ou Simon Boccanegra. Pourtant, jusqu'à
aujourd'hui, ce grand opéra en cinq actes ne
s'est pas imposé durablement au répertoire et
reste le plus méconnu des chefs-d'œuvre de la
maturité du compositeur italien.
La nouvelle production du Royal Opera de
Londres rend presque compréhensible ce dédain
des directeurs de théâtre. L'œuvre est lourde;
elle nécessite non seulement un quatuor de
solistes imposant capable d'affronter des rôles
d'une lourdeur et d'une difficulté technique
exceptionnelles, mais exige aussi l'engagement
d'un ballet et d'un chœur renforcé; pour ajouter
à ces difficultés, les nombreux changements de
lieux prévus dans le livret impliquent la mise en
place d'une production qui ne peut qu'être onéreuse. Enfin, avec près de quatre heures de
musique, l'ouvrage compte parmi les plus longs
de Verdi: seul Don Carlos fait mieux en terme
de durée!... Néanmoins l'effort se justifie
amplement tant la musique est grandiose et
innovante, même si elle reste encore fortement
marquée au sceau du style pompeux cher au
grand opéra à la française.
La mise à l'affiche de ce titre a remporté un
succès sans précédent sur la scène londonienne.
Pas un seul siège ne restait disponible pour cette
huitième représentation de la série, et l'on peut
espérer qu'une prochaine reprise du titre permettra à un public encore plus nombreux de
juger sur pièce une œuvre dont on a trop vite dit
qu'elle ne correspondait plus au goût du jour.
Une mise en scène innovante
Le metteur en scène norvégien Stefan
Herheim est d'avis que l'histoire du soulèvement
des Siciliens contre l'occupant français à la fin
du XIIIe siècle ne correspond plus à grand
a
chose pour le public actuel. Dans son nouveau
spectacle, il fait jouer l'intrigue sur la scène et
dans les coulisses de l'Opéra de Paris en plein
XIXe siècle. Pendant les préparatifs d'une représentation, les ballerines sont surprises en plein
travail par une équipe de soldats qui ne prend
pas de gants pour obtenir d'elles les satisfactions
escomptées. Le monde des arts devient ainsi
celui des victimes de l'oppression (les Siciliens
du livret), alors que celui des occupants est
incarné par le public qui vient au théâtre dans le
seul but de se détendre en versant une larme furtive sur le destin tragique des héros des ouvrages mis à l'affiche. La révolte finale permet au
artistes incompris et méprisés) mais ne propose
pas de pistes de réflexion. Il a du moins le mérite de se dérouler dans un décor grandiose qui se
transforme constamment en nous faisant passer
sans baisser de rideau de la salle de répétitions
du ballet à l'auditorium lui-même, constitué de
trois rangs de balcons, de quelques loges et
d'une scène d'une profondeur inattendue. Pour
rendre la dimension onirique encore plus présente, le décorateur Philipp Fürhofer s'amuse à
faire passer constamment de gauche à droite
l'espace scénique ou la salle de façon que le
public perd rapidement tout repère visuel et se
laisse porter par une extravagance scénique qui
compte parmi les plus spectaculaires qui se
puissent imaginer.
La distribution ne comprend aucun nom
d'interprète italien mais accomplit néanmoins
un sans-fautes dans ce parcours semé d'embûches de tous ordres. Michael Volle fait grande
impression dans la figure tyrannique de Guy de
Montfort à qui il prête une voix robuste mais
riche d'une incroyable fourchette de nuances.
Bryan Hymel, qui incarne son fils tiraillé entre
les impératifs de son amour filial et ses engagements politiques qui le rendent ennemi de son
père, fait étalage d'une voix magnifique d'éclat,
mais manifestant une tendance marquée au cri
en fin de parcours. Erwin Schrott trouve en
«Les Vêpres siciliennes» © Cooper
personnel artistique du théâtre de se débarrasser
de ceux qui tentent de l'asservir, le massacre de
l'oppresseur étant à interpréter comme un acte
de liberté artistique recouvrée.
On l'aura compris: ce spectacle se présente
comme une rêverie sur un thème connu (le
public inculte mais riche est ici opposé aux
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Procida un rôle qui lui permet de mettre en
valeur sa prodigieuse voix de basse, au détriment parfois, il est vrai, de la précision dans
l'intonation. La voix solaire, chaleureuse et
veloutée de Lianna Haroutounian convient idéalement au personnage d'Hélène dont elle brosse
un portrait probant sauf lorsqu'il s'agit de faire
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chœur et le non moins impressionnant orchestre
de la maison dans un parcours verdien sans
faute qui ferait honneur aux plus grands théâtres
de la Péninsule (11 novembre).
Wozzeck
Simon Keenlyside est «Wozzeck»
© Catherine Ashmore
preuve d'une virtuosité presque exhibitionniste
comme dans le fameux Boléro du 5e acte où
elle atteint alors visiblement les limites des possibilités techniques de son timbre plutôt lyrique.
Antonio Pappano dirige avec passion un opéra
qui lui tient à cœur: sa direction tour à tour
emportée ou fervente entraîne le prodigieux
Changement radical d'atmosphère le lendemain soir avec Wozzeck d'Alban Berg. La réalisation scénique de Keith Warner est à peine
moins spectaculaire que celle des Vêpres siciliennes vue le soir précédent. Dans le décor de
laboratoire médical d'une blancheur aveuglante
de Stefanos Lazaridis, le metteur en scène
anglais montre la descente aux enfers du personnage central comme une lente immersion
dans l'univers déshumanisé qui le rejette. Au fur
et à mesure que le drame progresse, l'espace
semble perdre sa structure et son équilibre: l'action se joue alors tantôt sur le plateau, tantôt en
dessous avec un immense miroir en toile de
fond qui permet au spectateur de suivre les fils
de l'intrigue en perspective aérienne, comme s'il
voyait s'agiter ce petit monde au travers des lentilles d'un microscope. La scène finale où
Wozzeck s'immerge dans un aquarium empli
d'eau teintée de sang sous le regard indifférent
et comme absent de son fils compte sans
conteste au nombre des images les plus fortes
Clôture
Manca, le Festival international des musiques d’aujourd’hui établi sur la
Côte-d’Azur, en est déjà à sa 34e édition. Remarquable longévité ! Le
thème de cette édition, “ Le Rayon vert ”, fait référence à un phénomène
optique particulier et à la légende qui l’accompagne, et se veut sa traduction en musique. Ou quand l’imaginaire tente de rejoindre la réalité.
Du 19 novembre au 1er décembre, créations
et manifestations inusitées ont ainsi empli d’effluves sonores les lieux les plus variés de Nice et
de ses environs. Le concert de clôture prend
place dans l’acoustique impeccable de
l’Auditorium Rainier III de Monaco, avec
l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo et
un programme éclectique à l’image du festival.
Se succèdent ainsi Jeu de Cartes de Stravinsky,
Redshift (autre référence optique – ici les clichés
obtenus au moyen de télescopes), création mondiale due au compositeur russe Vladimir
Tarnopolski, le Deuxième Concerto pour piano
de Prokofiev et la Rapsodie espagnole de Ravel.
Autant de pages de facture et de nature différentes, propres à mettre en exergue les vertus de duc-
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tilité et de malléabilité de la phalange monégasque. Car c’est à un festival sonore que l’on
assiste ! D’entrée frappe l’homogénéité, la virtuosité contrôlée et la vigueur des timbres, dans
un Stravinsky qui n’est pourtant que pièges pour
les cent vingt instrumentistes réunis. Ravel
confirme, par un envol souverain, le même
niveau d’excellence (oublions un petit écueil passager du pianissimo des cuivres à la fin de
Habanera). Prokofiev est plus sage, côté orchestral, mais laisse au soliste, Martin Helmchen, la
part belle : dans un jeu perlé et percutant, des
emportements d’un magnifique élan.
La pièce de Tarnopolski constitue une autre
aventure, qui associe un traitement électronique
dans un alliage de couleurs scintillantes, au sein
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qui se puissent imaginer sur une scène d'opéra.
La distribution est d'une homogénéité
remarquable. Simon Keenlyside a su faire sien
le rôle du soldat torturé; la voix n'est jamais
agressive, et c'est précisément par sa douceur et
la tendresse de ses inflexions qu'il rend encore
plus insupportable la situation de cette victime
qui assassine le seul être qu'il ait aimé pour
retrouver une partie de sa dignité. A Karita
Mattila, une Marie voluptueuse au chant d'une
opulence inhabituelle, s'opposent les coassements agressifs du Docteur de John Tomlinson
et les glapissements apeurés du Capitaine de
Gerhard Siegel. Endrik Wottrich, un TambourMajor aux accents idéalement arrogants, et John
Easterlin, un Andres aux intonations empreintes
de commisération, complètent idéalement ce
tableau musical inégalable de la misère humaine. A la tête d'un orchestre admirablement
disposé, Mark Elder radiographie la partition de
Berg à la fois pour en tirer les stridences les plus
modernes et pour en rechercher les racines
musicales dans un postromantisme sur lequel le
compositeur tire ici un trait définitif (12 novembre).
Eric Pousaz
d’un long crescendo-descrescendo-crescendo. Une
façon d’esthétique postspectrale, qui ne serait pas
follement originale, mais à
laquelle on peut succomber.
Sans retenir toutefois, au
bout du compte, le sentiment d’être confronté à la
création d’une œuvre
immortelle.
Nous n’avons encore
Dima
Slobodeniouk
rien dit du chef, Dima
© Marco
Slobodeniouk, pour le garBorggreve
der pour la bonne bouche.
Car si l’orchestre délivre une souplesse confondante, il la doit à la maîtrise consommée de la
direction qui la sous-tend. Précision des gestes,
assurance des tempos, cisèlement du détail et
rigueur du souffle : ces qualités indéfectiblement
conjuguées signent la matière d’une compétence
rare. On comprend alors l’hommage des instrumentistes, notable et assez exceptionnel, au
moment de l’un des saluts, refusant de se lever
pour laisser seul au chef le recueil des bravos.
Pierre-René Serna
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OPÉRA JEUNE PUBLIC
DÈS 7 ANS
VERSION FRANÇAISE
PLACES
CHF 15.– À 48.–
MIGROS-
L-CLAS
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L
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N
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POUR-C
014 au
Saison 2013/2
SICS
Victoria Hall
Jeudi 13 mars 2014 à 20 h
ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE
MONTRÉAL
Kent Nagano (direction)
Marc-André Hamelin (piano)
Richard Wagner
Prélude de l’opéra «Parsifal»
David Philip Hefti*
Création mondiale
Commande Migros-Pour-cent-culturel-Classics
Franz Liszt
Concerto pour piano Nº 2
Hector Berlioz
Symphonie fantastique
5, 7, 8, 9, 12 FÉVRIER
*Compositeur suisses
Billetterie: Service culturel Migros Genève, Rue du Prince 7, Tél. 022 319 61 11
Stand Info Balexert et Migros Nyon-La Combe.
www.culturel-migros-geneve.ch
WWW.OPERA-LAUSANNE.CH
T 021 315 40 20
SIDNEY BECHET
Organisation: Service culturel Migros Genève
www.culturel-migros-geneve.ch www.migros-pour-cent-culturel-classics.ch
Théâtre des Marionnettes de Genève
SWISS YERBA BUENA CREOLE RICE JAZZ BAND
VENDREDI 14 & SAMEDI 15 MARS — 20h
DIMANCHE 16 MARS —15h
SALLE DES FÊTES DU LIGNON
Place du Lignon 16 — Vernier
NOTA BÉBÉS
LES FOURBERIES
DE SCAPIN
Adultes, ados
7 février au 14 février 2014
Le plus célèbre valet du théâtre
révèle la comédie humaine.
Service de la culture — 022 306 07 80
www.vernier.ch/billetterie
De 1 à 3 ans
17 février au 2 mars 2014
Promenade musicale
et poétique sur le fil.
tmg
es
nnett
mario
Rue Rodo 3 – Genève
022 807 31 07
www.marionnettes.ch
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concours de genève
Palmarès 2013
Le Prix de composition 2013 a été décerné au
Sud-Coréen Kwang Ho Cho (26 ans) pour son œuvre,
Pneuma. Le public a été conquis par la candidate
japonaise Chikako Yamanaka (30 ans), lui attribuant
non seulement le Prix du public, mais aussi le Prix
Jeune public.
Le sujet du Prix de composition 2013 était une « œuvre pour flûte
solo et petit ensemble de cinq instruments ».
Cinq candidats venant de l’Italie, du Corée du Sud et du Japon ont été
sélectionnés comme finalistes. Leurs œuvres ont été interprétées lors de la
Chikako Yamanaka,
prix du public & prix jeune public
© Anne-Laure Lechat
finale publique - qui a eu lieu le dimanche
1er décembre 2013 au Studio ErnsestAnsermet - par l’Ensemble Contrechamps,
sous la direction de Gregory Charette, avec
les flûtistes Felix Renggli et Sylvia Careddu.
L’œuvre lauréate, à savoir Pneuma, sera la
pièce imposée pour la demi-finale du
concours de flûe en 2014.
C’est donc le Sud-Coréen Kwang Ho
Cho qui a remporté l’adhésion du jury grâce
à son œuvre « Pneuma » pour flûte solo et
ensemble (clarinette, violon, violoncelle,
percussions et piano). Son œuvre a été interprétée par Felix Renggli.
Quant à « Uminari », l’œuvre pour flûte
solo et ensemble (hautbois, clarinette, violoncelle, percussion et piano) composée par
la Japonaise Chikako Yamanaka, elle a été
jouée par la flûtiste Silvia Careddu (Premier
Prix en 2001).
Kwang Ho Cho, laureat du Prix de composition 2013
© Anne-Laure Lechat
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le quatuor signum à nyon et genève
Des archets engagés
«Signum», en latin, signifie «empreinte»; trois jeunes Allemands et un
Sud-Africain sont en train d'imprimer leur marque sur le paysage musical.
Fondé en 1994, l'ensemble est dans sa
forme actuelle depuis 2007. Les artistes, qui se
produiront en février 2014, ont mené brillamment à bien leurs études et ont, surtout, bénéficié des conseils des Quatuors Alban Berg,
Artemis et Melos. Ils ont aussi beaucoup échangé d'idées et d'expériences musicales avec des
musiciens aussi variés que György Kurtág,
Walter Levin, Alfred Brendel, Leon Fleisher ou
Jörg Widmann. Pour mener à bien leur carrière,
ils bénéficient de l'appui de la «Fondation
Bayer» et du «Programme 3» de la BBC.
Comment tous ces échanges et parrainages se
traduisent-ils sur le plan musical ?
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Une musique investie
Une écoute immédiate perçoit très vite une
immense énergie et un fort engagement. Pour ces
artistes, la musique, de chambre par surcroît, ne
saurait être un aimable divertissement pour personnes de la bonne société ! Les archets s'engagent à fond dans une théâtralisation forte, mais
jamais vulgaire. La musique se doit d'être bien
investie, avec un tempo élevé si nécessaire. Dans
des entretiens accordés à la presse allemande, les
concertistes insistent sur « l'importance de la
bonne impulsion, au bon moment ». La pointe
d'humour sait aussi se manifester quand il le faut.
Ces chambristes savent éviter de se prendre trop
au sérieux, et les seize cordes ne versent nullement dans l'esbroufe ou la facilité. Tout est soigneusement et précisément mis en place. Le
chant de l'ensemble est le résultat d'une longue
maturation, produite par les artistes lors de leurs
répétitions: tout est discuté, soigneusement
pensé, prévu, et les artistes assurent y consacrer
tout le temps nécessaire. Pour ces musiciens, le
respect mutuel est, d'après leurs dires - et leur jeu
le confirme - une vertu absolument cardinale.
Pour résumer trop brièvement le tout, les mauvaises langues diraient qu'ils ne sont pas Germains
pour rien ! Mais il paraît beaucoup plus opportun
de prétendre que les concertistes impriment de
manière très pensée leur marque - pour reprendre le nom qu'ils se sont donné - à leur partition.
Les moments plus recueillis sont intensément lyriques, et le mélomane peut associer ces
exécutants à l'univers romantique au sens original
du terme : fort, tourmenté, sombre, riche de sentiments qui se bousculent. Résumant l'impression
que donnent ces musiciens, Wolfgang Rihm, un
compositeur contemporain à l'esthétique exigeante, a déclaré à propos de l'interprétation de
son difficile Quatuor n° 9 : « C’est une grande
joie que de pouvoir entendre leur interprétation
sérieuse et énergique, leur précision poétique. Ce
sont exactement les qualités dont a besoin l’interprétation de mon quatuor. »
L'aspect expérimental de certaines pages
contemporaines est également audacieusement
mis en avant, comme en témoigne la mise en
musique implacable et impeccable des cinq quatuors à cordes de Jörg Widman, des opus à l'esthétique accidentée et étrange, voire inquiétante
par moments.
Une discographie contrastée
Parus chez Capriccio, les disques témoignent d'un désir évident de féconder les époques
en les opposant. L'auditeur trouvera aussi bien
des pages de Mozart et Beethoven, que des partitions de Berg, Bartók ou Schnittke. Dans leur
art, les interprètes s'attachent à mettre en évidence la modernité des portées du passé, quitte
à les dépoussiérer avec force; mais - quand ils
ne se transforment pas en explorateurs des portées d'aujourd'hui - ils mettent également en évidence, dans les styles plus récents, toutes les
dettes envers les prédécesseurs.
Pierre Jaquet
Kerstin Dill, premier violon / Annette Walther, second
violon / Xandi van Dijk, alto / Thomas Schmitz, violoncelle
Nyon, Salle de la Colombière, le 9 février à 11h15
Conservatoire de Genève, le 10 février à 20h
Programme: Haydn: Quatuor en ré mineur op.76 N°2,
"Les Quintes" / Schnittke: Quatuor N°3 / Dvorak:
Quatuor N°13 en sol majeur, op.106 B.192
Quatuor Signum
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victoria hall genève
Une qualité à exporter !
L’Orchestre de Chambre de Pologne est né en 1972, au sein de l'Opéra de
Chambre de Varsovie, sous la direction du chef Jerzy Maksymiuk.
Formation jeune et dynamique, l'ensemble s’émancipe rapidement et sort
des frontières de la Pologne, alors communiste, pour conquérir le public
étranger.
bout de son archet le Sinfonia Varsovia - connu
encore aujourd'hui sous son ancien nom
d'Orchestre de Chambre de Pologne - le 13
février prochain à Genève.
Outre les multiples apparitions sur scène et
de nombreux enregistrements, l’orchestre s’investit dans des festivals et crée, en 2000, une
fondation dont le but est de promouvoir de jeunes artistes et des compositeurs polonais. Une
fois par année, la phalange offre à sa ville-capitale de résidence un festival sur mesure, pour le
plus grand plaisir de ses compatriotes et des
mélomanes étrangers.
A Genève
En février prochain, la formation symphonique se présentera
devant le public genevois avec une
palette d’opus qui auront pour
principal protagoniste le violon.
Et pas n’importe lequel: il
s’agit du Stradivarius de Maxime
Vengerov ! Les fans de ce toucheà-tout doivent être heureux de le
retrouver en forme après un arrêt
forcé de presque quatre ans. Ce
concert sera également un clin
d’œil vers le passé : la véritable
carrière de ce musicien russe passionné a débuté à l’âge de 10 ans,
quand il a remporté le prestigieux
Concours Wieniawski en…
Pologne, à Poznan...
Beata Zakes
Orchestre de Chambre de Pologne / Sinfonia Varsovia
En 1984, une rencontre change la destinée
de l'OCP: le maestro Yehudi Menuhin accepte
une invitation à diriger ces instrumentistes à
l'effectif jusque-là resserré, qui, pour l’occasion, s’élargit à 40 musiciens. Les transmissions
radiophoniques et télévisées de ces concerts
rencontrent un accueil tellement enthousiaste
que le maestro signe quelque temps après un
contrat, en tant que chef invité, avec l'OCP qui
vient de prendre un nouveau nom : Sinfonia
Varsovia. En 1996, pour célébrer le 80e anniversaire de Sir Menuhin, l’ensemble enregistre
avec lui une intégrale des symphonies de
Beethoven et une seconde, de Schubert. Une
série de 65 concerts suit, dans le monde entier,
la même année.
Une autre collaboration enrichissante
débute en 1997, avec le compositeur et chef
polonais Krzysztof Penderecki. Ensemble, ils
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créent de nombreuses œuvres du maestro et gravent plusieurs CDs. Sinfonia Varsovia a notamment accompagné ce musicien phare lors de son
apparition au 15e Festival de Musique à Colmar
en 2003, année de son 70e anniversaire.
Un parcours sans faute
Une préparation méticuleuse et un répertoire presque illimité sont les principaux atouts de
la formation; elle a fait le tour du monde sous la
baguette de chefs réputés, polonais et étrangers,
tels que Witold Lutoslawski, Claudio Abbado,
Rafael Frübeck de Burgos, Mstislav
Rostropovich, Bruno Weil ou encore Marc
Minkowski (directeur musical depuis 2008).
Auprès de ce groupe orchestral, des solistes de
grande renommée ont toujours pu compter sur
un accompagnement de qualité. Parmi eux, il y
a Maxime Vengerov, le même qui guidera du
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Victoria Hall. Jeudi 13 février 2014 à 20 h
Service culturel Migros Genève
Tél.: +41 (0) 22 319 61 11
Wolfgang Amadeus Mozart :
Concerto pour violon Nº 4 en ré majeur, K. 218
Concerto pour violon Nº 5 en la majeur, K. 219
Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Sérénade mélancolique en si bémol mineur, op. 26
«Souvenir d’un lieu cher», op. 42
Valse-Scherzo en ut majeur, op. 34 (arrangement de
David Walter)
Camille Saint-Saëns
Havanaise en mi majeur pour violon et orchestre, op. 83
Introduction et Rondo capriccioso en la mineur pour violon et orchestre, op. 28
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portrait
Les CDs du label Doron Music
Sylviane Deferne
Deux disques, publiés coup sur coup par Doron Music, mettent en valeur
le talent de la pianiste Sylviane Deferne, bien connue comme concertiste et
enseignante en classe professionnelle à la Haute Ecole de Musique de
Genève. Deux concertos de jeunesse de Mendelssohn, l’un pour piano,
l’autre pour violon, tous deux avec orchestre à cordes, figurent sur le
premier CD. Le second, en tout point admirable, réunit des pages
méconnues, bien que d’une grande valeur musicale, d’Isaac Albeniz et
du Padre Antonio Soler.
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Née à Genève, où ses études au
Conservatoire ont été couronnées d’un 1er prix
de virtuosité avec distinction, Sylviane Deferne,
également finaliste du concours Clara
Haskil, obtient, au début de son activité professionnelle, entre autres distinctions, le 1er prix, attribué à l’unanimité, du Concours Frank Martin, aux
Pays-Bas. Commence alors une carrière de soliste qui la conduit à se produire en Europe aussi bien qu’en Asie et
aux USA. Chargée de cours à
l’Université de Montréal, elle choisit
de s’établir au Canada, tout en donnant
des cours d’interprétation dans divers
pays d’Europe et d’Asie, en Corée et
au Japon.
De retour en Suisse en 1996,
Sylviane Deferne enseigne le piano au
Conservatoire de Neuchâtel, puis, à
partir de 2008, à la HEM de sa ville
natale, tout en faisant partie du jury de
divers concours.
Un autre CD, édité en 2009, unit Karol
Szymanowski et Frédéric Chopin .
Publié en 2010 sous le label REM, un CD
Discographie sélective
Au Québec, Sylviane Deferne a
enregistré plusieurs disques de
musique de chambre en compagnie de
la violoniste montréalaise Anne Robert.
Paru en 2001 sous l’étiquette CBC, la
Sonate en sol mineur, op.23, de Louis Vierne est
une page négligée, à tort, du répertoire de la
première moitié du XXe siècle. La 3e Sonate en
la majeur du Breton Guy Ropartz renferme elle
aussi de belles idées musicales, bien mises en
valeur par le duo Robert-Deferne. Un Thème et
variations pour piano et violon datant de 1932,
d’Olivier Messiaen, complète intelligemment le
CD.
a
Sylviane Deferne. Photo © Sebastien Goyon
consacré à trois sonates pour violon et piano,
respectivement de Gabriel Pierné, Charles
Tournemire et César Franck, est particulièrement bienvenu, les sonates de Pierné et de
Tournemire, fort belles au demeurant, apparaissant comme des raretés discographiques.
On ne saurait oublier un fameux disque
Decca, où Sylviane Deferne et Pascal Rogé
rivalisent de brio dans un étincelant Concerto
pour 2 pianos de Francis Poulenc, avec l’OSM
(Montréal) conduit par Charles Dutoit.
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Faisant partie depuis 2007 du trio CERESIO, avec Anthony Flint au violon et Johann
Sebastian Paetsch au violoncelle, Sylviane
Deferne enregistre avec eux les deux grands
Trios avec piano de Mendelssohn, plus - une
première – le Trio en do mineur (1822), fruit
précoce de la douzième année du jeune Félix.
Datant des années montréalaises (1995/96),
mais édité par Doron en 2012, l’album « The
Last Rose of Summer » associe des pièces de
Félix Mendelssohn (dont les Variations sérieuses) à une œuvre de sa sœur Fanny, une Sonate
en do mineur qui ne manque pas d’intérêt.
C’est aussi le cas de l’album « Chants de
l’aube », autour de Robert Schumann, avec
notamment 3 Préludes et Fugues composés par
Clara.
Enfin il y a les deux CDs de parution
récente. L’un consacré à deux concertos
du jeune Mendelssohn, celui en la
mineur pour piano, et celui en ré mineur
pour violon, réalisé avec le concours de
l’Orchestre de Chambre de Toulouse et
le violoniste Gilles Colliard.
L’autre, « El Duende », sorti en
mars 2013, d’une grande originalité et
bénéficiant d’une superbe prise de son
du Berlinois Johannes Kammann, est
consacré à deux Catalans qu’un siècle
sépare, le Padre Antonio Soler (17291783) et Isaac Albeniz (1860-1909) Les
pages d’Albeniz datent des dernières
années de la vie du compositeur et sont
donc contemporaines d’Ibéria, son chefd’œuvre. Elles puisent au source d’un
folklore imaginaire. Pour deux d’entre
elles, Azulejos et Navarra, inachevées à
la mort d’Albeniz, Sylviane Deferne a
opté pour des partitions complétées à
son intention par le Neuchâtelois JeanPhilippe Bauermeister.
Elles sont suivies de 4 Mélodies de
1909, adaptées pour piano seul également par J.-Ph. Bauermeister. Cinq brillantes
Sonates du Padre Soler complètent le disque,
sous le signe du Duende, terme intraduisible
désignant une sorte d’envoûtement qui se dégage du flamenco. Le duende est « comme un flot
de sang, ami des vents chargés de sable », selon
Federico Garcia Lorca.
Yves Allaz
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portrait
Estelle Revaz
Le dimanche 16 février prochain, la jeune violoncelliste Estelle Revaz
jouera le Concerto en ré de Joseph Haydn, avec l’Orchestre des Pays de
Savoie conduit par Nicolas Chalvin, au Theâtre du Martolet à St-Maurice,
dans le cadre du Festival des Scènes valaisannes 2014. Au même
programme figurent la 2e symphonie d’Arthur Honegger, la 59e dite « Le
feu » de Haydn, ainsi que la Sérénade pour cordes No 2, datant de 1981, du
compositeur franco- libanais Bechara El Koury.
Née à Salvan en 1989, Estelle Revaz entreprend l’étude du violoncelle dès l’âe de 6 ans au
Conservatoire de Sion, puis au Conservatoire de
région de Boulogne, sa famille s’étant pour un
temps installée à Paris. Elle poursuit ensuite ses
études au Conservatoire National Supérieur de
Musique de Paris, et obtient à 15 ans le1er Prix
de la Fondazione Antonio Salieri di Legnano, à
Salzburg, ce qui lui permet d’entreprendre sa
première tournée de soliste en Italie, en
Récompenses
Cumulant dès lors, cachets, prix et bourses,
la jeune violoncelliste commence à vivre de son
art.
En été 2011, le St-Prex Classics lui ouvre
ses portes dans le cadre des invitations à de jeunes talents. Elle y revient l’année suivante pour
y jouer, en compagnie de Gautier Capucon, un
concerto pour 2 violoncelles de Vivaldi.
En avril 2012, Estelle Revaz est invitée à
Estelle Revaz © Markus Hoffmann
Allemagne et en Hollande. Elle fait à Cologne
une rencontre d’une importance déterminante,
celle de la violoncelliste Maria Kliegel, qui, lors
d’une master class, l’invite à passer une année
dans cette ville, où Estelle finira par s’établir.
Aujourd’hui encore, elle bénéficie régulièrement des conseils de Maria Kliegel, pédagogue
dont elle se sent très proche. « Elle m’épaule,
c’est mon maîre », confiera-t-elle à la Tribune
de Genève en juin 2012.
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passer trois semaines en Argentine et donne des
récitals à Mendoza et à Buenos Aires.
Au printemps de la meme année, le prix de
la Fondation Patino de la Ville de Genève lui
permet de passer six mois à la Cité des Arts, à
Paris. Elle tire profit de ce séjour au bord de la
Seine pour approfondir le répertoire francais du
tournant du XXe siècle.
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Estelle Revaz dit de son instrument :
« C’est mon compagnon de tous les jours. Je
joue du matin au soir, cinq heures minimum,
voire huit heures quand je prépare un concert »
(TdG du 14.06.12) Son instrument ? Un Fiorini
que lui ont prêté deux mécènes suisses.
La jeune femme ne cache pas son vif intérêt pour la musique contemporaine. En avril
2013, elle joue à Delémont et à Bâle le concerto PRANAM IV que Jean-Luc Darbellay avait
écrit pour Siegfried Palm en 1995. Elle est
accompagnée par l’Orchestre symphonique du
Jura, sous la direction de Facundo Agudin. Un
chef qui ne tarit pas d’éloges à son égard : « Son
jeu est noble, son timbre est intense et mystérieux, son phrasé est sensible et réactif. Estelle
est une musicienne intègre, douée de courage
artistique et d’un grand potentiel. »
Concerts
Les auditeurs d’Espace 2 n’auront pas
manqué d’entendre Estelle Revaz en compagnie
du pianiste Francois Killian et du violoniste
Oleg Kastiv dans des Trios de Haydn et de
Mendelssohn, le 7 septembre dernier au Théâtre
du Crochetan, dans le cadre de la Schubertiade
à Monthey.
