dossier_pedagogique_.. - Théâtre de la Tempête

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Dossier pédagogique
le soldat ventre-creux
texte de Hanokh Levin
mise en scène Véronique Widock
Cie Les Héliades
La Tempête – Cartoucherie de Vincennes / Route du Champ de Manœuvre, Paris
Du 11 au 29 septembre 2013
La Compagnie Les Héliades est soutenue par le Ministère de la Culture / DRAC Ile-de-France,
L’Etat / Préfecture des Hauts-de-Seine, le Conseil Régional d’Ile-de-France,
le Conseil Général des Hauts-de-Seine et la Ville de Colombes.
1
le soldat ventre-creux
de Hanokh Levin
Après cinq années, Sosie revient de guerre le ventre vide avec pour seul désir retrouver sa
femme et son fils. Mais devant la porte de sa maison, un autre lui même l'attend. Ce soldat
inconnu s'appelle aussi Sosie, il a le ventre plein, vit dans sa maison, embrasse sa femme et
son fils. Sosie a-t-il perdu la mémoire, ou la guerre a-t-elle tout pris de lui jusqu'à son identité?
Pour retrouver ses droits, le soldat ventre-creux livrera une bataille hors normes. Le combat
naviguera de l'absurde au cruel jusqu'à la farce sous le regard attentif et muet de l'enfant.
Revisitant le personnage de Sosie pour poser la question de l'identité volée par la guerre, le
Soldat ventre-creux est une fable politique contemporaine et universelle.
Jamais créée en Israël, jouée ici pour la première fois en France, cette pièce métaphorique est
l'une des dernières oeuvres de Levin.
Une pièce singulière : ironique, métaphysique, lumineuse.
Texte français Jacqueline Carnaud et Laurence Sendrowicz publié aux Editions Théâtrales
Mise en scène Véronique Widock
Avec : Axel PETERSEN, Stéphane FACCO, Vincent DEBOST, Henri COSTA, Christophe
PINON et Mateo FREY, Nicolas COUFFIN.
Assistanat à la mise en scène Nolwenn Le Du
Scénographie Eric Mariette
Création lumière Pierre Gaillardot
Chorégraphie Geneviève Sorin
Création costumes Myriam Drosne
Création sonore Bastien Boni
Crédits photos : Bram Tan et Myriam Drosne
Contact compagnie Les Héliades
Contact La Tempête
Chargée des actions culturelles
Iris Duval
01 47 60 10 33
[email protected]
www.lehublot.org
Accueil, réservations et relations avec le public
Amandine Lesage
01 43 28 36 36
[email protected]
www.la-tempete.fr
Le spectacle a été créé les 22 et 23 novembre 2012 à l'Avant Seine / Théâtre de Colombes (92) et le 30 novembre
2012 au Théâtre Simone Signoret de Conflans-Sainte-Honorine (78).
Production Cie les Héliades, en coproduction avec l'Avant-Seine / Théâtre de Colombes et le Théâtre Simone
Signoret / Conflans-Ste-Honorine.
Avec le soutien de la DRAC Ile de France, la Région Ile de France et la SPEDIDAM.
2
Sommaire
HANOKH LEVIN……………………………………..…. 4
SOLDAT VENTRE CREUX,
UNE COMEDIE GRINÇANTE ENTRE REVE ET REALITE……… . . 5
Résonnances……………………………………………………………
8
EXTRAITS……………………………………………. 9
INTERVIEW DE VERONIQUE WIDOCK,
METTEUR EN SCENE DE LA PIECE…………………… 14
SUGGESTIONS DE LECTURES…………………………..… 16
FILMOGRAPHIE ………………………………………… 18
A LA RECHERCHE D’UNE PAIX……………………….…… 20
POINT DE VUE D'UN PHILOSOPHE…………………………. 22
Annexes……………………………………………………………………… 26
L'ÉQUIPE ARTISTIQUE………………………………. 26
3
HANOKH LEVIN
Hanokh Levin, auteur
Né à Tel-Aviv en 1943, décédé en 1999, Hanokh Levin laisse
derrière lui une œuvre impressionnante qui, par sa qualité et son
ampleur, fait de lui l’une des figures majeures de la culture
israélienne contemporaine. Outre plusieurs recueils de poésie et
de prose, il est l’auteur d’une cinquantaine de pièces de théâtre,
dont trente trois ont été montées, souvent par lui.
Dès les années soixante, ses premiers spectacles de cabaret
politique, écrits au vitriol, font scandale. Fondamentalement
humaniste, révolté par cette vie à l’ombre de guerres
successives1, Hanokh Levin, en témoin malheureusement
privilégié, s’élève sans trêve contre toutes les guerres de
conquête, ces guerres qui ne laissent derrière elles qu’une
humanité vaincue. En cela, chacun de ses textes est une leçon
universelle.
Pièce fondatrice, Yaacobi et Leidental (1972) inaugure l’ère des personnages léviniens - ces
petites gens confrontés à leur incapacité à être heureux. Viennent ensuite des œuvres qui
proposent une relecture de la tragédie grecque, de la Bible (Les souffrances de Job) ou qui
empruntent la forme de la fresque épique (L’Enfant rêve). Qu’il situe l’action dans le
microcosme du quartier ou dans un vaste espace symbolique, Hanokh Levin invente un
langage théâtral qui lui est propre, mélange de provocation, de poésie, de quotidien et
d’humour, toujours animé par une tendresse fondamentale pour le genre humain.
Son sens aigu du théâtre et une grande économie d’expression en font un auteur de premier
ordre.
Le théâtre d’Hanokh Levin
On peut consulter sur Internet le site du Cameri Theatre de Tel-Aviv auquel Levin a été associé
toute sa vie. Le site, en anglais ou en hébreu, présente le plus grand théâtre d’Israël et
contient quelques informations sur l’auteur.
www.cameri.co.il
De la satire politique au théâtre antiguerre
Le théâtre politique de Levin est placé sous le signe d’un combat constant contre l’occupation
et l’exploitation des territoires et, surtout, contre la dégradation et l’humiliation résultant de
cette occupation.
(…)
1
La Seconde Guerre mondiale (1939-1945), la Guerre d’Indépendance (1948), la guerre du Sinaï
(1956), la guerre des Six Jours (1967), la guerre du Kippour (1973), la première guerre du Liban (1981),
ou la première Intifada (1987-1993) font partie des événements que Levin a traversés.
4
LE SOLDAT VENTRE CREUX, UNE COMEDIE GRINÇANTE ENTRE
REVE ET REALITE
Notes de mise en scène
La pièce commence par un récit, celui d'un
soldat. Il nous raconte son retour à la maison
après cinq années de guerre. Puis soudain, on
est dans l'histoire. Le soldat est devant la porte
de sa maison et ne peut pas entrer car un
autre y est déjà. Un autre lui-même. Il porte
son nom : Sosie. Il a pris sa place dans la
maison qu'il dit être sa maison. Le combat
entre les deux s'installe. Puis un troisième
soldat arrive. Il revient aussi de guerre et il
s'appelle aussi Sosie, il veut aussi entrer dans
cette maison qui est sa maison. Et la raison s'embrouille. Si le premier soldat a usurpé la place
du deuxième soldat alors qu'il était à la guerre, qui est le troisième soldat?
Plus l'histoire avance et plus elle devient à la fois étrangement limpide et obscure. Une
comédie grinçante entre rêve et réalité.
Ils sont maintenant trois qui disent avoir la même maison, la même femme et le même fils.
Mais ils ne peuvent pas tous les trois rêver, se tromper ou mentir. Ils s'appellent tous Sosie et
pourtant personne ne semble se reconnaître... Lui est le même, le même est l'autre, et
personne ne se ressemble. A moins qu'ils ne soient tous qu'un seul et même soldat ?
Retour de guerre d'un soldat qui fouille sa mémoire et le souvenir s'embrouille, devient confus,
absurdement tragique. L'héritage de la mémoire ressemble à une histoire piégée.
Les trois soldats, sans hésiter, entament le combat pour la place occupée. Dans cette guerre,
la seule règle est la loi du plus fort. Et ils n'ont qu'une seule chanson en tête : celle du petit
moucheron à la vie très brève. Car tous les soldats de ce coin du monde ont la vie brève
depuis la nuit des temps. C'est la chanson tragique d'un territoire en guerre qui envoie avec
détermination ses soldats à la mort. Un lieu où les hommes sont partagés en deux
communautés qui s'affrontent : les Israéliens et les Palestiniens, réunis par une histoire
commune qui les rend à la fois ennemis et frères, au point qu'ici les identités glissent les unes
sur les autres.
Volontairement, l'histoire ne donnera jamais aucune piste sûre au sujet des origines juives ou
arabes de ces trois soldats. Car la guerre prend tout : les biens, la famille, la mémoire, jusqu'à
l'identité. D'ailleurs il ne sera jamais dit qui est le soldat de la maison, ni même s'il existe. Ces
trois soldats Sosie sont peut être juste la trace d'une unité perdue, d'une vie d'avant la guerre
où tous vivaient sur le même territoire, dans la même "maison".
Cette histoire est aussi celle de toutes les guerres, depuis la nuit des temps.
Retour d'un soldat dont personne ne dit se souvenir, ni les voisins, ni le fils, ni même la femme
qui hurle que les trois soldats se ressemblent tous, et qu'il est impossible de les reconnaître.
Le Soldat ventre-creux soulève l'histoire de la vie abîmée par la guerre. Une guerre aveugle
aux petits, orchestrée depuis si longtemps qu'elle semble inévitable et irréversible.
Hanokh Levin dénonce ici, une fois de plus, le cercle vicieux de la haine qui sacrifie des vies
sans l'ombre d'un doute, l'utilisation du religieux à des profits purement matériels et politiques.
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Il fouille, comme il l'a fait tout au long de son oeuvre, les mécanismes qui alimentent les haines
communautaires et génèrent les guerres identitaires, que ce soit en Israël ou sur d'autres
territoires.
L'histoire de ce retour de guerre puise à des références très anciennes : Plaute, Molière,
Ruzante... et la figure de l'antihéros nous en est familière. Mais Levin, comme à son habitude,
désordonne nos références, jouant à retirer le principal élément de la pièce d'origine : Sosie
sans Amphytrion.
