Séance 6 - Observatoire de la Côte d`Azur

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Vème siècle - fin de l’école d’Alexandrie
Vème
Traductions et diffusions
XVI - XVIIème
XIIème
XVème
XIème
VIII – IXème
Calife Abbaside Al-Ma’mun (786 – 833)
• Fonde en 829 l’observatoire de Bagdad
premier observatoire permanent
•
La « Maison de la Sagesse » de Bagdad
Institution regroupant des bibliothèques, des centres de traduction, de
discussions
Traduction d’un grand nombre de textes grecs et syriaques (astronomie,
cosmologie, philosophie, etc.)
Fonctionne jusqu’au XIIIe siècle (destruction de Bagdad par les Mongols)
•
•
•
Conservation, traduction, commentaires des
textes grecs
Observations et établissements de
nouvelles tables astronomiques
Discussions critiques des hypothèses
d’Aristote et de Ptolémée
L’Almageste à travers le temps
Du grec meijistos
le plus grand / le très grand
•
IXe siècle: première traduction en arabe
ouvrage présent à Byzance mais perdu en Europe
•
XIIe siècle: découvert en Europe à partir des
versions arabes
traduction en espagnol puis en latin par
Gérard de Crémone à la demande de Frédéric II
•
XVe siècle: version grecque venue de Byzance
Page de l’Almageste
Platon et les Pères de l’Eglise
Saint-Augustin d’Hippone (354-430)
•
•
•
influence prépondérante dans la pensée
chrétienne occidentale.
le théoricien de l’histoire du christianisme.
Pas de contradiction entre christianisme
et philosophie de Platon
Ouvrages traitant du temps et du problème
du commencement:
Les confessions
La cité de Dieu
Le problème de l’éternité du monde – I
Penseurs chrétiens
Origène (185-253):
- le monde a une origine => Condition pour comprendre le monde;
- Il y a une succession de mondes innombrables car sinon que faisait Dieu avant de
faire ce monde-ci?
Saint Augustin (354-430):
- Le temps est créé conjointement à l’espace
- Il n’y a de temps que depuis que le monde existe
- Le temps est créé par Dieu, il n’y a pas de temps avant la création
- Dieu n’est pas dans le temps mais dans l’éternité
Le Moyen-âge latin adopta la doctrine issue des Pères de l’Eglise
- Dieu est un être absolument infini et incompréhensible
- Dieu est partout et en tout temps / Dieu est nulle part et en aucun temps
(Anselme de Canterbury – 1033-1109)
La situation change avec la découverte de la philosophie arabe (XIIe siécle)
Le problème de l’éternité du monde – II
Penseurs musulmans
Depuis longtemps il existe de vifs débats sur le sujet – philosophie / religion
Les thèses de Platon et d’Aristote étaient bien connues et discutées
Avicenne – Ibn Sina (980-1037):
- S’opposait aux défenseurs de la religion en soutenant l’opinion d’Aristote
Al-Ghazali (1058-1111):
- S’opposait à l’éternité du monde
- Argument: les âmes humaines sont immortelles; si le monde est éternel il y a une infinité
d’âmes; ce qui est impensable
- Le temps ne peut être pensé sans le mouvement, c.a.d sans le monde
- Le temps a été créé avec le monde
Averroès – Ibn Rushd (1126-1198)
- Grand défenseur d’Aristote
- Il défendait que l’éternité du monde est une conséquence de l’éternité du mouvement
- Il écarte l’idée de l’immortalité des individus contre Al-Ghazali.
Le problème de l’éternité du monde – III
Penseurs juifs
Moïse Maïmonide (1138-1204)
- Aristotélicien juif le plus influent
- Cherchait un compromis entre la Bible et Aristote
- « les raisons d’Aristote démontrent la possibilité de l’éternité du monde, pas la
nécessité »
- « le commencement temporel du monde est une vérité de la foi qui n’est
philosophiquement ni démontrable ni réfutable
La physique d’Aristote
dans l’occident chrétien
• Aristote n’a jamais été absent mais sa physique n’était pas
connue.
• IXe siècle: traductions arabes
• XIIe siècle: traductions latines
de Caelo traduit en 1170 - devient rapidement une référence
Les contradictions
La philosophie aristotélicienne est abordée avec
méfiance par les théologiens chrétiens
• Pas de création (genèse?)
• Une propriété n’existe pas indépendamment d’une
substance matérielle (eucharistie?)
• Opérations de la nature régulières et inaltérables
(miracles?)
• L’âme ne survit pas au corps (éternité de l’âme?)
