Procédure de référé précontractuel et contenu de l`AAPC_HL

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Procédure de référé précontractuel
et contenu de l’AAPC
Avocat du cabinet Symchowicz-Weissberg et associés, Hervé Letellier analyse une récente ordonnance de
TA évoquant à la fois les conditions de réouverture de l’instruction par le juge du référé précontractuel et la
nature des informations à faire figurer dans la rubrique « procédures de recours » des avis de publicité.
Hervé Letellier
Contexte
Le SYDED, syndicat départemental pour l’élimination des déchets ménagers et
assimilés de la Haute-Vienne, a lancé une procédure communautaire d'appel
d'offres en vue de la passation d’un marché public de fourniture de composteurs.
Plusieurs sociétés se sont portées candidates, dont la société FM Développement.
Suite à son éviction, cette dernière a saisi le juge du référé précontractuel en
arguant, principalement, de l’insuffisance de la rubrique « procédures de recours »
de l’avis d’appel public.
La particularité de cette affaire réside dans le fait que cette société se bornait, dans ses écritures initiales, à
invoquer cette méconnaissance au regard du modèle d’avis national annexé à l’arrêté du 28 août 2006.
L’aspect communautaire des choses, et notamment le non-respect du modèle joint au règlement
2005/1564, n’était en effet explicitement mis en avant que postérieurement à l’audience, par le biais d’une
note en délibéré.
Deux questions se posaient donc au magistrat : dans quelle mesure ce moyen pouvait-il être invoqué via
une note en délibéré ? Quelles mentions devaient effectivement figurer dans la rubrique « procédure de
recours » des avis publiés au JOUE ?
Juge du référé et clôture de l’instruction
En premier lieu, le juge avait à se prononcer sur la recevabilité du moyen tenant à la violation des règles
communautaires.
Confronté à l’évolution de l’argumentaire juridique précédemment évoqué, le magistrat, se fondant sur les
dispositions de l’article R. 522-8 alinéa 1er du Code de justice administrative (« l'instruction est close à
l'issue de l'audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l'instruction à une
date postérieure dont il avise les parties par tous moyens (…) »), avait décidé, par une mesure provisoire,
de différer la clôture d’instruction suite à la note en délibéré communiquée après l’audience. Le SYDED
contestait la régularité de ce procédé pour plusieurs raisons.
D’abord, il soutenait que les conditions imposées pour recourir à une telle mesure n’étaient pas réunies.
Selon la collectivité, l’article R. 522-8 alinéa 1er ne pouvait être mis en jeu que dans l’hypothèse où le
magistrat s’estimait, suite aux échanges écrits et oraux, insuffisamment informé sur certains points
particuliers du dossier (cf. M. Chabanol, CJA commenté, éd. Le Moniteur, p. 435). L’objectif de cette
disposition est en effet, avant tout, de permettre au juge du référé d’être éclairé sur un point déterminé
(généralement factuel) évoqué par l’une des parties avant ou pendant l’audience, et non de permettre au
requérant d’invoquer un nouveau fondement à l’appui de sa demande.
Ensuite, s’ajoutait le fait qu’un différé de clôture d’instruction suppose, d’un point de vue étymologique du
moins, que l’instruction ne se trouve pas déjà close. Le terme d’une période ne peut en effet être différé si
celle-ci est déjà expirée (de la même manière, par exemple, que la signature du marché ne peut être
différée si celui-ci a déjà été conclu). En l’espèce, le magistrat ne pouvait donc différer la clôture de
l’instruction deux jours après l’audience, puisque, à l’issue de celle-ci, elle était d’ores et déjà close. La
collectivité soutenait en conséquence que la seule possibilité offerte au magistrat était, non pas de différer,
mais de rouvrir l’instruction, ce qui impliquerait alors une nouvelle audience au sens de l’alinéa 2 de l’article
