Bimestriel N°41 Novembre Décembre 2014 Dossier : VOTRE FORMATION PAR L’ÉCHANGE DES BONNES PRATIQUES Prise en charge de l’Incontinence chez l’Homme DOSSIER ACTUALITÉ Le point sur : Le kyste pilonidal INSCRIVEZ-vous sur Infections urinaires liées au sondage vésical : Bientôt un vaccin ? Cicatrisation : Le curieux effet d’un stress psychologique aigu Plaies en oncologie : Un test simple pour prédire leurs complications Cancer et grossesse : Traitements chez la mère, quels risques pour l’Enfant ? www.santelog.com SAVOIR Surpoids et obésité de l’adulte : Prise en charge médicale de premier recours la des professionnels de santé la communauté communauté des professionnels de santé Édito Abonnement : Rubrique Espace abonnement sur www.santelog.com Tarif d’abonnement : Version électronique : 1 an - 7 numéros 29 € TTC Date de publication : 28 novembre 2014 Daté : Novembre-décembre 2014 Editeur : AlliedhealtH SAS Conseiller scientifique : Dr Martine Soudani, Médecin Gériatre, médecin coordonnateur du Centre d’action sociale de la ville de Paris, Membre du réseau Mémoire Aloïs. Coordination de la rédaction : Pierre Pérochon, Diététicien-nutritionniste, membre de l’AFDET (Association Française pour le Développement de l’Education Thérapeutique), de l’AFDN (Association Française des Diététiciens-Nutritionnistes), du CEDE (Club Européen des Diététiciens de l’Enfance), de la SFA (Société Française d’Alcoologie), du CLAN (Comité Liaison Alimentation Nutrition) du CHRU de Tours, du Conseil de Pôle Alcoologie et de la CSIRMT (Commission des Soins Infirmiers, de Rééducation et Médico-Techniques) du Centre Hospitalier Louis Sevestre. Pr Marysette Folliguet, Chef de Service d’Odontologie Hôpital Louis Mourier-Colombes Michel Jacquet, médecin directeur Santé service Limousin (HAD et SID) Claudette Dieuleveut, Diététicienne-nutritionniste formatrice PNNS petite enfance et personnes âgées Catherine Mayeur, Infirmière en Santé au Travail, Trésorière du Groupement Infirmiers du Travail pour la région Bretagne, Formatrice Sauveteur Secouriste du Travail Louisette Moreau, diététicienne-nutritionniste au CHRU de Tours, D.U. Initiation à la réflexion éthique dans la pratique soignante Sylvia Pierrot, infirmière en EHPAD Nathalie Masseboeuf, Diététicienne, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière Paris Roselyne Vasseur, Directrice des soins, Hôpital Necker, Paris Pascaline Noisette, Infirmière, Présidente de la Société des Infirmières en Pathologie Vasculaire (SIPV) Frédérique Debbiche, cadre infirmier, chargée de cours Filière soins infirmiers Haute école de santé - Genève Claude Neuveu, Cadre de santé, Président de l’Association ARESSAD (Association des responsables de services de soins infirmiers à domicile), Directeur de SSIAD Blandine Autrand, Cadre de santé en Maison de retraite Nicole Hubert, Infirmière, Cadre Transverse, membre du Conseil d’administration et référente Dom Tom de l’Association Française des Infirmier(es) de Cancérologie (AFIC) Brigitte Le Guyader, Infirmière Libérale - Meylan (38) D.U. Plaies et Cicatrisations Marie Bombail, Chargée de Mission à l’Association Française des Infirmier(e )s de Cancérologie (AFIC) Conseiller des rédactions : Vincent Chagué Actualités : P. B. et équipe rédaction Dossiers : Incontinence : Dr Lamia Fournis, gériatre, Consultation d’Urodynamique à l’hôpital Corentin Celton (APHP) avec la collaboration du Dr Vincent Cardot, Chirurgien Urologue, Ancien Chef de Clinique des Hôpitaux de Paris, Praticien Attaché à la Pitié Salpêtrière, Clinique de l’Alma (Paris) et Pôle de Santé du Plateau (Meudon-La-Forêt). Kyste pilonidal : « Le point sur » : Dr François, Secrétaire général de la SNFCP- Service de proctologie, hôpital Bagatelle, 33400 Talence. « Prise en charge clinique » : Drs Valentina La Torre et Matrella Fulvio, chirurgie viscérale APHP (Port-Royal). Remerciements au Dr Sonia Gaucher, MCU-PH Chirurgien Plasticien, Service de Chirurgie Générale, Plastique et Ambulatoire (SCGPA), Hôpitaux Universitaires Paris Centre, Port-Royal). Savoir : Nous remercions la Haute Autorité de Santé (HAS) de nous avoir autorisés à reproduire cette 2 sujets rarement abordés dans ce numéro… L’incontinence : un homme sur 10 est concerné à 60 ans, 3 sur 10 après 90 ans. Si de nombreuses études portent sur l’incontinence et ses facteurs, dont l’âge, on oublie parfois les hommes qui, avec les problèmes de prostate (hyperplasie, adénome, cancer) sont aussi atteints de ce trouble et touchés dans leur estime de soi, leur intimité et leur sexualité. Le Dr Lamia Fournis, Praticien Hospitalier Gériatre, Hôpital Antoine Béclère, qui reçoit ces patients en consultation d’urologie, nous propose un état des lieux, des principales causes et formes d’incontinence chez l’homme, leurs traitements, sans oublier les dispositifs de protection aujourd’hui bien adaptés à l’anatomie masculine. Ce dossier est accompagné par la mise en ligne, sur le site www.santelog.com d’un podcast vidéo, soutenu par TENA, qui décrypte pour les soignants de proximité la prise en charge de ces troubles de la continence et présente les meilleurs traitements. Le kyste pilonidal, rarement abordé, fait l’objet d’un second dossier. Cette anomalie pourtant fréquente, douloureuse et à la cicatrisation souvent difficile, nécessite une prise en charge souvent chirurgicale puis des soins post-opératoires de pansement efficaces. Pour rendre cette convalescence la moins lourde possible, la chirurgie doit être complète mais non agressive, et les soins doivent être simples mais adaptés. Le Dr François Pigot, Service de proctologie, hôpital Bagatelle (Talence) et Secrétaire général de la Société Nationale Française de Colo-Proctologie (SNFCP) nous rappelle les modes de prise en charge de cette pathologie, les Drs Valentina La Torre et Matrella Fulvio, chirurgie viscérale AP-HP (PortRoyal), partagent leur expertise sur sa chirurgie et sa cicatrisation. Bonne lecture, P.B. Votre revue est accessible sous format électronique sur www.santelog.com Sous un format pdf identique à la revue papier, feuilletable, téléchargeable, imprimable, accessible gratuitement à partir de vos codes d’accès au site par vos collègues ou vos équipes, plus écologique ! Cette nouvelle version électronique répond à la fois aux demandes des abonnés, au mode de consultation plus fréquent par Internet, à un mode d’édition plus « écologique », à un accès plus large et moins coûteux à l’information professionnelle santé. Synthèse des recommandations professionnelles : « Surpoids et obésité de l’adulte : prise en charge médicale de premier recours » - Septembre 2011. Ces recommandations et l’argumentaire scientifique sont consultables dans leur intégralité sur www.has-sante.fr © Haute Autorité de Santé. Conseil éditorial, PAO : Thomas Patin [email protected] - 06 80 58 36 58 Publicité Web et revues, opérations spéciales, partenariats : [email protected] Abonnements : Santé Log - Service abonnements BP 1 - 59361 Avesnes-sur-Helpe cedex [email protected] - 03 27 56 38 57 Conseiller abonnements : Xavier Granata, Propublic Service clients : Martine Delattre