Plus récemment, en décembre, Estelle
Revaz a été la violoncelliste solo du Triple
concerto de Beethoven au Victoria Hall de
Genève, et a joué des concertos de Vivaldi et de
C.Ph.E. Bach à la Fondation Gianadda à
Martigny.
En janvier 2014, le dimanche 19, elle a été
l’hôte du Studio Ansermet, à Genève, pour un
concert diffusé en direct sur les ondes d’Espace
2, puis le 23 en Allemagne, à Cologne, et le 26
à la Vallée de Joux, au Lieu.
Le 1er février, elle sera à Vers-l’Eglise, au
Festival Musique et Neige, le samedi 15 à
Annecy et le lendemain dimanche 16 à 17 heures, au Martolet, à St-Maurice. Le 23 à
Mulhouse, le 25 à Berne, elle jouera PRANAM
II de Darbellay, avec le Ludus Ensemble. Un
agenda déjà bien rempli pour cette artiste de 24
ans dont le répertoire ne cesse de s’enrichir et la
valeur de s’affirmer.
Yves Allaz
16 février : Guerre et Paix. Orchestre des Pays de Savoie,
dir. Nicolas Chalvin, Estelle Revaz, violoncelle (Honegger,
Haydn, El Khoury). Théâtre du Martolet (infos.+33
(0)4.79.33.42.71)
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saison 2014 du quatuor de genève au mah
Mozart en fil rouge
Après un tour d’Europe des écoles nationales l’année dernière, le Quatuor
de Genève a construit sa cinquième saison de musique de chambre autour
d’un compositeur, comme il l’avait proposé avec Schumann en 2010,
Brahms en 2011, Schubert en 2012.
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Venir les écouter le dimanche matin à la
Salle des Armures du Musée d’Art et
d’Histoire, comme nous le faisons depuis 5 ans,
montre à l’évidence la capacité de l’ensemble à
renforcer ses points forts au fil du temps : toujours plus d’écoute entre les quatre complices et
d’attention à maintenir l’équilibre entre les
instruments dans un dialogue entre égaux.
André Wanders, le violoncelliste de l’ensemble, détaille pour Scènes Magazine le programme de la saison 2014.
Pourquoi Mozart cette année ?
Parce que Mozart c’est la force vitale, un amoureux de la vie dans toutes ses expressions. Dans
ses opéras évidemment, mais le sentiment d’être devant le théâtre de la vie s’éprouve tout
autant dans sa musique de chambre. Certains
thèmes sont tellement expressifs qu’on imagine
voir apparaître des personnages. Il nous arrive
d’ailleurs souvent, lorsque nous travaillons un
passage, d’utiliser l’image d’un personnage
pour préciser entre nous le caractère musical
que nous souhaitons obtenir. Et puis, la musique
ainsi données des œuvres avec tour à tour piano,
flûte, hautbois, alto et clarinette. Par ailleurs
nous invitons pour la 3e fois le Quatuor
Schumann : aux côtés de Christian Favre
(piano), de Christoph Schiller (alto) et de
François Guye (violoncelle), le public pourra
découvrir Frédéric Angleraux, nouveau violon
de l’ensemble.
Vous produirez-vous ailleurs en
2014 ?
de chambre de Mozart recèle de véritables
chefs-d’œuvre ! C’est un régal que de pouvoir
en jouer plusieurs au fil d’une même saison...
Pour l’instant, deux concerts sont programmés
ce printemps. Le 16 mars au Théâtre du
Crochetan à Monthey dans un programme praguois (Mozart, Janacek, Dvorak), et le 13 avril
dans le cadre du Festival Vernier Classique avec
des oeuvres de Haydn, Janacek et Dvorak.
A part un concert 100% Mozart, vous
panachez vos programmes
Propos recueillis par Christian Bernard
Oui, nous associons à Mozart une œuvre du
XIXe ou du XXe siècle, permettant de faire ressortir des contrastes ou des prolongements. Le
Quintette de Dvorak rappelle Prague et l’amour
que Mozart avait pour cette ville et son public si
mélomane, qui le lui rendait bien. Nous rapprochons le Quatuor des “Dissonances” du Quatuor
de Debussy si coloré. Ou le Divertimento K 563
du Quatuor avec piano no2 de Fauré, deux œuvres de la maturité des compositeurs. Quant au
Quintette avec clarinette, sublime de sérénité, il
sera confronté à cet autre sommet qu’est le 3e
Quatuor “Razumovsky” de Beethoven.
Vous avez invité, comme à l’accoutumée, d’autres musiciens
Nous aimons effectivement le mariage des timbres, donner à entendre d’autres instruments, et
bien sûr le partage avec les musiciens qui nous
font l’amitié de participer à notre saison. Seront
DIMANCHE 9 FÉVRIER, 11 heures
QUATUOR DE GENÈVE
avec Didier Puntos, piano
Mozart : Quatuor avec piano K 478
Dvorak : Quintette avec piano opus 81
DIMANCHE 30 MARS, 11 heures
QUATUOR SCHUMANN (ensemble invité)
Christian Favre, piano
Frédéric Angleraux, violon
Christoph Schiller, alto
François Guye, violoncelle
Mozart : Divertimento pour trio à cordes K 563
Fauré : Quatuor avec piano no 2, opus 45
DIMANCHE 18 MAI, 11 heures
QUATUOR DE GENÈVE
avec Sarah Rumer, flûte
Vincent Gay-Balmaz, hautbois
Catherine Soris, alto
Mozart : Quatuor avec flûte K 285
Quatuor avec hautbois K 370
Quintette à deux altos K 516
DIMANCHE 21 SEPTEMBRE, 11 heures
QUATUOR DE GENÈVE
Mozart : Quatuor à cordes K 465 « Dissonances »
Debussy : Quatuor à cordes
Quatuor de Genève : François Payet-Labonne et Sidonie Bougamont, violons, Emmanuel Morel, alto et
André Wanders, violoncelle
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DIMANCHE 2 NOVEMBRE, 11 heures
QUATUOR DE GENÈVE
avec Camillo Battistello, clarinette
Beethoven: Quatuor à cordes no 9,
opus 59 « Razumovsky » no 3
Mozart: Quintette avec clarinette K 581
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Conservatoire Populaire de Musique, Danse et
Théâtre.
scènes de février
Agenda genevois
La Tétralogie se poursuit au Grand Théâtre de Genève, du 2 au 8 février,
avec Siegfried, mis en scène par Dieter Dorn et dirigé dans la fosse par Ingo
Metzmacher.
Par la suite, les amateurs de ballet seront
comblés, puisque deux rendez-vous sont pris.
Tout d’abord, le 4 février, dans cette même salle,
les Saisons russes du XXIe siècle reconstituent
les ballets de Diaghilev (et notamment le célèbre
Schéhérazade de Rimski-Korsakov). Puis du, 12
au 20 février au Bâtiment des Forces motrices,
Mémoire de l’ombre de Ken Ossola sera à
découvrir : le ballet du Grand Théâtre dansera sur
des musiques de Mahler.
Les 28 février, 1er, 2, 4 6, 7, 8 et 10 mars,
Nabucco de Verdi sera à l’affiche du Grand
Théâtre; John Fiore sera à la direction musicale,
et la mise en scène sera l’œuvre de Roland
Aeschlimann.
Concerto pour piano de Mozart, des œuvres
orchestrales de Respighi.
L’Orchestre de Chambre de Genève nous
emmènera le 27 février, depuis le Bâtiment des
Forces Motrices jusqu’à Londres, avec des œuvres anglaises de Haydn. Le voyage se poursuivra
en Roumanie - avec la complicité des pianistes
Ufuk et Bahar Dördüncü et des percussionnistes François Volpé et Sébastien Cordier -, grâce
aux Danses populaires roumaines de Bartók,
avec une escale offerte par la Sonate pour deux
pianos, deux percussions et orchestre. Maxim
Vengerov sera de retour à Genève avec
l’Orchestre de Chambre de Pologne, le 13 février
Ufuk & Bahar Dorduncu
Côté symphonique, l’Orchestre de la Suisse
Romande proposera une soirée le 12 février avec
Lars Vogt au piano, qui interprétera le Concerto
pour piano et orchestre de Grieg. Neeme Järvi
dirigera en outre la Symphonie No 3 de Brahms.
Ceux qui seraient occupés ce soir-là pourront
réentendre les mêmes œuvres et les mêmes interprètes pour la Saint-Valentin, toujours au Victoria
Hall.
Aucune excuse ne sera en revanche acceptée
pour manquer le concert dirigé par Charles
Dutoit, le 19 février, toujours au Victoria Hall et
avec la même formation. Accompagné par le pianiste Louis Lortie, il dirigera, hormis le 22e
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Le mois s’annonce dense pour les amateurs
de musique de chambre, grâce à la venue de trois
quatuors renommés au Conservatoire de
Musique de Genève. D’abord, le Quatuor Hugo
Wolf interprétera le Quatuor No 14 de Beethoven
ainsi que le Quintette à cordes de Schubert, grâce
au renfort du violoncelliste Xavier Philipps. Le
14 février, c’est au tour du Quatuor Belcea de
jouer des œuvres de Purcell, Britten et
Beethoven. Enfin, le 25 février, le Quatuor
Jerusalem viendra dans la cité du bout du lac
pour que résonnent des quatuors de Haydn,
Smetana et Ravel. Notons enfin une journée
Dissonances le 25 février, avec l’intégrale des
concertos pour violon et orchestre de Mozart qui
seront interprétés au Victoria Hall de Genève.
Toujours au chapitre des quatuors, notons la
venue du Quatuor Signum le 10 février au
Conservatoire, dans le cadre de la série Temps &
Musique avec, au programme, des œuvres de
Haydn, Schnittke et Dvorak.
PhilipGlass et Tim Fain © Brian Hall
prochain, dans le cadre des concerts Migrospour-cent-culturel. Le programme, dense, propose les quatrième et cinquième concertos pour violon de Mozart, ainsi que des compositions de
Tchaïkovski et Saint-Saëns.
Le 24 février, le baryton Dmitri
Hvorostovsky offrira un récital au Victoria Hall
avec des romances et des mélodies de
Rachmaninov, Tchaïkovksi, Mednter et Liszt.
Contrechamps s’intéressera pour sa part les 11 et
12 février à la voix contemporaine, avec un
concert organisé le premier soir au Studio ErnestAnsermet, puis une conférence le lendemain au
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A signaler également dans le cadre du
Festival Antigel, un événement : la venue au
Victoria Hall du compositeur et pianiste Philip
Glass, accompagné pour l’occasion par le violoniste Tim Fain, qui interpréteront lors de cette
soirée les œuvres les plus récentes du compositeur. Toujours dans le cadre d’Antigel, Antoine
Marguier sera aux commandes du Conservatoire
de Musique de Genève Orchestra le 8 février,
pour une interprétation de la Belle et la Bête à la
salle des Fêtes du Lignon, avec la participation
de la soprano Sophie Graf.
Martina Díaz
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bâtiment des forces motrices
Aimez-vous Bartok ?
Aimez-vous Bartok ? C’est ce qu’espère en tout cas l’Orchestre de
Chambre de Genève, qui propose le 27 février au BFM la célèbre Sonate
pour deux pianos et percussion de Bela Bartok, dans la version qui inclut
l’orchestre. Entretien avec François Volpé, percussionniste.
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François Volpé et Sébastien Cordier aux
percussions, Bahar et Ufuk Dorduncu aux pianos, ont déjà joué cette œuvre à plusieurs reprises. C’est une pièce majeure du répertoire des
percussionnistes : en musique de chambre, tous
les étudiants avancés la travaillent dans les
conservatoires. Bartok fut le premier à opter
pour la confrontation rare de ces deux familles
instrumentales : il exploite le
côté percussif du piano et utilise
des instruments d’orchestre
(timbales, grosse caisse, caisses
claires, xylophone, tam-tam, triangle, cymbales) en les adaptant
à une œuvre de musique de
chambre. Passionné par la
musique folklorique, il était
instinctivement attiré par la percussion, le plus ancien des
instruments avec la voix.
La création de la Sonate eut
lieu à Bâle en janvier 1938,
quelques mois après sa composition à Budapest, avec aux pianos Bartok lui-même et sa
femme. Il existe un enregistrement, peu convaincant pour
François Volpé, mais utile.
Peu de temps après, la
« sonate » devient « concerto »
puisque le compositeur lui ajoute l’orchestre. Ce dernier sonne
en fait comme une prolongation
du quatuor : François Volpé imagine le groupe
de solistes comme une comète, en noir et blanc,
dont la queue serait représentée par l’orchestre,
qui prolonge le discours et apporte la couleur.
Orchestres divers
Grâce à son expérience au sein de phalanges diverses, François Volpé nous donne une
idée plus précise du rôle à assumer. Dans un
orchestre symphonique comme l’OSR, celui qui
n’est pas le timbalier doit jouer de tous les
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instruments, claviers compris. C’est une tâche
particulièrement stressante car il s’agit de ne
manquer aucune intervention. La preuve c’est
que chez les Wiener Philharmoniker, il existe
une prime de stress !
Dans un orchestre de chambre comme
L’OCG, le timbalier est véritablement le moteur
de l’ensemble : la participation est importante,
François Volpé (photo MK/Urbain/FV)
le rythme essentiel. Il se sert de timbales
baroques, accordées, dont les peaux sont d’origine animale et dont le son est sec, incisif.
Contrechamps de son côté offre des possibilités illimitées. La musique du XXe et XXIe
siècles constitue l’apothéose de la percussion, le
bonheur total ! Il est même arrivé à François
Volpé de jouer de la perceuse ou du marteau
enclume. Bien sûr il faut aussi savoir négocier
avec les compositeurs qui, n’étant pas percussionnistes, ne se rendent pas compte des limites
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à ne pas dépasser. Stefano Gervasoni par exemple avait désespérément besoin d’instruments
capables d’imiter le train, le tram, l’aboiement
d’un chien ! Il a fallu pendant des heures, pour
quelques notes, construire ces instruments et
trouver comment les pratiquer !!
Autre exemple, Ferneyhough. Ses partitions sont souvent injouables, bien que, prise
séparément, chaque mesure est possible. Il sait
parfaitement que les musiciens n’y arriveront
pas. 60%, c’est déjà bien, pense-t-il !
Tous les compositeurs cependant ne parlent
pas de leur création en cours. Ivan Fedele a écrit
une pièce pour Contrechamps et n’est venu qu’à
la générale pour donner quelques brèves indications.
L’OCG aujourd’hui
Arie van Beek a succédé, on le sait, à
David Greilsammer. Les bonnes idées n’ont pas
manqué à ce dernier : il a
mis en place une saison de
musique de chambre, ce qui
est bon pour la motivation
personnelle des musiciens, a
délocalisé bien des concerts
dans des lieux insolites, a
exploré des répertoires
variés, a su prendre des
risques. Pianiste avant tout,
il lui manquait encore un
peu d’expérience en tant que
chef. Ce n’est pas le cas
d’Arie van Beek : son
maniement de la baguette
est extraordinaire de même
que sa connaissance du
répertoire et son talent d’organisateur. De plus, à la fois
chaleureux et exigeant, il
sait mettre à l’aise les
instrumentistes, tout en leur
demandant le meilleur
d’eux-mêmes.
D’après des propos recueillis par
Martine Duruz
27.2. : Concert de soirée No. 4. De Londres à Bâle. L’OCG,
dir. Arie Van Beek, Ufuk & Bahar Dördüncü, pianos,
Francois Volpé & Sébastien Cordier, percussions (Haydn,
Bartók). Bâtiment des Forces motrices à 20h
Location :022/807.17.90, [email protected]
ou www.ticketportal.com
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portrait
Lars Vogt
Le pianiste Lars Vogt sera en février le soliste des concerts d’abonnement
de l’Orchestre de la Suisse romande, le mercredi 12 et le vendredi 14 à
Genève, le jeudi 13 à Lausanne. Il interprétera, sous la conduite de Neeme
Järvi, un de ses chevaux de bataille, le Concerto en la mineur d’Edouard
Grieg. Au même programme figure un autre chef-d’œuvre du répertoire,
la Symphonie No 3 en fa majeur de Johannes Brahms.
Né à Düren, en Rhénanie-Westphalie, en
1970, Lars Vogt commence le piano à 6 ans,
avant de devenir successivement élève de Ruth
Weiss à Aachen et de Karl-Heinz Kümmerling à
Hanovre. Un maître vénéré, décédé en 2012,
dont Lars Vogt prendra la succession au poste de
professeur au Conservatoire de musique de
Lars Vogt est invité dans tous les grands festivals, à Edimbourg comme à Lucerne, à
Salzbourg comme à La Roque-d’Anthéron ou
Verbier. En juin 1998, il fonde avec des amis
son propre festival de musique de chambre
« Spannungen - Musik im Kraftwerk », une
manifestation qui a lieu chaque été à Heimbach,
au violoncelle, il joue à Paris, Berlin, Salzbourg
et Zurich. Il accomplit une tournée en Chine, se
produit à Tokyo avec le NHK Symphony et
Roger Norrington, à Amsterdam et Londres
avec le Royal Concertgebouw et Mariss
Jansons, à Berlin et Vienne avec le Deutsches
Symphonie Orchester et Tugan Sokhiev.
En janvier dernier, il interprétait le 27e
concerto pour piano de Mozart à Birmingham
avec Andris Nelsons, puis le Concerto en la
mineur de Grieg à Glasgow et Aberdeen avec le
BBC Scottisch Symphony et Donald Runnicles,
ainsi que le 24e concerto de Mozart à
Gateshead, en conduisant du piano la Royal
Northern Sinfonia. Le 6 février à Rotterdam, le
8 à Amsterdam, il joue le 2e concerto de
Chostakovitch avec Stéphane Denève et
l’Orchestre philharmonique de Rotterdam …
puis vient à Genève pour les concerts de l’OSR.
Et la liste des concerts donnés et à venir pour la
seule saison en cours est loin d’être exhaustive !
Ajoutons que Lars Vogt était aussi l’hôte du
Philharmonique de Radio France à la salle
Pleyel l’automne dernier, et qu’il sera de retour
à Paris le 12 mars, au Théâtre des Champs
Elysées, en compagnie de Christian Thielemann
et de la Staatskapelle de Dresde, pour le 4e
concerto de Beethoven.
Discographie récente
Lars Vogt © Aline Paley
cette ville, tout en menant en parallèle une
intense activité de concertiste à travers le
monde. La carrière de Lars Vogt démarre sur
les chapeaux de roue en 1990, après l’obtention
d’un 2e prix au concours de Leeds, et le début
d’une collaboration régulière avec Simon
Rattle, alors chef du City of Birmingham
Symphony Orchestra, avec qui il enregistre en
1992 déjà, pour EMI, les concertos de Grieg et
de Schumann. Cette collaboration se poursuivra
à Berlin, puisque Lars Vogt devient en 2003/4 le
premier « pianiste en résidence » des Berliner
Philharmoniker.
Apprécié pour son respect scrupuleux des
partitions et son absolue maîtrise du clavier,
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dans une usine hydro-électrique de style Art
Nouveau construite en 1904.
La saison 13/14
La saison 2013/14 s’avère particulièrement
riche pour Lars Vogt, qui va continuer de développer son nouveau rôle de chef à partir du
piano avec des formations comme l’ensemble
baroque allemand Arte del Mondo, l’orchestre
de chambre de Cologne et celui de Zurich, dont
il est cette année le « pianiste en résidence ».
Lars Vogt donne des concerts en Amérique
du Nord, avec les orchstres de Boston et de St
Louis, et en duo avec le violoniste Christian
Tetzlaff. En trio, avec Christian et Tanja Tetzlaff
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Lars Vogt a enregistré pendant une vingtaine d’années une quinzaine de CDs pour EMI, en
solo, en musique de chambre ou avec orchestre.
Chez Berlin Classics paraissent en 2010 la
Sonate de Liszt et la Fantaisie op.17 de
Schumann et chez Oehms les concertos No 20
et 23 de Mozart, avec Ivor Bolton et l’orchestre
du Mozarteum de Salzbourg.
Cavi-Music publie en 2011 les 2 sonates
op.120 de Brahms, avec l’altiste Rachel
Roberts, ainsi que le Trio No 2 de
Chostakovitch, avec Christian et Tanja Tetzlaff.
En 2013, le même éditeur fait paraître un
CD très original, comportant des œuvres de Lili
et Nadia Boulanger, Debussy et le Trio (1933)
de Paul Hindemith.
Ondine enfin édite en 2013 deux CDs du
duo Tetzlaff-Vogt : trois sonates pour violon et
piano de Mozart, et les deux de Robert
Schumann.
Yves Allaz
Location pour les concerts des 12 et 14 fév. au Victoria
Hall à 20h et celui du 13 à 20h15 au Théâtre de Beaulieu :
[email protected], www.osr.ch + divers points de vente
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les grands interprètes au conservatoire
Trois quatuors
de grande qualité
Caecilia présente en février les quatuors Hugo Wolf (le 3), Belcea (le 14) et
Jérusalem (le 25), au Conservatoire à 20h.
Le Quatuor Hugo Wolf, composé de
Sébastien Gürtler, Régis Bringolf, Thomas
Selditz (qui a remplacé en juin 2013 Gertrud
Weinmeister) et Florian Berner, recourra à la
participation de Xavier Phillips, violoncelle,
duquel ils ne sauraient se passer dans l’interprétation du quintette en ut majeur op.163 de
Schubert qu’ils exécuteront à la suite du
quatuor No 14 en ut dièse mineur op.131 de
Beethoven.
Ce quatuor, constitué à Vienne en 1993
et formé par des professeurs tels que le
Quatuor Alban Berg, des membres du
Quatuor Amadeus, et Walter Levin du
Quatuor LaSalle, a remporté en 1995 déjà le
1er prix du concours de Crémone. Ils ont
reçu également le Prix européen de Musique
de Chambre et le Prix spécial de l’Orchestre
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Philharmonique de Vienne.
En 20 ans les musiciens se sont produits
dans plus de 25 pays, dans les salles les plus
prestigieuses. Ils sont les dédicataires de
nombreuses œuvres contemporaines dont ils
ont assuré la création. Résultat de leur intérêt
pour le jazz, ils ont gravé en 2009 un CD,
Other People, en collaboration avec John
Taylor (piano) et Kenny Wheeler (trompette).
Collaboration aussi avec Bernarda Fink lors
de tournées européennes consacrées à l’adaptation pour quatuor et mezzo-soprano de
l’Italienisches Liederbuch de Wolf. Quant à
leur discographie elle implique Haydn,
Beethoven, Schubert, Brahms, Dvorak,
Ravel, Ligeti, Mittler et bien sûr Hugo Wolf.
Ils ont choisi Wagner, Webern et Berg pour
leur dernier enregistrement.
Quatuor Belcea
C’est de Grande Bretagne que nous vient
le Quatuor Belcea, mais ses membres ne
sont pas pour autant originaires de ce pays :
la violoniste Corina Belcea est Roumaine et
l’altiste Krzysztof Chorzelski est Polonais.
Ils sont tous deux membres fondateurs de
cette formation qui a vu le jour en 1994 au
Royal College of Music de Londres. Le
second violoniste, Axel Schalcher, et le violoncelliste Antoine Lederlin sont Français.
Une diversité qui leur ouvre bien des horizons dans le choix de leur répertoire, tant
dans le domaine classique que contemporain.
Les salles les mieux cotées leur réservent
toujours un accueil enthousiaste, qu’ils
soient seuls ou accompagnés de partenaires
réguliers comme Piotr Anderszewski, Martin
Fröst, Valentin Erben, Ian Bostridge et
Matthias Goerne.
Le Quatuor Belcea a créé récemment
une fondation dont le but est de soutenir et de
coacher les jeunes quatuors à cordes ainsi
que d’encourager la composition d’œuvres
destinées à être créées par leurs soins.
Leur discographie est importante :
Schubert, Brahms, Mozart, Debussy, Ravel,
Dutilleux, entre autres, plus tous les quatuors
de Bartok, Britten et Beethoven, ce dernier
enregistrement ayant obtenu l’ECHO Klassik
Award.
quatuor hugo wolf©hwq 2013-photo annamaria kowalsky
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Belcea Quartet © Ronald Knapp
multiplient et leur carrière internationale est
lancée.
Leurs enregistrements sont nombreux et
récompensés par de multiples prix.
En 2010 Amihai Grosz est engagé par le
Philharmonique de Berlin, et donc remplacé
par Ori Kam, altiste renommé et habitué à
collaborer avec les célébrités (Barenboim,
Boulez, Stern, Zukerman, Perlman,
Pahud…)
Au programme du 25 février : le quatuor
No 78 en si bémol majeur de Haydn ; le quatuor No 1 de Smetana et le quatuor en fa
majeur de Ravel.
Martine Duruz
Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info Balexert, Migros
Nyon-La Combe)
- 3 février : Quatuor Hugo Wolf & Xavier Phillips,
violoncelle.
- 14 février : Quatuor Belcea.
- 25 février : Quatuor de Jérusalem.
Ils joueront à Genève des
Fantaisies de Purcell, le quatuor
No 2 en ut majeur de Britten et le
quatuor No 7 en fa majeur de
Beethoven.
Quatuor Jerusalem
Alexander Pavlovsky, Sergei
Bresler, Amihai Grosz et Kyril
Zlotnikov ont fait connaissance en
1993 lors de leurs études à
l’Académie Rubin de Jérusalem.
Remarqués par le directeur, ils ont
été dirigés vers le grand pédagogue
Avi Abramovitch, qui leur a dévoilé les secrets de la technique et de
l’interprétation du quatuor à cordes. Quatre ans plus tard le
Quatuor Jerusalem remporte le
premier prix du concours Schubert
de Graz. Dès lors les invitations se
Quatuor Jerusalem © Felix Broede
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Brèves de février à Lyon
lyon : chronique de spectacle vivant
Opéra de Lyon : Le conte Ory de Rossini ; mise
en scène de Laurent Pelly ; direction musicale
de Stefano Montanari (du 21 février au 5 mars)
Roi Lear
[04 69 85 54 54 ; www.opera-lyon.com]
À Villeurbanne, le Théâtre National Populaire ouvre 2014 avec un Roi Lear
total, que Christian Schiaretti embrasse largement, sans idéologie préalable.
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Dans l’idéale traduction d’Yves Bonnefoy
(Folio-Gallimard), le concret des corps, du langage et des matériaux (un océan de glèbe, gisante puis précipitée des cintres) le dispute à l’onirisme (les voyages mentaux de Lear approchent
Une saison en enfer de Rimbaud). Tout de bois
clair, le décor est simple : un sol circulaire que,
en sa moitié profonde, borde un haut mur percé
de trois strates d’huis ; au cœur, une trappe.
Christian Schiaretti sait brasser des foules
(ici, 25 comédiens) où, pourtant, chacun a son
chemin. Le résultat, épique, exhale une multiplicité de sentiments et d’idées, au point que Roi
Lear rassemble tout l’art de Shakespeare, même
comique. Au début, Lear est un Merlin qui,
bientôt, rejoint Jérôme, Antoine ou Job. Dans ce
spectacle dont la mélancolie est le héros poisseux, le trajet de Lear se découvre à mesure
qu’il s’invente ; le rideau tombé, il demeure
inexpliqué, bouleversant.
La distribution est exemplaire. Et, dans le
rôle-titre, Serge Merlin, frêle allumette, regorge
d’inextinguibles forces ; tout à la fois incarné et
fantomatique, il offre un travail vocal ahurissant, qui assemble vers et prose en un continuum rythmé et coloré. Comment ne pas penser
à Philoctète, en 2009, dans cette même salle,
avec le regretté Laurent Terzieff ?
À Villeurbanane comme bientôt à Nancy,
Paris et Dunkerque, ne manquez pas ce Roi Lear
d’exception. Jusqu’au 15 février
Auditorium de Lyon / Orchestre national de
Lyon : Schnittke, Prokofiev (Concerto pour violon n°2) et Chostakovitch (Symphonie n°5), par
Vadim Repin (violon), Leonard Slatkine (direction), les 13 et 15 février. Et Mozart (Concerto
pour piano n°23) et Mahler (Symphonie n°4), par
Bertrand Chamayou (piano), Leonard Slatkine
(direction), les 20 et 22 février.
[04 78 03 30 00 ; www.tnp-villeurbanne.com]
[04 78 95 95 95 ; www.auditorium-lyon.com]
Autre richesse lyonnaise :
l’exposition Joseph Cornell et les
surréalistes, au Musée des beauxarts de Lyon. Plasticien autodidacte,
Joseph Cornell (1903-1972) fit du
surréalisme sans le savoir, avant
que, en 1931, à New York, il ne
découvrît la « maison-mère » française. Loin de toute inflexion politique, il demeura pur poète et enferma ses rêveries dans des boîtes et
des vitrines, mi-magie, mi-Nature
morte. Un troublant et doux parfum
d’enfance nimbe un univers captivant (avec des films tout aussi inventifs), que
complètent d’admirables Calder, Chirico, Dali,
Ernst ou Magritte et des réalisations de Breton
ou Éluard. À ne surtout pas manquer. Jusqu’au
10 février
Maison de la danse : Don Quichotte du
Trocadéro de José Montalvo (19 au 23 février).
Et Tragédie, d’Olivier Dubois (26 et 27 février)
[04 78 03 30 00 ; www.mba-lyon.fr]
[04 72 78 18 18 ; www.maisondeladanse.com]
«Don Quichotte du Trocadero» © Patrick Berger
Frank Langlois
Théâtre national populaire : Le triomphe de
l’amour de Marivaux ; mise en scène de Michel
Raskine (jusqu’au 21 février). Et Britannicus de
Racine ; mise en scène de Jean-Louis Martinelli
(du 21 février au 2 mars)
[04 78 03 30 00 ; www.tnp-villeurbanne.com]
«Le Roi Lear»
Théâtre des Célestins : Kiss & Cry, pièce collective (dont Michèle-Anne De Mey), Jaco Van
Dormael (mise-en-scène) [jusqu’au 6 février]. Et
Une heure et dix-huit minutes, pièce documentaire d’Elena Gremina (Russie), Cécile AuxireMarmouget (mise en scène) [du 13 au 26
février].
