TECHNIQUES ACTUELLES DE TRAITEMENT

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Rachis, 1991, vol 3, n° 2, pp. 175-183
SYNTHÈSE
TECHNIQUES ACTUELLES
DE TRAITEMENT CHIRURGICAL
DU CANAL LOMBAIRE ÉTROIT
PROCEDURES lN LUMBAR SPINAL STENOSIS SURGERY
R. ROY-CAMILLE*,
G. SAILLANT*, L, DOURSOUNIAN**,
E. ROLLAND *
* Service d'Orthopédie et de Traumatologie, Hôpital de la Pitié, 83, boulevard de l'Hôpital, 75651 Paris cedex 13.
** Service d'Orthopédie, Hôtel-Dieu, place du Parvis Notre-Dame, 75004 Paris.
RESUME
SUMMARY
La technique classique de lamino-arthrectomie partielle réalise une résection de l'arc postérieur dans 3
plans : sagittal (résection des épineuses), frontal
(laminectomie) et oblique (résection de la face antérieure des massifs articulaires).
The classical partial lamino-arthrectomy performs a
resection of the posterior arch in 3 planes : sagital
(resection of the spinous process), frontal (laminectomy) and oblique (resection of anterior face of the articular process).
La technique de la "carapace de homard" consiste à
enlever en monobloc les arcs postérieurs en utilisant
une scie oscillante. Elle peut paraître agressive, en
fait elle est moins traumatisante et plus rapide.
The "carapace de homard" procedure consists in a
monobloc removal of the posterior arch with an oscillating saw. It may appear aggressive, but in fact it is
less invasive and much faster.
Plus récemment, des techniques de décompression
interne (recalibrage, fenestration) ont été décrites
Elles réalisent une décompression nerveuse efficace
au prix d'une résection osseuse et ligamentaire économique pour prévenir une déstabilisation et améliorer les suites post-opératoires.
Recently internaI decompression procedures (recali.
bration, fenestration) were developed, they realise an
efficient neural decompression with much less osteoligamentous excision in order to prevent from destabilisation and to hasten recovery.
This paper describes the evolution of our surgical procedure in order to simplify it, to be less agressive and
to minimize post operative complications (hemorrage,
duraI iatrogenic lesion, neurological complications)
and to prevent as often as possible spinal destabilisation and thus reduce arthrodesis indications.
Cet article décrit l'évolution que nous avons suivie
dans la technique opératoire, avec pour but de la
simplifier, d'être moins agressif sur le rachis, de
diminuer les complications post-opératoires (hémorragie, brèches dure-mériennes, troubles neurologiques par hématome compressif), et d'éviter chaque
fois que possible la déstabilisation du rachis, ce qui
diminue les indications d'arthrodèse.
Mots-clés : Canal lombaire étroit - Lamino-arthrectomie
Décompression
interne - Déstabilisation
partielle
Key words:
-
Lumbar spinal steno sis - Partial lamino-arthrectomy
Internai decompression - Destabilisation - Arthrodesis
- Arthrodèse.
175
-
TECHNIQUES
ACTUELLES
DE TRAITEMENT
CHLRURGICAL
DU CANAL LOMBAIRE
ÉTROIT
• faut-il libérer les éléments neurologiques en fonction
des signes cliniques et des signes électrophysiologiques ?
ceci est une évidence;
La sténose canalaire lombaire est une pathologie complexe dans sa constitution et dans son évolution. Le
succès indiscutable du traitement chirurgical ne peut
être établi que grâce à une sélection rigoureuse des
patients, une analyse précise de la topographie des sténoses et une technique opératoire adaptée à chaque processus compressif.
• faut-il élargir le geste devant certaines images de
compression radiologique qui n'ont pas de traduction
clinique (bilatéralisation de la libération alors que la
symptomatologie est unilatérale, extension de la libération vers le haut ou vers le bas alors qu'un seul étage est
cliniquement incriminé : la question reste posée et doit
être résolue en fonction de chaque cas.
Nous rappellerons donc les éléments fondamentaux de
l'option chirurgicale, puis nous décrirons les différentes
techniques.