Web : santelog.com est certifié selon Conseil stratégique web : Benjamin Bühler Développement web : François Pierron, Kauriweb, 05 63 62 87 15 Coordination éditoriale web et blog : Pierre Pérochon Administration, comptabilité : Didier Merle, Cabinet @bp, Vitrolles Stratégie : Stratégie générale : Daniel Zumino (associé fondateur) Stratégie financière et régie : Emmanuel Russel (associé) Associés : Dr Pierre-Emmanuel Aubert, Philippe Col, Pierre Créau, Arnaud Delattre, Guy-Charles Fanneau de la Horie, Bernard Farkas, Hervé Gicquel, Jérôme Perrod, Chris Spencer, Laurent Wiernik Imprimé par Bernard D’HONT Impressions 66, rue Jean-Baptiste Lebas – 59910 Bondues Commission paritaire : 0318 T 89 268 ISSN : 1961-3407 Dépôt légal : novembre 2008 Directrice de publication et partenariats : Pascale Bernanose [email protected] AlliedhealtH - 45, Bd G. Clémenceau 13300 Salon-deProvence © AlliedhealtH SAS Tous droits réservés. santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 3 Sommaire SAD n°41 - Nov / Déc 2014 Actualités ........................................................................................................7 •Infections urinaires liées au sondage vésical: Bientôt un vaccin ? •Cicatrisation : Le curieux effet d’un stress psychologique aigu •Plaies en oncologie : Un test simple pour prédire leurs complications •Cancer et grossesse : Traitements chez la mère, quels risques pour l’Enfant ? Bimestriel N°41 Novembre Décembre 2014 Dossier : VOTRE FORMATION PAR L’ÉCHANGE DES BONNES PRATIQUES Prise en charge de l’Incontinence chez l’Homme Dossier : Prise en charge de l’Incontinence urinaire chez l’Homme .....................13 Physiopathologie de l’Incontinence urinaire masculine .................................................................14 Les différentes formes d’IUM ............................................................................................................14 •L’incontinence par impériosité ou urgenturie •Incontinence à l’effort ou insuffisance sphinctérienne •Incontinence par regorgement DOSSIER ACTUALITÉ Le point sur : Le kyste pilonidal INSCRIVEZ-vous sur Infections urinaires liées au sondage vésical : Bientôt un vaccin ? Cicatrisation : Le curieux effet d’un stress psychologique aigu Plaies en oncologie : Un test simple pour prédire leurs complications Cancer et grossesse : Traitements chez la mère, quels risques pour l’Enfant ? www.santelog.com Surpoids et obésité de l’adulte : Prise en charge médicale de premier recours la des professionnels de santé la communauté communauté des professionnels de santé Le diagnostic d’une IUM......................................................................................................................15 •L’interrogatoire •L’examen clinique •Un dosage biologique du PSA et de la fonction rénale Les traitements de l’IUM ....................................................................................................................16 •Incontinence par insuffisance sphinctérienne •Incontinence par regorgement •Incontinence liée à une urgenturie Le suivi fonctionnel, post-traitement ...............................................................................................21 Les autres mesures thérapeutiques .................................................................................................22 •Les protections absorbantes •Les thérapies naturelles Et la sexualité ? ....................................................................................................................................24 Dossier : Le point sur le kyste pilonidal ...............................................31 Qu’est-ce qu’un kyste pilonidal ? .......................................................................................................32 •Pourquoi en parle-t-on ? •Qui cela concerne-t-il ? Conduites à tenir .................................................................................................................................33 •Que faire devant des fossettes asymptomatiques ? •Que faire devant un kyste infecté ? •Pourquoi enlève-t-on rarement un kyste infecté en urgence ? •Que faire devant un orifice cutané qui coule de façon chronique ? Comment opère-t-on un kyste pilonidal ? ........................................................................................34 •À quoi sont dus les échecs de cette chirurgie ? Quels soins postopératoires sont conseillés ? .................................................................................35 •Les différents temps de la cicatrisation •La douleur, l’immobilisation En cas d’échec du traitement .............................................................................................................36 Le processus de cicatrisation dirigée................................................................................................38 •La première phase dite de détersion ou fibrineuse exsudative •La seconde phase dite de bourgeonnement •La troisième phase d’épithélisation Savoir ............................................................................................................ 40 •Surpoids et obésité de l’adulte : Prise en charge médicale de premier recours santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 SAVOIR 5 Actualités Infections urinaires liées au sondage vésical : Bientôt un vaccin ? Ce vaccin expérimental pourrait permettre de réduire considérablement l’incidence des infections urinaires, un type d’infections parmi les plus fréquents à l’hôpital comme en soins à domicile. Plus largement ces travaux, présentés dans la revue Science Translational Medicine, décryptent le processus de développement de l’infection et identifient une protéine cible, responsable de la formation du biofilm. Les infections urinaires sont les infections nosocomiales les plus fréquentes représentant 30 à 36% des infections nosocomiales, hors colonisations asymptomatiques. Elles interviennent dans de nombreuses spécialités, en chirurgie ou en rééducation de l’adulte ou de la personne âgée. L’infection urinaire associée au sondage vésical à demeure est la plus fréquente des infections associées aux soins (IAS) en établissement de santé. Son risque est lié à la méthode et à la durée du sondage, au type de sonde et au terrain patient. Ce même risque est encore accru dans les soins à domicile (SAD). Ainsi, les auteurs précisent que presque chaque patient ayant une sonde vésicale à demeure durant plus de 30 jours va souffrir d’une infection des voies urinaires, avec des symptômes de type miction douloureuse et lésions de la vessie, pouvant aller jusqu’à la septicémie. Ce vaccin expérimental, développé par des chercheurs de la Washington University (St Louis) pourrait donc répondre à un vrai besoin et contribuer aussi à réduire l’émergence des bactéries résistantes aux antibiotiques, précise l’auteur principal, le Dr Ana Lidia Flores-Mireles, chercheur à l’École de médecine. Son équipe a développé un vaccin qui bloque la protéine EBPA, (En blanc sur visuel ci-contre) et stoppe l’infection. Quel processus ? L’insertion de la sonde dans la vessie