LA LETTRE JURIDIQUE Page 1 Sommaire Droit routier Droit public Droit social Droit de la création Droit des contrôles Droit des affaires Droit de la publicité Focus Divers PAS DE CONFIDENTIALITE POUR L’AVOCAT D’ENTREPRISE 2 2 3 3 4&5 5&6 7 8 9 Une entreprise anglaise a recours aux services d’un avocat interne inscrit au Barreau néerlandais. Lors d’une visite domiciliaire de la Commission Européenne dans les locaux de l’entreprise, dans le cadre d'une enquête en matière de concurrence, la règle de confidentialité entre avocats et clients est invoquée pour des échanges entre l’entreprise et son avocat interne. La juridiction européenne rejette la demande car l'échange doit être lié à l'exercice du « droit de la défense du client » et l'échange doit émaner « d'avocats indépendants », c'est-à-dire « d'avocats non liés au client par un rapport d'emploi ». L’avocat ne doit avoir aucun lien structurel, hiérarchique et fonctionnel avec l'entreprise qui bénéficie de cette assistance. Il n’y a donc pas de « legal privilege » pour l'avocat d'entreprise et ses échanges avec son employeur peuvent être utilisés comme preuves d'éventuelles pratiques anticoncurrentielles. Cette décision pose un vrai problème à l’heure où la France envisage d’autoriser des avocats à être salariés d’entreprises. Quel serait l’intérêt si les échanges ne bénéficient pas de la confidentialité propre aux échanges avec l’avocat libéral ? Cour de Justice de l’Union Européenne, 14/09/10, n° C-550/07 AU FINAL COMBIEN COUTE UN PRODUIT ? OLIVIER POULET Avocat au barreau de Rennes 1 rue de Brocéliande 35760 Saint-Grégoire Tel.02.99.23.42.08 Port.06.81.56.19.18 [email protected] Siret : 42358055400032 La Commission d’examen des pratiques commerciales vient de rendre un avis sur la communication des prix dans le cadre d’offres couplées à une carte de fidélité. Deux mécanismes sont étudiés. Le premier annonce le prix payé en caisse et fait figurer le montant de l’avantage attaché à l’achat, comme par exemple « Prix + 1€ avec la carte XX ». La CEPC considère que cette présentation est claire. Le consommateur sait le prix qu’il paiera à la caisse et connaît le montant de l’avantage ultérieur qui lui sera consenti. Bien évidemment les modalités succinctes de l’avantage ultérieur doivent être indiquées. Dans le deuxième mécanisme, l’avantage annoncé est déduit du prix du produit pour faire apparaître un prix net, comme par exemple « prix Ŕ avantage carte=… », un astérisque renvoyant à une explication précisant que le prix indiqué correspond au prix auquel revient le produit après déduction de l’avantage lié à la carte, sur un achat ultérieur. Pour la CEPC, cela peut faire croire au lecteur peu attentif que le prix le plus bas est le prix net du produit. Dès lors que des mentions correctives ou explicatives figurent en petits caractères, il n’y a pas forcément de pratique trompeuse mais cela entraîne une nécessaire application de la recommandation « mentions et renvois » de l’ARPP, déjà évoquée dans le dernier n° de cette Lettre. En conclusion la CEPC recommande d’éviter une communication qui fait apparaître un prix d’article, avantage déduit. Cela pourrait constituer une mauvaise pratique, cette présentation juridiquement incorrecte, pouvant être source d’interprétation faussée pour le consommateur, et l’induire en erreur. Commission d’examen des pratiques commerciales, avis n° 10-12 sur l'utilisation des nouveaux instruments promotionnels dans la communication sur les prix assurée par les distributeurs sur le marché du jouet, 29 /09/10 LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 2 Droit routier LA FONCTION CESSE MAIS LA RESPONSABILITE RESTE Comme cela a déjà été évoqué à plusieurs reprises dans ces Lettres Juridiques, le code de la route fait peser sur le titulaire de la carte grise la responsabilité pécuniaire de l'amende encourue pour certaines infractions. Sauf si, notamment, il apporte des éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction. Le représentant d'une personne morale devra fournir les renseignements permettant d'identifier le véritable auteur de l'infraction pour s'exonérer du paiement. La