095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 99 Construction de l'Union européenne et croissance économique Document 1 m Mots clés – PNB par habitant – taux d’ouverture Rappel de cours 1 Le PNB, principal agrégat de la comptabilité nationale, mesure l’ensemble des valeurs ajoutées créés par les unités économiques nationales, qu’elles produisent sur le territoire national ou à l’étranger. Cet indicateur, contrairement au PIB, ne comptabilise donc pas les activités productives des entreprises étrangères sur le territoire national. Si on observe peu de différences entre le PNB et le PIB pour les pays développés, il existe parfois pour certains PED, où l’implantation de firmes multinationales est forte, un écart significatif entre ces deux agrégats. Le PNB par habitant est le rapport entre le PNB d’un pays pour une année t et la population moyenne en milieu d’année (c’est-à-dire la moitié de la somme de la population au 1er janvier de l’année t et de la population au 1er janvier de l’année t + 1). C’est un indicateur imparfait, mais fréquemment utilisé, du niveau de vie par habitant. Il s’agit d’une moyenne qui ne prend pas en compte les inégalités de répartition de richesses au sein d’un pays. Une variation du PNB par habitant permet d’établir si le pays est dans une conjoncture favorable au développement ou non : – si le taux de variation du PNB/hab. est négatif, alors le niveau de vie moyen se contracte (période non favorable au développement) ; – si le taux de variation du PNB/hab. est positif, le niveau de vie moyen augmente (période favorable au développement). Le taux d’ouverture d’une économie est défini en note dans le document, il se calcule par la somme des importations et des exportations divisée par deux et rapportée au PIB. Ce ratio permet d’évaluer le degré d’ouverture d’un pays, c’est-à-dire la place que tient le reste du monde (l’environnement extérieur) dans une économie nationale. Plus il est élevé et plus l’insertion dans le commerce international est forte. m Que dit le document ? Ce document permet d’illustrer les relations éventuelles entre le taux de croissance annuel moyen (TCAM) de la production par habitant des PED, et leur niveau d’ouverture vers l’extérieur pendant plusieurs périodes. © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 100 Une relation positive entre ces deux indicateurs se dégage, quelle que soit la période considérée : plus l’économie est ouverte, plus le TCAM du PNB/hab. est élevé. Ainsi, si de 1986 à 1992 le PNB/hab. des PED les plus ouverts augmente en moyenne chaque année de 5,9 %, il diminue de 0,2 % pour les économies modérément ou très fermées. Les inégalités de croissance entre PED ayant des degrés d’ouverture différents semblent évoluer favorablement pour les pays les plus insérés dans le commerce international. Entre la première période (1963-1973) et la dernière (1986-1992), le TCAM des pays très ouverts a baissé de 1,1 point et de 4,2 points pour les pays modérément fermés. De la même façon, le rapport du TCAM des pays les plus ouverts avec celui des pays modérément ouverts augmente : il est 2,4 fois plus élevé de 1986 à 1992, contre seulement 1,4 fois de 1963 à 1973. L’ouverture internationale, en apportant des ressources nouvelles grâce aux exportations et en renforçant la concurrence entre les productions locales et les importations, permet une hausse du revenu national et rend possible le financement du développement sans endettement excessif. L’insertion dans le commerce international est donc un des facteurs importants de la croissance économique et du développement. Cette conclusion confirme l’analyse des économistes libéraux qui, comme David Ricardo, plaident en faveur du libre-échange. On peut également penser que la hausse de la production industrielle favorise en retour l’insertion dans les échanges internationaux. Rappel de cours 2 Le libre-échange est l’un des thèmes récurrents du libéralisme économique. Adam Smith montre au XVIIIe siècle qu’un pays a intérêt à se spécialiser dans la production où il dispose d’un avantage absolu (c’est-à-dire dont les coûts de production sont inférieurs à ceux de tous les autres pays), et à acheter tous les autres biens. Chaque pays se procure ainsi tous les biens dans les meilleures conditions possibles. Mais cette analyse exclut du commerce international les pays n’ayant aucun avantage absolu. David Ricardo (1772-1823) parvient à dépasser cette objection en montrant que chaque pays doit se spécialiser dans la production où il détient un avantage relatif (production pour laquelle son avantage est le plus grand ou son désavantage le plus faible). Cette spécialisation permet d’utiliser le plus efficacement l’ensemble des ressources disponibles, ainsi tous les pays réalisent un gain à l’échange. Au XXe siècle, les économistes Hecksher, Ohlin et Samuelson ont