ciné-concert Orchestre symphonique d’État de Russie / Mark Gorenstein / Chœur du Théâtre Mariinski Alexandre Nevski Retraçant la lutte héroïque du prince Alexandre Nevski dans la Russie du xiiie siècle, ce film d’Eisenstein culmine dans une fameuse bataille sur un lac gelé, qui voit la victoire de Nevski sur les chevaliers teutons, victimes de l’effondrement de la glace. Cette bataille a été magnifiquement transposée par Prokofiev dans une musique d’une qualité presque graphique. Pour cette soirée épique, les musiciens de l’Orchestre symphonique d’État de Russie, qui joueront la partition devant le film projeté sur grand écran, seront rejoints par un ensemble vocal de renommée internationale, le chœur du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg (anciennement appelé le Kirov). film de Sergueï Eisenstein (noir & blanc, URSS, 1938) musique Sergueï Prokofiev Orchestre symphonique d’État de Russie Chœur du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg mezzo-soprano Evgenia Podymalkina chef de chœur Andreï Petrenko direction Marc Gorenstein durée 1h50 tarif rouge Évreux, Le Cadran samedi 13 novembre - 20h30 Navette au départ de Rouen à 19h Manifestation organisée dans le cadre de l’Année France-Russie 2010 / www.france-russie2010.fr 60 Alexandre Nevski, le film Basé sur un événement historique, la victoire du prince Alexandre Nevski, héros national russe, ce film est une commande des autorités stalinienne à Eisenstein et Prokofiev. Il est conçu à l’origine comme un film épique de propagande contre l’expansionnisme des nazis. Nevski, grand prince de Vladimir au xiiie siècle, est célèbre pour deux victoires militaires essentielles dans l'histoire de la Russie : l'une contre les Suédois sur les bords de la Neva en 1240, l'autre contre les chevaliers de l’Ordre teutonique, installés dans la région depuis 1237, sur les glaces du lac Peïpous en avril 1242. La première de ces victoires lui valut son surnom de Nevski (“de la Neva”). À une époque où les chevaliers teutoniques menaçaient de conquérir la Russie avec l'intention manifeste de la convertir à l'Église latine, Alexandre Nevski sut évaluer le danger, conclure une trêve avec la Horde d'Or de Gengis Khan et porter tous ses efforts sur le front occidental de la Russie. C'est le courage et la clairvoyance politique, à une époque critique de leur histoire, que le peuple et l'Église russes honorent en lui. Dans le film d’Eisenstein, les chevaliers teutoniques envahisseurs du territoire russe, évoquent clairement la menace allemande. La lecture du film doit se faire à deux niveaux : le xiiie siècle épouse un contexte contemporain. Par cette page d’histoire, l’URSS affirme qu’elle est prête à se défendre face à un envahisseur quelconque mais déjà tout désigné. Les gros plans de visages, caractéristiques des films d’Eisenstein, accentuent la bravoure ou la traîtrise. Le traitement plastique des images ont fait date dans l’histoire du cinéma. Eisenstein met ici en place le contrepoint audiovisuel : la musique de Prokofiev fait naître des contrastes, tantôt comiques, tantôt dramatiques, avec les images. Le réalisateur a été très surveillé pendant le tournage du film et les acteurs sont des membres du Parti. Eisenstein l’aurait d’ailleurs considéré comme son film le moins personnel et le plus superficiel, sauf pour tout ce qui concerne la bataille de la Glace. Deux mois avant la sortie du film en 1938, les accords de Munich signe le pacte germanosoviétique : le film devenu inutile est retiré des salles. Il sera à nouveau projeté après l’invasion des troupes allemandes et la rupture de ce même pacte. 