Au fur et à mesure que la pièce avance, il pousse plus loin encore la déstructuration par cette
magnifique idée de la duplication de la figure des Sosies, nous emmenant bien au delà de la
dualité attendue : vaincus/ vainqueurs, attaquant/subissant, possédant/possédés, il remet à
vif la question de l'identité. S'ingéniant à rendre abstraite l'identité des soldats, travaillant à la
similitude de leurs discours, il annule toute projection et logique communautariste et ébranle
volontairement toute possibilité de construction identitaire.
Ainsi la tragédie des Sosies confine à l'absurde
et au questionnement métaphysique. Et dans ce
jeu à trois désaccordé, trois ventres se battant
dans la nuit, dans ce grincement du sens,
l'esprit tente de pousser plus loin la question de
ce qui pourrait bien faire sens. L'existence ne
tient-elle qu'à la lutte? L'existence n'est-elle que
l'existant? L'existence de l'homme n'est-elle
qu'une vie habitant un corps ? Un homme nu?
Le choeur des comédiens raconte l'histoire. Ensemble, présents en bord de scène, ils sont les
témoins et les porteurs de cette fable qui traverse le temps. Ils la veillent et la réincarnent,
comme si de cette transmission cyclique pouvait un jour resurgir une lumière. Comme si, à
force d'user la haine, la trame du tissu allait céder enfin, délivrée de sa résistance.
Sur le plateau dénudé, la terre dévastée existe au travers du mouvement des soldats et de la
femme : courses, piétinements, errances, batailles. Les corps jouent, entraînant avec eux les
quelques éléments essentiels à la narration : une barrière, des bidons, une échelle, des
manteaux, des bassines, un chariot. Le blanc vole comme une poudre de balles, de cendre
ou la poussière du temps qui vient peu à peu envahir le bleu des éléments scéniques et le
rouge des blessures sur les vêtements.
Mémoire, vision : le Soldat ventre-creux, mort de trouille, à la main une lanterne tremblante
ouvre l'histoire. Si inquiet qu'il va défaillir, se demandant s'il rêve ou s'il vit, il avance et déjà il
parle. Le rêve éveillé se mène au travers de Ventre-creux, puis de ses doubles : Ventre-plein
et Ventre-à-terre. Et au centre de ce rêve, il est question de se battre, de croire, de perdre, de
résister, d'arriver au bout de l'impossible.
Dans ce défi hors normes existent les trois soldats. Acharnés, à vif et déshabillés par l'essence
du rêve. Les présences du Soldat ventre-creux, des deux autres et de la femme sont le
creuset dans lequel tout se joue. Enracinés, organiques, poétiques. Les corps engagés et
l'esprit mouvant comme des roseaux tremblants. C'est dans cet étirement entre l'acquis et le
possible, le corps et l'esprit, l'animal et l'âme que se tiennent les soldats et la femme.
Présences concrètes mais allégoriques, fragiles et denses.
On peut penser à des personnages de Kantor traversés par les questions de Beckett et
l'univers de Lynch. Sauf qu'on est chez Levin et que l'homme y est doué d'une extraordinaire
agilité, mentale et physique, d'un insatiable appétit à vivre qui le sauve. C'est cette énergie
inépuisable, maligne, créatrice qui va habiter la fable pour en faire une comédie grinçante et
métaphorique. L'humanité léviniene résiste, fiévreuse et d'une incroyable aptitude à l'espoir,
elle montre ses réserves d'obstination et de révolte.
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Plus fort que tout sera l'amour de la vie et la poésie qui sauve.
Le dernier regard de Ventre-creux sera pour son fils. A la différence des autres pièces de
Levin, la présence de l'enfant ouvre ici peut-être des perspectives nouvelles.
Dans Le Soldat ventre creux, l'enfant ne meurt pas, ni n'est encore perverti par la guerre. Il est
celui auquel dès le début Sosie raconte son histoire et dont il ne cessera de chercher la
reconnaissance. De quelle mémoire voudra-t-il bien se rappeler? De quelle histoire sera-t-il
capable? Quelle sera sa place prochaine dans l'histoire collective?
Et dans les yeux des trois soldats la vision se resserre autour de l'essentiel : l'enfant et sa
mémoire. L'enfant muet a environ huit ans et c'est un fils, il porte encore en lui la promesse de
l'avenir. On ne sait pas à quoi pense cet enfant. Il ne parle pas et regarde seulement ses trois
pères. Que pense-t-il? Comment résonne en lui la vision de la violence, de la lâcheté, de la
mort? De quelle façon sa vie, encore emprunte de légèreté, sera-t-elle transformée ou
transformera-t-elle l'histoire à venir? Gracieuse, légère, l'aile sombre et lumineuse de la mort
vole au dessus de nos têtes comme sans doute elle s'approche de l'oeuvre. Une des
dernières de Hanokh Levin.
Se promenant entre les mailles de l'histoire, la vacuité de l'enfance encore libre de ses choix
ouvrira l'horizon d'un peu de lumière. C'est cette lumière dans l'ombre qui indique une voix
possible. Dernière image : l'enfant s'assied près du Soldat ventre-creux endormi et le regarde.
Comme une dernière question, une ultime ouverture du jeu, un possible faisant résonner le
rêve le plus fort de Levin : son espoir qu'un jour peut-être l'homme sera capable de tolérance
et de pacifisme.
Véronique Widock
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Résonnances
« Au seuil de la mort j’aimerais écrire Une grande comédie, Quelque chose qui vous
transportera, Vous enchantera,
Quelque chose qui vous fera monter aux lèvres Un sourire, peut-être un rire de temps en
temps, D’où vous repartirez Avec une sensation de profond contentement. »
Hanokh Levin, 1999
REFLEXIONS DE NURIT YAARI, ASSISTANTE A LA MISE EN
SCENE DE HANOKH LEVIN
L’intrigue du Soldat ventre-creux se fonde sur l’Amphitryon, de Plaute, du IIIe siècle avant l’ère
chrétienne et sur Retour de guerre, de Ruzzante, du XVIe siècle. Par le choix de ces modèles,
Levin nous dit clairement que les « héros » sont des perdants de la guerre – les Sosies. Ainsi
les combattants du Soldat ventre-creux ont tous un nom commun et une adresse commune,
mais ils ne se distinguent pas comme attaquants ou attaquée, vainqueurs ou vaincus. Les
soldats revenant de guerre ne se définissent que par leur état physique : le Soldat ventre-plein,
le soldat ventre-creux et le soldat ventre-à-terre. Tous trois réclament la maison, la femme et
l’enfant, mais ils ne pourront pas les avoir tous les trois. La hiérarchie sociale est en question :
le Soldat ventre-plein est revenu le premier, il a « conquis » la maison, la femme et l’enfant ; le
Soldat ventre-à-terre, grièvement blessé, meurt devant la maison ; et le Soldat ventre-creux,
qui n’a plus ni maison, ni famille, tente d’aller s’installer ailleurs, pour commencer une vie
nouvelle, mais revient aussitôt chez lui et se révolte devant la porte de la maison :
(…) J’ai laissé ma maison derrière moi, j’ai continué à marcher et je me suis enfoncé dans la
forêt. Au milieu de la nuit. Non, ni les arbres, ni la forêt, ni le soleil, ni la beauté du monde ne
parviendraient à me consoler ni ne pourraient m’enlever à moi-même. Car je sais ce que j’ai
vécu ici. J’ai vécu dans cette maison, j’ai ri, caressé une femme et embrassé un enfant, j’ai
mangé une bonne soupe, et maintenant, il y en a un autre qui rit, qui caresse, qui embrasse et
qui mange à ma place. Un autre vit à ma place. Personne ne pourra jamais m’ôter ça de la
tête. Personne. Jamais. La conquête, l’occupation, la déportation et l’état de réfugié sont
décrits comme des conditions permanentes et constituent les bases d’une interrogation
existentielle. Passant du politique au mythique, Levin crée un violent contraste entre, d’une
part, la brutalité et la grossièreté des actions se déroulant sur scène et, d’autre part, la poésie
et la beauté de leur traduction en mots et en images scéniques. Il utilise cette collision de
l’horreur et du sublime pour amener le public à une prise de conscience, et le conduire à la
tolérance».
Extraits de : YAARI Nurit, Le théâtre de Hanokh Levin, Ensemble à l’ombre des canons,
Editions Théâtrales, 2008.
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EXTRAITS
Scène 1
La nuit. Une campagne désolée. A travers champs, un chemin conduit à une maison. Le
Soldat ventre-creux, une lanterne à la main, avance sur la pointe des pieds.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Quand je suis revenu du front, après cinq longues années
d’absence, et que je me suis approché de mon village, mon cœur s’est mis à battre si fort que
j’ai dû m’arrêter. J’ai cru que j’allais défaillir. Tout m’apparaissait tellement familier et en même
temps si étrange. Je ne savais pas si je rêvais ou si j’étais éveillé. Le chemin, la forêt, passe
encore, mais me retrouver devant ma maison ! Oui c’était elle, je la voyais, c’était bien elle !
Alors je me suis dit : quand j’ouvrirai la porte, je verrai ma femme et mon fils. Mon fils, je ne le
reconnaîtrai certainement pas, il avait trois ans quand je suis parti. Ma femme, si. Elle, je la
reconnaîtrai. Elle ne sera plus aussi jolie qu’autrefois, évidemment. La famine et tout ce temps
sans moi auront eu raison de ses forces. Je lui trouverai des fils blancs dans les cheveux et
des rides sur le visage. Mais ses yeux, ses yeux qui me regarderont seront les mêmes, et
quand elle me prendra dans ses bras, son odeur aussi sera la même, elle pleurera, je
pleurerai, et cet instant-là, celui de nos retrouvailles, donnera un sens à tout ce que j’ai
enduré. Oui, un tel moment vaut bien cinq années de souffrance ! Nous resterons serrés l’un
contre l’autre longtemps, longtemps, à pleurer sur ces cinq années qui ne reviendront pas.
