ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2016 RÉGULATION DE LA REPRODUCTION DE CERTAINS GRANDS MAMMIFÈRES DANS LES ZOOS ET LES PARCS ANIMALIERS BASÉE SUR LES PROTOCOLES RECOMMANDÉS PAR LE ZOO DE SAINT-LOUIS ET L’AZA THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL Le 8 juillet 2016 par Charlotte, Anastasia, Pierrette LE NAI Née le 7 mars 1990 à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) JURY Président : Pr. Georges GUELLAEN Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Mme Hélène COMBRISSON Professeur à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort Assesseur : Docteur Alain FONTBONNE Maître de Conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2016 RÉGULATION DE LA REPRODUCTION DE CERTAINS GRANDS MAMMIFÈRES DANS LES ZOOS ET LES PARCS ANIMALIERS BASÉE SUR LES PROTOCOLES RECOMMANDÉS PAR LE ZOO DE SAINT-LOUIS ET L’AZA THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL Le 8 juillet 2016 par Charlotte, Anastasia, Pierrette LE NAI Née le 7 mars 1990 à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) JURY Président : Pr. Geoges GUELLAEN Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Mme Hélène COMBRISSON Professeur à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort Assesseur : Docteur Alain FONTBONNE Maître de Conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort A Monsieur le Professeur Georges GUELLAEN de la Faculté de médecine de Créteil qui nous a fait l’honneur d’accepter la présidence de jury de notre thèse. Hommage respectueux. A Madame le Professeur Hélène COMBRISSON de l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort pour l’attention qu’elle a apportée à l’examen de mon travail Hommage reconnaissant pour sa disponibilité et son implication. A Monsieur le Docteur Alain FONTBONNE De l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort qui m’a fait l’honneur d’être l’assesseur pour cette thèse. Hommage respectueux. À mes parents, sans qui rien n’aurait jamais été possible. Merci d’avoir toujours cru en moi, et de m’avoir poussée à réaliser mes rêves. Mamiou et Papiou, je vous aime très très fort, et je suis plus que fière d’être votre fille ! À toute ma famille (Clémentine, César, Doudou, Solange, Isabelle, Delphine, Arthur, Chloé, Stéphanie, Johan, Romain, Laurane, , Jean-Luc, Sophie, Jérémy, Laura, ...), merci pour tout ! Merci pour tout l’amour que vous m’apportez chaque jour, et pour votre confiance en mes capacités !! Je vous aime ! À mes meilleurs amis, Corinne, Alba et Sébastien, merci pour votre soutien sans faille, et pour tous nos petits-déjeuners/goûters/brunchs et ces bons moments qui m’ont permis de tenir le coup et de garder courage malgré les difficultés ! À mes chers voisins Gilbert et Josiane Villoutreix qui ont pris le temps de lire ma thèse, de la corriger, de l’améliorer, et qui m’ont soutenue dans la dernière ligne droite !! Merci ! À tous ceux que j’ai eu la chance de rencontrer au cours de mes stages ou de ma scolarité et qui m’ont aidée à trouver ma voie et à m’y épanouir ! Merci ! À tous ceux qui comptent pour moi, car sans vous la vie ne serait pas aussi merveilleusement fantastique, et n’aurait que peu d’intérêt ! Merci ! À mon Marcel, soutien sans faille, et super aide pour les révisions et la rédaction de cette thèse. Je t’adore. To my so dear Aussie family, because without you I wouldn’t be myself!!! Thank you so much! Hope to see you again soon! Much love! TABLE DES MATIERES TABLE DES MATIERES ........................................................................................... 1 TABLE DES ILLUSTRATIONS ................................................................................ 3 LISTE DES ABREVIATIONS UTILISEES.............................................................. 7 INTRODUCTION ........................................................................................................ 9 PREMIERE PARTIE Physiologie de la reproduction des Mammifères ............. 11 1La gamétogénèse chez les mâles .................................................................... 11 2La gamétogénèse chez les femelles ................................................................ 16 3L’appareil génital des Mammifères ................................................................ 20 4La fécondation : rencontre entre les deux gamètes et deux partenaires ......... 24 5Facteurs pouvant influencer la fonction de reproduction ............................... 27 DEUXIÈME PARTIE Les différents moyens de contraception disponibles ........ 31 1Œstrogènes...................................................................................................... 31 2Progestagènes ................................................................................................. 33 3Association œstrogène/progestagènes ............................................................ 39 4Androgènes [6] ............................................................................................... 40 5Antagonistes de la GnRH ............................................................................... 40 6Agonistes de la GnRH .................................................................................... 40 7Immunocontraception ..................................................................................... 42 a) Vaccins dirigés contre la zone pellucide ..................................................... 42 b) Vaccins dirigés contre la GnRH.................................................................. 42 8Chirurgie [6][50][123] .................................................................................... 43 9Autres méthodes [6]........................................................................................ 44 a) Chez les femelles ........................................................................................ 44 b) Chez les mâles............................................................................................. 45 c) Chez les espèces saisonnées ........................................................................ 46 TROISIEME PARTIE Les moyens de contraception adaptés à chaque espèce .. 51 1Particularités des cycles de reproduction des espèces étudiées [84] ............. 52 a) Les Félins (Lions, Tigres, Guépards et Panthères) ..................................... 52 b) Les Éléphants .............................................................................................. 53 c) Les Hippopotames ...................................................................................... 56 d) Les Rhinocéros ............................................................................................ 56 e) Les Ongulés (Buffles, Gazelles, Zèbres et Girafes) .................................... 58 f) Les Ursidés (Ours et Panda) ....................................................................... 59 g) Les Canidés (Loups, Hyènes et Lycaons) ................................................... 61 h) Les Primates (Ouistitis, Orang-Outangs, Gorilles et Chimpanzés) ............ 61 2Recommandations pour réguler la reproduction des différentes espèces étudiées [6][32] .................................................................................................................... 63 a) Les Carnivores (Félins, Ursidés et Canidés) ............................................... 64 b) Les Éléphants .............................................................................................. 65 c) Les Rhinocéros ............................................................................................ 66 d) Les Ongulés (Buffles, Gazelles, Zèbres et Girafes) et les Hippopotames .. 66 e) Les Primates (Ouistitis, Orang-Outangs, Gorilles et Chimpanzés) ............ 67 3Bilan................................................................................................................ 67 CONCLUSION ........................................................................................................... 70 BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................... 72 2 TABLE DES ILLUSTRATIONS Figure 1 : Schéma et coupe transversale d'un testicule d'Humain afin de décrire dans l'espace les différentes étapes de la spermatogénèse, d'après le site VétoPsy, [123] ............... 13 Figure 2 : Modifications morphologiques des cellules germinales mâles au cours de la spermatogénèse, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT 2007, [59] .. 14 Figure 3 : Tableau récapitulatif des différentes durées de vie des gamètes après leur émission, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT 2007, [59] ............. 15 Figure 4 : Profil hormonal au cours du cycle sexuel chez la femelle Mammifère, d'après Gilles Furelaud et Bernard Calvino pour l’université Paris 6 Jussieu [119] ................ 18 Figure 5 : Schéma représentant les différentes phases du cycle œstral en s'appuyant sur l'exemple du cycle œstral de la chienne, d'après le site VétoPsy, http://www.vetopsy.fr/chien/ethogramme-chien/reproduction-chien/cycle-chienne.php [111] .................................................................................................................................................. 19 Figure 6 : Schéma des différents types de tractus génital femelle pouvant être identifiés chez les Mammifères, d'après le site internet Vétopsy, http://www.vetopsy.fr/anatomie/systeme-genital/uterus.php [123] ......................................... 21 Figure 7 : Vue en place de l'appareil reproducteur mâle chez un chien, d'après CynoDog, l'école des métiers du chien, http://cyno.net/Reproduction-male-femelle-chienchienne.html [50] ..................................................................................................................... 22 Figure 8 : Anatomie structurelle de l'appareil génital mâle chez le Chien, d'après Vétopsy, http://www.vetopsy.fr/anatomie/systeme-genital/corps-caverneux-os-penien.php [123] ......................................................................................................................................... 23 Figure 9 : Tableau des pertes en spermatozoïdes depuis leur éjaculation jusqu'à leur arrivée près de l'ovocyte chez différentes espèces de Mammifères, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT, 2007, [59] ........................................................... 26 Figure 10 : Schéma représentant les étapes de la fécondation avec les échéances pour plusieurs espèces de Mammifères, d'après le site internet du Lycée de Malherbe à Caen, http://lcs.malherbe.lyc14.ac-caen.fr/~dupin/dossiers/terminale/docs/fecondation.htm [47] ... 27 Figure 11 : Schéma de la régulation de l'activité sexuelle femelle par l'axe hypothalamo-hypophysaire d’après le site Veterinary Online [http://veterinaryonline.blogspot.fr/2012/12/sexual-cycle-in-animals-reproductive.html] [122] ....................... 29 Figure 12: Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des œstrogènes utilisés comme contraceptifs. ............................................................................................................................ 32 3 Figure 13 : Formules semi-développées de la progestérone et des différents progestagènes, d'après le site du département des sciences pharmaceutiques de l'UCLBruxelles, [http://www.farm.ucl.ac.be/Benin/pharmacologie-speciale/7-systemesendocriniens/7-05-andro_estro_progestogenes.pdf] [21][42] .................................................. 34 Figure 14 : Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des progestagènes utilisés comme contraceptifs. ............................................................................................................................ 35 Figure 15 : Schéma représentant le mécanisme selon lequel la progestérone inhibe la synthèse des prostaglandines, schéma issu du cours de Physiologie de Laurent Tiret, ENVA [116]. ........................................................................................................................................ 36 Figure 16 : Schéma récapitulant la synthèse des progestagènes, d’après le cours de Physiologie de Laurent Tiret à l’ENVA [116] ......................................................................... 38 Figure 17: Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des agonistes de GnRH utilisés comme contraceptifs. ............................................................................................................................ 41 Figure 18: Schéma représentant la régulation de la fonction de reproduction par la mélatonine, d'après Pet Informed, http://www.pet-informed-veterinary-advice-online.com/catin-heat.html [95] ....................................................................................................................... 48 Figure 19 : Eléphant d'Afrique femelle et de son jeune, http://education.francetv.fr/education-jeux/la-biodiversite-en-5questions/escales/voulons_elephantAfrique.html [80] ............................................................. 54 Figure 20: Éléphant de forêt femelle avec son éléphanteau, http://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/20101222.OBS5115/deux-especes-delephants-en-afrique.html [105] ............................................................................................... 54 Figure 21 : Un troupeau d'éléphants d'Asie, http://globe-nature.over-blog.com/article-lelephant-d-asie-une-espece-en-peril-52634306.html [17] ....................................................... 55 Figure 22 : Une femelle rhinocéros noir et son petit (les deux longues cornes caractéristiques de cette espèce sont bien observables ici,) http://iipdigital.usembassy.gov/st/french/publication/2012/12/20121203139445.html#axzz3xR A8VDr5 [74] ............................................................................................................................ 56 Figure 23 : Deux rhinocéros blancs, caractérisés par une couleur de tégument plus claire que celles des autres rhinocéros, http://cenozoicpark.emonsite.com/pages/holocene/rhinoceros-blanc.html [24] ........................................................ 57 Figure 24 : Un rhinocéros indien, http://www.cerza.com/objectif-rhino/ [25] ............ 57 Figure 25 : Un rhinocéros de Java, qui contrairement aux autres rhinocéros, vit dans la jungle, http://www.dinosoria.com/rhinoceros_java.htm [44] .................................................. 57 Figure 26 : Un rhinocéros de Sumatra, qui est caractérisé par la présence de poils sur son corps, http://www.manimalworld.net/pages/rhinoceros/rhinoceros-de-sumatra.html [85]58 4 Figure 27 : Schéma représentant le cycle de reproduction de l'ours brun, d'après le site du Pays de l'ours, http://www.paysdelours.com/fr/ours/ursus-arctos/reproduction.html [93] . 60 Tableau 1 : Tableau récapitulatif des recommandations faites pour les différentes espèces étudiées........................................................................................................................68 5 6 LISTE DES ABREVIATIONS UTILISEES ACC&D: Alliance for Contraception in CATS and DOGS ADN : Acide Désoxyribo-Nucléique AZA: Association of Zoos and Aquariums CL : Corpus Luteus, corps jaune en anglais DES : diéthylstilbestrol DIU : Dispositif Intra-Utérin DMSO: Di-Méthyl Sulf Oxyde EAZA: European Association of Zoos and Aquaria ENVA : Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort ENVT: Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse FSH: Follicle Stimulating Hormone GnRH: Gonadotrophin Releasing Hormone LH: Luteinizing Hormone MGA: Melen-Gestrol Acetate MPA : Medroxy-Progesterone Acetate PZP: Porcine Zona Pellucida RISUG : Inhibition Guidée Réversible du Sperme UCL : Université Catholique du Louvain ZAA: Zoo and Aquarium Association ZP: Zone Pellucide 7 8 INTRODUCTION [7][8][9][23][32][51][81] Depuis toujours les hommes sont fascinés par les animaux sauvages, comme l’attestent les descriptions de bêtes extraordinaires rencontrées au détour de fantastiques aventures, contées par les Anciens, ou comme en témoigne encore l’existence des ménageries. Dans un premier temps, comme l’enseigne l’encyclopédie Universalis,[51] regrouper des animaux rares ou sauvages dans les villes était un signe de puissance et de richesse. Puis cela devint une source d’amusement en approvisionnant les cirques de la Rome Antique en bêtes féroces, pour les combats de gladiateurs par exemple. Dans un même temps, dans l’Égypte des Pharaons, les ménageries servaient à garder les animaux sacrés, tels que les ibis, les babouins ou les hippopotames, utilisés pour les cultes des dieux. Jusqu’au XVIIIème siècle, les Grands de ce monde conservaient ainsi des animaux dans un but de divertissement et de démonstration. Ce n’est que lors de la fondation de la ménagerie du Jardin des Plantes à Paris en 1794, que naquirent véritablement les zoos modernes, dont le but était d’étudier scientifiquement des espèces rares, et ainsi d’en tirer des enseignements. Ce premier enseignement concerna d’abord la place de l’Homme dans le Monde, avec, entre autres, la recherche du « chaînon manquant », puis le monde animal en général. De nos jours, les zoos, et depuis quelques décennies, les parcs animaliers et les réserves, continuent à jouer un rôle pédagogique en présentant des espèces rares et étrangères au public. Mais en plus, depuis peu, avec le développement de la protection de l’environnement, ces centres doivent assurer la protection et la sauvegarde des espèces menacées de disparition. Cela passe naturellement par la reproduction des animaux vivant en captivité. Cependant, de tels centres ne disposent pas de superficies illimitées, en particulier, lorsqu’ils sont implantés dans des villes, et au vue des succès grandissant de l’élevage en captivité d’espèces sauvages, les zoos doivent veiller à ne pas se retrouver en surdensités animales. Cet aspect est d’autant plus d’actualité que le bien-être animal est devenu important. Le statut des animaux est rediscuté dans de nombreux pays, et c’est dans ce contexte que des travaux de rénovations ont été entrepris au zoo de Vincennes. On comprend ainsi l’importance particulière de la régulation de la fonction reproductrice, et de ce fait de la fécondité des animaux au sein de telles organisations, pour éviter le phénomène dit des « surplus » pouvant engendrer des situations de mal-être chez les pensionnaires. Le problème se pose également dans les parcs animaliers, car si une espèce devient trop représentée, cela peut aboutir à des conflits avec les populations autochtones, comme on peut le voir avec les éléphants en Afrique ou en Inde. L’autre situation qui peut en découler est la formation d’une espèce dite invasive, qui va proliférer au détriment des autres espèces (végétales et animales) déjà présentes, et détruire l’environnement traditionnel. 