cherché à expliquer l’origine des différences des avantages comparatifs par la dotation (ou répartition) en facteurs de production de chaque pays. © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 101 Selon le théorème HOS, chaque pays doit se spécialiser dans la production qui incorpore le maximum de facteurs de production qu’il détient en abondance. L’échange international est donc un échange de facteurs abondants contre facteurs rares. Document 2 m Mots clés – indice des prix – marché mondial m Que dit le document ? Ce document retrace l’évolution de 1978 à 1996 de l’indice des prix du cacao pour une quantité donnée sur le marché mondial; la base 100 correspond à l’année 1996. Le cours du cacao comme celui des autres produits primaires (café, bauxite, sucre, céréales…) se détermine sur le marché mondial selon les mécanismes de la loi de l’offre et de la demande. L’offre correspond pour l’essentiel aux quantités exportées par les PED, notamment les pays les moins avancés (PMA), et la demande provient en grande partie des pays développés à économie de marché (PDEM). On note une baisse assez nette du prix du cacao : si pour une quantité donnée le prix du cacao est de 100 € en 1996, il était de 260 € en 1978, soit une différence de 160 points. Plus précisément, quatre périodes se dégagent : 1. une baisse des prix de 1978 (indice 260) à 1981 (indice 160) ; 2. un redressement de 65 points (225 – 160) de 1981 a 1983 ; 3. une chute continue de 1983 à 1992 : le prix du cacao en 1992 est trois fois (225/75) moins élevé qu’en 1983 ; 4. enfin, depuis 1992, le prix augmente pour atteindre l’indice 120 en 1998. Cette évolution globalement négative de la rémunération des producteurs de cacao s’explique par une offre structurellement plus élevée que la demande. Cet exemple démontre que toutes les spécialisations n’entraînent pas des effets équivalents sur la croissance, et donc sur le développement. En définitive, une spécialisation dans des produits primaires semble cumuler plusieurs handicaps : – la part des produits primaires décline dans le commerce mondial au profit des produits manufacturés ; © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 102 – la demande reste peu dynamique, il existe effectivement de nombreux substituts, notamment ceux issus de l’industrie chimique ; – les prix sont orientés à la baisse alors que ceux des pays manufacturés importés par les PED augmentent, on assiste donc à une dégradation des termes de l’échange ; – ces productions ont un faible contenu en technologie et ne donnent pas lieu à des effets d’entraînement sur le reste de l’appareil productif. L’insertion des PED dans le commerce mondial se traduit donc ici par un renforcement de la dépendance de ces pays à l’égard des PDEM. Cette thèse confirme l’approche des économistes d’inspiration marxiste, qui voient le sous-développement comme la conséquence de rapports de domination et de dépendance entre le centre (PDEM) et la périphérie (PED). Le commerce mondial est un moyen pour les PDEM de lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit par l’importation de matières premières à bas prix et par la surexploitation de la maind’œuvre des PED. Selon Arghiri Emmanuel, les PED sont victimes d’un échange inégal, les pays les moins productifs échangent leurs produits contre des biens et des services incorporant une moins grande quantité de travail. Il faut alors rompre avec la logique de l’insertion dans le commerce international en mettant en œuvre des stratégies de développement autocentrées répondant à des objectifs internes. Rappel de cours 3 Les termes de l’échange représentent le rapport entre l’indice des prix des exportations et l’indice des prix des importations. Lorsque le rapport diminue, on parle de dégradation des termes de l’échange. Ce qui signifie que les pays doivent exporter plus en quantité pour maintenir l’équilibre des échanges extérieurs. Document 3 m Mots clés – pays émergents – crise asiatique Rappel de cours 4 Le concept de « pays émergents » est né dans les années 1980 avec le développement des marchés boursiers des pays du Sud. Il désigne les pays connaissant un accroissement rapide de leur revenu par habitant, et par conséquence une part dans le revenu mondial en forte progres- © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 103 sion et un degré élevé d’insertion dans le commerce et dans les flux de capitaux mondiaux. Ce concept reste cependant assez flou puisqu’il regroupe des pays dont le niveau de développement est proche des PDEM comme la Corée du Sud, et des pays où le revenu par habitant demeure faible (Maroc, Mexique…). m Que dit le document ? La multiplicité des crises monétaires et financières auxquelles sont confrontés les PED démontre l’instabilité de leur régime de croissance. Un accroissement rapide du revenu par habitant n’assure pas automatiquement