Pour un nouveau réalisme dans la politique

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Pour un nouveau
réalisme
dans la politique
environnementale
Reinhard Loske, Jörg Haas, Sascha Müller-Kraenner, Ingrid Nestle,
Hermann Ott, Boris Palmer et Roland Schaeffer
Benoît Lechat, Etopia
20 septembre 2006
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D éfendre la P la n èt e est la t â c he des Vert s
Les Verts ont co-dirigé l’Allemagne pendant 7 ans. A côté de la modernisation
sociétale, la participation a permis d’engranger de grands succès environnementaux.
On ne doit pas en douter. Cependant, par rapport à la réalité des défis, il vaudrait
mieux parler de commencements positifs figurant parfois à côté de tendances
négatives persistantes. Il est certes vrai qu’en matière de protection du climat,
l’Allemagne est l’un des rares borgne au pays des aveugles, mais il est
malheureusement tout aussi vrai que nos émissions moyenne par habitant restent
comme auparavant les plus élevées des grandes nations industrialisées européennes.
Tout plaide dès lors pour une analyse réaliste de notre période gouvernementale, qui
reconnaît ce qui a été atteint et qui nomme aussi clairement ce qui n’a pas été atteint,
tout comme les causes de ce qui n’a pas été atteint. Nous ne sommes pas une
association de défense et de promotion de l’héritage rouge-vert. Nous voulons nous
préparer sérieusement à de futures participations gouvernementales, ce qui doit aussi
comprendre une part de travail autocritique.
La raison peut-être décisive pour laquelle les Verts ont perdu en rayonnement
politique en ce qui concerne l’écologie, tient au fait que les périodes de participation
gouvernementales ne sont pas nécessairement compatibles avec des analyses sans
concession ainsi qu’avec la formulation de réponses radicales. Mais aujourd’hui
encore on sent encore trop l’influence d’une pensée « mainstream ». L’aspiration à ne
heurter personne n’est pas seulement contraire à l’esprit du temps. Elle rend les Verts
gris. S’ils veulent se remettre à la hauteur des défis écologiques, les Verts doivent dire
clairement ce qu’il adviendra si nous n’agissons pas et ce qu’il convient de faire. On
peut appeler cela une re-radicalisation, parce que les mesures nécessaires pour
protéger le climat vont bien au-delà de ce qui est discuté actuellement. Nous préférons
parler d’un nouveau réalisme dans la politique écologique, parce que les présupposés
qui étaient retenus jusqu’ici ne sont plus réalistes.
L’effet de serre concentre toutes les évolutions néfastes de la civilisation moderne : la
combustion excessive de charbon, gaz et pétrole, la recherche et l’exploitation de
ressources naturelles, l’industrialisation avec son usage intensif de matières
premières, l’intensification d’une agriculture de plus en plus chimique, l’élevage
intensif, la consommation excessive, la transformation de la forêt et de la savane en
terre agricole. La catastrophe climatique qui approche est en quelque le résultat de
« l’addition de toutes ces fautes ». Ces fautes, qui ont été avant tout commises par les
pays industrialisés, sont actuellement copiées par les pays en développement et
d’abord par la Chine, l’Inde et le Brésil avec des effets dévastateurs pour notre terre. Si
le réchauffement global franchit le seuil de deux degrés Celsius par rapport à la
température moyenne de l’aire préindustrielle, nous serons confrontés directement à
la menace d’une fonte irréversible des calottes glaciaires et par conséquent, à
l’élévation du niveau de la mer de plusieurs mètres.
Si on prend au sérieux les prévisions des climatologues, alors les dix à quinze
prochaines années seront décisives pour produire un renversement de tendance. Nous
proposons dès lors que les Verts mettent clairement la protection du climat au centre
de leur politique et orientent systématiquement tous les domaines politiques en
fonction de cet objectif. Nous voulons nous engager pour les projets suivants :
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P ri o rit é éc o n o mi e d ’ énerg i e
Beaucoup de choses ont été réalisées entre 1998 et 2005 en matière d’économies
d’énergie. Mais les énormes potentiels d’économies sont actuellement utilisés d’une
manière totalement insuffisante. Elles constituent pourtant la pierre d’angle de la
protection du climat. Celui qui économise de l’énergie, réduit également ses coûts, ce
qui n’est pas le moins important au moment où les prix du pétrole, du gaz et de
l’électricité explosent. D’un point de vue macro-économique, les économies d’énergie
ont aussi d’énormes avantages, parce qu’elles permettent de remplacer l’importation
chère de gaz ou de pétrole par l’intelligence des ingénieurs, la performance des
ouvriers et de la production industrielle. La plupart des mesures d’économie
d’énergie profite aux artisans et aux classes moyennes : de l’assainissement des
bâtiments jusqu’à la modernisation des installations de chauffage en passant par les
chauffe-eau solaire et les installations photovoltaïques. Nous plaidons dès lors pour
une campagne « les métiers ont des racines vertes ».
