"VERS LA CHINE DES CONFINS"

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"VERS LA CHINE DES CONFINS"
Projet initié par l'association ADOR, association des écoles supérieures
d'art du sud de la France. Voyage en Chine réalisé avec l'implication des
écoles supérieures d'art d'Aix-en-Provence, Arles, Avignon, Monaco et
Montpellier-Agglomération, grâce au soutien de CulturesFrance, des
Directions Régionales des Affaires Culturelles et des Régions ProvenceAlpes-Côte d'Azur et Languedoc Roussillon, et du Service de Coopération
et d'Action Culturelle du Consulat général de France à Canton.
Exposition présentée à L'Abbaye de Montmajour, du 25 octobre 2008 à la
fin février 2009, en partenariat avec le Centre des Monuments Nationaux.
Publication réalisée par l'association ADOR, avec le concours de
CulturesFrance
La présente édition inclut un DVD PAL/Stéréo/4:3/Français
Contenu du DVD :
Dongba, film de François Lejault, 58 min, 2008.
Contes des Cinq Montagnes, d’Alexandre Nativel, 18 min 26, 2008
Ce que je vois, textes de Caroline Muheim, lus par l’auteure, 2008
Projet Yunnan
Genèse, objectifs, mise en oeuvre et restitution
Les documents réunis dans le cadre de cette publication, en contrepoint de
l'exposition présentée à l'Abbaye de Montmajour, ne correspondent ni à
l'aboutissement d'un projet de création artistique à part entière, ni au
compte-rendu d'une recherche spécifiquement documentaire ou
ethnographique, ni même au bilan d'un projet pédagogique un peu décalé,
bien qu'ils en adoptent divers aspects et en mêlent les formes et les codes.
Il s'agit plutôt de restituer ici la diversité des interrogations, modes de
représentation et propositions plastiques, issus de l'expérience collective,
hybride et itinérante, qui a mené à l'automne 2006 un groupe d'une
vingtaine d'étudiants et enseignants français et chinois, depuis Canton
jusqu'aux marches du Tibet, à travers les régions montagneuses du sudouest de la Chine. Mais toute expérience, même la plus improbable, prend
son sens dans le cheminement de la réflexion qui la sous-tend, l'épaisseur
du vécu et les rencontres humaines qui l'éclairent, le questionnement
qu'elle permet d'ouvrir :
Genèse et objectifs du projet
En novembre 2003, à la faveur de l'Année de la Chine en France, cinq
membres de l'association ADOR, association des écoles d'art du sud de la
France, se sont rendus en Chine, avec le soutien de la Région ProvenceAlpes-Côte d'Azur (jumelée avec la Région du Guangdong au sud de la
Chine), pour y visiter notamment les académies des beaux arts et centres
d'art de Pékin, Hangzhou, Shangaï et Canton, afin de nouer des contacts
visant à engager des partenariats culturels et pédagogiques franco-chinois.
A l'issue de ce séjour, deux enseignants ont choisi de se rendre à Kunming
et Lijiang, dans la province du Yunnan, pour élargir cette prospection en
direction de la Chine de l'intérieur. Le Projet Yunnan a donc été conçu dans
cette perspective d'échanges, déplaçant cependant l'objectif initial des
mégapoles côtières vers la Chine périphérique et ses minorités.
La rencontre avec le professeur Deng Qiyao, anthropologue, doyen de la
Faculté de communication visuelle de l'Université Sun Yat-sen de Canton,
aura joué en ce sens un rôle déterminant. En attirant notre attention sur les
spécificités culturelles de la minorité Naxi, en facilitant nos contacts au
Yunnan, puis en s'impliquant personnellement dans l'organisation de ce
projet, il a en effet permis à ce voyage franco-chinois de se réaliser en
partenariat avec l'Université de Canton, en relation aussi avec des
enseignants de l'Académie des Beaux Arts de Canton et des chercheurs de
l'Institut de Recherche sur la Culture Dongba de Lijiang au Yunnan.
Mais tous ces contacts auront été facilités par le travail précurseur initié dès
les années 80 par Jean Biagini, alors chargé de mission à la Délégation
aux Arts Plastiques, qui a mis en place les premiers échanges de jeunes
artistes avec la Chine et le Japon, grâce à l'engagement des écoles d'art du
Sud : les écoles d'Aix-en-Provence et Toulon ont ainsi continué à accueillir
régulièrement en résidence de jeunes artistes et théoriciens chinois et à
échanger des étudiants. Nombre d'entre eux sont devenus des artistes ou
des médiateurs internationalement reconnus (Huang Yongping, Fei
Dawei...). D'autres, aujourd'hui enseignants dans les principales écoles
d'art de Chine, sont les relais privilégiés de partenariats avec les écoles
d'art françaises.
Il était cependant important de définir préalablement des objectifs et de
proposer des pistes de réflexion. Le texte intitulé Projet Yunnan, modèles
dominants, cultures minoritaires, dynamiques contemporaines, rédigé
préalablement à ce voyage, a donc été soumis à nos partenaires chinois
pour qu'ils précisent en retour leurs propositions et diffusé auprès des
étudiants du réseau des écoles d'art du sud de la France pour qu'ils
puissent faire acte de candidature. Malgré son caractère encore théorique,
il a semblé important d'en reproduire ici la majeure partie, car ce texte aura
contribué à éveiller l'intérêt des étudiants en évoquant une diversité
culturelle chinoise bien mal connue en France. Les notes rédigées
ultérieurement au voyage, reprennent ces mêmes questionnements dans
une perspective plus concrètement frottée à la matière du quotidien,
marquée par la chaleur des partages.
