Suicide assisté, euthanasie, sédation

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Suicide Assisté
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C
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D
Euthanasie
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n
Yvon Beauchamp M.D., C.C.F.P.
Services de soins palliatifs
Hôpital Sacré-Cœur de Montréal
CSSS Bordeaux-Cartierville-Saint –Laurent
Professeur-adjoint de clinique
Université de Montréal
• Introduction
• Débat de longue date et à plusieurs facettes au Canada
• Analogie historique de différents sujets apparentés qui ont trait
à la vie des individus dans la société canadienne et comment
on arrive à faire avancer ou reculer les décisions
• Doit-on absolument opposer les soins palliatifs à l’aide au
suicide et à l’euthanasie et pourquoi faire de la sédation une
alternative à l’euthanasie?
• Conclusion
Introduction
• C’est mon impression qu’avec les années au Canada les
soins palliatifs se sont donnés la mission d’être les
champions de la Non-Euthanasie et d’être l’alternative
universelle à un acte punissable au regard de la loi de Dieu,
de la loi des Hommes et du Collège des Médecins.
• Il y a des gens qui pensent qu’ « un développement
accéléré des soins palliatifs est synonyme de non-besoin de
suicide, de suicide assisté et d’euthanasie ».
• Les soins palliatifs sont une chose et l’euthanasie est un
autre sujet; le suicide et l’aide au suicide sont aussi des
sujets différents mais qui sont toujours liés lors de nos
discussions. L’un doit-il obligatoirement être en opposition
avec l’ autre ?
• La religion est affaire d’Églises, de foi non rationnelle et
d’obéissance surtout
•
• Nos codes, civil et criminel, sont affaires de sociétés civiles
laïques ici au Canada, de droits,de responsabilités et
d’obligations légales et sociales mais aussi d’obéissance
•
• Le code de déontologie est affaire de professionnalisme, de
connaissances, de savoir être, de savoir faire et encore
d’obéissance
•
• Trois niveaux d’interpellation d’un médecin ou d’une
infirmière qui sous-entendent des droits, des devoirs, des
obligations, des acceptations et une obéissance aux règles.
Trois créneaux différents du même individu, créneaux dont
l’importance relative varie d’un individu à l’autre.
Même débat; sujets différents
Sujets différents; même débat
• La société canadienne n’est pas statique, elle a cheminé, elle
change sa pensée.
Un individu vient au monde, vit plus ou moins longtemps et
meurt.
• Ces trois étapes de développement se sont traduites et se
traduisent encore dans notre société par de délicates
discussions, parfois des affrontements.
• Nous avons eu nos affrontements lors des décisions à prendre
au regard de l’avortement et nous en avons encore au regard
du fœtus et son existence en tant que personne légale; nous
en avons sur le suicide (fin de vie décidée par l’individu) et
sur l’aide au suicide ainsi que sur l’euthanasie ou encore sur
la fin de la vie lors d’une sédation palliative.
• Je ne veux pas parler des religions et des Églises ce matin;
elles ont leur propres règles concernant ces sujets.
L’histoire légale de l’avortement
Euthanasie: mot inconnu dans le code criminel
Article
Teneur
14
« Nul n’a le droit de consentir à ce que la mort lui soit infligée »
215
« … devoir de fournir les choses nécessaires à l’existence »
219
« …négligence criminelle »
220
« le fait de causer la mort par négligence criminelle »
222
Homicide
229
Meurtre
234
Homicide involontaire coupable
245
Le fait d’administrer des substances délétères
241
Coupable quiconque conseille ou aide qq’un à se donner la mort
Meurtre au premier degré car l’intention de causer la mort est présente et il y a
préméditation
Histoire légale du suicide et du suicide assisté au Canada
Dates
Articles
Commentaires
Avant 1892
Draft code
Pensées suicidaire passibles d’emprisonnement
Suicide et Aide au suicide punissables de mort
1892
238 et 237
Allègement des peines:
Tentative de suicide: diminuée à 2 ans de prison,
Aide au suicide: çà demeure la prison à perpétuité
1906
1927
1953
1970
Réformes de Aucun changement lors des révisions mais allègement de
la loi
la peine pour l’Aide au suicide qui passe à 14 ans de
prison.