61 Sergueï Prokofiev Sergueï Prokofiev est né à Sontvoka en Ukraine en 1891. Il reçoit les premières leçons de piano de sa mère, pianiste amateur. Dès l'âge de neuf ans, il écrivit un opéra pour enfant. En 1904, il entre au Conservatoire de Saint-Pétersbourg ou il est notamment élève de Nikolaï Rimski-Korsakov pour l'orchestration et Anna Essipova, professeur de piano. La puissance et la fougue de son jeu suscitent l'étonnement de ses contemporains. Il joue sa première sonate pour piano à Moscou en 1910, puis fait une tournée européenne. C'est avec son propre Concerto pour piano n° 1 qu'il obtint en 1914 son diplôme au conservatoire ainsi que le prix Anton Rubinstein. À la suite de la révolution d'Octobre, Sergueï Prokofiev quitte la Russie en 1918 pour les États-Unis. Il réside ensuite à Paris et voyage à travers le monde jusqu’en 1933, multipliant les tournées en Allemagne, aux États-Unis, au Canada, à Cuba, en Italie. Marié en 1923, à la soprano espagnole Lina Llubera, il se sépare d'elle et vit à partir de 1940 avec la poétesse Mira Mendelson. Après un premier séjour à Moscou en 1927, Prokofiev regagne finalement l'URSS en 1933. Mais ses relations avec le pouvoir soviétique se dégradent au fil du temps. Les autorités étaient peu disposées à lui accorder des visas de sortie du territoire afin qu'il puisse poursuivre ses tournées à l'étranger. Il compose dès lors dans un style "assagi", exempt de tout ce qui pourrait choquer les censeurs de l'Union des compositeurs soviétiques, fondée par Staline en 1932. Il est néanmoins accusé en 1949 de “formalisme bourgeois” et censuré. Il retrouve les faveurs des autorités soviétiques avec sa Symphonie n° 7 en 1952 et obtint le prix Staline. Il meurt brutalement à Moscou le 5 mars 1953, le même jour que Staline. Sergueï Eisenstein Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein est né en 1898 à Riga (Lettonie). Son père était architecte et sa mère appartenait à la petite bourgeoisie. En 1915, il entre à l'Institut des Ingénieurs civils de Petrograd avant de s'engager dans l'Armée Rouge en 1918 et partir, volontaire, pour le front. Démobilisé en 1920, il devient metteur en scène et décorateur de théâtre. Il fait ses débuts au cinéma en 1923, avec le Journal de Gloumov, un petit film burlesque inséré dans une représentation théâtrale et publie, la même année, ses premiers écrits théoriques sur le "montage-attraction". En 1925, à l'âge de vingt-sept ans, il met en scène le Cuirassé Potemkine, film devenu immédiatement un grand classique, qui relate des scènes de la révolution bolchévique. Il part pour le Mexique en 1930, pour y tourner Que Viva Mexico mais le film ne devait pas aboutir. De retour en Union soviétique, Sergueï Eisenstein entreprend alors son premier film parlant, le Pré de Bejine, d'après Tourgueniev, qui demeurera malheureusement inachevé. Après une musique de Serge Prokofiev, il réalise en 1938 Alexandre Nevski et prépare en 1941 Ivan le Terrible dont la seconde partie, comprenant des séquences en couleurs, terminée en 1946, ne sera présentée qu'en 1958. Alité depuis plusieurs mois à la suite de troubles cardiaques, Eisenstein meurt à Moscou en février 1948. Orchestre symphonique d’État de Russie 62 L’Orchestre symphonique d’État de Russie fait figure de référence dans le paysage musical russe. Fondé en 1936 sous le nom d’Orchestre d’État de l’URSS, il a été dirigé par de grands chefs d’orchestre dont Evgueni Svetlanov pendant 35 années. Il est également surnommé Orchestra Svetlanov, tant la renommée de ce chef est attachée à cette formation. Depuis 2002, Mark Gorenstein en est à la tête. Premier orchestre symphonique à présenter la musique soviétique à l’étranger, il mène une tournée en Pologne et en Roumanie en 1956, puis en Belgique et en Asie en 1958. Quelques années plus tard, il achève une série de concerts aux États-Unis par une représentation donnée au Madison Square Garden devant 16 000 spectateurs. Depuis le début des années 1960, l’Orchestre symphonique d’État de Russie se distingue sur la scène internationale et est invité dans les plus grands festivals, d’Edimbourg à Athènes et se produit à Vienne, Londres, Amsterdam, Paris, Washington, Tokyo, Buenos Aires… A l’automne 2002, il donne également un concert au Vatican. Depuis le début de son histoire, l’Orchestre symphonique d’État de Russie compte de brillants artistes avec lesquels il joue et enregistre des disques : Sviatoslav Richter, Natalia Gutman, Yuri Bachmet, Nikolai Petrov, Yehudi Menuhin, Isaac Stern, Mstislav Rostropovitch, Placido Domingo parmi tant d’autres et plus récemment Nikolaï Lugansky, Denis Matsuev, Ayako Uehara et Vadim Rudenko. Un certain nombre de compositeurs