Le problème de l’éternité du monde – IV
Saint Thomas d’Aquin (1224-1274)
•
•
•
dominicain
un des principaux maîtres de la philosophie
scolastique et de la théologie catholique
Vise à concilier la philosophie antique
(particulièrement l'enseignement de la philosophie
d'Aristote) avec la théologie chrétienne.
• 1270 « L’éternité du monde »
Saint Thomas y défend un point de vue paradoxal:
Bien que la foi enseigne le commencement du monde
dans le temps. Aucun argument ne permet de l’établir
et on peut même démontrer qu’il aurait été
possible à Dieu de créer un monde éternel:
l’idée de création n’implique pas celle de commencement
Influencé par Maïmonide
Un monde sans commencement et créé de toute éternité…
Aristote condamné
-
Fin XIIe siècle: Aristote traduit de l’arabe à Toledo, puis en Italie
1210: Concile de Paris: lecture de la Physique d’Aristote interdite
1231: Le pape Grégoire IX lève l’interdit
1269: L’évêque de Paris, Etienne Tempier, condamne 13 propositions
issues de l’enseignement d’Aristote (dont la thèse de l’éternité du monde)
1277: Etienne Tempier condamne 219 propositions (dont une grande partie
issues d’Aristote) et menace d’excommunication quiconque soutient une
seule de celles-ci.
=> Dieu n’est pas contraint par les lois stipulées par Aristote
1277: condamnation de 219 affirmations par l’évêque de Paris Etienne Tempier
Notamment la thèse thomiste selon laquelle il est impossible de réfuter la thèse d’Aristote
Le Cosmos d’Aristote
•
-320
Aristote
Univers géocentrique de taille finie et fondé sur le cercle
Sphère des
étoiles fixes
Monde
supralunaire:
Divin - Cercle
Lune
Éther
Terre
Monde
sublunaire:
Corruption
Terre-eauair-feu
Modèle à 55 sphères
Gossuin de Metz, XIIIe siècle
Matfré Ermengaut
Bréviaire d’Amour, fin XIIIe siècle
Copie XIVe siècle, BnF, Paris
Peter Appianus,
Cosmographia, 1539
Peter Appianus,
Cosmographia, 1539
Ouvrage très diffusé dans les écoles; une des
bases de l’enseignement cosmographique au
XVIe siècle.
Fusion partielle du monde d’Aristote et du monde
de la Bible
La représentation de l’espace cosmique apparait
en même temps comme l’incarnation du récit de
la création du monde présenté par la Genèse.
•
Firmament, ciel cristallin et Empyrée
proviennent de la tradition biblique. Termes
liés à la distinction faite pas les Pères de
l’Eglise et les commentateurs médiévaux
entre le ciel créé le Premier jour et le
firmament du Deuxième jour. Depuis le
12ème siècle, le ciel du Premier jour est
désigné comme la demeure des anges et le
lieu de leur création, et appelé Empyrée.
•
Sous la sphère immobile de l’Empyrée se
trouve le ciel cristallin. Ce ciel est la
traduction cosmographique de Genèse 1, 7
qui distingue « les eaux qui sont sous le
firmament d’avec les eaux qui sont au dessus
du firmament ». L’interprétation médiévale de
ce passage a fait de ces eaux supérieures
une sphère cristalline, solide et transparente
•
Représentation paysagère au centre de la
figure de la Terre comme sphère unique
homogène. Au XVIe siècle apparaît la notion
de « globe terrestre ». Cette innovation
conceptuelle est le résultat de l’effort
concerté de deux générations de géographes
et de navigateurs. La différence traditionnelle
entre sphère et œkoumène s’estompe au
XVIe siècle.
La fin du monde aristotélicien
Les acteurs principaux
Nicolas de Cues (1401-1464)
Tycho Brahé (1546-1601)
Nicolas Copernic (1473-1543)
Johannes Kepler (1546-1601)
Giordano Bruno (1548-1600)
Galileo Galilei (1564-1642)
Quelques éléments du contexte général en Europe
du XVe au XVIIe siècle
•
•
•
•
•
•
En peinture: développement de la perspective (quattrocento)
Les grands voyages (1492 - découverte des Amériques)
~1500: l’imprimerie
Luther et le protestantisme
1453: prise de Constantinople
etc.
