AES 1 Introduction aux Principes d'Economie Année 2001-2002 Cours de T. Pénard TD : Matthieu Leprince, Emmanuelle Reulier, Françoise Thouard Correction de l’examen Septembre 2002 Exercice 1 : Le marché du tabac a) Supposons que la demande mensuelle de paquets de cigarettes (en millions de paquets) en France soit représentée par la fonction : D(p)=240 – 60p où p est le prix en euro acquitté par l’acheteur pour un paquet de cigarette. (Note : si le prix d’achat d’un paquet est de 1 euro, la demande sera de 180 millions de paquets) De même, l’offre mensuelle (en millions de paquets) est représentée par la fonction : O(p)= -60+ 40p où p est le prix en euro obtenu par le fabricant de cigarettes pour un paquet. (Note : si les fabricants perçoivent 2 euros par paquet, leur offre sera de 20 millions de paquets) Sous l’hypothèse que le marché est concurrentiel, déterminez numériquement le nombre de paquets de cigarettes qui devrait être vendu en un mois en France, ainsi que leur prix de vente. Sous l’hypothèse d’un marché parfaitement concurrentiel, le prix d'équilibre d'un paquet de cigarettes p* est défini par l'égalité entre offre et demande : -60+40p*=240 -60p* p*=3 Q*=60 Le prix du paquet devrait doncs’établir à 3 euros et les quantités de paquets vendus chaque mois devrait être de 60 millions. 1 b) Supposons que les pouvoirs publics décident d’imposer aux fabricants de cigarettes une taxe forfaitaire de 1 euro par paquet de cigarettes vendu. En déduire les nouvelles fonctions d'offre et de demande mensuelles sur le marché. Quelle est la nouvelle situation d’équilibre (prix et quantités vendues) ? Qui au final supportera cette taxe ? Seule la fonction d’offre est modifiée, la fonction de demande restant inchangée (ce sont les fabricants qui doivent acquitter la taxe forfaitaire)1. La nouvelle fonction d'offre est définie par O(p)=-60+40(p-1) puisque l'offre de paquets dépend du montant perçu par les fabricants sur chaque paquet (le montant perçu est égal à p-1, soit le prix de vente p moins la taxe de un euro). On a donc O(p)=-100 +40p Le nouveau prix d'équilibre d'un paquet p** est défini par: -100+40p**=240 -60p** p**=3.4 Q**=36 Sous l'hypothèse que le marché est concurrentiel, les quantités de paquets vendues devraient être de 36 millions, à un prix de 3,40 euros. On constate que cette taxe est supportée à la fois par les consommateurs et les producteurs. En effet, pour les consommateurs, ils paient désormais 3,40 euros au lieu de 3 euros (ils supportent donc 40% de la taxe, soit 0.4 euros sur une taxe de 1 euros). Les fabricants de leur côté ne perçoivent plus que 2,40 euros au lieu de 3 euros avant cette taxe (ils supportent donc 60 % de la taxe, soit 0.60 euros sur une taxe de 1 euro). Par ailleurs, les fabricants sont doublement pénalisés puisque leurs ventes diminuent aussi. Au final, leur chiffre d’affaire (CA) diminue à cause de la baisse des recettes unitaires et des volumes de vente : leur CA est passé de 180 millions avant taxe à 86.4 euros (2.4*36) après taxe. c) Comment peut-on justifier économiquement la mise en place d’une telle taxe sur les paquets de cigarettes ? La taxe sur les fabricants de cigarette peut se justifier par le fait que le tabac est source d’externalités négatives (effet négatif non désiré sur l’utilité et les gains d’individus). Le tabac provoque des maladies et des morts prématurées chez les 1 Rappel : la fonction d’offre est une relation comportementale entre le prix perçu par les producteurs et la quantité qu’ils sont prêt à offrir. En l’absence de taxe ou de subvention sur les producteurs, le prix perçu est le prix de marché (prix affiché sur le produit). De même, la fonction de demande est une relation comportementale entre le prix acquitté par les consommateurs et la quantité qu’ils sont prêts à demander. En l’absence de taxe et de subvention sur les consommateurs, le prix acquitté correspond au prix de marché 2 fumeurs, mais aussi chez des non fumeurs respirant régulièrement un air enfumé. Les fabricants ne prennent pas compte ces effets négatifs ou dommages externes. Les coûts sociaux de l’activité de production de cigarettes sont donc bien supérieurs aux seuls coûts privés des fabricants. Ainsi, leur offre a tendance à être plus importante que l’offre socialement optimale. Une taxe permet d’élever les coûts des fabricants et de les obliger à prendre en compte les externalités négatives de leur activité. La taxe permet d’internaliser ces externalités et de faire coïncider l’offre privée avec l’offre socialement