● Pour qu’il y ait groupe, il faut au moins 3 conditions : - qu’il y ait une interaction entre les membres, - qu’il y ait conscience d’une appartenance commune - qu’il y ait une communauté de comportement, d’état ou d’objectif. ● Le groupe opère au moins 2 types de pressions - la suggestion - la facilitation ● Avec Merton, on peut aussi distinguer 2 types de groupes : - Groupe d'appartenance - Groupe de référence ● Le groupe opère donc une socialisation de l'individu. Socialisation : ensemble des mécanismes d’apprentissage qui font que les individus intériorisent les valeurs et les normes d’une société ou d’un groupe social particulier. ● L’équipe soignante est un groupe de personnes unies dans une tache commune. L’union et non pas seulement la juxtaposition d’individus, implique une interdépendance, une complémentarité indispensable. Le fonctionnement de l’équipe soignante 1 – Une relation de pouvoir ● Selon Norbert Elias (1897-1990) le pouvoir est un déséquilibre dans les interdépendances. EX : Penser à la relation amoureuse lorsque l'in parait plus dépendant que l'autre, la dépendance donne du pouvoir à celui qui est le moins dépendant. ● Pouvoir = possibilité de faire et ici de faire faire quelque chose à quelqu'un (Robert Dahl) Le pouvoir de la médecine ● Talcott Parsons (1951) : la relation thérapeutique est asymétrique en faveur du médecin car il possède le pouvoir de faire et l’état de stress du patient le déstabilise. Il s’en remet donc au médecin. ● Eliot Freidson (1970) : la domination des médecins serait liée au fait qu’ils ont réussi à imposer leur savoir comme légitime. ● Anselm Strauss (1992) : l’autorité du médecin face au client est à relativiser au vue de la négociation qui s’opère entre tous les participants de la prise en charge, notamment les patients et leur famille. La remise en cause du pouvoir médical ● Patrick Castel (2005) : 5 arguments de la baisse de l’autorité du médecin : 1 - Depuis les années 80, l’évolution de la réglementation. EX : 4 mars 2002 accès directe au dossier médical possible. 2 - Mobilisation des malades notamment sous forme d’associations les représentant. EX : Myopathies 3 - Nouvelles sources d’informations. Ex : internet, site plate forme d'échanges entre patients (essor en 1990) 4 - Interactions avec des acteurs non médicaux. Ex : IDE 5 - l’évolution de la maladie qui souligne la non maîtrise totale du médecin. Ex : Sida A propos des associations Ligues : Tuberculose 1892, Syphilis 1901, Alcoolisme 1905, Cancer 1918 Les membres sont médecins, pas de patients. Premières associations post 1ère guerre mondiale (victimes des poumons suite aux gaz) Des patients sont membres de l'association. 1955 APF, associations des diabétiques et celle des hémophiles Maladies chroniques, pas de traitement curatif, médecin fondateur dont le rôle était d'informer et de partager un peu de ses savoirs médicaux. Objectif : patient observant voire complaisant Explosion des associations de malades lors de l'infection VIH. 1985, 4 associations de lutte contre le VIH 1989, 40 associations de lutte contre le VIH Patients militants dépositaires d'un savoir, contre pouvoir face au médical, influant jusqu'aux politiques de santé. Autant d'éléments qui font que le savoir « expert » coexiste dorénavant au coté du savoir « profane » . L'expérience du malade est alors valorisée dans le processus de guérison. La transmission du savoir devient horizontale et non plus simplement verticale. Le pouvoir à l'hôpital ● Chronémie et proxémie : Non maitrise de l'espace et du temps par le patient qui se voit imposer une organisation spatio-temporelle. Ex : Le patient ne choisit pas qui rentre dans sa chambre (ni quand, ni comment). ● Le soignant détient un savoir faire qui le positionne en situation de supériorité face au soigné. Ce qui ne signifie pas qu'il en abuse. 