UNIVERSITÉ ABOU BEKR BELKAÏD DE TLEMCEN FACULTÉ DE MÉDECINE BENAOUDA BENZERDJEB DIABETE ET RAMADAN Journée de FMC régionale Bejaïa, le 29 juin 2013 A.YAHIA-BERROUIGUET Service de Médecine Interne – diabétologie C. H. U. de TLEMCEN Le Ramadan, mois sacré (de prière et de ferveur religieuse) Les 5 piliers de l’islam : 1er pilier: La profession de foi 2ème pilier: La prière 3ème pilier: L’aumône 4ème pilier: Le ramadan 5ème pilier: Le pèlerinage Sourate 2, Verset 183-1 La religion Musulmane Quelles instructions suivre durant une journée de Ramadan? Déroulement d’une journée de Ramadan Rester à jeun* du lever au coucher du soleil Durée : 10 à 20 H (2013: 16H 30) Durant 1 mois lunaire (29 - 30j) *A jeun = se priver de nourriture, boissons, cigarette, médicaments oraux et injectables (?), relations sexuelles 1 journée type : 2-3 repas Al Ftour : rupture du jeûne (après le coucher du soleil) Al Ichâa: repas 2 - 4H après (Pour certains) S’hour : repas du matin avant le lever du soleil Repas d’ « Al Ftour » Moment de partage et de vie communautaire festive Dattes Lait Shorba ou Harira Pain Brick à la viande/à l’œuf Salades, légumes, poivron Café (ou thé, ± lait) (environ 3) (1 verre) (1 bol) Tagine de mouton aux pruneaux Classiques : zlabilla, makrout (1 verre) Repas du « S’hour » Couscous aux raisins secs Café (au lait) ou thé sucré Messemem, crêpe ou pain Beurre, miel et confiture Eau INTRODUCTION Le diabète affecte les individus de toute confession religieuse Les musulmans : 1,5 milliard 50 millions diabétiques sont concernés ++ diabétiques veulent jeûner, au détriment de leur état de santé Dilemme pour les praticiens! PROBLEMATIQUE Peut- on autoriser un diabétique à jeûner? Quels sont les arguments pour ou contre! Si oui, Déterminer s’il peut le faire sans risque (hypo, DesH2O, coma) De mesurer les CSQ du jeûne, à long terme Comment l’accompagner (ASG)? Littérature internationale Publications « Diabète et Ramadan » Effets physiologiques du jeûne Modalités de la prise en charge thérapeutique PUBLICATIONS Ahmedani MY, et al. Diabet Med. 2012; 29:709-15. Ibtissem Oueslati, et al. La tunisie Medicale - 2012 ; Vol 90 ( n°010 ) : 735 – 739 Aravind SR, et al. Curr Med Res Opin 2011; 27:1237-42. Wojciechowski P, et al. Pol Arch Med Wewn 2011; 121: 333-43. Mohammed Abdul Jaleel, et al.Indian J Endocr.Met. 2011 Oct-Dec; 15(4): 268–73 Al-Arouj M, Assaad-Khalil S, Buse J et al. Diabetes Care. 2010; 33:1895-902. Al Sifri S, et al. Int J Clin Pract 2011; 65: 1132-40. Bravis V, et al. Diabet Med 2010; 27:327-31. Diabetes Technol Ther 2010;12:287–290. Hassanein M, et al. Diabetologia. 2009 Feb; 52(2):367-8. Garg S, et al. Diabetes Care 2006; 29: 44- 50. Zargar A, et al. J Indian Med Association 2005; 103: 444-6. Diabetes Care 2005; 28: 421-2 Salti I, et al. 1422/2001 (EPIDIAR) study. Diabetes Care 2004; 27: 2306-11. Pascal DEGRI, Enquête auprès des adolescents DID 1999, France Beshyah SA, Jowett NI, Burden AC. Diabet Med 1988; 5: 32-3. ……. ENQUETE « DID » MAGHREBINS (1) Différents opinions Les parents (font pression dans le sens de la prudence) L’Imam « le religieux » Le médecin Adolescents Marquer leur appartenance à la communauté Identité religieuse Le diabète « maladie aussi grave pour ne pas le faire » (Pascal DEGRI, Enquête auprès des adolescents DID 1999, France) ENQUETE « DID » MAGHREBINS (2) Ceux qui n’observent pas le jeûne Ceux qui disent ne pas le faire mais le font en réalité Mangent leurs repas + celui de la famille (hyperglycémie++) Prennent le plus de risque Arrêtent leur TRT pour le faire, s’exposent aux hyperglycémies Imprévisibles (un jour oui, un autre ils ne le font pas) Ceux qui veulent explicitement le faire Posent le moins de problèmes Comprennent les enjeux et la maîtrise de leur traitement (Pascal DEGRI, Enquête auprès des adolescents DID 1999, France) EPIDIAR study Profil épidémiologique des diabétiques Complications recensées 12243 individus qui jeûnent 13 pays