9 On comprend donc l’importance d’une régulation, dans l’intérêt des animaux euxmêmes mais également à plus large échelle dans l’intérêt de l’environnement. Cette régulation doit satisfaire à plusieurs critères comme par exemple [6]: - Contrôler efficacement le nombre de naissances - Contrôler le matériel génétique des petits pour maintenir la diversité génétique, et permettre un éventuel retour dans la nature - Être totalement et rapidement réversible en cas de besoin - Être abordable car utilisé en grandes quantités dans chaque centre, les animaux étant nombreux, et la plupart pesant plusieurs dizaines de kilogrammes. - Être facile à administrer, vu que des animaux comme les lions ou les éléphants sont difficilement manipulables et qu’il est inimaginable d’avoir recours quotidiennement à des anesthésies ou des tranquillisations. - Avoir le moins d’effets secondaires possibles, etc... Nous nous attacherons dans ce travail à étudier les moyens de réguler la fonction de reproduction de quelques espèces de Mammifères parmi les plus représentatives : les Félins (Lions, Tigres, Guépards et Panthères), les Éléphants, les Hippopotames, les Rhinocéros, les Ongulés (Buffles, Gazelles, Zèbres et Girafes), les Ursidés (Ours et Panda), les Canidés (Loups, Hyènes et Lycaons) et les Primates (Ouistitis, Orangs-Outangs, Gorilles et Chimpanzés). Nous nous concentrerons ici sur l’utilisation des moyens de contraceptions pour réguler la reproduction, mais il existe d’autres approches possibles, comme par exemple les collectes de semences associées aux banques de sperme ou d’ovocytes, que l’on pourra utiliser plus tard pour des inséminations artificielles, le déplacement des animaux dans des enclos plus grands appartenant ou non aux zoos, et enfin l’euthanasie des « surplus », comme ce fut le cas pour Marius, le girafon du zoo de Copenhague en 2014. Toutes ces techniques présentent des avantages et des inconvénients, et doivent être choisies en fonction du but recherché, et surtout du bien-être de l’animal. Dans un premier temps, nous étudierons la physiologie de la reproduction chez les Mammifères en général, puis nous établirons une liste la plus exhaustive possible des moyens de contraception pouvant exister, et enfin nous verrons quels sont les caractéristiques des cycles de reproduction et des modes de vie à prendre en compte pour chaque espèce précédemment citée, afin de définir les moyens de régulation les plus adaptés pour chacune d’entre elles. 10 PREMIERE PARTIE Physiologie de la reproduction des Mammifères [4][35][50][59][70][71][88][95][103][112][115][116][119][122][123] Tout être vivant doit pouvoir subvenir à trois besoins essentiels : se nourrir, se loger et se reproduire pour perpétuer l’espèce à laquelle il appartient. Dans ce but, certaines espèces ont opté pour la production d’un grand nombre de petits, alors que d’autres, dont les Mammifères, ont privilégié un plus petit nombre de descendants, dont les parents prennent grand soin, grâce au développement de l’instinct maternel et surtout de la viviparité, c’està-dire la gestation au sein-même du corps de la mère, d’une cellule-œuf initiale issue de la fécondation de deux cellules spécialisées dans la reproduction produites par chacun des parents. Cependant avant que les petits ne naissent, il y a un grand nombre d’étapes permettant de préparer la femelle à accueillir pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois, selon les espèces, sa descendance. Mais surtout, comme les Mammifères pratiquent la reproduction sexuée, il faut que les parents mettent en commun leurs gamètes (cellules haploïdes spécialisées dans la reproduction) au cours de la fécondation. Le mixage aléatoire des gamètes au cours de la fécondation permet de brasser le matériel génétique afin d’obtenir les descendants les plus performants possibles. Ces cellules particulières sont produites au cours de la gamétogénèse, dont les premières étapes débutent avant même la naissance. Pour élaborer cet exposé, nous nous sommes aidés des ouvrages intitulés « The life of Mammals » [70] [71], Biologie Licence, tout le cours en fiches, [103] La reproduction : gonades, gamètes et fécondation par Muller et Clos [88], et l’ouvrage de Thibault et Levasseur [115], ainsi que des cours de Physiologie et d’Histologie délivrés à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort [35] [116] et à l’École Nationale Vétérinaire de Toulouse [59]. 1- La gamétogénèse chez les mâles Chez les mâles Mammifères, la gamétogénèse produit des spermatozoïdes, au niveau des testicules, qui sont des organes ovoïdes limités par une capsule conjonctive fibreuse, blanc nacré, l’albuginée. Le tout est recouvert par la vaginale interne, qui est une émanation du péritoine viscéral. De l’albuginée partent des cloisons conjonctives divisant l’organe en trois cents lobules, convergeant vers le corps de Highmore. Dans chaque lobule sont regroupés 2 à 5 tubes séminifères, mesurant environ 250 micromètres de diamètre, pour un mètre cinquante de long. Mis bout à bout, les tubes séminifères forment un ruban de plus de 2 kilomètres, dans chaque testicule. Les tubes séminifères sont constitués par des éléments de soutien, les cellules de Sertoli, jouant des rôles multiples afin d’aider à la protection et à la maturation des spermatozoïdes, et les cellules germinales, qui se différencieront en spermatozoïdes. 11 En dehors de ces tubes, dans le tissu interstitiel se trouvent les cellules de Leydig, sécrétant les hormones sexuelles mâles, permettant l’expression des caractères sexuels secondaires, ainsi que l’initiation de la spermatogénèse. Les testicules des Mammifères ont la particularité d’être externalisées. En effet, il semblerait que la spermatogénèse soit impossible à la température du corps, qui serait trop élevée (d’où les problèmes de fertilité rencontrés actuellement chez les humains, suite à l’utilisation prolongée des ordinateurs portables, maintenus au niveau de leur pelvis). Cependant, quelques rares espèces, dont les éléphants, présentent des testicules internes, et non pas situés dans un diverticule du cœlome, protégeant les cellules reproductrices des variations environnementales, dont la température, et du sang de l’individu, pouvant transporter des substances ou des germes nuisibles au bon développement de ces cellules. De même qu’un grand nombre de fonctions au sein de l’organisme, la fonction de reproduction mâle, et en particulier la spermatogénèse, est sous contrôle de l’ensemble de l’axe hypothalamo-hypophysaire. Comme nous le reverrons dans la suite de notre développement plus en détails, les deux hormones principales sont la Luteinizing Hormone, LH, et la Follicle Stimulating Hormone, FSH. La spermatogénèse est un processus qui ne débute qu’à la puberté, bien qu’initiée lors de la vie fœtale, sous l’influence de l’augmentation de la sécrétion en Gonadotrophine Releasing Hormone, GnRH par l’hypothalamus. A ce moment, les cellules primordiales, appelées gonocytes vont donner les spermatogonies sous contrôle de la synthèse de FSH et de la testostérone produite par les cellules de Leydig. C’est ensuite un phénomène continu qui se déroule dans les tubes séminifères jusqu’à la mort de l’individu. Parmi les spermatogonies formées, on distingue les spermatogonies A qui restent en place en se multipliant intensément, sans se différencier, des spermatogonies B, qui donneront les futurs spermatozoïdes. La spermatogénèse commence à la périphérie du tube par la formation de spermatogonies, qui sont des cellules souches unipotentes, et se poursuit radialement de façon centripète. Ainsi les cellules les plus internes, les plus proches de la lumière, sont les cellules les plus matures. A la fin de ce processus, des spermatozoïdes immatures sont libérées dans la lumière des tubes séminifères. Les gamètes sont produits en vagues, appelées les ondes spermatogénétiques, ainsi à chaque segment du tube séminifère correspond un groupe de cellules de stade de maturation identique, les plus matures étant les plus proches et les plus distales, comme on peut le voir sur le schéma structurel de la figure 1. 12 La figure 1 ci-dessous permet d’illustrer les différentes étapes de la spermatogénèse. Figure 1 : Schéma et coupe transversale d'un testicule d'Humain afin de décrire dans l'espace les différentes étapes de la spermatogénèse, d'après le site VétoPsy, [123] La spermatogénèse comprend trois phases principales, plus une quatrième la spermiation, qui est l’étape au cours de laquelle les spermatozoïdes acquièrent leur pouvoir fécondant : 1) La phase de multiplication Au cours de cette étape, sous l’influence de la FSH, les spermatogonies se divisent par des mitoses successives pour donner des spermatocytes primaires I diploïdes. Seules certaines cellules issues de ces divisions vont poursuivre leur maturation, ce sont les spermatocytes B. Quant aux spermatocytes A, ils resteront en réserve pour des maturations ultérieures. 13 2) La phase de maturation Les spermatocytes I, diploïdes, venant d’être formés, subissent les deux divisions de méiose, ce qui conduit à la création de deux spermatocytes secondaires II, puis de quatre spermatides, haploïdes. A partir de ce stade et jusqu’à la spermiation, il y a formation d’une barrière hémato-testiculaire, constituée par un ensemble de jonctions serrées entre les cellules de Sertoli, ce qui protègent les gamètes en formation de l’influence du milieu extérieur. Ces gamètes sont alors sous le seul contrôle des substances paracrines produites par les cellules de Sertoli, dont en particulier, l’inhibine. Les cellules de Sertoli produisent également l’aromatase qui permet la conversion du cholestérol en testostérone, sécrétée par les cellules interstitielles de Leydig. La formation de cette barrière hémato-testiculaire associée à la modification de la perméabilité des jonctions serrées a lieu de façon cyclique, au moment de la période de reproduction. 3) La phase de différenciation Au cours de cette phase, les spermatides subissent un processus de modifications cytologiques, conduisant à leur différenciation en spermatozoïdes. Il s’agit de la spermiogénèse, qui consiste en la perte du cytoplasme, en la constitution d’un flagelle, d’une pièce intermédiaire et de l’acrosome, qui permettront les interactions entre les deux gamètes lors de la fécondation. Le schéma de la figure 2 ci-dessous retranscrit les modifications morphologiques subies par les cellules germinales mâles au cours de la différenciation. Figure 2 : Modifications morphologiques des cellules germinales mâles au cours de la spermatogénèse, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT 2007, [59] 4) La spermiation Cette étape consiste en la libération du spermatozoïde dans la lumière du tube séminifère, avec l’obtention d’une partie de ses capacités fécondantes. A ce moment, les spermatozoïdes sont à nouveau sous influence hormonale, de laquelle ils étaient protégés depuis le stade spermatocytes I grâce à la barrière hémato-testiculaire. Ensuite, les spermatozoïdes subiront l’étape de la capacitation au cours de leur trajet dans le tractus génital de la femelle, où ils seront baignés par différentes sécrétions, et par les glaires cervicales qui leur confèreront mobilité et pouvoir reproducteur. 14 Il existe une grande variabilité de forme de spermatozoïdes, mais tous sont constitués de deux parties bien distinctes : la tête et le corps. La tête comprend le nucléus, dans lequel se trouve le matériel génétique nécessaire à la production d’un nouvel individu. Cet ADN (Acide Désoxyribo Nucléique) est compacté, de sorte qu’il ne puisse pas interférer sur le métabolisme du spermatozoïde en lui-même. Le nucléus est recouvert par l’acrosome, formant une capsule protectrice. L’acrosome renferme un nombre important d’enzymes intervenant lors de la fécondation, et qui permettent de dissoudre l’enveloppe externe de l’ovocyte formée à ce moment uniquement par la zone pellucide. La queue du spermatozoïde est divisée en trois parties : le cou, la pièce intermédiaire, et le flagelle. Le flagelle permet au spermatozoïde de se mouvoir de façon rectiligne, en tournant sur son axe. Il peut atteindre la vitesse de 100 micromètres par seconde chez le taureau. Malgré toutes les capacités des spermatozoïdes, la vie d’un gamète mâle est très courte et variable d’une espèce à l’autre comme le montre le tableau de la figure 3 cidessous. Connaître ces durées de vie a une grande importance dans la mise en œuvre et l’organisation d’insémination artificielle. Figure 3 : Tableau récapitulatif des différentes durées de vie des gamètes après leur émission, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT 2007, [59] 15 Le sperme est très concentré en spermatozoïdes, avec seulement 10% de spermatozoïdes anormaux, qui ne pourront pas intervenir dans la fécondation de l’ovule. Ces concentrations sont variables d’une espèce à l’autre. C’est le mâle, via ses spermatozoïdes qui détermine le sexe des descendants, chaque spermatozoïde portant soit un chromosome sexuel X ou Y, les mâles étant XY, alors que les femelles sont XX. Cependant, il est impossible de distinguer un spermatozoïde X d’un spermatozoïde Y, sauf si on les code, mais cela empêcherait leur utilisation pour une éventuelle fécondation. L’injection d’un précurseur radioactif d’ADN a permis de montrer qu’il fallait au moins deux mois pour qu’une cellule somatique devienne un spermatozoïde efficace et soit éjecté dans le milieu extérieur (dans le meilleur des cas dans le tractus génital d’une femelle). 2- La gamétogénèse chez les femelles Chez les femelles, la gamétogénèse qui donne naissance à des ovocytes, a lieu dans les ovaires, qui sont deux structures, la plupart du temps ovoïdes, caudales aux reins, et présentant également une activité endocrinienne, avec la synthèse des œstrogènes et de la progestérone. Contrairement à ce qu’il se passe chez les mâles, chez les femelles Mammifères, les gamètes se forment avant la naissance de l’individu, et constituent un stock définitif de cellules germinatives qui pourront être utilisées à chaque cycle. Les cellules constituant cette réserve sont des ovogonies diploïdes. Au cours du développement embryonnaire de l’individu, ces ovogonies connaissent un grand nombre de mitoses successives qui augmentent leur nombre, et ce jusqu’au tiers de la gestation. Ensuite ces divisions cessent, et les ovogonies subissent les premières étapes de la première méiose. Elles deviennent alors des ovocytes primaires, diploïdes, et restent bloquées en prophase I jusqu’à la maturité sexuelle de la femelle. Ces ovocytes primaires s’entourent dès le départ de cellules somatiques se multipliant de façon spectaculaire. Cet ensemble constitue les follicules primordiaux, et agit comme un syncytium. Au moment de la maturité sexuelle, la FSH (Follicle-Stimulating Hormone) sécrétée par l’hypophyse sous l’influence de l’augmentation de la concentration en GnRH (Gonadotrophine Releasing Hormone) active le recrutement d’un certain nombre de follicules primordiaux, les autres étant voués à l’atrésie folliculaire. Ce recrutement a lieu par vagues successives, suivant la sécrétion pulsatile de la GnRH par l’hypothalamus. Les follicules recrutés sont caractérisés par un certain nombre de modifications structurelles. Tout d’abord, une zone pellucide de nature glycoprotéique se forme entre l’ovocyte et les cellules somatiques constituant un épithélium unistratifié appelé granulosa, on parle alors de follicule primaire. Ensuite les cellules folliculaires se multiplient jusqu’à former un épithélium pluristratifié, ce qui donne un follicule secondaire. Ce follicule est composé d’une thèque interne et d’une thèque externe, en plus de la granulosa. Les cellules de la thèque synthétisent différentes substances, dont les œstrogènes. Plus la thèque augmente et plus la synthèse d’hormone est importante, ce qui finit par provoquer la formation d’un antrum au sein du follicule. On parle alors de follicule à antrum. 16 Cette synthèse importante d’œstrogènes, associée à la synthèse par les cellules de la granulosa d’inhibine, va provoquer un rétrocontrôle négatif sur l’axe hypothalamohypophysaire, dont les sécrétions de facteurs endocriniens vont diminuer. C’est l’étape de la sélection. A ce stade, seuls les follicules les plus sensibles aux faibles taux encore présents de FSH vont pouvoir continuer à mûrir, les autres vont s’atrésier. C’est à ce moment que va s’achever la première méiose, puis se sera le début de la seconde division de méiose, qui aboutit à la formation d’ovocytes secondaires haploïdes, bloqués en métaphase II jusqu’à ce que les spermatozoïdes parviennent à traverser la zone pellucide. Cette étape s’accompagne de la libération de globules polaires qui ne seront pas impliqués dans la reproduction de l’animal. Ensuite, la concentration en œstrogènes étant de plus en plus importante, le rétrocontrôle au niveau de l’axe hypothalamo-hypophysaire va s’inverser, et les follicules à antrum vont devenir sensibles à la LH (Luteinising Hormone) grâce à la formation de récepteurs membranaires spécifiques. C’est sous l’influence de cette hormone synthétisée par l’hypophyse sous contrôle de la synthèse de GnRH par l’hypothalamus, que l’ovulation va être déclenchée. En outre, ce sont les concentrations en œstrogènes qui conditionnent les modifications comportementales observées lors de la période des chaleurs chez les femelles, telles que l’acceptation du chevauchement, la recherche de partenaires, les changements comportementaux ou encore la hausse de la température corporelle. Lors de l’ovulation, les enveloppes qui protégeaient l’ovocyte II venant d’être libéré, vont constituer le corps jaune, à l’origine de la sécrétion de progestérone, qui est l’hormone de la gestation. Sous son influence, le tractus génital de la femelle va se préparer à accueillir un futur embryon, et les cycles sexuels vont cesser jusqu’à ce que le petit soit autonome. La progestérone est également à l’origine du développement du tissu mammaire au cours de la gestation, afin de permettre la lactogénèse, qui est l’une des grandes caractéristiques des Mammifères. Le corps jaune est la principale source de progestérone chez les femelles, mais la LH, la prolactine et les œstrogènes peuvent également, chez certaines espèces, avoir une activité lutéotrophique. A partir de ces informations, on peut établir le profil hormonal suivant représenté par la figure 4 : Avant l’ovulation, le taux de LH est supérieur au taux de FSH, mais les cellules sont plus sensibles à l’action de la FSH que de la LH, c’est l’étape de la sélection. A ce moment, les cellules de la thèque produisent de l’œstrogène, d’où l’augmentation de sa concentration Juste avant l’ovulation, la concentration en œstrogène atteint un pic, qui va provoquer un inversement du rétrocontrôle négatif sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, à l’origine du pic de LH responsable de l’ovulation. Au moment de l’ovulation, il y a formation du corps jaune à partir des enveloppes de l’ovocyte, d’où production de progestérone, dont la concentration va rester élever jusqu’à la fin de gestation en cas de fécondation, où jusqu’à ce que le corps jaune soit lutéinisé sous l’effet des prostaglandines PGF2α sécrétées par l’utérus non gravide. 