entraine une réponse inflammatoire qui entraîne la formation d’une couche de fibrinogène, une protéine du plasma sanguin, autour du cathéter. Cette couche protège les bactéries des antibiotiques et permet le développement de l’infection : Précisément, les bactéries utilisent de longs « pili » pour s’ancrer sur le fibrinogène, commencent à former des biofilms, qui protègent les bactéries des antibiotiques et des cellules du système immunitaire, empêchent leur évacuation par l’écoulement de l’urine et préparent la muqueuse de la vessie au développement de l’infection. Un vaccin expérimental efficace chez la souris : Les chercheurs montrent ici, sur la souris, par l’implantation chirurgicale d’un petit segment de cathéter dans la vessie par l’urètre, sa vulnérabilité accrue, de manière similaire, à l’infection. Puis, en utilisant Enterococcus faecalis, une bactérie fréquemment associée aux infections des voies urinaires, les chercheurs identifient une protéine EBPA, présente à l’extrémité des pili, qui favorise la formation des biofilms. En empêchant les bactéries de produire EBPA, les chercheurs bloquent le développement de l’infection. Enfin, lorsqu’ils injectent à la souris un vaccin expérimental à base de cette protéine, les chercheurs montrent que le vaccin permet une réponse du système immunitaire capable de bloquer EBPA et donc le processus infectieux. En identifiant cette protéine essentielle au développement de l’infection, les chercheurs marquent ainsi une étape importante dans le développement possible d’un vaccin ou d’un médicament permettant de prévenir l’infection urinaire liée au sondage vésical. Source : Science Translational Medicine Sept. 17, 2014 DOI: 10.1126/scitranslmed.3009384 EbpA vaccine antibodies block binding of Enterococcus faecalis to fibrinogen to prevent catheter-associated baldder infection in mice (Visuel@ John Heuser) santé log - Soin à Domicile n°41 - Novembre Déc 2014 7 Dossier Prise en charge de l’Incontinence urinaire masculine L ’incontinence urinaire reste encore taboue. Pourtant, elle concerne entre 3 et 5 millions de personnes en France, femmes et hommes confondus. Moins fréquente que l’incontinence urinaire féminine, l’incontinence urinaire masculine (IUM) survient chez 3 à 5 % des quadragénaires et augmente ensuite avec l’âge pour toucher 10 % des hommes de 60 ans et 30 % des hommes de 90 ans et plus. Certains hommes seront touchés beaucoup plus tôt. Ainsi, l’incontinence urinaire d’effort est fréquente après prostatectomie radicale et l’hyperplasie prostatique est la cause la plus fréquente de l’urgenturie chez l’homme. Quel que soit l’âge ou le type d’incontinence, les répercussions psychologiques et sociales sont toujours importantes et à prendre en compte. On a tendance à croire que l’incontinence urinaire est une maladie uniquement féminine, c’est pourquoi les hommes hésitent à consulter. Pourtant des traitements existent ainsi que des palliatifs aujourd’hui adaptés à l’anatomie masculine. Le port de protections est parfois nécessaire et leur nombre est alors un élément d’évaluation de l’importance des fuites. Auteur et remerciements L.F. et P.B. Lamia Fournis, gériatre, Consultation d’Urodynamique à l’hôpital Corentin Celton (APHP), avec la collaboration du Dr Vincent Cardot, Chirurgien Urologue, Ancien Chef de Clinique des Hôpitaux de Paris, Praticien Attaché à la Pitié Salpêtrière, Clinique de l’Alma (Paris) et Pôle de Santé du Plateau (Meudon-La-Forêt). Sommaire Physiopathologie de l’Incontinence urinaire masculine ... 14 Les différentes formes d’IUM ....................................... 14 • L’incontinence par impériosité ou urgenturie • Incontinence à l’effort ou insuffisance sphinctérienne • Incontinence par regorgement Le diagnostic d’une IUM ................................................ 15 • L’interrogatoire • L’examen clinique • Un dosage biologique du PSA et de la fonction rénale Les traitements de l’IUM .............................................. 16 • Incontinence par insuffisance sphinctérienne • Incontinence par regorgement • Incontinence liée à une urgenturie Le suivi fonctionnel, post-traitement .......................... 21 Les autres mesures thérapeutiques ........................... 22 • Les protections absorbantes • Les thérapies naturelles Et la sexualité ?............................................................... 24 Avec le soutien de TENA www.tena.fr santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 13 Dossier WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4101 Physiopathologie de l’IUM L’urine est produite par les reins. Elle passe par les uretères, puis s’accumule dans la vessie. Cette urine est ensuite évacuée par un conduit l’urètre qui est plus long chez l’homme pour s’évacuer grâce au méat urinaire. Chez les hommes, la prostate entoure l’urètre. A la sortie de la vessie, il y a un dispositif musculaire lisse qu’on appelle le sphincter vésical. Ce sphincter vésical agit comme un fermoir. Son bon fonctionnement est facilité par le tonus des muscles pelviens. Mais l’ouverture ou la fermeture de ce sphincter est conditionnée par le système nerveux autonome (parasympathique pour la vidange de la vessie et sympathique pour la continence ou « verrouillage du sphincter lisse»). Le sphincter strié est la commande volontaire conditionnée par le système nerveux central. La miction est possible lorsque la pression de la vessie dépasse celle du sphincter lisse. La prostate est une glande de la taille d’une châtaigne située à la sortie de la vessie entourant l’urètre, canal par lequel évacue l’urine. La prostate fabrique un liquide stocké dans les vésicules séminales indispensable à la formation du sperme qui permet de nourrir les spermatozoïdes et de les acheminer vers le gland lors de l’éjaculation par contraction de la prostate. Les fuites urinaires sont caractérisées par la perte involontaire d’urine par le méat urinaire. Elles surviennent, • soit à l’effort, • soit par une envie très urgente (urgenturie), • soit par écoulement incessant sans sensation de besoin autrement dit par regorgement. Rein Uretère Vessie Urètre visuel@NIH- Copyright 1997-2014 A.D.A.M., Inc. NB : Ne doivent pas être considérées comme une fuite urinaire, les gouttes retardataires présentes à la fin de la miction liée à l’évacuation plus tardive de l’urètre. Les différentes formes d’incontinence urinaire chez l’Homme L’incontinence par impériosité ou urgenturie Cette forme entraine des fuites par dysfonctionnement de la vessie, dont les muscles se contractent anormalement et même lorsque celle-ci n’est pas pleine. Les envies d’uriner sont très fréquentes, de jour comme de nuit, et ne laissent pas le temps d’arriver aux toilettes. Ce type d’incontinence urinaire est souvent lié à : • une hyperplasie de prostate (cause la plus fréquente), une cystite, • un calcul vésical, • une tumeur de la vessie, • une vessie neurologique(accidents vasculaires cérébraux, maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson, diabète…). Sur le plan urodynamique, cela se traduit par une hyperactivité vésicale par contraction