Algérie, Tunisie, Maroc, Egypte Jordanie, Saoudia, Liban, Turquie, Pakistan, Inde, Bangladesh, Indonésie, Malaisie 10 patients interrogés par praticien 100 praticiens par pays (généralistes, diabétologues, internistes) Salti I, et al. 1422/2001 (EPIDIAR) study. Diabetes Care 2004; 27: 2306-11. EPIDIAR study Profil épidémiologique DT1 DT2 1070 (8,7 %) 11 173 ( 91,3%) Age/ durée (ans) 31 54 Durée du diabète (ans) 10 7,5 Niveau lycée/Université % 70 49 Autocontrôles % 67 37 Aides de la famille % 76 69 Suivi non spécialisé % 10,3 26,2 Pas de changement TRT % 64 (insuline) 75 Accomplissent Ramadan % 42,8 Maroc (9,4) Saudia (71,6) 78,7 n Salti I, et al. 1422/2001 (EPIDIAR) study. Diabetes Care 2004; 27: 2306-11. EPIDIAR study Complications DT1 DT2 Hypoglycémie sévère l’année précédente 23 % 4% Hypoglycémie pendant Ramadan 9% 2% Hyperglycémie sévère l’année précédente 40 % 9% Hyperglycémie pendant Ramadan 13% 4% Risque d’hypoglycémie Risque d’hyperglycémie DT 1 X 4.7 X 3 DT 2 X 7.5 X 5 Hypoglycémies sévères: non changement TRT, niveau d’activité Hyperglycémies sévères : abus alimentaires (sucreries) Salti I, et al. 1422/2001 (EPIDIAR) study. Diabetes Care 2004; 27: 2306-11. Diabète: Physiopathologie Dans le diabète de type 1 : - Insulinopénie absolue - Conservation de la production du glucagon * Le patient adapte ses injections selon sa ration * L’insulinothérapie « basal bolus », requise Insulinothérapie fonctionnelle Dans le diabète de type 2 - Coexiste une insulinopénie + insulinorésistance - Accroissement de la sécrétion de glucagon Jeûne: Physiopathologie Cycle insuline-glucagon Jeûne court Chute de la glycémie Sensation de faim Diminution de l’insulinémie Sécrétion de glucagon et catécholamines Néoglucogénèse Jeûne prolongé Libération d’acides gras Oxydation des acides gras Hyperglycémie et Acidocétose Cétogénèse Jeûne: Aspects physiologiques (1) Le jeûne comporte 2 phases : 1. Une phase d’adaptation (≃ 10 jours) L’organisme passe d’un régime classique à un régime de rigueur 2. Une phase d’équilibre - Disparition des difficultés ressenties lors de la 1ère phase - Perte de poids modeste (sauf excès) Jeûne: Aspects physiologiques (2) L’hydratation réduite En période du jeun, le corps s’adapte et réduit ses pertes * Urines concentrées * Selles dures En dehors du jeûne : les apports d’eau couvrent les pertes *Urines, *sudation, *respiration,* transit intestinal, … Jeûne: Aspects physiologiques (3) Psychologiques 1. Contrainte qu’impose l’esprit au corps 2. Moyen de contrôle des pulsions (colère , agressivité) • Devrait améliorer l’équilibre glycémique Sommeil court et fractionné Baisse des performances intellectuelles et physiques Jeûne: Risques potentiels Déshydratation et thrombose (déshydratation, hyperG., chaleur) Hyperglycémie, acidocétose (Diabète type I) Hypoglycémie Diabète II (sulfamides, insuline) Diabète I (insuline non adaptée au repas, efforts physiques) Décompensation de pathologies (cardiaque, HTA) Al-Arouj M, et al. Recommendations for management of diabetes during Ramadan: update 2010. Diabetes Care. 2010; 33:1895-902. Cependant, l’Islam Exempt du jeun la personne malade ou susceptible de le devenir Réunion de Consensus (Maroc 1995) Recommandations (EPIDIAR, 2005) Ramadan autorisé si DT2 s/biguanides et/ou sulfamides, stables sans co-morbidités ni complications Déconseillé chez les patients DID difficile à équilibrer, maladie instable (acido-cétose) Co morbidité (coronaro, HTA non contôlée, IR, AVC) Sujet âgée, polymédiqué ou vivant seul Femmes enceintes, allaitement Maladies intercurentes (infections) Edition of the Hassan II Foundation for scientific and Medical Research on Ramadan. 