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K y ot o p lu s
Le protocole de Kyoto est doublement mis sous pression : d’une part par ceux qui
torpillent toute forme de protection du climat et d’autre part par ceux qui trouvent
que le mécanisme des traités est trop souple. D’une part, « Kyoto plus » doit maintenir
l’architecture du protocole et la développer, notamment en ce qui concerne la fixation
d’objectifs obligatoires de réduction des émissions. D’autre part, il doit être ouvert à
une offensive technologique ayant pour contenu l’économie d’énergie, l’efficience
énergétique et les énergies renouvelables. Pourquoi ne pas lancer un grand
programme européen pour le climat doté d’immenses moyens financiers et
comparables à la mobilisation des USA pour les voyages dans la lune ? Un
programme pour la résolution du problème climatique créé par l’homme !
3.1
La bioénergie oui, mais verte
Il y a actuellement une véritable mode des bioénergies ! Nous pensons qu’il est en
effet raisonnable qu’elles soient développées pour la production d’électricité de
chaleur ou pour les transports. Mais nous sommes aussi conscients des problèmes que
pose l’engagement à grande échelle dans la culture des plantes énergétiques. Il faut à
tout prix éviter que l’augmentation du recours aux carburants bio n’entraîne un
recours plus intensif aux pesticides, aux engrais minéraux ainsi qu’une extension de la
monoculture.
Dans les pays tropicaux, le danger existe que la culture de plantes énergétiques
n’entraîne la destruction massive de forêts primaires. C’est déjà en partie le cas, au
Brésil, en Indonésie et en Malaisie. Nous nous trompons lorsque nous disons que la
bioénergie est par définition une énergie verte. Elle ne l’est pas. Il faut développer un
certificat doté de critères écologiques pour la bioénergie qui fait l’objet d’un commerce
international, sans quoi l’automobile risque de devenir l’un des facteurs majeurs de la
destruction des forêts tropicale.
3.2
Des infrastructures vertes pour tous
Dans les deux prochaines décennies, nous pouvons lancer en Allemagne un
gigantesque programme d’investissements dans les infrastructures en réseau, dans les
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3.3
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centrales électriques, dans l’assainissement des eaux, dans les infrastructures
ferroviaires. Nous voulons saisir cette fenêtre d’opportunité pour une offensive
d’investissements écologiques.
Ecomobile
Les besoins en pétrole du secteur des transports doivent être réduits de manière
drastique. Nous devons parvenir à un transfert d’au moins 20 pc du trafic automobile
vers des modes de transport durables. Nous proposons des limitations obligatoires de
l’utilisation des flottes, l’utilisation de biocarburants issus de l’agriculture biologique
et une limitation générale de la vitesse à 130 km/h sur les autoroutes. Cela entraînera
une entrée en service de véhicules plus légers dotés de nouvelles techniques de
motorisation. De plus, la capacité d’innovation d’une des branches les plus
importantes de l’industrie sera enfin poussée dans une direction respectueuse de
l’environnement.
A part quelques exceptions tout à fait mineures, le réseau routier allemand n’a plus
besoin de nouvelles extensions. Il faut donc passer de la construction de nouvelles
routes à l’entretien et l’amélioration du réseau existant, afin de conserver la qualité du
réseau disponible. Les exemples de Londres et de Stockholm montrent que la manière
la plus efficace de provoquer un transfert modal vers le rail et le bus réside dans
l’introduction de droits d’entrée dans les villes. Nous proposons donc l’adoption d’un
cadre juridique fédéral pour l’introduction de redevances urbaines pour les voitures.
Leurs recettes doivent être affectées à l’amélioration du transport public.
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O ser p l u s d e v i e sa u v a g e
Nous plaidons pour qu’au moins 10 pc de la surface de l’Allemagne soient mis sous
statut de zone naturelle protégée et que ces différentes zones soient reliées entre elles.
Nous nous réjouissons que le lynx, le chat sauvage, le loup et l’ours brun reviennent
en Allemagne et nous plaidons pour une coexistence pacifique entre l’homme et
l’animal, ce qui implique l’existence de zones de refuge pour les animaux sauvages.
Plutôt que d’entretenir la panique quand l’ours revient, nous voulons de l’éducation
et des dédommagements quand c’est nécessaire.
Nous nous réjouissons du fait qu’au sein des Verts, on puisse discuter et se disputer
sur tout, sauf en pratique sur la politique écologique. Il y a là une sorte de fausse
confiance en soi qui dit « mais oui, sur ce point, nous sommes tous d’accord et on
nous considère comme compétents ». Une telle attitude est problématique à un double
titre. D’une part, déclamer, c’est plus ennuyeux que de discuter. On ne convainc
personne de s’intéresser à la politique. Et par ailleurs c’est aussi erroné. Il existe une
masse de questions controversées : est-ce que la croissance économique continue et la
protection du climat sont conciliables ? N’avons-nous pas plutôt besoin d’une
révolution fondamentale de notre culture et de notre mode de vie que ce que suggère
le discours lénifiant de la modernisation écologique ? Comment résolvons-nous les
conflits d’objectifs entre la bioénergie et la biodiversité, entre la protection du paysage
et l’énergie éolienne ?
Celui qui revendique d’être le parti de la protection du climat, il doit aussi en faire un
point de discussion interne. Ce n’est que comme cela que nous parviendrons à être
crédible et que nous pourrons combattre l’attitude pessimiste selon laquelle le
changement climatique est de toutes les manières inexorable. Nous plaidons de
manière déterminée pour un nouveau et radical réalisme en matière d’écologie.
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