Avec mon fils, il faudra que je refasse connaissance. Quand il se réveillera demain matin, il
posera sur moi des yeux étonnés. Agitant une épée en bois, il me demandera de lui raconter
des hauts faits d’arme et de gloire. Sûr qu’il se ventera devant ses petits camarades : « Mon
père est revenu de guerre ! Mon père est revenu de guerre ! » Bref, il allait falloir que je lui
raconte mes exploits militaires, moi qui n’avais vu la guerre que par le trou du cul, moi qui
n’avais entendu que les balles et les obus qui me couraient aux fesses et explosaient tout
autour, moi qui ne me souvenais que des cris des blessés et des mourants qui se sauvaient
avec moi. Si seulement je m’étais retourné de temps en temps, j’aurais vu de quoi ça a l’air, la
guerre, quand on se bat. Mais comment aurais-je pu, j’avais une de ces trouilles ! (il pose la
lanterne par terre)
Bah, tu trouveras bien quelque chose, que je me suis dit. Y a pas de raison que tu t’en sortes
moins bien que certains autres qu’ont jamais entendu un coup de fusil de leur vie… Oui, mais
pour ça, faudrait peut-être que tu répètes ton rôle, Sosie. Bonne idée ! Donc… voilà la cuisine,
et la lanterne est mon fils. Mon fils qui me dévore des yeux et attend bouche bée.(il dialogue
avec la lanterne)
- Papa, raconte ! Raconte, papa !
- Que te dire, mon petit, c’était très dur, très très dur !
- Ca faisait peur,
- Et comment ! A… en crever !
- Et toi papa, t’avais peur ?
- Moi, pas vraiment mon petit. Quand on se bat, on n’a pas le temps d’avoir peur. On court,
on crie, on tire.
- T’as vraiment couru sur l’ennemi ?
- Oui, mon petit, j’ai couru et j’ai tiré.
9
- Et t’as tué ?
- Oui, aussi. Comment faire autrement ? Oui, j’ai tué, quand on tire, on tue. Tu sais, ton papa,
il est gentil, il ne veut pas tuer, mais si on veut tuer ton papa, ton papa se laisse pas faire, il tue
en premier, et c’est l’autre qu’est tué.
- Combien ?
- Au début, je comptais. Après j’ai arrêté. Une nuit, il faisait noir comme dans un four, huit
soldats me tombent dessus – des armoires à glace -, pas de bonjour, pas de comment ça va,
non, ce qu’ils veulent, c’est tuer. Ton papa, il est gentil, il ne veut pas tuer, mais si on l’oblige !
Je t’en ai attrapé un, le plus gros, je te l’ai plaqué contre moi et j’ai tiré sur les autres, eux
aussi ont tiré, mais ils ont touché le gros qui me servait de bouclier, j’en ai allongé six, le gros
est mort, n’en restait plus qu’un, il s’est rendu les mains en l’air.
- Et celui-là, qu’est-ce qu’il est devenu ?
- Je l’ai fait prisonnier, qu’est-ce que tu crois. Ton papa ne tue pas quand il n’est pas obligé,
seulement quand il n’a pas le choix. (il serre l’enfant imaginaire contre lui et l’embrasse ; des
larmes lui montent au yeux) Comme tu m’as manqué mon fils !
(un temps)
- Raconte encore, papa.
(il essuie ses larmes)
- Oui, je vais te raconter, il y en a tant, des histoires. (il n’arrive pas à retenir ses larmes) Mais
comme tu m’as manqué ! (il pleure. Un temps. Un temps. Il se ressaisit et recommence à
mimer. Le Soldat ventre-plein sort de la maison, s’arrête et observe la scène sans que le
Soldat ventre-creux s’en aperçoive) Je me souviens de cette bataille, on était devant une ville
entourée de murailles, une ville immense, plus qu’immense, je n’exagère pas. Nos hommes se
tiennent de ce côté, sur la colline, en ordre de bataille ; en bas, dans la vallée, nos ennemis
attendent en rangs serrés. Soudain, ils poussent un cri vers le ciel, un cri si puissant que les
nuages en renvoient l’écho, puis ils s’ébranlent et foncent sur nous. Mais nous, on est pas
plus bêtes qu’eux, et pas moins courageux, aussi sec, on les réexpédie d’où ils viennent.
Enfin, bon, au début, ils sont arrivés jusqu’à nos avant-postes, nos avant-postes ont détalé.
Après, ils ont attaqué notre artillerie, notre artillerie s’est rendue. Là, gonflés à bloc, ils se sont
rués sur le gros de la troupe. Le commandant s’est tourné vers moi et m’a chuchoté à l’oreille
– il me demandait toujours mon avis, le commandant : « Sosie, on donne l’assaut ? » Oui, que
j’ai répondu et tous derrière de crier : « Vive Sosie ! Vive Sosie ! »
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Scène 9
Ventre-plein sort de la maison et va pisser.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : (à Ventre-à-terre, en chuchotant) Tu vois le gros qui vient de
sortir de la maison et qui pisse ? Lui aussi prétend être Sosie. Et lui, je ne te conseille pas de le
contredire.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Pourquoi ?
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Il s’emporte vite et à la main leste. Te faut-il une raison
supplémentaire ?
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Non, celle-là suffit.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : (s’approche de Ventre-plein) Comment va Monsieur Sosie ?
On sort faire un petit pipi dans la neige ? On a bien bu, on s’est bien réchauffé, et on va
pisser, n’est-ce pas, Monsieur Sosie ? (Ventre-plein disparaît dans la maison ; Ventre-creux
revient auprès de Ventre-à-Terre) Tu as vu ? Dans la maison, il y a un soldat qui a le ventre
plein et qui s’appelle Sosie. Il embrasse la femme et l’enfant, mange de la soupe, se frotte les
mains devant la cheminée et pète sous la couverture. Sosie, c’est lui.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Tout à l’heure, tu disais que c’était toi et maintenant tu dis
que c’est lui. Mais en vrai, c’est moi !
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Non. En vrai, Sosie c’est d’abord le gros. Mais supposons
que, tout à coup, il meure d’une crise cardiaque ou d’autre chose, dans ce cas, la voie étant
libre, sache que Sosie, c’est moi. De sorte que, quoi qu’il arrive, des Sosie, il y en a deux
avant toi.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Certainement pas. De Sosie, il n’y en a pas avant moi, vu
qu’il n’en existe qu’un seul. Mais même s’il y en avait plusieurs, je serais le premier.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu te trompes, mon pauvre vieux ! Le monde n’est pas
comme tu te l’imagines. En fait, chaque bonhomme est plusieurs bonhommes, faut faire la
queue. Le plus gros est toujours le premier et ainsi de suite par ordre décroissant. Autrement
dit, ni lui ni toi n’êtes Sosie puisque c’est moi Sosie, mais si, par hasard, lui et toi l’étiez, alors
je serais le deuxième et tu viendrais après, d’abord parce que tu es arrivé après, et ensuite
parce que tu es encore plus maigre que moi. Tu vois, même être Sosie, c’est pas si simple.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je ne comprends pas ! Je suis Sosie !
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Oui, moi aussi je criais comme ça au début. On ne comprend
pas tout de suite, mais avec quelques baffes, tout s’éclaire.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Quel enquiquineur, celui-là ! Je suis blessé, je vais crever, je
n’ai pas le temps de discutailler, s’il te plaît, aide-moi à rentrer à la maison… (Ventre-creux
s’assied par terre et se gratte la tête) Qu’est ce qui se passe ?
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Je réfléchis. Sosie avait toujours des chaussures trouées, alors
comment se fait-il que tant de gens se bousculent pour entrer dedans ? Quoi, il n’y a pas
d’autres maisons sur terre ? Pas d’autres femmes, pas d’autres enfants ? Pas d’autres noms
que Sosie ? Je ne sais pas moi, Carpovitch, Tartovitch, Patatovitch ? Et des milliers d’autres ?
Qu’est-ce qu’ils ont tous à se jeter sur Sosie comme des mouches sur une merde ?
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Si tu es vraiment Sosie, pourquoi ne le cries-tu pas sur tous
les toits ?
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LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Je l’ai fait, mais jusqu’à quand peut-on s’égosiller en vain ?
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je suis Sosie et je n’arrêterai pas de le clamer.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Que tu crois.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je suis Sosie !
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu ne t’en es peut-être pas aperçu, mais tu cries déjà mois
fort.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je suis Sosie.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : De moins en moins fort.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : (il pleure) Je suis Sosie !
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu pleures parce que tu t’apitoies sur ton sort.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : (toujours pleurant, la voix plus faible) Je suis Sosie !
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu faiblis, bientôt tu n’auras plus du tout de force.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je suis So… Il arrête de pleurer et de crier.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu vois, tu te tais. (Ventre-à-terre pousse un gémissement de
douleur) Tes douleurs dans le ventre ont eu raison de tes prétentions à être Sosie. (Ventre-àterre se tait) Retranché dans le silence, tu penses tout bas : « Je suis Sosie. » (un temps) Et
voilà qu’un premier doute surgit comme une petite ride à la surface de l’eau, puis un
deuxième, un troisième, et derrière eux des cohortes de doutes t’assaillent par vagues
successives : « Et si je n’étais pas Sosie ? Et si j’avais rêvé ? Et si j’étais devenu fou ? Et si
l’approche de la mort obscurcissait mon esprit ? » (un temps) Maintenant, ta faculté de penser
t’abandonne. Si quelqu’un, moi, par exemple, se plante devant toi et te dit : « Je suis Sosie »,
tu baisses la tête et tu acceptes. Tu acceptes.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : (dans un filet de voix) Jamais.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Tu acceptes. De temps en temps, comme un battement de
paupière fatigué, te reviennent encore les mots : « Je suis Sosie… je suis Sosie… », mais en
fait, tu es au-delà du doute. Tu n’es pas Sosie.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Alors je suis qui ?
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Personne. Rien. Tu n’es rien, tout simplement. Un rien qui a
faim. Qui a froid. Qui est blessé. Qui agonise. Qui meurt.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Je crois qu’il me reste encore quelques petites heures de
souffrance avant la fin.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Peut-être. Ca se passe comme ça des fois.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : (il lève péniblement la tête et regarde vers la maison éclairée)
Qu’est-ce qu’il fait là-dedans, le gros Sosie ?
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Il vit. D’ailleurs, lui aussi prétend qu’il a des problèmes et qu’il
souffre.
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Il ne sait pas ce que c’est que de souffrir comme je souffre,
moi, ici dehors.
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LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Ben oui, il voit les choses de son point de vue. « Devrais-je
arrêter de vivre, se demande-t-il, parce que d’autres meurent ? Devrais-je arrêter de me
gratter les couilles parce qu’un Chinois est en train de rendre l’âme ? »
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Et pourtant, quelle injustice de respirer à pleins poumons
quand son prochain étouffe.
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : Hé, mon pauvre ami, sur quelle planète vis-tu ?