17 Figure 4 : Profil hormonal au cours du cycle sexuel chez la femelle Mammifère, d'après Gilles Furelaud et Bernard Calvino pour l’université Paris 6 Jussieu [119] 18 Un cycle sexuel correspond à la période séparant deux ovulations. On le sépare en quatre stades ainsi que l’illustre la figure 5 ci-dessous. Ces quatre phases sont: 1) Le pro-œstrus qui correspond à la période des chaleurs, c’est-à-dire le moment où la concentration en œstrogènes augmente, ce qui conduit à des modifications comportementales 2) L’œstrus pendant laquelle la femelle accepte l’accouplement, et au cours de laquelle se produit l’ovulation suite au pic de LH 3) Le métœstrus caractérisé par la présence de la progestérone produite par le corps jaune 4) L’anœstrus qui sépare deux œstrus, et au cours de laquelle l’activité sexuelle est basale. Figure 5 : Schéma représentant les différentes phases du cycle œstral en s'appuyant sur l'exemple du cycle œstral de la chienne, d'après le site VétoPsy, http://www.vetopsy.fr/chien/ethogrammechien/reproduction-chien/cycle-chienne.php [111] Le nombre de follicules libérés lors de l’ovulation varie d’une espèce à l’autre, mais en général, les plus gros animaux ne produisent qu’un ovule à la fois, chaque ovule étant libéré par un des deux ovaires, stimulés de façon alternée à chaque cycle. On distingue ainsi les espèces monotoques des espèces polytoques, qui libèrent plusieurs follicules lors de l’ovulation. De plus, le nombre d’ovules émis est souvent corrélé à la taille des portées chez les espèces polytoques. 19 3- L’appareil génital des Mammifères Jusqu’à présent nous n’avons parlé que des organes de la gamétogenèse, or, bien qu’essentiels, ils ne constituent qu’une petite partie de l’appareil reproducteur des Mammifères. Chez la femelle Mammifère, le tractus génital est formé sur le même modèle que chez les Vertébrés, c’est-à-dire une paire de canaux (constituant les canaux de Müller chez l’embryon) reliant la cavité cœlomique à l’extérieur. La particularité des Mammifères réside dans le développement au sein de ses canaux d’un utérus, pouvant être double chez certaines espèces, dont le but est d’accueillir et de nourrir le fœtus au cours de la gestation. De plus, ce clade dispose d’un organe dédié à la copulation : le vagin. En effet, l’un des problèmes de la vie sur Terre est l’absence d’un milieu de dispersion des gamètes, tel que l’eau pour les espèces aquatiques. Il a ainsi fallu développer un moyen pour que les ovocytes et les spermatozoïdes puissent se mélanger, sans avoir recours à l’eau. Chez les Mammifères, la solution a été trouvée en développant un système de clef-serrure, avec la modification d’une partie de la paroi du cloaque, ce qui a permis de constituer le pénis des mâles et le vagin des femelles. Ainsi, le tractus génital femelle est composé de quatre éléments : - Les organes de l’ovogénèse, les ovaires - L’oviducte et les cornes utérines constituant les voies génitales internes, et qui sont les lieux de la fécondation et de la gestation chez certaines espèces, dont les Carnivores. - L’utérus comportant un col plus ou moins étroit, un corps et deux cornes dans lesquelles se déroulent la plupart des gestations. - Les voies génitales externes constituées par le vagin, le clitoris, et la vulve. Cette partie peut selon les espèces avoir une portion commune avec le tractus urinaire. Bien que ces quatre éléments soient la structure de base pour toutes les femelles Mammifères, chaque espèce présente de grandes variabilités morphologiques, en particulier en ce qui concerne l’utérus. Ainsi, on en distingue quatre types principaux comme l’illustre la figure 6: - utérus duplex caractérisé par deux utérus distincts connecté à un seul vagin, et que l’on rencontre par exemple chez la lapine et la ratte, où le lien se fait via deux cols, ou chez la souris où seul un col utérin permet de relier les cornes au vagin. - utérus bipartite ou bipartitis, caractérisé par un seul col, un seul corps et deux cornes assez longue, et que l’on retrouve chez les Carnivores et les Ruminants - utérus bicornis, où le corps et les cornes utérines sont, à peu près, de même longueur, et qui est caractéristique des Equidés - utérus simplex où l'utérus est entièrement soudé et les cornes utérines n'existent pas, comme c’est le cas chez la femme. 20 Figure 6 : Schéma des différents types de tractus génital femelle pouvant être identifiés chez les Mammifères, d'après le site internet Vétopsy, http://www.vetopsy.fr/anatomie/systeme-genital/uterus.php [123] Chez le mâle, de même que chez la femelle, l’appareil génital dérive de deux cordons, qui lors du développement embryonnaire sont les canaux de Wolff, issus du pronéphros, dont la différenciation est sous influence de la testostérone produite sous contrôle des gènes présents sur le chromosome Y, dès la septième semaine de vie. Ces canaux de Wolff dérivent ensuite pour donner trois types de structures : - - 21 Les testicules, lieu de la spermatogénèse Les voies testiculaires qui stockent et transportent les spermatozoïdes jusqu’au sinus uro-génital. Ces voies comprennent les canaux efférents, l’épididyme, et le canal déférent. La section uro-génitale du tractus, composée du pénis et de l’urètre, permettant le transport du sperme à l’extérieur de l’organisme lors de l’accouplement. La figure 7 ci-dessous permet de représenter ces éléments en place chez un chien. Figure 7 : Vue en place de l'appareil reproducteur mâle chez un chien, d'après CynoDog, l'école des métiers du chien, http://cyno.net/Reproduction-male-femelle-chien-chienne.html [50] Après avoir été produits dans les tubes séminifères, les spermatozoïdes rejoignent l’épididyme, dans lequel ils vont mûrir au fur et à mesure de leur avancée ; les gamètes les plus matures se trouvant dans la tête de l’épididyme. Dans cette portion des voies testiculaires, il va y avoir réabsorption des liquides et sécrétion de protéines par le corps de l’épididyme, ainsi que phagocytose des spermatozoïdes morts ou anormaux, ce qui va conduire à l’élaboration d’une première sécrétion spermatique. 22 Ensuite, à cette première sécrétion vont s’ajouter les produits des différentes glandes annexes, dont la prostate, ce qui contribuera à la production de sperme, évacué vers les voies génitales femelles au moment de l’éjaculation, au cours du coït. La figure 8 ci-dessous permet de représenter le parcours suivi par les spermatozoïdes, depuis leur formation dans les tubes séminifères des testicules, suivie par l’élaboration du sperme à partir des sécrétions des glandes annexes, jusqu’à son éjaculation par l’urètre situé au sein du pénis. Figure 8 : Anatomie structurelle de l'appareil génital mâle chez le Chien, d'après Vétopsy, http://www.vetopsy.fr/anatomie/systeme-genital/corps-caverneux-os-penien.php [123] 23 4- La fécondation : rencontre entre les deux gamètes et deux partenaires La fécondation consiste en la fusion de deux gamètes haploïdes issus de parents de sexes opposés afin d’obtenir une cellule-œuf diploïde à l’origine d’un nouvel individu. Elle a lieu lorsque la femelle est en œstrus, au cours d’un coït, se déroulant au moment le plus propice aux deux gamètes. En effet, tout tend à provoquer la fusion du spermatozoïde et de l’ovule lorsque les deux seront au maximum de leurs capacités fécondantes, et que toutes les chances seront réunies de former un nouvel individu. Pour ce faire, tout d’abord, il y a la période de reproduction, ou saison des amours, au cours de laquelle une compétition s’engage pour désigner les partenaires les plus remarquables aux yeux de la femelle en œstrus. Cette manifestation limitée dans le temps, via la sécrétion pulsatile de GnRH, est sous contrôle des stéroïdes sexuels : œstrogènes pour les femelles et testostérone pour les mâles, mais également d’autres facteurs qui serviront de signaux de communication, tels que les odeurs, les phéromones, les sons, ou encore la vision. Les odeurs et les phéromones sont sécrétées dans la salive, comme chez le cochon par exemple, dans les urines et les fèces, qui servent alors aussi à marquer le territoire comme chez les Félins, ou encore dans les sécrétions vaginales. Ces signaux sont captés par la muqueuse nasale, au niveau des capteurs olfactifs, mais aussi par l’organe voméro-nasal lorsqu’il est présent, comme chez les Equidés ou les chats, chez qui on peut observer le signe du Flehmen. En ce qui concerne les sons, on peut noter le brahme du cerf, ou les barrissements de l’éléphante, audibles par des mâles situés jusqu’à douze kilomètres de là ! Pour ce qui est de la vision elle englobe l’ensemble des modifications morphologiques au moment de la période de reproduction ainsi que l’ensemble des caractères sexuels secondaires, qui permettent chez les Mammifères de distinguer assez facilement les mâles des femelles ; la crinière du lion est un exemple assez typique, son développement est sous contrôle de la testostérone. Tous ces signaux permettent de rapprocher les partenaires au bon moment, certaines études récentes montrent qu’en plus, ils viseraient à rassembler deux individus dont le mélange des gènes donnera le meilleur résultat possible. Après cette première phase, dite phase d’attraction au cours de laquelle les partenaires se sont choisis, la deuxième phase de la fécondation est la phase précopulatoire correspondant à l’expression de la motivation sexuelle des deux individus. A ce moment, le mâle comme la femelle présentent une activité importante dans le but d’établir un contact. Cependant, chez les Ongulés, l’immobilité seule revêt une signification sexuelle, l’œstrus étant défini par la période au cours de laquelle la femelle accepte le chevauchement. L’importance de ce signal visuel explique des réactions qui apparaissent comme des aberrations sexuelles (chevauchement d’objets inanimés). Il est à l’origine de la facilité d’obtention de réponses sexuelles pour la collecte de sperme en utilisant comme « boute en train » un leurre inanimé. 24 Après tous ces efforts, vient l’accouplement à proprement parler. L’acte sexuel se déroule avec des modalités différentes en fonction des espèces selon leurs particularités anatomiques, les modalités de déclenchement de l’éjaculation, le lieu de dépôt et le volume de sperme éjaculé. Dans tous les cas, l’objectif est que du sperme soit déposé au contact ou directement à l’intérieur des voies génitales femelles. A partir de là, les spermatozoïdes devront mener une véritable course d’obstacles et d’endurance pour atteindre l’ovocyte à féconder dans l’oviducte. Le premier de ces obstacles est le vagin, qui est un milieu hostile en raison de l’acidité de ses sécrétions (pH compris entre 3.5 et 4.5), les spermatozoïdes ne pourront y survivre qu’une à deux heures. En période ovulatoire, grâce à la glaire cervicale légèrement basique et au col un peu plus relâché sous l’influence des œstrogènes, le milieu est un peu plus favorable au déplacement des gamètes mâles. Grâce à leur flagelle mobile leur conférant un déplacement circulaire autour de leur axe, les spermatozoïdes gagnent le col de l’utérus, et de là l’intérieur même de cet organe. Cependant, ils doivent échapper aux replis très importants de la muqueuse, et ne pas se perdre dans ses enchevêtrements. Un pour cent des spermatozoïdes déposés dans le vagin parviennent à pénétrer dans l’utérus. Ensuite, une fois dans l’utérus, sous contrôle des prostaglandines contenues dans le sperme, des contractions du myomètre, en plus des mouvements des cils tapissant la muqueuse, aident la progression des gamètes mâles, qui grâce aux sécrétions du tractus génital femelle, subissent le phénomène de la capacitation. Cette étape, spécifique aux Mammifères, est nécessaire pour que les spermatozoïdes acquièrent leur pouvoir fécondant. La capacitation fluidifie leur membrane, jusqu’à libérer l’acrosome dans la partie la plus haute de l’oviducte, ce qui met à nu les sites de reconnaissance de l’ovocyte. Dans l’oviducte, le flagelle des spermatozoïdes, sous l’influence de flux calciques traversant l’appareil génital femelle, est animé par des mouvements en coups de fouet, permettant aux survivants d’atteindre enfin l’ovocyte. Sur plusieurs centaines de millions de spermatozoïdes éjaculés, seuls quelques centaines parviennent jusqu’à l’ovocyte, les chiffres varient d’une espèce à l’autre, comme on peut le voir dans le tableau de la figure 9, mais à chaque fois les pertes sont énormes. En outre, bien que chaque spermatozoïde soit fécondant, il semblerait qu’il soit nécessaire qu’il y en ait plusieurs autour de l’ovocyte pour que la fécondation réussisse. 25 Figure 9 : Tableau des pertes en spermatozoïdes depuis leur éjaculation jusqu'à leur arrivée près de l'ovocyte chez différentes espèces de Mammifères, d'après le cours de Physiologie de la Reproduction de l'ENVT, 2007, [59] De son côté, après l’ovulation, l’ovocyte a été conduit de l’ovaire, où il a été produit, à la partie haute de l’oviducte, grâce aux mouvements des cellules ciliées recouvrant la muqueuse. A son arrivée dans cette région, l’ensemble de l’oviducte est parcouru par de violentes contractions, achevant la désintégration de la zone pellucide et des thèques protégeant encore l’ovocyte, initiée par la réaction acrosomiale. Ainsi à leur arrivée dans la partie haute de l’oviducte, les récepteurs à la surface des spermatozoïdes et de l’ovocyte sont mis à nu, ce qui va permettre le contact entre les deux gamètes. Lorsque les spermatozoïdes entrent enfin en contact avec le gamète femelle, ils deviennent très actifs, et sont gagnés par des mouvements rotatifs rapides de la tête, ce qui leur permet de traverser l’amas visqueux des cellules folliculaires entourant encore l’ovocyte. Les spermatozoïdes s’engagent alors à travers les espaces intercellulaires composés d’acide hyaluronique en quelques minutes, grâce à la hyaluronidase présente sur leur membrane. A ce stade, il ne reste plus qu’une dizaine de gamètes mâles. La zone pellucide est composée de glycoprotéines fibrillaires les ZP1, ZP2 et ZP3. La fixation du spermatozoïde n’est possible que s’il possède des sites de reconnaissance spécifiques de ces glycoprotéines. Cela permet d’éviter les fécondations inter-espèces, et donc d’empêcher la naissance d’éventuels hybrides. La fixation du spermatozoïde vainqueur à la zone pellucide via les glycoprotéines ZP a lieu après la réaction acrosomique. Cet arrimage provoque la libération de granules corticaux par l’ovocyte, à l’origine d’un rejet d’eau dans l’espace périvitellin et du masquage des sites de reconnaissance avec les spermatozoïdes. Cette réaction empêche la polyspermie en formant une membrane de fécondation imperméable, en plus du brusque inversement de potentiel qui la précède, et qui va tuer les spermatozoïdes encore présents. La figure 10 ci-dessous permet de représenter les différentes étapes que nous venons de traiter. On peut constater que le phénomène de la fécondation est le même pour tous les Mammifères, mais chaque étape n’a pas lieu exactement au même moment, et ne prend pas le même temps. 26 Figure 10 : Schéma représentant les étapes de la fécondation avec les échéances pour plusieurs espèces de Mammifères, d'après le site internet du Lycée de Malherbe à Caen, http://lcs.malherbe.lyc14.ac-caen.fr/~dupin/dossiers/terminale/docs/fecondation.htm [47] La libération des granules corticaux lors de l’entrée en contact des deux cellules germinales réactive le métabolisme de l’ovocyte II, qui reprend alors sa méiose pour donner un ovule. Ensuite, les pronucléi des deux gamètes fusionnent, et c’est le début de l’embryogénèse à l’origine de la formation d’un tout nouvel individu, composé de la moitié du matériel génétique de ses deux parents. 5- Facteurs pouvant influencer la fonction de reproduction Le contrôle de la fonction de reproduction a pour but, tout d’abord, d’assurer un bon fonctionnement du système reproducteur de l’individu, afin qu’il puisse s’associer à un individu de sexe opposé, permettant d’obtenir des descendants avec un brassage génétique optimal pour s’adapter au mieux aux besoins de l’évolution des espèces ; mais le contrôle de la reproduction doit aussi permettre de soutenir le jeune jusqu’à ce qu’il devienne totalement autonome. Afin de décrire cette régulation physiologique nous avons fondé notre étude sur le chapitre 51 de The life of Mammals [70] ainsi que sur chapitre 7 de Wild Mammals in captivity [5]. Ainsi la production de gamètes ne représente qu’une infime partie de l’activité reproductrice, bien que ce soit sur cette phase de la reproduction que la régulation endocrinienne est la plus importante. Chez les Mammifères, un grand nombre d’actions, que l’on associe généralement au comportement maternel, ont pour but d’améliorer les chances de survie des jeunes. Chez ce clade, la société, la famille et l’individu sont étroitement liés. 27 Pour la plupart des Mammifères sauvages, le cycle de reproduction est saisonnée, afin que la naissance des petits ait lieu au moment le plus favorable à leur développement initial. Il s’agit d’une première échelle de régulation, mettant en jeu le système endocrine et le système nerveux. De plus, en communiquant entre eux, les individus peuvent connaître le sexe, le moment du cycle, et s’ils sont des partenaires appropriés pour se reproduire et perpétrer l’espèce. Cette communication inter-individus est assurée par les 5 sens, mais aussi par le développement lors de la maturité sexuelle des caractères sexuels secondaires, sous le contrôle des hormones de la reproduction. Or, comme pour la plupart des régulations endocriniennes, le contrôle de la fonction de reproduction est effectué par l’encéphale, et plus précisément par l’axe hypothalamo-hypophysaire via un système complexe et finement réglé de rétrocontrôles positifs ou négatifs selon le moment du cycle, et le messager hormonal. Ainsi la première étape de la régulation de la fonction de reproduction est la synthèse par l’hypothalamus d’une hormone peptidique la « Gonadotrophine Releasing Hormone » (GnRH), qui va ensuite agir au niveau de l’hypophyse. C’est sous l’influence de la GnRH que la puberté débute, ou que le cycle sexuel est réactivé au moment de la période des amours. Ensuite, au niveau de l’hypophyse, deux gonanodropines vont être sécrétées sous l’influence de la sécrétion pulsatile de GnRH : la « Luteinising Hormone » (LH) et la « Follicle-Stimulating Hormone » (FSH). La FSH est la première à intervenir sur les organes de la gamétogénèse, qu’elle stimule. Ensuite, la LH intervient en stimulant la synthèse des hormones sexuelles à partir du cholestérol, transformé par une enzyme avec une activité aromatase (c’est la stéroïdogénèse), mais aussi en intervenant dans la maturation des follicules au moment de la sélection et de la dominance. C’est aussi l’hormone responsable de l’ovulation chez les femelles. Ainsi, pour une reproduction efficace, les deux gonadotropines sont nécessaires. D’ailleurs l’exemple de la théorie des deux cellules pour la synthèse des stéroïdes ovariens émise pour la première fois par Fortune en 1981, puis reprise en 1986 par Liu et Hsueh [83], et en 1994 par Hillier et al.[69], illustre parfaitement l’action complémentaire des régulations par l’axe hypothalamo-hypophysaire sur le cycle reproducteur. D’ailleurs en 2011 Gohin et son équipe ont envisagé un troisième intervenant dans cette régulation, qui deviendrait alors « la théorie des trois cellules » [62]. Dans le follicule secondaire, les cellules de la thèque interne réagissent à la LH et peuvent grâce à leur activité aromatase convertir le cholestérol en androgènes. Sous l’influence de la FSH, les cellules de la granulosa transforment ces androgènes en œstrogènes, qui ont un rétrocontrôle sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, et donc sur la synthèse de la LH et de la FSH comme on peut le voir sur la figure 11 ci-dessous. 