Cour de Cassation vient de rappeler ce principe en précisant qu’est prise en compte l’identité du représentant légal au moment des faits quels que soient les circonstances postérieures. En l’espèce le représentant légal de la société reste responsable de ce paiement alors qu'il avait quitté cette société quelques mois après la date des faits et qu’il était de ce fait dans l’incapacité d'identifier l'auteur véritable. Cour de Cassation, chambre criminelle, 2/09/10, n° 10-82.393 LA RESPONSABILITE PECUNIAIRE PEUT-ELLE ETRE DELEGUEE ? Et si le responsable pénal de l’entreprise a mis en place une délégation de pouvoirs, le bénéficiaire de cette délégation peut-il être condamné à payer une amende pour excès de vitesse au nom de la personne morale titulaire de la carte grise ? Oui a répondu la juridiction de proximité, et non ont décidé les juges de cassation. En effet, pour eux, il résulte des textes que, lorsque le certificat d'immatriculation d'un véhicule verbalisé pour excès de vitesse est établi au nom d'une personne morale, le représentant légal de celle-ci, et lui seul, peut être déclaré redevable pécuniairement de l'amende encourue. La délégation générale de responsabilité pénale ne s’applique pas en l’état. On pourrait par contre s’interroger sur les conséquences d’une délégation qui viserait expressément ce cas de figure, par exemple établie au nom du gestionnaire des véhicules sachant que cette responsabilité pourrait s’accompagner d’une obligation de sensibilisation des salariés concernés aux risques de l’excès de vitesse. Cour de Cassation, chambre criminelle, 13/10/10, n° 10-81.575 Droit public L’ETAT DOIT TENIR SES PROMESSES Les héritiers d’une ile méditerranéenne la vendent à l’Etat français tout en conservant les parcelles sur lesquelles ils ont construit leur résidence principale et un hôtel. Ils ont également cédé à l'État les droits à construire attachés aux terrains. En échange et comme cela figure dans les actes, ils bénéficient de la promesse de pouvoir étendre leurs propriétés actuelles. Ayant déposé des permis de construire dans ce sens, ils se voient opposer un refus et le Pos est modifié pour déclassifier en inconstructibles les terrains concernés. Les juges, saisis par les héritiers, estiment que les agissements de l'État témoignent de son engagement à garantir aux héritiers un « droit à construire». Les actes de vente, dont l'État est à la fois partie, rédacteur et autorité de réception ne précisent à aucun moment que la faculté de construire serait conditionnée aux règles d'urbanisme. Compte tenu de la qualité même du cocontractant qui constituait indiscutablement un gage d'autorité, de bonne foi et du respect de la loi, les héritiers pouvaient légitimement penser que l'État était en mesure de leur accorder de tels droits à construire et s'attendre à ce qu'il respecte ses engagements contractuels. Pour les juges, l’Etat aurait dû proposer une compensation matérielle ou financière en réparation du préjudice subi du fait du non-respect des actes de vente. Cour Européenne des Droits de l’Homme, 18/11/10, n°18990/07 et n°23905/07 LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 3 Droit social ON PEUT SUIVRE A LA TRACE SES SALARIES Un coursier est licencié pour faute grave, notamment parce que l’employeur l’accuse d’utiliser son véhicule à des fins privées, et de ne pas respecter le code de la route. Comme preuves, l’employeur fournit des éléments provenant du système de géolocalisation équipant ses véhicules. Pour mémoire la mise en place de tels systèmes doit faire l’objet d’une information personnelle et préalable des salariés et d’une déclaration auprès de la CNIL. L’employeur est dans l’incapacité de fournir la déclaration, et concernant l’information préalable il ne peut remettre qu’une note de service, dont les destinataires sont inconnus, et au contenu sibyllin, sans aucune mention d’un service de géo-localisation. De ce fait, les informations utilisées pour justifier le licenciement ayant été recueillies par des moyens illicites, ne peuvent être retenues et le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse. Il est par contre intéressant