LE SOLDAT VENTRE-A-TERRE : Moi… je vais mourir avant l’aube, mais toi… que vas-tu
devenir ?
LE SOLDAT VENTRE-CREUX : (il hausse les épaules) Ne t’inquiète pas, j’ai mon petit domaine
à moi et une vie bien remplie. J’ai mon autonomie, ma place est d’ordre cosmique, une place
modeste certes, qui exige une ténacité surhumaine certes, qui aurait pu être infiniment
meilleure certes, mais j’ai arrêté de me plaindre, j’ai mon petit domaine à moi, immatériel, dans
les nuages, dans l’imagination, mais si tu as raison, même si je vais très mal, oui, même si je
suis au bout du rouleau, comme toi, je peux dire ça, je peux dire le contraire, je peux… je
peux… Excuse-moi, je ne sais plus très bien ce que je voulais dire.
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INTERVIEW DE VERONIQUE WIDOCK, METTEUR EN SCENE
DE LA PIECE
Véronique Widock :
Le Soldat ventre-creux est une pièce que Hanokh Levin a écrite
en 1999, s’inspirant d’un personnage mythique qui est le personnage de Sosie. Bien
évidemment, Hanokh Levin n’écrit jamais exactement là où on l’attend, donc, dans cette
version contemporaine du mythe de Sosie, il manque le personnage essentiel d’Amphitryon et
il y a aussi plein d’autres surprises qui nous attendent, dans cette nouvelle version du mythe
de Sosie.
Cette pièce, on peut la lire de plusieurs façons. La première toute simple est celle qui se fie à
l’histoire, celle que nous raconte le premier personnage qui entre en scène, qui est le Soldat
ventre-creux, qui en fait revient de guerre et souhaite bien entendu retrouver sa femme, sa
maison, son enfant, et évidement il ne retrouvera pas la place telle qu’il l’a laissée puisqu’un
autre occupe cette maison, embrasse cette femme et s’occupe de l’enfant et cet autre donc
décrète s’appeler comme lui Sosie. Donc on est sur une thématique assez connue et déjà
utilisée, exploitée par un certain nombre d’auteurs, du retour de guerre, avec ses
conséquences. Est-ce que le Soldat ventre-creux dit la vérité, est ce qu’il a perdu la mémoire,
est ce que cette place a bien été prise par une autre, c’est la première lecture que l’on peut
faire.
Bien sûr il faut se souvenir qu’Hanokh Levin écrit sur le fond important et essentiel pour lui du
conflit israélo palestinien et quand un peu plus tard dans la pièce, Ventre-plein, celui qui a pris
la place donc, nous dit s’appeler Sosile Smosile, on comprend bien entendu qu’il y a une
autre lecture possible, une lecture qui s’ajoute à la première qui est celle d’un soldat israélien
qui occupe le territoire et celle évidemment du palestinien qui se retrouve sans terre et sans
maison.
Cette lecture là tient, jusqu’à ce qu’arrive un autre personnage, un troisième soldat qui lui
aussi donc revient de guerre, veut retrouver cette femme et cet enfant, et qui lui aussi bien sûr
s’appelle Sosie. Donc là on l’aura compris la pièce bascule dans un univers tout à fait
fantastique, onirique, très étrange, et là on peut se dire que finalement ces trois soldats n’en
sont peut être qu’un seul, trois versions d’un même soldat qui a été éprouvé par la guerre, et
qui d’un côté ou l’autre du conflit et des territoires se trouve trahi, bafoué, et volé par cette
guerre qui lui prend sa vie, son identité, ses biens, la trace même de son existence. Je crois
que c’est ce qu’a voulu dire Hanokh Levin après avoir énormément dénoncé la politique de
son pays Israël, politique qu’il juge arrogante envers les palestiniens. Je crois qu’à la fin de sa
vie, il a voulu aussi surtout raconter que la guerre est un fléau universel et qu’elle sert à des
pouvoirs à des profits qui ne sont souvent pas assez décrits, pas assez nommés et qu’elle
envoie évidemment à la mort et au sacrifice un certain nombre de vies humaines qui n’ont pas
choisi cette destinée là. Cette guerre contre laquelle s’insurge et milite inlassablement Hanokh
Levin, évidemment pour une paix.
Ces trois soldats aussi, on peut aussi y voir trois états physiques de l’homme en proie à la vie
et à la guerre, puisque l’un a le ventre plein, il va bien, on peut le penser comme cela, il a de
quoi manger, il est dans le confort apparemment. L’autre le Ventre-creux a le ventre vide, il a
tout perdu. Et le troisième, le Ventre-à-terre, va mourir et donc n’a plus rien à perdre. A quel
moment donc ces trois soldats décident de parler, quels sont les positionnements qu’ils
adoptent selon les places qu’ils ont dans cette guerre, c’est ce que Hanokh Levin s’ingénie à
décrypter, sous le regard d’un personnage qui est lui aussi très important et peut être même
essentiel, en tout cas dans cette mise en scène que l’on crée pour cette pièce qui n’a jamais
été créée en France, donc c’est une première : le personnage de l’enfant. Je ne l’ai pas dit
jusque là mais, le Soldat ventre-creux revient de guerre avec pour objectif essentiellement de
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s’adresser à son enfant, qu’il a laissé, qu’il n’a pas vu pendant cinq ans, pour lui raconter
cette guerre, lui donner sa version et reprendre cette filiation qu’il a abandonnée à son corps
défendant. Et en fait l’enfant, évidemment convoité par les trois pères, sera un axe principal
de cette mise en scène, cet enfant présent qui observe mais qui ne dit jamais rien, qui ne
prendra pas position, qui ouvre et ferme le spectacle, selon le souhait d’Hanokh Levin, et
donc pour moi ouvre à cette question essentielle de l’avenir, cet enfant qui est essentiel
puisqu’il est au cœur de ce conflit, et qui pourtant semble oublié, car on ne s’adresse jamais à
lui de son point de vue mais toujours du point de vue de ces adultes. Donc cet enfant observe
cette guerre et je crois que ce qu’il peut en voir, c’est qu’elle est cruelle, tragique, absurde,
parfois même farcesque, dérisoire et qu’elle lui laisse en tout cas, un grand questionnement
dans les mains, un gros et lourd héritage aussi. Donc qu’est ce que fera cet enfant au sortir de
cette histoire, c’est bien la question qui est posée par Levin, qui est on peut l’espérer une
ouverture puisque rien n’est écrit encore de cette histoire à venir.
La pièce est très belle, c’est une pièce militante, engagée qui a un message fort à délivrer, un
message nourri par des années et des années d’observation de cette guerre par Hanokh
Levin, auteur israélien. C’est en même temps une pièce très onirique puisqu’elle n’est pas du
tout réaliste, et elle nous embarque dans des zones du théâtre très contradictoires ou en tout
cas très diversifiés, puisque l‘on passe de quelque chose de très drôle parfois à quelque
chose de tragique, à des choses effrayantes, à une image absurde. Voilà c’est une belle
traversée, qui peut se lire essentiellement comme un récit, un récit de maturité de Hanokh
Levin qui s’autorise après toutes ces années à donner des points de vue très diversifiés sur
cette guerre pour mieux nous la donner à réfléchir et peut être espérer autre chose.
(Interview réalisée à la suite d’une des dernières répétitions)
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SUGGESTIONS DE LECTURES
Le théâtre choisi de Hanokh Levin est publié aux Éditions
théâtrales, classé ainsi : Pièces mythologiques, Comédies
grinçantes, Comédies crues, Comédies, Pièces politiques et les
sketches Que d’espoir !
www.editionstheatrales.fr
Hanokh Levin, Théâtre choisi 4
Comédies grinçantes - Le Soldat ventre-creux, Funérailles d'hiver,
Sur les valises (2006)
Nurit Yaari, Le Théâtre de Hanokh Levin : Ensemble à l'ombre des canons (2008)
Dans cet ouvrage théorique et critique, le premier en français, Nurit Yaari
retrace l'itinéraire artistique de l'écrivain. Elle analyse son écriture depuis la
satire politique jusqu'à la tragédie mythique, en passant par la comédie. Elle
présente également l'évolution de son travail de metteur en scène, illustré par
des photos de ses spectacles. Plusieurs témoignages d'artistes français
traduisent l'écho de son œuvre en France. Un ouvrage essentiel pour
découvrir l'une des plus grandes œuvres théâtrales du XXe siècle.
David Grossmann, Tombé hors du temps, Récit pour voix, traduit de l’hébreu par
Emmanuel Moses
David Grossman a écrit un livre magistral sur le quotidien des Israéliens et la
mort annoncée de son fils. Du roman comme exorcisme. André Clavel
Un homme quitte soudain la table du dîner, fait ses adieux à sa femme, après
avoir gardé pendant cinq ans le silence sur « cette nuit-là ». Il se met en route
pour « là-bas », à la recherche de son fils mort.
De jour en jour, sa marche autour de la ville se fait plus obstinée. D’autres
parents qui ont aussi perdu un enfant le suivent. Parmi eux, un cordonnier,
une sage-femme, un centaure-écrivain tentent d’accepter l’intolérable, de
matérialiser l’absence radicale de ceux qu’ils pleurent. Un chroniqueur commente leurs faits et
gestes.
Ainsi, par la force et la grâce de la poésie, les personnages de ce récit polyphonique
envoûtant parviennent un bref instant à rejoindre leurs disparus et à rompre la solitude que le
deuil impose aux vivants.
David Grossman nous surprend par la délicatesse de son écriture et par son humanité.
David Grossman, né à Jérusalem en 1954, est l'auteur réputé de huit romans abondamment
primés dont Une femme fuyant l’annonce, couronné par le prix Médicis étranger 2011. Il est
aussi l'essayiste engagé de trois ouvrages qui ont ébranlé l'opinion israélienne et
internationale, notamment Le Vent jaune, qui a précédé la première Intifada. En 2010, il a reçu
en Allemagne le prix de la Paix des libraires allemands. David Grossman est officier de l'ordre
des Arts et des Lettres.