L'indication opératoire ne doit être portée qu'avec la
certitude du diagnostic, tant sur le plan clinique que
radiologique. Les différents éléments cliniques (claudication neurogène, radiculalgie
de repos ou d'effort
unique ou multiple, lombalgie, etc.) sont bien connus de
tous, nous n'y reviendrons pas ici. Quant aux examens
complémentaires, radiographie standard, scanner, saccoradiculographie, résonance magnétique nucléaire ou
examens électrophysiologiques
(électromyogramme,
potentiels évoqués somesthésiques),
ils sont du plus
grand intérêt pour préciser de façon exacte la topographie du geste chirurgical à effectuer.
Comment intervenir?
Devant le conflit contenant-contenu
qui constitue le
canal lombaire étroit, le principe de l'intervention chirurgicale, quelles qu'en soient les modalités techniques,
consiste à agrandir le contenant vertébral en agissant
sur les éléments osseux, ligamentaires ou discaux.
Nous décrirons successivement
les techniques
de
décompression large pour sténose dégénérative globale
(lamino-arthrectomie partielle "de proche en proche" et
"carapace de homard"), les techniques de décompression économique (recalibrage, fenestration) moins traumatisantes, plus électives et moins déstabilisantes et
enfin les techniques de stabilisation et les cas particuliers.
Où intervenir?
Cela dépend essentiellement
des caractères anatomiques de la sténose qui peut être centrale, latérale ou
globale.
TECHNIQUES DE DÉCOMPRESSION
LARGE
POUR STÉNOSE DÉGÉNÉRATIVE
GLOBALE
La sténose centrale(7) correspond à une étroitesse du
diamètre antéro-postérieur ou transversal du canal vertébral. Elle intéresse les racines à l'intérieur du fourreau
durai; elle peut être associée à une sténose latérale.
La sténose latérale se divise en sténose du récessus et
du foramen. La racine peut, en effet, être comprimée au
niveau du récessus latéro-pédiculaire, limité en dehors
par le pédicule, en avant par le corps vertébral, en arrière par la partie interne de l'articulaire supérieure ; elle
peut être comprimée plus loin, au niveau du foramen.
Installation
Pour la plupart des opérateurs, le patient est installé
dans une position dérivée de la position genu-pectorale.
Le patient repose sur le thorax et les genoux et/ou les
épines iliaques antérieures avec l'abdomen libre de
toute compression. Cette posture diminue la pression
intra-abdominale,
donc celle des veines épidurales et
minimise le saignement opératoire. Une hypotension
contrôlée réalisée chaque fois que l'état général du
patient le permet, améliore le confort opératoire.
Hanches et genoux sont fléchis de manière à éviter la
compression des axes vasculaires et relâcher les éléments nerveux. L'idéal est d'utiliser une table spéciale
permettant le passage de la cyphose à la lordose en
toute sécurité durant l'intervention.
Les éléments sténosants peuvent être osseux (ostéophytes le plus souvent) ou mous (disque, capsule articulaire, ligament jaune). Le nombre d'étages sténosés est
variable. La sténose peut être localisée ou pluri-étagée.
Elle peut être uni ou bilatérale. La sténose peut être
enfin permanente, quelle que soit la position de la
colonne lombo-sacrée, ou intermittente, ne survenant
que dans certaines positions (lordose le plus souvent).
Le résultat de la chirurgie est ainsi étroitement lié à la
parfaite connaissance pré-opératoire des différents composants de la compression et à la libération effective de
tous les niveaux et des sites sténosés.
L'utilisation d'un monitoring des potentiels évoqués
pendant l'intervention n'est pas systématique. Elle renseigne sur une éventuelle aggravation per-opératoire et
parfois sur l'efficacité de la décompression.
En fait, toute la difficulté est de définir la limite exacte
du geste chirurgical à réaliser:
176
R. ROY-CAMILLE*,
G. SAILLANT*,
L DOURSOUNIAN**,
E. ROLLAND
*
Exposition des arcs
postérieurs
sur la ligne médiane où il existe toujours
zone de ligament jaune non recouvert d'os.