[04 72 77 40 00 ; www.celestins-lyon.org]
Théâtre de la Renaissance : An old Monk par
Josse de Pauw et Kris Defoort [6 et 7 février]
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bâtiment des forces motrices, genève
« En danse, il faut
que ça bouge »
Le chorégraphe genevois Ken Ossola n’est pas un adepte de la « non-danse » à
la mode, pour notre plus grand bonheur ! Il est invité par Philippe Cohen,
directeur du Ballet du Grand Théâtre de Genève, à créer sa troisième
chorégraphie pour la compagnie genevoise. Mémoire de l’ombre, sur des
partitions de Gustav Mahler, sera donné au Bâtiment des Forces Motrices du 12
au 20 février 2014.
Genève peut être fière de son chorégraphe.
Ken Ossola, la quarantaine passée, a commencé
sa formation de danseur à l’école de danse de
Beatriz Consuelo. Il a ensuite été engagé dans la
prestigieuse compagnie Nederland Dans
Theater, d’abord chez les juniors, puis dans la
compagnie dirigée par Ji í Kylián, l’un des plus
grands chorégraphes de notre époque.
Pour Philippe Cohen, Ken Ossola est « un
orfèvre … (qui) sculpte les corps des danseurs
dans une apparente fragilité ». Nous avons posé
trois questions au chorégraphe, entre deux répétitions.
Quel est votre rapport avec l’œuvre
de Mahler ? Avez-vous vu les chorégraphies
de John Neumeier qui est considéré comme
le chorégraphe de Mahler ?
Je n’ai pas vu les ballets de Neumeier parce que
je ne voulais pas être influencé. Ma découverte
de l’œuvre de Mahler est assez récente. J’ai
commencé à faire une sélection cet été. Il y aura
des mouvements des symphonies nos. 2, 6 et 9,
Ken Ossola © Gregory Batardon
des extraits des Chants du compagnon errant et
du Chant de la terre. J’ai un rapport particulier
avec cette œuvre qui met en musique un poème
chinois et j’ai des racines asiatiques, coréennes.
Le ballet finira par le célèbre Adagietto de la 5e
symphonie (rendu célèbre par Visconti pour son
film Mort à Venise).
Le ballet durera une heure vingt,
n’est-ce pas un peu long ? Et pourquoi
Mémoire de l’ombre ?
Ce sera peut-être long, mais ce sera un beau
spectacle. Il y aura aussi les décors de Nicolas
Musin, qui a fait un travail magnifique. Et
Philippe Cohen m’a soutenu et encouragé. Il a
une grande expérience, je peux compter sur lui.
Mémoire de l’ombre est un hommage à la danse
classique et à Ji í Kylián. J’ai été inspiré par son
esthétique. Cela marque, 10 ans au NDT!
C’est votre troisième chorégraphie
pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève.
Comment définiriez-vous cette compagnie ?
C’est une compagnie très ouverte à des chorégraphes de styles très différents. C’est un plaisir
pour moi de travailler avec elle. Elle a de l’énergie et un grand potentiel, elle est généreuse et
possède une grande ouverture d’esprit.
Propos recueillis par
Emmanuèle Rüegger
Mémoire de l'ombre, musique de Gustav Mahler, chor.
Ken Ossola, création du Ballet du Grand Théâtre, dir.
Philippe Cohen. BFM à 19h30, dim à 15h
Billetterie : 022/322.50.50 et www.geneveopera.com/
Dates :
me 12 fev - 19:30 / je 13 fev - 19:30 / ve 14 fev - 19:30 /
sa 15 fev - 19:30 / di 16 fev - 15:00 / ma 18 fev - 19:30 /
me 19 fev - 19:30 / je 20 fev - 19:30
«Mémoire de l’ombre» © Gregory Batardon
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le béjart ballet à l’opéra de lausanne
Un Mandarin choc !
Après le Sacre du printemps en décembre, le public pourra découvrir ou
redécouvrir un autre ballet phare de Maurice Béjart ce mois de février à
l’Opéra de Lausanne, le Mandarin Merveilleux de Béla Bartok.
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«Le Mandarin merveilleux» © Philippe Pache
Arrivé en 1987 dans la capitale vaudoise,
Béjart avait alors déjà créé la majeure partie de
ses œuvres. Sa verve créatrice va lentement se
tarir mais avec quelques brillantes exception
dont ce fantastique Mandarin Merveilleux
donné en première à la Salle Métropole en
décembre 1992, certainement la plus belle
œuvre de sa période lausannoise.
Petit retour en arrière
Béla Bartok compose son ballet-pantomime en un acte à la sortie de la première guerre
mondiale en 1918. Mais il faudra attendre 8 ans,
soit 1926, pour que l’œuvre soit montée sur une
scène à Cologne. Et c’est un scandale énorme.
Les représentations sont rapidement suspendues
puis interdites. Il faut dire que l’argument,
d’une forte charge érotique, avait tout pour choquer à l’époque. Dans un quartier sordide d’une
ville, une jeune fille est contrainte par trois
voyous de se prostituer pour appâter des hommes de passage et les dépouiller. Première brève
expérience avec un vieux monsieur puis un
a
jeune désargenté et enfin avec un mandarin
excité qui se jette sur elle. Molesté puis violemment frappé, il agonise dans les bras de la jeune
fille en continuant ardemment de la désirer !
Deux ans plus tard le compositeur décide de
transformer sa musique en une suite pour
orchestre (comme Stravinski avec son Oiseau
de feu) et c’est cette mouture qui sera dorénavant utilisée au fil des ans par les dizaines de
chorégraphes qui en proposeront leurs propres
productions, bien souvent édulcorées par rapport à la trame originale. La partition éclaire
parfaitement la violence du sujet et définit
rigoureusement le contour des différents personnages avec plusieurs ensembles d’instruments.
Pour sa version, absolument fidèle au
découpage de Bartok, Maurice Béjart replace
l’œuvre dans le contexte Europe centrale de la
période entre deux guerres. Il s’inspire librement du cinéma expressionniste allemand de
Fritz Lang et surtout de deux œuvres phares : M.
le Maudit et Metropolis. Il confie le rôle de la
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jeune fille à un garçon travesti, axe central du
ballet et clin d’œil au robot androgyne de
Metropolis ainsi qu’aux cabarets berlinois de la
même époque. La danse de la jeune fille devient
ici une danse de mort et c’est elle qui manipule
tout le monde. Tout se joue alors sur l’ambiguïté sexuelle qui donne une dimension nouvelle
au ballet, encore non explorée jusque-là. A la
création, c’est le danseur belge Koen Onzia qui
l’incarnait d’une façon magistrale et époustouflante ! Et le Mandarin entre sur scène à bicyclette déguisé en chinois époque
maoïste avec bleu de travail,
casquette et étoile rouge.
Notons aussi que l’œuvre est
entrée au répertoire du Ballet de
l’Opéra de Paris en 2003.
De Béjart encore, reprise
du Manteau d’après une œuvre
de Gogol et qui date de 1999,
ainsi qu’un pas de deux Liebe
und Tot sur un lied de Mahler.
Ce dernier opus a été créé à
Tokyo au Théâtre Bunka Kalkan
en 2002 et pas encore donné à
Lausanne dans son intégralité.
Dernier volet de la soirée :
une création mondiale de Tony
Fabre, Histoire d’Eux, librement
inspirée de Didon et Enée, le
chef-d’œuvre de Henry Purcell.
Tony Fabre, malheureusement
disparu à l’âge de 49 ans en
décembre dernier, a été danseur au Ballet du
XXe siècle puis au BBL avant de rejoindre la
Compagnie Nationale de Danse à Madrid de
Nacho Duhato. Il a créé plusieurs ballets à
Madrid et c’est le troisième pour le BBL. On se
souvient d’Empreinte vu en 2012 , bel hommage aux traces que laisse un grand chorégraphe à
son danseur. Il avait terminé sa chorégraphie
juste à temps et ainsi le BBL pourra lui rendre
un dernier hommage.
Michel Perret
Du 20 au 23 février, Béjart Ballet Lausanne : Le Manteau,
chor. Maurice Béjart - Histoire d’eux, chor. Tony Fabre Liebe unt Tot, chor. Maurice Béjart - Le Mandarin merveilleux, chor. Maurice Béjart
Opéra de Lausanne, les 20 et 21 à 20h, le 22 à 19h, le 23 à
15h
Location : 021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h / en ligne
et infos : www.opera-lausanne.ch
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Tableaux vivants
festival de danse de cannes
Poèmes chorégraphiques
et visuels
En invitant Système Castafiore et Virgilio Senni, le directeur artistique du
Festival de danse de Cannes, Frédéric Flamand, parachève sa dernière
édition sur deux points d’orgues mêlant considérations eschatologiques,
philosophiques à des visées d’installation plasticienne croisant
pertinemment l’expression dansée.
Danse mémorielle
Sur le plateau, une femme, Renée, erre au
sein de limbes situées entre plusieurs panneaux
coulissant accueillant des projections de VJing
(équations, plans, paysages indéterminées du
micro au macrocosme) qui savent néanmoins se
faire discrètes. Arpentage sensoriel et flottant au
plus intime de la mémoire rapatriant paysages et
furtifs fragments de récits incongrus autour du
« mourir », ce huis clos campant dans
l’au-delà sert de prélude dramaturgique au Royaume d’Hadès. Agitée
d’une grammaire corporelle tissée de
gestes sémaphoriques et de parcours
erratiques, la figure de proue du surréaliste Renée en botaniste dans les
plans hyperboles signé par la
Compagnie française Système
Castafiore se remémore les derniers
instants d’une vie sur terre. Dans cet
entre-deux incertain, des réminiscences fantomales de la vie terrestre surgissent. Ainsi ce personnage gavroche
ondoyant en sinuosités et rapatriant
tant le souvenir des grandes heures du
burlesque à la Tati que la geste hiphop structurant et déstructurant son
anatomie, strate après strate. L’opus
convoque aussi, en projection vidéo,
la figure du physicien américain
Oppenheimer, co-inventeur de la bombe atomique et féru de la Bhagavad-Gita en ses
lamentations sur les conséquences de la guerre.
Plastiquement réussi et bordé d’effluves
sonores d’aurores boréales, atmosphériques,
comme Karl Biscuit en a le fabuleux secret
depuis les années 80, l’opus cosigné du tandem
Karl Biscuit-Marcia Barcellos vaut par une
forme accomplie de mimographie alliant le
texte amplifié et le mouvement de manière tour
à tour synchrone et déphasée. Cette partition se
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fige par stases successives découpant spatialement et géométriquement ses poses. Lesquelles,
silhouettées dans une semi pénombre, ont la
semblance de papiers découpés. On retient
moins les technologies de projections convoquées que cette manière indécidable de ciseler
des danses furtives mais d’une grande netteté.
Un trio d’interprètes aux visages recouverts
d’une toison laineuse bouclée et de lunettes de
«Renée...» par Système Castafiore
soleil parvient à faire dériver des figures de
street dance vers des airs de suspension étranges comme harponnées par des forces mystérieuses. Cette production fait son miel de symboles et allégories pour délier une mémoire du
vivant jouant à la fois de l’agitation moléculaire, reptilienne que du corps de Renée surmonté,
un temps, d’un agencement arborescent de
fleurs violacées et carmins, topographie botanique du titre oblige.
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Dire que l’énigmatique De Anima, créée en
2012 pour la Biennale de Venise par le chorégraphe et plasticien florentin Virgilio Sieni, alignant
les tableaux scéniques en forme de statuaires de
groupe, s’inspire du magnum opus dû à Aristote,
n’est probablement pas superflu. Le plus poète
des philosophes de la Grèce antique y livre ses
réflexions sur les principes moteurs et du vivant
jusque dans son mouvement même, sa psychologie et son traité des passions. Un à un, les danseurs s’avancent pour mettre un disque vinyle sur
une platine, introduisant et interrompant des
compositions iconiques de l’histoire de la
musique classique, du ballet, du jazz et de l’électro ambiant. Le son étant amplifié jusqu’à forer
loin dans les paysages kinesthésiques intérieurs
du spectateur, les levers et baisser d’aguilles
créent une rhapsode incisive.
Par les corps en suspension dans l’air modulant le retour en arrière ou l’arrêt sur image, de
micro-récits s’enclenchent en faisant glisser
comme au gré d’un diaporama une aventure historique humaine, en puisant dans des moments
picturaux et sculpturaux forts ou moins
connus de l’histoire de l’art. Des figures
enténébrées d’un Giambattista Tiepolo à
des arlequins ou Pierrots lunaires, en passant par les clowns et funambules chers à
Picasso et Léger. L’artiste transalpin a l’art
d’accommoder les techniques de l’improvisation, les ressorts et mécanisme du
théâtre et la poésie de haïkus pour sa série
de tableaux mouvants qui ne déplairait pas
à son compatriote plasticien de plateau,
Romeo Castellucci.
Le fantastique Drumming ciselé par
Anne Teresa De Keersmaeker fait, lui,
d’une unique phrase chorégraphique, une
myriade de possibles distillés dans le
temps et l’espace avec croisements et
ellipses travaillant des danseurs vêtus d’un
habit blanc aux lignes fluides. La partition
Drumming, composée par l’Américain
Steve Reich en 1971, propose donc un seul
modèle rythmique, de quelques secondes, dessin
originel de cette oeuvre pour percussions. Mais
l’ensemble « est soumis à des changements de
phase, de hauteur du son et de timbre », selon le
compositeur. Le retour de la musique sur un
cycle identique ouvre sur des courses tranchantes
et fluides ainsi que des oscillations anatomiques
d’une élégance racée. Le geste semble toujours
s’y compléter par son effacement en puissance.
Bertrand Tappolet
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rachid ouramdane à bonlieu annecy
Dérives climatiques
Pour Sfumato, le chorégraphe Rachid Ouramdane s’est mis en chemin
d’interrogations auprès de quelques victimes chinoises des changements et dérèglement climatiques. Entre fumerolles, déluge tropical et musique sérielle, l’artiste livre une pièce chorégraphique atmosphérique, plasticienne, hantée de
mouvements en ruptures, suspendus, et de tourbillons orageux.
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Dans le noir amniotique avant un arrièregoût de cendres apocalyptiques environnementales, la voix off précise le paysage : « La taïga
court. Comme en Afrique australe. Comme les
poissons des grands lacs. Comme dans le
Tanganyika. Coraux. Mangroves. Les glaciers
fondent. L’eau monte. La taïga court. » Le texte
est de Sonia Chiambretto, dont le travail dramaturgique se base sur le recueil de témoignages
autour de la migration, la langue, les frontières,
l’identité. Et son art alchimique, graphique des
signes qui cristallisent en peu de mots ce que la
paysage cache au plus profond de ses reliefs
tourmentés, balafrés par un développement utilitariste sans conscience d’une humanité sacrifiée, oubliée.
Contre nature
Même ce qui est contre nature se rattache à
la nature. Baignant dans une brume électrique
respirant autant l’encens de prières adressées à
une divinité dans un mouvement de transe que la
terre fumant de sa sécheresse, une danseuse tourne inlassablement sur elle-même, en réalisant un
déplacement elliptique. Un mouvement perpétuel
spiralé qui déracine. Mais il suggère que résister
c’est tenir, survivre, une simple parade vitale, un
réflexe dans ce bras, ici tendu à l’horizontale, là
replié, encadrant le visage. Une vision en centrifugeuse de vies aléatoires dérivant et résistant
entre désir d’ailleurs et réalité d’exil forcé face à
un environnement qui prend péril de partout.
Posé en bordure, un piano étagé en échos
ambient, minimalistes et lyriques, et une voix
féminine se coulant en cris animaliers chuintés.
Elle se déploie dans les parages chromatiques et
chamaniques de la « diva des dépossédés »,
Diamanda Galás. Le tout fait cascader les corps,
avant de les agencer par segments.
Plus avant, le « portraitiste chorégraphique »
que se veut Ouramdane filme des visages plissés
de paysans chinois qui témoignent de vies déplacées de force. Ils sont immenses et cadrés aux
pourtours des yeux, au plus près d’une peau
a
déclinée de l’écorce au paysage. Ils racontent un
exode voulu par le gouvernement vers des terres
arides plantées de tentes précaires avec un accès
problématique à l’eau. Toujours à la lisière sans
cesse déplacée et interrogée entre documentaire
et fiction, le chorégraphe a déjà passé, entre autres, les états de corps de suppliciés torturés dans
Des témoins ordinaires. Un opus qui se fait le sismographe sensible
sans voyeurisme de
trouble des corps, leur
déséquilibre. Mais il a
aussi parcouru avec
Exposition universelle
les esthétiques propagandistes liées à la corporalité.
Sur le plateau,
sept interprètes se
relaient en solitudes
giacomettiennes pour
donner une forme à ce
mouvement climatique
déréglant existences et
anatomies. Elles sont
comme douchés dans un dispositif scénique pouvant évoquer dans son enveloppe pluvieuse coulant des cintres, une installation signée Nam June
Paik ou une chorégraphie de Guilherme Bothelo
(Moving a perhaps), les corps font de leurs sillages incertains, gerbes et giclures aquatiques au
cœur d’un sfumato, cette singulière technique de
peinture chère à Léonard de Vinci, Andrea del
Sarto et Corrège, qui estompe les contours, et
fond les ombres comme une fumée, en multipliant les couches. D’où l’impression de volume
et d'évanescence, un modelé vaporeux que relaie
parfaitement la musique favorisant l’échelonnement des corps dans l’atmosphère et les gradations que soulignent la lumière. La hiérarchisation calme et mystérieuse de ses plans scéniques,
transforment par instants le monde de Sfumato en
tableaux successifs d’installation plasticienne
esthétisante. Plus de corps-à-corps exacerbés qui
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trahissent le délitement des relations humaines
sous les assauts de la misère. La chute et la
recomposition hip hop du corps retrouvant une
verticalité inversée, le mouvement de dervichetourneuse, ici, s’imposent. Se tuilent figements,
rigidités parfaites ou surprenantes constructions
acrobatiques, contorsions et déplacements à
genoux comme compas ou boussole erratique.
Noire ironie
Traduites ou non par des marches tamisant
l’espace de Sfumato, les migrations climatiques
recouvrent en réalité nombre de situations différentes et complexes. Les populations fuient des
événements climatiques extrêmes et soudains
(ouragans, tempêtes, inondations) ou des dégradations progressives et lentes des écosystèmes
(sécheresse, montée des eaux). Sfumato se délie
non sans une noire ironie d’eau-forte chez un
chorégraphe sensible à l’historicité de la danse.
«Sfumato» © Jacques Hoepffner
Ainsi ce ballet solitaire tramé moins de claquettes endiablées que d’un tap dance désillusionné
décliné en mouvements allant se déréglant. Et
poursuivi sur une rive sonore de terre déployée en
proscenium boisé. Ce, au rythme du légendaire
Singin’ in the Rain de Gene Kelly, et sa félicité
sous la pluie, chant entonné a capella et au sec
par un danseur, hébété, essoré, comme en bout de
course, enchaînant ses glissandos au bord du
gouffre. A l’ère des réfugiés climatiques, des pas
métronomiques de la comédie musicale originelle, ne semble subsister que le fantôme grotesque,
doloriste, d’une danse comico-acrobatique.
Bertrand Tappolet
Sfumato. Bonlieu Annecy. 13 au 15 février 2014. Rens. :
www.bonlieu-annecy.com
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spectacles onésiens
L’amour au menu
Poursuite en février d’une association qui a déjé fourni aux spectateurs
onésiens son lot de plaisir. Cette fois, l’amour sera au cœur du débat, et c’est
le philosophe français Luc Ferry qui ...
Art-en-Ciel et les Spectacles Onésiens ont
débuté leur collaboration en 2008 avec une passionnante conférence musicale, Mozart et les
étoiles, racontée par le conférencier Hubert
Reeves, qui était venu nous parler d’étoiles, de
philosophie, d’existentialisme. Après Piazzola,
quatre saisons de tango, le nouveau concertspectacle imaginé par Isabelle Meyer - âme et
directrice de ces productions pluridisciplinaires
– traitera de l’amour… et s’intitule Le
Violon de Cupidon. «Là où les
Anciens cherchaient plutôt une sagesse cosmique, une sagesse du monde,
nos contemporains sont davantage en
quête d’une sagesse de l’amour fondée sur une nouvelle conception de la
transcendance. » (p. 169). L’amour,
raconté par le philosophe Luc Ferry et
illustré par un répertoire musical
français inspiré des mythes amoureux
dans la littérature. Voilà le programme de cette conférence musicale,
illustrée musicalement par Isabelle Meyer et
l’Orchestre Art-en-ciel. Ce répertoire musical
français comprend des œuvres de : Saint-Saens,
la Muse et le Poète ; Chausson, poème composé sur Le Chant de l’amour triomphant de
Tourguéniev; Massenet, Méditation de Thaïs ;
Shchedrin / Bizet, suite sur des airs de
Carmen, composée sur une nouvelle
de Mérimée.
matériel en termes de sécurité, de soin, d'espérance et de qualité de vie, il semblerait que l'on
ait perdu sur le front de la consolation spirituelle, du sens et des valeurs : «Commençons par
écarter une confusion, qui pour être fréquente,
hypothèque d’entrée de jeu toute compréhension de la notion de spiritualité la laïque. » (p.
344) De sorte que le pessimisme, auquel l'ère
du soupçon et de la critique nous conduit, ne
Le jeune public, dès quatre ans,
retrouve le 2 et le 5 février un petit
pachyderme qui a enthousiasmé bien
des générations, Babar et
Ferdinand.
Luc Ferry
peut - en toute cohérence - jamais être complet.
Optimisme impossible, mais pessimisme
improbable, voilà la clé ou plutôt le verrou de
bien des débats actuels. Un des grands mérites
du livre de Luc Ferry est de permettre aux lec-
La conférence est basée sur l’ouvrage du philosophe, La Révolution
de l’Amour (époque qui marque la
victoire du matérialisme : disparition
des repères, fin des grands idéaux, triomphe du confort étroit, règne de la
consommation, apothéose de l'égoïsme, etc. Ce jugement est paradoxal,
car il nous installe dans l'idée que tout
va à la fois de mieux en mieux et de
pis en pis. Si, d'un côté, on a gagné
comme jamais sur le front du confort
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teurs de sortir de ce désarroi. Son livre pose
ainsi les jalons d'un optimisme lucide, une spiritualité laïque met en lumière plusieurs dynamiques de notre monde actuel. Si l'amour
depuis toujours, met du sens dans nos vies, l'union amoureuse librement choisie a remplacé,
depuis un bon demi-siècle, les valeurs familiales traditionnelles. Avec la mondialisation que
nous vivons actuellement, la logique de la compétition globale s'impose partout. Plus les
valeurs traditionnelles s'effon-drent, plus nous
sommes dans le manque et plus nous sommes
en proie à un confusionnisme : « C’est une évidence qui crève les yeux : c’est l’amour qui met
du sens dans nos vies. Pour ceux que nous
aimons, nous serions prêts à tout. » (p. 533)
Avec Luc Ferry, (conférencier), Isabelle
Meyer (violon) et l’Ensemble Art-en-ciel,
(orchestre), Gérard Diggelmann, collaboration
artistique.
Pour le public qui souhaite se
détendre en musique uniquement, il
sera comblé par Youn Sun Nah,
chanteuse jazz sud-coréenne qui
déborde d’énergie et enthousiasme
la planète entière. Soprano lyrique,
vocaliste virtuose et improvisatrice
géniale, elle fascine son auditoire. A découvrir
le 13 février (COMPLET).
La programmation de février se termine
avec une touche d’humour, un one-man-show
de Cédric Chapuis (texte et jeu), dans une mise
en scène de Stéphane Batlle. Ce seul
en scène pour un batteur virtuose et
comédien a été élu révélation du Off
au Festival d’Avignon 2011.
L’histoire est celle d’un gamin différent des au-tres, dont le monde
n’existe qu’à travers les rythmes et
les battements de mesure. Un spectacle tout public dès 10 ans.
F. Pillet
Article élaboré sur la base de l’ouvrage La
Révolution de l’Amour, de Luc Ferry, paru
aux Editions J’ai lu, 2012.
Cédric Chappuis © photolosa
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festation iconoclaste, pittoresque et insolite !
Les responsables du festival espèrent voir
affluer des renforts à leurs côtés pour soutenir
leur manifestation.
Ambitieux, le Festival Antigel a, dès ses
débuts, souhaiter surprendre et explorer. Durant
la quinzaine artistique proposée, le public est
convié à découvrir et redécouvrir son territoire.
Les spectacles ont lieu dans des espaces
conventionnels tels que des salles de spectacles
ou des salles communales. Parmi les communes
genève
Festival Antigel
Les Genevois avaient connaissance du festival Anti-brouillard, spécifique au
quartier de Saint-Jean. En 2011 a vu le jour la première édition du Festival
Antigel dont la quatrième édition se déroulera du 1er février au dimanche
16 février 2014.
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Derrière cette appellation de saison qui
intrigue, se trouve une solide équipe mue par
l’envie de créer un concept culturel novateur et
original : créer un festival des Communes genevoises, de plus en plus impliquées dans le festival. A l’heure des communautarismes de plus en
plus virulents, le nom du festival, Antigel, fait
résonner un double sens : faire fi de la saison
hivernale par des propositions variées de danse
et musique ; et briser la glace entre les particularités de chacun pour se mettre à l’unisson dans
la grande messe fraternelle de l’art.
Nguyen et Sarah Ludi pour
ne citer qu’eux.
Pittoresque et insolite,
ainsi s’affirme le Festival
Antigel ! Persuadés que les
pôles culturels sont amenés
à se mêler davantage à l’avenir, que les banlieues et
campagnes genevoises
devront créer un dialogue
neuf avec le centre urbain,
le Festival Antigel mise sur
la pollinisation artistique
L’équipe du festival, menée par la présiden- du territoire genevois. Dès
Le 13 février à Plan-les-Ouates : «Al menos dos caras»,
la première
chorégraphie de SharonFridman © Vojtech BRTNICKY
édition,
onze Communes – dont Bernex, complices de la manifestation, les habitués de la
Carouge, Collonge-Bellerive, vie culturelle genevoise reconnaîtront des lieux
Confignon, Cressy, Lancy, enclins à soutenir et promouvoir la culture sous
Meyrin, Onex, Plan-les-Ouates, toutes ses formes. Cependant, fidèle à son esprit
se sont ralliées au festival. Au d’originalité, le Festival se tiendra aussi dans
fil des ans, la liste s’est allongée des espaces non conventionnels comme un cen; Vernier s’est rapidement enga- tre sportif, un terrain de foot, une piscine, une
gée aux côtés de Genève, per- patinoire, un parking, une église, un vivarium,
mettant de projeter le Festival un stade de rugby, un dépôt de trams ou des
Antigel dans la réalité.
allées d’immeuble.
Le leitmotiv du festival Antigel se résume
Le 8 février au Centre communal de Genthod :
Special Acoustic Show d’Adam Green © DR
en deux syllabes : migrer ! Antidote à la moroHalte à la morosité
Cette année, le festival se rend au Moulin sité hivernale et aux frimas : se munir de son ticte Anne Biéler et la directrice, administration et Rouge avec Yan Duyvendak, à Cartigny pour ket d’entrée ou de sa carte de festivalier et parcoordination, Thuy-San Dinh, le festival affiche une Promenade au Moulin-de-Vert. L’artiste courir, au gré des envies et au fil de la multituson originalité au fil des éditions. Pour 2014, en sud-africaine Anthea Moys défie quant à elle les de de spectacles proposés, les diverses proposiréponse à l’hiver glacial qu’on nous prédit, clubs des Communes genevoises. Le public tions de la grille des programmes, en se laissant
Antigel rétorque avec une armée d’artistes. pourra monter sur scène en participant à Atlas porté par l’ardent souffle artistique.
D’abord en musique avec Philip Glass, Agnes Genève d’Ana Borralho & João Galante. Afin
Vous hésitez encore à quitter votre antre
Obel, Cody Chesnutt, Suzanne Vega, d’éviter la dispersion, le noyau du festival sera calfeutrée … Vous voilà convaincus ! Pour les
Trentemøller, Temples, Connan Mockasin, Jay- placé devant La Gravière, dans l’Igloo qui sera détails quant aux lieux, heures et spécificités de
Jay Johanson, Adam Green, Junip,Tamikrest, le lieu de rencontres pour les apéros, les afters et chaque proposition, rendez-vous sur le site du
Son Lux, Thee Silver Mt. Zion Memorial entre les deux. Tous les jeudis, vendredis et festival, au visuel coloré très accueillant !
Orchestra, Kaki King, Keaton Henson, Forest samedis, de 18h à 5h, retrouvez une programFirouz-Elisabeth Pillet
Swords, William Fitzsimmons, John the mation musicale riche avec de nombreux Dj’s,
www.antigel.ch
Conqueror & Dorian Wood, puis en mouvement des groupes, un concours scène découverte en
avec Pierre Droulers, François Chaignaud, Eisa plus des blind tests et des quizz musicaux.
Jocson, Sharon Fridman, Yan Duyvendak, Anne
L’équipe du festival consolide cette mani-
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napolitains, les marionnettes défilent comme
autant de miroirs aux amertumes du valet le
plus célèbre de l´histoire du théâtre. La partition
musicale baroque, elle, jouée sur le plateau par
un claveciniste.
les marionnettes de genève
Les Fourberies
de Scapin
Molière sera l’hôte du Théâtre des Marionnettes en février, l’occasion de
se rafraîchir la mémoire au sujet de ce gredin farceur qu’est Scapin.
Pour les plus petits, le menu sera composé de musique et d’un curieux
inventaire...
Du 7 au 14 février 2014, le Théâtre des
Marionnettes accueille à nouveau la Compagnie
Emilie Valentin pour Les Fourberies de Scapin.
