55 à 60 - Département de mathématiques et de statistique

publicité
10.3. Théorèmes de Mackey. Soient maintenant deux sous groupes H et K de G et V un
kH-module (où k est un corps). Alors on obtient le kG-module IndG
H V par induction et puis le
G
G
kK-module ResK IndH V par restriction. On peut partiellement décomposer ce kK-module.
Fixons pour le moment un élément s ∈ G. On obtient un sousgroupe Ks < K défini par
Ks := K ∩ sHs−1 .
Sur l’espace vectoriel V on a une action par H; nous l’utilisons pour définir une action de Ks sur
V par
σ · v := (s−1 σs)v, σ ∈ Ks , v ∈ V.
Il y a un sens parce que s−1 σs ∈ H. Nous notons V avec cette structure de kKs -module par Vs .
Proposition 10.1 (Mackey). Soient s1 , . . . , sr ∈ G des représentants des double-translatés K\G/H.
Alors il y a un isomorphisme de kK-modules
ResG
K
IndG
H
V '
r
M
IndK
Ks Vsi .
i
i=1
Preuve. Fixons s ∈ G encore. Considérons l’espace de fonctions
Ws := {f : KsH −
→ V ; ∀x ∈ KsH, ∀h ∈ H : f (xh−1 ) = hf (x)}.
Comme pour les modules d’induction on montre que c’est un espace vectoriel et K agit linéairement
sur Ws par
(σ · f )(x) := f (σ −1 x),
pour σ ∈ K, f ∈ Ws et x ∈ KsH. Montrons que Ws ' IndK
Ks Vs .
Rappelons que
IndK
→ Vs ; ∀x ∈ K, ∀σ ∈ Ks : f (xσ −1 ) = σv}.
Ks Vs = {f : K −
→ Vs par f (x) := f (xs), où x ∈ K. Vérifions que f ∈ IndK
Pour f ∈ Ws définissons f : K −
Ks V s .
Soit σ ∈ Ks et x ∈ K alors
f (xσ −1 ) = f (xσ −1 s) = f (xs · s−1 σ −1 s) = s−1 σsf (xs) = σ · (f (x)).
L’application f 7→ f est un kK-module homomorphisme:
g · f (x) = (g · f )(xs) = f (g −1 xs) = f (g −1 x) = (g · f )(x)
pour g ∈ K, x ∈ K. C’est un isomorphisme, son inverse est l’application f 7→ f˜, où
f˜(xsh) := h−1 f (x),
où x ∈ K, h ∈ H. Par construction l’application f˜ est dans Ws , et
f˜ (xsh) = h−1 f (x) = h−1 f (xs) = f (xsh)
et
f˜(x) = f˜(xs) = f (x).
Sauf possiblement f 7→ f˜ n’est pas bien définie, parce que’elle dépend des choix. Supposons
−1 −1 ∈ K ∩ sHs−1 = K . Mais f a
xsh = x1 sh1 , où x, x1 ∈ K et h, h1 ∈ H. Alors x−1
s
1 x = sh1 h s
−1 −1
une symétrie par rapport à Ks : f (x) = f (x1 (x−1
x))
=
(x
x)
f
(x
)
pour
l’action
de
Ks sur Vs ,
1
1
1
55
56
−1
−1
donc h−1 f (x) = h−1 s−1 (x−1
1 x) sf (x1 ) = h1 f (x) pour l’action de H sur V . Alors l’application
f 7→ f˜ était bien-définie.
G
On a une inclusion Ws −
→ ResG
K IndH V de kH-modules si on étend une application f : KsH
−
→ V vers une fonction f : G −
→ V où on définit f (x) = 0 si x 6∈ KsH. Si Ks1 H et Ks2 H sont
→ V est uniquement déterminée
disjoints, alors Ws1 ∩ Ws2 = {0}. De l’autre côté chaque f : G −
par ses restrictions sur tous les double-translatés KsH.
Si s1 , . . . , sr ∈ G sont des représentants des double-translatés K\G/H on obtient une bijection
G
r
⊕i=1 Wsi ' ResG
K IndH V . Et la preuve est complète.
On obtient le critère d’irréductibilité de Mackey, en prenant K = H.
Corollaire 10.3. Soit H un sous-groupe du groupe fini G et V un CH-module.
Alors IndG
H V est un CG-module simple si et seulement si
(i) V est simple comme CH-module, et
(ii) Pour chaque s ∈ G\H les deux CHs -modules Vs (défini plus haut) et ResH
Hs V sont disjoint
(c-à-d, il n’existe pas un CHs -module simple qui apparaı̂t dans ces deux CHs -modules).