Après une incision médiane suivant la ligne des épineuses, les gouttières para-vertébrales sont dégagées au
bistouri électrique jusqu'au bord externe des massifs
articulaires en réalisant pas à pas une hémostase soigneuse. Les écarteurs autostatiques sont mis en place.
Habituellement, le dégagement va du sacrum à la vertèbre située au-dessus du dernier étage sténosé. Au
moindre doute, une radiographie de contrôle per-opératoire avec repérage métallique permet de s'assurer du
niveau. Les articulaires souvent remaniées seront iden-
La libération commence en règle au niveau de l'espace
L5-S 1. Le ligament jaune est désinséré du sacrum au
bistouri, puis une spatule mousse ou un décolle duremère libère les éventuelles adhérences entre la dure-
tifiées, ainsi que les repères pédiculaires
imaginer les trajets radiculaires.
mère et le ligament jaune. Ce dernier est partiellement
réséqué au bistouri ou à la pince de Kérisson. Les
gestes doivent être réalisés avec la plus grande prudence : la graisse péridurale est absente et la dure-mère
peut adhérer à la face antérieure des lames. C'est au
niveau du bord supérieur des lames que la sténose est la
plus prononcée. Les lames sont réséquées petit à petit à
l'aide d'une pince de Kerisson ou d'une pince gouge, en
prenant bien garde de ne pas traumatiser le fourreau
duraI rendu vulnérable par l'absence ou la faible épaisseur du "matelas de sécurité" représenté par la graisse et
la couche liquidienne de L.eR.
afin de bien
La spino-Iaminectomie
Elle peut être effectuée selon deux techniques
proche en proche" ou en "carapace de homard".
une petite
"de
Au terme de ce temps de laminectomie, seule une étroite bande de fourreau duraI est exposée car les apophyses articulaires
souvent hypertrophiques
sont
proches de la ligne médiane. L'étendue en hauteur de la
résection dépend des données de l'imagerie pré-opératoire et des constatations in situ. L'absence de graisse et
de battements dure-mériens traduirait la persistance
plus ou moins importante de la compression vers le
haut.
La spino-Iaminectomie
"de proche en proche"
(figure 1)
Les apophyses épineuses, souvent néoarticulées entre
elles, sont sectionnées à leur base avec une pince de
Liston et réséquées. L'hypertrophie
arthrosique des
lames fait disparaître les espaces interlamaires et complique le temps de laminectomie. Celle-ci commence
La spino-Iaminectomie selon
la technique de
la "carapace de Homard"
(figures 2 a à d)
R. Roy-Camille effectue le temps de spino-laminectomie en monobloc dans les formes pluri-étagées afin de
réaliser une approche plus rapide et moins traumatisante pour l'axe dure-mérien.
Section des arcs postérieurs
Avec une scie oscillante (lame de 25 mm), un trait
sagittal bilatéral est réalisé à la jonction entre massif
articulaire et lame vertébrale. Ces deux coupes, droite
et gauche, sont menées de bas en haut. La difficulté est
de choisir le niveau d'attaque du trait de scie. Une section trop externe se ferait dans l'épaisseur du massif
articulaire puis du pédicule. Le trait, compte tenu de
l'étroitesse des lames, est en règle à 5 mm en dedans du
bord externe de l'isthme et à 8 mm en dedans de l'interligne articulaire (figure 2a). La résection osseuse aura
ainsi 15 à 18 mm de large. La limite en profondeur de
la section est marquée par la baisse de résistance de l'os
à la scie et de plus le ligament jaune à la face profonde
de l'os arrête la scie (figure 2b). Ce procédé permet
d'éviter par ailleurs d'introduire des instruments entre
lame et dure-mère.
Figure 1
Lamino-arthrectomie en trois temps:
1 - Dans le plan frontal: résection des épineuses.
2 - Dans le plan sagittal: résection des lames.
3 - Dans le plan oblique : résection de la face profonde des
articulaires.