non inhibée du detrusor (muscle de la vessie). L’incontinence à l’effort ou insuffisance sphinctérienne Cette forme d’incontinence fait suite à des traitements du cancer de la prostate qui, dans certains cas, peuvent endommager les tissus musculaires du sphincter urinaire et entrainer des difficultés à «verrouiller » la vessie. Les fuites peuvent être observées à la suite d’éternuements, de rires ou de quintes de toux, survenant par jet et sans envie d’uriner, se produisant toujours au cours de la journée, jamais durant la nuit. L’incidence réelle de l’incontinence post-prostatectomie reste mal définie car dépendante des critères utilisés et de la période de suivi prise en compte. Elle est donc estimée entre 5 et 20%. L’incontinence par regorgement ou liée à une rétention chronique d’urines. En cas de syndrome obstructif par hyperplasie de la prostate En cas de défaut de contractilité vésicale d’origine neurologique Les fuites se produisent au goutte à goutte, sans besoin ni envie d’uriner. Les hommes qui en souffrent vident mal leur vessie et ressentent le besoin de pousser pour uriner. Généralement, cette forme d’incontinence est liée à une augmentation trop importante du volume de la prostate, qui va obstruer l’urètre et provoquer un syndrome obstructif. Cette affection peut être liée à certaines maladies neurologiques comme la maladie de Parkinson ou des atteintes de la moelle épinière. 14 Soin à Domicile n°41 – Novembre Décembre 2014 - santé log WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4102 Les principales causes d’IUM Certaines maladies peuvent occasionner une incontinence urinaire, telles que : L’adénome prostatique : On parle d’adénome de la prostate quand la partie centrale de la glande prostatique gonfle, il s’agit d’une hyperplasie et non d’un cancer. La prostate devient volumineuse et comprime l’urètre qui la traverse, d’où des troubles urinaires dont se plaignent les hommes : Il s’agit surtout d’envies d’uriner fréquentes, de jour comme de nuit, d’une faiblesse du jet, d’une sensation de mauvaise vidange vésicale ou carrément d’une impossibilité d’uriner. Le diagnostic est conditionné par les signes cliniques cités plus haut, mais doit être confirmé par d’autres examens : Le toucher rectal permettant de palper la glande pour en évaluer sa taille et sa consistance et apporter ainsi un premier diagnostic rapide, l’échographie endorectale qui permet d’obtenir l’image de la prostate, sa taille et son poids et l’uroscanner. La prostate grossit avec l’âge et dans certaines circonstances : Il existe ainsi une relation entre le tour de taille et la taille de la prostate. Plus on est gros, plus la prostate est grosse. Le syndrome métabolique ou l’association d’une hypertension, d’un pré-diabète, d’une hypercholestérolémie est également fréquemment associé aux troubles urinaires en raison d’une dérégulation biologique. Chez les patients à syndrome métabolique, la prostate se met à grossir. L’insuline est également un facteur de croissance de la prostate. Enfin la relation entre le périmètre ombilical et la taille de la prostate a été documentée. Les autres causes évoquées sont l’âge et certains facteurs génétiques. Le cancer de la prostate La prise en charge de l’incontinence urinaire après traitement d’un cancer de la prostate notamment par prostatectomie repose en tout premier lieu par une information et une rééducation périnéale. Cette éducation du patient devrait même intervenir avant l’intervention chirurgicale afin de faire prendre conscience au patient de la nécessité de pouvoir contrôler ses mictions. Si on ne développera pas ici les différents modes et étapes du dépistage d’un cancer de la prostate (toucher rectal, dosage de PSA, techniques d’imagerie), on soulignera son importance dans la réduction de l’incidence des cancers de prostate avancés et métastatiques estimée à 30 à 50% de cancers avancés, ainsi que dans la diminution des taux de mortalité. • Le diabète • Les maladies neurologiques telles que, les accidents vasculaires cérébraux, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson. Le diagnostic d’une IUM L’interrogatoire Il sera axé sur les antécédents, les pathologies associées, les interventions chirurgicales, les traumatismes sur le bassin, les traitements médicamenteux, les circonstances de survenue des fuites, l’importance de ces fuites. Visuel@Fotolia L’examen clinique Il consiste à réaliser la palpation des fosses lombaires, le toucher rectal, la palpation abdominale à la recherche d’un globe vésical ou d’un fécalome. Il est réalisé par un médecin. Un dosage biologique du PSA et de la fonction rénale viennent compléter le bilan. Des examens complémentaires sont parfois nécessaires pour rechercher des facteurs irritatifs (tumeur de la vessie, corps étranger, calculs intra-vésicaux) par cystoscopie et cytologie urinaire, pour rechercher un obstacle (endoscopie urétro-prostatique ou uroscanner), pour identifier le tonus du sphincter (profilométrie urétrale lors d’un bilan urodynamique) ou pour mettre en évidence une hyperactivité vésicale (cystomanométrie lors d’un bilan urodynamique). Les questionnaires « Qualité de vie » qui peuvent être utiles • L’International Prostate Score Symptom (IPSS) : les questions relatives à la dysurie sont issues du questionnaire de l’IPSS destiné à évaluer les troubles mictionnels de l’hypertrophie bénigne de la prostate. La traduction de ce questionnaire d’origine anglo-saxonne est validée en français. Le questionnaire se compose de 7 items côtés de 0 à 5 et génère des scores allant de 0 à 35, 0 traduisant une gêne mictionnelle faible ou nulle et 35 une gêne maximale. • L’International Continence Society (ICS male) est l’outil fréquemment utilisé en France pour assurer l’évaluation de l’incontinence. Généralement les questions concernent les fuites à l’effort, spontanées, nocturnes, et l’impact sur l’habillement et le port de protections. Les questions sont cotées de 0 à 4 avec pour chacune une question associée sur la préoccupation ou la gêne secondaire, cotée elle aussi de 0 à 4. L’évaluation est complétée par une question plus précise sur le nombre de protections portées par jour. santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 15 Dossier WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4103 Les traitements de l’IUM Le choix du ou des traitements dépend essentiellement de la cause, du type et de la sévérité de l’incontinence. Incontinence par insuffisance sphinctérienne : Le traitement dépend ici essentiellement de la cause et de l’importance de l’incontinence. La rééducation représente le premier traitement visant à renforcer les muscles du plancher pelvien par des contractions répétées du périnée à l’aide d’un kinésithérapeute avec apprentissage d’exercices à poursuivre à domicile. Au minimum 15 séances sont nécessaires avec poursuite des séances au-delà de 15 après une nouvelle évaluation qui est parfois nécessaire. Les traitements médicaux sont d’efficacité limitée mais souvent « tentés » pour améliorer les symptômes avec des traitements anticholinergiques qui « calment » la vessie. Les traitements chirurgicaux : Les bandelettes sous-urétrales peuvent être intéressantes dans l’arsenal thérapeutique tout en contraignant à une incision du périnée nécessaire pour fixer la bandelette. La bandelette sous-urétrale trans-obturatrice va procurer un soutien anatomique au col vésical lors des efforts. Elle est le plus souvent indiquée dans les cas d’incontinence dite légère à modérée, c’est-à-dire avec des fuites ne dépassant pas 500 grammes par jour. La bandelette est posée par voie périnéale et ses bras sont passés dans les trous obturateurs des os du bassin. Elle est fixée à l’urètre pour permettre sa remontée lors de la mise en tension. 