Valet rusé, fourbe, Scapin décide d´aider de ses
stratagèmes deux jeunes amoureux dont les
paternels font le projet d´un mariage loin d´être
à l´avantage de tous. Et cette union semble à des
années lumières de celle que leur dicte leur
amour passionné. Sur scène, le comédien et
manipulateur virtuose Jean Sclavis fait vivre les
protagonistes moliéresques avec une force suggestive étonnante. De taille presque humaine,
ces marionnettes donnent à cette farce des allures de comédie dramatique sociale et métaphy-
sique. Jean Sclavis est seul au milieu de huit
marionnettes à taille humaine pour nous ces
Fourberies. Entre innocence et insolence le
comédien s’empare du texte – légèrement réduit
– de Molière, et réalise une performance qui
met en lumière la solitude métaphysique du personnage de Scapin. Une séduisante proposition
visuelle d’Emilie Valantin qui renoue avec
l’esprit original du texte, celui de la farce, et qui
dépoussière une certaine tradition moliéresque.
Voix modulées des huit personnages, registres
variés, chants fuselés : le comédien excelle dans
l´un des plus grands succès posthumes de
Molière. Visages inspirés de figures de saints
Du 17 février au 2 mars, le tout jeune
public pourra découvrir le nouveau spectacle de
Guy Jutard, Nota bébés qui sera interprété par la
comédienne et violoniste Sandrine Girard.
Sur quelques fils, tendus comme des cordes à linge, la comédienne accroche une étonnante lessive : des petits bonshommes, des
chats, des chiens, une pomme, un soleil, une
voiture... Avec facétie, tantôt elle organise délicatement cet inventaire à la Prévert, tantôt elle
en change le rangement. Ainsi la pomme
s´enfuit dans la voiture de peur d´être croquée,
et le chat porte le soleil sur son dos. Ces petits
récits musicaux, détournements enjoués du quotidien, nous disent le bonheur d´être au monde.
Ils formeront une subtile partition que la
comédienne déchiffrera, animera et illustrera
des mélodies de son violon de manière fort poétique.
F. Pillet
http://www.marionnettes.ch/
Théâtre Am Stram Gram
Le Théâtre Amstragram propose, du 4 au 9
février, une expérience unique et insolite,
Cinématique, un spectacle de la Compagnie
AM-CB, à la croisée des arts numériques, du
jonglage et de la danse contemporaine. Projetés
sur des surfaces planes qui tissent des liens poétiques, ce spectacle anime les espaces flous de
l'enfance, ses images en mouvement, ses secrets, sa soif de liberté.
Le mercredi 26 février, ASG propose Les
Yeux bandés, un théâtre sensoriel qui revisite Le
Petit Chaperon rouge avec drôlerie et intelligence pendant quarante minutes, faisant la part
belle au texte et aux quatre sens. Invités à prendre place sur l'une des chaises disposées dans
cet espace, vous serez priés de vous bander les
yeux. Sans le regard, place aux sons, aux parfums et aux saveurs.
F. Pillet
«Les Fourberies de Scapin» photo F. Jean
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e x p o s i t i o n s
ferme de la chapelle
Linda Naeff
L’exposition de la Ferme de la Chapelle rend hommage à Linda Naeff, une
artiste genevoise hors normes qui, du haut de ses quatre-vingt-huit ans,
continue à peindre, dessiner, assembler, sculpter quotidiennement, avec toutes
sortes de matériaux et entassant ses créations dans son appartement qui
déborde aujourd’hui de plus de quatre mille œuvres. La présentation
monographique qui lui est consacrée correspond aussi à une récente tendance
de l’art contemporain qui s’ouvre désormais aux arts dits « singuliers ».
70
Cette tendance s’est d’ailleurs brillamment
confirmée lors de la dernière Biennale de Venise
où un bon tiers des artistes présentés dans l’exposition internationale appartenait au domaine de
l’art brut. Ce phénomène s’explique aussi par
une évolution du marché qui amène quelques
bons collectionneurs à s’intéresser à ce genre,
ceux-ci estimant que l’art contemporain n’a pas
assez de relation avec le sensible et l’imaginaire. On ne s’étonnera donc pas que les marchands
d’art jettent leur dévolu sur ce nouveau filon.
enfance et sa vie d’adulte, Linda se tourne vers
l’écriture et l’expression plastique à soixante ans,
elle y a pris goût et déclare : «Peindre est pour
moi une vraie thérapie». Son style puise dans sa
dramaturgie personnelle et ses œuvres sont à lire
comme autant d’épisodes qui s’organisent en
saynètes auxquelles elle rajoute souvent du texte.
Si textes et images sont complémentaires, ils gardent néanmoins une part de mystère et d’indicible. Entre chaos et logique, les obsessions répétitives de l’artiste se déclinent sur une diversité
infinie de supports: boîtes, nappes cirées, lattes
de lit, bouts de bois, emballages divers. Corps et
visages, souvent le sien, constituent le principal
motif des représentations ; ses personnages sont
par ailleurs fréquemment enfermés dans des
cages, des boîtes ou formellement inscrits dans
des espaces cloisonnés se superposant ou se juxtaposant, tels des bas-reliefs médiévaux ou des
planches de BD.
Mouvances
une œuvre de Linda Naeff
Née le 22 février 1926 à Bagnolet dans la
région parisienne, de parents suisses exilés en
France, Linda Naeff est la seconde d’une fratrie
de cinq filles. Elle se sentira marquée par le chiffre deux ; souvent appelée « la seconde» durant
son enfance, elle signe encore ses œuvres
«LMII» (Linda, matricule II). Meurtrie par des
événements malheureux survenus dans son
a
Comment définir la production de Linda
Naeff ? La notion d’art brut peut certes nous
aider, mais si cette appellation (inventée par le
peintre français Jean Dubuffet qui l’aurait
employée pour la première fois dans une let-tre
qu'il adressa au peintre suisse René Auberjonois
le 28 août 1945) est bien devenue une catégorie
artistique, il faut cependant préciser que l’art brut
n’est pas un mouvement historique mais plutôt
un genre intemporel, composé d’univers personnels découverts par hasard, bien souvent contre le
gré de leurs auteurs voire post mortem. Face à
l’impossibilité de cerner ce type d’expression
dans une définition stylistique absolue et par
nécessité d’actualiser des œuvres qui ne se limitent pas à une époque donnée, on a vu apparaître
toutes sortes de nouvelles étiquettes : art populaire, art naïf, art singulier, art cru, création franche,
art hors-les-normes, art singulier etc… Linda
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Naeff s’inscrit dans une zone particulière de ces
mouvances et pour mieux la situer, nous devons
par exemple l’exclure de l’ensemble des créateurs à inspiration médiumnique et psychopathologique qui, la plupart du temps, vit en milieu
psychiatrique fermé et qui n’aspire pas à communiquer. La production de Linda Naeff correspond
à une troisième composante d’inspiration: celle
des marginaux. Linda est surtout une révoltée,
peut-être une anarchiste, qui évolue de façon
indépendante et s’exprime librement con-tre le
conditionnement imposé par la société, la
famille, la religion, la politique, l’économie, bref
contre toute sortes de règles et conventions qui
l’ont personnellement fait souffrir et qu’elle a
décidé, à un moment de sa vie, de dénoncer à travers ses représentations. Ses œuvres pour autant,
attention aux amalgames, ne relèvent pas d’une
contre-culture, mais bien de l’expression d’un
Moi spontané et archétypal, irréductible à
quelque embrigadement idéologique que ce soit.
Coupés du marché, les artistes singuliers ne
peignent pas pour montrer ou vendre, les exposer
peut paradoxalement les déstabiliser et les
angoisser. Linda ayant présenté quelques toiles
au Museum Im Lagerhaus de St-Gall, en 2008, a
déclaré à ce moment: «J’espère qu’ils ne me les
rendront pas, je les ai déjà remplacées. J’ai fait
des copies. Je ne supporte pas le manque. » Elle
ne supporte pas non plus de vendre ses œuvres ou
de les donner. «C’est comme si je cédais une part
de moi.» On l’aura compris, la médiatisation ou
la marchandisation de l’art singulier n’est pas
sans danger pour l’intéressé, Michel Thévoz écrit
à ce propos : « (ils) ne veulent rien recevoir de la
culture, rien lui donner ; ils n’aspirent pas à
communiquer, en tout cas pas selon les procédures marchandes et publicitaires. » (l’Art brut,
psychose et médiumnité, 1990). Dès lors, la mission de l’exposant devrait idéalement veiller à ne
pas pervertir ces caractéristiques essentielles qui
contribuent à créer des univers aussi fantastiques
et poétiques que sombres ou inquiétants. Peutêtre, le moyen approprié pour conserver, exposer
et commercialiser cette altérité est-il encore à
inventer ?
Françoise-Hélène Brou
L’Enigme Linda Naeff, jusqu’ au 9 février 2014, Galerie
Ferme de la Chapelle, Grand-Lancy, Genève. www.fermedelachapelle
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expos ition
cabinet d’arts graphiques, genève
Not Vital, Tanter
L’exposition consacrée à Not Vital au Cabinet d’arts graphiques du Musée d’art
et d’histoire dévoile une sensibilité toujours tanter, «entre» en romanche, un
terme soulignant la réputation nomade de l’artiste qui vit depuis des années
entre plusieurs continents. Déjà connu à Genève pour avoir exposé à la galerie
Guy Bärtschi, c’est pourtant la première fois qu’une institution de la Ville lui
dédie une exposition personnelle.
Né en 1948, Not Vital est originaire de Sent
un village situé en Basse-Engadine. Ses premières œuvres remontent aux années 1980 et, depuis,
sa renommée ne cesse de s’accroître au point de
figurer parmi les artistes suisses les plus exposés
dans des galeries ou des institutions de premier
plan, suisses ou étrangères. Ce succès est dû à
l’originalité et à la cohérence de son œuvre qui
s’enracine dans le creuset de son Engadine natale tout en déployant des thématiques universelles.
Plus connu pour ses sculptures, Not Vital consacre cependant une part importante de son énergie
à la création d’œuvres sur papier, estampes, dessins ou multiples et, plus récemment, à la peinture.
Habitué à changer de pays, de langues, de
techniques et de matériaux, Not Vital a développé une expression polymorphe. En Egypte, il
sculpte des têtes de chameaux, chez les Touaregs
il travaille l’argent, au Bhoutan le papier, à
Murano le verre, à Carrare le marbre, en Chine
l’acier, au Niger il construit une école, puis une
maison pour regarder le coucher de soleil, une
autre pour regarder la lune, en Indonésie sur l’île
de Florès il construit une maison pour admirer le
soleil se coucher sur les volcans. Ainsi au gré de
ses pérégrinations et au contact des artisans et
des traditions, savantes ou populaires, Not Vital
a-t-il créé un ensemble d'œuvres mêlant les pré-
occupations intellectuelles à l'intégrité matérielle. Une démarche que l’on pourrait qualifier
d’anthropologique, car centrée sur l’intégration
de l’homme dans la nature, l’environnement et la
culture. Des plus humbles aux plus sophistiqués,
les médiums qu’il utilise participent activement à
la création d’espaces spécifiques ; par exemple la
pure blancheur des cimes neigeuses peut se traduire soit par le dépouillement monochrome
d’une gravure ou d’un dessin, soit par la noblesse du marbre ou la translucidité du verre.
Oscillant entre austérité et préciosité, mais
jouant aussi sur les décalages d’échelles, ses
sculptures ou architectures ouvrent des espaces
suscitant trouble et étonnement. Elles déclenchent ensuite un mouvement immobile vers un
voyage intérieur, propice à renouer avec des
sensations, des images, des souvenirs enfouis
dans nos mémoires.
L’exposition du Cabinet des arts graphiques
illustre la polyvalence et le nomadisme de l’artiste : l’aquatinte The Kiss (1996) renvoie aux voyages de Not Vital au Niger ; la sculpture en acier
Model for House in Flores (2013), constitue une
pièce témoin d’une architecture réalisée en
Indonésie ; Mias Muntognas (Mes montagnes,
2000) établissent un lien direct avec le paysage
qu’il voit de sa chambre à coucher, en Engadine,
Not Vital «Sled», 2002
Marbre de Carrare, 93 x 38 x 27 cm
Collection de l'artiste © Not Vital
mais sous la forme de petits chefs-d’œuvre de
verre soufflé exécutés par un maître verrier de
Murano ; la luge en marbre Sled (2002) suggère
les jeux de l’enfance. Y figurent aussi une série
de « portraits » qu’il a fait de lui-même ou de
ses parents où, loin de recourir à la facilité naturaliste, Not Vital représente ces figures familières par le biais d’associations chiffrées ou métaphoriques.
Notons, in fine, la dimension accordée au
code de la langue dans les travaux de Not Vital.
Qu’elle se manifeste dans le titre de ses œuvres
ou qu’elle intervienne directement dans le corps
de la composition, cette présence concourt à
superposer des images aux signes de la langue,
une conjugaison d’encodages propre à générer
une forme de « rébus » activant à la fois les registres linguistique et iconique. Je pense en particulier à la sculpture en bronze intitulée Untiteld
(Fuck you, 1992). Cette pièce représente une
ramure de cerf, une sorte de trophée de chasse,
dont les bois forment à chacune de leurs extrêmités une lettre, lesquelles rassemblées produisent
l’énoncé « Fuck you ». Il s’agit précisément du
type de trouble et d’étonnement auquel le spectateur est confronté face à une œuvre de Not Vital,
à lui de décoder le message !
Françoise-Hélène Brou
« NOT VITAL, Tanter », jusqu’au 13 avril 2014. Cabinet
d'arts graphiques, du Musée d’art et d’histoire de
Genève.
Not Vital «Mias Muntognas (Mes montagnes)», 2000 Verre de Murano
diam. env. 15 cm chacun. Collection particuliere © Not Vital
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expos itions
FRANCE
en
franc e
Musée de l’Ancien Évêché :
Paroles de palette. Diodore Rahoult
(1819-1874). Jusqu’au 1er avril.
Garnier et l’Exposition internationale de 1914. Jusqu’à fin mars.
l
Vincent, 1746-1816, un peintre entre
Fragonard et David. Du 8 février au 11
mai.
Marseille
Annemasse
Centre de la Vieille Charité : Pontoise
Villa du Parc : La République - medio Le Havre
Musée d’Art moderne André Visages, Picasso, Magritte, Warhol.
Musée Tavet-Delacour : Albert
l
l
tutissimus ibis. Jusqu’au 22 mars.
Annecy
La Turbine-CCSTI : Les doigts dans
l
le cerveau. Jusqu’au 30 mars.
Carcassone
Musée des Beaux-Arts de
l
Carcassonne : Corot dans la lumière
du Nord. Du 21 février au 21 mai.
Chambéry
Musée des Beaux-Arts : Pierre
l
Leloup. Jusqu’au 24 février.
l
l
Malraux : Le siècle d’or de la
peinture danoise : une collection
française. Du 8 février au 11 mai.
Lens
Le Louvre : Les Etrusques et la
l
Méditerranée. La cité de Cerveteri.
Jusqu’au 10 mars. Voir le Sacré.
Jusqu’au 21 avril.
Du 21 février au 22 juin.
l Musée Cantini : La collection :
Picasso, Matisse, Giacometti,
Bacon…. Jusqu’au 15 février
Metz
Centre Pompidou-Metz : Hans
l
Oppenheim. Rétrospective. Du
15 février au 1er juin.
Richter. La traversée du siècle.
Jusqu’au 24 février. Paparazzi !
Photographes, stars et artistes. Du
26 février au 9 juin.
l Frac-Lorraine : Christian Waldvogel. Vision périphérique.
Jusqu’au 9 février
l
l
Renoir, Vuillard : la Collection
Arkas. Juqu’au 30 mars
Wurtemberg : Jules-Emile Zingg à
Perros-Guirec. Voyage japonisant d’un
peintre montbéliardais en Bretagne
(1914-1930). Jusqu’au 23 mars.
Lille
Musée d’Art moderne : Meret
l
Marquet. Les bords de Seine, de
Paris à la côte normande. Jusqu’au
16 février
St.Paul
de Vence
Fondation Maeght : « Djamel
l
Tatah » - Monographie. Jusqu’au 16
mars
Sèvres
Musée de la Céramique :
l
Picasso céramiste et la Méditerranée.
Jusqu’au 19 mai
Strasbourg
Evian
Montéliard
Musée d’Art Moderne et
Palais Lumière : Joseph Vitta - Lodève
Musée de Lodève : Bonnard,
Musée du château des ducs de Contemporain : Doré & Friends. Du
l
l
Passion de collection. Du 15 février au
1er juin.
Grenoble
Lyon
Bibliothèque d’étude et d’inforMusée des beaux-arts : Joseph
l
72
mation : Paroles de palette. Diodore
Rahoult (1819-1874). Jusqu’au 1er avril
l
Cornell et les Surréalistes à New
York. Jusqu’au 10 février. Tony
Montpellier
Musée Fabre : François-André
21 février au 25 mai.
Valenciennes
Musée des Beaux-Arts :
l
Constant Moyaux (1835-1911).
Jusqu’au 23 mars.
l
Palais Lumière, Evian
Joseph Vitta - Passion de collection
Joseph Vitta (1860-1942) est une personnalité d’exception qui a
marqué son époque en mettant sa fortune et son énergie au service de
l'art. Il est un collectionneur important à la charnière du XIXe et du XXe
siècle, quoique son nom soit bien oublié de nos jours, y compris des spécialistes de l’histoire des collections.
Collectionneur, commanditaire, donateur et mécène de Rodin, son
existence est liée à la volonté de rassembler une collection prestigieuse,
de contribuer à l’épanouissement des arts décoratifs et d’œuvrer autant
à sa postérité qu’à celle de ses artistes préférés : Chéret, Delacroix,
Bracquemond, Charpentier, Besnard et Rodin. Il avait ainsi réuni en deux
décennies plus d’un millier d’objets particulièrement variés.
La découverte de ce personnage méconnu et l’idée d’étudier sa collection puis d’en présenter des éléments au Palais Lumière, a pris forme
durant l’été 2009. D’autant plus que la villa La Sapinière, construite à
Evian pour la famille Vitta par l’architecte Jean-Camille Formigé à la fin
du XIXe siècle, a bénéficié de l’apport de nombreux artistes dans la décoration intérieure et extérieure : Félix Bracquemond, Jules Chéret,
Alexandre Charpentier, Albert Besnard, Auguste Rodin et Alexandre
Falguière.
Ainsi, l’exposition Joseph Vitta présentera des objets aussi divers que
des bustes antiques, des tableaux italiens du XVIIIe siècle, plusieurs dessins de Delacroix et de Ingres, un bronze, une pierre, des vases et des dessins de Rodin, des pastels et gouaches de Chéret, des œuvres de
Bracquemond et de Besnard enfin des peintures japonaises de Hokusaï,
des peintures chinoises et un extraordinaire rouleau en soie de 16 m de
long du peintre Xu Yang représentant une visite d’inspection en Chine du
Sud vers 1750 de l’empereur Quien-Long.
. A voir du 15 février au 1er juin 2014
Jules Cheret «La baronne Vitta», étude pour un portrait. Huile sur toile.
Collection Musee des Beaux Arts, Nice © Ville de Nice, photo Muriel Anssens
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d
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expos itions
en
europe
Palazzo Fava, Bologne
« La Jeune fille à la perle »
«La jeune fille à la perle» peinte par Vermeer, de même que «La
Joconde» de Leonard de Vinci ou «Le Cri» de Munch, est unanimement reconnue comme une des trois œuvres d’art les plus aimées et
les plus reproduites au monde.
Durant quelques semaines, le chef-d’œuvre de Vermeer sera en
Italie, plus précisément à Bologne au Palazzo Fava. Ce sera indiscutablement la “star“ d’une exposition raffinée consacrée à l’Age d’or
de la peinture hollandaise. Une occasion historique d’admirer en
Italie de célèbres peintures hollandaises.
«La jeune fille à la perle» évoque la beauté et le mystère, et
depuis cinq siècles son visage continue à ensorceler ceux qui ont la
possibilité de l’admirer pour “de vrai“ ou de le découvrir à travers
les romans ou le film dont la belle jeune fille au couvre-chef couleur
de ciel a été, contre sa volonté, la protagoniste.
Ce ne sera toutefois pas le seul chef-d’œuvre de Vermeer exposé, puisqu’il sera flanqué de «Diane et ses nymphéas», une grande
huile du maître; de plus, il sera accompagné d’une quarantaine
d’œuvres, également en provenance du Mauritshuis (Cabinet royal
de peintres Mauritshuis) de La Haye, toutes de grande qualité.
Le visiteur pourra ainsi admirer des œuvres de Rembrandt,
Frans Hals, Ter Borch, Claesz, Van Goyen, Van Honthorst, Hobbema,
Van Ruisdael, ... soit à peu près tous les principaux protagonistes de
l’Age d’or hollandais.
Jan Vermeer, «La jeune fille à la perle», vers 1665
Huile sur toile, 44,5 x 39 cm. L’Aia, Royal Picture Gallery Mauritshuis
AILLEURS
Karlsruhe
Staatliche Kunsthalle : Fragonard.
perle». L’Age d’or de la peinture hollandaise. Du 8 février au 25 mai.
Londres
British Museum : Au-delà de
Bologne
Palazzo Fava : «La Jeune fille à la
l
Bruxelles
Palais des Beaux-Arts : Zurbarán.
l
Maître de l’âge d’or espagnol.
Jusqu’au 25 mai. Michaël Borremans.
Du 22 février au 3 août
Ferrare
Palazzo dei Diamanti : Matisse. La
l
silhouette. La force de la ligne, l’émotion des couleurs. Du 22 février au 15
juin
Florence
Galleria del Costume : Le chal
peau entre art et extravagance.
Jusqu’au 18 mai.
l Villa Bardini : Photographies de
1975 à 2013. Jusqu’au 16 mars.
Forli
Musée San Domenico : Liberty.
l
Un style pour l’Italie moderne.
Du 1er février au 15 juin.
a
g
l
Poésie et passion & Fragonard,
dessins. Jusqu’au 23 février.
l
l’Eldorado. Pouvoir et or dans l’ancienne Colombie. Jusqu’au 23 mars.
Hommes sages de l'est. Les traditions
zoroastriennes en Perse et au-delà.
Jusqu’au 27 avril.
l Courtauld Gallery : Un dialogue
avec la nature. Paysages romantiques
de Grande-Bretagne et d’Allemagne.
Jusqu’au 27 avril.
l Estorick Collection of Modern
Italian Art : Giorgio de Chirico Mythe and Mystère. Du 19 février au
11 mai
l National Gallery : Etrange beauté - maîtres de la Renaissance allemande. Du 19 février au 11 mai
l Queen’s Gallery, Buckingham
Palace : Castiglione, génie perdu.
Jusqu’au 16 mars.
l Royal Academy : Francis Bowyer.
Jusqu’au 10 février. John Carter RA.
Jusqu’au 16 février.
l Tate Modern : Paul Klee - Making
Visible. Jusqu’au 9 mars.
e
n
. A voir du 8 février au 25 mai 2014
l Victoria & Albert Museum : L’art
perdu de l’écriture. Jusqu’au 30
juin. Dessins britanniques - De
1600 à nos jours. Jusqu’au 13 avril
Venezia : Carlo Saraceni 1579-1620.
Un Vénitien entre Rome et l’Europe.
Jusqu’au 2 mars.
l
nordique. Böcklin, Klimt, Munch
et la peinture italienne. Du 22
février au 21 juin.
Rovigo
Madrid
Palazzo Roverella : L’obsession
Musée du Prado : Velazquez. Les
l
derniers portraits. Jusqu’au 9 février.
Les Furies. De Titien à Ribera.
Jusqu’au 4 mai.
l Musée Thyssen-Bornemisza :
Cézanne. Du 4 février au 18 avril.
Darío de Regoyos (1857-1913). Du
18 février au 1er juin
Milan
Galleria Gruppo
Credito
Valtellinese : Franco Grignani.
Jusqu’au 15 mars
l
Stuttgart
Staatsgalerie : Brueghel, Rubens,
l
Ruisdael. Trésors de la collection
Hohenbuchau. Jusqu’au 23 février.
Venise
Peggy Guggenheim Collection:
l
Themes & Variations. The Empire of
Light. Du 1er février au 14 avril.
Padoue
Vérone
Musée du Diocèse : Les couleurs du
Palazzo della Gran Guardia :
l
l
sacré. Festival international d’illustration. Jusqu’au 2 juin.
Vers Monet. Le paysage du XVIIe
au XXe siècle. Jusqu’au 9 février
l
l
Escher. Paradoxes graphiques entre
arts et géométrie. Jusqu’au 23 mars.
Baselitz. Jusqu’au 23 février. En
couleur ! Bois gravés en clair-obscur de la Renaissance de la collection de Baselitz et de l’Albertina.
Jusqu’au 16 février
Reggio
Emilia Vienne
Palazzo Magnani : L’énigme
Albertina Museum (Albertinapl.)
Rome
Museo Nazionale del Palazzo di
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expos itions
Genève
Art & Public (Bains 37) Claude
l
74
Hermann. Jusqu’au 21 février.
l Bibliothèque d’art et d’archéologie (Promenade du Pin) Les livres de
photographes - Un musée de papier
pour l’image. Jusqu’au 31 mai.
l Blancpain Art Contemporain
(Maraîchers 63) Jérôme Leuba, Yves
Mettler. Jusqu’au 15 mars.
l Cabinet d’Arts graphiques
(Promenade du Pin 5) Not Vital.
Jusqu’au 13 avril.
l Centre d'Art Contemporain
(Vieux-Grenadiers 10) Robert
Overby & Nicole Miller. Jusqu’au
27 avril.
l Centre de la Photographie (Bains
28) Max Regenberg & Emmanuelle
Bayart. Jusqu’au 23 mars.
l Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle) Linda
Naeff. Jusqu’au 9 février.
l Fondation Bodmer (Cologny)
Wagner ou l’opéra hors de soi.
Jusqu’au 23 février
l Gagosian Gallery (Longemalle
19) Rachel Whiteread. Jusqu’au 22
mars.
l Galerie Bärtschi (rte des Jeunes
43) Cornelia Parker. Jusqu’au 21
mars.
l Galerie S. Bertrand (Simplon 16)
Yarisal & Kublitz. Jusqu’au 8 février.
Sam Kaprielov. Du 27 février au 5
avril.
l Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Kira Weber. Jusqu’au 1er
mars.
l Galerie Anton Meier (Athénée 2)
Gaspare O. Melcher. Jusqu’au 8
février.
l Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers
9) Pierre Schwerzmann / Skopia et
Boabooks. Jusqu’au 1er mars.
l Maison Tavel (Puits-St-Pierre 6)
Qu’as-tu appris à l’école ? La Criée
a 25 ans. Jusqu’au 16 mars.
l Mamco (Vieux-Granadiers 10)
Cycle Des Histoires sans fin, séquence printemps 2014. Du 12 février au
18 mai.
l Milkshake Agency (24, Montbrillant) Eun Yeoung Lee. Jusqu’au
16 février. Simone Holliger. Du 25
février au 25 mars.
l Musée Ariana (Av. Paix 10) Jean
Fontaine - En fer sur terre. Jusqu’au
16 février
l Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Konrad Witz et Genève les volets restaurés de la cathédrale St.Pierre. Jusqu’au 23 février.
Corps et Esprits. Regards croisés
sur la Méditerranée antique.
Jusqu’au 27 avril.
en
Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin
10) Découvrez les Baga. Jusqu’au
30 mars.
l Musée Rath (pl. Neuve) Héros
antiques. La tapisserie flamande
face à l’archéologie. Jusqu’au 2
mars.
l Musée de la Réforme (Maison
Mallet) Enfer ou paradis, aux sources
de la caricature. Jusqu’au 16 février.
l Red Zone Arts (r. Bains 40) UkiyoE - Images d’un monde qui passe.
Jusqu’au 1er mars.
l Saint-Gervais Genève (r. Temple)
La porte du non-retour, une exposition de Philippe Ducros. Jusqu’au
9 mars
l Villa Bernasconi (8, rte Gd-Lancy)
Dans le cadre du Festival Antigel : Un
temps sur mesure - Esther Ferrer,
La Ribot, Olga de Soto, Olga Mesa
& Francisco Ruiz de Infante. Du 5
février au 23 mars.
l
Lausanne
Collection de l’Art brut (Bergières
l
11) Véhicules. Jusqu’au 27 avril
l Fondation de l’Hermitage (2, rte
s uis s e
Signal) Le goût de Diderot. Greuze,
Chardin, Falconet, David.... Du 7
février au 1er juin
l Galerie Humus (Terreaux 18 bis)
Jean Fontaine. Jusqu’au 15 février
l Mudac (pl. Cathédrale 6) Mastering
Design & No Name Design - Franco
Clivio. Jusqu’au 9 février
l Musée cantonal des beaux-arts (pl.
Riponne) Giacometti, Marini, Richier.
La figure tourmentée. Jusqu’au 27
avril.
l Musée de l’Elysée (Elysée 18)
Philippe Halsman, Etonnez-moi !.
Jusqu’au 11 mai.
Lens
/ Crans
Fondation Pierre Arnaud
:
l
Divisionnisme. Jusqu’au 22 avril.
Martigny
Fondation Pierre Gianadda :
l
Méditerranée. Photographies des
années 50 de Léonard Gianadda.
Jusqu’au 9 février.
l Fondation Louis Moret (Barrières
33) Jean Scheurer - Zone grise. Du
16 février au 24 mars.
l Le Manoir de la Ville : L'Esprit de
la Montagne. Jusqu’au 23 février
Bulle
Neuchâtel
Musée gruérien : DressCode - Le
Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut
l
vêtement dans les collections fribourgeoises, 1800-1930. Jusqu’au
2 mars.
Fribourg
Musée d’art et d’histoire :
l
DressCode - Le vêtement dans
les collections fribourgeoises,
1800-1930. Jusqu’au 2 mars.
l
74) Balades avec le Minotaure.
Jusqu’au 9 mars.
l Laténium (Hauterive) Fleurs des
Pharaons. Jusqu’au 2 mars 2014.
l Musée d'art et d'histoire (espl.
Léopold-Robert 1) Argent - Jeux Enjeux. Jusqu’au 31 août.
Fondation de l’Hermitage, Lausanne
Le goût de Diderot
Dans le cadre des célébrations du
tricentenaire de la naissance de Denis
Diderot (1713-1784), la Fondation de
l’Hermitage a le plaisir de proposer
une exposition d’envergure consacrée
au célèbre philosophe français, et en
particulier à sa relation à l’art.