un développement sûr et harmonieux, et reposant sur une industrie dynamique. Les mécanismes de ces crises de surinvestissement, notamment ceux de la crise asiatique de 1997, sont désormais bien connus. Un accroissement rapide des revenus entraîne un afflux important de capitaux. Cette entrée massive de capitaux, stimulée également par le mouvement de globalisation financière, provoque une appréciation des monnaies locales qui diminue le coût de l’endettement extérieur pour les emprunteurs et ouvre la perspective de profits intéressants pour les investisseurs internationaux. Les investissements à la rentabilité plus ou moins assurée se multiplient et contribuent à la création d’une bulle spéculative, qui éclate lorsque les investisseurs constatent que la rentabilité attendue n’est pas au rendez-vous. Des mouvements spéculatifs à la baisse s’enchaînent et provoquent une perte de confiance envers la monnaie et une restriction des crédits. Les conséquences économiques et sociales de ces crises sont importantes : déséquilibre du solde extérieur, multiplication des faillites, augmentation du chômage, contraction rapide des revenus, développement de la misère, etc. Ainsi, la réussite des stratégies de développement par promotion des exportations n’est pas sans condition. Il est indispensable que les recettes issues d’une participation au commerce international soient effectivement réinvesties dans l’appareil productif et « permettent d’enclencher un cercle vertueux de croissance » comme le suggèrent les économistes libéraux. Ouverture internationale Exportations accrues et intensification de la concurrence Hausse de la production et recherche de gains de productivité Croissance économique Hausse de la demande intérieure et de l’investissement Hausse du revenu national © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 104 Ce cercle vertueux suppose un partage harmonieux des gains de productivité entre les différents acteurs de l’économie. L’exemple coréen montre la nécessité d’une intervention de l’État pour mettre en œuvre ce partage et favoriser un développement sur le long terme. À travers une politique volontariste en matière d’éducation, de restructuration de l’appareil productif, l’État coréen, loin des préceptes libéraux, est intervenu massivement dans le processus de développement. Or, comme le souligne Amartya Sen, prix Nobel d’économie en 1998, si les institutions publiques doivent jouer un rôle primordial dans la marche vers le développement, elles restent trop souvent marquées par des régimes totalitaires, peu enclins à lutter contre les inégalités, et où la corruption et le clientélisme demeurent la règle (l’Indonésie avec le régime Suharto illustrait parfaitement cet état de fait). Document 4 m Mots clés – capital humain – capital physique – transfert de technologie – rentabilité de l’investissement (rentabilité économique) Rappel de cours 5 Le capital humain désigne les capacités intellectuelles et professionnelles d’un individu, capacités propres à augmenter sa productivité et à lui procurer des revenus monétaires futurs. Popularisée notamment par Gary Becker, prix Nobel d’économie en 1992, cette notion montre que les salariés sont autant un coût pour l’entreprise qu’une occasion d’investissement pour assurer l’avenir de l’entreprise. Elle démontre également l’importance d’une politique d’éducation et de formation menée par l’État, capable d’engendrer des externalités positives. Le capital physique, ou encore matériel, correspond à un stock de richesses accumulées (plus communément appelé « capital », c’est-àdire tout actif susceptible de procurer un revenu). La rentabilité économique est le rapport entre les résultats et les capitaux mis en œuvre pour les obtenir. Les transferts de technologie d’un pays à un autre correspondent à une forme de mobilité internationale du progrès technique, par l’intermédiaire d’achat de brevets, de licences ou encore par l’implantation d’usines « clés en main ». © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 105 m Que dit le document ? Un investissement important en capital humain, associé au dynamisme de l’investissement physique, constitue l’un des moteurs essentiels de la forte croissance de l’économie coréenne. Source d’une meilleure productivité du travail, les dépenses en matière d’éducation et de formation de la main-d’œuvre augmentent le niveau d’alphabétisation, d’où une maîtrise plus grande de l’accroissement démographique, et servent la compétitivité de l’économie, garantissant ainsi des débouchés aux produits exportés. Une main-d’œuvre plus qualifiée permet effectivement une valorisation plus grande des investissements en leur assurant une rentabilité économique élevée. En retour, l’augmentation du taux d’investissement (montant des dépenses en formation brute de capital fixe, FBCF, rapporté au PIB) agit