28 Figure 11 : Schéma de la régulation de l'activité sexuelle femelle par l'axe hypothalamohypophysaire d’après le site Veterinary Online [http://veterinary-online.blogspot.fr/2012/12/sexual-cyclein-animals-reproductive.html] [122] Mais les facteurs endocriniens ne sont pas les seuls à agir sur la fonction de reproduction. En effet, le milieu extérieur joue aussi un rôle majeur, et si les conditions ne sont pas favorables, les taux de fécondité et de fertilité des individus peuvent s’effondrer. Par exemple, la durée de l’ensoleillement au cours de la journée va déterminer l’entrée en chaleurs des femelles des espèces saisonnées ainsi que la reprise de la spermatogénèse chez les mâles. Cela serait dû d’après Goldman et Nelson (1993) [63] et Demas et al. en 1996 [40], aux informations reçues et analysées par la glande pinéale, à l’origine de la sécrétion de mélatonine. Les températures extrêmes influencent aussi la glande pinéale, et peuvent supprimer les cycles sexuels, comme l’a montré Sod-Moriah en 1971 [111]. 29 Un autre facteur important à prendre en compte, en particulier dans une démarche d’élevage d’animaux en captivité, est la vie en société, bien que la socialité soit très variable d’une espèce à l’autre. Vandenbergh a ainsi démontré en 1983 [120] que via la synthèse de phéromones, les individus vivant en groupe avaient des cycles sexuels liés, cela se retrouve quand dans un enclos, on introduit un mâle, ce qui va alors provoquer l’apparition d’un comportement œstral et une activité ovarienne chez les femelles de cet enclos. De même, la hiérarchie sociale est très importante à respecter chez certains Mammifères. Les effets du stress sur la reproduction des Mammifères ont été étudiés par Whirledge et Cidlowski en 2010 [127], et ils ont pu déduire de leurs recherches que les glucocorticoïdes intervenaient à différents niveaux de l’axe de régulation de la fonction de reproduction, en provoquant des effets délétères sur l’individu lui-même, mais aussi sur sa descendance. La même chose s’observe en cas de surpopulation, comme ont pu le montrer Christian en 1980 [29] dans des expériences menées in vitro, et Wielebnowski et al en 2002 [128] puis Fanson et Wielenowski en 2013 [55] sur des lynx vivant en captivité. On comprend ainsi l’intérêt de réguler la reproduction des animaux maintenus en captivité, afin de ne pas arriver à des situations indésirables pour le cas, entre autres, de surpopulation. Au terme de cette présentation de la physiologie de la reproduction, on peut retenir qu’il s’agit d’un phénomène complexe, multifactoriel et sur lequel de nombreux éléments peuvent agir. Cette dernière information est importante à garder en mémoire pour l’étude de la régulation de la fonction de reproduction. Nous allons maintenant examiner dans une deuxième partie les différentes techniques de régulations à notre disposition et observer les éléments sur lesquels elles agissent. 30 DEUXIEME PARTIE : Les différents moyens de contraception disponibles [1][2][3][5][6][21][33][42][48][49] La contraception est la prévention délibérée de la conception et de la gestation d’un animal. Il existe de nombreux moyens possibles, agissant à différents moments de la reproduction, et sur différents éléments du système reproducteur. Ainsi la contraception est un véritable outil pour les personnes gérant des animaux en captivité, mais c’est également un élément à discuter et à analyser très précautionneusement avant de le mettre en œuvre. En effet, selon le but recherché, on ne choisira pas la même méthode de contraception : souhaitons-nous un arrêt définitif de la reproduction, ou seulement une pause, en attendant de trouver le partenaire idéal ? Souhaitons-nous seulement diminuer l’agressivité d’un animal ? Souhaitons-nous regrouper des individus de sexes opposés sans obtenir de petits ?... Il est nécessaire de pouvoir répondre à toutes ces interrogations, et plus encore, avant de pouvoir choisir la méthode la plus adaptée possible. Ce choix devra aussi prendre en compte les contraintes liées à l’utilisation de chacune des méthodes, afin de pouvoir évaluer le bénéfice par rapport aux risques éventuels. Cette deuxième partie se veut dans ce contexte établir une liste, la plus exhaustive possible, des différentes méthodes envisageables, en fonction de leur modalité d’action, avec leurs avantages et leurs inconvénients. Pour la réaliser nous nous sommes appuyés sur les travaux de Cheryl Asa et d’Ingrid Porton dans Wild Mammals in Captivity [5] et dans Wildlife Contraception [6], ainsi que sur les travaux antérieurs de Cheryl Asa [2] [3] [4]. Les modalités d’action et les effets secondaires des molécules suivantes ont pu être observés d’abord chez les animaux, lors de la mise au point des différents contraceptifs étudiés, puis chez les femmes. Ainsi les informations de l’exposé suivant concernent indifféremment les femelles et les femmes, sauf lorsque la distinction est faite. 1- Œstrogènes Les œstrogènes sont les hormones sexuelles produites par les ovaires des femelles. Ce sont des dérivés du cholestérol, qui a subi l’action de l’aromatase, grâce aux sécrétions combinées des cellules de la thèque et de la granulosa, comme nous avons pu le voir plus haut avec la théorie de la double cellule de Fortune. C’est cette hormone qui est responsable du comportement des femelles lors de l’œstrus où sa concentration est maximale. Ce sont les chercheurs Bowen, Olson, et Behrendt, qui en 1985 [18], se sont pour la première fois penchés sur les caractéristiques des œstrogènes dans le but de les utiliser comme contraceptifs pour les chiens. En effet, ainsi que l’illustre le schéma de la figure 12 à la page suivante, les œstrogènes ont la capacité d’inhiber la synthèse de FSH, et donc d’empêcher la stimulation de l’appareil reproducteur, aussi bien chez les mâles que chez les femelles, et chez ces dernières ils agissent directement sur le développement du follicule dominant, qu’ils inhibent. Ainsi, en l’absence de follicule de De Graaf réceptif au pic de LH, l’ovulation n’a pas lieu, et la femelle est stérile. 31 Cependant, comme la majorité des moyens de contraceptions, les œstrogènes (utilisés sous la forme de comprimés oraux), sont presque exclusivement utilisés chez les femelles. Mais leur utilisation chez les animaux restent très limitée à cause des nombreux effets secondaires qu’ils génèrent, comme ont pu le mettre en évidence Wright et Johnson [130]. Ces troubles, liés à l’utilisation des œstrogènes en tant que contraceptifs, consistent en particulier en des cancers mammaires, des ovaires ou de l’utérus, des pseudo-gestations en particulier chez les Canidés, et une hypertrophie de la muqueuse utérine, à l’origine d’une perte d’élasticité pouvant provoquer des dystocies. Les contraceptifs à base d’œstrogènes restent cependant utilisés chez les Canidés afin d’empêcher l’implantation suite à une fécondation non désirée. Mais cet usage doit rester exceptionnel au vu des nombreux effets secondaires induits par cette hormone. Figure 12: Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des œstrogènes utilisés comme contraceptifs. 32 Les contraceptifs à base d’œstrogène les plus courants sont : - Le diéthylstilbestrol (DES) composé en majorité d’œstradiol, qui est l’œstrogène naturellement synthétisé par l’ovaire, associé à un groupement éthinyl en position 17, afin d’améliorer l’absorption de la molécule par l’organisme. Il s’agit de la présentation la plus répandue. On le retrouve dans le DISTILBENE®, qui est une spécialité humaine commercialisée en France [125]. - Le mœstranol qui est converti en éthinyl œstradiol par l’organisme. On le retrouve dans le NORINYL© ou dans l’ORTHO-NOVUM© commercialisés au Canada et aux États-Unis par les laboratoires Janssen et Pfizer [49]. - Le benzoate d’œstradiol distribué par le laboratoire vétérinaire MSD [87]. - Le cypionate d’œstradiol que l’on retrouve dans le DEPO®-ESTRADIOL commercialisé aux États-Unis par le laboratoire Pfizer [97]. 2- Progestagènes Comme le décrivent Wright et Johnson [130] les progestagènes sont des composés synthétiques, qui ont été créés à partir de l’éthistérone, un dérivé de la testostérone. Les éléments utilisés comme contraceptifs sont de deux types principaux : les estranes qui sont des dérivés de la 19-nortestostérone et les gonanes qui sont les dérivés des estranes, portant un groupement éthyl en position 13, ces dernières ont une plus forte activité progestagénique que les estranes, mais leurs propriétés androgéniques sont réduites [42]. Il existe également un troisième type de progestatifs, les dérivés de la 17hydroxyprogestérone, les prégnanes, parmi lesquelles on retrouve l’acétate de médroxyprogestérone (MPA en anglais), commercialisée en France par le laboratoire ZOETIS sous le nom de DEPO-PROMONE® [98]. Ces molécules, dont les formules semi-développées [21] [42] sont représentées à la figure 13, constituent les principes actifs des pilules contraceptives à destination des femmes, et peuvent directement être utilisées chez les femelles Mammifères. 33 Figure 13 : Formules semi-développées de la progestérone et des différents progestagènes, d'après le site du département des sciences pharmaceutiques de l'UCL-Bruxelles, [http://www.farm.ucl.ac.be/Benin/pharmacologie-speciale/7-systemes-endocriniens/7-05andro_estro_progestogenes.pdf] [21][42] Les estranes sont des contraceptifs de première génération et comprennent la noréthistérone, la noréthindrone utilisée dans des comprimés à administration quotidienne tels que « Micronor ®» distribués par Ortho-McNeil, l’éthynodiol diacétate, la lynestrénol, et la noréthynodrel [98][125]. Les gonanes quant à elles sont divisées en deux catégories : les progestagènes de deuxième génération, dont font partie la lévonorgestrel utilisée dans les implants « Norplant® » et « Jardelle ®» distribués par Wyeth-Ayerst, et la norgestrel utilisée dans les comprimés « Ovrette® » distribués par Wyeth-Ayerst, et les progestagènes de troisième génération que sont la désogestrel, la gestodène, et la norgestimate [125]. 34 Les propriétés contraceptives des progestagènes ont été mises en évidence en 1967, par Rathmacher [102] à partir de différentes observations réalisées sur des animaux sauvages et de laboratoires gravides ou non. La progestérone, et ses dérivés synthétiques, les progestagènes, inhibent le pic de LH nécessaire au déclenchement de l’ovulation, ainsi que l’illustre la figure 14 ci-dessous. Ce sont les molécules les plus utilisées pour la contraception des animaux comme nous le reverrons dans la troisième et dernière partie de cet exposé. De plus, comme l’ont montré Coleman, Bartol et Riddel [31] dans leurs travaux sur les bovins domestiques en 1990, et Stevenson et al. en 1989 [113], l’utilisation des progestagènes permet de synchroniser les chaleurs et donc les cycles des vaches, pour optimiser le travail des éleveurs. Figure 14 : Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des progestagènes utilisés comme contraceptifs. 35 Le problème, comme l’a mis en évidence Croxatto en 1985 [37], est que l’inhibition de l’ovulation par les progestagènes (qui est l’effet recherché) ne se fait qu’à fortes doses ; ainsi l’œstrus peut donc toujours être présent chez les animaux ayant reçu un traitement contraceptif à base de progestagènes. A des doses plus faibles, les propriétés contraceptives des progestagènes concernent d’autres niveaux de l’axe reproducteur. Ces propriétés ont pu être démontrées par Brache, Faundes et Johannson en 1985 [19]. Ainsi, il a été montré que les progestagènes ont des effets mécaniques en rendant la glaire cervicale plus épaisse, ce qui rend le passage des spermatozoïdes presque impossible, comme c’est le cas lors de fécondation en dehors des chaleurs. Ils interrompent également le transport de l’ovocyte et des spermatozoïdes via leur action sur les prostaglandines. Ce phénomène s’expliquerait ainsi. La progestérone empêche les contractions utérines en maintenant la stabilité électrique membranaire des cellules du myomètre. Quant aux prostaglandines, au contraire, elles stimulent la formation de potentiels d’action, dont elles augmentent également la fréquence, induisant les contractions. Or, la progestérone inhibe la synthèse des prostaglandines selon le mécanisme décrit dans la figure 15 ci-dessous, et ainsi elle inhibe les contractions du myomètre, ce qui arrête la progression des gamètes. [116] Figure 15 : Schéma représentant le mécanisme selon lequel la progestérone inhibe la synthèse des prostaglandines, schéma issu du cours de Physiologie de Laurent Tiret, ENVA [116]. Actuellement de nouvelles recherches sont faites afin de synthétiser des progestagènes présentant moins d’affinités pour des récepteurs autres que les récepteurs de la progestérone. En effet, selon la molécule dont ils sont tirés, les progestagènes voient leur capacité à reconnaître les récepteurs devenir moins précise, d’où des affinités « parasites » avec d’autres récepteurs que ceux dont la stimulation est recherchée. [6] 36 En effet, ces affinités pour les récepteurs stéroïdiens, en particulier les récepteurs de glucocorticoïdes, des androgènes et de l’hormone de croissance, sont responsables des effets secondaires indésirables souvent observés lors de contraception avec des progestagènes, comme l’ont montré Fekete and Szeberenyi 1965 [56], Kloosterbœr, VonkNoordegraff and Turpijn 1988 [77], et Selman et al. 1997 [107]. Voici quelques exemples des effets secondaires couramment observés et recensés dans la revue de Gray et de Cameron en 2010 [64]: - L’acétate de mélengestrol (MPA), dont la structure présente des propriétés similaires aux sucres de part ses nombreux groupements méthyls, augmente les seuils de corticoïdes d’où des troubles dans le métabolisme du glucose, et il présente également une activité androgènique de type dihydrotestostérone d’où l’observation d’effets morphologiques, avec une masculinisation des femelles, comme l’ont rapportés Seal et al. en 1997 [106] et Gray et Cameron dans leur revue en 2010 [64]. L’acétate de mélengestrol est commercialisé par le laboratoire Vétoquinol, sous le nom de MEGECAT® [123]. - Le levonorgestrel a une très grande affinité pour les récepteurs des androgènes d’où un risque sur la santé à cause de ses effets sur les lipides, dont les structures sont similaires, et le système cardiovasculaire comme l’a montré Sitruk-Ware en 2004 [110]. Le levonorgestrel se retrouve dans les pilules contraceptives humaines, connues sous le nom de MINIDRIL®, LUTÉAL GÉ®, LEELOO GÉ® commercialisées en France [98]. - Chez certaines espèces la supplémentation en progestagènes est à l’origine du maintien de la gestation, ou d’une résorption embryonnaire quand elle est administrée lors de l’œstrus ainsi que l’ont démontré Diskin and Niswender en 1989 [45] et Shirley, Bundren et McKinney en 1995 [108]. - En supprimant la contractilité des fibres musculaires lisses du myomètre, les progestagènes peuvent aussi être à l’origine de dystocie, empêchant le part au terme de la gestation. C’est ce qu’ont pu conclure de leurs études les équipes de Jarosz et Dukelow en 1975 [75], de Plotka et Seal en 1989 [99] et de Patterson et al. en 1989 [92]. - Selman, Mal et Rutteman [107] ont montré dans leurs recherches en 1997 que les progestagènes interféraient avec le métabolisme du glucose, d’où une prise de poids chez certains patients. Ces effets sur les métabolismes du glucose et des lipides peuvent s’expliquer par le mode de synthèse de la progestérone et des progestagènes, qui est intimement lié à ces deux molécules ainsi que le montre la figure 16 ci-dessous. En cas de dysfonctionnement, ou d’affinité non sélective pour des récepteurs, les progestagènes peuvent ainsi être à l’origine de toute une chaîne de signalisation intervenant sur des mécanismes bien éloignés de la fonction de reproduction.[42] 37 La synthèse de la progestérone se fait à partir du cholestérol : sous l'influence d'une desmolase, le cholestérol est transformé en prégnénolone qui, sous l'influence d'une déshydrogénase, nommée 3’’ –OH déshydrogénase à la figure 16, et d'une isomérase, donne la progestérone. Ensuite, le catabolisme de la progestérone s'effectue essentiellement dans le foie où, sous l'influence de plusieurs enzymes, elle est transformée successivement en prégnanedione, prégnanolone et enfin prégnanediol. La progestérone est elle-même un intermédiaire métabolique pouvant conduire à la testostérone, l'aldostérone entouré en vert sur la figure 16, et au cortisol entouré en rouge sur la figure 16. Le cortisol appartenant aux glucocorticoïdes, il intervient dans le cycle du glucose. [42] Figure 16 : Schéma récapitulant la synthèse des progestagènes, d’après le cours de Physiologie de Laurent Tiret à l’ENVA [116] Cependant les progestagènes n’ont pas d’effets délétères sur la lactation ou sur le développement du jeune, comme l’ont mis en évidence Diskin et Niswender en 1989 [45] et l’équipe de Labussière lors de leurs expériences sur la lactation de la brebis Lacaune en 1996 [79], puis Truitt et al. en 2007 [117]. Pour parer ces effets secondaires indésirables, de nouveaux types de progestagènes sont élaborés à partir d’un dérivé de la spironolactone, la diénogest, une molécule ressemblant à la norethindrone qui agit comme un androgène, et trois dérivés de la 19-norprogestérone, la nestorone, l’acétate de nomegestrol et la trimégestone.[6] 38 Le but est de produire des molécules ayant plus d’affinité pour les récepteurs de la progestérone, ainsi que l’a exposé Pullen en 2012 [101]. 3- Association œstrogène/progestagènes C’est Banink, Revesz et Herr, qui pour la première fois en 1969 [11] ont imaginé pouvoir diminuer une partie des effets secondaires associés à l’utilisation d’une contraception à base d’œstrogènes en y associant des progestagènes. Cependant dans ces contraceptifs, les effets progestatifs supplantent les effets des œstrogènes au niveau du tractus génital et on assiste à une action synergique plutôt qu’inhibitrice. Les effets secondaires observés dans lors de l’administration d’œstrogènes et de progestagènes s’additionnent au lieu de se diluer comme l’espéraient les chercheurs, c’est ce qu’a pu montrer Pettiti dans ses recherches en 2003 [96]. Ce type de contraception engendre un risque accru de troubles au niveau de l’utérus et du tissu mammaire. Par exemple, dans Wildlife contraception [6] il est rapporté, qu’au cours de leurs expériences non publiées sur des singes araignées (Ateles), Porton, Dean, Asa, Plotka et Rayne, avaient observé que suite à une administration continue d’éthinyl d’estradiol et de MGA sous la forme d’implant sous cutanés, l’endomètre présentait une hyperplasie telle que l’étude a été arrêtée prématurément. Les mêmes résultats ont été observés par l’équipe de Kwiecien, Edelma, Nichols et Jensen en 2003 [78], chez des femmes utilisant de façon continue sur une période de six mois une pilule contraceptive à base d’une combinaison de progestagènes et d’œstrogènes. Ces patientes présentaient une hyperplasie de l’endomètre conduisant à une inactivation de ce dernier. Malgré tout, aux Etats-Unis, il existe plus d’une cinquantaine de pilules contraceptives avec des rapports différents en œstrogènes et progestérones, ayant reçu une autorisation de mise sur le marché. Cela est possible, puisque les conditions de la Food and Drugs Administration [48], chargeaient d’étudier les dossiers de demande de mise sur le marché des nouveaux médicaments, sont différentes des conditions européennes, et que les tests toxicologiques sont réalisés par les laboratoires eux-mêmes. L’association progestagènes-œstrogènes présente l’avantage d’empêcher l’implantation de l’embryon grâce à une inhibition du développement de l’endomètre. De plus, les œstrogènes potentialisent les effets des progestagènes, ce qui permet d’en limiter la concentration, comme l’ont décrit Wright et John [130] dans leur ouvrage, ainsi qu’Asa et Porton en 1996 [6]. En outre, les effets secondaires peuvent être limités en administrant le contraceptif lorsque la femelle est en plein anœstrus comme l’a décrit Bryan en 1973 [22]. 