Preuve. On utilise la réciprocité de Frobenius plusieurs fois. Soient s1 , . . . , sr des représentants des
double-translatés H\G/H, en supposant que s1 = 1. Nous avons Hs1 = H, et donc V = Vs1 =
ResH
HV.
G
G
G
(IndG
H χV , IndH χV )G = (ResH IndH χV , χV )H =
X
(IndH
Hs χVsi , χV )H =
i
i
= (χV , χV )H +
IndG
H
X
(χVsi , ResH
Hs χV )Hs
i>1
G
(IndH χV , IndG
H
Il suit que
V est simple ⇐⇒
χV )G = 1 ⇐⇒ (χV , χV )H = 1 et pour
H
chaque i > 1: (χVsi , ResHs χV ) = 0. Et on obtient le résultat voulu.
Si V est un kH-module, HC G, alors pour chaque s ∈ G on obtient un kH-module Vs , son
module conjugué, par g · v := sgs−1 v.
Corollaire 10.4. Soit HC G un sous-groupe normal du groupe fini G et V un CH-module.
Alors IndG
H V est un CG-module simple si et seulement si
(i) V est simple comme CH-module, et
(ii) Pour chaque s ∈ G\H le module conjugué Vs n’est pas isomorphe à V .
Exemple 10.4. Considérons Alt5 C S5 . Ils existent deux représentations simples complexes pour
Alt5 de degré 3, disons χ2 (avec C Alt5 -module V ) et χ3 . Soit g1 = (1, 2, 3, 4, 5) et g2 = (2, 1, 3, 4, 5) =
(12)g1 (12)−1 , alors g1 et g2 ne sont pas conjugués dans Alt5 . On a χ2 (g2 ) = χ3 (g1 ) 6= χ2 (g1 ), donc
5
V(12) n’est pas isomorphe à V (mais à l’autre C Alt5 -module de dimension 3). Alors IndSAlt
V est
5
un CSn -module simple de dimension 6.
11. Entiers algébriques
On rappelle que a ∈ C est un entier algébrique s’il existe un polynôme unitaire
f (T ) = T n + m1 T n−1 + . . . + mn−1 T + mn
57
avec coefficients mi ∈ Z tel que f (a) = 0.
Nous avons le critère suivant pour les entiers algb́riques, une conséquence du théorème de CayleyHamilton de l’algèbre linéaire.
Proposition 11.1. Soit a ∈ C. Alors a est un entier algébrique si et seulement si il existe un
sous-anneau A ⊂ C de rang fini sur Z, tel que a ∈ A.
Preuve. Si a est une racine du polynôme T n + m1 T n−1 + . . . + mn−1 T + mn ∈ Z[T ], alors an =
−m1 an−1 − . . . − mn−1 a − mn et donc le Z-module A engendré par 1, a, . . . , an−1 est un sous-anneau
de C de rang n < ∞ sur Z.
Par contre, soit A ⊂ C un sous-anneau qui a rang n < ∞ sur Z et a ∈ A. Alors il existe une
Z-base x1 , . . . , xn de A. Il existe une matrice M = (mij ) d’entiers telle que
axj =
n
X
mij xi .
i=1
Mi
ai .
La puissance
correspond à
Soit f (T ) = χM (T ) = det(T 1 − M ) le polynôme caractéristique
de la matrice M . C’est un polynôme unitaire de degré n dans Z[T ], car le coefficient de la matrice
sont entiers. Par le théorème de Cayley-Hamilton f (M ) = 0. Donc aussi f (a) correspond à la
matrice 0, donc f (a) = 0. Et donc a est un entier algébrique.
Exemple 11.1. Les exemples les plus importants dans la théorie de la représentation sont les suivants.
Les entiers algébriques contenus dans Q sont les entiers ordinaires, c.-à-d.les éléments de Z.
Preuve. Soit a = rs une fraction qui est aussi un entier algébrique avec polynôme T n + m1 T n−1 +
. . . + mn−1 T + mn ∈ Z[T ]. On peut supposer que r et s sont relativement premiers. Supposons
a 6∈ Z, c.-à-d., s 6= ±1. En substituant a et en multipliant par sn on obtient
rn + m1 rn−1 s + . . . + mn−1 rsn−1 + mn sn = 0
et il suit que s divise rn . Contradiction. Donc a ∈ Z.