Amos Oz, Comment guérir un fanatique, Gallimard, 2006
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Les trois textes rassemblés ici sont consacrés au processus de paix au
Proche-Orient, données en Allemagne en janvier 2001. Dans le premier texte,
Amos Oz évoque ses souvenirs d'enfance : le milieu 'tchékhovien' dans lequel
vivaient ses parents à Jérusalem, leur nostalgie de l'Europe, mais aussi la
misère autour de lui. Il revient sur les conséquences de la guerre de 1948 et
sur l'exode des Palestiniens, qui lui ont fait prendre conscience de la
nécessité de se mettre à la place de l'autre. Cet 'autre' - en l'occurrence les
Palestiniens - contre qui il faut se battre, mais avec qui il faut s'entendre. Le
deuxième texte constitue une réflexion sur les origines du fanatisme. Pour
Amos Oz, elles trouvent leur source dans le refus du compromis, l'absence d'humour, la
volonté de changer l'autre et de vouloir son bien par tous les moyens. Le troisième texte décrit
le conflit non pas comme une confrontation entre le bien et le mal, mais comme la guerre
entre deux prétendants légitimes à la même terre. L'écrivain revient sur la notion de
compromis comme seule solution du conflit, et rejette l'idéalisme et le moralisme des
commentateurs européens.
Amos Oz, né à Jérusalem en 1939, est sans doute l'écrivain israélien le plus connu à travers le
monde. Son oeuvre est traduite en trente-cinq langues, et son roman Une histoire d'amour et
de ténèbres, publié aux Editions Gallimard en 2004, a été salué dans le monde entier comme
un événement majeur de la littérature contemporaine. Cofondateur du mouvement "La paix
maintenant", il a participé d l'élaboration des accords de Genève. Il vit à Arad, au bord du
désert du Néguev.
Amos Oz, La Boîte noire, Calmann-Lévy, 1994
La boîte noire, celle qui enregistre les dialogues des pilotes, restitue, sous
forme lettres échangées entre Alec et Ilana, après sept années d'éloignement
et de silence, leur vie passée. Alec Gidéon, intellectuel de renommée
internationale, vit aux Etats-Unis ; ses rapports exacerbés avec son ex-femme
Ilana révèlent un homme blessé qui n'a pas su oublier. Ilana, agaçante,
passionnée, s'écoutant écrire n'aura de cesse d'espérer qu'Alec revienne.
Michel Sommo, pied-noir, partisan du grand Israël, deuxième mari d'Ilana, à
qui il voue un amour total, se laissera corrompre par l'argent d'Alec qu'il lui
aura extorqué. Et Boaz, fils d'Alec et d'Ilana, graine de voyou, est le symbole
d'une certaine jeunesse, lasse des guerres.
Gresh, Alain et Vidal, Dominique, Les 100 clés du Proche-Orient, Hachette littérature,
2003 (réédité en 2011).
Le processus de paix entre Israël et les Palestiniens est-il définitivement
enterré ? Quelles seront les conséquences de la seconde guerre contre
l’Irak ? Le terrorisme islamiste est-il capable de déstabiliser les régimes en
place ? La domination des monarchies régnant sur les pays du Golfe arrive-telle à son terme ? Le pétrole a-t-il fait son temps ou demeure-t-il une arme
efficace ? Autant de questions, parmi bien d’autres, que pose l’actualité
toujours brûlante du Proche-Orient et auxquelles répond cet ouvrage. Sous
forme de dictionnaire, comprenant près d’une centaine d’entrées, il passe en
revue les acteurs, les lieux, les événements.
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FILMOGRAPHIE
Retrouvez sur le site « irenees.net » une filmographie très complète du conflit israélopalestinien, un dossier qui traite à la fois du conflit et de paix.
http://www.irenees.net/fr/dossiers/dossier-2301.html
Amos Gitaï, House / La Maison (1980, Israël)
House retrace les changements de propriétaires et d'occupants d'une maison
de Jérusalem-Ouest. Après le départ de son propriétaire, un médecin
palestinien, en 1948, elle a été réquisitionnée par le gouvernement en vertu
d'une loi sur les "absents", louée à un couple de Juifs algériens, puis rachetée
par un professeur d'université israélien qui entreprend de la transformer... Sur le
chantier se succèdent les anciens habitants, les ouvriers, le nouveau
propriétaire, les voisins. Chacun raconte l'histoire du lieu. Ainsi Israéliens et
Palestiniens ne cessent de se disputer la même maison depuis 34 ans. Le film fut censuré par
la télévision israélienne.
Ari Folman, Valse avec Bachir (2008, Israël, France, Allemagne, film d’animation
documentaire)
Valse avec Bachir est le premier long-métrage documentaire d'animation et
l'une des principales œuvres du genre. Ce film, proche du questionnement
documentaire, aborde la question de la mémoire et de l'oubli. Il s'intéresse en
particulier aux soldats israéliens confrontés aux souvenirs du massacre de
Sabra et Chatila en 1982 lors de l'intervention militaire israélienne au Liban de
1982 : étaient-ils partie prenante ou simplement spectateurs ? Un tel thème
historique est atypique pour un film d'animation.
Valse avec Bachir explore la mémoire du réalisateur, Ari Folman. Il ne cache pas que ce film
est fondé sur son histoire personnelle et dont les nuits sont troublées par des hallucinations. Il
est fondé sur des interviews réelles, d'amis de l'époque qu'il est allé retrouver. La plupart
témoignent sous leur vrai nom.
Le titre du film fait référence à une scène durant laquelle, pendant un combat en plein
Beyrouth, un soldat israélien tire longuement avec une MAG en tournant sur lui-même,
effectuant ce qui ressemble à une valse, à quelques mètres d'un immense portrait de Bachir
Gemayel. Le récent meurtre de Gemayel ayant été l'événement déclencheur des massacres
de Sabra et Chatila, cette scène est une métaphore sur les relations entre les Phalangistes (les
hommes de Bachir) et l'armée israélienne.
Sylvain Estibal, Le cochon de Gaza (2011, Belgique, Allemagne, France)
Ce film aborde le conflit israélo-palestinien avec humour et dérision. L'histoire
se déroule en 2005, dans les semaines qui précèdent le retrait de Gaza par les
Israéliens. Jaafar, un pêcheur palestinien infortuné, attrape dans ses filets un
cochon vietnamien. Tiraillé entre sa foi musulmane et son envie d'améliorer la
vie de son épouse, payer ses dettes et la réalité du conflit, Jaafar décide
d'entreprendre avec son cochon un commerce des plus insolites avec une
jeune colon russo-israélienne, Yelena. En effet celle-ci élève des cochons et
n'ayant plus de cochon mâle, demande à Jaafar de lui apporter la semence de son cochon.
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Elia Suleiman, Intervention divine (2002, Palestine)
Ce film est une critique ironique de l'absurdité de la situation géopolitique en
Palestine. Es, un Palestinien vivant à Jérusalem, est amoureux d'une
Palestinienne de Ramallah. L'homme est partagé entre son amour et la
nécessité de s'occuper de son père, très fragile. En raison de la situation
politique, la femme ne peut aller plus loin que le checkpoint situé entre les
deux villes. Les rendez-vous du couple ont donc lieu dans un parking désert
près du checkpoint.
Eran Riklis, Les Citronniers (2008, Israël, Allemagne, France, fiction)
Salma vit dans un petit village palestinien de Cisjordanie situé sur la Ligne verte
qui sépare Israël des Territoires occupés. Sa plantation de citronniers est
considérée comme une menace pour la sécurité de son nouveau voisin, le
ministre israélien de la Défense. Il ordonne à Salma de raser les arbres sous
prétexte que des terroristes pourraient s’y cacher. Salma est bien décidée à
sauver coûte que coûte ses magnifiques citronniers. Quitte à aller devant la
Cour Suprême afin d’y affronter les redoutables avocats de l’armée soutenus
par le gouvernement. Mais une veuve palestinienne n’est pas libre de ses actes surtout
lorsqu’une simple affaire de voisinage devient un enjeu stratégique majeur. Salma va trouver
une alliée inattendue en la personne de Mira, l’épouse du ministre. Entre les deux femmes
s’établit une complicité qui va bien au-delà du conflit israélo-palestinien.
Michel Khleifi, Noce en Galilée (1987, Palestine, France, Belgique, fiction)
Le Moukhtar, chef d’un village arabe palestinien, vient demander au
gouverneur israélien de lever le couvre-feu pour pouvoir marier son fils. Après
une longue négociation, le gouverneur accepte à condition que lui et ses
militaires soient les invités d’honneur de la noce. Le Moukhtar s’en retourne se
demandant comment son village va prendre cet accord. Les oppositions et les
contradictions vont alors se révéler dans la communauté même.
Lorrine Levy, Le fils de l’autre (2012, France, Israël, Palestine)
Alors qu’il s’apprête à intégrer l’armée israélienne pour effectuer son service
militaire, Joseph découvre qu’il n’est pas le fils biologique de ses parents et
qu’il a été échangé à la naissance avec Yacine, l’enfant d’une famille
palestinienne de Cisjordanie.
La vie de ces deux familles est brutalement bouleversée par cette révélation
qui les oblige à reconsidérer leurs identités respectives, leurs valeurs et leurs
convictions.
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A LA RECHERCHE D’UNE PAIX
Sont rassemblés ici des éléments d’ouverture, de construction, de création qui montrent
qu’en Israël ou dans le monde, de nombreux acteurs militent pour la paix et œuvrent pour que
la notion d’identité culturelle ne soit pas prétexte à repli et enfermement mais à dépassement
et dialogue.
L’ONG israélienne Breaking the silence recueille les témoignages de soldats
Breaking the Silence (« Briser le silence »), une organisation d’anciens soldats israéliens,
témoigne de la réalité de la guerre d’occupation israélienne dans les territoires palestiniens,
sans tabous ni faux semblants. Leurs témoignages, accompagnés de photos et de vidéos,
invitent les Israéliens à prendre acte des dérives de leur armée et à se sentir responsables de
ce qui se joue dans les territoires palestiniens.
www.breakingthesilence.org.il
L’Hôpital de la Sainte Famille à Bethléem
Dirigé sous la houlette de l’Ordre de Malte, cet hôpital, consacré depuis 1990 à la maternité,
accueille tout le monde sans discrimination de race, de culture, de religion, ou de condition
sociale. Il est connu des Juifs mais aussi des Musulmans.
Le Beit Berl College ou l’école de la coexistence entre Juifs et Arabes en Israël
Situé près de Tel Aviv, cet Institut universitaire accueille 10000 étudiants israéliens dans ses
quatre écoles, parmi lesquelles figurent un Institut académique de formation des enseignants
arabophones et une Ecole d’Art et de Cinéma.