de noter qu’en refusant d’admettre que l’utilisation irrégulière d’un système de géo-localisation porte atteinte à la liberté fondamentale du salarié disposant d’un véhicule de service qu’il n’avait pas le droit de l’utiliser à titre personnel, la Cour reconnait que le suivi des déplacements, dans le cadre des dispositions légales, ne porte pas atteinte à la vie privée ni à la liberté d’aller et venir. Cour d’appel de Dijon, chambre sociale, 14/09/10 PORNOGRAPHIE NON SOLLICITEE Un cadre ayant presque 10 années d’ancienneté est licencié, son employeur ayant trouvé sur le disque dur de son portable professionnel des contenus pornographiques. Contestant le caractère réel et sérieux du motif du licenciement, le cadre obtient des dommages et intérêts. Les juges ont estimé que si la présence de ces contenus, en nombre réduit, était attestée par un constat d’huissier, (constat qui pourrait être contesté puisque réalisé après le licenciement du salarié et sans sa présence), rien ne permet d’établir que c’est le salarié qui les a volontairement téléchargés. Le salarié avait en effet invoqué le fait que ces contenus étaient arrivés sur son ordinateur sans qu’il les sollicite et l’employeur n’apportait aucune preuve d’un téléchargement volontaire. De ce fait, l’utilisation à des fins personnelle des matériels de l’entreprise n’est pas avérée. Cour de Cassation, chambre sociale, 14/04/10, n°08-43.258 Droit de la création REVENIR AUX FONDAMENTAUX Un photographe cède par contrat, à l’éditeur d’un dépliant, les droits de reproduction de photographies de fleurs. L’éditeur s’estimant propriétaire des clichés réalise des sets de table qu’il commercialise. Pour lui, dès lors que l’utilisation sur des sets n’était pas expressément interdite, et qu’il reproduisait strictement les oeuves, respectant ainsi l’esprit de l’auteur, il n’était pas attaquable. Les juges de cassation donnent raison au photographe et rappellent qu'en matière de cession de droit de reproduction d'une œuvre de l'esprit, chacun des modes d'exploitation cédés doit faire l'objet d'une mention distincte et doit être limité. Cour de Cassation, 1ère chambre civile, 30/09/10, n° 09-15.091 LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 4 Droit des contrôles LES SAISIES INFORMATIQUES A LA LOUPE Le 2 novembre 2010, la Cour d’Appel de Paris, saisie de recours contre les conditions de réalisation de visites domiciliaires en matière de droit de la concurrence, a examiné les pratiques de saisie informatique. Dans les trois dossiers, les juges ont détaillé les différentes étapes de ces saisies et ont relevé des éléments discutables. Les modalités techniques des saisies ne sont que sommairement décrites dans le procès verbal, et notamment les modalités de sélection des documents, les messages saisis dans une messagerie sont décrits trop synthétiquement dans l’inventaire pour permettre de garantir l’identification desdits messages et de vérifier qu’ils rentrent dans le champ de l’enquête, la saisie de la totalité de la messagerie d’un Directeur Juridique sans précaution particulière notamment en ce qui concerne le secret des correspondances et enfin l’absence de scellés. Par ailleurs, dans l’un des dossiers, l’entreprise visitée a mis en avant l’existence de procédures de saisies différentes de celles pratiquées et permettant de préserver l’authenticité et l’intégrité des données saisies et le contenu des ordinateurs visités, de garantir le contrôle effectif des opérations et la possibilité pour l’entreprise de faire retirer des documents sans rapport avec l’enquête ou couverts par un « légal privilège ». En conséquence de quoi, avant de se prononcer sur le fond des demandes, la Cour d’Appel a nommé un expert avec pour mission d’examiner les pratiques de saisie informatique en France, et par comparaison celles de la Commission européenne et des autorités de concurrence néerlandaises et américaines. Il en résultera un recueil des bonnes pratiques notamment pour la saisie des messageries. Le but est bien sûr de concilier la nécessité d’avoir accès aux éléments pertinents avec la préservation d’une indispensable confidentialité. Ce