favorablement sur la demande (multiplicateur keynésien) et sur les conditions de l’offre (compétitivité accrue, hausse des profits, accroissement des capacités d’autofinancement…). En outre, l’augmentation du niveau de qualification permet de profiter pleinement des transferts de technologie rendus possibles par l’implantation de nombreuses firmes multinationales. Le progrès technique se diffuse plus rapidement dans l’économie et autorise une réorientation de la spécialisation vers des produits de plus en plus sophistiqués à forte valeur ajoutée. Cette nouvelle spécialisation réduit les effets de dépendance envers les PDEM liés à un degré d’ouverture élevé. C’est ainsi que la Corée du Sud est parvenue à faire évoluer sa spécialisation et ses avantages comparatifs. Centrée dans les années 1960, sur la production de textile (incorporant beaucoup de facteur travail non qualifié), une politique de remontée de filière (de la production de vêtements à la production de machines textiles) au cours des années 1980, et des efforts de diversification vers des branches nouvelles (électronique, biens d’équipement), ont permis à la Corée du Sud d’adapter ses exportations à l’évolution de la demande mondiale et de restructurer son appareil productif. Nous avons ici les éléments clés du succès d’une stratégie de développement par insertion dans le commerce mondial : spécialisation sur la base des avantages comparatifs, utilisation des recettes des exportations pour diversifier l’appareil productif et investir dans le capital humain, grâce à une politique structurelle active de l’État qui fait naître de nouveaux avantages comparatifs (main-d’œuvre qualifiée, forte compétitivité dans certains secteurs industriels porteurs). © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 106 R É P O N S E S A U X Q U E S T I O N S D U T R AVA I L P R É PA R AT O I R E m Question 1 La question cherche à évaluer la compréhension des données statistiques. Le PNB par habitant des PED à économie très ouverte a augmenté en moyenne chaque année de 6 % de 1974 à 1985. m Question 2 La question vise à tester la capacité du candidat à mettre en relation des données statistiques, et à réinvestir ses connaissances. Une relation positive entre ces deux indicateurs se dégage quelle que soit la période considérée : plus l’économie est ouverte, plus le TCAM du PNB/hab. est élevé. Ainsi, si 1986 à 1992 le PNB/hab. des PED les plus ouverts augmente en moyenne chaque année de 5,9 %, il diminue de 0,2 % pour les économies modérément ou très fermées. Les inégalités de croissance entre PED ayant des degrés d’ouverture différents semblent évoluer favorablement pour les pays les plus insérés dans le commerce international. Entre la première période (1963-1973) et la dernière (1986-1992), le TCAM des pays très ouverts a baissé de 1,1 point et de 4,2 points pour les pays modérément fermés. L’ouverture internationale, en apportant des ressources nouvelles grâce aux exportations et en renforçant la concurrence entre les productions locales et les importations, permet une hausse du revenu national. L’insertion dans le commerce international est donc un des facteurs importants de la croissance économique. Cette conclusion confirme l’analyse des économistes libéraux qui, comme David Ricardo, plaident en faveur du libre-échange. On peut également penser que la hausse de la production industrielle favorise en retour l’insertion dans les échanges internationaux. m Question 3 La question permet de vérifier l’aptitude du candidat à analyser l’évolution d’un indicateur statistique. On note globalement une baisse assez nette du prix du cacao : si pour une quantité donnée le prix du cacao est de 100 € en 1996, il était de 260 € en 1978, soit une différence de 160 points. Malgré une remontée lente des prix depuis 1993, cette évolution négative se traduit par une perte de rémunération importante pour les pays producteurs de cacao. Leurs recettes d’exportation se contractent et compromettent leurs pos- © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 107 sibilités de financer leur développement futur. Les pays producteurs de matières premières restent soumis à l’évolution de la demande adressée par les PDEM. Dans le même temps, les prix de leurs importations en provenance des pays riches augmentent, ce qui se traduit par une dégradation progressive des termes de l’échange. Il leur faut exporter davantage de produits pour obtenir une même quantité de biens importés, il s’agit bien d’un appauvrissement, un processus d’endettement se met alors en place. En outre, la demande en produits primaires est peu dynamique car il existe une multitude de substituts issus de l’industrie chimique. Face à cette atonie de la demande, les producteurs sont contraints de répercuter la totalité de leurs gains de productivité sur les prix, limitant d’autant les