RÉSUMÉS DES COMMUNICATIONS

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RÉSUMÉS DES COMMUNICATIONS
Aleksandra KOMANDERA (Université de Silésie, Pologne)
La poétique de la parole dans Les Contes d’Amadou Koumba de Birago Diop
Le but de nos recherches est de décrire la poétique de la parole dans le conte africain en prenant appui
sur les Contes d’Amadou Koumba de Birago Diop. Pour définir l’oralité du conte africain, nous
analysons dans notre étude plusieurs aspects. En premier lieu, nous examinons les manifestations de la
parole et leur fonction au niveau générique (mise en scène du narrateur/conteur, langue familière,
musicalité, formulettes). Ensuite, nous menons une réflexion sur le rôle de la parole dans la création de
la nature fictionnelle ou vraisemblable de l’univers représenté. Enfin, nous étudions les récits de
Birago Diop afin de saisir les points communs avec les contes traditionnels européens et pour dévoiler
la spécificité, voire l’originalité du conte africain.
Lilla HORÁNYI (Université ELTE)
De la tradition orale au conte littéraire – Les sources d’inspiration de Kama Kamanda
Notre étude se propose d’aborder deux recueils de contes de Kama Kamanda : Les Contes des Veillées
africaines (1967) et La Nuit des griots (1991) dont les motifs sont similaires. Nous pouvons constater
que ces contes ne sont pas les transcriptions des récits traditionnels africains. Mythes antiques, thèmes
et légendes africains, lais médiévaux s’entremêlent dans ces récits pour donner des « contes littéraires
», pour reprendre l’expression de Kama Kamanda. D’origine congolaise, l’auteur intègre ces diverses
influences dans ses contes à travers l’interprétation de trois motifs : le pêcheur, la sirène et le fleuve.
Zeineb BEN-GHEDHAHEM (École Polytechnique de Tunisie)
Les énoncés parémiques au service du conte et de l’oralité dans la littérature africaine
francophone
Les expressions idiomatiques sont inhérentes à la transmission des traditions africaines par le biais des
contes et des fables. L’emploi fréquent des proverbes et plus généralement d’énoncés gnomiques
l’atteste. Que ce soit aux Antilles, en Afrique ou en Europe, le proverbe est un acte de parole qui
cautionne la sagesse d’un peuple, qui, du fait même qu’un sujet parlant se l’attribue, vient rappeler une
évidence, à savoir que tout individuelle qu’une parole puisse être, elle est néanmoins traversée par
d’autres paroles, paroles antérieures, paroles entendues, paroles retenues. Alain Mabanckou a
progressivement découvert l’intérêt diégétique, comique et intellectuel de ces énoncés. Cette
communication aura pour objet d’analyser les fonctionnalités des énoncés parémiques ainsi que les
liens qu’entretiennent les sentences et les proverbes avec le conte. D’autre part, cet exposé visera à
déterminer le rôle assigné aux détournements et aux distorsions de certaines formules sentencieuses en
parfaite adéquation avec les leçons développées, afin de répondre certainement au désir affiché par
l’auteur d’offrir à ses lecteurs un texte accessible certes, mais aussi et surtout une œuvre originale où
la tradition cède la place à la création et à la modernité.
Duygu ÖZTİN PASSERAT (Université Dokuz Eylül /Turquie)
Le discours implicite à travers l’oralité dans Le Passé simple de Driss Chraïbi.
Driss Chraïbi (1926-2007), écrivain français d’origine marocaine, est l’un des piliers de la littérature
maghrébine d’expression française. Le Passé simple est le premier roman de l’auteur. Il y décrit la
révolte d’un jeune homme contre la grande bourgeoisie marocaine et les abus de pouvoir incarnés par
son père, «le Seigneur » et la suprématie française dans un Maroc colonisé qui restreint l’homme à ses
origines. À travers la lutte introspective que se livre le protagoniste, le lecteur assiste à une critique
stricte de l’Islam due au décalage entre l’islam idéal révélé dans le Coran et la pratique hypocrite de
l’Islam par la classe bourgeoise d’un Maroc dans les années 50 ainsi qu’à l’analyse de la condition de
la femme musulmane en la personne de sa mère. En critiquant l’Islam et la condition de la femme au
Maroc, le narrateur vise les procédés narratifs et énonciatifs basés sur l’oralité tels les contes, les
proverbes qui expriment implicitement, la sagesse d’une société. C’est la raison pour laquelle le travail
va se baser sur une lecture narratologique et pragmatique qui cherche les réponses à la question : quel
est le rôle de l’oralité dans la structure narrative et argumentative du roman intitulé Le Passé simple ?