Pour l’occasion, une sélection
exceptionnelle de peintures, sculptures, gravures et dessins a pu être
réunie; des œuvres que Diderot a pu
admirer au Louvre à l’occasion des
Salons – expositions temporaires organisées par l’Académie royale de peinture et de sculpture – et qu’il a commentés dans ses comptes rendus rédigés entre 1759 à 1781. Ces textes,
d’une liberté de ton remarquable, marquent l’émergence de la critique d’art
telle qu’on la connaît aujourd’hui. Ils
témoignent de la culture artistique
initiale de Diderot, mais aussi et surtout de l’évolution de son goût, de son
regard et de son esthétique, à mesure
que le philosophe fréquente les œuvres
de son temps.
L’exposition met également en
lumière l’impact de ses écrits sur le
monde de l’art.
Claude Joseph Vernet «La bergère des Alpes», après 1770
huile sur toile, 119,5 x 80 cm. Musée des Beaux-Arts, Tours
© Musée des Beaux-Arts, Tours / P. Boyer Montlouis
a
g
e
. A voir du 7 février au 1er juin
n
d
a
expos itions
en
res. Jusqu’au 18 mai.
Fondation Gianadda, Martigny
Bienne
PhotoforumPasqu’Art
La Beauté du corps dans l'Antiquité grecque
Dans une salle de la Fondation, il
sera possible de contempler les deux
magnifiques statues découvertes à
Martigny le 6 juillet 2011, dans le
quartier des Morasses. C’est au pied
d’un mur, que sont mis au jour deux
torses masculins en marbre, d’époque
romaine, alignés sur le dos, et placés là
intentionnellement, vers la fin de la
période romaine, après avoir été mutilés. Provenant du bassin méditerraneen
oriental, ces statues devaient orner une
salle d’un complexe thermal.
Selon Francois Wiblé, archéologue
cantonal, ces sculptures font partie des
plus belles trouvailles archéologiques
jamais effectuées en Suisse. A ces deux
pièces exceptionnelles s’ajoute une statuette de marbre de Vénus, réplique de
l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle, également trouvée à Martigny.
. A voir du 21 février au 9 juin 2014
Prangins
Musée national suisse : «Swiss
l
Press Photo 13». Jusqu’au 2 mars.
Romont
VitroMusée : Le monde sous
l
verre de Fride WirtlWalser.
Jusqu’au 20 avril.
Vevey
Alimentarium : Délices d’artisl
tes. L’Imaginaire dévoilé des natures mortes. Jusqu’au 30 avril.
l Musée Jenisch : Pierrette Bloch une rétrospective. Jusqu’au 28 févr.
l Musée suisse de l’Appareil photographique (Grand Place) Maxim ou
la colorisation. Jusqu’au 9 mars
OUTRE SARINE
Bâle
Antikenmuseum
l
Basel (St.
Alban-Graben 5) Comment être un
homme? Le sexe fort dans l'anti-
a
g
quité. Jusqu’au 30 mars.
l Fondation Beyeler (Riehen)
Odilon Redon. Du 2 février au 18
mai.
l Kunsthalle : Ross Birrell et David
Harding – Winter Line. Jusqu’au 23
mars. Rita Ponce de León – Endless
openness produces circles. Du 2
février au 30 mars.
l Kunstmuseum (St. Alban-Graben
16) Jakob Christoph Miville (17861836). Jusqu’au 16 février. Les
masques intriguées - James Ensor.
Du musée royal d'Anvers et dans les
collections suisses. Du 16 février au
25 mai.
l Museum für Gegenwartskunst
(St. Alban-Rheinweg 60) Everytime
you think of me, I die, a little. The
Memento Mori by Andy Warhol and
Douglas Gordon. Jusqu’au 9 février.
l Musée des Cultures (Münsterpl.
20) Ara. Jusqu’au
l Cartoonmuseum (St. AlbanVorstadt 28) Les Aventures de la
Ligne claire. L'affaire Herr G. & Co.
Jusqu’au 9 mars.
l HMB - Museum für Musik / Im
e
n
Lohnhof (Im Lohnhof 9) pop@bâle.
La musique pop et rock depuis les
années 1950. Jusqu’au 29 juin.
l Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Objets ludiques. L'Art
des possibilités. Du 19 février au 11
mai.
l Spielzeug Welten Museum :
Marilyn privée: l'être humain derrière le concept Monroe. Jusqu’au
6 avril.
Berne
Centre Paul Klee (Monument im
l
Fruchtland 3) Entre «Brücke» et
«Blauer Reiter». Hanna Bekker vom
Rath, promotrice de l'art moderne.
Jusqu’au 23 mars. Paul Klee – Vie et
Œuvre. Jusqu’au 30 mars.
l Galerie TH13 (Theaterplatz 13)
«Imaginary Club» par Olivier
Sieber. Jusqu’au 23 février.
l Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr.
8-12) Rétrospective Germaine
Richier. Jusqu’au 6 avril. Hieronymus
Grimm (1733-1794), illustrateur et
caricaturiste. Jusqu’au 21 avril.
Markus Raetz. Estampes et sculptu-
d
: Beat
Schweizer & Thomas Kneubühler.
Jusqu’au 20 avril
l
La Fondation Gianadda collabore avec le British Museum pour présenter une exposition centrée sur
l’Antiquité gréco-romaine. Une manière de rappeler le passé gallo-romain de Martigny, et surtout de célébrer la beauté du corps.
Dix thèmes seront à l’honneur et
permettront au visiteur de se documenter sur la beauté des corps féminins et
masculins, le sport, la naissance, le
mariage et la mort, l’amour et le désir,
des thèmes richement documentés par
des pièces archéologiques.
«Vénus» en marbre, réplique de l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle
s uis s e
a
Warth
Kunstmuseum Thurgau : Joseph
l
Kosuth. L’existence et le monde.
Jusqu’au 24 août.
Weil
/ Rhein
Vitra Design Museum : Lightopia.
l
Jusqu’au 16 mars. Visiona by
Panton. Jusqu’au 1er juin.
Winterthur
Fotomuseum (Grüzenstr. 44)
l
James Welling - Autographe.
Jusqu’au 16 février.
l Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) Emil Schulthess – rétrospective. Jusqu’au 23 février.
l Kunstmuseum (Museumstr. 52)
Gerhard Richter - Lignes et verre.
Jusqu’au 20 avril. Gerhard Richter Travaux sur papier de la collection.
Jusqu’au 27 juillet.
l Museum Oskar Reinhart
(Stadthausstr. 6) Les peintres de
Winterthur à travers les siècles.
Jusqu’au 1er juin.
l Villa Flora (Tösstalstr. 44) Chefsd’œuvre de la collection Hahnloser
/ Jaeggli : Bonnard, Van gogh,
Vallotton.... Du 19 février au 27 avril.
Zurich
Haus Konstruktiv : Zurich Art
l
Prize. Adrián Villar Rojas – Films
Before Revolution. Jusqu’au 2 fév.
l Kunsthalle : Lutz Bacher.
Jusqu’au 2 février. Tobias Madison.
Du 2 février au 24 mars.
l Kunsthaus (Heimpl.1) L’Expressionnisme allemand et la France.
Du 7 février au 11 mai. Alberto
Giacometti. Du 28 février au 25 mai.
l Landesmuseum : Charlemagne
et la Suisse. Jusqu’au 2 février.
l Museum Bellerive (Augustinergasse 9) Henry van de Velde –
Intérieurs. Du 28 février au 1er juin.
l
Museum für Gestaltung
(Austellungsstr. 60) Galerie : Vintage
– Design with a History. Jusqu’au 6
avril. Halle : Affiches d'artistes
japonais - Fleurs de cerisier et
ascétisme. Du 12 février au 25 mai.
l Museum Rietberg (Gablerstr. 15)
Art de la Côte d’Ivoire. Du 14
février au 1er juin. Baldaquins pour
la déesse. Art textile en Inde.
Jusqu’au 13 avril.
75
expos ition
berne : germaine richier
L’Ouragane
La rétrospective que le musée des Beaux-Arts de Berne
consacre à Germaine Richier (1902-1959) est un
merveilleux hommage à une artiste qui, comme d’autres
femmes artistes de cette époque, Meret Oppenheim ou
Louise Bourgeois, a dû s’affirmer dans un univers à
domination masculine.
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Jusqu’à présent, seuls quelques collectionneurs ou experts avaient compris la signification exceptionnelle de son œuvre, et sa place comme plasticienne qui contribue à un nouvel expressionnisme. Certes, l’artiste a eu de
son vivant plusieurs grandes expositions, dont plusieurs en Suisse
(Kunsthalle de Bâle en 1944 et 1954, de Berne en 1946, Kunsthaus de
Zurich) mais aussi à Paris (Musée national d’art moderne), New York
(Museum of Modern Art), Londres ou Venise. Depuis sa mort prématurée
en 1959, quelques trop rares rétrospectives ont eu lieu : en 1996, à la
Fondation Maeght de Saint-Paul de Vence et en 2006, à la Collection
Guggenheim de Venise.
En programmant cette exposition rétrospective, articulée en sept sections, le directeur du musée des Beaux-Arts Matthias Frehner a eu une belle
intuition, remettant sur le devant de la scène une des figures pionnières de
l’avant-garde du XXe siècle. Une aubaine pour les amateurs d’art qui peuvent ainsi reconsidérer pleinement cette artiste. Deux commissaires l’ont
rejoint dans son projet : Jean-Louis Prat déjà en charge de l’exposition à la
Fondation Maeght et Daniel Spanke, historien d’art allemand attaché au
musée des Beaux-Arts de Berne.
n’entre plus dans une esthétique normative, même si les formes reproduisent
des figures et des corps humains. Ce « classique sans classicisme » enseigné par Bourdelle sera son viatique, que le maître lui serinera sans cesse par
cet adage : « c’est très bien d’employer un compas mais il faut que tu puisses le faire mentir ». Son œuvre sans concession, faites de sculptures déchirées, s’inscrit dans cette recherche exigeante, qui lui vaudra très vite une
reconnaissance internationale.
La deuxième section consacrée au divin dans l’humain présente des
œuvres clefs de l’artiste dont Le Crapaud (1940) mais surtout Buste du
Christ, une version en ciment (1931) ainsi qu’un petit bronze du Christ
d’Assy (1950). Une œuvre qui lui avait été commandée pour l’église d’Assy
en Haute-Savoie et qui, une fois réalisée, déplut à la communauté catholique
et dut être retirée, pour ne rejoindre son emplacement que vingt ans plus, en
1971. Une tête abîmée et maltraitée du Christ, mais pas encore déformée
Interroger la réalité
Lorsqu’elle s’installe à Paris en 1926, quittant son Languedoc natal,
Germaine Richier va travailler dans l’atelier d’Antoine Bourdelle, où elle
rencontre aussi Alberto Giacometti. Mais, à la différence de celui-ci, qui
avait une approche minimaliste de la figure humaine et dont les conceptions
finirent par s’imposer comme les seules nouvelles formulations valables,
Germaine Richier a une manière kafkaïenne d’interroger la réalité, qui marquera le terme d’une évolution réaliste et expressive amorcée par Rodin. Le
parcours de l’exposition est construit autour des thèmes structurant l’œuvre
de Germaine Richier. La tradition de la figure tout d’abord, passage obligé
pour les sculpteurs, s’intéresse aux années de formation de l’artiste. Celles
que l’artiste passe d’abord (1920-1926), à l’Ecole des Beaux-Arts de
Montpellier dans l’atelier de Louis-Jacques Guigues, élève de Rodin, puis
dans l’atelier d’Antoine Bourdelle, de 1927 jusqu’à la mort de l’artiste. Elle
reconnaît s’y être initiée à la « rude école du buste ». Au total 26 bustes ont
été conservés, auxquels l’artiste accordait peu d’importance mais qui prouvent sa maîtrise du travail technique. Son Torse II (1941) montre un corps
qui a l’air cassé au niveau des jambes et de la tête. Pour le tenir droit, elle
prolonge les jambes par des tiges, donnant ainsi une forme abstraite qui
annonce les fils de fer tendus des sculptures ultérieures. Lorsqu’elle crée en
1945 L’Homme qui marche, ce n’est pas une conscience de soi humaine
qu’elle affirme, ne cherchant pas à représenter le beau idéal de l’être
humain. Aucune posture triomphale mais une démarche pénible, freinée par
la pesanteur naturelle, avec les genoux pliés et le dos arrondi. La forme
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Germaine Richier «L’Ouragane», (Die Sturmfrau) 1948/49
Bronze, 179 x 71 x 47 cm. Collection famille Germaine Richier
© 2013 photo Brassai, coll. F. Guiter
© 2013 / 2014 Estate BrassaI – RMN © 2013, ProLitteris, Zurich
comme elle le fera ultérieurement et qui n’est pas sans rappeler les représentations du Christ profanées par les iconoclastes. Tout entière tournée vers
l’humain, Germaine Richier est souvent considérée comme une représentante de l’existentialisme, ramenant l’homme à sa contingence et lui rappelant
les limites de son existence. Avec une technique de réseaux linéaires utilisée
par l’artiste, qui peut être mis en regard avec l’œu-vre Pope II (1951) de
Francis Bacon enfermant son personnage dans une cage de lignes qui définit l’espace. Les tensions de fil n’imposent pas au corps un espace préexistant et défini puisque, comme dans le jeu des ficelles, où un fil tendu entre
les doigts permet de composer d’infinies formes, l’artiste se sert du fil sert
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pour rattacher avant tout les mains et les pieds dans des figures comme
L’Araignée I (1946), Le Griffu (1952) ou La Fourmi (1953).
Mais Germaine Richier se sentait aussi proche du surréalisme. Comme
eux, elle s’intéresse à la part cachée de l’homme dont témoignent ses hommes de la nuit, ses mantes, et ses êtres hybrides associant des femmes à des
amphores semblant être sortis de cet inconscient. Elle est toutefois moins
obnubilée que les surréalistes par les procédés d’automatisme psychique que
par la quête des sources mythiques. Elle réunit des choses qui n’ont rien en
commun dans le monde réel, comme dans L’Homme-Forêt (1945), réalisé à
partir d’un tronc de bois pour la partie supérieure du corps, auquel elle
rajoute des parties modelées, ne polissant presque pas les surfaces obtenant
ainsi un effet déchiré comme une écorce. Un procédé d’assemblage surréaliste comme le pratiquait aussi Picasso.
La force de la nature
Pour l’artiste, la nature est une force qui impacte l’être humain, le
dépasse et l’oblige de relativiser. En quoi, l’exposition nous la présente
comme une pionnière des idées écologiques en art. Cette relation à la nature est traitée dans une des étapes du parcours. On sait que dans son atelier
s’empilaient toutes sortes de pierres, d’insectes, de bois, d’herbes. Des
objets qui sont autant des sources d’inspiration que des éléments entrant
dans ses sculptures. La vérité de la nature n’est pas seulement beauté pour
l’artiste mais inclut également le bizarre, le laid, l’inquiétant. La sculpture
n’étant plus pour elle un objet de décoration. C’est avec La Sauterelle
(1944) que Germaine Richier inaugure la série des insectes, des animaux
moins majestueux que les chevaux, les lions ou les aigles que l’art antique
combinait volontiers en hybrides. Par la fusion organique de fragments d’animaux, de plantes, d’êtres humains naissent les plus étranges organismes.
La Sauterelle, avec ses distorsions, ses doigts et jambes étendus, sa tête
pointue évoque la tension d’un insecte mais aussi l’étrangeté du monstre.
Ses hybrides semblent avoir été saisis au moment de la métamorphose.
Germaine Richier n’a eu de cesse d’emprunter de nouvelles voies ou
d’expérimenter de nouvelles techniques. Comme utiliser la couleur pour ses
sculptures, faisant alors intervenir des amis peintres comme Zao Wou-Ki ou
Hans Hartung, ou envelopper de plâtre des fils de chanvre trempés dans de
la cire pour certains de ses moulages, remplaçant parfois même le bronze
comme matériau de fonte par du plomb qu’elle verse ensuite dans des creusets en seiche. Pour clore le parcours, qui correspond aussi à la fin de la vie
de l’artiste, la section intitulée “Germaine Richier et le jeu de la vie“ présente deux versions en bronze de L’Echiquier, une petite de 1955 et une autre
plus grande de 1959. Qu’on soit roi, fou ou dame nous sommes tous des
pièces de l’échiquier et faisons partie du jeu. La sculpture de Germaine
Richier reflète dans ses signes l’image de l’homme de la philosophie existentialiste, la menace que chacun exerce sur l’autre. Le bourreau et la victime malaxés dans le même corps et ses créations plastiques sont en fin de
compte une contribution au nouvel expressionisme après 1945. Son œuvre
ne retourne plus en arrière mais anticipe la nouvelle figuration des grands
peintres sauvages de notre temps, le Suisse Martin Disler ou les Allemands
Georg Baselitz ou Anselm Kiefer. « La sculpture n’est jamais frivole, écrit
Jean-Louis Prat dans son introduction du catalogue, le sculpteur sait bien
qu’il laisse un signe tangible pour le futur et que rien ne lui sera pardonné…
ce qu’il a déterminé, voulu, laissera à l’évidence des traces ».
Régine Kopp
Jusqu’au 6 avril 2014
www.kunstmuseumbern.ch
Du 9 mai au 24 août 2014 : Kunsthalle Mannheim (Allemagne)
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mènera les protagonistes vers une issue dramatique. Ibsen met le doigt sur
la fragilité et les faiblesses des uns et des autres, sur un ton permettant
d’entrevoir des références à Kierkegaard ou Schopenhauer et laissant, on
s’en doute, peu de place à l'espoir. Tout en contenant une charge évidente contre les préjugés et conformismes de l'époque, notamment dans le
rapport à l'argent, un autre sujet de prédilection de l'auteur, la pièce est surtout marquée du sceau d'un pessimisme que souligne le destin tragique de
la seule figure innocente de la pièce, une adolescente.
au théâtre de la colline
Le Canard
sauvage
Chez ces gens-là, on ne vit pas, on triche... C'est bien du
côté de Jacques Brel que l'on pourrait trouver un soustitre pour Le Canard sauvage d'Ibsen, à moins que le
propos ne concerne en fin de compte une grande
partie de l'œuvre du dramaturge norvégien.
Une distribution homogène
La production que propose Stéphane Braunschweig, à la fois adaptateur de la pertinente traduction d'Eloi Recoing, metteur en scène et scénographe, est conforme visuellement à ce que l'on connaît de son travail, à
savoir notamment le souci d'éviter toute référence naturaliste pour ce qui
est des éléments scénographiques. De fait, la pièce est jouée dans une
pièce unique dont les murs sont des panneaux de bois et le décor se compose d'un simple canapé-lit,
d'une table et de quelques
chaises. Dans cet espace
minimaliste, les comédiens
sont mis en valeur, la distribution se révélant homogène,
à commencer par le protagoniste central de la pièce,
Hjalmar dont Rodolphe
Congé fait un portrait nuancé, passant de manière crédible d'une sorte de mélancolie
tchekhovienne à un emportement pathétique. Dans un
registre difficile, celui
consistant à interpréter une
adolescente de quatorze ans,
Suzanne Aubert impose sans
aucune mièvrerie une
Hedwig en tous points
convaincante, alors que le jeu
tout en intériorité de Claude
Duparfait donne à la recherche de « vérité » de Gregers
«Le Canard sauvage» © Elisabeth Carecchio
une tonalité faisant frémir à
Chez ces gens-là, il y a Werle, le patriarche enrichi, son fils Gregers juste titre. Chloé Réjon, en épouse cherchant à protéger sa vie de famille,
investi d’une mission rédemptrice, le vieil Ekdal, l’ancien associé - ou Christophe Brault en médecin désillusionné mais lucide sont également
complice ? - de Werle qui avait été condamné au bagne pour avoir vendu excellents et Luce Mouchel (en gouvernante opportuniste), Charlie Nelson
du bois d’une forêt appartenant à l’Etat qui vit dans la maison de son fils, (en vieillard déshonoré) et Thierry Paret ne déparent nullement l'ensemble
le tourmenté et irrésolu Hjalmar et de sa femme Gina qui fut servante - et dans un style de jeu plus attendu. Mais quelle curieuse idée d'avoir fait le
un peu plus - chez Werle, ainsi qu’une adolescente, Hedvig (“son père choix au début de la pièce d'un dialogue entre Gregers présent sur scène et
n’est pas son père, mais son père ne le sait pas“). Six personnages pour un son père Werle interprété par Jean-Marie Winling... filmé !
huis clos sans concession et à l’issue fatale....
Frank Fredenrich
Fragilité et faiblesse
Sombre comme les journées de décembre dans un fjörd, la pièce écrite en 1884 et créée au début de l'année suivante présente un tableau de personnages marqués par d'insurmontables contradictions, ni bons ni mauvais, vivant dans une atmosphère dans laquelle le mensonge et les non-dits
règnent en maître jusqu'à l'apparition d'une sorte d'ange exterminateur qui
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Théâtre de la Colline (rés. 01.44.62.52.52)
Le canard sauvage de Henrik Ibsen, m.e.s. Stéphane Braunschweig, jusqu’au 15 février.
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Comédie-Française
Psyché
Des pièces de Molière, Psyché n’est certes pas la plus connue. On peut
découvrir cette rareté à la Comédie-Française, qui ne l’avait plus donnée
depuis 1962 (dans une version abrégée, et depuis 1862 dans son intégralité).
80
Cette pièce, réputée immontable, dura cinq
heures lorsqu’elle fut donnée en 1671, commandée par le Roi à l’occasion de la réouverture de
la salle des Machines du palais des Tuileries. Ne
disposant que de quelques semaines pour l’écrire, Molière s’adjoignit les services de Corneille,
qui composa 1’100 vers, tandis que Quinault
signait les paroles chantées et Lully la musique.
Psyché est en effet une pièce de théâtre et un
ballet, et comporte des parties chantées.
Véronique Vella a relevé le défi consistant
à mettre en scène ce divertissement royal, en
pratiquant des coupes et en remaniant entièrement les partitions. Sans atteindre le faste de la
représentation donnée au Roi-Soleil, la
Comédie-Française a mis les moyens pour
redonner vie à cette pièce tombée dans l’oubli.
Mais cette débauche de beaux décors et de
beaux costumes ne suffit pas à faire oublier la
relative insipidité de la pièce.
dre intérêt pour cette pièce, éprouve un sentiment de vanité en laissant son regard errer sur
ce déploiement de pompe. Le même ennui fait
qu’on en vient rapidement à prendre en grippe
certains comédiens dont le jeu, faisant pourtant
merveille lorsque le texte est bon, n’apparaît
plus dans ce contexte que comme un métier sans
âme. L’interprétation des deux rôles principaux,
Psyché et l’Amour (Françoise Gillard et
Benjamin Jungers), manque particulièrement de
sel. Restent quelques belles scènes, comme
celle où le père de Psyché (Laurent Natrella) ne
parvient pas à se consoler de la perte imminente de sa fille, ou celle mettant aux prises Vénus
et son fils, qui relancent notre intérêt de manière ponctuelle sans parvenir à dissiper la fadeur
de l’ensemble.
En voici le sujet :
Vénus, irritée que la beauté éblouissante de
Psyché lui fasse de l’ombre, décide de se venger. Son fils l’Amour qu’elle envoie séduire et
perdre la jeune mortelle tombera amoureux
d’elle, contraignant Vénus à le châtier à son
tour. Cette histoire empruntée à la mythologie
grecque, il aurait été trop facile de la tourner en
dérision. Véronique Vella ne le fait pas, mais
elle n’en fait pas grand-chose non plus, si bien
que le spectateur, peinant à concevoir le moin-
Julien Roche
Psyché
Comédie-Française
Jusqu’au 4 mars 2014
«Psyché» © Brigitte Enguerand
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maison de la culture du japon
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opéra de paris, salle garnier
Symphonie M Le Parc
Acteur underground du Japon des années 60,
Akaji Maro se forme au butô auprès de l’un de ses
fondateurs, Tatsumi Hijikata, puis monte sa propre
compagnie, Dairakudakan en 1972. Son nouveau
ballet, Symphonie M, était présenté à la Maison de la
culture du Japon du 21 au 30 novembre 2013.
Reprenant le thème du Livre des morts tibétains, Akaji
Maro nous offre sa vision des quarante neuf jours qui
suivent la mort et précédent la réincarnation.
Créé en 1994, Le Parc est le premier
ballet d’Angelin Preljocaj pour le
Ballet de l’Opéra de Paris. Le
chorégraphe prend comme thème le
jeu de la séduction dans la société
française du 18ème siècle. Le Parc a été
repris à Garnier du 7 au 31 décembre.
Dans un jardin à la française, un groupe
d’hommes et de femmes s’amusent. Badinage,
libertinage, l’austérité de la fin du règne de Louis
XIV est oubliée, l’air du temps est à la légèreté. A
ce jeu, un homme et une femme vont se faire prendre. Quand elle apparaît sur scène, pas de doute,
Isabelle Ciaravola est une grande dame, une reine,
I.Ciaravola dans «Le Parc»
Photo A Poupeney
une héroïne cornélienne, écartelée entre le devoir
et la passion. Si elle participe aux jeux de ses
amies, aux chaises musicales, à colin-maillard, elle garde ses distances. Son trouble va naître au contact de Stéphane Bullion. Le danseur étoile donne à son personnage la couleur du libertin torturé qui va succomber à l’amour sincère. Le jardin est le théâtre du drame de la passion, de sa naissance au milieu des amis qui
s’amusent, jusqu’au duo final où l’héroïne s’abandonne définitivement dans les
bras du héros.
Les scènes sont entrecoupées par l’apparition des jardiniers, à la danse très
contemporaine, qui évoluent sur une création sonore de Goran Vejvoda alors que
c’est Mozart qui accompagne le ballet. Les danseurs prennent un plaisir évident
à interpréter ces variations autours de la séduction. La société du 18ème siècle, à
cent lieues de la révolution, apporte un délicieux vent de liberté, bien agréable
dans le contexte de crise actuel.
Un être flottant dans l’éther tel un oiseau dans le ciel,
un corps libéré de l’attraction
terrestre… Cette première
vision nous frappe quand se
lève le rideau. La musique, la
5ème symphonie de Mahler, est
régulièrement interrompue par
de longs moments de silence.
Ces éléments nous font prendre
conscience de la nouvelle
dimension spatiale et temporelle dans laquelle nous sommes
projetés. Sur scène, ce qui se
déroule n’a jamais aussi peu
mérité le nom de repos éternel.
Le défunt, incarné par Akaji
Maro, va en effet connaître la
tentation de femelles lubriques,
«Symphonie M»
Photo Junichi Matsuda
les persécutions d’une cohorte
de mâles sadiques puis l’agression d’un monstre à demi fossilisé. Après ces créatures infernales, l’épreuve la plus dure va être d’affronter son passé qui refait surface. La
mort serait donc cela, l’angoisse et le désespoir, les remords qui minent
la conscience, avant de connaître la dernière asphyxie, la chute sidérale qui mène à la lumière éblouissante, la porte vers une nouvelle vie, le
droit de rejouer la partie. Cette porte marque particulièrement pour
nous le retour à une certaine légèreté, en même temps qu’à la matérialité. Encadré par des maîtres de cérémonie aussi grotesques qu’inquiétants, Akaji Maro incarne avec une force fascinante le mort, dans cette
danse très théâtrale. Qu’il soit en caleçon ou vêtu d’une somptueuse
robe émeraude, il réussit à faire passer les émotions poignantes que son
personnage ressent. Les tableaux à la scénographie très esthétisante,
faite de miroirs, de bois, de cordes et de sables sont incroyablement prenants. Symphonie M est un fascinant voyage dans l’au-delà.
Stéphanie Nègre
La danse en février
L’Opéra de Paris propose du 21
février au 13 mars un programme consacré
à deux œuvres méconnues du répertoire du
20ème s., Mademoiselle Julie de Birgit
Cullberg qui fait son entrée au répertoire et
Fall river legend d’Agnès de Mille.
Le Théâtre de la ville accueille, du 26
février au 6 mars, So Blue, création de
Louise Lecavalier qui fut une des danseuses fétiches de la compagnie canadienne
La la la human step d’Edouard Lock.
Perfection de Bud Blumenthal, création qui mêle danse et vidéo, sera à l’affiche du Théâtre national de Chaillot du 11
au 14 février.
L’Opéra de Massy présente le 13
février, Inferno, d’Emiliano Pellisari,
Stéphanie Nègre
Après le Théâtre de la Ville en mai 2013, le Théâtre des Gémeaux présente, les 16,
17 et 18 mai 2014, Umusuna de la compagnie de butô Sankai Juku. Cette compagnie est dirigée par Ushio Amagatsu, ancien élève d’Akaji Maro.
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inspiré de la Divine comédie de Dante.
Le Saint Petersbourg Ballet Theatre
sera au Palais des congrès avec Le Lac des
cygnes les 4, 5 et 9 février avec Irina
Kolesnikova du St. Petersbourg Ballet
Theatre et Vadim Muntagirov de l’English
National Ballet, Don Quichote le 6 février
avec Daniil Simkin, de l’American Ballet
Theatre, et Yana Salenko du Ballet de
l’Opéra de Berlin, La Bayadère les 7 et 8
février avec Anna Tikomirova du Ballet du
Bolchoi et Vadim Muntagirov.
Toujours au Palais des Congrès, le
Moscou Ballet Theatre présentera du 14 au
23 février Romeo et Juliette avec dans le
rôle de Juliette, la danseuse étoile du
Bolchoi, Evguenia Obraztsova.
Stéphanie Nègre
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opéra
Dialogues acerbes
Puritains pur jus
Excellente production, que celle de
Dialogues des Carmélites au Théâtre des
Champs-Élysées. Tout se conjugue pour une soirée réussie, de l’interprétation musicale à la mise
en scène. Cette dernière revient à Olivier Py.
Décidément, Py et Pelly forment actuellement le
duo obligé des nouvelles productions lyriques
marquantes à Paris ! Avec trois mises en scène
chacun depuis la rentrée de la saison. Match nul !
Mais Py l’emporte, incontestablement, pour la
valeur de la prestation. Ainsi de ces Dialogues,
nimbés de symboliques sur fond de murs noirs
coulissants, dans une animation d’une juste évocation. La mort de la Mère prieure, à la fin du
premier acte, est à cet égard éloquente : sur un lit
vertical, offert comme un tableau suspendu, crûment éclairé. Vocalement, il n’est aussi que de
louer le plateau réuni. Patricia Petibon incarne le
rôle principal avec une ferveur de chaque instant.