rapport d’expertise, qui doit être rendu dans les six mois, aura une grande importance pour y voir plus clair sur ce sujet encore très empirique. Pendant ces six mois il y a fort à parier que toutes les visites comportant des saisies informatiques, en droit de la concurrence mais aussi en droit fiscal ou en droit financier pour ne citer que ces deux procédures proches, feront l’objet de recours sur les mêmes fondements et logiquement les juges ne pourront statuer avant le dépôt du rapport. Cour d’Appel de Paris, 2/11/10, n°10/01894 (et autres) LA PREUVE DE L’HABILITATION DES ENQUETEURS C’est au juge, qui autorise la visite, de vérifier si les agents nommés pour l’effectuer sont effectivement habilités. Les agents des impôts effectuant la visite doivent avoir été autorisés par le juge des libertés et de la détention et avoir été habilités à cet effet par le directeur général des impôts. Les agents de l’administration fiscale présentent leur habilitation au juge des libertés et de la détention, celui-ci en faisant mention dans son ordonnance. Il ne résulte pas de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales que les habilitations des agents doivent être annexées à l’ordonnance. Cette décision est applicable aux visites domiciliaires en matière de concurrence du fait de l’identité des textes. Cour de Cassation, chambre commerciale, 14/09/10, n°0967.980 LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 5 PRECISIONS SUR LE CONTENU DE L’ARRET D’APPEL Contrairement à l’ordonnance d’autorisation dont le contenu est détaillé par les textes, les mentions devant figurer dans l’arrêt d’appel ne sont pas précisées. L’article L. 16 B II du livre des procédures fiscales ne dispose pas que le premier président de la Cour d’Appel statuant sur un recours contre l’ordonnance d’autorisation, doit mentionner dans son ordonnance, à peine de nullité, que le dossier du tribunal a été transmis au greffe de la cour d’appel et a été mis à la disposition des parties. Cette décision est applicable aux visites domiciliaires en matière de concurrence du fait de l’identité des textes. Cour de Cassation, chambre commerciale, 14/09/10, n° 09-67.404 LE DROIT DE S’OPPOSER A UNE VISITE On le sait, la Commission Nationale Informatique et Libertés dispose d’un droit de perquisition en entreprise. Mais elle ne peut accéder à des locaux que sous réserve que le responsable de ces locaux ne s’oppose pas à cette visite, laquelle ne peut alors avoir lieu qu’avec l’autorisation et sous le contrôle du juge judiciaire. Pour être effective, une telle garantie nécessite que le responsable des locaux, ou le représentant qu’il a désigné à cette fin, ait été préalablement informé de son droit de s’opposer à la visite et qu’il soit mis à même de l’exercer. Dès lors qu’il n’est pas contesté que les responsables des locaux, ayant fait l’objet des contrôles, n’ont pas été informés de leur droit de s’opposer à ces visites, et que grâce à cela la CNIL a eu accès à divers documents, l’entreprise visitée est fondée à soutenir que la sanction qui lui a été infligée, dès lors qu’elle reposait sur les faits constatés lors des contrôles effectués, a été prise au terme d’une procédure irrégulière et qu’elle doit pour ce motif être annulée. Conseil d’État 10ème et 9ème sous-sections réunies, 7/07/10, n°309721 Droit des affaires LE TRANSFERT DE LA RESPONSABILITE ENVIRONNEMENTALE DANS UN CONTRAT A l’occasion de l’achat d’un terrain ayant appartenu à un producteur de produits chimiques, un promoteur découvre dans le sol des produits polluants, ce qui entraine pour lui des surcoûts et un retard dans les travaux. Il assigne la société qui, ayant cédé le terrain à la société immobilière vendeuse, n’était pas l’exploitant direct de l’installation mais seulement l’ayant droit à titre universel du dernier exploitant de l’activité industrielle par le jeu d’apports partiels d’actifs successifs. Les juges ont considéré que cette société était la dépositaire du passif environnemental résultant de l’activité polluante et devait donc assumer la responsabilité délictuelle de la dernière société exploitante, cette société ne démontrant pas