70 % des patients présentent une guérison ou une amélioration, mesurée par le port, en moyenne d’une protection par jour. • • • • • Bandelette sous-urétrale, les complications sont rares Érosion urétrale Rétention aigue d’urines, dysurie Retard local de cicatrisation Douleur périnéale possible Infections de la bandelette (rare). Les avantages sont que c’est un geste mini invasif, les mictions « physiologiques » sont préservées avec une efficacité dans les formes légères à modérée. Les inconvénients peuvent se traduire par des douleurs périnéales, une aggravation de l’incontinence (exceptionnelle), une dégradation des résultats fonctionnels au fil du temps. La bandelette sous urétrale est contre-indiquée en cas de radiothérapie. La bandelette sous-urétrale est le plus souvent indiquée dans les cas d’incontinence dite légère à modérée (Visuel@AFU) Le geste se fait au cours d’une hospitalisation courte (2 à 3 jours), au bloc opératoire sous anesthésie générale ou rachi-anesthésie en position gynécologique. La durée est de 45 minutes avec mise en place d’une sonde urinaire. Les suites opératoires sont le retrait de la sonde le lendemain de l’opération avec sortie après reprise des mictions, le lendemain ou le surlendemain de l’opération, un arrêt de travail d’1 mois et le conseil d’éviter le port de charges lourdes pendant 1 mois. 16 Soin à Domicile n°41 – Novembre Décembre 2014 - santé log Les ballons ACT sous la vessie (« Adjustable Continence Therapy ») autour de l’urètre pour le comprimer ont été proposés, adaptables en consultation puisque l’on peut gonfler ou dégonfler le ballon en cas de besoin. Il s’agit de 2 ballons en silicone remplis d’eau stérile et de produit de contraste placés par voie périnéale de part et d’autre de l’urètre au niveau du col vésical. Ils sont reliés à 2 chambres de ponction placées dans la peau, sous le scrotum. L’ajustement du volume des ballonnets se fait par simple ponction à l’aiguille des chambres de ponctions, si nécessaire, quelques semaines après la chirurgie (en moyenne 3 ou 4 ajustements). Le geste se fait en hospitalisation courte (2 jours) ou ambulatoire au bloc opératoire sous anesthésie générale ou rachianesthésie en position gynécologique, en une durée de 30 minutes (Visuel@AFU) La sonde urinaire est enlevée en fin d’intervention. Les suites opératoires sont en général simple avec sortie le jour même où le lendemain de l’opération après ablation de la sonde et reprise des mictions. Un arrêt de travail d’un mois est proposé avec une visite de contrôle et un premier gonflage si nécessaire à 6 semaines en consultation. Les résultats montrent que 30 à 35% de patients sont entièrement continents (0 protection) à 1 an, 70 % d’amélioration (0 à 1 protection par jour), résultats stables à 2 ans. • • • • • Des complications rares mais en général simples à traiter Le sphincter artificiel. Cette prothèse est un manchon en silicone implanté autour de l’urètre. Elle est actionnée par une petite pompe placée sous la peau des bourses. La continence est restaurée dans plus de 95 % des cas mais des révisions peuvent être nécessaires. Le geste est réalisé en hospitalisation courte (48h en moyenne), au bloc opératoire sous anesthésie générale ou rachianesthésie, durée d’1h avec pose de sonde urinaire en fin d’intervention. Les suites opératoires sont l’ablation de la sonde le lendemain de l’intervention et départ à la reprise des mictions. Le sphincter artificiel est indiqué en cas d’incontinence grave ou rebelle aux différents traitements (Visuel@AFU) Les soins locaux sont effectués par l’infirmière à domicile. Un arrêt de travail de 15 jours est préconisé. 75 à 90 % des patients retrouvent leur continence durablement, 85 à 90 % se déclarent satisfaits. Ce traitement est efficace et durable, le changement de matériel est techniquement simple et possible quels que soient les antécédents et l’importance des fuites. Ses inconvénients sont son coût, et…un minimum de dextérité. Perforation vésicale per opératoire Rupture de ballonnets Rétention aigue d’urine Migration secondaire des ballonnets Infections. Les avantages de cette technique est que le geste est simple, peu invasif, les ballonnets sont ajustables en fonction de la persistance des symptômes (gonflages itératifs en consultation). Les enlever est facile en consultation, en cas de complication ou d’échec. Cela ne compromet pas la pose éventuelle de bandelette sous urétrale ou d’un sphincter. L’inconvénient est que l’efficacité de la technique reste inconstante. santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 17 Fiche N° 10 : L’Incontinence Urinaire Masculine en bref L’incontinence masculine survient chez 3 à 5 % des quadragénaires et augmente ensuite avec l’âge pour concerner 10 % des hommes de 60 ans et 30 % après 90 ans. L’urine est produite par les reins, passe par les uretères, s’accumule dans la vessie évacuée par l’urètre plus long chez l’homme pour s’évacuer grâce au méat urinaire. Le sphincter de l’homme est formé d’une musculature lisse à commande sympathique situé dans la région du col vésical, et d’une musculature striée à commande volontaire situé autour de l’urètre membraneux appelé sphincter urétral distal. Il assure un tonus permanent, il se renforce lors du remplissage vésical et s’ouvre lors de la miction. Il peut être contracté à la commande volontaire conditionnée par le système nerveux central. Chez les hommes, la prostate entoure l’urètre. Les fuites urinaires sont caractérisées par la perte involontaire d’urine par le méat urinaire. Formes et causes d’incontinence urinaire chez l’homme : Incontinence par impériosité ou Urgenturie : – Par dysfonctionnement de la vessie (le detrusor se contracte anormalement), – Envies d’uriner très fréquentes, survenant jour et nuit, ne laissant pas le temps d’arriver aux toilettes. Ce type d’incontinence urinaire est souvent lié à : • une hyperplasie de la prostate (cause la plus fréquente), • un calcul vésical, • une lithiase vésicale, • une tumeur vésicale, • une vessie neurologique (diabète, maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer…). Incontinence à l’effort ou insuffisance sphinctérienne : Les fuites surviennent à la suite d’éternuements, rires, quintes de toux, par jet, toujours au cours de la journée, jamais durant la nuit. – Suite à des traitements de la prostate qui peuvent endommager les tissus musculaires du sphincter urinaire, entrainant des difficultés