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Tumba SHANGO LOKOHO (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
L'écriture ou la mise en scène de l'oralité chez Kourouma, Pépin et Chamoiseau
Fernanda MURAD MACHADO (Universidade de São Paulo /Brésil)
De l’oralité à l’espace du livre : Amadou Hampâté Bâ et les notes de bas de page
L’œuvre d’Amadou Hampâté Bâ révèle la volonté de mettre en valeur la culture africaine et de
contribuer à la construction d’un discours permettant de réinsérer l'Afrique dans un cadre universel. Il
réactualise la littérature orale, qu’il recueille et écrit en français, et cherche des stratégies pour
représenter la réalité sociale à laquelle il se réfère, mais aussi pour la recréer de manière à interagir
avec la réalité de son lecteur. L’écrivain a recours en particulier à l’usage surabondant de notes. Espace
intermédiaire, entre le texte et le hors texte, l’illusion fabuleuse et le discours pragmatique, l’appareil
de notes lui permet de mettre en scène, dans le corps du livre, les relations entre conteur et public dans
la tradition orale et constitue le lieu privilégié d’une action sur celui-ci. Incité à transgresser la linéarité
du récit, en prenant part à la construction de la narration, le lecteur est invité à une réflexion sur le réel
et la manière de le raconter.
István CSEPPENTŐ (Université ELTE)
Éléments de l’identité antillaise dans le roman historique
La mémoire collective antillaise trouve l’une de ses formes d’expression littéraire dans certains
romans historiques contemporains liés au pays soit par l’origine de l’auteur, soit par le sujet traité. Les
exemples cités ont la particularité d’être tous associés à la Guadeloupe et à une période historique
concrète, celle de la fin du XVIII e siècle. A travers des textes divergents, il sera question des moyens
d’expression de l’antillanité perçue dans une dimension historique, par l’évocation des luttes antiesclavagistes en Guadeloupe, ou par le récit d’un destin fabuleux, celui du Chevalier de Saint-George
qui, d’origine africaine, a charmé l’Europe des Lumières. La poétique du roman historique permet
d’étudier l’expression de l’identité noire dans une perspective nouvelle, laissant par exemple une large
place à l’oralité par le biais des dialogues.
Ewa KALINOWSKA (Université de Varsovie)
Je te raconte cette histoire… : l’oralité et l’engagement dans l’œuvre de Raharimanana
L’Afrique est de tout temps terre de l’oralité. Si l’oral prévaut dans les cultures traditionnelles
africaines depuis les temps immémoriaux, il reste toujours vivace dans les temps modernes.
La période précoloniale est sauvegardée et magnifiée par les griots, djelis ou gawlo. Le temps
douloureux de la domination et des post-colonialismes occultés trouvent leurs expressions en langues
européennes. Si l’oralité pure et simple disparaît progressivement dans le monde actuel, elle y est
toujours présente en adoptant de nouvelles formes. Nous examinerons l’écriture engagée de
Raharimanana, auteur malgache, qui se fait un témoin infatigable du passé et du présent de son île
natale et du Continent noir. Imprégné de l’histoire et de la culture, Raharimanana laisse transparaître
dans ses textes l’oralité ancestrale et se met au service des causes contemporaines.
Axel ARTHERON (Université Antilles Guyane / Paris 3)
Dramaturgie de l’oralité dans les tragédies de la révolution de Saint Domingue
La vague des décolonisations et de remise en cause des impérialismes européens à partir des années
1950 a contribué à la formation, dans la caraïbe francophone, d’une esthétique théâtrale autonome.