39 4- Androgènes [6] La testostérone et des dérivés des androgènes, à l’origine d’un rétro-contrôle négatif sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, peuvent être utilisés comme contraceptifs chez les chiens domestiques aux États-Unis. Ces animaux sont traités avec des Cheques Drops©, qui est le nom déposé de la mibolérone, un dérivé des androgènes. Cependant chez les chats, leur utilisation est fortement déconseillée en raison des effets secondaires affectant les glandes thyroïdiennes. De plus, chez les Mammifères sauvages, l’administration d’androgènes provoque une augmentation de l’agressivité, non préconisée chez de tels animaux. 5- Antagonistes de la GnRH Afin d’inhiber l’ensemble du cycle de reproduction, on peut agir en amont de la boucle de régulation, c’est-à-dire au niveau de la synthèse par l’hypothalamus de la gonadotropine Releasing Hormone (GnRH). Ainsi en empêchant la production pulsatile de ce peptide, on empêche la stimulation de la synthèse de toutes les autres hormones intervenant dans la régulation de la reproduction, ce qui rend l’animal (mâle et femelle, contrairement à la plupart des autres techniques traitées ici) infertile. Cependant cette infertilité est temporaire, car dès qu’on lève l’inhibition sur l’hypophyse, le cycle sexuel reprend. Aucun effet secondaire n’a encore été mis en évidence avec l’utilisation des analogues de la GnRH. [6] Ces analogues sont de deux types : les agonistes et les antagonistes. Leurs effets et leurs modes d’action sont décrits dans la revue de Gobello en 2012 [60]. On pourrait penser que les antagonistes seraient le moyen le plus efficace de bloquer la synthèse de GnRH. Or, il s’avère, comme l’ont démontré Vickery et son équipe en 1989 [124], puis Vitale et al. en 2006 [126] sur des cellules humaines de la granulosa, que les antagonistes sont plus coûteux, et ont une plus courte demie vie, ils agissent donc moins longtemps (de 1 à 4 jours) ce qui rend leur utilisation peu pratique chez des animaux sauvages. De plus, ils provoquent une stérilisation moins prévisible que les agonistes, ce qui rend leur utilisation moins sûre, et ils sont responsables d’effets allergisants de type réaction histaminique (Dr Alain Fontbonne, communication personnelle). On les retrouve dans les implants « Antagon ®» distribué par Organon et « Cetrotide® » distribué par Serono [6]. 6- Agonistes de la GnRH Comme on l’a vu plus haut dans le paragraphe 4, les agonistes de la « gonadotropine releasing hormone » sont préférés aux antagonistes. Leurs propriétés contraceptives ont été étudiées par Munson et son équipe en 1979 [89], par Herbert et Trigg en 2005 [67]. Ils fonctionnent en deux temps. Tout d’abord, on peut observer une phase initiale dite phase aiguë, qui dure quelques jours, pendant lesquels, la synthèse de la LH et la FSH sont toutes les deux stimulées, d’où l’apparition d’une période d’œstrus suivie par l’ovulation, comme l’ont décrit Bergfiels, D’Occhio et Kinder en 1996 [13]. Pour limiter cette première phase, on peut utiliser en complément une contraception orale à base de progestagène avant la pose de l’implant. 40 Ensuite vient la phase chronique pendant laquelle les sécrétions de FSH et de LH sont bloquées à cause du rétrocontrôle négatif provoqué par la GnRH sur les cellules produisant ces deux peptides, ainsi que l’illustre la figure 17 ci-dessous. Cette phase, décrite par Huckle, McArdle et Conn en 1988 [73], dure plusieurs semaines voire plusieurs mois selon le temps durant lequel l’implant contenant la substance active est laissé en place. Les effets sont similaires à une ovariectomie, mais disparaissent après le retrait de l’implant. Figure 17: Comparaison avec le schéma de la figure 11 pour la physiologie de la reproduction, en montrant par différenciation les effets des agonistes de GnRH utilisés comme contraceptifs. Chez l’Homme, les agonistes de la GnRH sont utilisés afin de traiter les problèmes de cancer de la prostate et de puberté précoce chez l’enfant. Chez les animaux il s’agit de la seule technique de contraception chimique réversible disponible chez les mâles. Chez les animaux, la présentation la plus commune est l’implant de Desloreline (commercialisé par Virbac France, sous le nom de « Suprelorin® »), et son action s’est montrée très efficace chez de nombreuses espèces en particulier les chats domestiques (Munson et al en 2001 [90]), les chiennes (Trigg et al en 2001 [117]), les bovins domestiques (D’Occhio et al en 1996 [39]), et plusieurs espèces exotiques (Bertschinger et al. 2001 [14]). 41 Cependant, le problème rapporté par le centre de Contraception du Zoo de Saint Louis [32], et actuellement rencontré dans les zoos et les parcs animaliers utilisant la desloreline est le non retour à la cyclicité malgré le retrait des implants chez les animaux. De plus, comme on peut l’observer dans certains parcs, dont le « Werribee Open Range Zoo » à Melbourne en Australie, les mâles peuvent perdre leurs attributs sexuels, comme la crinière chez les lions, ce qui peut être un problème dans une structure à but pédagogique. 7- Immunocontraception L’immunocontraception est une technique de contraception étudiée et mise au point par Kirkpatrick et son équipe en 2009 [76]. Elle consiste en une vaccination des individus afin qu’ils déclenchent une réaction immunitaire spécifique dirigée contre des protéines agissant au niveau de la reproduction. Les protéines ciblées sont de deux types principaux : les protéines de la zone pellucide de l’ovocyte, et la GnRH. a) Vaccins dirigés contre la zone pellucide Comme l’ont montré Frank, Lyda et Kirkpatrick en 2005 [57], en détruisant la zone pellucide de l’ovocyte, on empêche la reconnaissance de celui-ci par les spermatozoïdes, ce qui inhibe la fécondation, et rend donc l’animal infertile. La destruction de la zone pellucide se fait de façon très sélective grâce à une réaction immunitaire dirigée spécifiquement contre la zone pellucide porcine (PZP en anglais) et induite par une vaccination. Bien qu’appartenant à l’espèce porcine, comme l’atteste son nom, la protéine PZP se retrouve dans la majorité des espèces Mammifères, comme le montre l’étude réalisée par Kirkpatrick et son équipe en 2009 [76], ce qui garantit une contraception efficace. Pour ce faire, deux primovaccinations à un mois d’écart sont nécessaires, avec des rappels annuels, ou bisannuels chez les espèces saisonnées. Ce vaccin n’ayant qu’une action très ciblée sur le cycle de reproduction, les animaux ainsi stérilisés expriment normalement l’ensemble de leur comportement sexuel, et les femelles ovulent naturellement. Cependant, d’après les recherches effectuées par VandeVoort et son équipe en 1995 [121], dans certains cas l’immunocontraception avec la PZP s’accompagne d’une stérilisation irréversible, car le vaccin immunise aussi contre l’oocyte et les cellules de la granulosa. Kirkpatrick en 2009 [76] a montré que la stérilisation pouvait être réversible après une courte période d’utilisation mais après plus de 5 ans, il y avait un risque élevé de rupture ovarienne, rendant la femelle totalement stérile, et sans moyen d’exprimer les caractères sexuels secondaires, suite à l’arrêt de la synthèse des œstrogènes. b) Vaccins dirigés contre la GnRH De même que les vaccins dirigés contre la zone pellucide, les vaccins contre la GnRH ciblent une protéine précise du cycle de reproduction, et assurent ainsi une stérilité réversible. Ces vaccins ont la même action que les agonistes de la GnRH, ainsi que l’ont présenté Hodges et Hearn en 1997 [72], Curtis et al. en 2002 [38], puis Gupta et son équipe en 2011 [65]. 42 L’efficacité et la réversibilité de cette contraception sont variables selon l’âge des individus, mais elle devient irréversible quand elle est utilisée chez les femelles prépubères. Ces vaccins sont actuellement utilisés pour leurs propriétés thérapeutiques dans le traitement des hyperplasies de la prostate chez les chiens grâce au « Canine Gonadotropin Releasing Factor Immunotherapeutic » distribué par « Pfizer animal health », mais ils pourraient aussi être efficaces chez les femelles dans un but contraceptif. [6][32] 8- Chirurgie [6][50][123] Les techniques de stérilisation par chirurgie sont couramment utilisées chez les animaux domestiques pour les contraceptions de convenance. Ces méthodes sont irréversibles, exceptée la vasectomie quand elle est réalisée dans certaines conditions et selon certains protocoles. D’après Cheryl Asa dans « Wildlife Contraception », [6] l’inconvénient de la vasectomie c’est qu’il faut choisir entre une technique réversible et une contraception totalement sûre, les deux n’étant pas compatibles. La vasectomie consiste en une ligature réversible des canaux déférents, acheminant les spermatozoïdes de leur lieu de synthèse dans l’épididyme à l’urètre avant d’être expulsés lors de l’éjaculation. La castration pour les mâles et l’ovariectomie pour les femelles consistent en l’exérèse des organes responsables de la gamétogénèse. Chez les mâles il s’agit la plupart du temps d’une chirurgie assez simple, les testicules étant externalisés, mais chez les femelles l’ovariectomie nécessite un temps intra-abdominal. Pour ce faire, soit on pratique une laparotomie en incisant sur la ligne blanche dans le but d’aller rechercher les ovaires en région rétro-péritonéale, soit on peut réaliser deux petites incisions dans le flanc, une à gauche et une à droite, en arrière des pôles caudaux des reins, et en regard de la position supposée des ovaires. Cette technique permet de favoriser une récupération rapide post-opératoire, la chirurgie étant peu invasive. Cependant, au milieu du temps opératoire, il faut rompre l’asepsie, afin d’atteindre l’autre flanc. Quelle que soit la technique d’ovariectomie employée, l’une des plus grandes failles est la rémanence ovarienne. En effet, dans certains cas, une minuscule portion de l’ovaire persiste, ce qui induit une synthèse d’œstrogènes, rendant la stérilisation inefficace. Dans certains cas, il peut être choisi de retirer l’ensemble de l’appareil reproducteur de la femelle, soit pour des raisons pathologiques, soit parce que la femelle est gestante au moment de la stérilisation, et qu’une nouvelle portée n’est pas souhaitée, il s’agit de l’ovario-hystérectomie. Cette chirurgie passe obligatoirement par une laparotomie au niveau de la ligne blanche, et débute de la même façon que pour une ovariectomie, puis une troisième ligature est posée sur le col utérin (le plus caudalement possible), afin de retirer l’ensemble de la matrice. 43 9- Autres méthodes [6] Avoir prise sur sa fertilité est un enjeu majeur au sein de notre société, que ce soit pour des raisons éthiques (conception hors mariage, virginité, ...), pratiques (ascension sociale avant la fondation d’une famille, contrôler les effets du cycle, ...), ou encore médicales (traitement des infertilités, conception à un âge avancé, traitement des cancers et autres affections de l’appareil génital, ...). C’est pourquoi de nombreuses recherches sont menées dans ce domaine, afin d’offrir aux patients la meilleure solution possible, qui puisse également être la moins contraignante et la plus économique possible. Ces recherches peuvent bénéficier aux animaux sauvages, surtout lorsque les animaux servent de modèles d’étude pour tester les nouvelles molécules et les nouveaux protocoles médicaux. Ainsi l’utilisation de telles techniques dans les zoos et les parcs animaliers peuvent être assez rapidement mises en place. De plus, de nombreuses recherches sont effectuées dans ce domaine pour réguler les populations de carnivores domestiques, ce qui rend les procédés mis au point encore plus facilement extrapolables aux animaux sauvages. Il est également intéressant de noter que la plupart des méthodes contraceptives, que nous avons pu citer dans les pages précédentes, concernent pour la grande majorité d’entre elles les femelles. Or dans des sociétés animales pour la plupart polygames, c’est-à-dire qu’elles comprennent un mâle reproducteur pour plusieurs femelles, la contraception des mâles permettrait une approche plus pratique et plus économique pour les gestionnaires d’animaux. Les nouvelles recherches effectuées dans ce domaine tentent aussi d’évaluer l’influence de la contraception sur l’expression des comportements sexuels normaux des espèces étudiées. Cet aspect de la contraception est de plus en plus pris en compte dans un but de respect du bien-être des animaux. En effet, chez des espèces sociales, une non-expression des chaleurs chez l’une des femelles peut affecter le groupe complet, qui va alors soit rejeter la femelle, soit développer des réactions agonistes voire agressives, ce qui poserait de gros problèmes de gestions au sein d’une structure disposant d’une superficie limité ne permettant pas de séparer les individus. De même la hiérarchie sociale peut être bouleversée avec l’avènement d’une nouvelle femelle dominante fertile. D’où cette dernière partie de notre liste de méthodes contraceptives, afin de traduire les différentes voies à explorer pour l’avenir. a) Chez les femelles De nombreuses recherches concernent l’amélioration des moyens de contraception existant déjà, afin de les rendre plus sûrs et de réduire, voire de supprimer leurs effets secondaires indésirables. Ainsi se développent de nouvelles pilules contraceptives à base de progestérone, ou d’association d’œstrogènes et de progestagènes. On trouve aussi de nouvelles techniques d’immunocontraception ciblant de nouvelles protéines, dont celles composant le sperme ou la cellule-œuf, ainsi que le décrivent Naz et Chauhan en 2002 [91], et Coonrod en 2002 [34]. 44 Une autre approche est une méthode contraceptive assez répandue en médecine humaine, et qui a déjà été étudiée chez de nombreuses espèces animales. Il s’agit des stérilets, ou dispositifs intra-utérins (DIU). Ils empêchent la gestation d’abord via une action mécanique locale au niveau de l’utérus, empêchant la nidation, et ensuite via une action chimique, de part l’utilisation de cuivre ionique dont sont constitués la plupart de ces dispositifs, ce qui augmente les propriétés contraceptives du stérilet, car le cuivre est un métal spermicide. Pour encore améliorer son efficacité, certains DIU sont imprégnés de progestagènes (en particulier la Levonorgœstrel), dont les effets contraceptifs ont été exposés plus haut au paragraphe correspondant. [6] Les stérilets présentent l’inconvénient chez la femme d’accroitre le risque d’infection urogénitale, en particulier lors des quatre premiers mois suivant la pose. Cependant, ces effets n’ont pas été retrouvés lors des études effectuées chez les animaux. Les stérilets destinés aux femmes peuvent être utilisés tels quels chez les femelles Mammifères, à partir de 12 kilos, bien que désormais il existe des dispositifs destinés aux chiennes de moins de 12 kilos, un brevet pour un stérilet ayant été déposé en avril 1997 par Enrique Horacio Turin [43]. Chez les femelles dont l’utérus est constitué de deux cornes, il est possible d’utiliser deux stérilets, qu’il faudra introduire dans chacune des deux cornes. Chez les Félidés, où le col utérin est très étroit, il est conseillé avant de pouvoir poser un stérilet d’attendre que la femelle ait mis au monde une première portée afin de détendre un peu les muscles lisses du col. (Wildlife Contraception [6]). b) Chez les mâles La volonté actuelle en médecine humaine est de trouver une pilule contraceptive aussi efficace que chez les femmes mais qui serait destinée aux hommes. Cette pilule serait chémo-stérilisante. Plusieurs molécules sont actuellement en cours de développement. - La bisdiamine qui inhibe de façon réversible la spermatogénèse sans affecter les niveaux d’hormones, ce qui permet de conserver les caractères morphologiques et le comportement sexuel, ainsi que l’ont montré Beyler et ses collègues en 1961 [16]. Cependant cette molécule n’a pas pu être développée en humaine, car elle inhibe l’enzyme hépatique à l’origine de la détoxification de l’alcool, comme l’ont démontré les études réalisées par Heller et ses collègues en 1961 [66]. Cette molécule n’a présenté aucun effet secondaire au cours des études recensées dans la revue de Cheryl Asa en 1993 [2]. Malgré tout son utilisation dans les zoos et les parcs animaliers semble assez compromise au vu des doses nécessaires, ce qui représenterait un important investissement. - L’indénopyridine Matter et al. 1979 [86] et Fail et al. en 2000 [54]. - Le gossypol Liu (1987) [82] et Coutinho (2002) [36]. - Les acides indazolés carboxyliques Cheng et al. (2002) [28] et Gatto et al. en 2002 [58]. 