La représentation du monde et les grands
voyages d’exploration
•
La Terre est :
- une sphère participant de l’ordre global du cosmos (sphérique)
- un élément du monde sublunaire
- une créature de Dieu
- la demeure des hommes – l’Oekoumène
[héritages grec, arabe + tradition hexamérale]
•
•
Au XVIe siècle la Terre devient le « globe terrestre », produit de
l’effort de 2 générations de navigateurs et de géographes
Superposition de l’œkoumène et de la sphère terrestre
La carte du monde de Ptolémée, reconstituée au XVe siècle à partir de sa Géographie, indique les
pays de Serica, Sinae (Chine) à l’extrême droite, au-delà de l’île de Taprobane (Sri Lanka, trop
grande) et l’Aurea Chersonesus (Asie du Sud-Est)
Œkoumène et voyages d’exploration
•
•
XIIIe siècle : Guillaume de Rubrouk et Marco Polo vers l’Asie – idée
d’une extension de la Terre habitable
XVe siècle : conquêtes des latitudes méridionales par le Royaume
portugais
1434 : passage du cap de la peur au 26e parallèle et découverte de
populations indigènes)
1436 : Tropique du Cancer, zone torride pénétrée
1456 : îles du Cap vert
1488 : Cap de Bonne Espérance
1497 : Vasco de Gama
•
•
1500 : découverte du Brésil par Cabral
1520 : cap Horn - Magellan
Le globe terrestre selon Cratès de Mallos (~220 – 140 av. J.-C.), schéma D. Lecoq
Isidore de Séville, L’Oekoumène, Etymologia, Venise, 1483
Lambert de Saint-Omer, Oekoumène et terre antipodale, Liber Floridus, XIIe siècle
Bartolomeo Velho, Cosmographie, Paris, 1568
Rupture avec le savoir des anciens
Diego Gomes, 1460
« Or nous avons trouvé le contraire de ces choses [évoquant le savoir des
Anciens], car nous voyons le pôle arctique habité jusqu’à la perpendiculaire
du pôle, et la ligne équinoxiale est aussi habitée par des Noirs, avec une
telle multitudes de peuples qu’il est impossible de le croire. »
J. Münzer rapporte la réaction de l’Infant Henri, fin XVe
« L’Infant s’est réjoui d’apprendre par l’expérience qu’il y avait des hommes
qui habitaient là, contrairement à l’opinion des cosmographes qui nient que
les hommes habitent sous la zone torride. »
Frontispice du Novum Organum
de Francis Bacon, 1620
L’espace
Mise en place d’un nouveau concept d’espace à la fin du
Moyen-âge
- discussions théologiques / philosophiques (XVIe siècle)
- la perspective dans la peinture (XVe siècle)

Participera à remettre en cause la finitude du monde et à la
destruction du monde clos et fini de l’antiquité
Qu’est-ce que l’espace?
Chez Aristote:
•
•
la superficie qui entoure les corps
Le vide est privé de tout corps
Scaliger (1484-1558)
•
•
« Le vide est ce dans quoi se trouvent les corps »
« Le vide est la même chose que l’espace »
Thomas Hobbes (1588-1679)
« l’espace est un simple objet de pensée, un phantasma qui subsiste quand nous
supprimons en pensée toutes les choses extérieures. »
 Séparation entre corps et espace
L’espace et l’invention de la perspective
•
Perspective (du latin perspicere, voir clairement)
•
1420: invention de la perspective par Brunelleschi – le mythe fondateur
•
Le quattrocento italien
•
« reconstruire l’acte de voir grâce à l’artifice d’une représentation ou
d’une théorie de la représentation »
 plasticiens, mathématiciens, philosophes, théoriciens de la vision
Les origines: L’Annonciation à Sainte Anne (chapelle Scrovegni à Padova)
Giotto, 1303
Lorenzetti, Annonciation, 1344, Sienne, Pinacoteca nazionale
L’Annonciation
• Rencontre du divin et de l’humain
• Advenue de l’invisible dans le visible
• Et de l’infini au milieu du fini
La perspective met en évidence, par la convergence des
lignes de fuite vers un point visible, la présence de l’infini
au milieu du fini
Filippo Brunelleschi (1377-1446)
La double vue ~1415
Piero della Francesca (1412-1492)
Flagellazione di Cristo, 1455
Huile sur bois de 59 cm x 81 cm,
conservée à la Galleria nazionale delle Marche d'Urbin.
Luciano Laurana (?), La cité idéale, vers 1470,
Urbino, Galerie nationale des marches
Leon Battista Alberti (1404-1472)
1435 - De Pictura
Un des premiers à comprendre que l’invention de
la perspective en train de se réaliser était bien
plus que la réussite d’un savoir faire:
une prouesse fondamentale de l’esprit humain
La perspective est une méthode de détermination
visuelle des distance et des dimensions
plutôt qu’un artifice d’illusion
Lien avec la science de l’optique
•
•
•
La vision est une pyramide de rayons
Le tableau est une coupe perpendiculaire en quelque endroit de cette
pyramide, comme une vitre transparente
Le regard d’un œil figé
Grâce à l’opération du regard, l’homme est désormais la mesure de l’espace
Albrecht Dürer (1471-1528) - Nuremberg
•
•
Différents usages de la perspective au XVe siècle
Le dispositif met en jeu une certaine relation des corps à l’espace et
du fini à l’infini
• Alberti:
« Ce que nous voyons en premier lieu quand nous regardons quelque
chose, c’est que cette chose occupe un lieu. »
S’agit-il de construire séparément des corps environnés de leur lieu
propre?