Relayant les enjeux de l’émancipation politique, problématisant le rapport à l’histoire du sujet dominé,
les dramaturges caribéens francophones se donnaient aussi pour tâche d’œuvrer au renouvellement des
formes, des canons et des sources d’inspiration du théâtre caribéen. A côté des influences qu’ont pu
constituer la tragédie grecque et shakespearienne, ou le drame brechtien, l’oralité et le conte
constituèrent des éléments fondateurs de cette poétique dramatique caribéenne. La Tragédie du Roi
Christophe d’Aimé Césaire, et Monsieur Toussaint d’Edouard Glissant témoignent de l’inscription de
l’oralité et de la dramaturgie du conte au cœur du dispositif théâtral. Au-delà de la simple transposition
d’un folklore, de l’authentification d’une couleur locale, ces éléments travaillent en profondeur la
structure des pièces et assument des fonctions dramaturgiques diverses. Quelles sont les modalités de
figuration de l’oralité et du conte dans ces tragédies ? Comment interpréter leurs récurrences et la
pluralité de leurs expressions ? Quelles fonctions remplissent-ils au cœur du dispositif dramaturgique ?
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Zouleikha KABILENE (Université d’Alger)
L’Enfant Mbénè ou la confluence de la tradition orale et de la dramaturgie contemporaine
Nous allons dans un premier temps dégager les éléments constitutifs de ce conte initiatique, tant sur le
plan thématique que formel, sachant que notre analyse se basera sur le texte écrit et non sur la pièce
jouée. Parmi les points que nous aborderons, nous citerons entre autres l’inscription du rite d’initiation
dans cette pièce, nous verrons également si cette inscription permet pour autant de classer cette pièce
parmi celles du théâtre-rituel, tel qu’il a été défini par l’auteure, ainsi que par M-J.Hourantier. Nous
interrogerons également la symbolique à laquelle fait référence Liking : instruments de musique,
chiffres, notamment le chiffre trois, ainsi que le bestiaire. À la suite de l’étude des points cités
précédemment, nous montrerons comment Liking est parvenue à élaborer une « pièce contemporaine »
en puisant dans la tradition.
Magdolna JÁKFALVI (Színház- és Filmművészeti Egyetem / Budapest)
Les détours du théâtre de Peter Brook par l’oralité africaine
« Je ne suis pas un metteur en scène qui voyage, - dit Peter Brook - mais un voyageur qui met en
scène. » Il existe une culture universelle que le théâtre fait advenir, il ne faut que trouver les outils qui
permettent l’avènement. Peter Brook en 1972, en traversant l’Algérie, le Niger, le Nigéria, le
Dahomey et le Mali remplace le livre par le voyage. Grace à ces expériences africaines il introduit
l’oralité, l’interactivité aux jeux. Le théâtre est équivalent de la place publique, car c’est le seul endroit
où la distance dans le temps se convertit en éloignement dans l’espace. Dans ma communication,
j’analyse cette voie non-verbale de l’apprentissage théâtral en Afrique et surtout l’effet sur les
mouvements théâtraux en Hongrie.
Stéphanie BÉRARD (University of Virginia)
Détournements afro-caribéens du conte européen par José Pliya
La transposition du conte sur la scène théâtrale participe de l’esthétique du détour pratiquée par José
Pliya qui adapte dramatiquement dans ses dernières pièces deux classiques de la littérature pour
enfants : Le Petit Poucet de Charles Perrault et La Chèvre de monsieur Seguin d’Alphonse Daudet. Le
dramaturge franco-béninois vivant aujourd’hui en Guadeloupe déterritorialise la tradition littéraire
française pour la reterritorialiser dans l’oralité afro-caribéenne : l’esthétique de la répétition et de la
variation, l’architecture circulaire, le dédoublement du narrateur/conteur, les animaux comme
représentants du genre humain, la ronde hypnotique et tournoyante des mots sont autant de détours
empruntés par Pliya pour nous ramener à l’oralité ancestrale africaine et caribéenne et nous révéler des
vérités humaines universelles.
Daniel URRUTIAGUER (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Du droit à la culture aux droits culturels : quelles places pour les conteurs ?
Après les déclarations de l’Unesco en 2001 et en 2005, qui légitiment la notion de la diversité
culturelle à une échelle internationale, la déclaration du Groupe de Fribourg en 2007 a mis en avant
une éthique de la dignité par le respect des droits culturels des personnes. Le modèle du service public
culturel, en privilégiant la qualité artistique d’une poétique humaniste, accorde une place subalterne
aux conteurs, porteurs de récits populaires. L’objet de la communication est de s’interroger sur le
degré de changement de paradigme dans les politiques culturelles quant à l’appréciation de ce travail.
Les conteurs bénéficient-ils d’une meilleure reconnaissance symbolique et économique de la part des
collectivités publiques et des établissements culturels ? Ou continuent-ils à jouer avant tout un rôle
souterrain de consolidation de solidarités communautaires ?
