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Céréales
Petite graine sucrée
Texte de Snezana Gerbault
Apprécié et cultivé pour ses grains
croquants et sucrés, le maïs doux
est destiné exclusivement à
l’alimentation humaine. Riche en
sucre, en vitamines et en sels
minéraux, le maïs doux ne
contient pas d’amidon contrairement
aux autres variétés de maïs.
La France est le troisième
producteur mondial de cette
céréale que l’on s’habitue à
consommer en tant que légume
cru, cuit ou grillé. Afin de
répondre à une demande
croissante, les surfaces cultivées
ne cessent d’augmenter
d’une année à l’autre…
Les grains
Maïz’Europe
de
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e maïs sucré ou maïs doux, ( Zea
mays saccharata Sturt.), sweet corn
ou sugar corn pour les Anglo-Saxons,
est une variété hybride du maïs (Zea mays),
plante herbacée de la grande famille des
Poacées. On le nomme aussi « blé de Barbarie », « blé de Guinée » ou « blé de Turquie », « froment des Indes » ou « blé indien », alors qu’au Brésil, il est « milho
verde », le maïs vert. Son origine était pendant très longtemps mal connue, d’où ces
étranges et nombreuses appellations qui lui
ont été attribuées au fil du temps. Son nom
« maïs » vient de l’espagnol, maiz, ce qui
désigne également un petit grain qui ne dépasse pas la taille d’un petit pois. Les Espagnols l’ont d’ailleurs emprunté à la langue
parlée d’une ethnie amérindienne, les Tainos, qui le cultivaient à Haïti. Quant au
nom générique, Zea, il est certainement originaire du mot grec zeia, qui désigne une
céréale cultivée dans l’Antiquité.
Sans doute la plus ancienne céréale du continent américain, le maïs est bien connu des
civilisations des Mayas, des Aztèques et des
Incas et constituait la base de leur alimentation avant l’arrivée de Christophe Colomb.
Aujourd’hui encore, c’est la plante sacrée
chez certaines populations du Guatemala et
du Mexique. Le maïs fut introduit sur le
continent européen au XVIe siècle et il est aujourd’hui la première céréale mondiale qui
devance par les surfaces cultivées celles de
blé et de riz. Vers le milieu du XXe siècle arri-
La France, troisième producteur mondial
Le maïs est cultivé partout dans le monde et la culture de cette céréale importante occupe
environ 157 millions d’hectares. Les Etats-Unis, premier producteur mondial, consacrent
plus de 32 millions d’hectares au maïs à grain et 200 000 ha à la culture de maïs doux, dont
60 000 ha sont destinés à la production des épis (qui sont cueillis en même temps que les
grains). En France, selon les années, les surfaces occupées par le maïs doux varient entre
20 000 et 25 000 ha, ce qui la situe en troisième position mondiale. L’Union européenne
est le deuxième grand producteur avec la Hongrie (44 %) qui aujourd’hui fait concurrence à la France (35 %) et risque de la détrôner de sa troisième position mondiale. Mais
la demande n’est pas la même : « Aux Etats-Unis, on consomme 12 kg de maïs par personne et par an, au Canada 10 kg alors qu’en France nous en sommes à ce jour à moins
d’un kg par personne et par an » constate Matthieu Çaldumbide, chargé de mission à
l’AGPM, Association Générale des Producteurs de Maïs.
Les nouveaux marchés émergent et surtout celui de la Thaïlande, le premier exportateur dans le monde. Les Etats-Unis sont le plus grand producteur mais une grande
partie de leur production reste à l’intérieur du pays (ce pays était le troisième exportateur mondial de boîtes en 2008). La Russie est l’un des plus grands pays importateurs du maïs doux et son marché est en pleine expansion.
vent les premiers hybrides et la culture de
maïs s’intensifie. À partir des années cinquante, la France devient l’un des plus
grands producteurs dans le monde. Le maïs
fut d’abord cultivé comme plante fourragère
et comme céréale pour ses grains riches en
amidon destinés surtout pour la consommation animale. Ce n’est que dans les années 1970 que se développe la production de
maïs doux en France. Apprécié depuis fort
longtemps aux Etats Unis et en Angleterre,
cet aliment a déjà bien conquis le marché
français où il est disponible aujourd’hui sous
forme d’épis frais, en conserve ou surgelés.
Un peu de botanique
Le maïs doux appartient à la sous-famille
des Panicoideae (famille des Poacées) tout
comme la canne à sucre et le sorgho et
contrairement aux autres céréales que
ins
Maïz’Europe
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La France est le 3e pays producteur de maïs.
de maïs ont une teneur variable en sucres.
