MÉDECINE CONFÉRENCE TDA/H BELGIQUE – BRUXELLES, 28/11/2006 Le TDA/H de l’adulte nous ne sommes qu’une dizaine de médecins en Belgique à nous intéresser à cette problématique,et il est difficile dans ces conditions de donner les meilleurs soins possible, » conclut le Dr Oswald. « On estime que le TDA/H affecte quelque 4% de la population belge, or à peine 1.000 ou 2.000 patients sont traités. » ■ Dr Jacek Sierakowski Un tiers des enfants TDA/H ne le seront plus à l’âge adulte, soit par disparition des symptômes, soit par acquisition de mécanismes de compensation. Mais cela veut dire aussi que chez deux tiers d’entre eux, le problème persistera au-delà de l’enfance... I Le Dr Pierre Oswald (Hôpital Érasme) a rappelé que le TDA/H n’est pas dû à une cause unique. On sait en tout cas qu’il est lié à un dysfonctionnement cérébral, en particulier du lobe frontal, qui est responsable de l’inhibition, de la planification et de la modulation des réponses. Deux neurotransmetteurs sont impliqués. On a pu mettre en évidence, d’une part, une concentration insuffisante en dopamine, responsable des processus de motivation et de renforcement. Quant au déséquilibre de la production de la noradrénaline, il affecte les processus d’apprentissage, de mémoire et de vigilance. Pas nécessairement hyperactif Après la première guerre, on parlait du ‘syndrome de lésion cérébrale a minima’ (minimal brain dysfunction), quand on pensait qu’il était consécutif à des séquelles cérébrales de la grippe espagnole ou à une anoxie périnatale. Dans les années 1950, il a été question de ‘réaction hyperkinétique de l’enfant’,pour passer ensuite, dans les années 1970, au ‘trouble attentionnel’ (attention deficit disorder,ADD). Depuis la fin des années 1980, on parle de ‘trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité’, ou TDA/H (attention deficit hyperactivity disorder, ADHD).On distingue le TDA/H à prédominance hyperactive-impulsive, celui à prédominance inattentive et le TDA/H mixte, avec la présence simultanée d’hyperactivité, d’impulsivité et d’inattention. Et pas vraiment déficitaire La personne victime duTDA/H aura du mal à sélectionner le bon stimulus dans une pléthore d’influx, à continuer à se concentrer sur ce stimulus et à gérer les différents stimuli en fonction de leur importance. Elle pourra présenter une hyperfocalisa- Témoignage Être adulte atteinte de TDA/H, pour moi, cela veut dire que je me laisse facilement distraire. J’ai des difficultés à me concentrer. J’ai tendance à sortir ou à m’écarter des sujets de conversation. Je suis impulsive. Je prends des décisions de façon précipitée, sans toujours en envisager les conséquences. Je suis agitée, souvent hyperactive et extrêmement nerveuse. Je suis fatigante pour mon entourage mais bien plus encore pour moi-même. J’ai souvent le sentiment profond de ne pas donner mon plein rendement, de ne pas utiliser tout mon potentiel. J’ai des difficultés dans mes relations humaines. Je ne peux pas tolérer l’ennui et suis toujours en train de chercher quelque chose à faire. Il m’est difficile de m’organiser. Je suis impatiente et tolère mal les frustrations. Je suis d’humeur variable, je passe par des épisodes d’anxiété, de dépression et de solitude. Je trouve difficile de suivre les sentiers battus ou les procédures habituelles. Je mène toujours plusieurs projets de front. J’ai tendance à dire tout ce qui me passe par la tête sans tenir compte du moment ou de la pertinence de mes propos. Je suis trop perfectionniste et m’oblige indûment à performer. Je suis souvent sur la défensive, je réagis mal à la critique personnelle ou à l’indifférence, je me sens parfois mal en société et quand c’est le cas, j’ai tendance à m’isoler. Mais être atteints de TDA/H, cela veut aussi dire que nous sommes intelligents et que les défis intellectuels sont pour nous une grande source de motivation. Nous sommes créatifs et créateurs. Nous avons une intuition juste et nous percevons facilement les besoins et le ressenti des autres. Nous sommes de bons observateurs du monde qui nous entoure et sommes capables de trouver des solutions rapides à des situations compliquées. Nous sommes productifs et efficaces quand nous aimons ce que nous faisons. TDA/H Belgique – 24 rue de la Glacière, 1060 Bruxelles www.tdah.be – [email protected] Permanence le jeudi de 10h à 16h hors vacances scolaires © VPM l semble que la présence de comorbidités (et notamment du trouble des conduites), les antécédents familiaux