Judith MILLER (NYU)
Werewere Liking et la guérison à travers la parole incarnée
Werewere Liking est une "prêtresse théâtrale" camerounaise qui se sert de ses traditions bassa pour
réaliser un théâtre de guérison. Depuis presque trente années elle essaie, à travers son travail théâtral,
de rassembler son public pour évacuer le mal psychologique et sociologique qui ronge, selon elle,
l’Afrique entière. Le conteur, parfois déguisé en ngangan (guérisseur), fait toujours partie intégrante de
l’articulation du récit. Tout comme les tambours, il fonctionne pour solliciter l’adhésion psychique et
physiologique du spectateur. Notre communication se portera sur trois de ses plus grands spectacles :
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Singuè Mura : Considérant que la femme, Un Touareg s’est marié à une pygmée et Héros d’eau afin
d’analyser le processus de guérison qu’elle envisage. Nous pouvons aussi nous demander comment ce
processus fonctionne dans un cadre et chez un public non-africain.
Fanny LEGUEN (Université Paris IV)
Bintou de Koffi Kwahulé, le conte moderne d’une sirène-oiseau
Le bestiaire nourrit l’imaginaire humain depuis l’Antiquité à travers les mythes, les contes ou les
légendes car l’animal est au cœur des représentations humaines depuis toujours. L’univers animalier
n’a cessé de démontrer ses capacités d’apprentissage des valeurs sociales que ce soit en Afrique ou
ailleurs. Les auteurs tragiques antiques, Sophocle, Euripide ou Eschyle comme plus tard La Fontaine
ou Dadié ont par leurs tragédies, fables ou poèmes invitent les lecteurs à comprendre les relations de
pouvoir de nos sociétés et les rapports humains à travers les archétypes animaliers. Les formes de
hiérarchies humaines ont parfois été critiquées et la personnification animalière par métaphore s’est
aussi construite pour éviter la censure et déjouer la critique en feignant de s’adresser aux enfants. Mais
chez les auteurs de la diaspora africaine, le bestiaire peut revêtir une nouvelle fonction critique. En
effet, depuis les "zoos humains", l’enfermement forcé d’hommes et d’animaux au sein d’espaces
reconstitués, ou les freaks show, cirques du monstrueux, le bestiaire ne sous-entend plus les signifiants
classiques, il convoque une réalité nouvelle au croisement de la théâtralisation de la tératologie et des
théories scientifiques sur la hiérarchie des types d’humains. Ainsi, dans Bintou de Koffi Kwahulé il
n’y pas à proprement parler d’animaux en jeu, l’animal sert de comparatif, mais son rôle n’est pas
seulement d’illustrer la psychologie des personnages ou de critiquer les rapports de force. L’enjeu est
ailleurs. Kwahulé rappelle par un habile renversement comment se sont forgés l’intolérance et plus
précisément le racisme.
Alice ZENITER (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Se forger une identité par la parole : étude du duo de Big Shoot de Koffi Kwahulé
Les personnages des pièces de Koffi Kwahulé n’ont souvent pas de noms – à peine un surnom, parfois
rien. Dès lors, ce qui tisse leur identité, ce qui leur donne un corps, c’est la parole. Dans Big shoot la
parole est répartie entre deux voix – que l’on appellera pour des raisons de commodité Monsieur et
Stan mais que l’auteur, lui, refuse de nommer en entrée de répliques – des voix aux rythmes différents,
à la typographie contraire lorsque l’on regarde le texte. C’est en opposant leurs voix– bref/long,
calme/nerveux, etc – mais aussi en se retrouvant – dans l’anglais par exemple – que Monsieur et Stan
se structurent une identité qui n’a pas d’autre base que leur manière de projeter les mots. Cette
communication se propose d’étudier les différents modes de fonctionnement de la parole dans leur
duo, inspiré selon l’auteur par les musiciens Monk et Coltrane.