possibilités d’investissement et de développement. m Question 4 La question vise à tester la capacité du candidat à comprendre les informations contenues dans texte en utilisant ses connaissances. La réussite des stratégies de développement par promotion des exportations n’est pas sans condition. Il est indispensable que les recettes issues d’une participation au commerce international soient effectivement réinvesties dans l’appareil productif et « permettent d’enclencher un cercle vertueux de croissance » comme le suggèrent les économistes libéraux. Selon cette logique, l’ouverture internationale a pour objectif de développer de nouveaux débouchés et d’accroître la concurrence. Cette intensification de la concurrence est un élément incitatif à la recherche d’une meilleure productivité. Un partage harmonieux de ces ressources nouvelles entre les différents acteurs de l’économie (ménages, entreprises, État…) doit permettre de soutenir la demande intérieure, d’améliorer les conditions de l’offre et d’engager, sous l’égide de l’État, des politiques structurelles (politique d’éducation, lutte contre les inégalités, politique industrielle…) visant à faire évoluer la spécialisation vers des produits industriels à fort contenu technologique. m Question 5 La question vise à tester la capacité du candidat à comprendre les informations contenues dans un texte en réinvestissant ses connaissances. Un investissement important en capital humain, associé au dynamisme de l’investissement physique, constitue l’un des moteurs essentiels de la forte croissance de l’économie coréenne. © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 108 Source d’une meilleure productivité du travail, les dépenses en matière d’éducation et de formation de la main-d’œuvre augmentent le niveau d’alphabétisation, d’où une maîtrise plus grande de l’accroissement démographique, et servent la compétitivité de l’économie, garantissant ainsi des débouchés aux produits exportés. Une main-d’œuvre plus qualifiée permet effectivement une valorisation plus grande des investissements en leur assurant une rentabilité économique élevée. En retour, l’augmentation du taux d’investissement (montant des dépenses en formation brute de capital fixe, FBCF, rapporté au PIB) agit favorablement sur la demande (multiplicateur keynésien) et sur les conditions de l’offre (compétitivité accrue, hausse des profits, accroissement des capacités d’autofinancement..). En outre, l’augmentation du niveau de qualification permet de profiter pleinement des transferts de technologie rendus possibles par l’implantation de nombreuses firmes multinationales. Le progrès technique se diffuse plus rapidement à l’économie et autorise une réorientation de la spécialisation vers des produits de plus en plus sophistiqués à forte valeur ajoutée. Cette nouvelle spécialisation réduit les effets de dépendance envers les PDEM liés à un degré d’ouverture élevé. m Question 6 La question vise à tester la capacité du candidat à comprendre les informations contenues dans un texte en utilisant ses connaissances. Une « production pour l’exportation », c’est-à-dire exclusivement tournée vers l’extérieur, n’est pas sans risque pour les PED. Elle se traduit par une dépendance renforcée à l’égard des PDEM, comme le montre l’exemple des PMA spécialisés dans des produits primaires à faible valeur ajoutée (document 2). C’est pourquoi les économistes d’inspiration marxiste contestent l’efficacité d’une stratégie de développement par une insertion dans le commerce mondial. Les PDEM exploitent les ressources naturelles et humaines des PED pour leur croissance. Il faut alors rompre avec la logique de l’insertion dans le commerce international en mettant en œuvre des stratégies de développement autocentrées répondant à des objectifs internes. m Bilan du travail préparatoire Les questions du travail préparatoire ne permettent pas à elles seules de fournir une argumentation suffisante. Il faut donc étayer sa réflexion par l’analyse des documents et par la mobilisation des connaissances personnelles. © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 109 La première partie de la synthèse portant sur les avantages pour les PED d’une insertion dans le commerce international s’appuiera sur les questions 2, 4 et 5 et sur l’analyse des documents 1, 3 et 4. La seconde partie se donnant pour objectif de montrer que la réussite de ces stratégies n’est pas sans conditions s’articulera autour des réponses aux questions 3 et 6 et des études des documents 2 et 3. P L A N D É TA I L L É D E L A QU E ST I O N D E SY NT H È S E p Introduction – Accroche : crises récurrentes dans la PEO. – Définition des termes : « pays en développement », « insertion dans le commerce international ». – Annonce du plan. p Première partie Les pays en développement peuvent retirer des avantages de leur insertion