Soit n ∈ N. Définissons le nombre complexe n = e2πi/n ∈ C; c’est une solution de l’équation
T n − 1 = 0, donc est un entier algébrique. Les entiers algébriques contenus dans le corps Q(n )
(le plus petit sous-corps de C contenant Q et n ) forment le sous-anneau Z[n ] = Z + Zn + Z2n +
. . . + Zn−1
engendré par n ; Z[n ] est de rang ≤ n sur Z. Le groupe multiplicatif Γn = (Z/nZ)×
n
agit sur Q() Q-linéaire par
X
X
(m + nZ) •
qi i :=
qi mi ,
i
i
où qi ∈ Q. On a Q(n )Γn = Q et Z[n ]Γn = Z.
Q
Preuve. Soit Φn (T ) := m∈Γn (T − m
n ). Alors par exemple Φ1 (T ) = T − 1, Φ2 (T ) = T + 1,
Q
2
2
Φ3 (T ) = T + T + 1, Φ4 (T ) = T + 1. On a d|n Φd (T ) = T n − 1. On utilise cet identité pour
montrer par induction que chaque Φd (T ) est unitaire, dans Z[T ] et irreéductible (cf. [3, §13.6]).
P
Il suit que Q(n ) ' Q[T ]/(Φn (T ) et aussi que m∈Γn m
n ∈ Z.
P
i
Γ
n
Soit α = i qi ∈ Q() , où gi ∈ Q. Alors
!
1 X X m X
1 X m
α=
qi n =
qi
n ∈ Q.
|Γn |
|Γn |
m∈Γn
i
i
m∈Γn
58
Alors Q(n )Γn = Q et aussi Z[n ]Γn = Z.
Un élément général de Q() s’écrit uniquement comme
a=
r0 + r1 n + r2 2 + . . . + rφ(n)−1 φ(n)−1
,
s
où les ri et s sont entiers et φ(n) := |Γn |. Supposons a est un entier algébrique et a 6∈ Z[], c.-à-d.,
s ne divise pas tous les coefficients ri . Comme avant, en substituant a = rs dans son polynôme
d’intégrité et en multipliant par sn on obtient
rn + m1 rn−1 s + . . . + mn−1 rsn−1 + mn sn = 0
et il suit que s divise rn . Contradiction. Donc a ∈ Z[].
Maintenant nous commençons à donner des applications dans la théorie des représentations.
Proposition 11.2. Soit ρ : G −
→ GL(d, C) une représentation complexe d’un groupe fini avec le
caractère χ : G −
→ C. Soit g ∈ G d’ordre n et posons n = e2πi/n ∈ C. Alors χ(g) ∈ Z[n ].
Si pour chaque m ∈ Z relativement premier avec n on a que g m est conjugué à g, alors on a
même que χ(g) ∈ Z.
Preuve. On peut diagonaliser la matrice ρ(g) d’ordre fini. Les coefficients sur le diagonal sont tous
P
de la forme rni , pour certaines ri , 1 ≤ i ≤ N . Donc la trace est i rni ∈ Z[n ].
P
Si m est relativement premier avec n, alors χ(g m ) = i mri = χ(g), donc χ(g) ∈ Z[]Γn = Z,
par l’exemple précédent.
Proposition 11.3. Soit χ : G −
→ C un caractère simple et C(g) la classe de conjugaison de g.
|C(g)|χ(g)
Alors χ(1G ) est un entier algébrique.
P
Preuve. Soient C1 , . . . , Cc les classes de conjugaison, et [Ci ] = g∈Ci [g] ∈ CG. Choisissons des
P
représentants ci ∈ Ci . Alors [Ci ][Cj ] = r aijr [Cr ], où aijr = |{x ∈ Ci , y ∈ Cj ; xy = cr }|. Donc
P
i Z[Ci ] est un sous-anneau du centre de CG de rang fini. Fixons maintenant une représentation
simple ρ de caractère χ. Alors par le lemme de Schur ρ(c) est scalaire, pour chaque c dans le centre
P
de CG, disons a(c) Id. Par restriction, i Z[Ci ] −
→ C : c 7→ a(c) est un homomorphisme d’anneau.
L’image est donc un sous-anneau de C de rang fini sur Z. Alors par le critère de prop. 11.1,
chaque image est un entier algébrique. En particulier, a([Ci ]) est un entier algébrique. On calcule
a([Ci ]) = χ([Ci ])/χ(1G ) = |Ci |χ(ci )/χ(1G ) et on conclut.
Proposition 11.4. La dimension de chaque représentation simple complexe divise l’ordre du
groupe.
Preuve. Soit χ un tel caractère simple. On a
c
c
i=1
i=1
X |Ci |χ(ci )
|G|
|G|
1 X
=
< χ, χ >=
|Ci |χ(ci )χ(c−1
)
=
χ(c−1
i
i )
χ(1)
χ(1)
χ(1)
χ(1)
est un entier algébrique inclu dans Q, donc est un entier ordinaire. Alors χ(1) divise |G| dans Z. 59
11.1. Le théorème pa q b de Burnside. Une des premières applications importantes de la théorie
des caractères était le théorème de Burnside disant que chaque groupe d’ordre pa q b , où p, q premiers,
est résoluble. Dans la preuve le prochain résultat est utilisé.