Károly Sándor PALLAI (Université ELTE)
Résonances, langages, écritures : voix de la poésie seychelloise contemporaine
Dans ma communication, je me propose d’analyser le corpus poétique contemporain seychellois,
influencé par l’histoire coloniale, la pluralité des langues et des héritages et la diversité des horizons
culturels. Je m’intéresserai aux facteurs psycho-philosophiques (identité, altérité), linguistiques
(trilinguisme) et topo-psychologiques (archipélité, insularité) qui se manifestent dans les œuvres
littéraires et les constructions identitaires complexes, superposées. Il sera question de mieux
comprendre la juxtaposition, l’interinfluence et l’échange enrichissant entre l’anglais et le français qui
se complètent des voix diasporiques du créole, détentrices de mémoires d’appartenances, d’histoires
de créolisation, de poétiques de musicalités et de croisements, de résonances d’oralité.
Ramcy KABUYA (Université de Lubumbashi / Lorraine)
Contes et écritures africaines depuis 1980 - Oralité et roman africain: itinéraire critique d’une
pratique subversive
Les discours critiques sur l’oralité en Afrique ont donné lieu à deux conceptions différentes de cette
notion. Une première considère qu’elle appartient à un ordre ancien et par conséquent elle est appelée
à disparaître au profit de l’écriture. Dans cette optique oralité et écriture rejoignent d’autres
oppositions dichotomiques comme « tradition », « modernité », «africain » non « africain » etc. A
l’opposé de cette acception folkloriste, l’oralité est pensée en tant que poétique. Dans ce sens, il entre
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dans la construction d’une littérature africaine moderne. Les écrivains africains sont ainsi pris dans
cette double perspective. Dans cet exposé, je m’attacherai dans un premier temps à montrer comment
ces deux conceptions se construites parfois en se nourrissant l’une de l’autre et puis je montrerai
comment des écrivains comme Sony Labou Tansi, Kossi Efoui ou encore Edem Awumey tirent, dans
leurs œuvres, le parti de l’une ou de l’autre.
Virginie SOUBRIER (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Pour une poétique du silence dans les écritures dramatiques contemporaines d’Afrique noire et
de ses diasporas
Nous partirons de l’hypothèse selon laquelle les dramaturgies contemporaines d’Afrique noire et de
ses diasporas font du silence la condition même de leur existence. Dans quelle mesure la parole s’y
déploie-t-elle à partir du silence, source de leur musicalité ? Quelle est la nature de ce silence ?
Comment parviennent-elles à transformer l’indicible en inédit ? L’enjeu sera de définir, à l’aune du
silence, l’oralité singulière de ces écritures qui accordent une place centrale au souffle et au corps.
Ilona KOVÁCS (Université de Szeged)
Le monde mélancolique de Koffi Kwahulé
Sur la base des plusieurs pièces de théâtre de l'auteur, comme Brasserie, Mélancolie des barbares, Big
shoot, etc. et de préférence de celles qui ont été traduites en hongrois et sont disponibles dans le
recueil édité par L'Harmattan, je tenterai de montrer comment le monde post-colonial revit dans les
textes de Kwahulé. Il crée des personnages et des situations de conflit où il ne voit aucune solution
directe ou ne s’efforce jamais de se concentrer sur les issues, mais présente les dilemmes et les drames
du monde actuel vus et revisités par un Africain. Sa grande culture, pour ne pas dire érudition
européenne lui permet de conforter des civilisations à travers son écriture et de faire sentir aux
spectateurs ou aux lecteurs la douleur pour ne pas dire encore la mélancolie de son monde recréé
magiquement par l’alchimie de son style.
Anaïs NONY (Université de Minneapolis / Paris 3)
Le flux musical chez Kossi Efoui
Cette communication aborde la poétique du flux musical dans l’œuvre théâtrale de Kossi Efoui à
travers le prisme du blues. Non seulement l’esprit de cette musique hante la poétique de l’auteur grâce
aux figures appartenant à la mythologie du blues, telles que celle du Hoochie-koochie-man dans sa
pièce Io (tragédie), mais le blues en tant que musique d’une grande souffrance est utilisée par l’auteur
en qualité de puissance métaphysique afin de libérer, au détour d’un jeu de mots, un éclat de rire qui
offre à entendre les résonances plurielles de notre être au monde.