avoir expressément transféré l’obligation de remise en état des lieux à la société immobilière à qui le terrain avait été cédé dans un simple but de transaction immobilière. Cette décision montre avec quel soin le transfert de la responsabilité environnementale doit être traité lors des cessions de bien industriels ou lors de la mise en place d’apports partiels d’actifs. Il faut des clauses expresses et détaillées pour s’assurer de transferts. Le silence ne vaut pas apport. Cour de Cassation, 3ème chambre civile, 22/06/10, n° 09-10.215 LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 6 L’IMPERIEUX DEVOIR D’INFORMATION Les faits sont terribles : un enfant meurt, la tête coincée sous le volet roulant d'une porte de garage. La responsabilité du gérant de la société ayant vendu le volet est mise en cause pour homicide involontaire. Pour les juges, cet homicide involontaire résulte d’une faute caractérisée ayant exposé autrui à un risque, d'une particulière gravité, que le gérant ne pouvait ignorer. Cette faute s'analyse comme un manquement caractérisé à des obligations professionnelles essentielles ou comme l'accumulation d'imprudences ou de négligences successives témoignant d'une impéritie prolongée. Pour les juges de cassation, lorsqu’on exerce une activité commerciale, on doit s’informer des règles de sécurité et les normes applicables aux produits vendus. Cour de Cassation, chambre criminelle, 29/06/10, n° 09-84.439 JUSQU’OU VA LE DEVOIR DE CONSEIL ? Deux décisions, parmi d’autres, sont venues préciser le devoir de conseil qui pèse sur les professionnels dans leur relation avec leurs clients non professionnels. Application classique au matériel très technique Un fournisseur, revendeur, d’installations téléphoniques vend à un utilisateur un système d’appel destiné à fonctionner avec un matériel existant. L’installation existante se révèle déficiente et au final l’ensemble ne fonctionne pas. Les juges ont accueilli le recours du revendeur contre le fabricant du matériel neuf au motif que ce fabricant, spécialiste du secteur, savait que l’installation projetée était partielle, que l’unité centrale ancienne n’était plus disponible sur le marché et sans prestataire capable d’effectuer des réparations. A ce titre le fabricant n’a pas remplit l’obligation de conseil à laquelle il est tenu et qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l’acheteur et de l’informer, lors de l’achat, de l’adéquation du matériel proposé à l’utilisation qui en est prévue. Pour les juges, c’est au titre de cette obligation qu’il doit s’interroger sur la pérennité du matériel déjà installé chez l’acquéreur et avec lequel le bien vendu doit fonctionner. Cour de Cassation, chambre commerciale, 7/09/10, n° 08-17.890 Application plus novatrice pour du carrelage Ayant vendu du carrelage qui, destiné à être posé autour d'une piscine, s’est désintégré à cause de l'eau, traitée, de la piscine, le vendeur est assigné par son client pour non respect de son obligation de conseil. Il est reproché au vendeur de ne pas avoir conseillé à l'acheteur un carrelage adapté à son environnement. Les juges ont accueilli la demande du client alors même qu’il ne s’agit pas d’une vente de « produits complexes », tels certains matériels informatiques. Cette obligation de conseil consiste à se renseigner sur les besoins de l'acheteur, et à l'informer quant à l'adéquation du produit proposé à l'utilisation qui en est prévue. Enfin, il est rappelé que c’est au professionnel de prouver que son obligation de conseil a été correctement remplie. Cour de Cassation, 1ère chambre civile, 28/10/10, n°09-16.913 Si vous désirez une étude complète sur un des thèmes de cette lettre, prenez contact par email. Retrouvez toutes ces informations, et d’autres, sur le blog du cabinet : http://olivier.poulet.avocats.fr Vous retrouverez aussi différentes interventions dans les groupes de discussion ouverts sur Viadeo et Linkedin LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 7 Droit de la publicité HONORER OU COUCHER, TOUT EST QUESTION DE TERMINOLOGIE Deux décisions du Jury de Déontologie Publicitaire, rendues le même jour, illustrent