2 - Des critères de domination De nombreux critères entrent en considération dans les rapports entre soignant/patient ● les hommes > les femmes ● les adultes > les jeunes diplomés ● les organes : le coeur > les pieds ● les services : la pédiatrie > la gérontologie Ex : il est plus valorisant de travailler en cardiologie auprés de jeunes enfants, qu'en dermatologie auprés de personnes agées. Un IDE de 30 ans sera plus facilement pris pour un médecin, une jeune IDE antillaise pour une aide soignante. dominant dominé homme femme haut bas ● Pierre Bourdieu (1930-2002) : le summum de la domination est dans l'intériorisation même de ce pouvoir par les dominants comme par les dominés. Cette domination réside dans la structure et non dans les acteurs. La violence symbolique est cachée et est d autant plus efficace qu elle s exerce sans coercition explicite. ’ ’ ’ Ex : Une IDE entre dans une chambre frapper et personne ne le lui reproche. sans 3 - Des relations de coopération L'évolution des statuts de chaque profession qui constitue l'équipe génére une coopération, des échanges plus soutenus. EX : réunion de staff, mode de communication multiples.... Sur le terrain, on observe des différences en fonction des services mais le principe de coopération existe bel et bien. L'IDE dans la relation de soin Identité soignante positive dans la société en générale Historiquement, professionnelles exécutantes sous le contrôle des médecins 1978, définition du rôle propre, rapport de collaboration dans le soin En janvier 2012, on compte plus de 552 000 IDE en activité de moins de 65 ans en France métropolitaine et DOM-TOM En 2004, on compte 15 357 orthophonistes dont 1126 salariés hospitaliers Typologie de l'identité professionnelle selon Renaud Sainsaulien 1. identité fusionnelle : fort investissement dans le groupe de pairs avec des techniques précises et des normes et valeurs revendiquées spécifiques. Ex : Nous les artisans... 2. l’identité de retrait : groupe sans mobilisation, l’identité ne se créée pas dans le travail, mais à l’extérieur. Ce groupe n’a pas de rapport avec un métier. EX : Boulot alimentaire 3. l’identité de négociation : groupes ponctuels ayant un rapport assez fort à un métier. Détenteurs de compétences. L’individualité y est forte : les groupes se forment dans un but précis et se dissolvent dès gain de cause, sorte d’opportunisme collectif. EX : Lors du décès d'un patient, ou dans les services de réa...Lors des conflits sociaux : 1995 IDE 4. l’identité affinitaire : groupe avec peu de motivations. Les relations y sont privilégiées. L’implication dans le métier est forte. Les individus jouent la carte de l’uniformité, de l’adhésion à la culture interne pour adopter des stratégies individuelles. EX : Femme comptable qui travaille pour son mari.- Gestion de la violence à l’hôpital relève de la compétence individuelle plus que d'une réponse collective et/ou organisationnelle (# ratp) 45% des IDE* se disent agressées verbalement ou physiquement au cours des 12 derniers mois. + Services urgence – psy – gérontologie - En clinique privée (tri des patients ? ) 1 - Les compétences IDE 5 niveaux d’expertise selon Patricia Benner 1 - Novice : pas d’expérience donc références aux règles enseignées. 2 - Débutant : commence à percevoir la signification des aspects caractéristiques rencontrés. 3 - Compétent : après 2/3 années d’expérience, une vision à long terme se dégage et la personne repère les aspects déterminants d’une situation et, ceux qu’elle peut ignorer. 4 - Performant : perception de la situation en terme globale plutôt qu’en terme d’aspects. Vision qui facilite la prise de décision avec un nombre limité d’hypothèse et un raisonnement conscient. 5 - Expert : personne qui ne passe plus par le raisonnement conscient mais par une reconnaissance « intuitive » (en fait liée à un bagage d’expériences références mobilisées). 2 - L'écart entre la tâche et l'activité Le travail est le lieu où se joue l'identité professionnelle. La reconnaissance au travail porte sur le faire, l’identité est donc inséparable des gestes techniques effectués par l'individu. Dans tout travail, il y a des tâches précises, décrites par les protocoles. Mais l’activité ne correspond pas toujours aux modes opératoires prescrits, finalement le travail est toujours inattendu dans sa réalité. EX : certaines IDE ne mettent pas de gants lors de prélevements. C’est pourtant dans l’écart entre le prescrit et le réel que l’on devient compétent. Bien travailler, c'est « bricoler » avec les moyens du bord. EX : Parvenir à faire l'ensemble des soins alors qu'il manque ce jour là une collègue. On va considérer que vous êtes efficace, compétente. Travailler ensemble suppose pourtant de coopérer et d'informer de son activité (et non de sa tâche) donc de rendre visible son bricolage. 