S’attache-t-elle à définir le lieu qui les contient tous?
Pas encore énoncé comme le sera l’espace de la géométrie
cartésienne
Au XVIe siècle en Italie: nombreux traités théoriques sur la perspective
rédigés par des humanistes, mathématiciens, géographes…
Graduel passage de témoin entre art et science.
La fin du monde aristotélicien
Les acteurs principaux
Nicolas de Cues (1401-1464)
Tycho Brahé (1546-1601)
Nicolas Copernic (1473-1543)
Johannes Kepler (1546-1601)
Giordano Bruno (1548-1600)
Galileo Galilei (1564-1642)
Nicolas de Cues (1401 – 1464)
•
•
•
•
•
Nicolas de Cues rompt avec la
distinction aristotélicienne entre les
mondes supra-lunaire et sub-lunaire, en
appliquant à la « machine du monde »
l'image de la sphère infinie dont le
centre est partout, la circonférence nulle
part.
il fait appel à Dieu comme centre et
circonférence infinis
Il fonde une cosmologie où Dieu ne
réside pas autrement que de façon
spirituelle.
négation de la hiérarchisation de
l'Univers
Inspirateur de Giordano Bruno et de la
révolution galiléenne
Copernic
Entre 1510 et 1514: rédaction d’un
Commentaire de l'Almageste de Ptolémée,
dans lequel il évoque l'hypothèse
héliocentrique.
Fin 1530, l'ensemble de ses recherches sur
le calcul des positions des planètes dans
cette hypothèse, et leur comparaison avec
l'observation du ciel, était consigné dans un
manuscrit de plus de quatre cents pages
qui n’est pas publié.
L'édition de ces notes en un livre intitulé De
revolutionibus orbium cœlestium grâce à
Rheticus, disciple qui resta auprès de
Copernic entre 1539 et 1542.
Nicolas Copernic (1473-1543)
Le livre ne causa qu'un débat modeste à
l'époque, et ne provoqua pas de sermons
enflammés sur le fait qu'il contredisait les
écritures saintes
Dédicace au pape Paul III
Nicolas Copernic,
De revolutionibus orbium coelestium, 1543
-
Avant tout un travail d’astronomie
mathématique où Copernic rend compte du
mouvement rétrograde sans épicycles
-
Présentation de l’hypothèse héliocentrique
dans l’introduction.
Référence à Aristarque de Samos
Influences de l’astronomie arabe?
Nicolas Copernic, De
revolutionibus orbium
coelestium, 1543
« Que le monde est sphérique
Tout d’abord il nous faut remarquer que le monde est sphérique,
soit parce que cette forme est la plus parfaite de toutes, totalité
n’ayant besoin d’aucune jointure; soit parce qu’elle est la forme
ayant la capacité la plus grande, qui convient le mieux à tout
contenir et tout embrasser; soit aussi parce que toutes les partie
séparées du monde, je veux dire le soleil, la lune et les étoiles, sont
vus sous cette forme; soit parce que toutes choses tendent à se
limiter ainsi comme il apparaît dans les gouttes d’eau et d’autres
corps liquides, lorsqu’ils tendent à se limiter par eux même. C’est
pourquoi personne ne mettra en doute que cette forme
n’appartienne aux corps divins. »
Copernic, Des révolutions des orbes célestes, 1543
« (…) lorsqu’un navire flotte sans secousses, les navigateurs voient se
mouvoir, à l’image de son mouvement, toutes les choses qui lui sont
extérieures et, inversement, ils se croient être en repos avec tout ce
qui est avec eux. Or, en ce qui concerne le mouvement de la terre, il
se peut que c’est de façon pareille que l’on croit le monde entier se
mouvoir autour d’elle. »
Copernic, Des révolutions des orbes célestes, 1543
•
Les motifs de Copernic – difficiles à comprendre
- motif physique: impossibilité d’expliquer mécaniquement l’astronomie
ptoléméenne (l’équant)
- les irrégularités des mouvements planétaires ne sont que des apparences
•
Comment en arrive-t-il là?