La tentative de suicide passe à un statut de « sérieux » à
« moins grave » comme acte criminel.
1972
Abolition dans le code criminel canadien de l’aspect
criminel de la tentative de suicide, mais non de l’aide au
suicide
L’histoire légale d’un mot qui n’existe pas dans le code pénal
Dates
Conclusions
1983
Concensus canadien sur 3 principes:
Commission 1. La protection de la vie humaine est une valeur fondamentale
Un malade a droit à l’autonomie et à l’autodétermination à propos de ses soins médicaux
de réforme 2.
3. La vie humaine doit être envisagée dans une perspective à la fois quantitative et
du droit du qualitative
L’aide au suicide demeure un crime mais on supprime les ambigüités qui semblaient obliger
Canada
un MD, de façon absolue, à poursuivre un traitement commencé
1994
Commission
sénatoriale
sur
l’euthanasie
Rapport en
1995
Ne suggère aucun changement dans la loi pour le suicide assisté ( il y a des membres
dissidents)
Définition de l’euthanasie: « un acte qui consiste à provoquer intentionnellement la mort
d’autrui pour mettre fin à ses souffrances »
Subdivisions:
1. volontaire (demande du patient)
2. non volontaire (sans qu’on connaisse les vœux du patients)
3. involontaire (à l’encontre des vœux du patient)
Les trois formes d’euthanasie demeurent illégales et les seules ouvertures sont au regard de
la forme volontaire et non volontaire pour lesquelles on suggère une diminution des peines
lorsque l’élément de compassion est présent.
Définition sénatoriale de la « sédation palliative »
Le code de déontologie
Article
Libellé
7
Le médecin doit ignorer toute intervention qui ne respecte pas sa liberté professionnelle
28
Obtention d’ un consentement libre et éclairé du patient ou de son représentant légal avant d’entreprendre
une investigation ou un traitement
55
Le médecin ne doit pas diminuer les capacités physiques, mentales ou affectives d’un patient, sauf si cette
diminution est requise pour des motifs préventifs, diagnostiques ou thérapeutiques
58
Le médecin doit agir de telle sorte que le décès d’un patient qui lui paraît inévitable survienne dans la
dignité. Il doit assurer à ce patient le soutien et le soulagement appropriés.
59
Le médecin doit collaborer avec les proches du patient ou toute autre personne qui démontre un intérêt
significatif pour celui-ci
60
Le médecin doit refuser sa collaboration ou sa participation à tout acte médical qui irait à l’encontre de
l’intérêt du patient, eu égard à sa santé.
La sédation palliative
•
1. « Atténuation ou disparition des manifestations pathologiques »
Dictionnaire Larousse
•
2. « La sédation complète est le fait de rendre une personne totalement inconsciente
en lui administrant des médicaments non susceptibles d’abréger la vie »
Comité sénatorial spécial sur l’euthanasie et l’aide au suicide (1993)
•
3. « La sédation profonde, ou sédation terminale, se définit par l’induction et le
maintien intentionnel d’un sommeil léger à profond, mais ne causant pas
délibérément la mort, chez des patients en phase terminale de leur maladie »
Le Regroupement des Pharmaciens ayant un Intérêt pour les Soins
Palliatifs (RPISP, 1995)
4. « Administration intentionnelle de substances sédatives au dosage minimal
nécessaire dans le but d’obtenir le soulagement d’un ou plusieurs symptômes
réfractaires en réduisant l’état de conscience temporairement ou
définitivement d’un patient porteur d’une maladie avancée dont l’espérance
de vie estimée est courte (jours ou semaines), ceci en collaboration avec une
équipe multidisciplinaire compétente »
Symptôme réfractaire: symptôme vécu par le patient comme insupportable et
ne pouvant être contrôlé de manière satisfaisante pour le patient en dépit d'une
prise en charge palliative correctement menée qui jusqu'alors ne compromettait
pas la communication de la personne malade avec autrui.
Broeckart et Olarte (2000-2002-2004)
•
•
Ce que ce n’est pas
• 1. La sédation terminale devrait être distinguée de l’état d’altération
progressif de la conscience qui accompagne spontanément l’évolution de la
maladie vers la mort. Cette dernière résulte de l’addition des conditions
métaboliques du mourir et des traitements utilisés.