Cet Institut a le mérite et la particularité d’associer à parité enseignants et étudiants Arabes et
Juifs et de contribuer ainsi à l’égalité des chances, à la bonne entente entre les communautés
et aux efforts en faveur de la paix.
Combatants For Peace
L’ONG « Combatants for peace » cherche des réponses au conflit israélo-palestinien en
unissant les forces des deux peuples
www.combatantsforpeace.org
New Profile, une association de femmes contre la militarisation de la société
israélienne
Association qui veut « re-civil-iser » l’Etat d’Israël en aidant les jeunes à connaître l’objection de
conscience et à être de plus en plus nombreux à refuser le service militaire dans ses
conditions actuelles.
http://www.newprofile.org/english/
Machsom Watch
Association de femmes israéliennes qui se sont donné pour but la surveillance des check
points pour éviter les abus que peuvent être les fermetures temporaires et arbitraires, les
attentes injustifiées, les brutalités…
http://www.machsomwatch.org/en
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Women in black
Mouvement international de femmes qui protestent contre la guerre. En Israël, depuis vingt
ans, elles manifestent silencieusement chaque vendredi entre 13h et 14h avec des pancartes
portant le slogan suffisant selon elles, « end the occupation ».
www.womeninblack.org
Le MAN – Mouvement pour une Alternative Non-violente
Le M A N a pou r obj e cti f d e promouvoir la non-violence et de faire valoir son apport
spécifique dans la vie quotidienne, dans l’éducation et dans les luttes sociales et politiques.
w ww .n on -vio le nc e. fr
Alternatives Non-Violentes
Alternatives Non-Violentes est le nom d’une revue de recherche sur la non-violence. Cette
publication trimestrielle centre chacun de ses numéros sur un sujet précis lié à la
problématique violence/non-violence, en publiant des articles d’auteurs qualifiés (chercheurs,
universitaires, acteurs sociaux). Cette revue explore les champs éducatifs, éthiques et
politiques de la non-violence ; elle est agréablement illustrée et s’obtient par abonnement.
www.non-violence.fr
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LE POINT DE VUE DU PHILOSOPHE PATRICK GATIGNOL
« Ve ntr e cr eu x » : un e Pi è ce d’ Han oc kh L e vin p our e ntr er da ns l e si le nc e d ’u n
En fant ?
I Pr ésen ta tio n d e la Piè c e :
So si e alias Ventre Creux revient à la Maison après la Guerre : il découvre qu'un bonhomme
qui porte le même prénom que lui – « Sosie » - habite chez lui et prétend être l'habitant de
cette Maison bien avant son départ ; disons qu'il prétend être Lui, ce que sa Femme et son
Fils, au moins dans un premier temps, semblent confirmer ! ?
Plus tard un troisième larron - Ventre à Terre - prétendra lui aussi se prénommer "Sosie" et
être l'occupant d'avant Guerre, le mari de la Femme et le Père de l'Enfant ! ?
Nous pouvons appeler cette tripartition, invraisemblable, la Pr obl é ma ti sa tio n T hé âtr al e de
la Pièce.
Elle porte, elle problématise Théâtralement la Question de l'Identité/ des Identités de
quelqu'un – à travers la perte, apparente, de son (ses) Identité(s) et à travers une sorte de
démultiplication de ce qui semblait être une unique personne.
Tentons un éclairage Philosophique de cette pièce – à nos risques et ridicules !
II D e l'Id en tit é à l'Id en tit ai re ?
L'Id ent it é d’un être Humain est ce qui permet de le Reconnaître malgré le temps qui passe,
de la Reconnaître dans les contextes les plus variés, de rapporter à lui des choses lui
appartenant et enfin de connaître ses appartenances à tel ou tel ensemble.
Notre Identité est composée de multiples constituants d'Identification : physiques, ethniques,
sociaux, professionnels, psychologiques, culturels, religieux etc. etc. mai s tous ces
constituants ne composent notre Identité qu'en tant que l'on peut justement les rapporter à ce
qui fait de chacun d'entre nous un être "à nul autre pareil", Unique et insubstituable en tant
que tel : on peut certes nous remplacer mais ce ne sera plus nous, ce sera quelqu'un d'autre ;
il n'y a qu e no us à êtr e « nou s » e n t an t qu'à nul a utr e par ei l i n sub st itu abl e ! ?
Mais qu'est que ce "à nul autre pareil" Insubstituable et Unique?
Désignons, au moins, ce truc par une expression : "Not re Id ent it é". Nous pourrons dire, si
un pareil truc existe, qu'elle subordonne à elle toutes nos composantes d'Identification (elles
renvoient toutes à elle).
Ce truc doit avoir au moins 4 fonctions ou puissances :
1° Un e fon cti on d e te mpo ra li sa tio n de chacun d'entre nous : nous restons le même à
travers le temps de nos existences. Nous n'avons un Présent / un Passé / et un Avenir que
pour autant que les trois instances du Temps sont rapportables à quelque chose qui
demeurant Identique et unique / à nul autre pareil à travers Présent/Passé/Avenir sinon le
chaos sans Temps !
2° U ne fon ctio n d e Di sc ri mi na tio n de nous-mêmes au sein de la réalité : "tiens je
l'aperçois là bas".
3° U ne fon ctio n d 'approp ri atio n : on peut grâce à elle rapporter à moi de multiples
caractéristiques (physiques / Psychologiques / Sociales / Culturelles etc.), de multiples autres
être humains (Amour, Amitié, Famille, groupes divers et variés : familiaux, sociaux, ethniques,
Culturels etc.) et de multiples fourbis (propriétés ou non mais que j'utilise ou qui sont miennes).
En bref je suis un centre de rapports et d'appartenances.
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4° Un e F on cti on d ’a ppar te na nc e Id en tit air e : on parlera d’a ppa rte na nc e
Ident it air e lorsqu’une appartenance (ou plusieurs) sont réputée(s) définir – avant tout : primat
– un individu ou un groupe.
Il s'agit de la figure la plus forte de l'Identitaire : Famille / Caste / Ethnie / Civilisation / Bande
etc. Avant d'être un individu Singulier à nul autre pareil, avant d'être un Humain nous serions
cela ! Un Noir ou un Arabe ou de même un Juif, un Occidental en Majesté, un Macho
tonitruant, un Mafieux de la Finance en Mission Humanitaire, un membre de la célèbre Famille
des Rhododendrons de St Sauveur etc.
III L' Ob je t d e la P iè ce d ' H. L ?
(D’autres approches sont possibles de la Pièce : la tripartition de « sosie » peut pointer des
différenciations sociales ou ethniques mais dans tous les cas il faudra saisir qu’Hannock Levin
met constamment en tension le circonstanciel et l’Universel – ces guerres du proche et moyen
orient/ la Guerre, le singulier et l’universel – les problèmes Identitaires là-bas/ la possible
criseIdentitaire de n’importe qui-n’importe quand-n’importe où ?)
Il s'agit tout bonnement de m'être en Crise ce système d'Identifications et d'Identifications
Identitaire, de le mettre en crise en le confrontant à une situation extrême pour un Humain : la
Guerre et précisément le Retour de la boucherie ?
Pour se faire Hanockh Levin engage au moins trois Opérations proprement Théâtrale.
IV Le s Opé ra tio ns pr opre m en t Th éâ tra le s d e l a Pi è ce :
1) Les Opérations Théâtrales de Fi cti on ne ment i rré ell e s e t éni g ma tiqu e s: ses
plus proches – « Sa » Femme, « Son » Fils – ne le Reconnaissent plus / Il se démultiplie en
trois (Trinitation caractéristique !).
2) Les Opérations Théâtrales d’ab se nt e ment (ou pour parler Philosophiquement :
de « mise aux abonnés absents) : ainsi H.L n’évoquera jamais la Recherche d’une Identité
Vraie ou Sacrée par delà les réputées courantes / ni non plus d’Identités collectivesHistoriques-Religieuses / la Figure de l’Ennemi et l’Idée même d’Ennemi / le Conflit IsraéloPalestinien (ou l’inverse !).
3) Les Opérations d’i nt err upti on s p ar mi se en su sp en s : les points nodaux ne
seront pas éclaircis au-delà de leurs seules proclamations Théâtrales : le Prénom « Sosie »
sera proclamé « mot creux », « grain de poussière » / un « Sosie » dira à un autre « Sosie » à
propos de ce dernier ( ! ?) : « Personne. Rien. Tu n’es rien, tout simplement. Un rien qui a faim.
Un rien qui a froid. Qui est blessé. Qui agonise. Qui meurt » / ou encore « Celui qui vous le dit
est un homme comme vous ».
* « Opérations de fi ctio nn e me nt ir éel le s et én ig mat iqu e s : ce ne sont pas des Mots
clamés par les Acteurs qui vont pointer cette implosion Identitaire, des Mots qui seraient déjà
des concepts (Philosophiques) ou qui seraient conceptualisables – comme dans les Pièces à
Thèses (qui sont tout aussi bien des Pièces à Concepts) : ce sont des « Scènes Théâtrales » :
ce retour qui devrait être retrouvailles et qui devient la Scène de « la non Reconnaissance par
sa Femme et son Enfant » / ces Scènes de Rencontres entre les trois « Sosie » qui disent
chacun être « Sosie » (sans que l’auteur laisse soupçonner la moindre mystification ! ?) :
Ces Scènes « extrémisent-Théâtralement », par le Fictionnement iréel, l’implosion Identitaire :
tellement en perte de son Identité – au rouet de la Guerre – qu’il n’est même plus reconnu par
ses plus proches, tellement et tellement qu’il se démultiplie, invraisemblablement, en trois
« Sosie » (mais l’invraisemblable est porté ici par cette puissance du Théâtre à Fictionner des
Scènes iréelles, au bord du fantastique).
Les Mots du Texte sont alors (et pour cette Opération) des générateurs de Scènes et non
point des encrages conceptuels : des passeurs pour des Scènes qui outrepassent les signifiés
de ces Mots.
** « Opérations d’ Ab se nt e me nt s » (on pourrait dire aussi de « Forclusion ») : des
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Questions/ des Enjeux nodaux, pour tout un chacun ou presque, sont laissés de côté au point
que rien dans la pièce n’en porte trace même indirectement, ils sont forclos, radicalement
absents ; pourtant hanock Levin ne peut les ignorer et même en ignorer l’importance pour les
pensées circulantes en dominance – Idéologique/ Médiatiques / Étatique et politique (partout
dans le Monde et au premier chef en Israël/ Palestine.