45 Une autre approche est également étudiée. Il s’agit de bloquer le passage du sperme depuis les testicules jusqu’à l’urètre, ainsi qu’on l’observe lors de vasectomie, mais sans avoir recours à la chirurgie. Pour ce faire, on injecte un composant qui se solidifie une fois dans le canal déférent. Cette technique se nomme l’Inhibition Guidée Réversible du Sperme (RISUG en anglais), et utilise un copolymère dissout dans du sulfoxide de diméthyl (DMSO) qui empêche les tissus au contact du dispositif de se scléroser. Cette technique, toujours en cours de développement, a été décrite par Chaki et son équipe en 2003 [27]. L’Alliance for Contraception in Cats and Dogs [1] fait également référence à une stérilisation définitive des mâles, sans avoir recours à la chirurgie. Pour ce faire, des agents sclérosants sont injectés sous anesthésie locale ou générale dans chacun des deux testicules. Ces agents (par exemples le gluconate de zinc, le chlorure de sodium, ou la chlorhexidine de digluconate) vont provoquer une nécrose et une fibrose des structures internes des testicules, et ainsi inhiber la spermatogénèse et la synthèse de testostérone. c) Chez les espèces saisonnées Ainsi que nous l’avons vu précédemment, la synthèse pulsatile par l’hypothalamus de GnRH est à l’origine de l’activation de l’ensemble de l’axe de reproduction, c’est pourquoi, les analogues de la GnRH, tels que la Desloréline, constituent des contraceptifs intéressants. Cependant, il existe de façon physiologique des hormones agissant directement sur l’hypothalamus, et ainsi sur l’origine de l’activation de la fonction de reproduction. L’une des plus remarquables est la mélatonine chez les espèces saisonnées. Cette hormone est produite par la glande pinéale en réponse à la diminution de la durée du jour, ou à l’obscurité perçues par des capteurs rétiniens. Lorsque sa concentration augmente la synthèse hypothalamique de GnRH diminue, d’où une inactivation de la reproduction ainsi que l’illustre la figure 18. Ce mécanisme est vrai pour les espèces dites « à jours longs » qui vont se reproduire au printemps, comme c’est le cas de la majorité des Mammifères, cependant chez d’autres espèces telles que les Ovins, le mécanisme est inversé, et c’est au contraire l’augmentation de l’obscurité et de la durée de la nuit qui va induire le début de la saison de reproduction, les petits naissant ainsi au printemps, lorsque les pâtures sont les plus riches. C’est en étudiant ces chaînes de signalisation, que Silman en 1993 [109] décrétait que « la mélatonine était un contraceptif des années quatre-vingt dix ». Un peu plus tôt, en 1989, Cohen [30] avait pu constater que la mélatonine avait des effets inhibiteurs sur les gonades de différentes espèces de rongeurs. Cependant ces effets ne se retrouvaient pas chez toutes les espèces de Mammifères. En effet, l’injection de mélatonine à des moutons ou à des primates ne montrait aucune modification de leur fonction de reproduction. Pourtant, injectée à des doses dépassant largement les valeurs physiologiques (0.5 à 7 mg par kg et par jour), chez les femmes, la mélatonine permettait de supprimer de façon sélective le pic de LH nécessaire à l’ovulation, ce qui induit une infertilité réversible chez les patientes. De plus, il a été rapporté par Cohen [30] que l’administration de mélatonine pendant seulement un à quatre jours après le jour de l’ovulation était nécessaire pour inhiber le cycle sexuel. Ces effets contraceptifs avaient également été mis en évidence par Delmas et son équipe en 1996 [40], qui avaient également montré une relation entre la photopériode et l’immunité des individus. 46 Deux décennies plus tard, la mélatonine est utilisée de façon courante chez les animaux domestiques en tant que contraceptif temporaire. On trouve ainsi des implants de mélatonine (MELOVINE®) fonctionnant pendant deux à quatre mois chez les chattes, afin de réguler l’expression de leurs chaleurs sans provoquer d’effet secondaire, ainsi que le décrit Gogny et son équipe [54]. La mélatonine est également utilisée chez les Ovins sous la forme d’implant (MELOVINE®) afin de les dessaisonner, et de produire des agneaux tout au long de l’année. Cet implant est notamment commercialisé par le groupe CEVA [26]. L’utilisation de mélatonine en tant que contraceptif n’a pour le moment montré aucun effet secondaire, si ce n’est l’apparition d’un pelage plus fourni similaire au poil d’hiver chez les chattes traitées avec ce procédé, cependant, ainsi que le précise le docteur Gogny [61], les interactions entre la mélatonine et la sérotonine, très proches structurellement, n’ont pas encore été évaluées. 47 Figure 18: Schéma représentant la régulation de la fonction de reproduction par la mélatonine, d'après Pet Informed, http://www.pet-informedveterinary-advice-online.com/cat-in-heat.html [95] L’augmentation de la durée d’ensoleillement est détectée par la glande pinéale. Encéphale Glande pinéale Hypothalamus Hypophyse La production de mélatonine par la glande pinéale est réduite. Moins de mélatonine atteint l’hypothalamus. L’hypothalamus synthétise de la GnRH, qui agit au niveau de l’hypophyse. L’hypophyse sécrète la LH et la FSH qui agissent sur les ovaires. La FSH (et la LH) stimulent la croissance folliculaire. Les follicules ovariens grossissent. Ovaire Follicule proche de l’ovulation La LH stimule les cellules de la thèque qui produisent de la testostérone. La testostérone est convertie en œstrogène par les cellules folliculaires. Synthèse d’œstrogène 48 Dans le prolongement de ce travail nécessaire limité aux aspects qui nous sont apparus les plus significatifs dans ce large champ de possibilités, on peut mieux apprécier l’étendue et la diversité des méthodes à la disposition des gestionnaires des animaux dans les zoos et les parcs animaliers afin de réguler leur fécondité. Des limites existent et toutes ces techniques ne peuvent pas être utilisées chez tous les animaux à toutes les étapes de leur vie. L’objet de notre troisième et dernière partie sera de faire le bilan des méthodes contraceptives, que les scientifiques et les chercheurs du Centre de Contraception du Zoo de Saint Louis [32] recommandent d’utiliser pour chaque espèce, en fonction des caractéristiques des cycles de reproduction de chacune des espèces auxquelles nous avons choisies de nous intéresser ici. Chaque recommandation est issue de l’étude sur le terrain des réponses des différents individus aux méthodes contraceptives utilisées. Toutes ces données ont été communiquées au Centre de Contraception par les vétérinaires en charge des zoos et des parcs animaliers via la plateforme du « Reproductive Health Surveillance Program », ce qui permet de regrouper un échantillonnage aussi représentatif que possible des animaux vivant en captivité et de leurs conditions de vie, afin d’ajuster au mieux les traitements proposés.[32][9] Pour les aider dans leur travail, plutôt que de capturer et d’évaluer les différentes constantes de leurs pensionnaires à chaque fois que cela est nécessaire, ce qui représenterait un risque non négligeable pour le bien-être et la santé des animaux, les vétérinaires et les soigneurs peuvent désormais doser les différentes hormones sexuelles, et évaluer d’autres paramètres vitaux en recueillant les fèces, l’urine ou la salive des individus ainsi qu’ont pu le démontrer Brown et son équipe dès 1996 [20]. 49 50 TROISIEME PARTIE : Les moyens de contraception adaptés à chaque espèce Comme le précisent les auteurs de « Zoo Conservation Biology » [53], afin d’assurer la conservation des espèces au sein des zoos et des structures recueillant des animaux sauvages, il a fallu que les responsables de ces centres se coordonnent à l’échelle internationale. Cette décision a donné naissance à l’EAZA (European Association of Zoos and Aquaria) en Europe, à l’AZA (Association of Zoos and Aquariums) aux Etats-Unis et au Canada, et au ZAA (Zoo and Aquarium Association) pour l’Australie et l’Asie. Ces associations ont pour objectif de rassembler les informations concernant les animaux conservés dans l’ensemble des zoos, afin de contribuer à la conservation des espèces tout en optimisant la variabilité génétique des descendants, et ainsi pouvoir espérer produire des animaux qui pourront être réintroduits dans le milieu sauvage, bien que les réintroductions soient de moins en moins fréquentes, car se soldant souvent par des échecs. De plus la constitution de tels groupes de centralisation des données, permet de définir quelles sont les conditions optimales à rassembler en captivité pour le bien-être de chaque espèce. Ces données concernent aussi bien l’environnement, que la nourriture, le nombre d’individus nécessaires pour constituer un groupe fonctionnel, que les soins à apporter à chaque stade de la vie des animaux. Ainsi grâce à ces données on bénéficie également d’un très bon retour sur les caractéristiques de la reproduction de chaque espèce vivant en captivité, et donc sur les moyens de contraception recommandés pour chacune. Ces recommandations sont accessibles aux responsables des zoos et parcs animaliers, ainsi qu’aux vétérinaires travaillant dans ces centres, sur les sites de l’AZA [9] et du Zoo de Saint Louis [32] dont voici l’adresse internet : https://www.aza.org/wildlife-contraceptioncenter/. Cependant avant de décider de contrôler la fertilité et la fonction de reproduction d’un animal quelconque, il faut s’assurer que toutes les conditions sont réunies pour que le traitement soit efficace, et pour qu’il n’y ait pas de conséquence indésirable sur l’individu lui-même, mais également sur la constitution du groupe, et son avenir. C’était déjà ce que prônaient Wildt et Bush dans leur article en 1984 [129]. En effet, préserver des comportements sexuels normaux chez les espèces sauvages vivant en captivité est vital pour établir des populations saines. Historiquement, cependant, de nombreux Mammifères ne se reproduisaient pas ou peu en captivité, ainsi que le décrivait Wielebnowski en 1998 [128]. Les problèmes les plus souvent rencontrés sont une incapacité des individus à choisir un partenaire, ou à pratiquer le coït, ou encore à donner naissance à une descendance viable. 51 Ces dysfonctionnements sont souvent liés à des interactions avec l’environnement et les congénères qui sont trop éloignées des conditions naturelles, ainsi que le décrivent les auteurs de la 5ème partie de « Wild Mammals in Captivity » [10]. D’où les questions auxquelles il faut pouvoir répondre si on veut choisir la contraception la plus adaptée possible à l’individu étudié et à sa situation à l’instant t, ainsi que le détaille Cheryl Asa, Ingrid Porton et Paul Calle dans le 6ème chapitre de Wildlife contraception, « Choosing an appropriate contraceptive » [6] en Français « Choisir une contraception adaptée ». Pour ce faire, il faut donc connaître les propriétés des différents types de contraception pouvant être utilisés, ainsi que nous l’avons vu dans la deuxième partie de notre développement, mais il faut également connaître et comprendre les différents modes de vie des individus dont nous souhaitons réguler la fonction de reproduction. Les critères les plus importants à analyser étant entre autres l’âge de la maturité sexuelle, le nombre de partenaires sexuels, le type de cycle de reproduction, et la structure du groupe. C’est ce que nous allons voir maintenant pour les différentes espèces auxquelles nous avons choisi de nous intéresser. Cette présentation des différentes caractéristiques de la reproduction pour les vingt espèces sélectionnées a pu être réalisée à l’aide de l’encyclopédie de l’université de Princeton « Mammals » [84]. 1- Particularités des cycles de reproduction des espèces étudiées [84] a) Les Félins (Lions, Tigres, Guépards et Panthères) La plupart des Félins sauvages sont des espèces sociales, plus ou moins territoriales. Généralement, les femelles vivent en groupes avec leurs petits, sur un territoire assez restreint autour des sources de nourriture, et les mâles vivent dans des territoires plus vastes, englobant plusieurs groupes de femelles, qu’ils retrouvent au moment des périodes de chaleurs, on parle de socialité à distance. Lors des chaleurs (saisonnées ou non), les femelles manifestent leur état aux mâles par des vocalises, ou des marquages urinaires aux limites de leurs espaces vitaux, comme c’est le cas chez les tigres (Panthera tigris) et les guépards (Acinonyx jubatus) par exemple. En ce qui concerne la socialité, seuls les lions (Panthera leo) dérogent à cette règle. En effet, les lions constituent l’espèce de Félins la plus sociale, en vivant dans des groupes composés de trois à dix femelles adultes appartenant à la même famille, de leurs petits, et de deux à trois mâles adultes non apparentés aux femelles. Ces groupes sociaux sont cependant très variables dans le temps. Les femelles vivant ensemble sont cyclées en même temps, et peuvent être fécondées par chacun des mâles du groupe sans hiérarchie spécifique, bien que dans les grandes coalitions il y a des mâles dominants et des « géniteurs de secours ». 52 Chez les femelles, caractérisées par un cycle polyœstral, comme les autres femelles Félins, l’œstrus dure en moyenne deux à quatre jours, et bien que l’on ne soit pas encore certains que l’ovulation soit réellement induite par le coït, comme chez les chattes domestiques, ces phases d’œstrus se répètent toutes les deux à trois semaines jusqu’à ce que la femelle soit gestante. Lors des phases d’acceptation du mâle, les femelles peuvent être saillies jusqu’à trois fois par heure. Les lionnes se reproduisent dès l’âge de 36-46 mois (24-28 mois en captivité) jusqu’à leurs quinze ans, leur espérance de vie étant de 18 ans (25 ans en captivité), ce qui est assez similaire aux autres Félins sauvages. La gestation dure de cent à cent-dix-neuf jours, avec deux à quatre lionceaux par portées. Ces petits sont ensuite éduqués avec les autres jeunes de leur âge par l’ensemble des mères. Ils deviendront indépendants à partir de deux ans et demi. Chez les tigres (Panthera tigris), les femelles après une gestation durant en moyenne cent trois jours, donnent naissance à deux à trois tigrons par portée, dès l’âge de 3-4 ans. Les petits quittent leur mère vers l’âge de 1,5-2 ans. Chez les guépards (Acinonyx jubatus), les mâles atteignent leur maturité sexuelle à l’âge de trois ans, tandis que les femelles commencent à se reproduire à partir de deux ans. Chaque portée compte de un à six petits, les femelles pouvant avoir une portée tous les dixhuit mois. Cependant en captivité, la fécondité de cette espèce est bien plus faible. En effet, les guépards couvrent d’habitude un territoire de huit cents kilomètres carré, sur lequel les adultes des deux sexes ne se croisent qu’au moment de la reproduction, ainsi lorsque les deux partenaires vivent tout au long de l’année ensemble ou à proximité l’un de l’autre, comme c’est le cas en captivité, leur libido est fortement diminuée, ce qui altère la fertilité des individus. Enfin, chez les panthères ou les léopards (Panthera pardus), les deux noms désignant le même animal, les femelles atteignent leur maturité sexuelle à l’âge de deux ans, et sont ensuite en chaleurs toutes les trois à sept semaines durant la période des amours, généralement au printemps. Elles donnent naissance, après quatre-vingt-dix à cent cinq jours de gestation à un ou deux petits, qui deviendront indépendants à l’âge de dixhuit ou vingt mois. b) Les Éléphants Chez les éléphants, on dénombre trois espèces différentes : l’éléphant d’Afrique (Loxodonta africana) qui est le plus gros Mammifère terrestre au monde avec des mâles pesant jusqu’à six tonnes, et des femelles pesant en moyenne 3 tonnes, l’éléphant de forêt (Loxodonta cyclotis), qui est le plus petit des éléphants, et l’éléphant d’Asie (Elephas maximus). 53 Figure 19 : Eléphant d'Afrique femelle et de son jeune, http://education.francetv.fr/educationjeux/la-biodiversite-en-5-questions/escales/voulons_elephantAfrique.html [80] Figure 20: Éléphant de forêt femelle avec son éléphanteau, http://www.sciencesetavenir.fr/natureenvironnement/20101222.OBS5115/deux-especes-d-elephants-en-afrique.html [105] 54 Figure 21 : Un troupeau d'éléphants d'Asie, http://globe-nature.over-blog.com/article-l-elephantd-asie-une-espece-en-peril-52634306.html [17] Chez ces trois espèces, les individus, dont l’espérance de vie dépasse les soixante ans, vivent dans des groupes à la socialité complexe, dirigés par une matriarche. Ces groupes sont en général constitués de deux à trois sœurs, de la matriarche et de leurs petits. Les mâles sont plutôt solitaires, mais en période « musth », pendant laquelle leur taux de testostérone dans le sang est vingt fois supérieur aux valeurs physiologiques, ils recherchent de façon très intense les femelles en chaleur. Le « musth » apparaît chez les mâles ayant atteint l’âge de 20 ans, et se caractérise par un changement très important du comportement, les éléphants pouvant alors devenir agressifs et imprévisibles. Cette phase coïncide en général avec la saison des pluies et dure deux à trois mois. Les couples qui se forment au moment de la saison des amours ne sont pas durables dans le temps, cependant ainsi qu’ont pu le mettre en évidence Proctor et Brown en 2015, le choix du partenaire sexuel n’est pas une source de stress nuisible à la fertilité des éléphantes élevées en captivité. Les femelles sont gestantes pendant près de deux ans et donnent naissance à un éléphanteau à chaque fois à la saison des pluies. Ensuite, les mères allaitent leurs petits pendant trois à quatre ans, l’éléphanteau consommant en moyenne quinze litre de lait par jour, ainsi que nous l’apprend le documentaire « In Utero » [12]. Les éléphanteaux ne deviennent indépendants qu’à partir de l’âge de 6-7 ans. L’adoption d’un petit est impossible chez les éléphants. 55 c) Les Hippopotames Les hippopotames (Hippopotamus amphibius) sont des animaux dont la vie sociale est assez peu connue, mais il semblerait qu’ils soient grégaires, mais non sociaux. De plus les mâles présentent un comportement territorial, chaque individu défendant plusieurs centaines de mètres d’un cours d’eau. La différenciation sexuelle est mal aisée, car les testicules des mâles sont peu descendus, et il n’y a pas de scrotum. Chez la femelle, le vagin est caractérisé par la présence de nombreuses brides, ainsi que par deux diverticules projetant vers l’arrière du tractus génital. Ces particularités rendent l’insémination artificielle assez difficile. La gestation dure deux cent-quarante jours au terme de laquelle un petit naîtra, la mise bas ayant lieu aussi bien sur terre que dans l’eau. Le sevrage a lieu vers l’âge de 6-8 mois, mais les petits resteront jusqu’à l’âge de 8 ans auprès de leur mère. Les hippopotames vivent jusqu’à quarante-cinq ans, voire quarante-neuf ans en captivité. d) Les Rhinocéros On distingue cinq espèces de rhinocéros : - Le rhinocéros noir (Diceros bicornis) Figure 22 : Une femelle rhinocéros noir et son petit (les deux longues cornes caractéristiques de cette espèce sont bien observables ici,) http://iipdigital.usembassy.gov/st/french/publication/2012/12/20121203139445.html#axzz3xR A8VDr5 [74] 56 - Le rhinocéros blanc (Ceratotherium simum) Figure 23 : Deux rhinocéros blancs, caractérisés par une couleur de tégument plus claire que celles des autres rhinocéros, http://cenozoicpark.e-monsite.com/pages/holocene/rhinocerosblanc.html [24] - Le rhinocéros indien (Rhinoceros unicornis) faisant l’objet d’un programme de protection en partie financé par le CERZA [25] Figure 24 : Un rhinocéros indien, http://www.cerza.com/objectif-rhino/ [25] - Le rhinocéros de Java (Rhinoceros sondaicus), il s’agit de l’espèce de Mammifère terrestre le plus rare au monde actuellement. Figure 25 : Un rhinocéros de Java, qui contrairement aux autres rhinocéros, vit dans la jungle, http://www.dinosoria.com/rhinoceros_java.htm [44] 57 - Le rhinocéros de Sumatra (Dicerorhinus sumatrensis), il s’agit du plus petit rhinocéros, ainsi que du Mammifère terrestre le plus rare au monde après le rhinocéros de Java. Figure 26 : Un rhinocéros de Sumatra, qui est caractérisé par la présence de poils sur son corps, http://www.manimalworld.net/pages/rhinoceros/rhinoceros-de-sumatra.html [85] Malgré la grande diversité régnant entre les cinq espèces de rhinocéros, ces animaux sont caractérisés par une longévité de trente à quarante-cinq ans, les femelles atteignant leur maturité sexuelle vers l’âge de 5 ans, tandis que les mâles ne sont matures qu’à partir de l’âge de 7-8 ans. Cependant les mâles ne peuvent se reproduire qu’à partir du moment où ils sont capables de défendre leur premier territoire, ce qui n’est pas avant une dizaine d’année. La reproduction des rhinocéros n’est pas saisonnée, mais la plupart des rencontres entre les deux sexes ont lieu à la saison des pluies, les petits naissant donc pour la majorité à la saison sèche. Grâce à cette gestion des naissances, les petits ne soufrent pas de la sécheresse et du manque de nourriture au cours de leur croissance, vue qu’à la saison sèche ils ne se nourrissent que du lait maternel. Le sevrage commence à 3 mois, mais les jeunes ne quitteront leur mère que lorsqu’elle sera à nouveau gestante, soit au bout de 2 à 3 ans, la gestation durant seize à dix-sept mois (sept à huit mois pour le rhinocéros de Sumatra). Les femelles, contrairement aux mâles, sont peu agressives. Cependant les rhinocéros sont les Mammifères ayant le plus haut taux de mortalité due à des combats interspécifiques, trente-trois pour cent des femelles et la moitié des mâles rhinocéros meurent des suites de blessures infligées par un autre congénère. e) Les Ongulés (Buffles, Gazelles, Zèbres et Girafes) Les Ongulés sont des animaux très sociaux vivant en groupes assez nombreux. La plupart du temps ces grands groupes sont constitués par des femelles et leurs petits, ainsi que d’un mâle dominant. Les autres mâles vivent soit en solitaires, soit en plus petits groupes qui gravitent autour des grands groupes, les jeunes mâles solitaires tentant de détrôner les mâles dominants pour pouvoir s’accoupler. Ces animaux vivent en moyenne une vingtaine d’année, et ont une gestation de sept ou huit mois. Les buffles (Syncerus caffer) constituent un parfait exemple de l’organisation sociale décrite ci-dessus. De même que les gazelles (Aepyceros melampus) et les zèbres (Equus zebra). 