Sabine Devielle (remplaçant de dernière minute
Anne-Catherine Gillet, elle-même remplaçant
Sandrine Piau), lui donne une belle réplique,
dans un chant plus léger, mais tout aussi prenant.
Et ainsi du reste de la distribution : Véronique
Gens, Rosalind Plowright, Topi Lehtipuu,
Philippe Rouillon. Seule Sophie Koch dénote,
avec ces notes outrées dont elle s’est fait une spécialité. Mais les uns et les au-tres avec une
ardeur, une justesse de projection, qui sait éviter
toute mièvrerie. Il en est de même de l’Orchestre
Philharmonia, avec ses timbres francs sous la
battue d’un Jérémie Rhorer plus précis qu’à son
accoutumée. Si la soirée semble s’éterniser, on le
doit à l’œuvre, ses dialogues constamment en
récitatifs qui tournent à vide et son inspiration
musicale chiche. L’opéra de Poulenc est ici pourtant servi on ne peut mieux.
Les Puritains viennent à la Bastille. Ce n’est que justice, pour cet opéra parmi
les plus inspirés de Bellini, trop peu fréquent sur les scènes, et qui fut en outre
créé à Paris (en 1835). Encore faut-il des chanteurs qui savent le porter !
Contrat rempli.
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A la Bastille : «Les Puritains» avec Dmitry Korchak (Lord Arturo Talbot), Maria Agresta (Elvira), Michele Pertusi
(Sir Giorgio) et Andreea Soare (Enrichetta di Francia) © Opéra national de Paris/ Andrea Messana
Les deux rôles principaux, d’Elvira et
d’Arturo, sont à cet égard bien distribués. Si ce
n’est que Maria Agresta et Dmitry Kochak nécessitent l’un et l’autre un moment d’échauffement.
Moment assez court pour la première, avec
quelques cris de départ peu mélodieux, mais vite
compensés d’un magnifique phrasé qui rend
toute la douleur étreignante des sublimes épanchements belliniens. Le second met beaucoup
plus de temps, avec une voix trop longtemps étirée et rêche, mais se rattrape ardemment dans les
tout aussi sublimes pages finales qui lui reviennent. Mariusz Kwiecien, pour sa part, suit une
similaire courbe ascendante, qui le voit enfin
défendre en bel canto de baryton son personnage
de Forth. Mais n’oublions pas Luca Lombardo,
pour Roberton, ténor dont on ne vante pas assez
les mérites, d’une assurance de legato que bien
des vedettes du gosier pourraient lui envier.
La mise en scène ?… Disons qu’elle ne gêne
pas, ni ne gâche notre plaisir (vocal). On sait gré
à Laurent Pelly d’avoir su, cette fois, éviter les
gags et la dérision facile. Cette histoire romantique à souhait (d’après Scott), est donc prise au
premier degré : costumes crypto d’époque
a
(romantique), jolis mouvements d’ensemble et
poses convenues. Parfaitement en place et approprié, mais sans ne rien bouleverser. De son côté la
direction musicale de Michele Mariotti, jeune
spécialiste de ce type de répertoire, sait allier raffinements et tensions, à partir de la récente édition critique de la partition. Une soirée tout en
séductions.
Au Théâtre des Champs-Elysées : «Dialogues des Carmélites» © Vincent Pontet-WikiSpectacle
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re combien le reste de l’opéra languit. Il n’empêche que Christopher Purves, Barbara
Hanningan et Iestyn Davies sont des voix excellemment adaptées, que l’Orchestre philharmonique de Radio France, sous la direction de
George Benjamin soi-même, est à son affaire
comme rarement, que la mise en scène de Katie
Mitchell peut convaincre ; dans son décor de
maison décrépie et mal bâtie – pour qui s’y
connaît un tant soit peu en architecture – et ses
outrances gestuelles.
Mystères amusants
A l’Opéra-Comique : «Manfred» © Julien Etienne
Manfred et Written
C’est une gageure que de vouloir monter
Manfred de Schumann. Car d’action, il n’est pas
vraiment question, sinon d’une succession de
tableaux contemplatifs ou fantasmagoriques,
dits par des récitants à partir du poème alambiqué de Byron, dont les courtes séquences musicales qui s’intercalent sont censées restituer
l’obsession. Mais l’œuvre est des plus rares au
concert ou à la scène, et la splendide musique
justifie tout. L’Opéra-Comique a donc été bien
inspiré de tenter l’aventure. Si ce n’est qu’il a
fallu faire la part des choses, avec un texte
déclamé, originellement en allemand, traduit
pour la circonstance, mais aussi simplifié. Dans
ces conditions, le comédien Pascal Rénéric s’en
sort avec les honneurs, dans une diction claire et
articulée, comme sa partenaire Astrid Bas.
Diction toutefois déparée d’une importune
sonorisation, inutile, dans l’excellente acoustique de la salle, et préjudiciable à l’équilibre
sonore général (surtout dans les moments de
mélodrame, ou parlé sur fond instrumental).
Sous la direction d’Emmanuel Krivine, la
Chambre Philharmonique délivre de belles couleurs, après la mauvaise impression d’une
ouverture (la page la plus célèbre de la partition) brutalement cognée. Les chanteurs solistes
et le chœur les Éléments se révèlent pareillement en phase. La conception de Georges
Lavaudant trouve à illustrer cette suite de scènes
sans effet scénique, dans une appropriée obscurité, zébrée de projections énigmatiques et peuplée de personnages tout aussi ténébreux, propice aux rêves et à leurs fantômes.
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Créé lors du Festival d’Aix 2012, Written
on Skin fait un tabac à l’Opéra-Comique. Bien
que l’on puisse s’interroger sur ce triomphe,
assez télécommandé. Puisqu’il a été dit à satiété qu’il s’agissait du (centième ?) plus bel opéra
depuis Wozzeck !… Eh bien non ! Ce serait
même, pour nous qui n’étions pas à Aix, une
déception – pour qui connaît quelque peu les
autres œuvres de Benjamin, dont son opéra de
chambre Little Hill. Œuvres mieux constituées
et pensées. À l’évidence, la grande forme, pour
son second opéra, ne lui convient pas ; s’ébrouant entre interminable et vite insupportable
récitatif à la Pelléas (ou Wozzeck) et de ponctuelles belles sonorités d’orchestre. Le petit
moment – trois secondes – où enfin les chanteurs poussent la note ensemble, un brévissime
trio, suffit à démontrer par le plaisir qu’il procu-
Sous l’égide du Palazzetto Bru Zane, les
Mystères d’Isis renaissent Salle Pleyel le temps
d’un concert. De quoi s’agit-il ?… En l’espèce,
d’un arrangement de la Flûte enchantée créé en
1801, dû à un certain Lachnith, compositeur
d’origine tchèque, et Morel de Chédeville,
librettiste. Il fallait bien, à l’époque à Paris, présenter un opéra en français, où en outre les dialogues parlés étaient exclus. Mais dans ce cas,
c’est à un galimatias que l’on assiste. De la
Flûte enchantée restent divers passages,
transposés, écourtés, transformés, mis sens dessus dessous… S’ajoutent d’autres pages de
Mozart, puisées à Don Giovanni, les Noces de
Figaro ou la Clémence de Titus, elles aussi
jetées au petit bonheur et subissant un sort comparable. Viennent aussi les récitatifs, d’une lourdeur à faire pleurer les tombes, et quelques passages inconnus (de Lachnith ?), assez ternes.
Quant au texte, il aligne les poncifs, un langage
pauvrichon et une histoire abracadabrante où
par comparaison le livret même de Schikaneder
en devient limpide…
On s’étonne au début, pour ensuite s’amu-
A l’Opéra-Comique : «Written on skin» avec Barbara Hannigan et Christopher Purves © Julienne Etienne
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ser franchement la soirée passant. Il n’empêche
que l’on ne peut que saluer le méritoire travail
de reconstitution de la partition. Que louer les
interprètes, pour leur courage et à l’occasion
leur prestation. Sébastien Droy livre le style de
chant français qu’on lui connaît (pour Isménor,
alias Tamino), Jean Teitgen et Tassis
Christoyannis donnent leurs rôles sans faillir
(Bochoris, alias Papageno, et Zarastro). Les
voix féminines sont plus incertaines individuellement (Chantal Santon-Jeffery, prenant place il
est vrai de Sandrine Piau déclarée forfait), mais
s’acquittent bien des parties d’ensemble. Le
Chœur de la Radio flamande est parfait. Le
Concert spirituel, après quelques flottements
initiaux, vibre de tous ses timbres sous la battue
énergique de Diego Fasolis (remplaçant Hervé
Niquet, souffrant). Bref, un beau travail ! Mais
un effort presque inutile…
s
gée dans son découpage et sa trame. Pauvre
Offenbach ! qui ne voit jamais, ou quasiment,
ses ouvrages donnés tels quels. L’ensemble est
toutefois bien fait, avec quelques tournures drôles, chez des troufions d’opérette revus par le
théâtre de Boulevard. Le metteur en scène
Philippe Béziat en rajoute un peu, mais le public
semble ravi. C’est l’essentiel. Isabelle Druet
campe une pétulante Grande Duchesse, quand
David Ghilardi, François Rougier et
À l’Opéra-Comique, c’est l’Orchestre philharmonique de Radio France qui fait le détour,
pour un programme réunissant l’Inachevée de
Schubert, le 22e Concerto pour piano de
Mozart et la 6e de Sibelius. Ou une montée en
puissance, passant par un Mozart transcendant
sous les doigts du prodigieux Jonathan Biss, et
une symphonie de Sibelius au plus haut de son
mystère sous la battue innervée de Thomas
Dausgaard.
... et Danaïdes
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Toujours dans le cadre de sa réhabilitation
d’opéras français célèbres en leur temps mais
depuis lors oubliés, la saison Bru Zane se poursuit avec les Danaïdes. C’est autrement mieux
venu, et plus essentiel, que les Mystères d’Isis ;
pour la force d’un opéra, signé Salieri, qui a
marqué son époque (l’après Gluck, dont on
trouve la trace). Lors du concert à l’Opéra royal
Versailles, Christophe Rousset officie, dans des
tempos judicieusement exacerbés, avec la verve
et l’ardeur qui siéent. Ses Talens Lyriques sont
sans reproche, d’un bel élan d’ensemble vite
communicatif. On serait plus réservé pour les
Chantres du Centre de musique baroque de
Versailles, leurs voix aigrelettes et à l’occasion
décalées, prenant toutefois davantage consistance dans les saisissantes scènes finales. Judith
van Wanroij n’évite pas toujours les excès, dans
sa caractérisation de la tragique Hypermnestre,
avec quelques notes tirées, mais demeure une
vive incarnation. La palme du beau chant
revient à Philippe Talbot, délicieux ténor élégiaque pour Lyncée, le héros fragile et malheureux, et à Tassis Christoyannis, sombre à souhait
pour Danaüs, le méchant de cette ténébreuse
histoire. Et le public de réserver un triomphe
final, amplement mérité.
Petite Grande Duchesse
L’Athénée présente, avec la complicité de
la compagnie les Brigands, la Grande
Duchesse. Ou un spectacle d’après Offenbach et
sa Grande Duchesse de Géroldstein. D’après…
car il s’agit d’un arrangement, pour petit ensemble instrumental, d’une œuvre elle-même arran-
a
A l’Athénée : «La Grande Duchesse» © Claire Besse
Emmanuelle Goizé lui donnent réplique avec un
bagout de circonstance. Les uns et les autres
avec des voix assurées et un jeu scénique qui
l’est autant. Direction musicale sans histoire de
Christophe Grapperon.
Roméo et Sibelius
Valery Gergiev et l’Orchestre symphonique
de Londres, accompagné de son Chœur et des
Guildhal Singers, font le déplacement Salle
Pleyel pour Roméo et Juliette. D’emblée frappe
l’intensité, une ferveur quasi mystique. Gergiev
est le démiurge de Berlioz ! Cette intensité ne se
relâchera jamais, des dispersions les plus subtiles, des emportements les plus endiablés, des
déchaînements abrupts aux silences lourds de
profondeurs. Le chœur participe de la même
véhémence que l’orchestre, comme les solistes.
Olga Borodina délivre un legato que l’on n’aurait pas cru d’elle, sauf pour deux notes malencontreusement criées ; Keneth Tarver dispense
une délicate voix de ténor fluide ; et Evgeny
Nikitin s’acquitte de sa partie de basse, sans
réellement en posséder la tessiture, avec ardeur.
Un moment de fusion, entre les interprètes, l’assistance et l’œuvre.
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Poulenc et Holmès
Poulenc, pour les cinquante ans de sa
disparition, est également célébré à
l’Amphithéâtre de la Bastille par les soins de
l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris. Ses mélodies sont à l’honneur, en compagnie de celles de
deux de ses acolytes : Barber et le rare Louis
Durey. Tiago Matos, João Pedro Cabral, Olga
Seliverstova, Élodie Hache, jeunes talents
vocaux qu’il n’est plus besoin de présenter,
tirent le meilleur. Les pianistes Adria Grácia
Gálvez et Jorge Giménez, les jeunes solistes
instrumentaux issu de l’Orchestre-Atelier
OstinatO, ne sont pas en reste de talents.
Au Temple du Luxembourg, c’est à une
autre célébration que l’auditoire, choisi, est
confronté : Augusta Holmès. Cette compositrice
(1847-1903), amie de Liszt et de Franck, a laissé un nom dans l’Histoire de la musique. Mais
ses œuvres beaucoup moins, qui ne sont quasiment jamais interprétées. L’occasion était donc
inespérée, d’entendre enfin ses mélodies, précieuses ou fortes (le cycle Conte de fées) et un
extrait de sa magnifique cantate, Lutèce, par les
voix appropriées d’Aurélie Loilier, Jeanne de
Lartigue, Xénia d’Ambrosio, Alexander Swan
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et L’Oiseleur des Longchamps, accompagnées
du piano de Yoan Héreau.
Lakmé au-delà des clochettes
Lakmé ne s’était pas vu à Paris depuis une
vingtaine d’années. Son retour à l’OpéraComique, dans une coproduction inaugurée en
octobre à l’Opéra de Lausanne, fait un triomphe.
Mérité. La mise en scène de Lilo Baur se contente d’une simple évocation, assez juste au reste.
Mais c’est l’interprétation qui soulève le public.
Et au premier chef, pour le rôle-titre, Sabine
Devieilhe, à la coloratoure ardente et aux aigus
joliment filés. À croire que le rôle a été écrit pour
elle ! Mais son partenaire, Frédéric Antoun, lui
ravirait presque la vedette, avec une voix de ténor
léger ferme dans tous les registres. Le reste de la
distribution, dont Élodie Méchain, Paul Gay,
Jean-Sébastien Brou, Antoine Normand et Hanna
Schaer, n’est pas en reste, parfaitement en adéquation avec ses personnages et ses tessitures. Le
chœur Accentus délivre nuances et vaillance
quand il faut. Alors que les instruments d’époque
de l’orchestre les Siècles sonnent merveilleusement. La battue de fouillée de François-Xavier
Roth rend justice à une partition qui comporte
d’autres joyaux que ses “ clochettes ” (la fin aux
voix savamment entremêlées du deuxième acte,
par exemple), dans un tempo enlevé qui évite une
déliquescence dans laquelle l’exotisme de carton-pâte de l’opéra de Delibes pourrait facilement risquer de tomber.
Einstein fait son retour
Einstein on the Beach remplit jusqu’au dernier strapontin du Châtelet (associé pour l’occasion au Festival d’Automne). Car c’est un
ouvrage mythique, on le sait. Depuis certain
beau soir de 1976 à Avignon, l’opéra de Philip
A l’Opéra-Comique : «Lakme» © Pierre Grosbois
Glass et Robert Wilson n’a cessé de faire référence à travers différents points de la planète
théâtrale. Sa dernière reprise en France date de
1992 à la MC93 de Bobigny, où nous l’avions
vu avec un temps de retard. Le temps a donc
passé. Mais l’œuvre n’a jamais si bien vieilli !
Désormais, c’est un sentiment de beauté générale qui émane. Y compris pour la musique de
Glass, dans cette fameuse esthétique répétitive
dont on a pu lui faire grief, mais devenue incantatoire et qui recèle des vertus insoupçonnées.
Le sommet à cet égard revient à l’Intermède 3,
dans une polyphonie chorale d’une virtuosité
confondante. La conception de Wilson porte les
caractères de son signataire : des lumières crûment magnifiques, une gestuelle au millimètre,
des poses hiératiques, un ordonnancement quasi
militaire dans sa rigueur d’automates. Le tout,
et ses quatre heures dix de représentation (sans
entracte !), tient du cérémonial, d’une communion collective, pour peu qu’on y entre sans trop
de réserves. Il y aurait bien quelques passages à
vide : comme les longs solos de saxophone, de
synthétiseur et de la soprano (Hai-Ting Chinn),
sans autre décor qu’une barre lumineuse ; ou les
deux scènes réservées au ballet, le point faible
du spectacle, dans la chorégraphie de Lucinda
Childs avec ses danses tournoyantes depuis lors
mille fois vues. Mais on garde gravées les images des deux splendides scènes du “ Procès ” ou
de celle de la “ Space machine ” finale, soutenue par le clignotement de mille ampoules.
Puisqu’il s’agit d’un travail éminemment léché,
depuis les choristes, les musiciens du Philip
Glass Ensemble, sous la direction de Michael
Riesman, et chacun des intervenants, comédien,
chanteur, figurant ou danseur.
Catone et Curtis
Catone in Utica est présenté en version de
concert au Théâtre des Champs-Élysées. Ou
plutôt, les deux derniers actes de l’opéra de
Vivaldi, qui sont seuls restés, et un pasticcio
(comme on disait à l’époque) pour un premier
acte reconstitué d’après d’autres pages du
“ Prêtre roux ”. Et de fait, l’intérêt musical
prend mieux consistance passé ce premier acte,
avec des arias d’une inspiration mélodique foisonnante. L’interprétation y est pour beaucoup,
qui réunit un bouquet de voix féminines, et
internationales, de premier choix : Caitlin
Hulcup (remplaçant Roberta Mameli), la puissante Ann Hallenberg, Sonia Prina, Ana
Quintans et la toute jeune Nerea Berraondo (et
petite révélation, avec son timbre d’alto comme
il est peu). Colin Balzer, seul chanteur masculin, peine dans les aigus, tout en remplaçant
dignement Topi Lehtipuu prévu. Alors que, face
à son vibrant ensemble Il Complesso Barocco,
Alan Curtis démontre la maîtrise qu’on lui
connaît (trop peu célébrée par les médias).
Pierre-René Serna
Théâtre du Châtelet : «Einstein on the Beach» (Reprise de la production de Philip Glass / Robert Wilson)
© Marie-Noëlle Robert
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Chronique musicale de février 2014
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A partir du 1er février, saluons l'entrée au répertoire de l'Opéra
National de Paris du chef-d'œuvre de Puccini La Fanciulla del West, dans
la production signée Nikolaus Lehnhoff et dirigée par Carlo Rizzi avec
dans le rôle titre Nina Stemme (Minnie) - personnage dans lequel elle
vient de remporter un beau succès à Vienne avec Jonas Kaufmann -,
Claudio Sgura (Jack Rance), Marco Berti (Dick), Roman Sadnik (Nick) et
Andrea Mastroni (Ashby), l'Orchestre et Chœur de l’Opéra National de
Paris, dernière le 28. En alternance à partir du 14 février et jusqu'au 12
mars, un autre pilier puccinien Madama Butterfly, spectacle conçu il y a
longtemps déjà par Bob Wilson : cette fois le rôle de la fameuse geisha
sera tenu par Svetla Vassileva qui sera entourée par Teodor Ilincai
(Pinkerton), Cornelia Oncioiu (Suzuki) et Gabriele Viviani (Sharpless),
l'orchestre de l'opéra étant placé sous la direction de Daniele Gallegari. Le
3 février dans le cadre de « Convergence », récital du baryton Michael
Nagy accompagné par le pianiste Gerold Huber : au programme Schubert,
Mahler, Ives, Schönberg et Eisler et le 6, place à la soprano Françoise
Masset accompagnée par Dana Ciocarlie (Milhaud, Ravel, Honegger).
Le TCE propose le 10 février, Theodora de Haendel, un oratorio en
trois actes dirigé par Harry Bicket avec Rosemary Joshua (Theodora),
Sarah Connolly (Irene), Andrew Kennedy (Septimius), Tim Mead
(Didymus) et Neal Davies (Valens), avec les membres de The English
Concert. Les 11 et 13, Gala Monteverdi interprété par une pléiade d’artistes dont Rolando Villazón, Magdalena Kožená, Topi Lehtipuu et
Katherine Watson dirigée par Emmanuelle Haïm et Le Concert d’Astrée.
Concert Puccini le 20 février avec Le Villi, opéra en deux actes de 1884
de Belgique placé sous la baguette de Gareth Jones (« Héros
Légendaires » de Wagner et Mozart) dans le cadre du cycle Grandes Voix,
le 15 Anja Kampe et Gary Lehman étant attendus pour un concert
Wagner (extraits de Tristan und Isolde et Die Walküre) avec le National de
Lille dirigé par Jean-Claude Casadessus.
Du 17 au 25 février reprise de la merveilleuse production de Pelléas
et Mélisande de Debussy réalisée en 2010 par Stéphane Braunschweig
avec Louis Langrée dans la fosse avec l'Orchestre des Champs-Élysées.
Comme en 2010 le baryton Phillip Addis incarnera Pelléas et Karen
Vourc'h sera Mélisande, en compagnie de Laurent Alvaro (Golaud),
Jérôme Varnier (Arkel), Sylvie Brunet (Geneviève).
Sophie Karthäuser chantera des lieder de Schubert et de Schumann
ainsi que des mélodies de Honegger, Poulenc, Satie et Chabier avec le pianiste Eugène Asti le 8 février au Théâtre des Abbesses.
Au Théâtre du Palais Royal, récital de Max-Emmanuel Cencic le 10
(Rossini, Donizetti, Mozart), au piano Masuko Otsuka, et de Waltraud
Meier le 24 avec Joseph Breinl au piano.
A la Cité de la Musique, concert Haendel (Dixit dominus) et Purcell
(Didon et Enée) le 21 proposé par Simone Kermes et l'ensemble Musica
Aeterna dirigé par Theodor Currentzis.
Enfin le 10 février, la Salle Gaveau affiche « La Passion Lemieux »
avec la contralto Marie Nicole Lemieux rejointe par le pianiste Daniel
Blumenthal pour un programme où l'on pourra entendre des pages signées
Ravel, Weil, Schubert, Barber, Poulenc, Brahms, Offenbach, Tchaïkovsky,
De Falla…
Ailleurs en France : A Nice du 16 au 20 février, nouvelle production
de Semele de Haendel réalisée par Jakob Peters-Messer et dirigée George
Petou.
«Pelléas et Mélisande» en 2010 © Elisabeth Carecchio pour l’Opéra-Comique
que dirigera Paolo Carignani avec Ermonela Jaho (Anna), Thiago
Arancam (Roberto), Dimitri Platanias (Guglielmo), Marcello Scuderi
(récitant), l'Orchestre National de France, œuvre précédée par des airs
extraits de I Pagliacci, Andrea Chénier, Loreley, Francesca da Rimini.
Comme toujours la Salle Pleyel proposera tout au long du mois de
février d'ambitieux concerts et notamment le 5 une version concertante de
Boris Godounov qui réunira Ferrucio Furlanetto, Ain Anger, Anastasia
Kalagina, Garry Magee, le Chœur Orfeon Donostiarra et le National du
Capitole de Toulouse dirigé par Tugan Sokhiev. Le 6 Sandrine Piau, Sara
Mingardo, Werner Güra et Christopher Purves dirigés par Laurence
Equilbey interpréteront le Miserere de Zelenka et le Requiem de Mozart.
Le 8 le baryton Bryn Terfel sera en concert avec l'Orchestre National
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«Dialogues des Carmélites» © Vincent Pontet-WikiSpectacle
Vu et entendu : Au Théâtre des Cjamps-Elysées, parcours sans faute
pour les Dialogues des Carmélites de Poulenc réalisés par un Olivier Py
transfiguré (après un ratage absolu à Bastille dans Aïda), un chef décidément passionnant, Jérémie Rhorer et une distribution parfaite : Patricia
Petibon se surpassant en Blanche, Véronique Gens admirable Lidoine,
Sophie Koch altière Mère Marie et Rosalind Plowright bouleversante
Croissy.
François Lesueur
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chronique des concerts
Tout un monde
lointain
Un Järvi chasse l'autre. C'est à Kristian, fils de Neeme et
frère de Paavo qu'il revient de diriger cette étonnante
soirée latino-américaine à la tête de l'orchestre de Paris.
Les accents exotiques de Danzón n°2, du Mexicain Arturo Márquez se
mêlent à une nostalgie sensuelle de bon aloi. Donné en création française, le
Concerto Nazareth, pour guitare et orchestre de Paulo Aragão, en hommage au compositeur brésilien emblématique Ernesto Nazareth, est ici interprété par le dédicataire Yamandu Costa, Brésilien lui aussi. Aux côtés de son
compatriote accordéoniste Alessandro Bebê Kramer, il conclut la première
partie par deux bis d'une virtuosité redoutable : Bachbaridade de Costa, puis
«Pixinguinha», le premier des Retratos de Radamés Gnattali. La très hollywoodienne Troisième Symphonie de Copland occupait à elle seule la seconde partie du programme. Cette partition n'avait pas fait son retour dans le
répertoire de l'orchestre depuis un concert donné par le compositeur peu
avant sa disparition. Célébration de la victoire des alliés, elle se présente
sous la forme d'une immense fresque sonore et colorée dans laquelle circulent des thèmes folkloriques.
Toujours à Pleyel, on pouvait également écouter la suite de l'intégrale
des symphonies et concertos de Chostakovitch sous la baguette de Valery
Gergiev. L'orchestre du Mariinsky enchaîne à un train d'enfer les représentations, répétant même une heure avant chaque concert pour quelques ultimes raccords. La 9e symphonie (qui valut l'opprobre de la caste dirigeante
au compositeur) brille d'une lumière sombre inédite, principalement dans les
échanges cordes-bois et la manière éminemment russe de tenir les thèmes.
Le Concerto pour piano et trompette fait dialoguer les doigts d'acier du
jeune Daniil Trifonov et la virtuosité lumineuse de Timur Martynov. Le martèlement rythmique fait de cette musique une luxuriante mécanique sonore
que rien ne semble arrêter. La bouleversante 4e symphonie concluait un programme déjà très riche en émotions. La combinaison des timbres et la force
expressive du propos conduisent à une inexorable progression vers un abîme
méditatif. Le public ne s'y trompe pas et manifeste vigoureusement son
enthousiasme.
Le concert suivant associait la 14e et la 5e Symphonie – puissant
contraste entre une œuvre quasi liturgique, regroupant des textes chantés
d'Apollinaire, Lorca ou Rilke et la jubilation rutilante d'une musique plus
libérée. Les solistes de la première partie ne sont pas tous du même niveau,
à commencer par un Mikhail Petrenko décidément bien terne, largement
supplanté par le lyrisme éperdu de Veronika Djoeva. Gergiev trouve dans le
final de la 5e symphonie un façon très personnelle de traduire l'énergie des
musiciens en une marche en avant que rien ne semble arrêter.
Elliott Carter sous les ors du Palais Garnier… symbole insolite et
remarquable de l'hommage rendu par les musiciens de l'orchestre de l'Opéra
de Paris à cette immense figure de la création contemporaine. Le violoncelliste Alexis Descharmes a imaginé ce salon musical dominical sans entracte, en associant une dizaine de pièces représentatives de la musique de
chambre du compositeur américain avec des extraits de l'excellent documen-
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taire de Frank Scheffer (Elliott Carter :
A Labyrinth of Time). Cette option offre
l'avantage de présenter à un public pas
forcément aguerri un portrait très
détaillé à travers des œuvres représentatives des différentes périodes de création de Carter. La réalisation technique
sans faille est d'autant plus remarquable
que ce répertoire est loin de constituer
l'ordinaire de ces musiciens. Didactique
tant dans la forme que dans le contenu,
le programme mêle œuvres de jeunesse
et de la maturité du compositeur récemment disparu.
Agenda chargé pour le quatuor
Diotima. Après Sao Paulo, Berlin,
Edimburgh
en
passant
par
Alexis Descharmes
Huddersfield, les quatre musiciens
© Philippe Gontier
posent leurs valises au Théâtre des
Bouffes du Nord. Le programme présente trois univers fondamentalement
différents et complémentaires : Berg, Schubert et Pesson. L'opus 3 du premier alterne des espaces-temps tantôt en expansion, tantôt resserrés, avec
des alliages de timbres interlopes d'une densité peu commune. Vingt ans
après Respirez, ne respirez plus, Gérard Pesson revient à l'écriture pour quatuor avec Farrago, troisième opus du genre. On retrouve sans surprise derrière le trompe-l'œil furieusement dilettante, un métier aguerri et la maîtrise
absolue d'une palette d'effets. Les modes de jeu alternent fragmentations et
affects dans une stratification fragile d'impacts sensitifs qui sollicitent l'écoute d'un bout à l'autre de la pièce. Aux côtés de la violoncelliste Anne
Gastinel, les Diotima concluent la soirée avec le Quintette à cordes de
Schubert. Dès les premières notes, on a la confirmation d'une adéquation
avec cet univers pictural et littéraire. Quelques tensions parasites dans les
changements de registres surgissent çà et là dans l'allegro initial mais la plénitude suspendue de l'adagio est, elle, proprement stupéfiante. La lumière
diffuse et les alliages de timbres fluctuent au gré des interventions du
Goffriller d'Anne Gastinel, dont la sonorité de grand orgue finit par noyer
l'équilibre général à de nombreuses reprises. Avec l'allegretto furibond, la
concentration finit par l'emporter et les lignes se resserrent fort heureusement. Sans être pleinement convaincant, on ne pourra donc pas rester insensible à cette proposition hors des sentiers battus.