Romain PIANA (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Corps et voix du music-hall chez Koffi Kwahulé
Deux de ce qu’on pourrait appeler des « pièces de guerre » de Koffi Kwahulé font intervenir, de
manière plus ou moins centrale, la thématique et l’imaginaire du music-hall. La chanteuse Poupinette
égaye la croisière des tirailleurs sénégalais du Masque boiteux en voyage vers les théâtres de la
Seconde Guerre Mondiale ; dans Brasserie, c’est Magiblanche, meneuse de revue du Moulin-Rouge,
qui va redonner vie à l’établissement dont se sont emparés les vainqueurs de la guerre civile africaine
dont l’épilogue fournit l’arrière-plan de la pièce. À la fois allégorie politique satirique et symbole
historique et culturel ironique, mais également matrice musicale, la figure de la chanteuse de cabaret
fait l’objet d’une représentation ambivalente dont il s’agira d’interroger les formes, les modalités et les
fonctions.
Réka TÓTH (Université ELTE)
« Des textes à dire debout » Oralité-écriture, collectif-individuel dans l’écriture de Guy Régis
Junior
Guy Régis Junior (1974- ), l’auteur haïtien de l’extrême contemporain est devenu connu comme
fondateur, animateur, acteur et metteur en scène de Nous Théâtre (2001- ),compagnie itinérante,
novatrice par l’audace de ses formes et de ses langages. Il publie des pièces de théâtre, des poèmes et
depuis un certain temps de la prose aussi (roman, Vent d’ailleurs, 2011). Je me propose d’étudier les
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traits de l’oralité dans ces différentes formes d’apparition de l’écriture régisienne qui vient des tripes,
qui touche à l’élémentaire, qui est incisive et concise, toujours pleine de tensions et toujours poétique,
et qui veut dire l’amour-rage qui l’attache à son pays meurtri, ravagé, zombifié, à « l’île de tous ses
rêves et de tous ses cauchemars ».
Buata MALELA (Univ.de Silésie)
Du roman musical à la musique romanesque : Approche comparée de l’oralité dans le discours
littéraire de Patrick Chamoiseau et d’Alain Mabanckou
Il s’agit d’étudier le fonctionnement de l’oralité dans la littérature de la diaspora africaine et antillaise
de l’époque contemporaine en adoptant un point de vue comparatiste. Pour ce faire, nous partirons du
cas de deux écrivains assez différents dans leur prise de position dans l’espace public et dans l’univers
culturel et littéraire. Nous aurons pour but d’étudier l’oralité dans leurs productions, placées dans leur
contexte spécifique, comme stratégie de placement d’une posture de l’écrivain antillais pour
Chamoiseau et francophone pour Mabanckou. Comment cette stratégie se retrouve-t-elle dans leurs
productions littéraires et dans leurs essais et quelle en est la signification dans l’espace public ?
Isabella ZATORSKA (Université de Varsovie)
Entre le malgache et l’occidental : Za. roman de Jean-Luc Raharimanana
Dans l’avant-dernier roman ? de Raharimanana (né en 1967), Za.roman (2008), le partage net entre le
bien et le mal se brise et s’intériorise, grâce à l’outil grammatical et phonétique : za ou izahoo, forme
soutenue, c’est moi ; mais c’est aussi un « je » zézéyant d’un intellectuel malgache victime de tortures,
et un « il » pour un francophone étranger, ballotté entre l’aspect sonore et le visuel ; ainsi le lecteur
inspecte, visible et audible conformément à sa propre culture, la conscience trouble d’un témoin de
l’intelligentsia malgache (l’histoire du narrateur rappelle le martyre vécu par le père de l’écrivain).
Des jeux de mots rendent la pareille aux jeux d’histoire. Voire plus...
Hedia KHADHAR (Université de Tunis)
Corps et voix dans les Chants d’ombre de Senghor
Dans son premier recueil de poésies Chants d’ombre (1945) Senghor par ce titre oxymorique marque
le début d’une quête, celle des voix intérieures qui peuplent le corps et l’esprit marqués par l’Histoire
et qui s’expriment par l’émotion du chant et de la danse. Tout comme le chant et la danse, le masque
fait pendant à la fièvre des sens pour exprimer l’immuable. De même la femme où selon GG Osman «
l’éternel féminin demeure la source d’extase sous la plume de Senghor source de fécondité et qui se
confond avec la terre africaine. L’Afrique se présente avec un visage et un corps sensuel «
incorruptible comme l’or. C’est la parole qui prend le relais et devient source fécondante d’un
homme nouveau. Le rapport entre le corps et l’écriture est complexe puisque le corps écrivant
s’estompe pour que l’œuvre prenne sa place. Dans ce rapport matriciel le corps se sacrifie sur l’autel
de la feuille blanche pour donner naissance à un autre corps « corps-texte ». Pour Senghor, toute
écriture de soi passe par l’écriture du corps et de son histoire. Une Histoire inséparable de la terre
d’Afrique, de l’esclavage, de la colonisation, tout ce qui a pu marquer le corps et modifier la voix du
poète. Ainsi par son chant, Senghor arrive à libérer la parole en évoquant l’histoire glorieuse d’un
corps martyrisé qui grâce au chant arrive à se libérer et à retrouver son être.