58 Pour les girafes (Giraffa camelopardalis), par contre, les choses sont un peu différentes. Toute d’abord, leur gestation dure quinze mois, chaque femelle donnant naissance à cinq à dix girafons au cours de sa vie qui est de vingt-cinq ans. Les mâles atteignent leur maturité sexuelle à l’âge de 8 ans, ce qui est quatre ans plus tard que les femelles. Les girafes vivent en groupes d’une vingtaine de femelles avec leurs girafons. La composition de ces groupes varie beaucoup au cours du temps. Les plus grands mâles monopolisent les faveurs des femelles, dont ils s’enquièrent de l’avancement de leur cycle sexuel en stimulant la zone urogénitale afin de recueillir un prélèvement d’urine qu’ils analysent à l’aide de leur organe voméro-nasal. Les femelles sont généralement en lactation et en gestation en même temps, le sevrage des jeunes étant vers dix-huit mois. De cette façon, les girafes peuvent parer la mortalité très élevée des jeunes avant qu’ils n’atteignent 6 mois. f) Les Ursidés (Ours et Panda) Le groupe des Ursidés rassemble des animaux aux mœurs très particulières, ainsi que l’illustrent les deux espèces auxquelles nous avons choisi de nous intéresser ici : l’ours brun (Ursus arctos) et le panda géant (Ailuropoda melanoleuca). Ainsi qu’on peut l’apprendre dans Mammals [84], et grâce à l’association « Le Pays de l’ours » [93], l’ours brun est le seul Mammifère capable de survivre presqu’un an sans manger, ni boire, ni uriner, ni déféquer, et ce grâce à l’énergie contenue dans son tissu adipeux. Les ours bruns sont des animaux solitaires, qui se réunissent au moment de la saison des amours de mai à juillet, pendant laquelle ils peuvent rester en couples plusieurs semaines avec le même partenaire. Ensuite, les embryons s’implantent très tardivement, en moyenne vers le mois de novembre, ce qui représente plus de cinq mois, alors qu’il ne faut que quelques jours chez la majorité des autres Mammifères. Les oursons naissent six à huit semaines plus tard, soit en janvier ou février, dans la tanière. En général, l’ourse donne naissance à un voire quatre petits, et ce tous les deux ou trois ans. A la naissance, les oursons sont immatures et dépendants totalement du lait de leur mère qui est extrêmement riche. Il leur permet de prendre plusieurs kilos par semaine, ainsi à la sortie de l’hibernation, les oursons peuvent suivre leur mère dans ses déplacements. La figure 27 permet de reprendre les différentes phases du cycle de reproduction des ours, et ainsi de mieux comprendre comment la vie de cette espèce s’organise au cours de l’année. 59 Figure 27 : Schéma représentant le cycle de reproduction de l'ours brun, d'après le site du Pays de l'ours, http://www.paysdelours.com/fr/ours/ursus-arctos/reproduction.html [93] Quant au panda géant (Ailuropoda melanoleuca), ce sont des Ursidés pouvant vivre jusqu’à vingt ans, voire trente ans en captivité. Ce sont des animaux solitaires, ainsi que leurs cousins bruns, et seuls les jeunes non sevrés restent avec leur mère. Chaque adulte défend contre toutes les intrusions un territoire bien défini, de trente kilomètres carré pour les mâles et de quatre à dix kilomètres carré pour les femelles. Le territoire des mâles comprend plusieurs territoires de femelles. Ce n’est qu’à la saison des amours que les deux sexes se retrouvent. Les femelles ne sont fertiles que deux à quatre jours par an, d’où l’enjeu pour les mâles, qui se battent pour les femelles en œstrus. Cependant, bien qu’ils doivent passer après les mâles dominants, les mâles situés plus bas sur l’échelle hiérarchique ont quand même leur chance. Ensuite les femelles sont gestantes pendant cinq mois, voire huit mois en cas de diapause. Elles donnent naissance à un, deux ou trois petits, ce dès leurs quatre ans et jusqu’à leurs vingt ans. Les petits sont sevrés au bout de un an, mais resteront avec leur mère jusqu’à ce qu’elle soit de nouveau gestante. Malheureusement pour les gestionnaires des zoos et des parcs animaliers, la captivité de ces animaux diminue grandement leur libido. En 2009, seuls deux petits ont vu le jour. Cette situation est assez préoccupante car les pandas, même en liberté, ont une fécondité faible, tandis que leur nombre diminue chaque jour, à cause, entre autres, de la destruction de leur milieu naturel. 60 g) Les Canidés (Loups, Hyènes et Lycaons) Les Canidés sont des espèces à la socialité très complexe. Chez les loups gris (Canis lupus) et les lycaons (Lycaon pictus), on parle de groupe social coopératif dont la taille dépend de la disponibilité des ressources, en général les clans sont composés de cinq à douze individus. Seul le couple dominant, appelé couple alpha, se reproduit, mais toutes les femelles sont cyclées en même temps que la mère alpha, ainsi lorsque les petits du couple dominant naissent, toutes les femelles du clan peuvent les allaiter et les éduquer. Ainsi que l’expose le documentaire In Utero, à chaque cycle, dix à douze ovocytes sont produits, mais ces gamètes ne seront matures, et donc fécondables, que deux jours après le coït. Ce délais n’est cependant pas fatal aux spermatozoïdes, qui une fois arrivés dans l’oviducte, vont s’arrimer à la paroi, et entrer en quiescence pendant sept à douze jours, jusqu’à ce que les ovocytes soient prêts à être fécondés. Les petits sont totalement dépendants de la mère jusqu’à leurs septième semaine de vie. Chez les loups gris, la gestation dure de soixante-et-un à soixante-trois jours, et aboutit à la naissance de cinq à quatorze, en moyenne six, louveteaux. Les loups atteignent leur maturité sexuelle à l’âge de vingt-deux mois, pour une espérance de vie de huit à seize ans, voire vingt ans en captivité. Les lycaons sont caractérisés par les plus grandes portées chez les Canidés avec dix petits, qui seront sevrés à l’âge de quatre ou cinq mois. La gestation dure soixante-dix à soixante-treize jours, soit dix jours de plus que les loups. De plus, les femelles lycaons peuvent avoir leur première portée dès l’âge de treize ou quatorze mois. Quant aux hyènes (Hyaena hyaena), lorsque les ressources sont suffisantes, elles vivent dans des groupes régis par une hiérarchie linéaire, les femelles étant les supérieurs hiérarchiques des mâles. Les individus se retrouvent pour se reproduire grâce aux marquages territoriaux, les femelles se reproduisent alors avec les mâles du clan, mais aussi avec des mâles solitaires errants. Les femelles, caractérisées par un vagin péniforme, donnent naissance de un à quatre petits, en général trois, après quatre-vingt-dix jours de gestation. Les petits sont sevrés à l’âge de dix à douze mois. h) Les Primates (Ouistitis, Orang-Outangs, Gorilles et Chimpanzés) Ainsi que le précise Primate Sexuality [46], la plupart des Primates vivent dans des groupes sociaux complexes, dont les membres restent ensemble tout au long de l’année. Contrairement à ce que l’on a pu voir chez les autres espèces étudiées plus haut, les individus de sexe opposé ne se réunissent pas qu’au moment de la reproduction. Les sociétés primates rassemblent soit un petit groupe d’individus appartenant à la même famille, soit lorsque les ressources le permettent, de grandes assemblées de plusieurs centaines d’individus, comptant un nombre similaire de mâles et de femelles. 61 Chez ces Mammifères, la reproduction, et plus particulièrement la sexualité, jouent un rôle crucial pour le maintien de la cohésion du groupe. C’est pourquoi il est peut-être encore plus complexe de mettre en place un traitement contraceptif chez ces individus, car toute modification du cycle de reproduction provoquera une modification du groupe, avec le développement de comportements agonistes, pouvant être très difficiles à gérer au sein de structures à la superficie limitée. Nous avons choisi ici de nous intéresser un peu plus à quatre espèces de Primates, qui font partie des plus populaires et des plus représentatifs de la diversité de cette famille de Mammifères si particuliers. Tout d’abord, les ouistitis, qui sont en réalité des animaux de différentes espèces avec de grandes variabilités physiques appartenant à la même famille, celle des Callitrichidae. Ce sont des animaux pesant en moyenne de deux-cent soixante à trois-cent quatre-vingts grammes, vivant dans des groupes comptant la plupart du temps de quatre à vingt individus, formant une famille étendue. Ce sont des animaux territoriaux qui marquent leur territoire à l’aide de glandes situées sur la poitrine et le pubis. Les ouistitis forment une société polyandrique, ce qui signifie qu’une femelle, dès l’âge de un an à un an et demi, se reproduit avec plus d’un mâle. Si la saillie est fécondante, au bout de deux-cent trente-cinq à deux-cent soixantedix jours, la femelle donnera naissance, deux fois par an, à un, voire plus rarement à deux petits, qu’elle nourrira jusqu’à leurs deux mois. Les gorilles (Gorilla gorilla et Gorilla beringei) sont des animaux vivant en harems comptant de cinq à dix individus, généralement composés de trois femelles adultes, de quatre à cinq petits d’âges différents et du mâle dominant. On rencontre aussi des groupes plus larges lorsque les ressources sont suffisantes pour subvenir à leurs besoins. Trois quart des femelles quittent le groupe dans lequel elles sont nées à l’âge adulte, ce qui permet de limiter la consanguinité. Les femelles peuvent se reproduire dès l’âge de sept à huit ans, mais elles ont leur premier petit généralement vers l’âge de dix ans, ensuite elles donneront naissance à en moyenne un petit tous les six à huit ans. En effet, la gestation dure de deux-cent cinquante à deux-cent soixante-dix jours au terme de laquelle la femelle donnera naissance à un seul petit (en cas de naissance gémellaire, seul un des petits survivra), qui sera sevré à l’âge de deux ans et demi voire trois ans. La mère ne retrouvera un cycle sexuel régulier que quatre ans après la naissance de son jeune. Cependant, dans la société des gorilles, les infanticides sont nombreux. En effet, de jeunes mâles solitaires viennent régulièrement défier le mâle dominant, et s’ils viennent à remporter le combat, afin de s’assurer de la paternité du plus grand nombre d’individus du groupe, ils tueront les jeunes. Si les petits sont tués avant l’âge de un an, les mères retrouveront une cyclicité normale deux ans plus tôt. Les mâles atteignent leur maturité sexuelle vers l’âge de quinze à vingt ans, pour une espérance de vie pouvant aller jusqu’à cinquante ans en captivité. Chez les chimpanzés (Pan troglodytes) les groupes sociaux comptent de quinze à cent cinquante individus dominés par une femelle dominante chez les bonobos et par un mâle dominant chez les chimpanzés. Leur comportement sexuel est complexe et variable, en effet les chimpanzés, de même que les bonobos (Pan paniscus) dont ils sont très proches, ont des rapports sexuels opportunistes avec tous les autres membres du groupe, qu’ils soient du sexe opposé ou non. Ici la reproduction et la sexualité jouent un vrai rôle de ciment social. 62 Lorsqu’elles sont en chaleurs, les femelles se reproduisent avec un grand nombre de mâles, qui ne pouvant alors pas s’assurer de la paternité des jeunes, ne peuvent tuer les petits qui pourraient être les leurs. Les mâles qui ont pu s’accoupler montent dans la hiérarchie sociale du groupe. Les chaleurs des femelles sont marquées par un gonflement très important de la vulve pendant douze à vingt jours, puis elle retrouve sa taille normale, avant que la femelle n’ovule un à trois jours plus tard. Le cycle de reproduction des femelles chimpanzés dure de trente-cinq à quarante jours. En ce qui concerne la gestation et le cycle de reproduction les femelles chimpanzés sont très similaires aux femelles gorilles, avec une gestation durant de deux-cent trente à deux-cent quarante jours, aboutissant à la naissance d’un petit unique, qui sera sevré à l’âge de quatre ans, sa mère ne retrouvant sa cyclité qu’à partir de ce moment. Les chimpanzés peuvent commencer à se reproduire à l’âge de treize ans, pour une longévité de quarante à quarante-cinq ans. Quant aux orangs-outangs (Pongo pygmaleus et Pongo abelii) ce sont généralement des animaux solitaires, en particulier ceux vivant à Bornéo (Pongo pygmaleus). Cependant les rencontres entre plusieurs individus donnent rarement lieu à des agressions, les orangsoutangs étant assez paisibles. Les ourangs-outangs peuvent se reproduire à l’âge de douze ans pour les mâles et de dix ans pour les femelles, qui resteront fécondes jusqu’à leurs trente ans. Le comportement sexuel des femelles change vers le milieu de leur cycle de reproduction, qui correspond au moment où les concentrations plasmatiques en œstrogènes et en testostérone sont les plus élevées. On peut situer ce changement à la fin de la période folliculaire et au début de la phase péri-ovulatoire. A ce moment, les femelles vont alors retrouver les mâles, grâce aux longs cris qu’ils poussent en continu. Après la conception, la gestation dure de deux-cent trente-cinq à deux-cent soixante-dix jours, et aboutit à la naissance d’un seul petit, qui sera sevré à l’âge de trois ans, mais qui ne deviendra indépendant qu’à l’âge de sept à dix ans. Les ourangs-outangs peuvent vivre jusqu’à trente-cinq ans dans la nature, contre soixante ans en captivité. 2- Recommandations pour réguler la reproduction des différentes espèces étudiées [6][32] Suite à cette présentation nécessairement restreinte, nous pouvons avoir un aperçu de la variabilité des modes de vie, et des modes de reproduction. Malgré tout, on peut observer que la plupart des espèces citées vivent en groupes de femelles avec leurs petits, et que ces groupes sont dirigés par un mâle dominant, des mâles solitaires tentant régulièrement de renverser la hiérarchie afin de se reproduire avec les femelles du groupe. Ainsi en revenant à la régulation de la reproduction, on pourrait penser qu’il suffirait d’empêcher les mâles dominants de se reproduire, ce qui limiterait fortement le nombre d’individus à traiter. Or, comme nous l’avons vu dans la deuxième partie de notre développement, les techniques de contraceptions dédiées aux mâles sont peu nombreuses, et en plus, si on empêche les mâles dominants de se reproduire, on risquerait de bouleverser toute l’organisation sociale du groupe, ce qui conduirait à un désagrégement de celui-ci, soit à l’avènement d’un nouveau mâle dominant. 63 Une autre difficulté à prendre en compte lorsque l’on veut réguler la fonction de reproduction des animaux, est que, ainsi que nous l’avons vu, la plupart vivent sur des territoires très étendus, et surtout ils se déplacent beaucoup, leur territoire n’étant donc jamais définitif. De plus, la plupart des individus des deux sexes ne se retrouvent qu’à la saison des amours, au cours de laquelle les femelles vont s’accoupler avec un grand nombre de partenaires, et non pas uniquement avec le mâle qui partage leur enclos trois-cent soixantecinq jours par an. Malgré tout, les équipes gérant les animaux en captivité, à force de recherches et d’observations, et en partageant leurs données, sont parvenues à lister les techniques contraceptives les plus adaptées à chaque espèce. Ces recommandations sont rassemblées dans « Wildlife Contraception » [6], ainsi que sur le site du zoo de Saint Louis, dans la partie AZA Reproductive Management Center [32] dont voici l’adresse internet : http://www.stlzoo.org/animals/scienceresearch/reproductivemanagementcenter/. Ainsi que le reprécisait Cheryl Asa [6], les méthodes utilisées en captivité ou sur des espèces vivant à l’état sauvage ou semi-sauvage, sont généralement considérées comme expérimentales car non représentative de l’ensemble des individus d’une même espèce. D’une part parce que les animaux sauvages présentent d’importantes différences de taille, de poids, de métabolisation des molécules, et de modes de vie. D’autre part parce que le nombre d’animaux ayant reçu une contraception est peu élevé, il est donc très difficile d’en tirer un consensus utilisable les yeux fermés par les personnes gérant des espèces sauvages. Cependant, voici les recommandations faites par l’AZA sur son site internet Contraception Center [32] concernant chacune des espèces choisies pour notre développement. Les recommandations pour les Félins, les Ursidés et les Canidés étant similaires, nous avons choisi ici de les regrouper dans le groupe des Carnivores. a) Les Carnivores (Félins, Ursidés et Canidés) Chez ces animaux, la méthode de contraception semblant la plus sûre serait l’administration sous la forme d’implants ou d’injections d’agonistes de la GnRH. Mais ils présentent l’inconvénient d’avoir une durée d’efficacité très variable selon les individus, et assez imprévisible, certains animaux n’ayant pas retrouvé de cyclicité plusieurs mois, voire années après le retrait de l’implant. En moyenne, on considère que les implants utilisés permettent une contraception de un à six ans. Les effets secondaires constatés s’apparentent à ceux observés après une ovariectomie, avec entre autres une prise de poids si le régime alimentaire n’est pas contrôlé. La molécule utilisée est la desloréline, que l’on retrouve dans le « SUPRELORIN® » (implant) et le « LUPRON® » (injection) commercialisé aux États-Unis et au Canada, qui peuvent être utilisés chez les deux sexes [6]. L’autre méthode de contraception conseillée est la stérilisation chirurgicale. Il s’agit d’interventions présentant peu de risques de complications, cependant la contraception sera ensuite irréversible. 