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Les épis de fleurs femelles à l’aisselle des longues feuilles.
sont riz, blé, orge ou seigle, qui font partie
de la sous-famille des Pooidae. Le maïs se
distingue des autres céréales par son caractère monoïque : chaque pied est bisexué (la plante porte des fleurs mâles et
femelles) mais les sexes sont séparés et
portés par des inflorescences distinctes.
Aujourd’hui le maïs fait partie de la tribu
des Maydeae (selon les résultats obtenus
par Doebley et Iltis, publiés en 1980). Au
XIXe siècle, le botaniste américain Sturtevant classe les maïs en plusieurs groupes,
selon l’aspect de ses grains : maïs doux,
corné, cireux, farineux, denté, perlé, vêtu.
Cependant, cette classification fut abandonnée au profit d’une autre qui tenait
compte de plusieurs autres caractères.
C’est ainsi qu’en 1977, Robert Bird et Major
Goodman parlent de 14 catégories de maïs.
Le maïs doux forme une tige épaisse qui
peut atteindre deux mètres de hauteur
pour les variétés couramment cultivées.
La tige porte plusieurs nœuds d’où partent les feuilles luisantes et larges d’environ 10 cm et très longues, mesurant parfois plus d’un mètre, à l’aisselle desquelles
poussent des fleurs femelles rassemblées
en épi. Protégé par de nombreuses feuilles
modifiées, les spathes, l’épi de maïs porte
de nombreuses graines, les caryopses, qui
se succèdent d’une façon très régulière autour de l’axe central nommé la « rafle ».
Un épi mature peut compter entre 500 et
mille grains. De trois à quatre épis se développent sur un même pied, mais très
38 souvent, un seul arrive au stade de développement complet. Les « soies », les filaments longs et soyeux coincés entre les
feuilles, appelés également « cheveux de
maïs » ou « barbes de maïs », sont en effet
les styles de l’inflorescence femelle portant à leur bout les stigmates. Une panicule terminale qui apparaît au sommet de
la tige après la dernière feuille, regroupe
les fleurs mâles, les épillets, dont chacun
porte deux fleurs à trois étamines.
Issu d’une sélection
naturelle
Le maïs doux est probablement un mutant
naturel, apparu pour la première fois dans
les champs de maïs denté (Zea mays indentata) suite à une mutation d’un gène
qui contrôle la conversion du saccharose en
amidon. Il s’agit du gène récessif « su » qui
code la « sucrase synthase enzyme » qui est
nécessaire à la transformation du sucrose
en fructose, étape intermédiaire dans la fabrication de l’amidon. Cette mutation empêche le déroulement de ce processus et la
fabrication de l’amidon, tout en préservant
les sucres (glucose et fructose). Résultat
final : le maïs doux, contrairement aux autres maïs, ne contient pas d’amidon, et ceci
est prouvé par le test à l’eau iodé (l’amidon
se teint en bleu). Chez le maïs doux, il n’y
a pas de coloration, donc pas d’amidon.
Au XXe siècle, apparaissent les mutants
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« se » (sugary enhanced) qui se montrent
plus adaptés à une commercialisation à
l’état frais. Dans les années 1950 fut isolé
un gène, le « sh2 » (shrunken-2), qui agit
sur la production de l’enzyme qui convertit le sucre en amidon. « Le gène Sh2 est
une forme dominante nécessaire aux premières étapes de la biosynthèse de l’amidon. Un autre type de maïs doux dit
« super sweet » possède le gène « su » mais
pas la forme dominante de Sh2 obligatoire
pour la synthèse de l’amidon. Donc il ne
contient pas d’amidon », explique Xavier
Foueillassar, ingénieur semences innovation chez Arvalis-Institut du Végétal à Pau.
La présence de ce gène empêche cette
conversion. Afin que ce caractère instable
persiste (le gène sh2 est récessif et pas dominant), les cultures de variétés de maïs
doux doivent être éloignées des autres variétés de maïs qui possèdent Sh2 dominant,
pour éviter les éventuelles pollinisations
croisées qui risquent d’entraîner la fabrication d’amidon dans les graines. Une distance minimale, au moins de 50 m voire
100 m par rapport aux autres cultures de
maïs, était indispensable. Aujourd’hui, les
producteurs de semences proposent un
maïs doux qui produit sur un même épi
des grains portant les gènes « se » et « sh2 »
et ces variétés ne réclament pas de mesures
d’isolement. La plupart des variétés semées aujourd’hui sont des hybrides et peu
de variétés traditionnelles sont cultivées.