pour «verrouiller» la vessie : • une faiblesse constitutive du sphincter ou lésion opératoire sont deux causes possibles de fuites à l’effort au décours d’une adénomectomie. • la radiothérapie entraîne des phénomènes irritatifs vésicaux, une perte de compliance, une perte d’élasticité des tissus. – Suite à des complications prostatectomie totale pour cancer de la prostate : • car une partie du col vésical peut est retiré avec la pièce opératoire, • car le sphincter distal peut être lésé par une section basse de l’urètre ou lors de la dissection, • par affaiblissement des ligaments de soutien du sphincter, • car la commande neurologique est affaiblie en cas de section des bandelettes vasculonerveuses. Incontinence par regorgement liée à une rétention chronique d’urines : – Syndrome obstructif par hyperplasie de la prostate : • Les fuites se produisent au goutte à goutte, sans besoin ni envie d’uriner, avec mauvaise vidange vésicale et besoin de pousser pour uriner, • La rétention urinaire par augmentation trop importante du volume de la prostate obstrue l’urètre et provoque un syndrome obstructif. – Trouble de la commande neurologique qui peut être lié à certaines maladies neurologiques comme la maladie de Parkinson ou des atteintes de la moelle épinière. Diagnostic : – L’interrogatoire sera axé sur les antécédents, les pathologies associées, les interventions chirurgicales ou traumatismes sur le bassin, les traitements médicamenteux, les circonstances de survenue et l’importance de ces fuites. – Des questionnaires « Qualité de vie » peuvent être utiles (International Prostate Score Symptom- IPSS et International Continence Society- ICS male). – L’examen clinique : palpation des fosses lombaires, toucher rectal, recherche de globe vésical ou fécalome. – Un outil indispensable, le calendrier mictionnel : recueil sur 24 à 78 heures (horaire des mictions, volume uriné, fuites, mictions par besoin ou par précaution, boissons ingérées). – Les examens complémentaires : • Dosage biologique du PSA et de la fonction rénale, • Cystoscopie, • Cytologie urinaire, • Endoscopie urétro-prostatique, • Uroscanner, • BUD : profilométrie urétrale (tonus du sphincter), cystomanométrie (hyperactivité vésicale) Traitement : Incontinence par insuffisance sphinctérienne : • La rééducation périnéale • Les bandelettes sous urétrales • Des ballons ACT sous la vessie autour de l’urètre • Le sphincter artificiel Incontinence par regorgement c’est-à-dire par rétention urinaire chronique : • Le traitement de l’adénome prostatique : phytothérapie, alpha-bloquants, inhibiteurs de la 5-alpha réductase, en cas d’échec l’adénomectomie • La section de sténoses urétrales • Des auto-sondages en cas de vessie neurologique Incontinence liée à une urgenturie (mictions impérieuses) : • • • • Le traitement médical symptomatique par les anticholinergiques, Le traitement de la cause, La neuro-modulation sacrée ou du nerf sciatique poplitée interne, Les injections de toxine botulique A. Protocole fourni par Lamia Fournis, Praticien Hospitalier Gériatre Consultation d’Urodynamique Hôpital Corentin Celton (APHP) Dossier Visuel@FP Le point sur le kyste pilonidal L e kyste pilonidal est une anomalie très fréquente, sa surinfection touche l’adulte jeune. Les deux caractères notables de cette affection sont premièrement le caractère parfois très douloureux de la phase abcédée, et ensuite la durée des soins entrainés par le traitement chirurgical d’exérèse. D’où la mauvaise « réputation » de cette pathologie. Or une prise en charge adaptée à toutes les phases de la maladie et les progrès dans les soins de plaie rendent cette maladie plus facile à traiter et surtout plus facile à vivre par les malades. Auteur et remerciements F.P. Dr François Pigot, Service de proctologie, hôpital Bagatelle, 33400 Talence. Dr Valentina La Torre, Chirurgien et proctologue, praticien attaché au Service pluridisciplinaire de Chirurgie Ambulatoire, Hôpital Cochin/Port-Royal (Paris). Dr Fulvio Matrella, Chirurgien, Chef de Clinique - Service pluridisciplinaire de Chirurgie Ambulatoire, Hôpital Cochin/Port-Royal (Paris). La Société Nationale Française de Colo-Proctologie regroupe des chirurgiens et des gastroentérologues s’intéressant aux pathologies de l’anus et du rectum. Elle offre aux malades et aux médecins des informations scientifiques et techniques, un diplôme de formation, et organise un congrès annuel. www.snfcp.org Sommaire Qu’est-ce qu’un kyste pilonidal ?.................................. 32 •Pourquoi en parle-t-on ? •Qui cela concerne-t-il ? Conduites à tenir ............................................................ 33 •Que faire devant des fossettes asymptomatiques ? •Que faire devant un kyste infecté ? •Pourquoi enlève-t-on rarement un kyste infecté en urgence ? •Que faire devant un orifice cutané qui coule de façon chronique ? Comment opère-t-on un kyste pilonidal ? ................... 34 •À quoi sont dus les échecs de cette chirurgie ? Quels soins postopératoires sont conseillés ? ............ 35 •Les différents temps de la cicatrisation •La douleur, l’immobilisation En cas d’échec du traitement ........................................ 36 Le processus de cicatrisation dirigée........................... 38 •La première phase dite de détersion ou fibrineuse exsudative •La seconde phase dite de bourgeonnement •La troisième phase d’épithélisation MOT kyste pilonidal, kyste sacro-coccygien, kyste sacrococcygien santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 31 Dossier WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4107 Qu’est-ce qu’un kyste pilonidal ? Le kyste pilonidal (ou kyste sacro-coccygien) est une formation kystique située au niveau du sillon inter-fessier. Son mode de formation est discuté : •soit kyste acquis formé par un poil qui pousse « en dedans », ou un poil cassé qui s’enfonce dans la peau, •soit kyste congénital qui se manifeste à la puberté du fait de la croissance de poils en son sein. Ce ou ces kystes, car ils sont souvent multiples chez une même personne, sont situés sous la peau et ils communiquent avec la surface par un petit trou plus ou moins facile à voir, situé exactement sur la ligne médiane du sillon inter-fessier. Cet orifice naturel appelé fossette peut être retrouvé très près de l’anus ou plus à distance sur la hauteur du sillon inter-fessier. Cette fossette est à distinguer de l’orifice cutané qui peut se former après fistulisation d’un abcès. Les formes infectées se manifestent sous la forme d’une infiltration inflammatoire sous-cutanée, la collection est plus ou moins rapidement visible. En cas de rupture spontanée se crée un orifice de drainage secondaire. L’abcès ainsi formé est souvent décalé latéralement par rapport à la ligne médiane, et le plus souvent vers la gauche. Le kyste pilonidal n’est jamais associé à une fistule anale, il s’agit de deux pathologies différentes. Il existe des associations entre kyste pilonidal et maladie de Verneuil (infection de glandes cutanées pouvant intéresser le périnée, les plis inguinaux, le cou, le tronc et les aisselles). Pourquoi en