177
TECHNIQUES
ACTUELLES
DE TRAITEMENT
CHIRURGICAL
DU CANAL LOMBAIRE
ÉTROIT
rieurs sont ainsi libérés jusqu'à la limite supérieure de la
laminectomie (figures 2c et 2d), où le ligament jaune
est, comme en bas, sectionné transversalement.
Figure 2
Technique de la "carapace de homard".
a - Niveau d'attaque du trait d'ostéotomie.
b - Section des arcs postérieurs à la scie oscillante.
c - Section du ligament jaune.
d - Ablation de l'ensemble des arcs postérieurs en monobloc.
Au prix du respect scrupuleux de ces règles, ce procédé
qui peut paraître dangereux, est en fait une façon élégante et rapide de ne pas comprimer le contenu duremérien, comme pourraient le faire les instruments clasSIques.
Libération durale,
ablation des arcs postérieurs
Le ligament jaune est coupé transversalement avec un
bistouri à lame fine à la limite inférieure de la laminec-
L'arthrectomie
partielle
Ce temps fondamental permet de dégager les parties
latérales du fourreau duraI ainsi que les racines. A ce
stade, les berges osseuses de la laminectomie
sont
constituées par la succession des isthmes et des apophyses articulaires inférieures recouvrant les supérieures sous-jacentes. A l'aide d'un petit ciseau frappé
tomie. L'épineuse inférieure est saisie dans un davier de
Farabeuf pour être attirée vers le haut et les adhérences
entre la face profonde de l'arc postérieur et la dure-mère
sont décollées petit à petit à l'aide d'une spatule. Puis le
ligament jaune qui tapisse latéralement la face profonde
des articulaires est sectionné. Les différents arcs posté178
R. ROY-CAMILLE*,
G. SAILLANT*,
L. DOURSOUNIAN**,
E. ROLLAND
*
La fermeture
étroit, il faut entamer la partie interne de l'apophyse
articulaire inférieure, La coupe oblique de dedans en
dehors se fait aux dépens de la partie antérieure de l'articulaire, Il faut prendre soin de ne pas fragiliser inutilement l'isthme pour ne pas provoquer une séparation de
l'articulaire inférieure,
Elle se fait après"avoir vérifié la liberté de tous les éléments nerveux désignés par le bilan radio-clinique, Les
compresses et les tampons hémostatiques sont méthodiquement retirés, La dure-mère peut être recouverte de
produits synthétiques, mais le greffon graisseux est
actuellement largement utilisé comme moyen de prévention de la fibrose post-opératoire, Il est prélevé dans
le tissu cellulaire sous-cutané et simplement posé sur le
sac duraI. Il doit être suffisamment volumineux pour ne
pas migrer, Un ou deux drains aspiratifs seront mis en
place et la fermeture se fera plan par plan en veillant à
ne pas laisser de décollement.
Le travail au ciseau frappé intéresse ensuite la portion
interne de l'apophyse articulaire supérieure qui est le
plus souvent responsable de la compression radiculaire
latérale, La frappe à ce moment doit être particulièrement maîtrisée car la racine est coincée sous l'os attaqué, Les petits fragments osseux ainsi détachés sont
retirés avec une pince à disque, L'utilisation du ciseau
frappé est préférable à celle de la pince de Kérisson
oblique qui menace la racine en la comprimant temporairement avec son talon,
Ces manœuvres permettant d'exposer les racines sont
réalisées de chaque côté et à tous les niveaux intéressés
par la sténose, Dans la mesure du possible, il faut libérer bien latéralement les racines en respectant au maximum les massifs articulaires, L'arthrectomie complète
ne doit être réalisée que la main forcée,
TECHNIQUE DE DÉCOMPRESSION
INTERNE ÉCONOMIQUE
POUR STÉNOSE DÉGÉNÉRATIVE
GLOBALE
La décompression interne désigne le procédé qui traite
la sténose en conservant une partie des arcs postérieurs,
Elle est encore appelée recalibrage ou fenestration, Elle
vise à prévenir l'instabilité post-opératoire et à beaucoup mieux focaliser le geste de libération sur l'endroit
précis de la compression, Un autre avantage réside dans
le caractère beaucoup plus simple des suites opératoires.