optimale. Le marché est ainsi ramené vers une situation plus optimale. Exercice 2 : Les vacances de Sophie à Dinard Sophie a choisi de partir cette année en vacances à Dinard. Elle a trouvé un travail saisonnier à mi-temps (le matin). Grâce à ce travail, elle dispose d’un revenu qu’elle peut allouer entre diverses activités l’après-midi. Par commodité, nous nous limitons à deux activités, le cheval (activité 1) et le catamaran (activité 2). a) Supposons que Sophie ne puisse pas consacrer plus de 20 heures sur le mois à ces deux activités. Écrire et représenter graphiquement sa contrainte temporelle dans les choix de ces deux activités. Soient t1 le temps consacré à l’activité 1 et t2 le temps consacré à l’activité 2. La contrainte temporelle de Sophie pour les activités de cheval et de catamaran s’écrit : t1 + t2 = 20 H En effet, Ghislaine ne peut consacrer plus de 20 heures à ces deux activités. Toutefois, son domaine de choix est plus large que la seule droite temporelle. Son domaine de choix, sous contrainte temporelle, est l’ensemble des combinaisons (t1,t2) tel que t1 + t2 ≤ 20 H Graphiquement, on représente en gris la contrainte temporelle définie par la droite t2 = 20 - t1 (en noir on a le domaine des choix possibles) 3 Activité 2 en heures Domaine de choix 20 10 Activité 1 en heures 10 20 b) Supposons que Sophie dispose de 120 euros de budget pour ces deux activités. Si le prix d’une heure de cheval (activité 1) est égal à 8 euros et le prix d’une heure de catamaran (activité 2) est égal à 6 euros, écrivez et représentez graphiquement la contrainte budgétaire de Sophie pour ces deux activités. La contrainte budgétaire de Sophie s’écrit : 8*t1 + 6*t2 = 120 avec t1 le temps consacré à l’activité 1 et t2 le temps consacré à l’activité 2. Son domaine de choix possible, sous contrainte budgétaire, est l’ensemble des combinaisons (t1,t2) telles que 8*t1 + 6*t2 ≤ 120 Graphiquement on représente en noir la contrainte budgétaire qui pèse sur les choix d’activités et en gris son domaine de choix. 4 Activité 2 en heures Contrainte budgétaire 20 10 A Courbe d’indifférence Activité 1 en heures 10 15 c) Au final, Sophie sera-t-elle contrainte dans son choix optimal d’activités par le temps ou par son budget ? Justifiez. Au final, elle est contrainte plus par son budget que par le temps. En effet, du point de vue de sa contrainte temporelle, elle pourrait très bien faire 20 h uniquement de cheval, alors que sur le plan budgétaire, elle ne peut en faire au maximum que 15 h. On voit d'ailleurs graphiquement que la contrainte temporelle est au dessus de la contrainte ou droite budgétaire. d) Étant donné ses préférences, Sophie décide de consacrer 80 euros à faire du cheval, le reste du budget étant affecté au catamaran. Représentez graphiquement le choix optimal et la courbe d'indifférence associée à ce choix. Un choix optimal se situe nécessairement sur la contrainte budgétaire (saturation du budget). Ce choix optimal correspond à 10 heures de cheval (80 euros) et un peu plus de 6h30 de catamaran (40 euros de dépenses). Ce panier (10 heures de t1 et 6h30 de t2), noté A, correspond au point de tangence entre la droite de budget et la courbe d’indifférence la plus élevée. e) Après avoir défini la notion de taux marginal de substitution, en déduire la valeur du TMS associé à ce choix optimal. Commentez. Le taux marginal de substitution entre l’activité 1 et l’activité 2 en un point de la courbe d’indifférence mesure le nombre maximum d’heures d’activité 2 auquel le consommateur est prêt à renoncer pour obtenir une heure supplémentaire d’activité 1, sans diminuer son utilité. 5 Au point A correspondant au choix optimal, le TMS entre les activités 1 et 2 est égal au rapport des prix des deux activités (p1/p2) : soit TMS=8/6=1.33. Sophie est donc prête à renoncer à 1 heure et 20 minute de catamaran (soit 1.33) pour faire une heure de cheval en plus. f) Quel est l’effet prévisible d’une hausse du prix de l’activité 2 (catamaran) sur les choix optimaux d’activités de Sophie ? Expliquez. • • Si le prix de l’activité 2 augmente, deux effets vont jouer : Un effet de substitution conduisant Sophie à remplacer des heures d’activité 2 par des heures d’activités 1, compte tenu de la hausse de prix relatif de l’activité 1 Un effet revenu conduisant Sophie à réduire le temps de deux activités. En effet, la hausse du prix de l’activité appauvrit Sophie et réduit son espace de choix . Ces deux effets jouent dans le même sens pour l’activité 2 : Sophie va réduire le nombre d’heures de