dans le commerce international. m 1. Les effets favorables d’une insertion dans le commerce international. a. Les PED les plus ouverts sur l’extérieur connaissent des taux de croissance économiques élevés… (question 2). b. … conformément aux thèses libre-échangistes défendues par les économistes libéraux (connaissances personnelles). m 2. L’ouverture internationale exerce un puissant levier sur la croissance et sur le développement. a. Des exportations en augmentation, une concurrence étrangère renforcée génèrent de nouveaux moyens de financement… (question 4). b. … qui exercent un effet favorable sur l’investissement et permettent de faire évoluer positivement la spécialisation (question 5). p Deuxième partie Il existe cependant des conditions à la réussite d’une stratégie de développement par insertion dans les échanges internationaux. m 1. Toutes les spécialisations n’ont pas des effets équivalents sur le développement. a. Une spécialisation des produits primaires… (document 2) b. … tend à renforcer les phénomènes de dépendance à l’égard des PDEM (questions 3 et 6). m 2. Les enchaînement vertueux liés à une insertion dans le commerce international… a. … ne semblent pas irréversibles… (document 3). © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 110 b. … et supposent que l’État mène une politique structurelle volontariste (documents 3 et 4). p Conclusion – Bilan de l’argumentation. – Ouverture. RÉDACTION DE LA QUESTION DE SYNTHÈSE Le caractère récurrent des crises auxquelles sont confrontés les PED (crise du Mexique en 1994, crise asiatique en 1997, crise argentine en 2002) pose avec une grande acuité la question de leur mode de développement. Les PED peuvent se définir, selon François Perroux, comme les situations où les « coûts de l’homme (alimentation ; instruction ; santé) ne sont pas couverts ». Ce concept reste cependant flou puisqu’il regroupe des pays économiquement et socialement hétérogènes comme les nouveaux pays industrialisés (NPI), les pays émergents ou encore les pays les moins avancés (PMA). Depuis les années 1980, la plupart des PED, après les échecs des stratégies autocentrées et soucieux de reproduire « le miracle asiatique », s’orientent vers des stratégies visant à s’insérer dans le commerce international. L’expression « insertion dans le commerce international » désigne à la fois la place qu’occupent les PED dans les échanges mondiaux et le type de spécialisation adoptée. Les situations très différenciées dans les pays ayant mené une telle stratégie invitent à s’interroger sur leurs avantages et sur leurs conditions de réussite. C’est pourquoi, après avoir montré que les PED peuvent retirer des avantages de leur insertion dans le commerce international, nous mettrons en évidence les conditions nécessaires à cette réussite. Les PED peuvent retirer des avantages de leur insertion dans le commerce mondial car elle entraîne des effets favorables sur la croissance économique, susceptibles de faciliter la marche vers le développement. Une relation positive entre le degré d’ouverture des PED et leur niveau de croissance économique se dégage quelle que soit la période considérée : plus l’économie est ouverte, plus le TCAM du PNB/hab. est élevé. Ainsi, si de 1986 à 1992 le PNB/hab. des PED les plus ouverts augmente en moyenne chaque année de 5,9 %, il diminue de 0,2 % pour les économies modérément ou très fermées. Les inégalités de croissance entre PED ayant des degrés d’ouverture différents semblent évoluer favorablement pour les pays les plus insérés dans le commerce international. Entre la première période (1963-1973) et la dernière (1986-1992), le TCAM © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 111 des pays très ouverts a baissé de 1,1 point et de 4,2 points pour les pays modérément fermés (document 1). Cette corrélation ouverture sur l’extérieur – croissance économique confirme l’analyse des économistes classiques et néo-classiques. Au XIXe siècle en poursuivant l’analyse de Smith, Ricardo a démontré les avantages d’une spécialisation dans la production où un pays dispose d’un avantage comparatif (production pour laquelle son avantage est le plus grand ou son désavantage le plus faible). Cette spécialisation permet d’utiliser le plus efficacement l’ensemble des ressources disponibles ; ainsi tous les pays réalisent un gain à l’échange. Plus récemment, les économistes Hecksher, Ohlin et Samuelson ont expliqué l’origine des différences des avantages comparatifs par la dotation (ou répartition) en facteurs de production de chaque pays. Selon le théorème HOS, chaque pays doit se spécialiser dans la production qui incorpore le maximum de facteurs de production qu’il détient en abondance. L’échange international est donc un échange de facteurs abondants contre facteurs rares. Ainsi les PED, souvent peu dotés en facteur capital, ont intérêt