Voyageons à présent vers un tout autre univers à présent. Un titre mystérieux (Wisshhh) sert de carte de visite pour pénétrer dans l'univers subtil
de la Compagnie Caryatides. Danse et voix se mêlent l'une à l'autre dans un
effleurement sensuel avec, en trame de fond, les sensations liées au quatre
éléments. C'est dans le cadre des concerts jeune public, organisés par l'Opéra
de Paris, que se déroule ce moment de grâce pour petits et grands. Le hautecontre Mathieu Jedrazac nous guide de la voix et du violon alto dans un
monde alternativement minéral,végétal, aquatique et aérien, reconstitué à
l'aide de projections vidéos. Evguenia Chtchelkova et Lionel Bègue évoluent en contrepoint chorégraphié sous forme de deux soli et deux duos en
lien étroit avec la respiration et les textures du matériau pictural. Entre souffle suspendu et rugosité terrienne, le corps des danseurs devient à son tour
une toile où se déploie la palette de sentiments et d'émotions. Un vrai grand
moment de poésie.
David Verdier
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ANTOINE (01.43.38.74.62)
u Fabrice Luchini lit Céline : Voyage
au bout de la nuit ( la banlieue ) - jusqu’au 12 mars
ATELIER (loc. 01.46.06.49.24)
u Savannah Bay de Marguerite Duras
- m.e.s. Didier Bezace - du 4 février au
9 mars
u Le Square de Marguerite Duras m.e.s. Didier Bezace - du 11 février au
9 mars
u Marguerite et le Président de
Marguerite Duras - m.e.s. Didier
Bezace - du 12 février au 9 mars
BOUFFES DU NORD
(loc. 01.46.07.34.50)
u La Maison de Bernarda Alba de
Federico García Lorca - m.e.s. Carole
Lorang - du 7 au 15 février
CARTOUCHERIE - LA TEMPÊTE
(loc. 01.43.28.36.36)
u Homme pour homme de Bertolt
Brecht - m.e.s. Clément Poirée - jusqu’au 16 février
u Corps étrangers de Stéphanie
Marchais - m.e.s. Thibault Rossigneux
- jusqu’au 16 février
CHAILLOT (01.53.65.30.00)
u Nancy. Interview de Claude
Bardouil - du 4 au 8 février
u Kabaret warszawski - m.e.s.
Krzysztof Warlikowski - du 7 au 14
février
COLLINE (rés. 01.44.62.52.52)
u Le canard sauvage de Henrik
Ibsen
m.e.s.
Stéphane
Braunschweig - jusqu’au 15 février.
u Re-Walden d’après «Walden ou la
Vie dans les bois» de Henry David
Thoreau - m.e.s. Jean-François
Peyret - jusqu’au 15 février.
COMÉDIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES
(01.53.23.99.19)
u Ensemble et séparément de
Françoise Dorin - m.e.s. Stéphane
Hillel - avec Jean Piat et Marthe
Villalonga - jusqu’au 13 avril
COMÉDIE FRANÇAISE
SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15)
u Dom Juan ou le festin de pierre de
Molière - m.e.s. Jean-Pierre Vincent
- jusqu’au 9 février
u Antigone de Jean Anouilh - m.e.s.
Marc Paquien - jusqu’au 2 mars
u Psyché de Molière - m.e.s.
Véronique Vella - jusqu’au 4 mars
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u Candide de Voltaire - m.e.s.
Emmanuel Daumas - jusqu’au 16
février
u Le Songe d’une nuit d’été de
Shakespeare - m.e.s. Muriel MayetteHoltz - du 8 février au 15 juin
u Un chapeau de paille d’Italie
d’Eugène Labiche - m.e.s. Giorgio
Barberio Corsetti - du 21 février au 13
avril
u Andromaque de Jean Racine m.e.s. Muriel Mayette-Holtz - du 28
février au 31 mai
STUDIO-THÉÂTRE (01.44.58.98.98)
u Candide de Voltaire - m.e.s.
Emmanuel daumas - jusqu’au 16
février
VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00)
u Triptyque du naufrage :
Lampedusa Snow de et m.e.s. Lina
Prosa - jusqu’au 4 février
u Triptyque du naufrage :
Lampedusa Beach de et m.e.s. Lina
Prosa - du 1er au 3 février
u Triptyque du naufrage :
Lampedusa Way de et m.e.s. Lina
Prosa - du 1er au 5 février
u La visite de la vieille dame de
Dürrenmatt - m.e.s. Christophe Lidon
- du 19 février au 30 mars
GUICHET MONTPARNASSE
(01.43.27.88.61)
u Lettre d'une inconnue de Stefan
Zweig - m.e.s. William Malatrat - jusqu’au 5 avril
HÉBERTOT (01.43.87.23.23)
u Des fleurs pour Algernon de Daniel
Jeyes, Gérard Sibleyras - m.e.s. Anne
Kessler - du 7 février au 30 mars
u Le Roi se meurt d’Eugène Ionesco m.e.s. Georges Werler - avec Michel
Bouquet, Juliette Carré - du 26
février au 30 mars.
LE MONFORT (www.lemonfort.fr)
u Blue Jeans - marionnettes avec
Yeung Faï - du 4 au 15 février.
MUSÉE DU LOUVRE
Robert Wilson / Living Rooms, jusqu’au 17 février
ODÉON EUROPE (01.44.85.40.40)
u Les Fausses Confidences de
Marivaux, avec Isabelle Huppert m.e.s. Luc Bondy - jusqu’au 23 mars.
RANELAGH (loc. 01.42.88.64.44)
u Comtesse de Ségur née
Rostopchine de Joëlle Fossier - m.e.s.
Pascal Vitiello - avec Bérengère
Dautun - jusqu’au 30 mars.
RIVE GAUCHE (01.43.35.32.31)
u La trahison d'Einstein de ÉricEmmanuel Schmitt - m.e.s. Steve
Suissa - avec Francis Huster et JeanClaude Dreyfus - jusqu’au 30 mars
ROND-POINT (0.892.701.603)
u Clôture de l'amour de et m.e.s.
Pascal Rambert - du 22 février au 2
mars
FESTIVAL LES CHIENS DE NAVARRE :
u Une raclette - création collective m.e.s. Jean-Christophe Meurisse - du
5 au 16 février
u Regarde le lustre et articule - création collective - m.e.s. JeanChristophe Meurisse - du 8 février au
2 mars
u Nous avons les machines - création
collective - m.e.s. Jean-Christophe
Meurisse - du 19 février au 2 mars
THÉÂTRE LABORATOIRE
(01.43.40.79.53)
u L’Adieu à l’automne d’après Jon
Fosse - m.e.s. Elizabeth Czerczuk création musicale Matthieu Vonin jusqu’au 16 mars.
Théâtre Hébertot
Le Roi se meurt
Il y avait dans un pays imaginaire un vieux roi qui croyait tenir dans son poing un pouvoir éternel. Puis un jour,
tout bascule dans l’anarchie et dans l’horreur. Le roi doit alors accepter l’inéluctable, le grand rendez-vous avec la
mort. Mais va-t-il mourir ?
Lors de 50
représentations exceptionnelles,
Michel
Bouquet reprend le rôle
principal du «Roi se
meurt»
d’Eugène
Ionesco, un rôle dans
lequel il s’est illustré à
maintes reprises, et
grâce auquel il a remporté deux Molières,
dont celui du meilleur
acteur en 2005. Il sera
accompagné sur scène
par la comédienne
Juliette Carré.
La mise en scène
est signée Georges
Werler.
Michel Bouquet dans «Le Roi se meurt» lors d’une tournée hors Paris © Bernard Richebé
. Du 26 février au 30 mars
Réservation en ligne sur : http://theatrehebertot.com/accueil / tél. 01.43.76.23.23
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Atelier Grognard, Rueil-Malmaison
Les peintres du paysage provençal
La Ville de Rueil-Malmaison poursuit sa programmation artistique autour des grands courants picturaux et présente à l’Atelier Grognard un ensemble
d’œuvres d’artistes de l’École de Marseille.
Ces artistes, attirés par la lumière et la chaleur du
Midi, originaires de Provence ou d’autres régions, ont
pour noms Félix Ziem, Adolphe Monticelli, mais aussi
Charles Camoin, Auguste Chabaud, ou encore Paul
Signac, Henri Manguin et Raoul Dufy...
Le paysage a pris une part capitale dans la révolution plastique du XIXe siècle, et le paysage provençal
a agi comme un facteur stimulant sur les peintres qui se
sont établis dans cette contrée. Si leur création jouit
d’une reconnaissance universelle, l’œuvre des artistes
qui les ont précédés en Provence est singulièrement
méconnue
L’exposition comprend une centaine de pièces,
provenant en majorité du Musée Regards de Provence,
à Marseille, et du Musée de l’Annonciade, à SaintTropez. Son but est de mettre en évidence les expériences et les innovations de l’école de Marseille et
d’analyser son influence prépondérante sur la
représentation du paysage au milieu du XIXe siècle.
Paul Guiguou «Paysans devant la Saint-Victoire», 1867
Huile sur toile, 55 x 80 cm. Collection Fondation Regards de Provence
Atelier Grognard
Rueil Malmaison
l LES PEINTRES DU PAYSAGE PROVENÇAL – jusqu’au 17 mars.
Bibliothèque Nationale
l VERDI, WAGNER ET L’OPÉRA DE
PARIS – jusqu’au 16 mars.
Centre culturel suisse
l JULIEN CHARRIÈRE – jusqu’au 23
février
l OLIVIER MOSSET – jusqu’au 30
mars.
l AUGUSTIN REBETEZ – Du 28 février
au 30 mars.
Centre Pompidou
l LE SURRÉALISME ET L’OBJET – jusqu’au
3 mars
l CLAUDE SIMON, photographe –
jusqu’au 10 mars.
l DONATION FLORENCE ET DANIEL
GUERLAN, œuvres sur papier – jusqu’au 31 mars.
Cité de l’Architecture
l 1925, QUANT L’ART DÉCO SÉDUIT LE
MONDE – jusqu’au 17 février.
Fondation Cartier pour l’art
contemporain
l AMÉRICA LATINA 1960-2013, photographies – jusqu’au 6 avril
Grand Palais
l RAYMOND DEPARDON. Un moment
si doux – jusqu’au 10 février
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Hôtel de Ville
l BRASSAÏ, pour l’amour de Paris –
jusqu’au 8 mars.
Institut du Monde arabe
l « VOUÉS À ISHTAR. SYRIE, JANVIER
1934, ANDRÉ PARROT DÉCOUVRE
MARI » – jusqu’au 4 mai
Jeu de Paume
l ROBERT ADAM - L’endroit où nous
vivons – du 11 février au 18 mai
l MATHIEU PERNOT - La Traversée –
du 11 février au 18 mai
La Maison Rouge
l IL ME FAUT TOUT OUBLIER - Berlinde
de Bruyckere et Philippe
Vandenberg – du 13 février au 11
mai
l L’ASILE DES PHOTOGRAPHIES Mathieu Pernot et Philippe
Artières – du 13 février au 11 mai
Musée d’art moderne
l DECORUM. Tapisseries et tapis
d’artistes – jusqu’au 9 février
l SERGE POLIAKOFF. Le rêve des
formes – jusqu’au 23 février
l ZENG FANZHI – jusqu’au 16 février
Musée des arts décoratifs
l DANS LA LIGNE DE MIRE, SCÈNES DU
BIJOU CONTEMPORAIN EN FRANCE –
jusqu’au 2 mars
l SECRETS DE LA LAQUE FRANÇAISE : LE
VERNIS MARTIN – du 13 février
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n
. A voir jusqu’au 17 mars 2014
au 8 juin.
Musée Carnavalet
l ROMAN D’UNE GARDE-ROBE, de la
Belle Époque aux années 30 – jusqu’au 16 mars
Musée Cognacq-Jay
l FEUILLES D'HISTOIRES, vie quotidienne et grands événements à travers
l'éventail en France (XVIIIe s) – jusqu’au 9 mars
Musée Dapper
l INITIÉS, BASSIN DU CONGO &
MASQUES DE ROMUALD HAZOUMÈ –
jusqu’au 6 juillet
Musée Eugène Delacroix
l DELACROIX EN HÉRITAGE. Coll.
Étienne Moreau-Nélaton – du 11
décembre au 17 mars.
Musée du Louvre
l LE FONDS PHOTOGRAPHIQUE DES
ANTIQUAIRE
GEORGES JOSEPH
DEMOTTE ET LUCIEN DEMOTTE – jusqu’au 25 mars.
l NEW FRONTIER III - Portraits
anglo-américains à l’heure de la
Révolution – jusqu’au 28 avril
l LE CIEL EST PAR-DESSOUS LE TOIT…
Dessins pour les plafonds parisiens du Grand Siècle – du 20
février au 19 mai
Musée Maillol
l ETRUSQUES. Un hymne à la vie –
d
a
jusqu’au 9 février
l SERGE POLIAKOFF. Gouaches de
1948 à 1969 – jusqu’au 9 février
Musée Marmottan-Monet
l LES IMPRESSIONNISTES EN PRIVE. 100
chefs-d’œuvre de collectionneurs
– du 13 février au 6 juillet
Musée d’Orsay
l GUSTAVE DORÉ (1832-1883).
L’imaginaire au pouvoir – du 11
février au 11 mai
Musée Rodin
l RODIN, la lumière de l’antique –
jusqu’au 16 février
Musée de la Vie Romantique
l ESQUISSES PEINTES DE L’ÉPOQUE
ROMANTIQUE – jusqu’au 2 février
Musée Zadkine
l VOYAGE DANS L'ANCIENNE RUSSIE –
jusqu’au 13 avril
Petit de Tokyo
l L’ÉTAT DU CIEL [partie 1] – du 14
février au 7 septembre.
Pinacothèque
l GOYA ET LA MODERNITÉ – jusqu’au
16 mars
l LA DYNASTIE BRUEGHEL – jusqu’au
16 mars
l CHU TEH-CHUN, LES CHEMINS DE
L'ABSTRACTION – jusqu’au 16 mars
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GENEVE
concerts
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u 1.2. : AHMAD JAMAL piano, avec
REGINALD VEAL basse, HERLIN RILEY
batterie, MANOLO BADRENA percussion. Victoria Hall à 20h30 (loc.
Ticketcorner, T 0900 800 800, La
Poste, Manor, CFF, Globus, Centre
Balexert, La Praille, Fnac)
u 3.2. : Les Grands Interprètes.
QUATUOR HUGO WOLF & XAVIER
PHILLIPS, violoncelle. Conservatoire
de Musique à 20h (loc. Service culturel Migros Genève, Stand Info
Balexert, Migros Nyon-La Combe)
u 9.2. : QUATUOR DE GENÈVE & DIDIER
PUNTOS, piano (Mozart - Quatuor
avec piano K 478 & Dvorak Quintette avec piano opus 81).
Musée d’Art et d’Histoire, salle des
Armures, à 11h
u 10.2. : Temps & Musique. QUATUOR
SIGNUM (Haydn, Schnittke, Dvořák).
Conservatoire de Genève à 20h
(billetterie : Service culturel Migros,
Migros Nyon-La Combe, Balexert)
u 11.2. : LA VOIX : PRÉSENCE - ABSENCE
2. Jamilia Jazylbekova, voix, Brice
Pauset, Gertraud Mariam Zotter,
récitants, Élèves des écoles primaires, Ensemble Contrechamps, dir.
Michael Wendeberg (Barden,
Jazylbekova, Lachen-mann). Studio
Ernest-Ansermet à 20h / 19h : présentation avec Jamilia Jazylbekova
(billetterie ouverte 45 min. avant le
concert / ou rés. sur : www.contrechamps.ch/reserver)
u 12.2. : Série Grands Classiques.
OSR, dir. Neeme Järvi, LARS VOGT,
piano (Brahms, Grieg). Victoria Hall à
20h (Tél. 022/807.00.00 / E-mail:
[email protected])
u 13.2. : Migros-pour-cent-culturelclassics. ORCHESTRE DE CHAMBRE DE
POLOGNE, dir. et violon MAXIM
VENGEROV (Mozart, Tchaïkovski).
Victoria Hall à 20h (loc. SCM
022/319.61.11)
u 14.2. : Série Répertoire. OSR, dir.
Neeme Järvi, LARS VOGT, piano
(Brahms, Grieg). Victoria Hall à 20h
(Tél. 022/807.00.00 / [email protected])
u 14.2. : Les Grands Interprètes.
QUATUOR BELCEA. Conservatoire de
Musique à 20h (loc. Service culturel
Migros Genève, Stand Info Balexert,
Migros Nyon-La Combe)
u 19.2. : Série Symphonie. OSR, dir.
Charles Dutoit, LOUIS LORTIE, piano
(Mozart, Respighi). Victoria Hall à
20h (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected])
u Dimanche 23.2. : Amarcordes.
CONCERT
FORMATION
(Haydn
Boccherini - quatuors et quintettes).
Moulin en Clarens 17h (réservation
sur http://www.amarcordes.ch/)
u 25.2. : Les Dissonances. DAVID
GRIMAL, violon, JULIA GALLEGO, flûte,
ALEXANDRE GATTET, hautbois, BRICE
PAUSET, clavecin. (Mozart). Victoria
Hall à 15h et 20h (loc. Espace Ville
de Genève, Grütli, Genève
Tourisme, Cité Seniors, Centrale
Billetterie T 0800 418 418, Service
culturel Migros Genève)
u 25.2. : Les Grands Interprètes.
QUATUOR DE JÉRUSALEM. Conservatoire de Musique à 20h (loc. Service
culturel Migros Genève, Stand Info
Balexert, Migros Nyon-La Combe)
u 27.2. : Concert de soirée No. 4. DE
LONDRES À BÂLE. L’OCG, dir. Arie Van
Beek, Ufuk & Bahar Dördüncü, pianos, Francois Volpé & Sébastien
Cordier, percussions (Haydn,
Bartók). BFM à 20h (loc.
022/807.17.90 / [email protected]
ou www.ticketportal.com)
u 28.2. : Les vendredis de l’ethno.
XHEMALI BERISHA ET SKAROS. Musique
grecque et albanaise. AMR-Sud des
Alpes à 21h30 (prélocation au
022/716.56.30)
FESTIVAL ANTIGEL
du 1er au 16 février (billetterie :
Fnac, Service culturel Migros, Petzi
ou Gelatomania 022/901-13.00
/[email protected])
u 1.2. : DORIAN WOOD. Le Chat Noir
à 20h30
u 3.2. : Le compositeur PHILIP GLASS
& le violoniste TIM FAIN (œuvres les
plus récentes de Philip Glass).
Victoria Hall à 20h30
u 6.2. : AGNES OBEL. Victoria Hall à
20h30
u 6.2. : SUZANNE VEGA. Temple de
Chêne-Bougeries à 20h30
u 7.2. : JAY-JAY JOHANSON, pop. Salle
des fêtes du Lignon à 20h30
u 7.2. : KEATON HENSON, folk-pop.
Temple de Chêne-Bougeries à
20h30
u 8.2. : ADAM GREEN, Special
Acoustic Show. Centre communal
de Genthod à 20h30
u 15.2. : TAMIKREST, musique du
désert. MàD à 20h30
théâtre
u Jusqu’au 2.2. : POUR UN OUI OU POUR
UN NON de Nathalie Sarraute, m.e.s.
René Loyon, accueil. Théâtre des
Amis (rens. 022/342.28.74)
u Jusqu’au 2.2. : L’ENTÊTEMENT de
a
g
Rafael Spregelburd, m.e.s. F. Polier.
Le Grütli, sam à 19h, dim à 18h ([email protected] / 022/888.44.88)
u Jusqu’au 2.2. : JE SUIS LE VENT de
Jon Fosse. création par la Cie De
nuit comme de jour, m.e.s.
Guillaume Béguin. Théâtre du Loup,
sam à 19h, dim à 17h (rés.
022/301.31.00)
u Jusqu’au 2.2. : COUCOU ! NOUS SOMMES TOUS DES PETITS SUISSES DADAÏSTES,
studio d’action théâtrale. Opéra futurible/dadaïste. Le Galpon (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 h avant
le début de l’événement - mail :
[email protected])
u Jusqu’au 2.2. : DIAGNOSTIC : HAMLET
inspiré de Shakespeare, m.e.s. María
Castillo, création. Théâtre Alchimic,
sam et dim à 19h (rés. 022/301.68.38
/ www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Jusqu’au 2.2. : CHARLES-EDOUARD,
PAYEZ-VOUS ENFIN UN BANQUIER! de et
par Lionel Rudaz, m.e.s. Gaspard
Boesch. Au Casino-Théâtre, sam à
19h, dim à 17h (rés. 022/793.54.45 ou
[email protected])
u Jusqu’au 2.2. : RÉCITS DE FEMMES de
Dario Fo et Franca Rame, m.e.s.
Patrick Mohr, Michele Millner, Naïma
Arlaud. La Comédie de Genève, sam
19h, dim 17h (loc. : 022/320.50.01 /
[email protected])
u Jusqu’au 9.2. : LE MALADE IMAGINAIRE de Molière, m.e.s. Jean Liermier.
Théâtre de Carouge, Salle FrançoisSimon, mar, mer, jeu et sam à 19h /
ven à 20h / dim à 17h (billetterie :
022/343.43.43 - [email protected])
u Jusqu’au 16.2. : UN AVENIR HEUREUX
de Manon Pulver, m.e.s. Nathalie
Cuenet. Le Grütli, à 20h, dim à 18h.
Relâche lun (billetterie : [email protected] / 022/888.44.88)
u Jusqu’au 16.2. : LE RÉVIZOR d’après
Nicolas Gogol, m.e.s. Evelyne
Castellino. Par les arTpenteurs.
Théâtre de la Parfumerie, ma-je-ve à
19h, me-sa-di à 17h (rés.
022/341.21.21)
u Du 3 au 15.2. : Off. AU BORD DU
MONDE par Valentine Sergo. Théâtre
Saint-Gervais, Salle Isidore Isou,
7ème étage - L’Atelier, mar-jeu-sam
à 20h30, lun-mer-ven à 19h (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u 4.2. : LE BONHEUR d’Eric Assous.
Théâtre du Léman à 20h30 (loc.
www.theatreduleman.com)
u 4, 5, 7, 8, 9.2. : CINÉMATIQUE, de et
avec Adrien Mondot, dès 7 ans.
Théâtre Am Stram Gram, mar + ven
à 19h, mer à 15h, sam + dim à 17h
(Loc. 022/735.79.24 et Service
Culturel Migros)
u Du 4 au 7.2. : MISSION de David
Victoria Hall
David Grimal
La série Classiques
Alternances accueille le
violoniste français David
Grimal et l’ensemble
Dissonances pour une
soirée consacrée à
l’Intégrale des concertos
pour violon et orchestre
de Mozart.
Pour ce projet un peu
particulier, David Grimal
est aidé par Brice Pauset
qui sera au clavecin pour
y interpréter un continuo
de sa composition, dans le
style de Mozart, ainsi que
des cadences.
Quant à l’orchestre,
il sera de taille assez
réduite, avec des vents
David Grimal © Gilles Abegg
anciens.
Pour David Grimal, Mozart est un mélange de complexité et de simplicité. A constater “sur pièce“ lors de cette soirée sous forme de laboratoire
musical.
. Mardi 25 février 2014 à 15h et 20h
Location : Service culturel Migros et Espace Ville de Genève, Grütli, ...
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Temple Saint-Gervais Genève
Gli Angeli
Lors de son concert de février, l’ensemble Gli Angeli poursuivra son
Intégrale des Cantates de Bach avec les pièces BWV 55, 58, 170.
Cette soirée sera
également l’occasion
de mettre en valeur les
voix uniques et rares à
Genève de Carlos
Mena et de Hans-Jörg
Mammel, dans deux
des plus célèbres cantates pour voix seule de
l’œuvre du Cantor.
Hans Jörg Mammel
. Lundi 10 février 2014, 20h00
Billetterie Service culturel Migros
A noter que ce concert sera également donné le dimanche 9 février à 17h à la
Chapelle Notre-Dame de Compassion, Bulle (loc. Société des Concerts de la Ville de Bulle)
Van Reybrouck, m.e.s. Raven Ruëll.
La Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim
17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected])
u Du 6 au 8.2. : Off. TESTIMONY RÉCITATIF d’après Testimony, recitative
de Charles Reznikoff, Henri Jules
Julien. Théâtre Saint-Gervais, Salle
Marieluise Fleisser, 2ème sous-sol grande salle, jeu-sam à 19h, ven à
20h30 (loc. 022/908.20.20 ou
www.saint-gervais.ch)
u Du 7 au 14.2. : LES FOURBERIES DE
SCAPIN de Jean Sclavis, m.e.s. Emilie
Valantin, adultes et ados. Théâtre
des Marionnettes à 19h, dim à 17h
(rés. 022/807.31.07)
u Du 7 au 16.2. : L'INTERROGATOIRE de
Jacques Chessex, m.e.s. Laurent
Gachoud. Théâtre Alchimic, mar et
ven à 20h30; mer, jeu, sam et dim à
19h (rés. 022/301.68.38 / www.alchimic.ch - loc. Service culturel Migros)
u Du 7 au 22.2. : C'EST DÉJÀ DEMAIN.4.
Jeunes comédiens / jeunes compagnies. Le 7 à 20h et le 8 à 19h : 1.
COUVRE-FEUX de Didier-Georges
Gabily, création, m.e.s. Ludovic
Chazaud. / Le 15 à 19h et le 16 à
17h: 2. ABYMES # VOLET 1 par Audrey
Cavelius. / Le 21 à 20h et le 22 à 19h:
3. VIENNOISERIES d’après Mademoiselle Else de Arthur Schnitzler, m.e.s.
Dorothée Thébert et Lola Riccaboni,
reprise. Théâtre du Loup (rés.
022/301.31.00)
u Du 10.2. au 2.3. : BOURLINGUER de
Blaise Cendrars, m.e.s. Darius
Peyamiras. Le Poche-Genève, lun et
ven à 20h30, mer-jeu-sam à 19h, dim
à 17h, mardi relâche (rens./rés. /loc.
022/310.37.59)
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u 11 et 12.2. : 13 À TABLE, avec Jean
Leduc, Yann Papin, m.e.s. Pierre
Palmade. Théâtre du Léman à 20h30
(loc. www.theatreduleman.com)
u Du 11 au 15.2. : Off. MON LIVRE
D'HEURES à partir de Frans Masereel,
La Fanfareduloup Orchestra.
Théâtre Saint-Gervais, Salle
Marieluise Fleisser, 2ème sous-sol grande salle, mar-jeu-sam à 19h,
mer-ven à 20h30, dim 1.6. à 18h
(loc. 022/908.20.20 ou www.saintgervais.ch)
u Du 11 au 16.2. : CABARET LEVIN #2
de Hanokh Lein, m.e.s. Hervé
Loichemol et Nalini Menamkat. La
Comédie de Genève, relâche lun,
mar-ven 20h, mer-jeu-sam 19h, dim
17h (loc. : 022/320.50.01 / [email protected])
u du 12.2. au 9.3. : LES POÈTES
MAUDITS - BAUDELAIRE, VERLAINE ET
RIMBAUD. Conception, m.e.s. et jeu :
Alain Carré. Théâtre du Crève-Cœur,
Cologny (rés. 022/786.86.00)
u Du 13 au 23.2. : TRANSMISSION par
Christophe Jaquet. Théâtre de
l’Usine (rés. 022/328.08.18 ou
www.theatredelusine.ch)
u Du 17.2. au 2.3. : NOTA BÉBÉS de et
m.e.s. Guy Jutard, de 1 à 3 ans.
Théâtre des Marionnettes, nombreuses séances de 20 min. (rés.
022/807.31.07)
u Du 18.2. au 2.3. : PORTRAIT JENS
VAN DAELE. Danse et musique avec
Jens Van Daele et l’Ensemble
Batida. Le Galpon (rés. au
022/321.21.76 au plus tard 2 heures
avant le début de l’événement mail: [email protected])
u dimanche 19.2. : Les Théâtrales.
LE REPAS DES FAUVES de Vahé Katcha,
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m.e.s. Julien Sibre. Par la Cie Minus
et Cortex. BFM à 17h (Rés.
022/364.30.30 ou Fnac)
u Du 25.2. au 8.3. : MADEMOISELLE
ELSE par tg STAN - Ingmar
Bergmann. Théâtre Saint-Gervais,
Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Du 25.2. au 8.3. : APRÈS LA RÉPÉTITION par tg STAN - Ingmar
Bergmann. Théâtre Saint-Gervais,
Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Du 25.2. au 8.3. : SCÈNE DE LA VIE
CONJUGALE par tg STAN - Ingmar
Bergmann. Théâtre Saint-Gervais,
Salle Marieluise Fleisser, mar-jeusam à 19h, mer-ven à 20h30 (loc.
022/908.20.20 ou www.saint-gervais.ch)
u Du 25.2. au 23.3. : LE BRUIT DU
MONDE par la Paradoxe Compagnie,
m.e.s. Yves Pinguely, création.
Théâtre des Amis (rens.
022/342.28.74)
u Du 26.2. au 2.3. LE COMBAT ORDINAIRE de Manu Larcenet, Compagnie
L'outil de la ressemblance, m.e.s.
Robert Sandoz. Théâtre du Loup,
mar+jeu+sam à 19h, mer+ven à 20h,
dim à 17h (rés. 022/301.31.00)
u Du 26.2. au 5.3. : GUERRE ET PAIX
de Léon Tolstoi, m.e.s. Piotr
Fomenko. Théâtre de Carouge, Salle
François-Simon, à 19h tous les soirs
(billetterie : 022/343.43.43 [email protected])
u 26.2. : Midi Théâtre! - FOYER
MODERNE !, conception Aurélie
Cuttat et Pascale Güdel. Espaces
"bar" de la Petite et de la Grande
salle à 12h (rés. sur www.grutli.ch)
u Du 28.2. au 15.3. : ANDROMAQUE 10
- 43 d'après Jean Racine, m.e.s.
Kristian Frédric. Le Grütli, Grande
salle (sous-sol), mar-jeu-sam à 19h,
mer-ven à 20h, dim à 18h. Relâche
lun
([email protected]
/
022/888.44.88)
opéra
u 2, 5, 8.2. : SIEGFRIED de Wagner,
OSR, dir. Ingo Metzmacher, m.e.s.