catamaran. Par contre, ils jouent en sens contraire pour l’activité 1 : l’effet net est indéterminé et peut se traduire par une hausse comme une baisse des heures de cheval. Exercice 3 : La production de crèmes glacées IceCream France est une entreprise fabriquant des crèmes glacées. Sur l’année 2001, nous disposons des informations suivantes. L’entreprise doit faire face à des dépenses incompressibles de l’ordre de 30 000 euros. De plus, les coûts variables de production de crèmes glacées sont définis dans le tableau suivant : Production de crèmes glacées en 1 2 3 tonnes Coût variable en euros 4 000 14 000 30 000 4 5 54 000 90 000 a) Calculer le coût total moyen de fabrication des crèmes glacées en fonction des quantités produites. Représentez graphiquement. Production de crèmes glacées (en tonnes) 1 2 3 4 5 Coût variable de production CV(Q) 4 000 14 000 30 000 54 000 90 000 Coût total de production CT(Q) 34 000 44 000 60 000 84 000 120 000 6 Coût moyen de production CM(Q) 34 000 22 000 20 000 21 000 24 000 Coût marginal de production Cm(Q) 4 000 10 000 16 000 24 000 36 000 Pour un niveau de production Q, le coût total moyen (CM(Q)) est défini par la formule : CF + CV (Q ) Q où CF correspond aux coûts fixes ou dépenses incompressibles. CM (Q ) = b) Calculer le coût marginal de production d’une tonne supplémentaire de crème glacée. Représenter sur le même graphique. Le coût marginal de production correspond aux coûts induits par la production d’une unité supplémentaire. Pour calculer le coût marginal, on ne prend en compte que les coûts variables puisque par définition les coûts fixes sont supportés par l’entreprise quelle que soit la quantité produite. En particulier, pour passer d’une production de 0 tonne à 1 tonne, le coût marginal est 4 000 euros (égal au montant des coûts variables pour produire cette première tonne). En déduire la nature des rendements chez IceCream France. Dans un raisonnement sur le court terme, on peut inférer la nature des rendements à partir de la courbe de coût moyen. On en déduit que les rendements sont croissants sur la partie décroissante de la courbe de coûts moyens (économie d’échelle) correspondant à une production inférieure à 3 tonnes, et que les rendements sont décroissants sur la partie croissante de la courbe de coûts moyens (déséconomie d’échelle) correspondant à une production supérieure à 3 tonnes. Toutefois, lorsque l’on raisonne sur le long terme (la plupart des coûts fixes deviennent alors variables), la nature des rendements est donnée par la forme de la courbe de coût marginal. Comme les coûts marginaux sont croissants avec les quantités produites, on en déduit que les rendements sont décroissants. c) Si le marché des crèmes glacées est en concurrence parfaite, quelle est la fonction d’offre d’IceCream France sur l’année 2001 ? Représentez graphiquement cette offre sur le graphique précédent. Soient CM le coût moyen minimum total. D'après les indications du tableau 1 et sachant que la courbe de coût moyen (CM) atteint son minimum au point d'intersection avec la courbe de coût marginal, ce minimum devrait être atteint pour une production comprise entre 3 et 4 tonnes et CM devrait avoir une valeur entre 16 7 et 20 (16 est la valeur du coût marginal pour 3 tonnes et 20 la valeur du coût moyen pour 3 tonnes, l’intersection se fait nécessairement pour une valeur entre les deux) En l’absence de coût irrécupérable, la fonction d'offre de l'entreprise peut alors s'écrire : O(p)=0 si p<CM O(p)=Q* si p≥CM Avec Q* défini par Cm(Q*)=p, Cm(.) étant la fonction de coût marginal. . Représentation graphique avec en trait noir ( ) la courbe d’offre 40 35 CM Coût en millers d'euros, Prix 30 25 Coût moyen total Coût marginal 20 15 10 5 0 1,00 2,00 3,00 3,50 Quantités produites en tonnes 8 4,00 5,00 Exercice 4. Question de cours. Après avoir rappelé la définition d’un bien public, vous montrerez en quoi le financement de ce type de biens peut poser des problèmes. Quelles sont alors les solutions possibles pour surmonter ces problèmes ? Vous prendrez soin d’illustrer votre réponse avec des exemples de bien public. Un bien public est un bien non rival et non exclusif. Son financement est problématique en raison des comportements de passagers clandestins. Il existe deux solutions pour sortir de ce problème : • Solution publique : l'État finance à travers les impôts (financement obligatoire) • Solution privée : le bien public est transformé en bien club (non rival, mais exclusif), avec la mise en place de péage ou de droit d’entrée. 9