Témoignages anciens
Aristarque de Samos, théories pour lesquelles Vénus et Mercure tournent
autour du soleil
Mais pourquoi le soleil au centre? Pour des raisons métaphysiques;
symbolique de la lumière
En quoi l’héliocentrisme est-il en
contradiction avec les Ecritures ?
Ancien testament - Livre de Josué, X
« C’est alors, au jour où Iahvé livra l’Amorrhéen à la merci des fils d’Israël,
que Josué parla à Iahvé et dit sous les yeux d’Israël:
« Soleil arrête-toi sur Gabaon
Et, Lune sur la vallée d’Ayalon! »
Et le soleil s’arrêta et la lune stationna, jusqu’à ce que la nation se fût
vengée de ses ennemis!
Est-ce que ceci n’est pas écrit dans le Livre du juste?
« Le soleil stationna au milieu des cieux
et il ne se hâta point de se coucher,
presque un jour entier.
Et il n’y eut pas de jour comme celui-là
Ni avant lui, ni après lui,
Quand Iahvé écouta la voix d’un homme,
Car Iahvé combattait pour Israël ! »
Giordano Bruno (1548-1600)
Moine dominicain, philosophe et
théologien italien
Le monde est infini parce que Dieu est infini. Comment croire que
Dieu, être infini, aurait pu se limiter lui-même en créant un monde
clos et borné ?
« Il n'y a qu'un ciel, une immense région éthérée où les
magnifiques foyers lumineux conservent les distances qui les
séparent au profit de la vie perpétuelle et de sa répartition. Ces
corps enflammés sont les ambassadeurs de l'excellence de
Dieu, les hérauts de sa gloire et de sa majesté. Ainsi sommesnous conduits à découvrir l'effet infini [le monde] de la cause
infinie [Dieu] ; et à professer que ce n'est pas hors de nous qu'il
faut chercher la divinité, puisqu'elle est à nos côtés, ou plutôt en
notre for intérieur, plus intimement en nous que nous ne
sommes en nous-mêmes. »
Giordano Bruno, Le banquet des cendres
• Bruno « abolit » la sphère des étoiles fixes,
puisque dans toutes les directions, à l'infini, le
vide immense est parsemé d'étoiles.
• Pour la première fois dans l'histoire de la pensée
humaine, le ciel acquiert une profondeur.
• la notion même de ciel s'évanouit, pour laisser
place à celle d'espace, homogène, c'est-à-dire
identique à lui-même, dans toutes les directions
Le système de Copernic selon Digges
Thomas Digges,
la parfaite description
des orbes célestes, 1576
Si le travail de Copernic est reconnu pour sa
partie technique, peu de philosophes
adhèrent à l’héliocentrisme vers 1600.
La fin du monde aristotélicien
quelques repères
• 1543
N. Copernic (De Revolutionibus)
La Terre et les planètes tournent autour du Soleil.
• 1572
T. Brahé : du changement dans le monde supralunaire
« Absence de parallaxe pour la supernova dans Cassiopée. »
• 1609
J. Kepler (Astronomia Nova)
• 1610
• 1687
2 premières lois du mouvement des planètes autour du Soleil
G. Galilée (le messager des étoiles)
Satellites de Jupiter / Phases de Vénus
I. Newton (Principia Mathematica)
Lois du mouvement, base de la mécanique classique
Postule l’existence d’un espace et d’un temps absolus
Loi de la gravitation universelle
Observations et observatoires astronomiques
autour de 1600
•
De grands observatoires existent depuis plusieurs centaines
d’années dans le monde musulman
•
Dans les années 1580, l’astronome danois Tycho Brahé construit le
premier grand observatoire européen
A quoi ressemblaient ces observatoires?
Observatoire de Maragha
(1259 – ~1316)
Nasir al-Din al-Tusi
(1201 – 1274)
Observatoire de Samarkand
(1424 – 1449)
Ulugh Beg (1394-1449)
Instruments d’astronomie à l’observatoire d’Istanbul (1577)
Johannes Hevelius, Prodromus astronomiae, 1690
Tycho Brahé (1546-1601)
Fait construire un observatoire –
Uraniborg - vers 1580
Bien plus qu’un observatoire…
Programmes d’observations
systématiques
Observations à l’œil nu les plus précises
Stjerneborg ou le palais des étoiles, 1584 – 75m au sud d’Uraniborg
Les instruments de l’observatoire de Tycho Brahé (1580)
Astronomiae
instauratae
mechanica
(1598)
La nova de 1572
« Absence de parallaxe pour la supernova dans Cassiopée. »
parallaxe
Instrument utilisé par
Tycho Brahé pour
mesurer la distance de la
nova de 1572
Le système tychonien
Pourquoi Tycho Brahé n’accepte-t-il pas le
système de Copernic?