à se spécialiser dans des productions de base incorporant une grande quantité de facteur travail qu’ils échangeront avec des productions à niveau technologique élevé. C’est la voie suivie par les NPI asiatiques qui ont, par une politique de remontée des filières, réussi à se spécialiser dans des productions industrielles de plus en plus capitalistiques. L’ouverture internationale semble donc exercer un puissant effet de levier sur la croissance et sur le développement. En effet, une hausse des exportations se traduit par une entrée de capitaux susceptible de financer le développement du pays. Mais l’ouverture sur l’extérieur ne se limite pas aux exportations, la contrepartie d’une telle stratégie est une concurrence étrangère renforcée, qui oblige les entreprises à rechercher en permanence les nouveaux gains de productivité indispensables à leur compétitivité. L’amélioration de l’efficacité productive génère également de nouvelles ressources. Ainsi, un cercle vertueux de croissance se met en place (document 3). Les capitaux ainsi dégagés doivent permettre d’assurer le financement du développement sans endettement excessif. Ces capacités de financement autorisent de nouveaux investissements porteurs de croissance et de développement. L’exemple coréen illustre parfaitement cette logique. Des efforts importants d’investissements en capital humain et physique expliquent le rattrapage de ce pays, désormais proche des niveaux de développement des PDEM. Source d’une meilleure productivité du travail, les dépenses en matière d’éducation et de formation de la main-d’œuvre augmentent le niveau d’alphabétisation, d’où © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 112 une maîtrise plus grande de l’accroissement démographique, et servent la compétitivité de l’économie, garantissant des débouchés aux produits exportés. De la même façon, l’augmentation du taux d’investissement agit favorablement sur la demande (multiplicateur keynésien) et sur les conditions de l’offre (compétitivité accrue, hausse des profits, accroissement des capacités d’autofinancement…). En outre, l’augmentation du niveau de qualification permet de profiter pleinement des transferts de technologie rendus possibles par l’implantation de nombreuses firmes multinationales. Le progrès technique se diffuse plus rapidement à l’économie et autorise une réorientation de la spécialisation vers des produits de plus en plus sophistiqués à forte valeur ajoutée (document 4). Cette nouvelle spécialisation réduit les effets de dépendance envers les PDEM liés à un degré d’ouverture élevé. Nous avons ici tous les éléments clés du succès d’une stratégie de développement par insertion dans le commerce mondial : spécialisation sur la base des avantages comparatifs, utilisation des recettes des exportations et des gains de productivité pour diversifier l’appareil productif et investir dans le capital humain, qui font naître de nouveaux avantages comparatifs (main-d’œuvre qualifiée, forte compétitivité dans certains secteurs industriels porteurs). Cependant la situation actuelle de certains PED montre que la réussite d’une stratégie de développement par insertion dans les échanges n’est pas sans conditions. Il apparaît effectivement que toutes les spécialisations n’ont pas des effets équivalents sur le développement, et les enchaînements vertueux que nous avons décrits ne semblent pas irréversibles et supposent une intervention importante de l’État. Une spécialisation dans des produits primaires, comme pour la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne, ne semble pas garantir la réussite du processus de développement. Ainsi par exemple, l’évolution du prix du cacao témoigne de la difficulté des producteurs à assurer leur rémunération. On note globalement une baisse assez nette du prix du cacao : si pour une quantité donnée le prix du cacao est de 100 € en 1996, il était de 260 € en 1978, soit une différence de 160 points. Malgré une remontée lente des prix depuis 1993, cette évolution négative se traduit par une perte de rémunération importante pour les pays producteurs de cacao (document 2). Leurs recettes d’exportation se contractent et compromettent leurs possibilités de financer leur développement futur. Les pays producteurs de matières premières restent soumis à © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 113 l’évolution de la demande adressée par les PDEM. Dans le même temps, les prix de leurs importations en provenance des pays riches augmentent, ce qui se traduit par une dégradation progressive des termes de l’échange. Il leur faut exporter davantage de produits pour obtenir une même quantité de biens importés ; il s’agit bien d’un appauvrissement, un processus d’endettement se met alor s en place. En outre, la demande en produits primaires est peu dynamique car il existe une multitude de substituts