Réalisation du voyage
Ce voyage vers la Chine des confins, s'est déroulé du 12 septembre au 9
novembre 2006, avec l'implication des écoles supérieures d'art d'Aix-enProvence, Arles, Avignon, Monaco et Montpellier-Agglomération et le
concours de CultureFrance, des DRAC et Régions Provence-Alpes-Côte
d'Azur et Languedoc Roussillon. Nos partenaires chinois ont bénéficié du
soutien de l'Université Sun Yat-sen de Canton et de Canon.
La première partie du voyage s'est déroulée à travers les régions
montagneuses des provinces du Guangdong, du Hunan, du Guangxi et du
Guizhou, peuplées de nombreuses minorités, dont les Yao, les Dong et les
Miao, évoqués ici. Commencé à bord de trois campings de Canton jusqu'à
Kunming, capitale du Yunnan, ce voyage s'est poursuivi vers les hautes
vallées du Yunnan, en utilisant les moyens de transport locaux ou à pied et
sac au dos. Notre groupe était alors constitué d'une vingtaine de
participants : le professeur Deng Qiyao, accompagné de huit de ses
étudiants en communication visuelle, journalisme et anthropologie, le
directeur d'un musée de Taïwan, spécialiste du patrimoine textile de la
minorité Miao, ainsi que trois enseignants du réseau ADOR, accompagnés
de huit étudiants en art, photographie et conservation-restauration
d'oeuvres d'art des cinq écoles supérieures d'art impliquées. A partir de
Lijiang, trois jeunes chamanes Dongba de la minorité Naxi nous ont
également accompagnés.
La seconde partie du voyage s'est poursuivie dans les régions d'altitude du
nord Yunnan, nous permettant de visiter les villages de plusieurs minorités,
Naxi, Tibétains, Mosso, Yi et Pumi, ou d'y séjourner. Après le retour de nos
amis de l'Université de Canton, nous avons voyagé d'abord en compagnie
du responsable du Centre de recherche sur la conservation-restauration de
l'Académie des Beaux Arts de Canton, accompagné de l'une de ses
étudiantes, puis de deux chercheuses de l'Institut de recherche sur la
culture Dongba de Lijiang accompagnées des trois jeunes chamanes
Dongba que nous avons ainsi retrouvés. Le retour de Kunming à Canton
s'est fait par le train.
Pendant ces deux mois, tous les participants au voyage ont donc campé où
habité dans les villages, partageant le mode de vie, la nourriture et les fêtes
des paysans, qui nous ont toujours accueillis très chaleureusement. La
dimension humaine de l'expérience a sans doute constitué la dimension
centrale d'un projet que ses participants ont parfois pu vivre aussi comme
une sorte d'épreuve personnelle, du fait des contraintes liées au mode de
vie spartiate des paysans chinois et à l'absence de repères culturels dans
ces provinces où cohabitent des populations de langues et de traditions fort
différentes.
Le recours à la photographie, à la vidéo, au dessin, à l'écriture ou à la prise
de son, a permis aux uns et aux autres de garder trace d'une expérience
qui ne s'est pas interrompue avec le retour en France. La mise en forme
des matériaux rapportés, le développement de travaux plastiques plus
personnels, les lectures effectuées ensuite, témoignent à la fois des
interrogations multiples suscitées par ce voyage et du désir de ses
participants d'en prolonger l'écho pour mieux élaborer le projet de restitution
collective engagé par étapes.
Restitution de l'expérience
Cette expérience partagée et itinérante, différente des résidences
individuelles de création organisées par ailleurs à Berlin ou à Rio de Janeiro
par le réseau ADOR, correspond à une volonté des écoles d'art de
renforcer leur dynamique interrégionale pour mieux s'ouvrir aux échanges
internationaux. La restitution de l'expérience, qui réunit des travaux réalisés
par les participants français et chinois à ce voyage, ne vise pas seulement
à présenter l'entrecroisement des points de vue, elle interroge aussi les
modes de représentation et de construction d'un réel qui pouvait apparaître
à la fois comme insaisissable (faute de disposer des codes permettant de
bien le comprendre) et trop prégnant (les mises en scène identitaires se
révélant difficiles à dissocier de l'exotisme touristique).
Les premiers états de ce travail de restitution (exposition, films et
conférences) ont été présentés à l'Université de Canton dès novembre
2006, à l'Ecole Supérieure d'Art d'Aix-en-Provence en février 2007, puis à
l'Ecole Supérieure des Beaux Arts de Montpellier-Agglomération en mars
2008.
L'exposition présentée à l'Abbaye de Montmajour du 25 octobre à la fin
décembre 2008, ainsi que la présente publication, accompagnée d'un choix
de films et de lectures sur support DVD, réalisés avec le soutien de
CulturesFrance et du Centre des Monuments Nationaux, seront présentés
en Chine en 2009.
Jacques Defert
Enseignant d’anthropologie, Ecole supérieure d’Art d’Avignon
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