1.
Pour ses convictions religieuses
il ne peut accepter une doctrine en opposition aux Ecritures saintes.
2.
Pour des raisons physiques
il ne peut comprendre le mouvement de la Terre
3.
Pour des raisons astronomiques
il ne peut admettre une distance bien plus grande des étoiles que
celle supposée alors.
Johannes Kepler (1571-1630)
•
Astronome allemand
•
Kepler est très tôt un copernicien
•
Plusieurs de ses ouvrages visent à démontrer la
suprématie du système copernicien:
•
1596: publie son Mysterium Cosmographicum
•
Poursuivi pour ses convictions religieuses et ses
idées coperniciennes, Johannes Kepler doit
quitter Graz en 1600. Il se réfugie à Prague,
invité par l’astronome danois Tycho Brahe pour
y devenir son assistant.
•
1605: Il montre que l’orbite de Mars suit une
ellipse à partir des observations et mesures de
la position des planètes faites par Tycho Brahé.
•
1609: publie son Astronomia Nova
Kepler copernicien - I
« Il y a six ans, lorsque j’étudiais avec le distingué maître Michael Maestlin à
Tübingen, j’étais perturbé par les nombreuses difficultés des conceptions
usuelles de l’Univers, et j’étais si enthousiasmé par Copernic que Mr.
Maestlin mentionnait souvent dans ses conférences, que non seulement je
défendais fréquemment ses opinion aux disputatios des candidats en
physique mais j’ai aussi écrit sur le premier mouvement argumentant qu’il
est dû à la révolution de la Terre. J’atteignais le point où j’assignais à la
Terre le mouvement du soleil, mais là où Copernic le faisait à partir
d’arguments mathématiques, les miens étaient physiques, ou si vous
préférez métaphysiques. »
Kepler, Mysterium cosmographicum, 1596
Kepler copernicien - II
« Que si l’on objecte que l’on peut, ou que l’on a déjà pu, dire la même chose
à propos des tables anciennes, à savoir, qu’elles se conforment aux
phénomènes et qu’elles sont pourtant rejetées comme fausses par
Copernic; et que donc on peut répondre de la même façon à Copernic en
disant: sans doute rend-il raison d’une manière excellente des apparences,
mais il se trompe dans son hypothèse. Eh bien! Je répondrai premièrement
que les hypothèses anciennes ne donnent absolument aucune raison de
certains faits importants. Ces hypothèses, par exemple, ignorent les causes
du nombre, de la grandeur et de la durée des rétrogradations, et pourquoi
ces rétrogradations se produisent d’une manière si exactement en accord
avec le lieu et le mouvement du Soleil moyen. Or, puisque dans toutes ces
questions il apparaît un ordre absolument merveilleux chez Copernic, force
est que la cause soit aussi présente chez lui. »
Kepler, Mysterium cosmographicum, 1596
Le Soleil chez Kepler
« Dès le départ, même un aveugle ne pourrait nier que de tous les corps
dans l’univers le plus supérieur est le soleil, dont toute l’essence est pure
lumière, dont aucune étoile n’est plus grande, qui est l’unique, celui qui
préserve, plus chaud que toute chose; la source de lumière, de la chaleur
abondante; le plus beau, le plus clair et le plus pur à la vue; à l’origine de la
vision, de l’expression des couleurs et étant lui même sans couleur; appelé
le roi des planètes en ce qui concerne le mouvement, le cœur de la force du
monde, et son œil pour la beauté; et que nous jugerions tous comme étant
la seule chose d’importance, dont le meilleur et plus grand Dieu, s’Il
souhaitait occuper une maison corporelle et serait en un lieu, habiterait
avec les anges bénis. »
Kepler, Mysterium cosmographicum, 1596
La cause du mouvement des astres
« il n’est pas approprié que le premier mobil soit réparti sur une sphère mais
plutôt qu’il vienne directement d’une source particulière (…). Le plus juste
est de l’attribuer au soleil qui seul le mérite et dont la force est appropriée
pour générer le mouvement (…) »
Mysterium cosmographicum, 1596
Kepler platonicien
• Jo
Comment expliquer le
nombre des planètes?
Johannes Kepler,
Mysterium Cosmographicum, 1596
Johannes Kepler, Mysterium Cosmographicum, 1596
Kepler, Astronomia Nova, 1609
Objectif de Kepler très ambitieux et moderne,
au-delà du système de Copernic:
Établir l’unité de la conception scientifique du
monde entre physique et astronomie
« Astronomie nouvelle ou physique céleste »
Le soleil est au centre mais:
Les mouvements ne sont pas ordonnés par rapport au soleil
uniquement de manière géométrique ou optique comme chez
Copernic, ils le sont aussi de manière physique et dynamique.