la grande difficulté d’analyser de manière objective, et sécurisante, les messages publicitaires. Humour gras ? Sur plainte d’un particulier contre une publicité sur Internet pour un site proposant des renseignements sur la situation financière des entreprises, le Jury demandé l’arrêt de cette publicité car elle porte atteinte à la dignité des femmes. Selon la Recommandation Image de la personne humaine de l’ARPP « La publicité ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d’objet » et « la publicité doit éviter d’induire une idée de soumission ou de dépendance dévalorisant la personne humaine et en particulier les femmes ». Le Jury décide que le texte de la publicité est dévalorisant pour la femme car il joue sur deux sens du verbe honorer, dont celui à connotation sexuelle, et qu’il induit sans aucun doute, et en dépit des dénégations, une image de la femme traitée comme un objet et comme étant soumise à son employeur. Jury de Déontologie Publicitaire, décision du 22/11/10, dossier 77/10. Humour provocateur ? Suite à trois plaintes de particuliers contre une campagne d’affichage en faveur d’une marque de chaussures, le Jury a estimé qu’il n’y avait pas atteinte à la dignité de la personne humaine. Pour les plaignants, le texte placardé revient à légitimer toute forme de pression sexuelle dans le cadre du travail. Après avoir rappelé le même passage de recommandation ARPP que ci-dessus, le Jury relève que ce visuel ne comporte aucune représentation dégradante ou avilissante de la femme. Le texte « procède par une énumération systématique, excessive et volontairement provocante. Il s’agit de décrire sur le mode ironique et hyperbolique des comportements que l’on prétend, à tort ou à raison, être ceux des milieux de la mode et de la publicité, et des situations d’inégalités et de difficultés possiblement vécues par des personnes exerçant leur profession dans ces milieux. La virulence de ces descriptions est en total décalage tant avec la futilité de l’image qu’avec la faible valeur du produit représenté souligné par le slogan traditionnel de la marque ». Ainsi présentés, ces messages constituent non la mise en avant de comportements dégradants ou avilissants pour la personne humaine, voire leur validation, ou la légitimation de situations professionnelles conduisant à des souffrances pour les personnes mais plutôt la dénonciation de tels comportements et un appel à la réflexion des milieux concernés. De ce fait, ce message ne contrevient pas aux termes de la Recommandation « Image de la personne humaine » de l’ARPP. Jury de Déontologie Publicitaire, décision du 22/11/10, dossier 75/10. LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 8 FOCUS INTERNET, LA PUBLICITE POUR LES BOISSONS ALCOOLISEES ET LE MESSAGE SANITAIRE La publicité pour les boissons alcoolisées a été autorisée sur Internet. Juridiquement cette autorisation a été accordée en introduisant Internet dans la liste des supports autorisés de l’article L3323-2 du Code de la Santé Publique. Ce qui veut dire que ce support doit respecter toutes les autres dispositions du Code de la Santé Publique, que l’on parle des contenus ou du message sanitaire. Mais précisément, au sujet de ce message sanitaire, comment doit-il apparaître sur les pages des sites ? En permanence comme un élément du cadre intangible du site, que l’on parle ou non d’alcool ? Ou seulement en pied des pages déroulantes lorsqu’on parle d’une boisson alcoolisée ? Ou bien encore seulement en page d’ouverture ou dans les mentions légales ? Si on se réfère aux dispositions très succinctes de l’article L3323-4, on sait que toute publicité doit être assortie du message. C’est tout et c’est un peu court! LA RECOMMANDATION « Alcool » de l’ARPP ? On nous dit que le message de caractère sanitaire doit, pour être clairement lisible et visible, être mentionné exclusivement à l’horizontale, en caractères imprimés en corps gras, d’une couleur tranchant sur le fond du message, aucune lettre ne devant avoir une hauteur inférieure au 1/100e de la somme hauteur/largeur de l’annonce considérée, avec un décalage par rapport aux bords de l’annonce d’au moins