Dieter Dorn. Grand Théâtre à 18h,
dim à 15h (loc. 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
u 8.2. : Festival Antigel. CONSERVATOIRE DE MUSIQUE DE GENÈVE
ORCHESTRA, dir Antoine Marguier,
avec la soprano SOPHIE GRAF (La Belle
et la Bête). Salle des fêtes du Lignon
à 15h et 17h
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u 24.2. : DMITRI HVOROSTOVSKY, récital
de romances et mélodies de
Rachmaninov, Tchaïkovski, Medtner
et Liszt. Avec Ivary Ilja au piano.
Victoria Hall à 20h (loc. Espace Ville
de Genève, Grütli, Genève
Tourisme, Cité Seniors, Centrale
Billetterie T 0800 418 418, billetterie-culture.ville-ge.ch, Fnac)
u 28.2. et 1, 2, 4, 6, 7, 8, 10.3. :
NABUCCO de Giuseppe Verdi, OSR,
dir. John Fiore, m.e.s. Roland
Aeschlimann. Grand Théâtre à
19h30, dim à 15h (billetterie :
022/322.50.50 et www.geneveopera.com/)
danse
u 4.2. : SAISONS DES BALLETS RUSSES :
SHÉHÉRAZADE, LES SYLPHIDES ET DANSES
POLOVTSIENNES de Michel Fokine,
Ballet du Kremlin de Moscou. BFM à
19h30 (billetterie : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
u 13.2. : LA BAYADÈRE. Par le Saint
Petersbourg Ballet Théâtre. Théâtre
du Léman à 20h30 (loc. www.theatreduleman.com)
u 12, 13, 14, 15, 16, 18, 19, 20.2. :
MÉMOIRE DE L'OMBRE de Gustav
Mahler, chor. Ken Ossola, création
du Ballet du Grand Théâtre, dir.
Philippe Cohen. BFM à 19h30, dim à
15h (billetterie : 022/322.50.50 et
www.geneveopera.com/)
FESTIVAL ANTIGEL
Loc. : Fnac, Service culturel Migros,
Petzi ou Gelatomania 022/901-13.00
/[email protected]
u 4 et 5.2. : SOLEILS, chor. Pierre
Droulers. Salle des fêtes du Lignon à
20h30
u 6, 7, 8 et 9.2. : ALL INSTRUMENTS,
chor. et conception Sarah Ludi.
ADC-Salle des Eaux-Vives à 21h, le 8
à 19h, le 9 à 18h
u 11 et 12.2. : DEATH OF THE POLE
DANCER, suivi de MACHO DANCER,
chor. Eisa Jocson. Undertown,
Meyrin, à 21h
u 12, 13 et et 14.2. : IDIOM 3, hip-hop
avec Rafaël Smadja, Menad Benhaça
et Tsipatron. Point Favre, ChêneBourg, à 21h, le 13 à 19h
u 13.2. : AL MENOS DOS CARAS, chor.
Sharon Fridman. Espace Vélodrome,
Plan-les-Ouates à 20h
divers
u 6.2. : MESSMER, LE FASCINATEUR.
Théâtre du Léman à 20h30 (loc.
www.theatreduleman.com)
u 15 et 16.2. : La saison des P’tits
91
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Loups. MISTER GIGI, par Nathalie
Athlan. Théâtre du Loup. Matinée à
11h, suivi d’un brunch. Après-midi à
15h, avec goûter. Dès 2 ans (rés.
022/301.31.00)
u 15 et 16.2. : Festival Antigel. DUMY
MOYI, un spectacle conçu par
François Chaignaud. Musée Ariana,
le 15 à 19h, 21h et 23h / le 16 à 17h,
19h et 20h30
u 26.2. : Laboratoire spontané. LES
YEUX BANDÉS de Jean-Claude
Grumberg, m.e.s. Julien George,
création, dès 8 ans. Théâtre Am
Stram Gram à 19h (Loc.
022/735.79.24 et Service Culturel
Migros)
LAUSANNE
concerts
92
u 9.2. : Les Concerts J.S. Bach de
Lutry. ENSEMBLE LUCERAM avec
RAFFAELLA MILANESI, soprano, dir.
Hélène Schmidt (Vivaldi, Haendel,
Scarlatti). Temple de Lutry à 17h
(Billets : Hug Musique, Grand-Pont
4, ou à l'entrée du Temple dès 16h
le jour du concert / rés. Point I,
Quai Gustave Doret, 1095 Lutry,
Tél. 021 791 47 65)
u 13.2. : OSR, dir. Neeme Järvi, LARS
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VOGT, piano (Brahms, Grieg).
Théâtre de Beaulieu à 20h15 (Tél.
022/807.00.00 / [email protected] ou
chez Passion Musique)
u 20.2. : OSR, dir. Charles Dutoit,
LOUIS LORTIE, piano (Mozart,
Respighi). Théâtre de Beaulieu à
20h15 (Tél. 022/807.00.00 /
[email protected] ou Passion Musique)
théâtre
u Jusqu’au 2.2. : DOGUGAESHI de et
m.e.s. Basil Twist. Vidy-Lausanne,
salle René Gonzalez, à 19h30, dim à
18h30,
lun
relâche
(loc.
021/619.45.45)
u Jusqu’au 2.2. : IMMORTELS de et
m.e.s. Nasser Djemaï. Vidy-Lausanne,
salle Charles-Apothéloz, mar-mer-jeusam à 19h, ven à 20h30, dim 2.2. à
18h30 (loc. 021/619.45.45)
u Jusqu’au 2.2. : WESTERN DRAMEDIES,
création collective par la 28B
Company. L’Arsenic, ma, je, sa 19h /
me, ve 20h30 / di 18h (021/625.11.36,
[email protected] )
u Jusqu’au 2.2. : MOLLY BLOOM avec
Anouk Grimberg – Production CICTThéâtre des Bouffes du Nord.
Théâtre Kléber-Méleau, me/je/sa à
19h, ve à 20h30, di 18h (rés.
021/625.84.29)
L’Arsenic
7 minutes de terreur
«7 minutes de terreur»
Le spectacle de la Compagnie Yan Duyvendak propose une réflexion sur
la communication, plus précisément sur les images télévisuelles et mentales,
sur les codes sociaux en vigueur dans notre vie, dont l’effet tend à influencer
grandement notre perception de la réalité, voire à la fausser.
Le propos, bien au-delà de la vaine parodie, joue avec l’humour et la
mélancolie, assaisonné d’une touche de sérieux et de dérision.
. du 13 au 15 février 2014
Réservation : 021/625.11.36 ou [email protected]
a
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u Jusqu’au 16.2. : LA PETITE FILLE AUX
ALLUMETTES d'Andersen, m.e.s. Julie
Annen, dès 6 ans. Le petit théâtre,
me à 17h / sa et di à 14h et 17h (rés.
www.lepetittheatre.ch)
u Du 4 au 23.2. : FRANÇOIS D’ASSISE
d’après Joseph Delteil, m.e.s. Adel
Hakim. Chapiteau Vidy-L, mar-merjeu-sam à 20h30, ven à 19h, dim à
17h (loc. 021/619.45.45)
u 6 et 7.2. : RÉCRÉATION d'après
Robert Walser, m.e.s. Danielle Bré.
La Grange de Dorigny, ma-je-sa à
19h / me-ve à 20h30 / di à 17h (rés.
021/692.21.24)
u Du 11 au 22.2. : VIELLEICHT de
Mélissa Von Vépy. Vidy-Lausanne,
salle Rene Gonzalez, à 19h30 (loc.
021/619.45.45)
u Du 11.2. au 2.3. : L’ANNIVERSAIRE
d’Harold Pinter, m.e.s. Jean-Gabriel
Chobaz. Pour les 30 ans du Théâtre
du Projecteur. Pulloff théâtres, mer
+ ven à 20h, mar, jeu + sam à 19h,
dim
à
18h
(réservations
021/311.44.22 ou www.pulloff.ch)
u Du 12 au 19.2. : CINÉMATIQUE par la
Compagnie Adrien M/Claire B. VidyLausanne, salle Charles Apothéloz, à
19h, ven à 20h30, dim à 17h30, lun
relâche (rés. 021/619.45.45 www.billetterie-vidy.ch)
u 13, 14 et 16.2. : LAPIDÉE de Jean
Naguel. Compagnie Paradoxe,
m.e.s. Jean Chollet. Espace culturel
des Terreaux, jeu à 19h, ven à 20h,
dim à 17h (loc. http://www.terreaux.org/)
u Du 13 au 15.2. : 7 MINUTES DE TERREUR par Yan Duyvendak et Nicole
Borgeat, création. L’Arsenic, je, sa
20h30 / ve 19h ([email protected] / 021/625.11.36)
u 20 et 21.2. : PRÉLUDE À L'AGONIE,
m.e.s. Sophie Perez et Xavier
Boussiron. L’Arsenic, je 19h / ve
20h30 ([email protected] /
021/625.11.36)
u Du 27.2. au 8.3. : YVONNE, PRINCESSE DE BOURGOGNE de Witold
Gombrowicz, m.e.s. Genevière Guhl.
La Grange de Dorigny, ma-je-sa à
19h / me-ve à 20h30 / di à 17h (rés.
021/692.21.24)
danse
u Du 4 au 9.2. : SHIVER, chor. Nicole
Seiler, création. L’Arsenic, ma, je, sa
19h / me, ve 20h30 / di 18h ([email protected] / 021/625.11.36)
u Du 12 au 16.2. : STRESS BIOLOGY,
chor. Corinne Rochet et Nicholas
Pettit, création. L’Arsenic, me, ve
20h30 / je, sa 19h / di 18h ([email protected] / 021/625.11.36)
u Du 20 au 23.2. : BÉJART BALLET
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LAUSANNE : LE MANDARIN MERVEILLEUX,
chor. Maurice Béjart. Opéra de
Lausanne (loc. 021/315.40.20, lunven de 12h à 18h / en ligne et infos :
www.opera-lausanne.ch)
opéra
u 5, 7, 8, 9, 12.2. : HÄNSEL ET GRETEL
d'après les Frères Grimm. Orchestre
de Chambre de Lausanne, Maîtrise
du Conservatoire de Lausanne dir.
Laurent Gay, m.e.s. Julie Beauvais.
Opéra de Lausanne (Billetterie :
021/315.40.20, lun-ven de 12h à 18h
/ en ligne : www.opera-lausanne.ch)
u 16.2. : SANDRINE PIAU & LES
PALADINS, dir. et clavecin Jérôme
Correas. Opéra de Lausanne
(Billetterie : 021/315.40.20 / en ligne
: www.opera-lausanne.ch)
u 19.2. : Midi-récitals - Artistes des
MOUSQUETAIRES AU COUVENT. Salle de
l'Opéra de Lausanne à 12h15 (billets
sur place).
AILLEURS
annecy
BONLIEU SCÈNE NATIONALE aux Haras
d’Annecy, sauf mention contraire
(rens./rés. 04.50.33.44.11 / [email protected])
u 7.2. Musée-château : TRIO
CHAUSSON, Philippe Talec, violon,
Antoine Landowski, violoncelle, et
Boris de Larochelambert, piano
u 8.2. : LES MÈRES DE FAMILLE SE
CACHENT POUR MOURIR par Constance
et Jérémy Ferrari, Humour
u 12.2. Espace Malraux, Chambéry :
TABAC ROUGE de James Thierrée
u 13 et 14.2. : LAAROUSSA de et avec
Elma et Sofiane Ouissi, danse
u 13 et 14.2. : SFUMATO de et chor.
Rachid Ouramdane, danse
u Du 25 au 27.2. : LA FAUSSE SUIVANTE
OU LE FOURBE PUNI de Marivaux, m.e.s.
Nadia Vonderheyden
annemasse
RELAIS CHÂTEAU-ROUGE à 20h30
sauf mention contraire (loc.
+33/450.43.24.24)
u 1.2. : IBRAHIM MAALOUF, Jazz
u 6 et 7.2. : SOLONELY de, m.e.s. et
avec Thomas Guerry et Camille
Rocailleux, danse
u 7 et 8.2. : LES CHEVALIERS de
Guillaume Bailliart
u 11 et 12.2. : INNOCENCE de Howard
Barker, m.e.s. Howard Barker et
Gerrard McArthur
d
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u 14.2. : PETER VON POEHL et MÉLISSA
LAVEAUX, pop folk / Blues rock
u 15.2. : UN CHIEN DANS LA TÊTE de
Stéphane Jaubertie, m.e.s. Olivier
Letellier
u 19.2. : BRASS’ ATTITUDE - Namascae
Brass
u Du 25 au 27.2. : LA PREUVE PAR L’AUTRE, chor. Bouba Landrille Tchouda,
Anne Nguyen, Farid Berki, danse
fribourg
THÉÂTRE EQUILIBRE à 20h (billetterie :
Fribourg Tourisme 026/350.11.00 /
[email protected])
u 1.2. : LE ROI SE MEURT d'Eugène
Ionesco, m.e.s. Georges Werler
u 13.2. : ROMÉO ET JULIETTE, dir. et
chor. Thierry Malandain, danse
u 15.2. : JE SUIS VIEUX (PAS BEAUCOUP
MAIS DÉJÀ) de et avec Frédéric
Recrosio, m.e.s. Jean-Luc Barbezat
u 20 et 21.2. : LE MALADE IMAGINAIRE
de Molière, m.e.s. Jean Liermier
u 26.2. : PLAN B, chor. Aurélien Bory,
m.e.s. Phil Soltanoff, danse
givisiez
THÉÂTRE DES OSSES (rés. 026/469.70.00)
u Du 9.2. au 23.3. : RIDEAU! de et
m.e.s. Gisèle Sallin
u 13 et 14.2. : L'ANNÉE DE LA BALEINE
de et avec Jacques Michel, m.e.s.
Véronique Ros de la Grange, Cie Où
Sommes-Nous, Genève. Théâtre
Alambic, Hôtel-de-Ville 4, à 19h30
(rés./loc. 027/722.94.22)
meyrin
FORUM MEYRIN à 20h30 sauf mention contraire (loc. 022/989.34.34)
u 5.2. à 19h : L'OMBRE d'Andersen,
m.e.s. Jacques Vincey
u Du 11 au 14.2. : OBLOMOV. Dorian
Rossel-Compagnie STT / O'Brother
Company
u 25.2. : VOUS DÉSIREZ?, revue hiphop - Précédé de Ma leçon de hiphop, par Céline Lefèvre - François
Berdeaux
u 28.2. et 1.3. : DE BEAUX LENDEMAINS
de Russell Banks, m.e.s. Emmanuel
Meirieu, Cie Bloc Opératoire
monthey
THÉÂTRE DU CROCHETAN à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u 12.2. Festival Scènes Valaisannes :
FRÉDÉRIC RECROSIO, m.e.s. Jean-Luc
Barbezat
u 26 et 27.2. <: COMME S'IL EN PLEUVAIT de Sébastien Thiéry, m.e.s.
Bernard Murat
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lon, Haute Ecole de Musique de
Genève (Akshelyan, Prokofiev,
Dvorak). Temple du Bas, Neuchâtel
(infos.+33 (0)4.79.33.42.71)
u 7 et 9.2. : LES DEUX GENTILSHOMMES
DE VÉRONE de Shakespeare, par la
Compagnie du Passage
u 9.2. : LA COURSE AUX CHANSONS de
Marie Nimier, m.e.s. Elizabeth
Macocco
u Du 11 au 16.2. : MARC DONNETMONAY TRANSMET SA JOIE, m.e.s. JeanLuc Barbezat
u 15 et 16.2. : LES DÉSAXÉS : SEA, SAX
& FUN, de et m.e.s. Philippe Martz
u 20.2. : GRACIAS PIAZZOLLA par Maria
de la Paz
THÉÂTRE DU POMMIER
(tél. 032/725.05.05)
u 5 et 6.2. à 20h : CLOSER de Patrick
Marber, par Le Poche-Genève, m.e.s.
Françoise Courvoisier.
u 11.2. à 20h : ALDJIA LA FEMME DIVISÉE de Jacques Probst, m.e.s.
Christian Vez
u 14.2. à 20h30 : ROUND MIDNIGHT
par la Cie Le Trio Classic Plus - Sofia
de Salis, flûte; Katja Avdeeva, piano;
Vladimir Virok-Stoletov, violoncelle
u 22 et 23.2. à 20h30 : OLD WINE IN
NEW BOTTLES par la Cie Les Chemins
la chaux-fds montreux
ARC EN SCÈNES. CENTRE NEUCHÂTELOIS
DES ARTS VIVANTS sauf mention
contraire (loc. 032/967.60.50 ou
www.arcenscenes.ch/)
u 1.2. : MÜNCHENER KAMMER-ORCHESTER, dir. Alexander Liebreich, VILDE
FRANG, violon (Rossini, Mendelssohn). Salle de Musique à 20h15
u 6 et 7.2. TPR : LE COMBAT ORDINAIRE de M. Larcenet, m.e.s. R.Sandoz
u 7.2. : PIOTR ANDERSZEWSKI, piano
(Bach). Salle de Musique à 20h15
u 13.2. : LE MALADE IMAGINAIRE de
Molière, m.e.s. Jean Liermier
u 15.2. TPR : PIERRE À PIERRE de Tian
Gombau, m.e.s. Rosa Diaz
u 19.2. : LE VOYAGE DE PENAZAR de et
m.e.s. François Cervantes
u 20.2. : ORCHESTRE DE CHAMBRE DE
BÂLE, dir. Giovanni Antonini, SOL
GABETTA, violoncelle (Mozart,
Schumann). Salle de Musique à
20h15
martigny
FONDATION GIANADDA à 20 h, dim à
17 h sauf mention contraire (loc.
027/722.39.78)
u 2.2. : I SOLISTI VENETI, dir. Claudio
Scimone
a
g
e
n
t
o
de Traverse - B. Minder, flûtes traversières et électroniques; F.
Eichelberger, clavicorde électro
acoustique et organetto; M.
Amiguet, flûtes traversières et
électroniques; W. Daiss, tape-guitare
et archiluth
nyon
USINE À GAZ sauf mention contraire
(loc. 022/361.44.04)
u 1.2. : ROCIO MÁRQUEZ, Concert
assis, Flamenco
u 9.2. : Les Matinales. QUATUOR
SIGNUM (Haydn, Dvořák). Grande
salle de la Colombière à 11h15
(billetterie : Service culturel Migros,
Migros Nyon-La Combe, Stand Info
Balexert)
onex
SPECTACLES ONÉSIENS, salle communale à 20h30 (loc. 022/879.59.99
ou SCM 022/319.61.11)
u 2 et 5.2. : Récrés-spectacle. BABAR
ET FERDINAND, Magie et musique
u 11.2. : LE VIOLON DE CUPIDON,
Concert conférence avec Luc Ferry,
Isabelle Meyer, Mirella-VadevaRuaux et l’ensemble Art-en-ciel
En tournée, puis à Genève
Le combat ordinaire
u 15.2. : NOLWENN LEROY, Tour de
l'Eau. Auditorium Stravinski, 20h15
morges
THÉÂTRE DE BEAUSOBRE à 20h
(loc. 024/471.62.67)
u 1er et 2.2. : MUMMENSHANZ 4 KIDS
u 4.2. : OPERETTA de et m.e.s. Jordi
Purtí, dir. David Costa
u 5.2. : LA ROSE TATOUÉE de
Tennessee Williams, m.e.s. Benoît
Lavigne
u 6 et 7.2. : FRÉDÉRIC RECROSIO
u 9.2. : ALDEBERT, jeune public
u 11.2. : LES GRANDS MOYENS de
Stéphane Belaïsch et Thomas
Perrier, m.e.s. Arthur Jugnot et
David Roussel
u 12 et 13.2. : HIER EST UN AUTRE JOUR
de Sylvain Meyniac et Jean-François
Cros, m.e.s. Eric Civanyan
u 18 et 19.2. : MICHAEL GREGORIO
neuchâtel
THÉÂTRE DU PASSAGE. A 20h, di à 17h
(loc. 032/717.79.07)
u 2.2. : AU-DELÀ DES FRONTIÈRES.
Orchestre des Pays de Savoie, dir.
Nicolas Chalvin, TEDI PAPAVRAMI, vio-
e
n
«Le combat ordinaire» © Guillaume Perret
La Compagnie L’outil de la ressemblance repart en tournée avec son
spectacle «Le combat ordinaire» - tiré de la bande dessinée de Manu
Larcenet parue aux éditions Dargaud.
C’est l’histoire du photographe Marco, une histoire qui nous propose
une réflexion unique sur le passage à l'âge adulte, l'acceptation de soi et
notre rapport au monde. Des escales sont agendées dans plusieurs théâtres
de Suisse romande, avant que le périple ne se termine au théâtre du Loup.
. 6 et 7 février 2014 au TPR de La Chaux-de-Fonds
. 11 février 2014 au Théâtre de Vevey
. 13 février 2014 au CO2 de Bulle
. 20 février 2014 à l'Usine à Gaz de Nyon
. du 26 février au 2 mars 2014 au Théâtre du Loup à Genève
d
a
93
m
é
m
u 13.2. : YOUN SUN NAH, Jazz
u 27.2. : UNE VIE SUR MESURE, de et
avec Cédric Chappuis
plan/ouates
ESPACE VÉLODROME, sauf avis
contraire (loc. 022/888.64.60)
u 7.2. : PIERRE LAPOINTE, Concert
u 13.2. : AL MENOS DOS CARAS par la
Compagnie Sharon Fridman, Danse
u 26.2. La Julienne : CABAN par le
Theater De Spiegel, Ballade
musicale
pully
n
t
st-julien
u 4.2. : CAMILLE CLAUDEL,
CORRESPONDANCES, m.e.s. Audrey
Lamarque et Françoise Sliwka.
L’Arande à 20h (rés. au +33
(0)4.50.75.07.54)
st-maurice
u 16.2. : GUERRE ET PAIX. Orchestre
des Pays de Savoie, dir. Nicolas
Chalvin, ESTELLE REVAZ, violoncelle
(Honegger, Haydn, El Khoury).
Théâtre du Martolet (infos.+33
(0)4.79.33.42.71)
sierre
LES HALLES à 19h30
(rés./loc. 027/722.94.22)
u Du 19.2. au 1.3. : SEULE LA MER, de
Amos Oz par le Théâtre en Flammes,
m.e.s. Denis Maillefer. Création en
résidence
sion
THÉÂTRE DE VALÈRE à 20h15, sauf mention contraire (loc. 027/323.45.61)
u 5.2. : OPERETTA par le Cor de teatrem, m.e.s. Jordi Purtí
SAISON
2013—2014
94
L’OCTOGONE, à 20h30 sauf mention
contraire (loc. 021/721.36.20)
u 6 et 7.2. : SOLOGRAPHIES, chor.
Katarzyna Gdaniec et Marco
Cantalupo, création, Danse
u 13.2. : ERIK TRUFFAZ & ENKI BILAL,
Concert Graphique
u 14.2. : LES DEUX GENTILSHOMMES de
Vérone de Shakespeare, m.e.s.
Robert Bouvier, Théâtre
u 18.2. Pour l'Art et le Lutrin : CYCLE
2 – TRIO NOTA BENE avec SHMUEL
ASHKENASI et NABUKO IMAI
(Rachmaninov, Dohnanyi, Schubert)
u 20.2. : 3 LITS POUR 8 d'Alan
Ayckbourn, m.e.s. Jean-Luc Moreau
e
JANVIER
JE 23 – L’INSOLENCE DU PRINTEMPS
de Marie Fourquet danse/théâtre
DI 26 – TANGO SENSATIONS
ME 29, JE 30 & VE 31 – JE SUIS VIEUX
(PAS BEAUCOUP MAIS DÉJÀ)
de Frédéric Recrosio Humour
FÉVRIER
ME 5 – OPERETTA par Corteatre Humour Musical
VE 14 – VIVRE EST INCURABLE,
C’EST MOURIR QUI PIQUE UN PEU
par Noël Antonini
MA 18 – LUNE AIR de Julien Cottereau Clown moderne
JE 27 – PUSH UP de Roland Schimmelpfennig
o
u 14.2. : VIVRE EST INCURABLE, C'EST
MOURIR QUI PIQUE UN PEU de et par
Noël Antonini, m.e.s. Michèle
Guigon
u 18.2. : LUNE AIR de Julien
Cottereau, m.e.s. Fane Desrues
u 27.2. : PUSH UP de Roland
Schimmelpfennig, m.e.s. Virginie
Fouchault
inspirée de Wolf Erlbruch. Par la Cie
La Bocca della Luna. Église SteClaire, je 19h | ve-sa 20h | di 17h30
(rés. au 021 923 74 50)
u 21.2. : ANAÏS RENCONTRE MALCOLM
BRAFF, jazz, dès 12 ans
u 22.2. : Midi, Théâtre! / TRACER LA
VOIE, guide pratique par les
Compagnies Frakt et Barbiturik
thonon-évian villars s/glâne
MAISON DES ARTS, ESPACE MAURICE
NOVARINA à 20h30, sauf mention
contraire (loc. 04.50.71.39.47 ou en
ligne : billetterie.mal-thonon.org)
u 3 et 4.2. / Espace des Ursules :
HAUT DE GAMME par le Sagliocco
Ensemble, m.e.s. Anne-Sophie
Erichsen. Horaire : lun 3 à 14h30 /
mar 4 à 14h30 et 19h
u 8.2. / Grange au Lac à 20h, Evian :
MANU KATCHÉ, Jazz
u 11.2. / Publier-Amphion, Cité de
l’eau à 20h : RÉCITAL À 40 par le
Centre Chorégraphik Pôle Pik, dir.
Mourad Merzouki
u 11.2. / Publier-Amphion, Cité de
l’eau à 20h : THOMAS FERSEN
u 18.2. / Théâtre du Casino, Evian :
BABX
u 20.2. / Théâtre du Casino, Evian :
ALEX BEAUPAIN
u 25.2. / Théâtre du Casino, Evian
: ARTAUD – BARRAULT d'Antonin
Artaud et Jean-Louis Barrault,
m.e.s. Denis Guénon
u 27 et 28.2. / Espace Tully : P.P.
LES P'TITS CAILLOUX par la
Compagnie Loba, m.e.s. Anne
Marcel. Horaire : jeu 27 à 14h30 /
ven 28 à 14h30 et 19h
u 28.2. / Grange au Lac à 20h,
Evian : BRAD MEHLDAN TRIO, Jazz
vevey
THÉÂTRE. À 19h30, dim à 17h
sauf mention contraire (rés.
021/925.94.94 ou L@billetterie)
u 6.2. : Arts & Lettres. BAHAR ET
UFUK DÖRNDÜNCÜ (Adams Schubert - Reich - Brahms)
u 7.2. : OPERETTA de et m.e.s. Jordi
Purti, dès 12 ans
u 8.2. : L'ÉTUDIANTE ET MONSIEUR
HENRI d'Yvan Calbérac, m.e.s. José
Paul, dès 14 ans
u 11.2. : LE COMBAT ORDINAIRE de
Manu Larcenet, m.e.s. Robert
Sandoz, dès 14 ans
u 16.2. : PIERRE À PIERRE de et
m.e.s. Rosa Díaz, El teatre de
l'Home Dibuixat, dès 2 ans
u 21 et 22.2. : Oriental-Vevey. LE
GRAND POURQUOI, performancespectacle tout public, librement
a
g
e
ESPACE NUITHONIE, Salle Mummenschanz à 20h (loc. Fribourg Tourisme
026/350.11.00 / [email protected])
Nuithonie: 026 407 51 51
u Du 6 au 8.2. : MÄNNER STÜCK, dir.
Et chor. Karine Jost, Tanztheater
Karine Jost
u Du 12 au 15.2. : CABARETS DES VILAINES de Nathalie Sabato, m.e.s.
Valérie Bovet
u 14 et 15.2. : ESPACE SCHENGEN de
et m.e.s. Laura de Weck
u 21 et 22.2. : CINÉMATIQUE, chor.
Adrien Mondot, danse
u 27 et 28.2. : AU RYTHME DE BÉNARÈS,
Priscilla Brülhart Gauri et Fanny
Marquet Meera, danse
yverdon
THÉÂTRE BENNO BESSON sauf mention
contraire (loc. 024/423.65.84)
u 1.2. : Soirée slam
u 6.2. : LA ROSE TATOUÉE de
Tennessee Williams, m.e.s. Benoît
Lavigne
u 11.2. : LORENZO SOULÈS, piano (NN)
u 13.2. : SEULE LA MER d'Amos Oz,
m.e.s. Denis Maillefer
u 18.2. : LA TRATÉGIE COMIQUE, m.e.s.
Eve Bonfanti
u 20.2. : DU VENT… DES FANTÔMES par
la Fabrique imaginaire
u 21.2. : AU BORD DE L'EAU par la
Fabrique imaginaire
THÉÂTRE DE L’ECHANDOLE
(loc. 024/423.65.84 ou 024/423.65.89
une heure avant le spectacle)
u Du 6 au 8.2. : CAMUS & SCHMUTZ,
humour
u 15 et 16.2. à 14h et 17h : LE GRAND
POURQUOI d'après Wolf Erlbruch,
m.e.s. Muriel Imbach
u 21.2. : BARBOUZE DE CHEZ FIOR,
Anick Rody et Camille Stoll, violon,
Laurence Crevoisier, alto, Sara
Oswald, violoncelle
n
d
a
BOURLINGUER
DE BLAISE CENDRARS
MISE EN SCÈNE DARIUS PEYAMIRAS
AVEC JEAN-QUENTIN CHÂTELAIN
ÉQUIPE ARTISTIQUE JONAS BÜHLER
GILLES LAMBERT, MICHEL ZÜRCHER
COPRODUCTION THÉÂTRE VIDY-LAUSANNE / LE POCHE GENÈVE /
COMPAGNIE ARGOS* THÉÂTRE ET LE SOUTIEN DU DÉPARTEMENT
DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE DU CANTON DE GENÈVE
& LA FONDATION CASINO BARRIÈRE MONTREUX
THÉÂTRE LE POCHE
www.lepoche.ch / 022 310 37 59 / location Service culturel Migros
10 FÉVRIER > 2 MARS 2014
CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE / PHOTOGRAPHIE AUGUSTIN REBETEZ
LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE)
LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD)
PARTENAIRES MEDIAS : LEPROGRAMME.CH & NOUVELLES
av ecetun
gr and A )
(Histoire
extrd’amour
aordinaires
fantastiques
(Récits
)
Olivia Csiky-Trnka, comédienne
Jean-Quentin Châtelain, comédien
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