Le soleil n’est pas que le centre du monde qu’il éclaire: il doit
exercer une influence physique sur les corps célestes
A l’époque sont connus les expérience de magnétisme de Gilbert
montrant les effets d’attraction mutuelle d’un aimant sur de la
limaille de fer.
 Idée d’une force magnétique émanent du soleil
Il ne s’agit pas d’une force dirigée vers le centre du soleil, mais d’un
entrainement des planètes par une rotation du soleil sur lui-même.
Des ellipses et non plus des cercles
Kepler, Astronomia Nova, 1609
Astronomia Nova (1609)
Première loi de Kepler
Les planètes du système solaire décrivent des trajectoires elliptiques dont le
Soleil occupe l'un des foyers. À l'exception de Mercure, les ellipses que
décrivent les planètes ont une très faible excentricité orbitale, et leur
trajectoire est quasi-circulaire.
Astronomia Nova (1609)
Deuxième loi de Kepler
Loi des aires
La vitesse d'une planète devient plus grande lorsque la planète se rapproche
du Soleil. Elle est maximale au voisinage du rayon le plus court (périhélie), et
minimale au voisinage du rayon le plus grand (aphélie)
Troisième loi de Kepler (1618)
Loi des périodes
Décrit la relation mathématique entre la période de révolution et la distance au Soleil.
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Kepler, Les Tables Rudolphines, 1627
Galileo Galilei (1564-1642)
•
Défenseur de la conception
copernicienne de l’Univers
•
Fondement des sciences mécaniques
•
Il perfectionne la lunette
•
1609: Il effectue avec les premières
observations astronomiques avec une
lunette
•
Nombreuses observations en
contradiction avec le système
d’Aristote
•
Il est considéré comme le père de
l'observation astronomique et de la
physique moderne.
La lunette de Galilée (1609)
Sidereus nuncius, 1610
« le messager des étoiles »
résultats des premières observations
de Galilée sur la Lune, les étoiles et
les lunes de Jupiter.
Dessin de la Lune par Galilée, Sidereus Nucius, mars 1610
Les phases de Vénus
(Observées par Galilée en 1609)
Réactions au Sidereus Nuncius
•
les partisans de la théorie géocentrique selon Aristote sont devenus
les ennemis acharnés de Galilée et les attaques contre lui ont
commencé dès la parution du Sidereus Nuncius. Ils ne peuvent pas
se permettre de perdre la face et ne veulent pas voir leur science
remise en question.
•
« Les astrologues ont fait leurs horoscopes en tenant compte de
tout ce qui bougeait dans les cieux. Donc les astres médicéens ne
servent à rien et, Dieu ne créant pas de choses inutiles, ces astres
ne peuvent pas exister. »
Martin Horky, disciple du professeur Giovanni Antonio Magini et
ennemi de Galilée, 1610
1616: censure de la thèse copernicienne
•
1612: début des attaques religieuses qui s’opposent à l’idée du mouvement de la terre. Les
opposants utilisent le passage biblique Josué 10, 12-14 comme arme théologique contre Galilée.
•
En décembre 1613, un ancien élève de Galilée, est sommé de prouver l'orthodoxie de la doctrine
copernicienne. Galilée viendra à son aide à son disciple en lui écrivant une lettre sur le rapport
entre science et religion.
« dans le domaine des phénomènes physiques, l'Écriture Sainte n'a pas de juridiction. »
•
La controverse continue et prend une telle ampleur que le cardinal Bellarmin, pourtant favorable à
Galilée, est obligé d'intervenir. En l'absence de réfutation concluante du système géocentrique, il
condamne la thèse héliocentrique. Tout en reconnaissant l'intérêt pratique, pour le calcul
astronomique, du système de Copernic, il déclare formellement imprudent de l'ériger en vérité
physique.
•
En réaction, en 1615, Galilée écrit une longue lettre dans laquelle il développe ses arguments en
faveur de l'orthodoxie du système copernicien.
« l'intention du Saint-Esprit est de nous enseigner comment on doit aller au Ciel, et non comment
va le ciel »
•
Malgré de nombreuses tractations pour empêcher l'inévitable, Galilée est convoqué le 16 février
1616 par le Saint-Office pour l'examen des propositions de censure. Le 25 février la censure est
ratifiée par l'Inquisition et par le pape Paul V. La théorie copernicienne est condamnée. Galilée
n'est pas inquiété personnellement mais doit enseigner sa thèse comme une hypothèse.
•
Cet arrêté s'étend à tous les pays catholiques.