• 2. La sédation terminale se distingue également de la sédation survenant
occasionnellement comme effet secondaire non désiré des dérivés opioïdes
utilisés à forte dose dans le cadre du soulagement de douleurs sévères. La
sédation terminale consiste donc en une décision explicite de provoquer
l’inconscience chez un patient pour prévenir ou répondre à une quelconque
situation de détresse physique ou psychologique incontrôlable.
Qui sédater ?
• Les situations singulières et complexes dont la réponse ne
peut se réduire au seul domaine médical sortent du domaine
des indications.
• Elles s’inscrivent dans un contexte de détresse persistante,
vécue comme insupportable par le patient, comportant
parfois une demande d’euthanasie. Elles ne peuvent
s'envisager en terme de "maîtrise" au sens médical du
terme.
• Parfois résumée par le terme de "souffrance existentielle",
elle ne peut constituer en tant que telle une « indication » à
la sédation.
• La prise en compte de ce type de souffrance ne peut être
réduite à une prise en charge médicale ou pharmacologique.
Bibliographie
• 1. The Ethics of Palliative Sedation as a Therapy of Last Resort, National
Ethics Commitee, Veterans Health Administration: American journal
of hospice & palliative medicine 2007; vol 23 no 6 pp 483-491
• 2. Bigorio 2005, Recommandations « sédation palliative »; consensus sur
la meilleure pratique en soins palliatifs en Suisse; Groupe d’experts
de la Société Suisse de Médecine et de Soins palliatifs
• 3. La sédation pour détresse en phase terminale, Recommendations de la
Société Française d’Accompagnement et de soins palliatifs
• 4. Le suicide assisté, héraut des moralités changeantes, Joane Martel
Presses d’Université d’Ottawa
5. Code de déontologie des médecins Loi, L.R.Q.c. M-9
Conclusion
• Débats persistants, la loi n’a pas encore changé. Le terme « euthanasie »
n’existe pas dans le code criminel; on parle de meurtre au premier ou au
second degré et tous les termes que l’on veut introduire n’y changent rien.
• La loi va changer si la société en fait vraiment la demande, de façon
soutenue comme pour l’avortement et le suicide. Le terme « euthanasie »,
apparaitra-il dans nos codes de loi? L’aide au suicide sera-t-il
décriminalisé? Il faut y penser, c’est une question de temps.
• Le médecin acceptera-t-il de poser ces gestes ? Affaire de conscience, de
religion peut-être et de code de déontologie.Ce qui est légal est-il
nécessairement moral ou ce qui est moral est-il nécessairement légal ?
• Sommes-nous une société meilleure religieusement ou culturellement que
la société belge ou que celle des Pays-Bas ou des États de Washington et
d’Orégon qui ont légiféré pour permettre et encadré ce fameux mot « aide
au suicide médicalement assisté » ? Ou bien est-ce que nous n’avons pas
poussé aussi loin le débat. ?
Conclusion
• Pourquoi l’aide au suicide et l’euthanasie volontaire ne seraient-il pas d’autres
gestes médicaux adéquats dans certaines circonstances ?
• Pourquoi est-ce moralement et légalement acceptable de sédater profondément et
sans retour un malade en « disant laisser faire la nature et la maladie » (discours
officiel) en sachant que la privation de nourriture et d’hydratation , conséquence du
geste médical de sédater, est tout à fait en cause aussi dans un processus de décès
qui s’étalera sur 6-7 -8 jours et plus parfois , mettant souvent les familles dans des
états émotionnels très affligeants ainsi que l’équipe soignante?
• On peut toujours argumenté que c’est le patient qui est prépondérant lors de la prise
de décision des gestes que nous posons !
Pourtant c’est l’essence même des « soins palliatifs » que d’ englober
continuellement les familles et leur vécu dans nos décisions.
Conclusion
• Pourquoi est-ce illégal et criminel de faire une même sédation
qui ne durerait pas de façon indue avec les mêmes
médicaments, avec le même idéal de soulager une souffrance
physique ou psychologique réfractaire.
Pourquoi la prise de décision du choix des médicaments qui
obéit aux mêmes règles que pour une sédation palliative ne
nous permettrait-elle pas de viser un processus de décès de
durée moindre ?
• Sommes-nous hypocrites, de bonne foi ou naïfs ?
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