parle-t-on ? Qui cela concerne-t-il ? Ces kystes ne seraient pas gênants s’ils ne s’infectaient pas. La manifestation clinique qui leur est associée est donc la suppuration avec ses différentes phases : phase d’abcédation aigüe, phase d’évacuation, voire de résorption spontanée et phase latente. Probablement une part importante de la population est porteuse de kystes pilonidaux qui ne se manifesteront jamais. Les formes symptomatiques (infectées) touchent le plus souvent l’adulte jeune, plus fréquemment de sexe masculin. L’abcédation se traduit par une tuméfaction douloureuse qui grossit rapidement et peut devenir insupportable. Sans intervention thérapeutique peut survenir une rupture avec évacuation de pus, souvent mêlé de sang qui soulage le malade, ou plus rarement une décroissance spontanée de l’abcès. Cette disparition spontanée de l’infection est parfois observée spontanément pour les petits abcès, elle est exceptionnellement durable si elle est due à un traitement antibiotique. S’ensuit une phase de latence qui peut être totalement asymptomatique, alors seule l’existence d’une ou plusieurs fossettes sur la ligne médiane au niveau du sillon inter-fessier permet de poser le diagnostic (Figure 1) ; soit il existe une suppuration chronique avec un ou des orifices qui suintent (Figure 2) et une zone fibreuse plus ou moins sensible. Au cours de cette phase suppurative chronique l’induration fibreuse sous-cutanée grossit progressivement avec le temps, et l’orifice cutané devient plus ou moins granulomateux et proéminent. Figure 1 : Fossettes asymptomatiques sur le sillon inter-fessier (flèches) (Visuel @FP). 32 Les facteurs de risque supposés : •un sillon inter-fessier profond, •une pilosité développée, •un surpoids. Il n’est pas prouvé qu’un rasage ni une épilation de cette région prévienne l’apparition ou la surinfection de ces kystes. Figure 2 : Fossettes (flèche blanche), orifice de drainage (flèche rouge) témoignant d’un épisode récent d’abcès (Visuel@FP). Soin à Domicile n°41 – Novembre Décembre 2014 - santé log WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4108 Conduites à tenir Que faire devant des fossettes asymptomatiques ? Un patient chez qui on découvre une ou des fossettes sur le sillon inter-fessier, sans induration sous-jacente, sans écoulement à la pression, sans notion d’épisode de tuméfaction ou de douleur à cet endroit ne nécessite aucun traitement. On peut le prévenir que ces microkystes risquent éventuellement de s’infecter un jour, mais sans aucune certitude. Il n’est pas nécessaire de lui proposer un traitement chirurgical préventif. Que faire devant un kyste infecté ? L’infection d’un kyste pilonidal est un événement en général aigu, souvent extrêmement douloureux. L’abcès se développe rapidement, entouré d’une réaction inflammatoire plus ou moins étendue. La douleur est insomniante, la fièvre est le plus souvent absente. La radiologie est inutile au diagnostic. Le traitement est l’évacuation en urgence du pus dans deux buts : soulager quasi immédiatement le malade et arrêter la progression de l’infection. Les antibiotiques seuls sont le plus souvent inefficaces, même s’ils permettent parfois une accalmie passagère de quelques jours. L’application de pansements alcoolisés ou autres pour faire « murir » l’abcès est inutile et douloureuse. Les pommades antibiotiques locales sont sans aucune efficacité. Les antiinflammatoires non stéroïdiens ne sont pas recommandés à ce stade car ils diminuent les défenses contre les infections. L’incision d’une telle suppuration est le plus souvent simple et peut éventuellement être faite sans anesthésie locale. L’incision doit être suffisamment importante pour permettre l’évacuation de tout le pus contenu (Figures 3 et 4). Une fois l’abcès évacué l’antibiothérapie est inutile sauf cas particulier : diabétique… Au décours de ce geste on propose de simples toilettes avec un savon neutre, voire un antiseptique, et surtout le port d’un pansement pour se protéger du suintement purulent qui peut persister 24 à 48 heures. Le malade peut reprendre ses activités normales très rapidement, le plus souvent après 1 à 3 jours. Il faut prévenir le malade qu’après une simple évacuation, cet accident peut se reproduire dans un délai imprévisible. C’est pourquoi il faut lui proposer d’effectuer à distance une intervention afin d’éviter la récidive. Pourquoi propose-t-on rarement un traitement radical en urgence devant un kyste infecté ? •La simple évacuation du pus règle quasi instantanément le problème de la douleur et celui de l’infection. •C’est donc le geste nécessaire et suffisant en cas d’abcès. •Le traitement radical du kyste en phase d’abcès aboutit le plus souvent à une plaie plus importante que si ce geste est effectué à froid, et donc une durée de cicatrisation et une immobilisation plus longue. •Une intervention différée, programmée à froid, permet au malade d’organiser au mieux sa convalescence et sa prise en charge infirmière en fonction de ses activités scolaires ou professionnelles. Figures 3 et 4 : Incision en urgence d’un kyste pilonidal infecté (Visuel@FP). santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 33 Dossier WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4109 Que faire devant un orifice cutané qui coule de façon chronique ? On rencontre parfois des patients qui supportent depuis des années un écoulement quasi quotidien tâchant sous-vêtements et draps. Le plus souvent cet écoulement est accompagné d’une zone fibreuse cicatricielle plus ou moins sensible et plus ou moins étendue, pouvant atteindre le bas du dos ou la marge anale. Aucun soin (toilettes antiseptiques, méchage, nitratage, antibiotiques, irrigation…) ne guérira ce malade. Il faut lui proposer un traitement chirurgical, et en attendant préconiser une simple protection pour raison d’hygiène et des toilettes avec un savon doux. Comment opère-t-on un kyste pilonidal ? Le traitement chirurgical est le seul traitement qui va permettre d’éliminer le risque de récidive. Plusieurs techniques existent. Pour opter pour l’une d’entre elles, il faut bien définir les objectifs : •obtenir une disparition complète et définitive du ou des kystes, •faire une plaie qui cicatrise le plus rapidement possible •obtenir une cicatrice la moins inesthétique possible. Les exérèses suivies de plasties ferment d’emblée la plaie créée, la cicatrisation est donc théoriquement rapide. Néanmoins ces techniques souffrent de plusieurs défauts qui ne les font pas préférer : le taux d’échec avec désunion rapide des sutures ou récidive secondaire de l’abcès est élevé, les cicatrices qui barrent parfois la fesse ne sont pas très esthétiques. Les exérèses larges passant au ras de l’aponévrose sacrée en profondeur avec cicatrisation secondaire dirigée sont les techniques les plus employées. Le taux de récidive est très faible, par contre la durée de cicatrisation les douleurs et l’immobilisation sont importants. Les mises à plat avec une exérèse minimale de tissu sont actuellement préférées. Elles permettent de démarrer la cicatrisation sur un socle déjà solide. Les