Dialogue sur les deux grands systèmes
du monde, 1632
•
ouvrage demandé à Galilée par le
Pape Urbain VIII, ouvrage qui
présenterait de façon impartiale à la
fois le système aristotélicien et le
système copernicien.
•
un dialogue entre trois personnes,
la première favorable au système
héliocentrique de Copernic,
la deuxième au système
géocentrique de Ptolémée
(Simplicius), et
la troisième sans opinion préalable
sur la question.
Questions sur le mouvement liées au
système de Copernic:
- Si la Terre tourne sur elle-même et autour du soleil,
comment est-il possible que nous ne ressentions rien?
 Principe d’inertie
- S’il n’y a plus de sphères pour entrainer les corps
célestes dans leur rotation, quel moteur peut maintenir
les planètes (y compris la Terre) sur leur trajectoire?
 Cf. Kepler
Cherchant toujours une preuve du mouvement de la Terre et pour
répondre aux objections du cardinal Bellarmin, Galilée pense la
trouver dans le phénomène des marées…
Galilée devant le Saint Office au Vatican (1633)
Joseph-Nicolas Robert-Fleury, 1847
Musée du Louvre
Abjuration de Galilée, le 22 juin 1633
« Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de 70 ans, ici
traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés
cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté,
ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure
que j'ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l'aide de
Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église Catholique
et Apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j'avais
été condamné par injonction du Saint Office d'abandonner complètement la
croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas,
et que la Terre n'est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas
défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce
soit, par oral ou par écrit; et après avoir été averti que cette doctrine n'est
pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j'ai écrit et publié un
livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par
des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière; ce pour
quoi j'ai été tenu pour hautement suspect d'hérésie, pour avoir professé et
cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la
Terre n'est pas le centre, et se meut. [...] »
Comment démontrer que la Terre se déplace dans
l’espace?
•
la direction apparente d'une source lumineuse dépend de la vitesse de celui qui
l'observe, de la même façon que la pluie semble tomber depuis une direction située
vers l'avant d'un véhicule et non à la verticale de celui-ci quand celui-ci se déplace.
=> Aberration des étoiles découverte par Bradley en 1725
René Descartes (1596 – 1650)
Le système cosmologique de
Descartes est à chercher
principalement dans 2 textes :
•
Traité du Monde et de la lumière,
rédigé en 1629-1633 et publié en
1664
•
Les principes philosophiques, 1644
« […] depuis deux ou trois mois, je me suis engagé fort avant dans le
ciel; et après m’être satisfait touchant sa nature et celle des Astres
que nous y voyons, et plusieurs autres choses que je n’eusse pas
seulement osé espérer il y a quelques années, je suis devenu si
hardi, que j’ose maintenant chercher la cause de la situation de
chaque étoile fixe. Car encore qu’elles paraissent fort
irrégulièrement éparses ça et là dans le Ciel, je ne doute point
toutefois qu’il n’y ait un ordre naturel entre elles, lequel est régulier
et déterminé; et la connaissance de cet ordre est la clef et le
fondement de la plus haute et plus parfaite science que les hommes
puissent avoir touchant les choses matérielles; d’autant que par son
moyen on pourrait connaître a priori toutes les diverses formes et
essences des corps terrestres, au lieu que, sans elle, il nous faut
contenter de les deviner a posteriori, et par leurs effets […] »
Descartes, lettre à Mersenne du 3 mai 1632
« (...) puisque nous voyons que la Terre n’est point soutenue par des
colonnes, ni suspendue en l’air par des câbles, mais qu’elle est
environnée de tous côtés d’un ciel très liquide, nous pensons qu’elle
est au repos et qu’elle n’a point de propension au mouvement, vu
que nous n’en remarquons point en elle; mais nous ne croyons pas
aussi que cela puisse empêcher qu’elle ne soit emportée par le
cours du ciel et qu’elle ne suive son mouvement, sans pourtant se
mouvoir: de même qu’un vaisseau n’est point emporté par le vent ni
par des rames, et qui n’est point aussi retenu par des ancres,
demeure en repos au milieu de la mer, quoique peut-être le flux ou
reflux de cette grande masse d’eau l’emporte insensiblement avec
soi. (…) »
Descartes, les principes de la philosophie, troisième partie
Imaginer un monde..
• Rejet du vide
• matière unique et divisible en parties
diversement mues
• « grand espace » : évite l’écueil de
l’espace infini (condamnation de
Bruno)
• système des tourbillons
• unité des phénomènes célestes et
terrestres
Les tourbillons de Descartes
La pesée des systèmes du monde
G. Riccioli, Nouvel Almageste, 1651
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