de TDA/H et le manque de soutien familial soient des facteurs de risque de cette persistance. Parmi les possibles moyens de compensation, on trouve rigueur, perfectionnisme, respect scrupuleux des horaires,rigidité dans les rapports sociaux et familiaux... mais aussi le recours au cannabis et à l’alcool. En fait de TDA/H, il n’y a pas à proprement parler de déficit d’attention, mais un excès de stimuli. Et trop de stimulation tue la stimulation par une mauvaise utilisation de celle-ci... La personne victime du TDA/H aura du mal à sélectionner le bon stimulus dans une pléthore d’influx, à continuer à se concentrer sur ce stimulus et à gérer les différents stimuli en fonction de leur importance. tion sur un sujet qui l’intéresse, être accro à Internet,à la philatélie.« C’est assez paradoxal, ces patients sont incapables de faire attention à ce que je leur dis en consultation, mais ils passeront des nuits entières à coller des timbres sur des feuilles de papier. Ils doivent absolument terminer ce qu’ils ont commencé, sous peine d’une grosse frustration. » « Cette appellation de TDA/H est assez inappropriée: il n’y a pas de déficit d’attention, mais un excès de stimuli. Comme le dit le Dr Frédéric Kochman (Lille), il y a trop d’attention, cette hyperstimulation est à l’origine d’un réel problème.Trop de stimulation tue la stimulation par une mauvaise utilisation de celle-ci. » Tension intérieure Il est important de noter que l’on ne parle de trouble que lorsqu’il y a souffrance, que celle-ci soit le fait du patient,de la famille ou de l’entourage. Si le patient TDA/H adulte ne grimpe pas aux arbres, il parlera cependant d’agitation et de tension intérieure. Il bougera les mains, les pieds,chipotera avec le poivrier et la salière, le bic de son interlocuteur. Il présentera souvent une faible tolérance aux frustrations, il sera impatient et il perdra facilement son sangfroid. En réunion, il s’emportera si le sujet l’intéresse et sera absent dans le cas contraire. Il présentera souvent de la dépression, de l’anxiété et de l’insomnie. Il s’adonnera souvent au grignotage. Le TDA/H touche près de 170.000 adultes et 74.000 enfants en Belgique. Seuls 25% des enfants et 1% des adultes sont diagnostiqués. Trop d’enfants continuent à être considérés comme paresseux, caractériels, voire retardés mentaux, et ne sont pas pris en charge comme ils le devraient. Trop d’adultes souffrent de problèmes d’organisation, de planification, de mauvaise estime de soi, de troubles anxieux, d’échecs professionnels et familiaux, d’impulsivité, du sentiment d’être sans cesse débordé. Alors qu’ils souffrent peutêtre de TDA/H et ne le savent pas. TDA quoi? La fondation Roi Baudouin vient de publier une brochure consacrée au TDA/H de l’enfant, écrite par notre consœur Karin Rondia. Elle s’adresse aux parents, enseignants, généralistes, pédiatres. On peut la télécharger gratuitement sur www.kbs-frb.be, ou la commander par e-mail ([email protected]) ou par téléphone, au ✆ 070/23.37.28. Consommation de substances Leur cerveau en état d’ébullition permanente, les patients TDA/H auront tendance à consommer certaines drogues pour s’apaiser. La nicotine stimule leur vigilance. Le cannabis les apaise mais inhibe leur motivation. L’alcool stimule leur socialisation et apaise leur anxiété. Traitement Le traitement médicamenteux n’est indiqué qu’en cas de dysfonctionnement significatif, et il n’est qu’un volet d’une prise en charge globale, notamment de soutien et par psychothérapie. Le méthylphénidate agit au niveau de la recapture de la dopamine. S’il est administré dans les bonnes indications, à la bonne dose et sous surveillance médicale, il est efficace et sans danger. « Malheureusement, LE GENERALISTE 7 décembre 2006 N° 809 People Walt Disney a été renvoyé de son poste de journaliste, parce qu’il avait les idées ailleurs. Albert Einstein était décrit par ses professeurs comme lent mentalement, asocial, à la dérive dans ses rêves idiots, élève médiocre, impulsif et inattentif. Sa méfiance des théories établies lui permit de définir la théorie de la relativité. Autres TDA/H célèbres: Ludwig van Beethoven, Jim Carey, Salvator Dali, Whoopi Goldberg, Dustin Hoffman, Magic Johnson, John Lennon, Carl Lewis, Steve Mac Queen, Pablo Picasso, Will Smith, Steven Spielberg, Sylvester Stallone, Jules Verne, Robin Williams, Stevie Wonder, Francis Lalanne, Lindsay Wagner, Winston Churchill, John F. Kennedy, Bill Clinton, Roberto Benigni, Louis De Funès. 21