Vérification des trajets
radiculaires
Chacune des racines exposées doit être mobilisée prudemment et il faut s'assurer de l'absence de tout élément
compressif sur le trajet.
La racine peut être pincée au niveau du récessus latéral
et sera libérée lors de l'arthrectomie partielle,
P.M. Lin(3) propose de conserver le ligament surépineux
et les épineuses et de décomprimer le sac duraI et les
racines par une lamino-arthrectomie partielle, La laminectomie ne concerne que la partie médiale de la facette
articulaire inférieure, puis supérieure.
La racine peut être étirée sous un pédicule et pour qu'elle retrouve son aisance, une résection inféro-interne du
pédicule peut s'avérer nécessaire,
L'auteur précise que cette technique ne s'adresse pas
aux sténoses avec hypertrophie de l'arc postérieur, Mais
il faut souligner que dans les sténoses centrales, c'est la
partie supérieure de la lame qui est la plus compressive.
Cette modification de l'abord interlamaire, lorsqu'elle
est réalisable, convient donc surtout aux sténoses latérales,
La racine peut être comprimée dans le foramen entre le
sommet de l'articulaire supérieure et le pédicule et/ou le
corps vertébral: la résection du pôle supérieur de l'articulaire supérieure peut s'imposer,
La racine peut être ainsi comprimée à deux niveaux:
• soit à la naissance de la racine par le disque susjacent,
• soit dans le foramen par le disque sous-jacent.
R.M, Joson(2) cherche à préserver le surtout fibreux
postérieur et le ligament surépineux qu'il considère
comme des éléments non négligeables
du segment
mobile rachidien.
En réalité, si les bombements discaux étagés sont fréquents, leur responsabilité dans la sténose est relativement peu fréquente et l'excision discale est rarement
indiquée, Par contre, les barres ostéophytiques de part
et d'autre du disque nécessitent fréquemment une résection,
L'incision du fascia-lombaire est faite à 2 ou 3 mm de la
ligne médiane, puis il est procédé à une désinsertion
unilatérale des muscles paravertébraux. La section des
épineuses est réalisée sous leurs pointes en laissant
celles-ci solidaires du ligament surépineux, Puis la
désinsertion des muscles paravertébraux contro-latéraux est réalisée en les réclinant en dehors avec le liga-
Il importe donc de se souvenir que chaque racine, et
plus particulièrement LS, peut être comprimée à différents niveaux.
179
TECHNIQUES
ACTUELLES
DE TRAITEMENT
.Â.
Figure 3
3a
.Â.
CHIRURGICAL
3b chaque
La fenestration.
LOMBAIRE
ÉTROIT
lame et une excision
complète
du ligament
jaune;
a - Tracé en pointillé de la zone osseuse réséquée pour réaliser la fenestration. Épineuses et ligaments interépineux sont
soigneusement conservés.
b - Temps oblique réalisé au ciseau frappé.
• une résection de la portion interne des facettes articulaires ;
• une ostéoplastie des ostéophytes
dure-mériens par emboutissement ;
pré-
R. Roy-Camille propose la fenestration (figures 3a et b)
qui consiste, selon le même principe, à conserver une
partie des arcs postérieurs. Les ligaments sus-épineux et
inter-épineux sont ici soigneusement conservés, ce qui
évite d'avoir à recourir à une ligamentoplastie prothétique. Chaque étage à libérer est exposé en commençant
par attaquer la lame sus-jacente au ciseau frappé au
niveau de son tiers inférieur, juste au-dessus de la limite
supérieure d'insertion du ligament jaune. Le contact
dure-mérien est ainsi pris, puis l'espace inter-Iamaire est
agrandi pas à pas à la fraise ou au ciseau pour réséquer
le tiers supérieur de la lame sous-jacente (figure 3a). La
fenestration se poursuit latéralement sur le bord interne
des facettes articulaires et dans le foramen, comme cela
a déjà été décrit précédemment (figure 3b).
Une telle attitude permet de réaliser une lamino-arthrectomie classique tout en préservant un solide surtout
ostéo-articulaire postérieur qui est censé prévenir une
cyphose secondaire.