Reprenons : sont « absenter » la Recherche d’une Identité Vraie individuellement et
collectivement, la Problématique de l’Essence des Peuples et de tel ou tel Peuple (et en
particulier les Peuples du conflit Israëlo/ Palestinien !), la Problématique Ami/ Ennemi (il y a
certes des adversaires mais qui semblent pris, à égalité avec les siens, dans les dévastations
guerrières sans responsabilisation d’un camp : atrocités de la Guerre mais non pas d’un
ennemi).
Certes nous pourrions croire que c’est par légèreté de pensée ou par manque de sens
politique ou encore par peur de la censure etc. - qu’H.L procède à ces « oublis » - nous
pensons tout au contraire que là réside la force de sa pensée Théâtrale et son véritable
engagement Politique – « sa Grande Politique » ? Il n’oublie rien, il exclut de sa pièce ce qui ne
saurait en constituer l’Essentiel des Enjeux Existentiels – l’Identité d’un Humain (et de surcroit
au retour de la Guerre) – et de ses Enjeux Politiques - au sens de la « Grande Politique »
partout et toujours et donc aussi la où Hanock Levin est un Citoyen, au sens d’une Politique
non politicarde et qui ne serait pas partisane comme celle d’un camp.
*** La troisième Opération – l’Opération d’int e rrupt ion p ar mi se en su sp en s - est
comme le revers de la deuxième puisque tout au contraire elle engage ce qui pour H.L
constitue l’Essentiel, pour toute Problématisation de l’Identité sur un plan individuel ou collectif
(et donc Politique).
Mais quel est alors cet Essentiel ? « Sosie » comme un « mot creux », comme un » grain de
poussière » et aussi « Personne. Rien. Tu n’es rien, tout simplement. Un rien qui a faim. Un
rien qui a froid. Qui est blessé. Qui agonise. Qui meut » et encore : « Celui qui vous le dit est
un homme comme vous » ?
L’identité vraie de « n’importe qui » nous est ici donnée mais au delà de ces Mots/ Expression
H.L ne commente nullement au travers de discours de ses personnages : juste cela : juste
cela qui pointe l’appartenance Universelle et égalitaire de tout Humain à l’Humanité – « un
ho m me co m me vo us », juste cela qui pointe ce que tout Humain a en partage avec
n’importe quel autre Humain en deçà/ au-delà de toute propriété d’appartenance Identitaire
sociale, culturelle, ethnique, religieuse etc. - soit en deçà/ au delà de toutes nos
caractéristiques Identitaires qui nous divisent, nous hiérarchisent et nous mènent à la Guerre.
« Un ri en q ui a fa i m. U n rie n qu i a fai m. Un rien q ui a fro id. Qu i e st bl e ssé . Q ui
ago ni se . Qui m eu rt » juste un être capable ou au risque de souffrir et de mourir – exposée
dans sa pure Existence nue finie et précaire, tout le reste est second, non essentiel et toujours
contingent.
Et encore pour définitivement briser toute consistante Identitaire ces Mots de minage à propos
du prénom de Sosie : « mo t cr eu x », « P er so nne » , « rie n » puisque celui qui croyait
pouvoir être Identifié comme le porteur de ce prénom a perdu sa capacité à être
reconnu/Identifié et se démultiplie en un ensemble hétéroclite de bonhomme se réclamant de
la même Identité (de surcroit notons que ce prénom « Sosie » est un prénom paradoxal : le
prénom de quelqu’un est censé être capable de le singulariser et de l’Identifier dans une
lignée familiale or ce prénom signifie exactement le contraire soit l’indistinction entre
justement des « sosies », le comble étant ici que nous avons trois « Sosie » mais sans
qu’aucun ne paraisse le modèle des autres : trois purs « sosie » ! ?)
La Problématisation de la Pièce s’approfondit alors d’un cran : d’une part l’affirmation que
« sosie » est un « mot creux » etc. / d’autre part en même temps et comme du même
mouvement est proclamé par nos trois-un larron qu’ils n’arrêteront pas de « clamer » qu’ils
sont « sosie » et de se battre pour cette question ! ?
H.L ne fait que nous « proposer » ces(ses) Mots, ces(ses) expressions
: on peut certes, comme je viens de le faire, leur donner leurs sens directs et incontestables
mais au-delà, là ou un travail de Pensée pourrait s’enclencher, H.L n’en dit pas plus – et c’est
cela que nous appellerons l’interruption suspensive : H.L laisse alors la parole ou plutôt la
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Pensée à ses spectateurs, à eux de Penser en leur nom propre et à leurs risques et périls (et
H.L qui était un contemporain présent en Israël en avait déjà beaucoup pris de risques et de
périls) ce que pourrait être une Éthique Humaniste de l’Identité vraie de chacun dans son
Existence nue et son inconsistance Identitaire, ce que pourrait être là bas et partout une –
Grande Politique – sous l’Idée de l’Universalité Égalitaire de l’Humanité ? Ici le Théâtre met en
suspens ses propres propositions pour que puisse advenir un Spectateur/Acteur-Pensant.
Encore faut-il, pour devenir Spectateur de cette pièce, assumer ce qui la soutient, soit la
« mise au abonné absent » du bataclan Identitaire au nom duquel les humains s’entretuent
allégrement – sinon le quidam assis sur son fauteuil s’ennuya ferme (en pensant qu’H.L parle
de tout sauf de l’actuel des Guerres) ou se scandalisera de l’oubli du sacré (variable
inversement suivant les camps !) : ce quidam ne sera en rien un Spectateur du Théâtre d’H.L ,
au mieux il sera un consommateur culturel, étranger à la vérité de la Pièce.
*** Un Sp ec ta te ur e t l e « Si le nc e » d e l’Enfa nt ?
Alors gardons nous de nous enflammer trop vite. Soyons comme l’Enfant à la fin de la
Pièce : « L ’En fa nt sort d e la mai son s’appro c he et l e re gard e e n si le nc e ».
Soyons cet Enfant ?
Patrick Gatignol
"philosophe urgentiste et de proximité"
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Annexes
L’EQUIPE ARTISTIQUE
Véronique Widock, metteur en scène
Sortie du Conservatoire National Supérieur d’Art
Dramatique en 1984, elle joue, sous la direction de
Daniel Mesguich, les rôles de Juliette dans Roméo et
Juliette au Théâtre de l’Athénée et de la Marquise
Cibbo dans Lorenzaccio au TGP.
Elle fonde la compagnie "Les Héliades" et crée sa
première mise en scène au TGP, Les rescapés de
Stig Dagerman. En 1992, elle fonde "Le Hublot",
chantier de construction théâtrale, dans une
ancienne usine de métallurgie à Colombes. Elle crée,
en lien avec les habitants : Visions du monde
d’Eugène Durif au Théâtre de Gennevilliers, Portraits
vidéo à la Coupole/Scène Nationale de Sénart, et au
Bateau-Feu/Scène Nationale de Dunkerque, Trame
de Roselyne Brunet-Lecler au Théâtre Paris-Villette.
Elle travaille essentiellement sur des écritures contemporaines et crée notamment Dans le petit
manoir de Witkiewicz et Le jeu de la vérité de Stig Dagerman au Hublot, Le chemin du serpent
de Torgny Lindgren à la Coupole/Scène Nationale de Sénart, La rose tatouée de Tennessee
Williams à l’Avant-Seine/Théâtre de Colombes, 27 remorques pleines de coton de Tennessee
Williams au Sudden Théâtre et Tuta Blu de Tommaso di Ciaula au Hublot.
Ses dernières créations sont : Barbe-Bleue, espoir des femmes de Dea Loher, créée en mai
2007 au théâtre de la Tempête, reprise en novembre 2007 à l'Avant-Seine/Théâtre de
Colombes, Gengis parmi les Pygmées de Grégory Motton qu'elle crée au théâtre de l'AvantSeine à Colombes et au Festival des écritures contemporaines à Bagneux.
En 2010 elle adapte, joue et met en scène Voyage à travers les ombres d'après le journal de
Mary Barnes au Hublot, Colombes.
Nolwenn Le du, assistante à la mise en scène
Après sa formation à l’Ecole du Théâtre National de Bretagne de 1994
à 1997, elle joue sous la direction de M. Langhoff dans Femmes de
Troie, J. Lambert Wild dans Orgia, D. Jeanneteau dans La sonate des
spectres, P. Eustachon dans Constellation-le marin et J-P. Wenzel dans
La strada. En 1999 elle participe à la création du Double de la Bataille,
pièce chorégraphiée par C. Diverrès. En 2001, elle met en scène et joue
dans Matériau-Médée de H. Müller, création collective présentée dans
le cadre du festival Mettre en scène à Rennes. Elle écrit une adaptation
de Mademoiselle Else d'A. Schnitzler et est l'auteur d'une pièce de
théâtre Une confrontation. Sa rencontre avec la metteuse et
comédienne Agnès Bourgeois en 2005, l'amène à participer à plusieurs
spectacles dont Un sapin chez les Ivanov, Espace(s) de démocratie et
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dernièrement Le conte d'hiver. Elle assiste Véronique Widock pour la création de Le soldat
ventre-creux et joue dans Que d'espoir, cabaret qui se joue en appartement, pièces écrites
par H. Levin.
Axel Petersen, comédienne / la femme
Après une formation à l’Ecole Perimony puis à l’ENSATT, Axel Petersen
se perfectionne avec A.Hakim, Ph.Adrien puis à l’Actor Studio chez
J.Strasberg, B.Salland, P.Weaver.
Elle joue les auteurs Racine, Kleist, Brecht, Montaigne, Homère, Anouilh,
Molière, Philippe Sabres, Garcia Lorca, Tirso de Molina, Feydeau,
Claudel, Sophocle, Thomas Bernhard, Shakespeare, Jura Soyfer, Dea
Loher, Hanokh Levin... Elle est dirigée par Marcel Bozonnet, Jacques
Kraemer, Mehemet Ulusoy, JP.Andréani, Sylvain Lemarié, Jacqueline
Boeuf, Emmanuelle Weisz, JL.Palies, Jacques Dacqmine, JP.Nortel,
Daniel Thuann, Philippe Boronad, Olivier Comte, Yves Chenevoy,
Véronique Widock, Christophe Patty, Mariana Araoz …
Elle pratique le clown avec Vincent Rouch, le masque avec Mario Gonzales, le cabaret avec
Sylvain Maurice, le théâtre de rue avec les compagnies “Annibal et ses éléphants” et “Art tout
chaud”.