Soit ρ : G −
→ GL(V ) une représentation simple complexe. Le centre de ρ, noté Z(ρ) est par
définition Z(ρ) := ρ−1 (Z(GL(V ))), c-à-d, les g ∈ G qui sont envoyé sur une matrice scalaire. Donc
Z(ρ)C G.
Proposition 11.5 (Burnside). Soit ρ une représentation simple d’un groupe fini G avec caractère
χ et g ∈ G. Supposons que pgcd(χ(1), |C(g)|) = 1. Alors g 6∈ Z(ρ) si et seulement si χ(g) = 0.
Preuve. Par l’hypothèse ils existent deux entiers a, b ∈ Z tels que aχ(1) + b|C(g)| = 1. Donc par
prop. 11.3
(1 − aχ(1))χ(g)
χ(g)
b|C(g)|χ(g)
=
=
− aχ(g)
χ(1)
χ(1)
χ(1)
est un entier algébrique, et donc aussi α :=
χ(g)
χ(1)
est un entier algébrique.
Soit n = O(g), l’ordre de g. Posons := e2πi/n ∈ C. L’extension de corps Q ⊂ Q() a
Γn = (Z/nZ)× comme groupe de Galois. L’automorphisme γ = m (m est relativement premier
avec n) est induite par γ() = m . Le nombre γ(α) est aussi un entier algébrique, et si α 6= 0 alors
Q
aussi γ(α) 6= 0. Le produit N (α) := γ∈Γ γ(α) est Γ-invariant, donc N (α) ∈ Q()Γn = Q et N (α)
est un entier algébrique. Donc N (α) ∈ Z.
Supposons que g ∈ Z(ρ), alors par Schur il existe un c ∈ C, |c| = 1, tel que ρ(g) = c1, donc
|χ(g)| = |c|χ(1) = χ(1) 6= 0.
Par contre si g 6∈ Z(ρ) alors par l’inégalité du triangle on a |χ(g)| < χ(1), donc |α| < 1. Pour
chaque γ ∈ Γ on a aussi |γ(α)| < 1 et donc |N (α)| < 1. Mais N (α) ∈ Z, donc N (α) = 0. Alors
α = 0 et χ(g) = 0.
Corollaire 11.1. Soit G un groupe simple et non-abélien. Supposons |C(g)| = pr pour un g ∈ G
et un nombre premier p. Alors g = 1.
Preuve. Supposons g 6= 1. Soit ρ une représentation simple non-triviale avec caractère χ. Le sousgroupe Z(ρ) est normal dans G, donc Z(ρ) = {1} ou Z(ρ) = G, parce que G est simple. Mais si
Z(ρ) = G, nécessairement χ(1) = 1 et on obtient un homomorphisme non-triviale G −
→ C× , injectif
parce que G est simple. Donc G est abélien; contradiction avec l’autre hypothèse. Donc g 6∈ Z(ρ).
Par prop. 11.5 si p ne divise pas χ(1) alors χ(g) = 0. On applique une relation d’orthogonalité du
tableau de caractères simples:
X
X
0=
χ(1)χ(g) = 1 +
χ(1)χ(g)
χ irr.
χ irr.; p|χ(1)
Alors
−1
=
p
X
χ(1)
χ(g)
p
irr.; p|χ(1)
est un entier algébrique et donc dans Z. Une contradiction. Alors g = 1.
χ
Théorème 11.1 (Burnside). Supposons |G| = pa q b , où p, q premier. Alors G est résoluble.
60
Preuve. On va utiliser induction sur l’ordre du groupe et on peut supposer que G n’est pas trivial.
Soit N C G un sous-groupe normal propre maximal de G. Si N 6= {1} alors par induction N et
G/N sont résolubles, donc aussi G est résoluble.
Supposons donc que N = {1}, c-à-d, G est un groupe simple. Soit P un p-Sylow sous-groupe
de G. Le centre de chaque p-groupe contient un élément non-trivial. Soit g un élément non-trivial
dans le centre de P , alors son centralisateur contient P et donc C(g) = q c pour un certain c ≤ b.
Par le corollaire il suit que G est simple et abélien, donc résoluble.
61
Département de mathématiques et de statistique, Université de Montréal, C.P. 6128, succursale
Centre-ville, Montréal (Québec), Canada H3C 3J7
E-mail address: [email protected]
Téléchargement