J. Senegas(6) réalise une décompression interne originale qu'il qualifie de "recalibrage" du canal lombaire ; elle
consiste en :
• une ablation des ligaments inter-épineux et de la partie hypertrophique des épineuses ;
• une résection de la moitié supérieure de chaque épineuse;
à la fraise de la moitié supérieure
corporéaux
• une ligamentoplastie inter-épineuse au Dacron pour
stabiliser la région décomprimée termine l'intervention.
ment surépineux et les pointes des épineuses. Les écarteurs autostatiques sont mis en place de manière classique.
• une exérèse
DU CANAL
de
180
R. ROY-CAMILLE*,
TECHNIQUES
G. SAILLANT*,
DE STABILISATION
L'instabilité peut être évoquée en pré-opératoire devant
un spondylolisthésis
dégénératif ou une dislocation
lombaire rotatoire sur scoliose. Elle peut être redoutée
après la libération neurologique surtout en cas d'arthrectomie bilatérale au même niveau ou de large discectomie associée à la laminectomie. Cette instabilité est
néfaste à plus d'un titre. A court terme, elle est responsable de douleurs qui vont pénaliser le résultat de la
libération. A long terme, elle va favoriser le glissement
intervertébral, ainsi que le développement de lésions
dégénératives ou de compression itérative.
L'arthrodèse doit être évoquée et réalisée chaque fois
qu'il existe un risque d'instabilité post-opératoire. Le
plus souvent, il s'agit d'une arthrodèse postéro-Iatérale
L. DOURSOUNIAN**,
E. ROLLAND
*
bilatérale. Les gouttières paravertébrales sont dégagées
au bistouri électrique jusqu'à la pointe des apophyses
transverses. Ce temps, un peu hémorragique, impose
une hémostase méticuleuse, et l'exposition se fait soit
avec des valves, soit avec des écarteurs de Homan
appuyés modérément sur les transverses. C'est pourquoi
nous préférons une arthrodèse latérale sans aller jusqu'aux transverses. Les interlignes articulaires sont très
soigneusement avivés et le bord latéral des massifs articulaires est véritablement décortiqué à l'aide de ciseaux
frappés. Le sacrum est avivé au ciseau frappé.
Le succès de la prise de greffe dépend d'un parfait avivement du dièdre inter-articulo-transversaire
dans
lequel se placent les copeaux osseux. L'exposition s'arrête à la partie externe de l'articulaire supérieure de la
vertèbre la plus haute incluse dans l'arthrodèse. Les
Figure 4
Lamino-arthrectomie
postéro-Iatérale.
étendue du L3 au sacrum associée à une arthrodèse avec plaques vissées dans les pédicules vertébraux et greffe
TECHNIQUES
ACTUELLES
DE TRAITEMENT
CHIRURGICAL
DU CANAL LOMBAIRE
ÉTROIT
Les difficultés
greffons sont prélevés à la face externe d'une crête
iliaque postérieure, soit par la même incision à travers
un décollement sous-cutané, soit par une contre-incision. L'idéal est d'obtenir de longs copeaux spongieux
pontant chaque étage, et cette greffe est augmentée de
tous les fragments conservés lors de la laminectomie.
Parfois, l'os provenant du bénéfice des lames et épineuses réséquées est suffisant pour avoir une quantité
d'os correcte pour obtenir une greffe satisfaisante.
Il s'agit du saignement, des brèches dure-mériennes
des lésions des articulaires.
et
Le saignement
Malgré le soin porté à l'installation du patient, l'importance du saignement peut être problématique et rendre
périlleuse toute libération des éléments nerveux:
• l'hypotension est un excellent moyen préventif, mais
l'état des patients ne permet pas toujours d'y recourir;
Nous renforçons systématiquement nos arthrodèses par
une ostéosynthèse(4) de la région arthrodésée afin d'éviter les échecs de consolidation
des greffons. Cette
ostéosynthèse se fait par deux plaques vissées dans les
pédicules selon la technique de R. Roy-Camille (figure
4). Pour des raisons de confort opératoire, le déroulement de l'arthrodèse postéro-Iatérale instrumentée doit
se faire dans cet ordre: d'abord repérage pédiculaire,
puis avivement des gouttières, ensuite fixation des
plaques et enfin mise en place des greffons osseux.