Il existe trois grandes familles de maïs
doux : les variétés sont classées selon la couleur des graines (blanche, jaune ou bicolore).
Elles sont aussi classées selon leur patrimoine génétique qui gouverne la teneur en
sucres des graines. Le type standard, le maïs
doux « intermédiaire » (su, Sh2), présente
des variétés productives et vigoureuses,
mais à faible taux de sucre (‘Silver Queen’ à
graines blanches, ‘Jubilee’ à graines jaunes),
et de ce fait il très peu utilisé. Le type (SE)
sucré, le maïs doux sweet compte quelques
variétés précoces mais moins productives
que celles du premier groupe (‘Miracle’ à
graines jaunes, ‘Sweetie’ et ‘Badaïque’ à
graines blanches). Le type SE est utilisé en
grande partie pour la conserve. On le
consomme rarement en épis car il possède
une texture collante et adhère beaucoup aux
muqueuses. Quant au maïs doux de type
« super sweet » (SU, sh2), super sucré, uti-
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lisé par la plupart des industriels du frais, il
possède un goût très sucré grâce à la présence de ce gène qui retarde la transformation des sucres en amidon, un caractère lui
permettant une meilleure conservation par
rapport à la variété sweet. Dans la famille
« super sweet », on distingue plusieurs variétés qui se différencient par leur saveur, la
taille de l’épi, leur teneur en sucre et l’aspect
des grains. On peut citer les variétés ‘Aspen’
à graines blanches, ‘Chalenger’ et ‘Supersweet Jubilee’ à graines jaunes.
Le maïs doux français
En France, le maïs doux est cultivé dans
deux zones principales : en Aquitaine
avec 92 % des surfaces (Landes, PyrénéesAtlantiques, Lot-et-Garonne, Gironde,
Gers, Tarn-et-Garonne) et dans le Loir-etCher avec 5 à 8 % de surface. Le maïs
doux français est exporté vers les pays de
l’UE (à 90 %), surtout en Allemagne,
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Grande-Bretagne, Espagne, Italie, pour
une balance commerciale de plus de 100
millions d’euros. Près de trois quarts des
boîtes de maïs doux en grains sont exportées vers l’étranger.
« La filière française est très bien organisée, à chaque étape, depuis la production
jusqu’à la transformation, ajoute M. Çaldumbide. Des partenariats très anciens
datant des années 1970, entre coopératives, producteurs et industriels, permettent une grande efficacité, et notre zone de
production est parmi les plus importantes
du monde. Par ailleurs, une traçabilité totale de chaque produit permet de contrôler toutes les étapes de la production ».
Les contrats sont établis entre producteurs
et coopératives, partenaires de groupes industriels (comme Géant, Bonduelle, Daucy).
Quant aux variétés, les industriels les sélectionnent en fonction de leurs besoins,
de leur production ou de performances
agronomiques recherchées. « Les usines
de transformation se situent très souvent
à proximité des champs de culture pour
préserver au maximum la fraîcheur de récolte, explique Anne Kettaneh, responsable de la communication de l’AGPM. Il ne
s’écoule que six heures entre la récolte et
la mise en boîte du produit ». Les épis sont
cueillis et nettoyés, les grains enlevés sont
triés afin d’éliminer les débris et les insectes, puis plongés dans l’eau salée pendant 3 à 4 minutes à 100 °C, et stérilisés
encore quelques minutes à une température entre 125 et 320 °C. Ce procédé n’utilise aucun additif ni agent conservateur.
La surgélation s’effectue également par
des traitements thermiques naturels à
–18 °C pendant quelques minutes.
La société « Sweet Corn Midi-Pyrénées »
produit le maïs « super sweet », qu’elle exporte vers les pays de la Communauté européenne, Allemagne, Suisse, Pays scandinaves, etc. Aurélie Millet, responsable de la
communication souligne : « Ce maïs sans
OGM est cueilli à maturité, lorsque les épis
affichent une belle couleur jaune et que les
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La production de maïs doux en France s’est développée dans les années 1970.