1995 Salti I, Diabetes Care 2004; 27:2306-2311 Stratification de risque Patients DI – DII jeûnant Ramadan - 2010 NB : Opinions d’experts (non sur des données scientifiques) Très haut risque Hypoglycémie sévère (- 3 mois) Hypoglycémies récidivantes et/ou non ressenties Déséquilibre glycémique permanent Acidocétose ou coma hyperosmolaire (- 3 mois) Diabète I Affection aigue intercurrente Grossesse Dialyse Haut risque Hyperglycémie 1,5 - 3g/l ou HbA1c 7,5 - 9% Insuffisance rénale Morbidité macrovasculaire Sujet vivant seul (s/ insuline ou sulfamide) Co- morbidités Update 2010. Diabetes Care. 2010; 33:1895-902. Stratification de risque Patients DI – DII jeûnant Ramadan - 2010 NB : Opinions d’experts (non sur des données scientifiques) Risque faible Diabète bien contrôlé sous sulfamides /courte durée d'action Très faible risque Diabète bien contrôlé MHD Metformine, acarbose, glitazones, incrétines … Update 2010. Diabetes Care. 2010; 33:1895-902. “Organization of Islamic Conference” Résumé des recommendations, 2011 Très haut risque Travail physique intense Haut risque Rétinopathie diabétique avancée État psychiatrique justifiant des drogues affectant le cognitif Indian J Endocr.Met. 2011 Oct-Dec; 15(4): 268–73 Comment aider /accompagner nos patients diabétiques ? Ramadan comment manager nos diabétiques? Hui E et al. 26 june 2010 | Volume 340 BMJ 2010;340:bmj.c3053 Ramadan se prépare à l’avance (2 - 4 mois) Evaluation médicale Approche individualisée Evaluation clinique : IMC, PA, lipides, A1c., fonction rénale Adaptation du TRT: choix de molécule, horaire Education thérapeutique Planification de repas et conselling diététique (2-3 repas, boissons) Intensité exercice physique Auto surveillance glycémique (ASG) Identification et contrôle des complications Hui E et al. 26 june 2010 | Volume 340 BMJ 2010;340:bmj.c3053 Adaptation TRT anti diabétique (DII) Metformine (500, 850, 1000) Sulfamide Gliclazide Glimépiride Glibenclamide Avant Ramadan 8h / 13h / 20h Pendant Ramadan 20h / 00h / 4h 1 / 1/ 1 1 / 0/ 1 0 / 1/ 1 0 / 1/ 0 1 / 1/ 1 1 / 0/½ 1 / 0/0 1 /0/ ½ IAG acarbose 1 / 1/ 1 1 / 0/ 1 Glinide repaglinide 1 / 1/ 1 1 / 0/ 1 Hui E et al. 26 june 2010 | Volume 340 BMJ 2010;340:bmj.c3053 Adaptation insulinothérapie (préférer les analogues) TRT initial TRT adapté Mixte Mix® 25/30/50 1 injection au Ftour À éviter le matin ou 1/3 dose ou remplacer par basal + 1-2 bolus NPH 1 injection Idm ou analogue lent (même dose ) 2 injections Passer à 1 analogue lent (20-30%) Analogue lent 1 inj./j Analogue lent Rapide ultrarapide Supprimer dose de la mi- journée dose matin (shour) dose rupture (ftour) Hui E et al. 26 june 2010 | Volume 340 BMJ 2010;340:bmj.c3053 Schéma « 1 basal » : Bed time Analogue basale FTOUR ICHAA SHOUR Schéma à 2 injections : Mix + Rapide Insuline Mix Analogue rapide FTOUR SHOUR Schéma analogue lent « basal 2 +» Analogue basale Analogue rapide Analogue rapide FTOUR ICHAA SHOUR Schéma analogue lent « basal 3 +» Analogue basale Analogue rapide FTOUR Analogue rapide ICHAA Analogue rapide SHOUR AUTOSURVEILLANCE GLYCEMQIUE C’est quoi et pourquoi? Mesurer soi-même sa glycémie. Elle vérifie : Pour se faire, elle nécessite: Que tout va bien ou il va falloir « rectifier le tir » Identification et gestion des urgences (hypoglycémies) Moment de dialogue ++ « malade – médecin » Education minutieuse du patient Soutien de l’équipe soignante Respect de protocole : fréquence, rythme, objectifs, ajustements Intérêt : marqueur de prise en charge active de la maladie Clefs pour réussir Ramadan Ramadan se prépare au moins 2 mois à l’avance Approche individualisée (patient) Adapter le traitement Conselling diététique S’hydrater +++ Dormir suffisamment Favoriser l’exercice physique contrôlé (prière Tarawaih) Autocontrôle glycémique (ASG) Identification et contrôle des complications Rupture du jeûne: Hypoglycémie < 0,6 g/l Hyperglycémie > 3.5 g/l CONCLUSION La décision de jeûner doit être le résultat d’un dialogue éclairé entre médecin et patient Elle devra se conformer le plus possible aux recommandations Les excursions glycémiques méconnues restent des événements à haut risque en l’absence de l’ASG. ASG (auto surveillance glycémique) renforcée TLEMCEN, VILLE D’ART ET D’HISTOIRE