64 L’utilisation des progestagènes est également possible, mais les effets secondaires chez les Carnivores sont assez importants. On peut citer par exemple la prolifération endométriale pouvant conduire à la stérilité des animaux, et l’apparition de pyomètre et de tumeurs mammaires à cause d’une trop forte stimulation hormonale. Les femelles devant recevoir un traitement à base de progestagènes ne doivent pas être gestantes et elles doivent être loin de la phase de pro-œstrus, pour limiter l’apparition d’effets secondaires liés aux fortes doses simultanées en œstrogènes et en progestérone. De plus, un tel contraceptif ne doit pas être utilisé plus de quatre ans cumulés, car il a été montré par Munson et al. [90], qu’après soixante-douze mois, une contraception à base de progestagènes (en particulier à base de MGA), augmentait fortement le risque d’apparition de pathologie utérine grave chez les Félidés femelles. Pour la même raison, l’AZA recommande d’utiliser une contraception hormonale pendant deux années successives, puis de faire reproduire ces femelles, avant de reprendre une contraception pour deux ans. Cela se traduit chez les espèces à reproduction saisonnée par la recommandation de ne pas utiliser les progestagènes au cours de deux saisons successives. Chez les mâles la vasectomie est déconseillée car l’ovulation des femelles étant la plupart du temps déclenchée par le coït, en particulier chez les Félins, les femelles saillies mais non fécondées risquent de développer des pseudo-gestations à l’origine d’une élévation du risque d’apparition de cancers. Quant au vaccin PZP à la protéine porcine de Zone Pellucide, il est à l’origine chez les Félins de l’apparition de réactions croisées avec les sites de fixation des spermatozoïdes sur les ovocytes, il provoque aussi un taux important de rupture ovarienne, rendant les femelles définitivement stériles. b) Les Éléphants Chez les éléphants la seule technique de contraception qui a été bien décrite est l’immunocontraception. Avant, pour réguler leurs populations, les individus étaient déplacés dans différents parcs naturels, selon la densité en animaux dans ces zones. L’immunocontraception présente l’avantage de pouvoir se faire à distance grâce au fusil hypodermique, sans avoir besoin d’anesthésier les animaux, l’anesthésie présentant des risques élevés pour des individus de cette masse. Après deux premières campagnes d’études au sein de troupeaux d’éléphants vivant en liberté dans les parcs nationaux de Kruger en Afrique du Sud entre 1996 et 2001, Bertschinger et son équipe, en 2004 [15] ont procédé à l’immunocontraception en utilisant le vaccin PZP de cinquante-huit éléphantes. Le vaccin était injecté par fusil hypodermique à raison de deux injections de primovaccination à trois ou quatre semaines d’intervalle, suivies d’un rappel tous les ans ensuite. Une étude du comportement et du budget-temps des éléphants ayant reçus ces traitements a été réalisée avant et après l’injection du vaccin PZP. La contraception a vraiment été efficace, les auteurs pensent qu’une des raisons est que la protéine de la Zone Pellucide Porcine a une conformation semblable à celle de la Zone Pellucide chez les éléphants. Juste après les injections de vaccins, les scientifiques ont pu observer quelques modifications dans les mouvements des groupes familiaux d’éléphants ainsi que dans l’utilisation de leur budget-temps. Cependant, le comportement des éléphantes est redevenu tout à fait normal deux semaines après l’injection, le comportement ayant été comparé au comportement d’avant les injections. 65 En 2012, Audrey Delsink et Jay Kirkpatrick [41] ont publié une étude concernant les résultats de l’immunocontraception chez les éléphants, et ils concluent en disant qu’il pourrait bien s’agir d’une nouvelle technique de base pour la gestion des éléphants vivant en liberté, afin d’éviter les conflits avec les populations vivant à proximité. c) Les Rhinocéros Ainsi que le précisent Hermes et son équipe en 2003 [61], les rhinocéros vivant en captivité présentent d’importants troubles de la fertilité. Quelques années auparavant, il n’était pas considéré comme anormal qu’une femelle rhinocéros présente des phases de non reproduction inexpliquées de dix à quinze ans. La reproduction des rhinocéros n’a donc pas besoin d’être régulée dans le sens que nous avons défini au début de ce travail. Au contraire, les personnes gérant ces animaux cherchent à améliorer leur fécondité en mettant en place des inséminations artificielles après avoir prélevé le sperme des mâles par électroéjaculation. Dans leur article, Hermes et son équipe [68] décrivent une utilisation autre que contraceptive, de la Desloréline. Ici elle aurait un effet activateur initial, permettant de stimuler l’activité ovarienne chez des femelles n’ovulant pas, en agissant sur l’hypothalamus pour stimuler la synthèse de gonadotrophines et d’hormones par l’hypophyse. De même que nous avons rassemblé les Félins, les Ursidés et les Canidés dans le groupe des Carnivores, les recommandations de contraception, pour les Ongulés et les Hippopotames étant similaires, nous avons choisi de les rassembler ici. d) Les Ongulés (Buffles, Gazelles, Zèbres et Girafes) et les Hippopotames Chez les Ongulés, contrairement aux Carnivores, l’utilisation des progestagènes est moins risquée puisqu’ils ne sont responsables que de l’apparition peu fréquente de pyomètre, et d’inflammation de l’utérus, dont les conséquences sur la reproduction sont moindres, en particulier en cas de traitement. Les animaux doivent donc être bien suivis, ainsi que le préconisaient les auteurs du CD-ROM CEVA [52] sur le contrôle de la reproduction des vaches domestiques. Ce type de contraceptif n’est utilisable que pour les femelles. Les progestagènes utilisés peuvent être administrés sous forme d’implant, de pilules orales ou de liquide à prise orale. Il s’agit de l’acétate de mélengestrol (MGA) et de l’acétate de médroxyprogestérone, commercialisé sous le nom de DEPO-PROVERA®. En ce qui concerne le MGA, la posologie est de un demi milligramme par jour et par animal pour les Bovidés, les Cervidés et les Camélidés pesant moins de deux cent kilogrammes, et de un milligramme par jour et par animal pour les Bovins, les Cervidés et les Camélidés pesant plus de deux cent kilogrammes. Pour les hippopotames et les girafes la posologie recommandée est de deux à trois milligramme par jour et par animal. [6] Pour le DEPO-PROVERA®, qui est un produit à usage retard devant être injecté, la dose pour les girafes est de quatre-cent cinquante milligrammes toutes les six semaines. Si l’œstrus apparaît malgré le traitement, il faut augmenter la posologie de cent milligrammes. Quant aux hippopotames on peut utiliser le DEPO-PROVERA® à la dose de huit-cent milligrammes toutes les six semaines. 66 On peut également utiliser chez les femelles les vaccins PZP pour durée de deux à trois ans, et les agonistes de la GnRH, qui ont comme inconvénient d’offrir une durée et une efficacité de contraception variables d’un individu à l’autre. Contrairement aux autres espèces, la Desloréline ne fonctionne pas chez les mâles Ongulés. e) Les Primates (Ouistitis, Orang-Outangs, Gorilles et Chimpanzés) Chez ces Mammifères, les contraceptifs recommandés sont les implants d’acétate de mélengestrol (MGA) chez les femelles non gravides, et les injections d’acétate de médroxyprogestérone, commercialisé sous le nom de DEPO-PROVERA®. On peut également utiliser les agonistes de la GnRH, même si les posologies et les effets ne sont encore pas très bien connus chez toutes les espèces. La Desloréline est utilisable chez les femelles et les mâles sous la forme d’un implant. Cependant, chez les Primates, où on l’a vu la sexualité est essentielle à la cohésion du groupe, la Desloréline présente l’inconvénient d’inhiber l’expression des comportements sexuels. Du fait de leur grande proximité avec l’espèce humaine, les grands primates peuvent bénéficier directement des connaissances en ce qui concerne les contraceptifs chez la femme. On peut ainsi utiliser chez les femelles gorilles, chimpanzés et orangs-outangs les pilules contraceptives humaines à base soit d’une association de progestagènes et d’œstrogènes soit à base de progestagènes seuls. Ces pilules, de même que chez les femmes, sont à prendre tous les jours soit pendant vingt-et-un jours, avec ensuite sept jours ou les principes actifs sont remplacés par des placebos, soit pendant quatre-vingt-dix jours, avec ensuite une semaine de comprimés placebo. Cependant, chez les Primates, l’efficacité des différentes posologies utilisées (parfois un demi voire un quart de comprimé donné par jour au lieu d’un complet) n’est pas encore bien connue, et mériterait de plus amples recherches. Toujours grâce à cette grande similarité avec les Humains, il est possible de mettre en place chez les femelles des grands Primates des stérilets. Soit des stérilets à base de progestagènes, soit des stérilets au cuivre. De plus, leur pose n’est pas très compliquée, car la morphologie du tractus génital des femelles Primates est très proche de celle de la femme. 3- Bilan A partir des différentes informations que nous avons pu rassembler dans ce travail, nous pouvons construire le tableau récapitulatif suivant présenté dans le tableau 1, permettant de repréciser quelles sont les méthodes de contraception recommandées pour chacune des espèces de Mammifères étudiées ici. Exceptés la vaccination PZP et l’utilisation d’agonistes de la GnRH, les méthodes contraceptives rassemblées dans le tableau 1 ne sont utilisables que chez les femelles. 67 Tableau 1 : Tableau récapitulatif des recommandations faites pour les différentes espèces étudiées Espèces Méthode de contraception recommandée par le Centre de Contraception du zoo de Saint Louis et l’AZA Effets positifs Effets négatifs Pour combien de temps ? Effets Pas besoin temporaires Acétate de d’anesthésie car + Espèces médroxyprogestérone injection sous la forme Effets 22 mois saisonnées (DEPO-PROVERA®) d’implant au fusil secondaires dus à hypodermique l’utilisation de progestérone Prise quotidienne Espèces Acétate de mégestrol + pouvant être Pilules à prendre avec (OVABAN®, OVARID®, Effets habituées par la nourriture MEGACE®) secondaires dues leurs soigneurs aux estrogènes Seul progestagène à fonctionner chez les Progestagène, altrenogest Equidés Equidés, contrairement (REGUMATE®) à l’acétate de mélengestrol (MGA) Implant à base Espèces de Implant de plus petite Levonorgestrel petite taille taille (NORPLANT®) Prise de poids Desloréline Pas d’effet secondaire Durée de la Carnivores (SUPRELORIN® et Un à six ans rapporté contraception LUPRON®) variable Pas d’effet secondaire rapporté Un an (rappel annuel Eléphants Vaccination contre la PZP Pas besoin nécessaire) d’anesthésie (fusil hypodermique) Rhinocéros Sans objet acétate de mélengestrol Pyomètre et (MGA) et acétate de Peu d’effets Ongulés inflammation de médroxyprogestérone, secondaires rapportés l’utérus (DEPO-PROVERA®) Grands Stérilets au cuivre ou avec Peu d’effets Besoin Primates des progestagènes secondaires rapportés d’anesthésie implants d’acétate de mélengestrol (MGA) chez les femelles non gravides, Peu d’effets Petits Primates et les injections d’acétate de secondaires rapportés médroxyprogestérone chez les autres (DEPOPROVERA®) 68 69 CONCLUSION Grâce aux avancées faites dans différents domaines des sciences, en particulier de la biologie et de la médecine, les gestionnaires d’animaux sauvages sont parvenus à aménager des environnements et des conditions de vie de plus en plus adaptées aux besoins de leurs pensionnaires. La qualité de ces structures peut être jugée à l’aulne de l’amélioration, au cours des dernières décennies, des taux de reproduction rencontrés dans les zoos et les parcs animaliers. Ainsi, certaines espèces se sont vraiment bien adaptées à la captivité et se reproduisent très facilement. Or le problème qui se pose actuellement, suite à cette évolution, est la surdensité au sein des espaces dédiés à la sauvegarde des espèces sauvages. D’où le recours à des méthodes visant à réguler les populations vivant en captivité. Parmi ces techniques, la contraception est jugée par les experts éthiquement préférable au déplacement d’individus dans des structures annexes plus ou moins bien adaptées à leurs besoins, ou à l’euthanasie. Cependant, ainsi qu’avertissaient Penfold et son équipe en 2014 [94], différer la conception chez une femelle, pourrait conduire à une perte irréversible de sa fécondité, d’où le titre de leur article « Use it or lose it » [94]. Comme nous avons pu le montrer au cours de ce travail, la contraception doit répondre à plusieurs critères et est fonction de la physiologie et de la biologie de l’animal considéré, mais aussi de l’objectif recherché. Ainsi, si les implants de progestérone semblent particulièrement bien adaptés chez les Primates, chez les Carnivores, ils présentent de nombreux effets secondaires indésirables. Quant à la Desloreline, il semblerait à l’heure actuelle, qu’elle nécessiterait quelques ajustements afin que son action soit totalement et systématiquement réversible après retrait des dispositifs. Il existe de plus plusieurs autres techniques en cours de développement, tels que l’administration de mélatonine pour les espèces saisonnées, ou l’immunocontraception. De telles méthodes permettraient de pouvoir cibler des espèces chez lesquelles les techniques actuelles de contraception n’apportaient pas de résultat satisfaisant. Cependant, en ajoutant encore un nouveau degré de contrôle sur la vie des animaux élevés en captivité ou en semi-liberté, ne risque-t-on pas d’obtenir des individus trop différents de leurs congénères sauvages et plus inadaptés à la vie en liberté ? N’oublions pas que le rôle essentiel des zoos et des parcs animaliers au XXIème siècle est de sauvegarder les espèces en voie d’extinction. Ainsi en faisant vivre des animaux dans des conditions de plus en plus contrôlées et anthropisées (sous le contrôle de l’Homme), ne serions-nous pas en train de créer des espèces différentes, trop éloignées des espèces initiales naturelles, et donc avec lesquelles elles ne pourront plus interagir ? C’est-à-dire, avec lesquelles elles ne pourront plus ni vivre ni se reproduire, ce qui limiterait fortement la possibilité de sauvegarder les animaux en voie de disparition... C’était déjà la préoccupation d’Alain Zecchini, chercheur à l’INRA, en 2002 [131] : « Les animaux sauvages captifs peuvent-ils rester « naturels » ? », puis de Swaisgood en 2004 [114] : « What can captive breeding do for conservation [...] ? ». Puis en 2015, SchulteHosteddel et Mastromonaco [104] s’interrogeaient sur la façon dont il faudrait prendre en compte l’évolution des espèces dans les zoos et les parcs animaliers. 70 71 BIBLIOGRAPHIE 1. Alliance for Contraception in CATS and DOGS (ACC&D), (2013), Contraception and Fertility Control in Dogs and Cats: a report of the Alliance for Contraception in Cats and Dogs, 154p. 2. ASA C.S. (1993). The Development of contraceptive methods for captive wildlife. In: Contraception in Wildlife Management. Paper 2, Lincoln, DigitalCommons@University of Nebraska, 235-240. 3. ASA C.S. (2007). Zoo Biology special issue on contraception. Zoo Biology, 26, 235-236. 4. ASA C.S. (2010). 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Courrier de l'environnement de l'INRA n°46, 21-37. 81 82 RÉGULATION DE LA REPRODUCTION DE CERTAINS GRANDS MAMMIFÈRES DANS LES ZOOS ET LES PARCS ANIMALIERS BASÉE SUR LES PROTOCOLES RECOMMANDÉS PAR LE ZOO DE SAINT LOUIS ET L’AZA LE NAI Charlotte Résumé Contrairement à ce qui est communément admis, la sauvegarde en captivité de Mammifères sauvages ne fait pas recours à la production d’une abondante descendance. En effet, par souci de densités animales et de surfaces disponibles dans les zoos ou les parcs animaliers, la reproduction de deux individus doit être régulée pour assurer leur bien-être. Dans ce contexte, la contraception de tels animaux apparaît comme une solution efficace et intéressante. Or, selon la physiologie et le mode de vie de chaque espèce, une même technique contraceptive n’apportera pas les mêmes effets et pourrait présenter des risques pour l’individu. Ainsi avant de pouvoir choisir le moyen de régulation le plus adapté possible, il faut avoir une connaissance poussée de la socialité et du mode de reproduction de l’individu, dont la fertilité doit être régulée. De nombreux moyens de contraception différents existent, agissant à différents niveaux de l’axe de régulation de la fonction de reproduction. Ces moyens comprennent des hormones, des interventions chirurgicales, et des dispositifs mécaniques. L’AZA et le centre de contraception du zoo de Saint Louis ont émis pour chacune des espèces étudiées dans ce travail (des espèces appartenant aux familles des Félins, des Ongulés, des Ursidés, des Canidés, des Primates, ainsi que les éléphants, les hippopotames et les rhinocéros) des recommandations concernant les moyens de contraception les plus adaptés à chacune. Ces recommandations font l’objet de la troisième partie de cette thèse. Cependant certains chercheurs et animaliers s’inquiètent qu’un tel contrôle de la reproduction n’aboutisse à une perte de la fertilité et de la naturalité des animaux concernés. Mots clés CONTRACEPTION, REPRODUCTION, RÉGULATION, MAMMIFÈRES, CAPTIVITÉ, AZA. Jury : Président : Pr. Directeur : Professeur Hélène COMBRISSON Assesseur : Docteur Alain FONTBONNE Invité : 83 REGULATION OF REPRODUCTION IN SOME WILD MAMMAL SPECIES BRED IN CAPTIVITY BASED ON PROTOCOLS ADVICED BY SAINT LOUIS ZOO AND THE AZA LE NAI Charlotte Summary Contrary to popular thinking, the breeding of wild mammals raised in captivity cannot be sustained by assuring the birth of numerous offspring. Indeed, to prevent such animals from overcrowding or the problems of lack of room in captivity, reproduction by two animals must be controlled in order to assure their well-being. Contraception appears to be a good and reliable solution. But according to the physiology and the way of life of each species, the same contraceptive method will not give the same effects and could even present risks for the animals. For this reason, accurate knowledge of the sociality and reproduction of any animal is needed before selecting the appropriate method of contraception. Many different ways of achieving this exist, reflecting several aspects of the reproduction-regulation axis. This includes the use of hormones, surgery, and mechanical devices. The AZA and the Contraception Center of the Saint Louis Zoo have advised on the most appropriate contraception solutions for each species studied here: Felids, Ungulates, Ursidae, Canidae, and Primates, and elephants, hippos, and rhinos. A survey of this advice comprises the third part of this thesis. However, some researchers and keepers are worried such control could affect fertility of treated animals as well as their integrity as wild animals. Key words : CONTRACEPTION, CAPTIVITY, AZA. REPRODUCTION, REGULATION, MAMMALS, Jury : President : Pr. Director : Professeur Hélène COMBRISSON Assessor : Docteur Alain FONTBONNE Guest : 84