• les tranches osseuses peuvent être enduites de cire
mais la tenue de celle-ci n'est pas toujours satisfaisante;
• l'électrocoagulation bipolaire permet de contrôler préventivement les veines péridurales mais est peu efficace
sur celles qui saignent.
On est ainsi le plus souvent ramené aux moyens habituels de clarification
du champ opératoire : coton,
Surgicel® et aspiration. Cette dernière expose d'ailleurs
à des pertes sanguines excessives et les dispositifs de
récupération/réinjection du sang type Cell-Saver® trouvent ici une éventuelle indication.
D'autres modalités d'arthrodèse existent, grâce à une
instrumentation différente (Louis, Cotrel-Dubousset) ;
des séries d'arthrodèses postérieures, selon la technique
de Cloward, ont été rapportées avec des résultats satisfaisants.
Les brèches dure-mériennes
Malgré la minutie et la douceur des gestes de libération,
ce sont des accidents fréquents qui nécessitent d'exposer correctement la zone de déchirure et de la suturer en
surjet avec un fil fin (5/0).
CAS PARTICULIERS
Lorsque la perte de liquide céphalo-rachidien
a été
importante, il est souhaitable de réinjecter avec une
aiguille très fine une quantité équivalente de sérum salé
isotonique dans le fourreau réparé.
Les sténoses latérales isolées
Sténose du récessus
Lorsque la clinique et l'imagerie concluent à une compression isolée d'une ou plusieurs racines dans le récessus latéro-pédiculaire, un abord limité permet de soulager le patient. Cet abord est uni ou bilatéral selon la
nécessité.
L'étanchéité de la réparation est la meilleure garantie
contre l'hématome compressif, post-opératoire.
En
effet, l'absence de fuite permet d'une part le drainage
aspiratif, et d'autre part la conservation du matelas protecteur naturel autour des racines que représente le
liquide céphalo-rachidien.
L'approche est inter-lamaire en mordant plus ou moins
sur les lames sus et sous-jacentes. Puis la partie médiale
de l'articulaire inférieure est réséquée au ciseau. C'est
sous la partie interne de la facette articulaire supérieure
ainsi exposée que se situe le conflit. La racine peut être
pincée dans la portion latéro-pédiculaire de cette facette, mais aussi par une ostéophytose para-discale. Il faut
également suivre la racine à la partie inférieure du
récessus pour ne pas méconnaître un conflit sous isthmique.
Les résections d'articulaires
La libération radiculaire convenable implique une
hémi-arthrectomie médiale qui est le plus souvent bilatérale et ne menace pas la stabilité du niveau intéressé.
Par contre, l'arthrectomie totale, qu'elle soit de principe
pour exposer une racine dans son foramen, ou accidentelle, va être responsable de contraintes excessives sur
le massif articulaire opposé. En cas d'arthrectomie bilatérale totale ou de rupture isthmique bilatérale, le risque
d'instabilité est majeur et l'arthrodèse du ou des étages
impliqués doit se discuter.
Sténose foraminale
Elle est plus éloignée latéralement et la racine peut être
coincée à ce niveau soit par un élément discal, soit par
la pointe de l'articulaire supérieure sous-jacente, voire
les deux. La libération de la racine à ce niveau peut
conduire à une arthrectomie totale.
182
R. ROY-CAMILLE',
G. SAiLLANP,
L. DOURSOUNJAN**.
SOINS POST-OPÉRATOIRES
*
Chirurgie toujours minutieuse et précise, parfois difficile, le traitement chirurgical du canal lombaire étroit doit
dans tous les cas libérer dans leur ensemble les élé-
Ils sont très simples. Le patient est laissé en décubitus
dorsal 3 jours, ce qui permet une compression de la
plaie et évite un hématome post-opératoire.
ments neurologiques comprimés et symptomatiques,
tout en effectuant des gestes de résection suffisants,
mais également le moins agressifs possibles et non
déstabilisants sur les éléments osseux ou disco-ligamentaires.