issus de l’industrie chimique. Face à cette atonie de la demande, les producteurs sont contraints de répercuter la totalité de leurs gains de productivité sur les prix, limitant d’autant les possibilités d’investissement et de développement. L’insertion des PED dans le commerce mondial se traduit donc ici par un renforcement de la dépendance de ces pays à l’égard des PDEM. Cette thèse confirme l’approche des économistes d’inspiration marxiste, qui voient le sous-développement comme la conséquence de rapports de domination et de dépendance entre le centre (PDEM) et la périphérie (PED). Le commerce mondial est un moyen pour les PDEM de lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit, par l’importation de matières premières à bas prix et par la surexploitation de la maind’œuvre des PED. Selon Arghiri Emmanuel, les PED sont victimes d’un échange inégal, les pays les moins productifs échangent leurs produits contre des biens et des services incorporant une moins grande quantité de travail. L’une des conditions de réussite d’une stratégie de développement extravertie est donc une spécialisation dans des productions faisant l’objet d’une demande internationale soutenue. Par ailleurs, la crise asiatique de 1997 démontre la fragilité des économies fortement ouvertes sur l’extérieur (document 3). Cette crise de surinvestissement trouve son origine dans la dépendance de ces pays envers les capitaux des PDEM, et dans l’opacité des circuits de financement en raison d’un niveau élevé de corruption et d’un certain clientélisme entre hommes politiques et hommes d’affaires (le « système Suharto » en Indonésie symbolisait bien cette dérive). Attirés par un accroissement rapide de la production, les investisseurs internationaux ont massivement placé leurs capitaux dans les pays asiatiques. Cette entrée massive de capitaux, stimulée par le mouvement de globalisation financière, provoque une appréciation des monnaies locales qui diminue le coût de l’endettement extérieur pour les emprunteurs et ouvre la perspective de profits intéressants pour les investisseurs internationaux. Les investissements à la rentabilité plus ou moins assurée se multiplient et contribuent à la création d’une bulle spéculative, qui éclate lorsque les investisseurs constatent que la rentabilité attendue n’est pas au © HATIER 095-134/Partie 3 30/01/03 14:59 Page 114 rendez-vous. Des mouvements spéculatifs à la baisse s’enchaînent et provoquent une perte de confiance envers la monnaie et une restriction des crédits. D’origine monétaire et financière, la crise a des répercussions importantes sur la sphère réelle : déséquilibre du solde extérieur, multiplication des faillites, augmentation du chômage, contraction rapide des revenus, développement de la misère, etc. Elle démontre clairement les effets pervers d’un modèle de développement ouvert. Dans ce cadre, le rôle de l’État est fondamental et constit u e u n e c o n d i t i o n d e r é u s s i t e d e l ’ i n s e rt i o n d a n s l e s é ch a n g e s internationaux. L’État doit tout d’abord lutter contre la corruption et rendre les circuits de financement moins opaques, permettant de favoriser un vrai développement. De plus, l’exemple coréen illustre bien la place de l’État comme un acteur à part entière du processus de développement. De fait et malgré les préceptes libéraux, le succès d’une insertion dans le commerce international passe par la mise en place d’une politique structurelle (document 3). Il revient aux institutions publiques de redistribuer équitablement les ressources issues de la croissance économique entre les différents acteurs de l’économie, et de promouvoir une politique de développement à long terme à traver s ses dépenses en matières d’éducation (document 4), et en accompagnant les restructurations de l’appareil productif. La qualité de la spécialisation, ainsi qu’une action importante de l’État, sont autant d’éléments participant à la réussite d’une stratégie de développement par l’insertion dans le commerce international. En définitive, les stratégies de développement par une insertion dans les échanges internationaux comportent de nombreux avantages, notamment sur la croissance économique comme le démontre l’exemple des NPIA. Elles demeurent néanmoins soumises à certaines conditions comme le type de spécialisation et la capacité d’intervention de l’État dans le processus de développement. La place encore limitée des PED dans le commerce international (80 % des échanges s’effectuent entre les PDEM), et la situation catastrophique de certains pays africains (mauvaise spécialisation, État inexistant…) doivent nous inviter à repenser les conditions de l’insertion dans le commerce international, en développant notamment les politiques de soutien des cours des matières premières et en approfondissant la logique d’un commerce équitable. © HATIER