3 - Travailler ensemble • La confiance Pour montrer ce que l'on fait réellement, il faut d'abord avoir confiance. EX : La gène de certaines IDE étudiante stagière leur est associée. lorsqu'une • Le jonglage temporel Mener une vie avec des horaires atypiques nécessite une capacité d'organisation spécifique. 54% des IDE alternent les horaires (soir/matin) 11% travaillent de nuit et 17 ne connaissent pas leur planning du mois prochain. • L'anticipation Le travail infirmier consiste à anticiper les désirs et besoins des autres acteurs (personnel soignant, patients, administration Ex : La sortie d'un patient : diagnostiquer de son état général pour penser sa sortie mais aussi préparer les documents comme l'ordonnance qui devra être signer par le médecin et donnée avec les consignes au patient. • La visibilité Il faut parfois être démonstratifs. Certains auteurs appellent cela les épreuves de grandeur et de monstration (Nicolas Dodier, Luc Boltanski), ce sont souvent des mises en scène du corps, une gestuelle, adressées aux autres. EX : « Regarde comme j'ai bien fait ». Mais cette coopération, ce travail d'équipe (cette possibilité d'avoir confiance, d'anticiper et de rendre visible) se complique par la naturalisation des tâches. 4 - Naturalisation des compétences Quand une femme a un savoir faire, une technique, un métier, la naturalisation de ses compétences consiste à dire que ce n’est pas le résultat d’un apprentissage, d’une conquête, mais que c’est naturel. EX : « Toutes les femmes savent faire un lit, » donc une IDE qui fait un lit ne fait rien qui relève d'une compétence, tandis qu'on attribuera cela à une compétence si l'IDE est un homme. Plusieurs études (P. MOLINIER) sur le métier d'infirmière et les métiers féminins (secrétaire, assistante sociale par exemple) ont montré que de nombreux gestes de l'activité quotidienne des femmes sont effectués sans que ceux qui en bénéficient se rendent compte des efforts qui ont été mobilisés. Le travail des femmes consiste à faire par anticipation ce que l'autre aurait à demander. Il s'agit d'être au service des autres, ou en tout cas d'avoir le souci de l'autre (take care) sans en faire la démonstration. EX : mettre la sonnette à portée de main du patient en refaisant un lit. Conséquence : le travail infirmier ne se voit que lorsqu'il est mal fait. Ex : Le patient ne remarque le travail de l'IDE que s'il a besoin de la sonnette et qu'elle n'est pas à sa place. Ex : le dossier discrètement glissé dans les mains du medecin lors de sa tournée par l'IDE. Ce geste n'est repéré que s'il n'est pas fait, lorsqu'il est fait cela est « normal ». Ex : Les instruments passés au chirurgien par l'IBODE lors d'une opération.... Nota Bene Concepts : Identité (profesionnelle soignante) Compétence (professionnelle) Organisation (des soins) Care Bibliographie - Françoise ACKER, "les infirmières une profession en crise ?" in Kervasdoué (dir) La crise des professions de santé, Dunod, 2003 - Paul BOUFFARTIGUE, Jacques BOUTEILLER, Jean-René PENDARES, « La perception des liens entre travail et santé » in Revue française de sociologie, Avril-Juin, n°51-2, pp. 247-280 - CARPENTIER-ROY M.Cl., 1991, Corps et âme, psychopathologie du travail infirmier, Montréal, Liber. - Christian CHEVANDIER, Les métiers de l’hôpital, Coll. Repères, La Découverte, 1997 - Christophe DEJOURS, Souffrance en France : banalisation de l'injustice sociale, Seuil, 1998 - Josette HART, Alex MUCCHIELLI, Soigner l’hôpital, éditions Lamarre, 1994, p 63 - C. Herzlich, « La résistible émergence de la citoyenneté », Politique Santé, n°1, Déc. 1997, p. XV - Pascale MOLINIER,1999 : "Prévenir la violence : l'invisibilité du travail des femmes"; Travailler N°3, pp.73-86. - Pascale MOLINIER, 2000 : "Travail et compassion dans le monde hospitalier" La relation de service : regards croisés Cahiers du genre N°28, IRESCO - CNRS, pp.: 49-70. - Jean PENEFF, L’hôpital en urgence, Métailié, Paris, 1992 - Jean PENEFF, Les malades des urgences, Métailié, Paris, 2000 - A. PERRAUT SOLIVERES, 2001, Infirmières, le savoir de la nuit, PUF, coll. Partage du savoir. - Daniel SICART, 2012, «Les professions de santé au 1er janvier 2012», Document de travail, série Statistiques, n°168, mars