Le lever est autorisé au 4ème jour sous couvert d'un lombostat en coutil baleiné pour 45 à 60 jours.
La rééducation statique posturale est entreprise à la fin
du premier mois.
COMPLICATIONS
PRÉCOCES
E. ROLLAND
C'est à ce prix que les complications, et en particulier
les déstabilisations post-opératoires, deviendront moins
fréquentes.
POST-OPÉRATOIRES
L'iconographie des Figures] et 2 sont extraites de l'iconographie:
"Atlas de Chirurgie Orthopédique"
- R. RoyCamille, C.A. Laurin, L.H. Riley Ir - Tome premier. Éditions
Masson, ]989.
Les complications principales sont les hématomes compressifs, les suppurations et les complications neurologiques. Leur risque de survenue est de l'ordre de 5 %.
Les hématomes
Ils sont provoqués par des interventions hémorragiques
et des drainages inefficaces. L'existence d'une brèche
dure-mérienne non suturée est une cause fréquente d'hématome en raison de l'absence de drainage aspiratif
qu'elle impose. L'hématome compressif peut se traduire
par un tableau clinique aigu post-opératoire,
fait de
douleurs suivies d'un déficit moteur et sensitif uni ou
poly-radiculaire
pouvant aller jusqu'à la paraplégie.
BIBLIOGRAPHIE
L'existence d'un hématome compressif est une indication à la réintervention en urgence pour lever la compression de la queue de cheval ; le meilleur examen
complémentaire à demander, pour peu qu'il ne retarde
pas l'heure de la reprise chirurgicale, est la résonance
magnétique, qui permet de visualiser la présence et
l'étendue de l'hématome.
1 - DEBURGE A., BEX M., LASSALE B., BITAN F.
Technique chirurgicale dans le traitement des sténoses du canal
lombaire.
Acta Orthopedica
2 - JOSON R.-M.
Belgica, 1987,53,3:412-419.
Preservation of the supraspinous
technical note.
Neurosurgery,
3 - LIN P.-M.
1987,21,3:420-422.
Internai decompression
technical note.
La suppuration
ligament for spinal stenosis : a
for multiple levels of lumbar stenosis : a
Neurosurgery, 1982, 11,4:546-549.
4 -ROY-CAMILLE R., BENAZET J.-P., VIALE P., HAUTEFORT P.,
SAILLANTG.
Elle nécessite également une reprise chirurgicale. Elle
justifie un bilan infectieux pré-opératoire, rigoureux et
une antibioprophylaxie.
Place de l'ostéosynthèse du rachis lombaire
chirurgicale des canaux lombaires étroits.
associée
à la cure
SOFCOT Réunion annuelle, Noy. 1987. Rey. Chir. Orthop., 1988,
74, Suppl. II, 70-73.
5 - ROY-CAMILLE R., BENAZET J.-P.
Sténoses canalaires rachidiennes.
Les complications neurologiques
post-opératoires immédiates
Atlas de Chirurgie Orthopédique. Masson, tome 1; 435-445.
6 - SENEGAS J., ECHEVERS J.-P., VITAL J.-M., BAULMY D.,
GRENIERF.
Elles résultent le plus souvent d'un hématome compressif, beaucoup plus rarement d'une contusion ou d'un
traumatisme majeur per-opératoire. Comme pour les
hématomes, elles imposent en urgence la nécessité
d'une sacco-radiculographie ou, mieux, d'une résonance
magnétique pour préciser l'étendue de la compression et
guider les gestes à réaliser lors de l'intervention qui peut
s'imposer dans les plus brefs délais.
Le recalibrage du canal lombaire : alternative à la laminectomie
dans le traitement des sténoses du canal lombaire.
Rey. Chir. Orthop. 1988,74,15-22.
7 - VERBIEST H.
Sténoses progressives acquises du canal vertébral lombaire.
Encycl. Méd. Chir. Techniques chirurgicales. Orthopédie 44-181.
183
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