impératifs techniques sont de ne pas opérer en phase d’abcès, de bien repérer toutes les fossettes et les cavités sousjacentes, ne pas former une plaie en puits, mais une plaie avec des berges en pente douce en s’aidant d’un éventuel parage de ces dernières (Figures 5 à 9). Les douleurs sont moindres et les soins raccourcis. Après ce type de chirurgie, la cicatrisation est obtenue en 1,5 à 2 mois, pour un lycéen l’immobilisation est d’une semaine de cours et de 2 à 3 mois de sport. Figures 5 à 9 : différents temps de la mise à plat kyste pilonidal Cathétérisme de la cavité Kyste mis à plat, avec parage des berges Premier pansement avec une mèche Mise à plat du kyste (Visuel@FP) Fossette et orifice d’un épisode d’abcès 34 Soin à Domicile n°41 – Novembre Décembre 2014 - santé log WWW à lire sur le web www.santelog.com/id4110 Les causes des échecs de cette chirurgie Les causes de récidive sont multiples et imposent un suivi attentif de la phase de cicatrisation. Il peut apparaitre un nouveau kyste dans le sillon inter-fessier à distance de la cicatrice d’exérèse de la lésion initiale. La cicatrice peut se refermer en pont et créer une poche qui va se surinfecter. Enfin si la cavité n’a pas été suffisamment mise à plat, la cicatrisation ne sera jamais complète. Il est important de bien respecter toutes les étapes du traitement : •Simple drainage en phase d’abcès •Intervention à distance sur des tissus non inflammatoires •Repérage et traitement de toutes les cavités et orifices •Ne pas opérer si le jour prévu aucune lésion n’est visible. •Utiliser la technique la moins agressive possible •Enfin et c’est essentiel faire des soins postopératoire adaptés et bien suivre le malade régulièrement jusqu’à cicatrisation complète. Quels soins post-opératoires sont conseillés ? Les soins doivent être simples et faciles à effectuer, ne pas induire de douleurs, ne pas nécessiter de compétences particulière. Le principal acteur des soins d’un kyste pilonidal est le malade lui-même. La part « infirmière » du soin peut rapidement être effectuée par un membre de la famille, cela permet d’alléger les contraintes d’immobilisation du malade. Le soin se décompose en deux temps : •Une douche est effectué pansement et mèche enlevés. Le jet est appliqué directement sur la plaie, c’est le seul temps de « détersion ». Un savonnage avec un savon neutre (de Marseille ou de pharmacie) est effectué à la main. Il est inutile et peu hygiénique d’utiliser gants ou autres tissus. Un rinçage est effectué à grande eau. Pendant tout ce temps de lavage le malade est accroupi, il tire sur ses fesses pour bien exposer toute la surface du kyste à l’irrigation. •Ensuite un temps d’application du pansement. Le plus souvent toutes les phases de la cicatrisation tolèrent et se suffisent de la simple application d’un pansement hydrocolloïde recouvert d’un pansement adhésif souple. Il est inutile si la douche a été bien faire de nettoyer à nouveau la plaie, ni d’enlever les fausses membranes résiduelles ou les points de nécrose tissulaire. Ces gestes entrainent douleur et sont inutiles. Le bourgeonnement en général précoce doit être respecté. Il est exceptionnellement exubérant. L’installation sur la plaie d’un tapis de végétations asphyxie cette dernière et ralentit la cicatrisation. Dans ce cas la plaie est recouverte d’un tapis gélatineux, fragile, saignotant et malodorant. La première cause en est l’occlusion permanente de la plaie et l’absence d’irrigation correcte lors de la douche (malade pusillanime ou douloureux). Il faut réexpliquer la nécessité d’une douche efficace. On peut s’aider de nitratages au crayon régu- liers, espacés de 3 à 7 jours jusqu’à reprise d’un aspect normal de la cicatrice. Un accolement trop précoce des berges ou la couverture de la plaie par une peau en pont nécessitent son effondrement aux ciseaux, ou au crayon de nitrate. Une des causes est là aussi l’absence de traction sur les fesses lors de la douche. Certains conseillent à leurs malades de faire des exercices de flexion complète sur les jambes (squats) matin et soir afin d’éviter les accolements des berges de la plaie. Pour accélérer l’épithélialisation de la plaie lorsque celle-ci s’est parfaitement comblée, certains soignants appliquent durant quelques jours des pommades au goudron. Voir également p38 «La cicatrisation dirigée». Les séquences normales de la cicatrisation (visuels provenant de patients différents@FP) Bourgeonnement Elimination des points de nécrose Régénération tissulaire Fermeture J50 (Visuel@FP) santé log - Soin à Domicile n°°1 – Novembre Décembre 2014 35 Savoir Surpoids et obésité de l’adulte : Prise en charge médicale de premier recours L’obésité est une maladie chronique et l’excès de poids augmente la morbidité. La mortalité totale augmente avec l’indice de masse corporelle (IMC), essentiellement à partir d’un IMC ≥ 28 kg/m2, sauf pour les patients âgés. Il faut souligner l’intérêt de la perte de poids chez des personnes avec obésité pour réduire les comorbidités associées. Ainsi, une perte de poids de 5 % à 10 % diminue le risque d’apparition du diabète de type 2. Pourquoi repérer l’excès de poids ? •Il est recommandé de repérer systématiquement à la première consultation puis régulièrement le surpoids et l’obésité chez les patients consultant en médecine générale. •Les personnes ayant une obésité sont victimes de nombreuses discriminations qui touchent toutes les dimensions de la vie. Il est recommandé que le médecin en mesure l’impact. •Il est recommandé que le médecin mette en garde les patients contre les régimes successifs à l’origine de fluctuations de poids qui peuvent être dangereuses pour la santé et contre l’utilisation des traitements médicamenteux. Quand diagnostiquer le surpoids et l’obésité ? Le médecin généraliste doit peser régulièrement et au mieux à chaque consultation tous les patients. La taille doit être mesurée à la première consultation. Le poids et la taille doivent être inscrits dans le dossier du patient pour calculer l’IMC et en surveiller l’évolution. Les facteurs favorisant la prise de poids •Apports énergétiques excessifs (alimentation trop riche, trop dense en calories, boissons sucrées, grande taille des portions). •Sédentarité. •Arrêt ou réduction de l’activité physique et sportive. •Arrêt du tabac non accompagné de mesures adaptées. •Consommation d’alcool. •Prise de certains médicaments (parmi lesquels des neuroleptiques, des antidépresseurs, des antiépileptiques, l’in- suline, les sulfamides hypoglycémiants, les corticoïdes). •Facteurs génétiques et antécédents familiaux d’obésité. •Antécédents d’obésité dans l’enfance. •Grossesse. •Ménopause. •Troubles du comportement alimentaire (impulsivité alimentaire, compulsions alimentaires, hyperphagie boulimique). •Troubles anxio-dépressifs et périodes de vulnérabilité psychologique ou sociale. •Facteurs professionnels (parmi lesquels stress au travail, travail posté). •Diminution du temps de sommeil. Les fluctuations de poids peuvent être dangereuses pour la santé (Visuel@Fotolia) 40 Soin à Domicile n°41 - Novembre Décembre 2014 - santé log