-
les particularismes nationaux qui favorisent des pactes
d'alliance entre le pouvoir politique et les structures mafieuses ;
-
les rivalités commerciales entre Etats-nations.
En
faisant des contradictions marchandes leur principal
atout commercial, les entreprises mafieuses ont internationalisé
de manière performante le trafic des stupéfiants, l'industrie de la
contrefaçon
et les nouveaux marchés issus du piratage informati-
que. Le glissement des activités des organisations criminelles vers
l'économie
de marché a eu des retombées directes sur certaines
pratiques marchandes occidentales. Comme la production et
l'écoulement des marchandises mafieuses reposent sur une ges-
tion permanente du risque en milieu hostile, les cadres responsa-
bles
de ce processus acquièrent une formation aux tactiques de
terrain de la guerre économique bien
plus
redoutable que n'im-
porte quel cadre
d'une
entreprise
légale.
Ces situations économi-
ques particulières donnent naissance à des
élites
criminelles
qui se
normalisent en contaminant peu
à
peu
la
périphérie de leur sphère
d'influence.
Les
exemples du Panama et de la Colobmie sont la partie
visible
d'un péhnomène transculturel qui
a
pris
ses
racines
dans
les
pays industrialisés. Dès l'époque de la prohibition, les Etats-Unis
ont
servi
de champ d'expérimentation à cette criminsalisation des
méthodes concurrentielles. Après plusieurs décennies de campa-
gnes répressives nationales et même internationales, les admi-
nistrations fédérales américaines se sont révélées incapables de
contenir
le développement stratégique des économies mafieuses.
La
mobilisation actuelle des Etats-Nations contre le commerce
des stupéfiants n'estompe pas la réalité historique de cet
échec
par
rapport
aux fondements de la démocratie marchande.
ANTAGONISMES
CULTURELS,
SOCIÉTÉS
DE
CONSOMMATION
ET
MODES DE
VIE
La
mondialisation des échanges a provoqué une
rupture
radicales des équilibres économiques de l'après-guerre. La perte
de vitesse de l'économie américaine et la multipolarité des ten-
sions
marchandes fait apparaître de nouvelles lignes de fracture :
-
renforcement des rivalités économiques
dans
les zones
régionales
du marché mondial, comme nous le
prouve
la guerre
de position entre
le
Japon et les nouvelles puissances industrielles
d'Asie sur le marché Pacifique ;
-
dénonociation multiforme des mécanismes pervers de la
société
de consommation (problèmes écologiques, tensions de la
vie
urbaine, interrogations sur les retombées de l'utilisation
intensive des engrais
dans
l'agriculture, etc.
-
démystification du way
oflife
américain (premiers effets
de lassitude sur la manière de « consommer les loisirs »
dans
certains pays industrialisés de culture latine...) ;
-
montée des antagonismes culturels sur le problème du
mode de vie (développement des intégrismes religieux comme
expression archaïque des contradictions entre les peuples...).
La
division idéologique du monde en deux
blocs
antagonis-
tes,
pays capitalistes et pays socialistes, a masqué
pendant
plus
d'un demi-siècle les contradictions sous-jacentes au système
d'économie de marché qui prédomine en Occident.
L'effondrement des régimes communistes
dans
les
pays est-
européens contribue à
effacer
ce faux-semblant. L'apparition de
plusieurs pôles de développement concurrentiels
autour
de l'océan
Atlantique et de l'océan Pacifique pose le problème de l'équilibre
des échanges entre
les
Etats-nations.
Aujourd'hui,
les
démocraties
marchandes sont contraintes d'intégrer à leur approche globale
du marché mondial la question de l'expansionnisme, c'est-à-dire
comment contenir ou faire échouer la stratégie offensive
d'une
économie
nationale.
La
mondialisation des échanges conduit chaque pays à
recenser
ses points forts et ses points faibles sous peine de faire de
véritables contresens stratégiques. Le nombre d'incertitudes qui
plane sur l'avenir du Grand Marché et de l'Europe politique
oblige
la France et ses partenaires de la CEE à jouer sur les deux
tableaux,
bâtir un développement harmonieux des échanges
tout
en se
préparant
aux affrontements économiques de toute nature.
Les
dialogues constructifs entre cultures marchandes constituent
la
première étape de l'élaboration d'un mode de régulation et de
gestion des flux économiques au niveau planétaire. Mais ils ne
sont pas suffisants
pour
inverser la dynamique actuelle des conflits
marchands.
Théoriquement, le commerce mondial va entrer, à partir de
1993,
dans
une nouvelle ère de réglementation des échanges.
Mais
les principaux litiges marchands qui opposent les pays
industrialisés et
les
pays du Nord et du Sud sont loin
d'être
résolus.
La
volonté de défendre la propriété
intellectuelle,
de lutter contre
la
contrefaçon, de moraliser l'acte commercial, est contredite par
le
durcissement de la position des blocs économiques constitués
par le Japon, les Etats-Unis et la CEE. Le caractère souvent
insoluble des tensions commerciales abordées
dans
le cadre du
GATT
crée un climat favorable au développement des pratiques
illicites
sur un nombre croissant de marchés. Malgré l'importance
prise par
les
organismes internationaux, aucune loi ne
peut
mettre
à
l'abri une entreprise de l'ingérence indirecte d'un Etat
dans
un
enjeu
concurrentiel. Aucune juridiction n'a pu empêcher jusqu'à
présent les structures mafieuses de fausser les lois de la concur-
rence
et de parasiter le fonctionnement des circuits financiers.
Depuis la décolonisation, la tendance naturelle de la France
est
d'œuvrer
pour
une recherche de l'équilibre des échanges entre
les
démocraties marchandes. De même qu'elle a dénoncé jadis la
politique des blocs idéologiques, de même la France se démarque
naturellement de la politique des
blocs
économiques, dès l'instant
où ces blocs économiques accentuent les tensions conflictuelles
entre le Nord et le Sud et,
plus
près de nous, les disparités entre
l'Europe de l'Ouest et l'Europe de
l'Est.
La
réussite de la construc-
tion européenne passe par l'instauration d'un nouveau dialogue
marchand, qui tienne compte à la
fois
des décalages de dévelop-
pement et des risques de saturation concurrentielle
dans
l'évolu-
tion du volume des échanges des pays industrialisés.
Notes
1. Charles Goldfinger,
la Géofinance,
pour
comprendre la
mutation
financière,
éditions du
Seuil,
Paris,
1986.
2. Les
junk
bonds
sont des obligations à risque, émises par des
entreprises déjà anciennes en difficulté ou par des entreprises de création
récente
à la recherche
d'une
crédibilité bancaire. Cet instrument finan-
cier,
apparu
au
début
des années soixante-dix sur le marché américain,
offre
une rémunération supérieure
aux
obligations
traditionnelles
placées
par les banques.
Les
junk
bonds
représentent actuellement
plus
de 25 %
du total des émissions obligataires aux Etats-Unis.