R. 522-8 (« l’instruction est rouverte en cas de renvoi à une autre audience »).
Le magistrat a pourtant retenu une solution autre en considérant « qu’il a toujours la faculté dans l’intérêt
d’une bonne administration de la justice, de rouvrir l’instruction et de soumettre au débat contradictoire les
éléments contenus » dans une note en délibéré. Il a ainsi considéré être à même de connaître du moyen
tiré de la violation des modèles d’avis communautaires. Cette solution n’allait cependant pas de soi. En
effet, si l’ordonnance prend la peine de préciser, contournant ainsi les arguments avancés par la
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collectivité, qu’était en cause une réouverture d’instruction (alinéa 2 de l’article R. 522-8 du CJA) – alors
que la mesure d’instruction visait l’hypothèse d’un différé de clôture (alinéa 1er) –, elle n’en tire pas toutes
les conséquences procédurales qui, semble t-il, s’imposaient, en convoquant à une nouvelle audience.
Concrètement, la collectivité n’a ainsi pas pu s’exprimer oralement sur le moyen invoqué.
Si les procédures de référé précontractuel impliquent nécessairement un échange soutenu entre les
parties, parfois de dernière minute, voire même après l’audience, il convient néanmoins de veiller à ce que
cette pratique ne puisse conduire les requérants à pouvoir, après la fin normale de l’instruction, et en
violation des droits de la défense, invoquer de nouveaux moyens non encore débattus.
Contenu de la rubrique « voies de recours ».
L’argument ayant été considéré comme recevable, restait ensuite à étudier si, au regard des modèles
d’avis communautaires, l’indication du tribunal administratif territorialement compétent pour connaître des
recours constituait une mention suffisante.
Il s’agit là d’un moyen « à la mode » des procédures de référé précontractuel, résultant de l’apparition de la
rubrique « procédures de recours » dans les nouveaux modèles d’avis communautaires. Cette rubrique, qui
porte le numéro VI.4, est subdivisée en trois catégories : la VI.4.1 impose de mentionner les coordonnées
de l’« Instance chargée des procédures de recours », la VI.4.2 s’intitule « Introduction des recours » et
comporte l’indication : « Précisions concernant le(s) délai(s) d’introduction des recours », la VI.4.3 enfin est
relative aux coordonnées du « Service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus
concernant l’introduction des recours ». Notons toutefois que la rubrique VI.4.2 est assortie de la mention «
veuillez remplir la rubrique VI.4.2 OU, au besoin, la rubrique VI.4.3 ». On est ainsi en présence de trois
rubriques qui sont donc théoriquement toutes obligatoires, même si la deuxième d’entre elles peut être, a
priori, remplie par le biais du renseignement de la troisième.
En l’espèce, la difficulté résultait de ce que la collectivité n’avait rempli que la rubrique VI.4.1. Faisant une
application stricte de la règle de droit, le magistrat a alors considéré que faute d’avoir complété, en sus, la
rubrique VI.4.2 ou VI.4.3, la procédure était viciée. Une collectivité ne peut donc se borner à faire état, dans
la première rubrique, de la juridiction en charge des recours ; quand bien même aurait-elle entendu par ce
biais implicitement se référer à cette même instance au titre de la rubrique VI.4.3 en qualité, cette fois, de
service auprès duquel des renseignements peuvent être obtenus concernant l’introduction des recours. En
bref, la rubrique VI.4.1 doit être impérativement remplie, de même que l’une des deux suivantes. Il s’agit là,
à l’évidence, d’une interprétation qui juridiquement repose sur une lecture difficilement contestable des
modèles communautaires, confirmée d’ailleurs par d’autres décisions (TA Orléans, Ord. 19 mars 2007,
Société Signature SA, req. n° 0700734 ; TA Nice, Or d. 11 janvier 2007, Sté Clear Channel France, req. n°
0606631 ; TA Rennes, Ord. 15 décembre 2006, Société Idex Energies, req. n° 064794 ; TA Paris, Ord. 18
octobre 2006, Société Secuserve, req. n° 0614224).