deux fois la hauteur des lettres, et être exprimé selon la formule “L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération”. Toutefois la formule peut être réduite à la première partie de la phrase pour des raisons liées à la dimension du support. Doit-on comprendre de l’exigence, déontologique de lisibilité et de visibilité, qu’il doit être en permanence dans le cadre des pages ? Ce n’est pas évident. LA PRATIQUE « TABAC » ? Pour se donner quelques éléments de comparaison, regardons du coté du tabac. Le message sur les paquets (et bientôt les photos) est imprimé à un endroit apparent, de façon inamovible et indélébile, et ne peut être dissimulé, voilé ou séparé par d’autres indications ou images ou par l’ouverture du paquet. Et en ce qui concerne les produits du tabac autres que les cigarettes, les textes peuvent être apposés au moyen d’adhésifs, à condition que ces derniers soient inamovibles. (Arrêté du 15 avril 2010 article 8) Là on pourrait comprendre : le message dans le cadre, en permanence ! LA MENTION « ANTI OBESITE » ? Et pour le message sanitaire sur les publicités pour tous les produits alimentaires, les modalités d’apposition sont-elles plus claires ? Pas vraiment. L’arrêté du 27 février 2007 nous précise que « le message sera présenté d’une manière aisément lisible ou audible, respectueuse de sa vocation de santé publique et clairement distinguable du message publicitaire ou promotionnel ». EN CONCLUSION, QUE FAIRE ? Pour en revenir à nos moutons, sur les sites de « communication en ligne » qui comportent des messages publicitaires pour les boissons alcoolisées, comment appose-t-on ce message ? La prudence, et une vision en cohérence avec des engagements sur la consommation responsable, voudraient la présence permanente dans le cadre de la page, et dans une couleur tranchant sur le fond. Et en respectant les exigences de taille. Mais les autres modes d’apposition sont-ils tous illégaux ? Pas sûr tant le texte est vague. En tout état de cause, cela ne peut qu’inciter à la plus grande prudence. LETTRE N°16 3 novembre 2010 LA LETTRE JURIDIQUE Page 9 IL FAUT RELIRE « L’ŒUVRE » D’EMILE ZOLA DIVERS L’exposition Monet fait salle comble au Grand Palais et il est vrai qu’il est particulièrement passionnant de revoir ainsi rassemblées tant d’œuvres qui ont participé à la révolution de la peinture occidentale et ouvert la voie à bon nombre des courants du 20ème siècle. L’apparente facilité, et la tranquille évidence de tous ces tableaux masquent le combat de Claude Monet et de ses contemporains pour accepter leur propre liberté et la faire partager. Aussi, pour mieux pénétrer l’intimité de ce peintre, on ne peut que recommander l’un des épisodes des Rougon Macquart d’Emile Zola, l’Oeuvre, qui conte la vie et les tourments de Claude Lantier, peintre impressioniste s’il en est, mélange de différents peintres impressionistes que Zola cotoyait, qui va sombrer dans la folie, et la mort, vaincu par son combat pour une peinture différente et naturelle. Comme à son habitude, Emile Zola dresse autour de son héros une description pointilliste et minutieuse de la société du 19ème siècle et plus particulièrement du monde de l’art à cette époque. Il y a bien sûr quelques passages mélodramatiques, excessifs. Mais l’ensemble n’en reste pas moins très instructif pour comprendre comment on peut parvenir à consacrer d’immenses toiles à de simples reflets du ciel dans un étang couvert de nymphéas. On pourra compléter cette lecture des différents articles de Zola sur la peinture et sur ses amis. Enfin à noter le très beau catalogue de l’exposition ainsi que le site internet http://www.monet2010.com qui propose un voyage original à travers l’œuvre de Claude Monet. Des formations peuvent être réalisées dans vos locaux sur les thèmes suivants : Contrôles, perquisitions, Droit de la concurrence Droit du contrat Principes de négociation Publicité en général et publicité des boissons alcoolisées Le Cabinet est enregistré comme prestataire de formation auprès du Préfet de Région de Bretagne sous le n°53 350863935. Cet enregistrement ne vaut pas agrément de l’Etat. LETTRE N°16 3 novembre 2010