Amélie THÉRÉSINE (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Corps parlés et théâtre de voix dans l’œuvre de Dieudonné Niangouna
« Comment (se) dire » c’est-à-dire « comment partir de soi pour aller vers l’autre ? » est une
interrogation qui traverse toute l’œuvre de Dieudonné Niangouna. Mettant en scène des personnages,
ou plutôt des figures, ses œuvres esquissent des situations qui peinent à se raconter et dont la structure
fait difficilement sens. S’il est tentant de reconnaître dans ces caractéristiques celles qui renvoient
généralement au drame moderne et contemporain qui a rompu avec la conception aristotélicienne
organiciste de la fable, la poétique du théâtre de Dieudonné Niangouna prend surtout sens dans la
notion de « corps parlés ». Loin de corps agissants, sa dramaturgie présente des corps réduits à une
fonction de catalyseur qui font entendre la voix dans laquelle se condense la physicalité qui a déserté
les corps. Aussi est-ce par et dans la langue que se signale une dramaturgie symptomatique d’une
transmission rompue. Le surgissement d’une parole empêchée ou échappée et son déploiement (proche
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de la méthode analytique d’un laisser-parler) déploie un théâtre de voix où seul l’acte de parole
devient primordial face à la difficulté de produire du sens car il semble avoir pour but non pas de
conjurer le vertige mais de le rendre tangible par l’ouverture vers ces endroits « d’où ça parle ».
Théâtre de l’origine et de la naissance de la parole, l’œuvre de Dieudonné Niangouna résiste à la
lecture et repose sur une oraliture et une musicalité qui exigent une actualisation dans l’acte de
communication que propose la représentation.
Pierre LETESSIER (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Musique et didascalies chez Koffi Kwahulé
Si les didascalies de Koffi Kwahulé ouvrent des « hypothèses interrogatives » dans le texte, beaucoup
indiquent les moments précis où il y a (et n’y a plus) musique. En étudiant ces didascalies, Il s’agira de
se demander quelles sont les nécessités et les fonctions de la musique dans le théâtre de Koffi Kwahulé
et comment la musique, inscrite dans le texte, participe à la construction du spectacle et du sens.
Marià MINICH BREWER (Minneapolis)
Mise en scène, mise en seuil des corps et des voix dans le théâtre francophone diasporique
Cette communication interroge le théâtre diasporique africain à partir des seuils inédits qu’il invente
entre les espaces, les corps et les voix. Mais comment saisir le phénomène du ‘corps parlant’ dans ses
rapports au théâtre comme événement? À partir de perspectives à la fois théoriques et dramaturgiques,
je propose une lecture de pièces où l’écriture poétique et scénique opère un dépassement des régimes
du corps visible et de sa parole audible pour transformer ceux-ci en seuils événementiels d’un théâtre
qui advient.
Pénélope DECHAUFOUR (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Voix et corps marionnettiques : avatars d’oralités
Les dramaturgies d’Afrique noire francophone et des diasporas, en étant traversées par l’oralité, sont
empreintes de questions liées à la mémoire et à la transmission d’une mémoire difficilement audible.
La musicalité et la corporéité de ces écritures nous ramènent récurremment sur les traces du masque et
de la marionnette se faisant tour à tour actant du drame ou présence sous-jacente, motif d’écriture.
L’univers marionnettique ainsi déployé interroge alors le rapport à la mémoire historique, culturelle
ainsi que physique, les mots eux-mêmes peuvent devenir des présences spectrales, des traces à écouter
ou à observer. Enfin, les questions de l’oralité et de la marionnette se rejoignent autour du thème de la
manipulation en en recouvrant les différentes définitions et en abordant la parole comme un corps à
manipuler précautionneusement, métaphore du corps social souvent bafoué. Entre transmutation et
métamorphose, les voix et corps marionnettiques sont la trace et le devenir de l’oralité, un système
ayant fondamentalement structuré les sociétés africaines précoloniales ; des avatars ne manquant pas
d’interroger également les méandres de nos sociétés post-coloniales.