L’ordonnance du Tribunal administratif de Limoges s’insère, ce faisant, dans une mouvance
jurisprudentielle particulièrement rigoureuse quant au contenu et à la pertinence des informations
communiquées aux candidats au titre de la rubrique « procédures de recours ». Les collectivités, au-delà
de la mention de l’instance chargée des recours (généralement le TA territorialement compétent, mais qui
peut être aussi le juge judiciaire pour les marchés soumis à l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005) – ce
qui ne recouvre toutefois pas les organes de médiation, sauf lorsqu’ils sont obligatoires (TA Paris, Ord. 22
mars 2007, Société Unilog IT Services, req. n° 0703 033/3 ) – doivent ainsi prêter une attention toute
particulière lorsqu’elles choisissent de remplir la rubrique VI.4.2 afférente au délai d’introduction des
recours. Il conviendra, à cet égard, non seulement, de viser l’hypothèse du référé précontractuel sans se
borner à évoquer les recours au fond (TA Versailles, Ord 11 décembre 2006, Sté Les paveurs de
Montrouge, req. n° 0611120), mais aussi de préciser que ce référé peut être intenté jusqu’à la signature du
contrat, la seule mention du délai de 10 jours sans référence aux conséquences de la signature étant
insuffisante (TA Toulouse, Ord. 28 février 2007, Société Clear Channel France, req. n° 07//577). Il sera tout
aussi prudent, pour éviter toute surprise, de mentionner, au-delà du référé, le recours pour excès de
pouvoir et le recours indemnitaire, avec leurs délais respectifs. Quant à la rubrique VI.4.3 (obligatoire
seulement lorsque la rubrique VI.4.2 n’est pas elle-même remplie, et inversement), on peut envisager de
mentionner, ou bien, l’adresse du tribunal compétent en reprenant une information identique à la rubrique
VI.4.1, ou bien, celle du service de la collectivité susceptible de donner les informations considérées.
Cela étant dit, le contenu même de la rubrique VI.4.3 qui vient d’être évoqué, confirme le caractère
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particulièrement rigoureux de l’interprétation retenue par l’ordonnance commentée. On peut en effet, même
si les termes de la directive sont explicites, s’interroger sur l’utilité de mentionner dans la rubrique VI.4.1
l’adresse du tribunal compétent pour le refaire quelques lignes plus bas au titre de la rubrique VI.4.3. Ainsi,
pour reprendre l’hypothèse d’espèce, la procédure se trouve annulée alors même que l’information
imposée par les textes – en l’occurrence l’adresse du TA de Limoges – se trouve déjà dans l’avis, mais
sans être expressément réitérée, au bon endroit, au titre du service susceptible de donner des
renseignements ! D’ailleurs, il est intéressant de noter que le modèle d’avis de publicité national, qui ne
comporte qu’une seule rubrique, a pris le parti de considérer que le service auprès duquel des
renseignements peuvent être obtenus est nécessairement l’instance chargée des procédures de recours.
C’est sans doute pour ces raisons que le TA de Paris a, pour sa part, jugé que la procédure qui était
contestée devant lui était régulière alors que la collectivité s’était pourtant bornée à ne faire état que du
tribunal compétent (TA Paris, Ord. 23 février 2007, Société Clear Channel France, req. n° 0701657).
Encore une fois, et même si la jurisprudence semble fixée en faveur d’une interprétation rigide des textes,
certains juges – sans doute en raison de considérations d’intérêt général tenant à la spécificité du marché
contesté – adoptent donc des positions quelque peu divergentes. A nouveau, l’intervention du Conseil
d’Etat sur la question pourrait être salutaire pour clarifier l’état du droit. Mais d’ici là, il ne peut qu’être
conseillé aux collectivités d’être particulièrement rigoureuses, comme pour toutes les rubriques des avis de
publicité, dans les informations communiquées aux candidats au titre des voies de recours.
Hervé Letellier © achatpublic.info, 01/05/2007
Pour obtenir l’ordonnance : [email protected]
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