soviétiques ont également créé leurs œuvres lors de collaborations avec l’Orchestre symphonique d’État de Russie comme Arvo Pärt ou encore Yuri Shaporin tandis que d’autres ont rejoint l’orchestre le temps de l’interprétation de leurs œuvres à l’image de Sergueï Prokofiev, Giya Kancheli, Dimitri Chostakovitch, Aram Khachaturian… L’Orchestre symphonique d’État de Russie compte une riche discographie, notamment une célèbre Anthologie de la musique russe constituée de 250 disques. En janvier 2005, il devient le premier orchestre russe à remporter le "Supersonic award" au Luxembourg pour un enregistrement des symphonies de Chostakovitch. Récemment, l’Orchestre symphonique d’État de Russie a donné, dans son pays, un concert en l’honneur d’Evgueni Svetlanov ainsi qu’une série de représentations en 2007 dans le cadre du 150e anniversaire de la naissance du compositeur Edward Elgar. Il poursuit également les tournées à travers le monde. Chœur du Théâtre Mariinski Construit en 1860 à Saint-Pétersbourg, le Théâtre Mariinski regroupe en son sein un orchestre, un ballet et un chœur. Anciennement appelé Théâtre Kirov, cette compagnie connaît un âge d’or à la fin du xixe siècle et devient une référence mondiale en inventant le ballet "à la russe". Le chœur du Théâtre Mariinski contribue, quant à lui, au développement de la culture musicale russe. Dirigé depuis 2000 par Andrei Petrenko et constitué d’une cinquantaine de chanteurs, il est aussi réputé en Russie qu’à l’étranger. Privilégiant la musique classique, il compte à son répertoire plus de cinquante opéras de compositeurs russes et européens. Parallèlement, il interprète nombre de cantates, oratorios et chants a cappella de Tchaïkovski, Stravinski, Prokofiev, Goubaïdoulina parmi d’autres. En tournée en Russie, Finlande, Suisse, Grande-Bretagne, France, Italie et Israël, le Chœur du Théâtre Mariinski séduit par sa puissance vocale. Présent dans de nombreux festivals, il compte également une riche discographie : Boris Godunov de Musorgsky, Ivan le Terrible de Prokofiev et plus récemment, en 2003, Alexandre Nevski du même compositeur. C’est cette œuvre qui sera interprétée pour ce ciné-concert. Mark Gorenstein Dès l’âge de 6 ans, Mark Gorenstein étudie le violon au sein de l’école de musique d’Odessa et intègre le Conservatoire de Kishinev. Durant de nombreuses années, il est violoniste dans l’orchestre du Théâtre Bolchoï et dans l’Orchestre symphonique d’État de Russie avant de suivre une formation de chef d’orchestre au Conservatoire de Novossibirsk. Depuis le début de sa carrière de chef au milieu des années 1970, Mark Gorenstein ravit chaque fois le public qui apprécie la performance et la profondeur de l’interprétation. En 1985, il est nommé chef d’orchestre de l’Orchestre symphonique MAV de Budapest et propose plus de cent concerts sur trois saisons, ce qui contribue à la renommée de l’institution. Il est également le fondateur du désormais traditionnel concert du Nouvel An à Budapest. Quatre années plus tard, il prend la tête de l’Orchestre symphonique de la ville de Pusan en Corée du Sud et en fait le meilleur orchestre du pays. En 2002, Mark Gorenstein accepte le poste de chef d’orchestre et de directeur artistique de l’Orchestre symphonique d’État de Russie. D’année en année, il collabore avec de grands solistes tels que les violonistes Viktor Tretyakov et Vadim Repin, les violoncellistes Mstislav Rostropovitch et Antonio Meneses, les pianistes Nikolaï Petrov et Nikolaï Lugansky ou encore les chanteurs Elena Obraztsova et Angela Gheoghiu. Par ailleurs, Mark Gorenstein est régulièrement chef invité pour plusieurs orchestres dont l’Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg, de Tokyo et d’Israël. En décembre 2005, il se voit attribuer par le gouvernement russe un prix récompensant sa saison 2003-2004 en tant que chef de l’Orchestre symphonique d’État de Russie. En 2006-2007, il reçoit le prix le plus prestigieux de Russie pour “services rendus à la patrie” et, avec l’ensemble de l’orchestre, la “gratitude du Président de la Fédération de Russie”. Il se place ainsi dans la lignée des plus grands artistes russes. 63