Amos FERGOMBÉ (Université d’Artois)
Une tempête des corps errants
Gladys M. FRANCIS (Georgia State University)
La mort dans le théâtre de Sony Labou Tansi ou la construction d’un mythe neuf
La complexité et la violence de la notion de coupure-lien à l’autre et à soi sont centrales à l’esthétique
de Sony Labou Tansi. Faut-il un assassinat pour qu’un Chef d’État devienne martyr ? Faut-il être
martyr pour parvenir à rassembler son peuple ? Est-il possible de diriger son peuple sans le nourrir de
mystères ? Et si ce peuple est avide de secrets, comment le diriger avec qualité ? Tels sont les enjeux
au centre du suicide embryonnaire d’Antoine m’a vendu son destin, où la folie révèlera le drame du
manque de qualité dans les espérances des dirigeants africains. À travers cette folie-suicide, humour et
pathétique rendent compte des états d’Êtres bysantesques du personnage principal, et suscitent sans
équivoque – le rire. Bien que ce rire rabaisse, il permet pourtant de matérialiser un espace d’entre-deux
qui renvoie à l’état d’urgence de notre condition humaine. Cette communication propose une analyse
du sens du sacrifice, de l’intérêt de (se) jouer (de) la folie, et de la donner à lire et à jouer. Nous
verrons dans quelle mesure Sony Labou Tansi déconstruit son héros ascensionnel pour réactualiser le
mythe de la terre – mère.
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Sylvie CHALAYE (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Corps diasporiques et voix chorales des théâtres marrons
Les dramaturgies contemporaines afro-caribéennes, dramaturgies de marronnage, convoquent des
corps en voix, dématérialisés, fantomatiques, disséminés, traversés de part en part, corps revenant, qui
se reconstruisent par la parole. Ces corps d’oralité, de choralité aussi, « théâtre du drame », disent
l’identité diasporique et le royaume perdu à réinventer.
Paul BALAGUÉ (Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
Le corps-territoire chez Kossi Efoui : une dramaturgie de l'oralité explosée
Dans la dramaturgie de Kossi Efoui, la parole n'est pas simple élocution de mots par un personnage.
L'acte même de la parole semble être plus dans la projection corporelle d'une parole qui n'est pas que
l'expression d'une personnalité mais aussi des traces du collectif, de l'Histoire et des territoires perdus.
Chez cet auteur, le corps n'est pas dans un espace, il est l'espace. En ce sens que le corps porte,
transmet, invoque ce qui est autour de lui comme un catalyseur. Chez Kossi Efoui une grande part de
ce qui est convoqué ne se voit pas, on parle d'espaces perdus, de voix venues d'ailleurs et de
personnages absents. Dans cette absence, ce creux, le corps est ce qui est parcouru. On analysera
comment le corps chez Kossi Efoui est rendu "autre", par toutes les paroles qui le traversent. A travers
cela, c'est une dramaturgie de l'explosion que nous propose Efoui, quand tout est tiraillé, l'énergie sort
en répandant partout son souffle.
Agathe BEL (Sorbonne Nouvelle- Nouvelle-Paris 3)
Corps-territoire et sexualité dans les dramaturgies contemporaines des diasporas afrodescendantes en France, au Brésil et aux Etats-Unis
Dans les dramaturgies contemporaines des diasporas afro-descendantes en France avec Koffi
Kwahulé, au Brésil avec le Bando de Teatro Olodum et aux Etats-Unis avec Suzan Lori-Parks, l’acte
sexuel est présent sous de nombreuses formes au cœur des pièces. Le théâtre met en scène ce thème
universel et nous plonge au cœur de violences en convoquant le viol sous différentes formes, agression
corporelle souvent vécue par les femmes. Les corps se font territoire en devenant la métaphore de ces
diasporas dans la relation entre Noirs et Blancs, du viol de l’esclavage à la domination actuelle.
Cependant, les dramaturges fêtent aussi les sens avec des procédés farcesques qui soulignent le plaisir
des corps permettant l’acte créatif. Ces dramaturgies, par la mise en scène du sexe comme approche
concrète et intime du corps trouve un moyen pour exprimer l’exil où les corps sont des territoires de
construction identitaire.
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