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Une haute valeur
nutritionnelle
La variété la plus succulente de maïs, le
maïs doux, est un légume à part entière. Il
existe plusieurs variétés adaptées à la
consommation en conserve, en surgelé, en
épis ou égrené et mis en conserve. La
graine tendre et croquante est récoltée tôt
au stade laiteux, lorsqu’elle contient environ 70 % d’eau. Pour vérifier sa maturité,
il suffit de l’appuyer légèrement : si un
« lait » blanchâtre apparaît, le maïs est
prêt pour la récolte. Selon la variété, son
goût est plus ou moins fin et son enveloppe plus ou moins épaisse. Tout juste récolté, il peut même être consommé cru, ou
simplement salé avec un peu de beurre.
Le maïs égrené est utilisé dans les soupes,
pizzas, salades composées, il accompagne
les plats de viandes, de poissons, de volailles, etc. Lors de la cuisson, les grains
augmentent de volume jusqu’à deux fois.
Pendant la cuisson, il faut éviter de saler
l’eau qui durcit l’enveloppe des grains.
Les épis sont cueillis et congelés lorsqu’ils
sont très tendres avant la maturation des
grains. Cuits avec toutes leurs feuilles, ils préservent leur goût intense. Les grains secs peuvent également être consommés à maturité.
Le maïs sucré possède une haute valeur
nutritive et énergétique. Il est riche en sels
minéraux (magnésium, phosphore, potassium, fer), en provitamines A (carotène) et
vitamine B, en protéines et fibres, et surtout, il est peu calorique : 97 kcalories
pour 100 g dont 18 g de glucides. Grâce à
son faible taux glycémique, c’est un aliment qui n’augmente que modérément le
taux des glucides dans le sang et, de ce
fait, ne favorise pas le « stockage » de
l’énergie sous forme de graisses. Grâce à
sa richesse en fibres, le maïs doux est bénéfique pour le transit intestinal et fournit
l’énergie qui est utilisée lentement par
l’organisme. Par ailleurs, c’est une céréale
sans gluten, indiquée dans l’alimentation
40 Le maïs doux, au jardin aussi…
De nombreux jardiniers apprécient la présence de maïs doux dans leur jardin, surtout
dans le coin du potager. Certains ont même osé en constituer des haies. Excellent brisevent, elles sont en même temps très productives et offrent des épis à consommer tout
l’été. Semez directement sur place en poquets de trois ou quatre graines, à une distance d’environ 80 cm. Éclaircissez après la levée en laissant un ou deux plants par
trou. Il ne faut oublier d’arroser lors de la levée, juste avant la floraison et surtout en
période de grossissement des grains. Sarclez, binez et enlevez les mauvaises herbes
de préférence avant la floraison afin de ne pas perturber les plantes. Un sol enrichi en
compost assure une meilleure récolte. Le maïs doux craint surtout la fusariose provoquée par les bactéries Fusarium roseum et Giberella zeae. Ces attaques peuvent être néfastes pour les jeunes plants car elles entraînent une mauvaise levée. Le charbon est dû
à un champignon, Ustilago zeae, qui se développe sur les épis, la tige ou la panicule…
des personnes allergiques à ce composant.
Dans la pharmacopée traditionnelle, les
« cheveux du maïs » sont réputés pour
leurs propriétés diurétiques et, grâce à leur
teneur élevée en vitamine K, ils possèdent
aussi des vertus antihémorragiques.
Une plante peu exigeante
Le maïs est une plante annuelle qui nécessite pour sa croissance de la chaleur, de
l’eau et de l’espace. Comme il s’agit d’une
espèce d’origine tropicale, sa culture ne va
pas au-delà des régions tempérées. Tout
comme la tomate, le maïs redoute le froid,
mais aussi des températures trop élevées
qui risquent de réduire la qualité des épis.
Pendant la période de croissance, le maïs
réclame au moins 500 mm d’eau pendant
les trois mois d’été et surtout lors du remplissage des grains. Le maïs s’adapte à tous
les types de sols, mais apprécie les terres
profondes et riches en matières organiques.
La rotation des cultures est bénéfique et
permet d’obtenir des récoltes de qualité. Le
maïs doux se cueille au moment où ses
« soies » changent de couleur et commencent à brunir. Pour mieux apprécier la fraîcheur et le croquant des grains, il faut récolter les épis bien fermes et homogènes,
légèrement dorés. Les déchets verts qui en
résultent peuvent être employés en tant que
fourrage d’excellente qualité. Maïz’Europe
feuilles qui les protègent sont encore vertes.
Les graines doivent avoir un goût sucré ».
Les épis entiers sont alors mis en emballage
sans aucun conservateur. Ils se conservent
comme tous les autres légumes frais, une semaine environ à une température de 4 à 7 °C.
Le maïs sucré possède une haute valeur nutritive.
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