Stéphane Facco, comédien / le soldat ventre-creux
Stéphane Facco s'est formé à l'université d'Aix en Provence puis à
l'Atelier de Recherche et de Formation théâtrale de Toulouse. Depuis 97
il a joué sous la direction de collectif ATV, de Catherine Thouvenin, S
Bournac, M Cipriani, C. Duparfait et J Nichet notamment dans "Faut pas
payer" de Dario Fo au théâtre des Amandiers et dans "La Ménagerie de
Verre" de Tennessee Williams au Théâtre de la Commune. En 2003 il
participe à la création du collectif Drao avec lequel il met en scène et
joue "Derniers Remords avant l'oubli" de JL Lagarce au théâtre 71 et à la
Tempête, en 2006 "Push Up" de R. Schimmelpfennig (Prix
d’interprétation, et meilleur spectacle / Prix du Souffleur 2008), en 2008
"Nature morte dans un fossé" de F. Paravidino au théâtre 71, en 2010
"Petites histoires de la folie ordinaire" de P. Zelenk au Théâtre de la Tempête.
Vincent Debost, comédien / le soldat ventre-plein
Vincent Debost s’est formé au Conservatoire National d'Art Dramatique
de Paris, promotion 2000. Au théâtre il a travaillé avec : Hédi Tillette de
Clermont Tonnerre, Paul Desveaux, Sylvain Maurice, Jacques Lassalle,
Brigitte Jaques-wajeman, Anne Contensou, Jacques Weber, Lucie
Berelowitsch, Olivier Treiner, Arnaud Denis, Matthew Jocelyn, Olivier
Bunel, Lucie Vallon, Gregorry Motton & Ramin Gray, Philippe Adrien,
Stephan Druet, Jérémy Banster, Mario Gonzales, Loïc Corbery & Jérôme
Ragon, Joseph Menant…
Au cinéma et à la télévision avec Sam Karmann, Luc Besson, François
Dupeyron, Tonie Marshall, Caroline Glorion, Jean-Marc Brondolo,
Christian Merret-palmer, Eric Summer, Michel Hassan, Grégoire Sivan,
Nadia Jandeau, Ona Luambo...
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Henri Costa, comédien / le soldat ventre-à-terre
Henri Costa s’est formé de 90 à 95: Licence et Maitrise en Etudes
Théâtrales à Paris 3 Sorbonne, École Jacques Lecoq à Paris. Au Théâtre
il a joué sous la direction notamment de Anne Morel, de Eloy Recoing.t
de C. Sorba, L. Gachet, et de Philippe Adrien dans "Doux oiseau de
Jeunesse" de T. Williams au Théâtre de la Madeleine et "Cadavres
Exquis" / Grand-Guignol au Th. de la Tempête à Paris, Suisse. A la
Télévision il tourne avec Pascal Lahmani Daniel Losset, Louis Choquette,
Jean Sagols, Zabou Breïtman. Au Cinéma avec Farouk Thoyer. N.
Rousseau En 2008, il crée le groupe « Têtes de Chien », concerts au
New Morning, festivals, tournée (chanteur).
Christophe Pinon, comédien / le grand-père, les voisins
Christophe Pinon s'est formé au Cours Jean-Louis Martin
Barbaz sous la direction de Serge Erik et aux Ateliers Gérard
Philippe, classe de Philippe Duclos, au T.G.P., direction :
Daniel Mesguich. De 82 à 87, il joue dans différents théâtres à
Varsovie. De 1991 à 2006, il joue sous la direction de Patrice
Bigel, Compagnie "La Rumeur", "Flagrant Délit de mensonge",
"Une tragédie Céleste", « Dramen, de l'aube à minuit », de
Georg Kaiser, « Le Cocu Magnifique », de Fernand
Crommelynck, et "Tableaux d'une exécution" de Howard
Barker. De 96 à 97, il joue sous la direction de Jacqueline Ordas, dans « L'Ombre de Mort »,
de Stig Dagerman et dans « Rencontre manquée », de Mario de Carvalho au Théâtre de la
commune à Aubervilliers.
Au cinéma il joue sous dans « Le chemin sous la Lune », réalisation : Maciek Wojtysko ; « Sur
la Terre comme au Ciel », réalisation : Kristin Johannesdottir ; « Remake », réalisation : Pierre
Huygues.
Geneviève Sorin, danseuse, chorégraphe et enseignante
Après une formation classique avec Igor Fosca, Geneviève Sorin
s’engage dans les années 70 à Paris, dans la danse contemporaine
alors émergente en France. Elle est interprète pour les compagnies Félix
Blaska, le Ballet Contemporain, Joseph Russillo, les Ballets de la Cité, le
Ballet de Poche, Susan Buirge et danse les premières pièces de
Dominique Bagouet. Au début des années 80, elle s’installe à Marseille.
Là, dans une totale liberté, elle crée l’ATelier de Recherche
Chorégraphique et enchaîne des expériences qui lui ouvrent la voie de
l’improvisation. Elle s’affirme alors comme chorégraphe, danseuse,
enseignante et musicienne.
En 1989, elle retrouve Dominique Bagouet qui lui commande l’écriture
d’une pièce Allo ! Monsieur Baril ? La collaboration se poursuit la même année sur Meublé
Sommairement.
C’est en 1990 avec Chansons qu’elle fonde sa compagnie.
Geneviève Sorin a réalisé à ce jour plus d’une trentaine de créations chorégraphiques et
musicales, une pièce radiophonique, deux disques et plusieurs commandes chorégraphiques
ou musicales.
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Bastien Boni, contrebassiste / compositeur / improvisateur
Tout en se produisant sur scène dans le trio Boni’s Family, il a suivi une formation classique au
conservatoire d’Avignon. Depuis, il joue régulièrement en France comme à l’étranger dans
différentes formations de musiques improvisées en concert, ou pour des projets de spectacles
de danse, théâtre ou poésie. Il compose des musiques et fait de la création sonore de films
documentaires, de courts-métrages et de spectacles. Il accompagne régulièrement les
créations de Geneviève Sorin en tant que musicien ou créateur sonore. Depuis 2007, il est
intervenant en son à l’Université d’Auvergne en licence professionnelle création multimédia.
Pierre Gaillardot, concepteur lumière
Il crée des lumières pour des metteurs en scène et des chorégraphes : P. Bigel, V. Novarina,
J. Rebotier, L.-D. de Lencquesaing, K. Biscuit et M. Barcellos. Depuis 1996, il travaille
régulièrement avec D. Bruguière. Depuis 1997, il collabore avec la chorégraphe C. Diverrès.
Ces deux dernières années, il conçoit la lumière de nombreuses créations sur des mises en
scène de J.-P. Wenzel, E. Bastet, A. Ollivier, M. Paquien… Il crée les lumières des trois
dernières mises en scène de V. Widock.
Eric Mariette, scénographe
Formé notamment par Julian Knab, Paul Golub, Joel Pommerat, Dominique Verrier et Simon
Abkarian. Auteur/metteur en scène, il crée : « Les Praticiennes », « L’envers du décor », « Les
Naufragés de la mare », « Les Médiévales », « Les Petits Choix », Kristalnacht ». Auteur, il écrit
« Fleur de peau », « Extase », « Maman Lise et Jean-Pierre », « Babel », « Hasard ».
Metteur en scène de « Polards », en 2001, « Cantates » de J. S. Bach, en 1995.
Assistant à la mise en scène de Joël Pommerat sur « Treize étroites Têtes » aux Fédérés CDN de la région Auvergne à Montluçon et au Théâtre Paris-Villette en 1997.
Concepteur lumière du « Jeu de la Vérité » de Stig Dagerman, au Hublot en 1997, de
« Trame » de Roselyne Brunet-Lecler, au Théâtre Paris-Villette en 1997, de « Présences »,
mise en scène de Joël Pommerat au Hublot et au Théâtre 71-Malakoff en 1996, et du « Cri
des Hannetons », mise en scène de Dominique Verrier au Hublot en 1994.
Réalisateur vidéo / théâtre et documentaire, il crée « Les Rires d'en face » en 2006 au
Bathyscaphe et « La Grande Cour » en 2000 au Hublot. En 2007, il réalise le film du spectacle
« Barbe bleue, espoir des femmes ». En 2008, il réalise un documentaire sur Mayotte et sur la
tournée du groupe de musique Tsenga.
Myriam Drosne, costumière
Professionnelle du textile, elle travaille depuis 1995 en tant que costumière, accessoiriste
(volume textile), tapissière et décoratrice textile. Elle appréhende le textile appliqué au corps et
à l’espace pour le théâtre, la danse, la mode, le cinéma et l’événementiel.
Elle collabore entre autre avec les compagnies de théâtre et de danse La Rumeur - Patrice
Bigel, Catherine Berbessou, Terrain Vague, Paris Concert, LMNO et la Maison Martin Margiela
pour la mode.
Elle se forme au lycée Paul Poiret à la couture sur mesure et aux techniques de toilistemodéliste, au Greta des arts appliqués aux techniques de costumes de théâtre puis aux
techniques de tapisserie de spectacle à l’Ecole Boulle.
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Laurence Sendrowicz, traductrice
Née en France, qu’elle quitte après son bac, elle restera treize ans en Israël où elle devient
comédienne, puis se consacre à l’écriture dramatique.
Elle est une des initiatrices du projet de traduction de l’oeuvre de Hanokh Levin en français.
Depuis 1991, elle a traduit une vingtaine de ses pièces pour les Éditions théâtrales. E n 2005,
elle a mis en scène Que d’Espoir !, un spectacle de cabaret adapté de textes et de chansons
de Hanokh Levin.
Elle travaille aussi en tant que traductrice de littérature hébraïque contemporaine..
Jacqueline Carnaud, traductrice
Coauteure de deux manuels d’hébreu contemporain, L’Hébreu au présent (Maisonneuve et
Larose, vol. 1, 1978, vol. 2, 1982), rédactrice en chef de la revue TransLittérature de 1992 à
2003, elle est traductrice d’anglais et d’hébreu. Elle a traduit une quarantaine d’ouvrages,
notamment en histoire, sciences humaines, philosophie (dont Bernard Lewis et Noam
Chomsky) et des pièces de théâtre pour France-Culture. Elle enseigne également au DESS de
Traduction littéraire professionnelle de l’université Paris VII.
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