la competitivite des entreprises europeennes face a la mondialisation

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COMMISSION DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
Bruxelles, 20.01.1999
COM (1998) 718 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION
AU CONSEIL,
AU PARLEMENT EUROPEEN,
AU COMITE DES REGIONS ET
AU COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL
LA COMPETITIVITE DES ENTREPRISES EUROPEENNES
FACE A LA MONDIALISATION COMMENT L’ENCOURAGER
Bien que les services de la Commission mettent tout en oeuvre pour éviter d'éventuelles erreurs ou
ommissions, les documents diffusés n'engagent pas la Commission et seule la version publiée au Journal
Officiel des Communautés européennes fait foi.
COMMUNICATION DE LA COMMISSION
LA COMPETITIVITE DES ENTREPRISES EUROPEENNES
FACE A LA MONDIALISATION COMMENT L’ENCOURAGER
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
4
I.
5
TENDANCES : LE PHENOMENE DE LA MONDIALISATION
I.1
I.2
LES ELEMENTS MOTEURS DE LA MONDIALISATION
LES NOUVEAUX FACTEURS CLEFS DE LA COMPETITIVITE
L'environnement multilatéral : un nouveau cadre institutionnel
Industries de la connaissance : le nouvel enjeu
Internet, commerce électronique : nouveau media, nouvelles pratiques
Recherche et développement technologique : un cycle de temps plus resserré
Petites et moyennes entreprises : de nouveaux acteurs globaux
Emploi et qualité de la vie
Un développement soutenable et durable
II. LES POSITIONS DES ENTREPRISES EUROPEENNES FACE A LA
MONDIALISATION : ELEMENTS DE DIAGNOSTIC
6
7
7
8
8
9
9
10
10
10
11
II.1
COMPÉTITIVITÉ : LE BESOIN DE NOUVELLES DEFINITIONS
II.2
UN POSITIONNEMENT TRADITIONNEL PLUTÔT QUE “PORTEUR” SUR LE
11
PLAN INDUSTRIEL
Une industrie européenne compétitive, mais présentant des faiblesses dans sa
spécialisation
11
Une utilisation modeste des technologies de l’information
12
La mondialisation tardive des services aux entreprises
13
II.3
IDENTITE CULTURELLE ET SECTEUR AUDIOVISUEL - UN DEFI ET UNE
14
CHANCE
II.4
POLITIQUE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE : UN EFFORT
14
INSUFFISANT ET UNE ORGANISATION PERFECTIBLE
Un niveau et un accroissement de ressources inférieur
14
Une politique fragmentée et peu coordonnée
16
Une moindre efficacité dans l’exploitation des résultats de la recherche
16
II.5
UN SYSTEME PEU PERFORMANT DANS LE DOMAINE DES BREVETS ET DU
17
COMMERCE DES LICENCES
II.6
ALLIANCES, FUSIONS ET ACQUISITIONS DANS LES DOMAINES AVANCES :
18
UNE CERTAINE INHIBITION
Fusions et Acquisitions
18
Partenariats de recherche
18
19
II.7
L'EUROPE NE VALORISE PAS ASSEZ LE RISQUE
III.
ORIENTATIONS POUR UNE NOUVELLE POLITIQUE INDUSTRIELLE
III.1
PROMOUVOIR LA COMPÉTITIVITÉ DANS UNE PERSPECTIVE MONDIALE
Adapter les systèmes d’acquisition des compétences et susciter l’esprit
d’entreprise
Améliorer le système “recherche - exploitation des résultats ”
Faciliter la prise de risque
Réorienter l'aide publique aux entreprises vers l’investissement immatériel
Valoriser le capital humain
Accroître la mobilité des personnes
III.2
PROMOUVOIR L'ACCES DES ENTREPRISES AU MARCHE MONDIAL
Poursuivre la mise en valeur des avantages concurrentiels du Marché intérieur
Assurer une concurrence efficace qui permette de tenir compte de la nature
mondiale et innovatrice des marchés
Continuer les efforts positifs dans la libéralisation du secteur public
2
20
21
21
22
22
23
23
24
24
24
26
28
III.3
PROMOUVOIR UN CONSENSUS ET DES REGLES DU JEU EQUITABLES AU
28
NIVEAU MONDIAL
Promouvoir l’établissement d’un cadre concurrentiel mondial
28
Contrôler l’application des règles
29
Défendre les positions européennes : renforcer la vigilance, préparer les
négociations, travailler ensemble
29
Œuvrer pour la mise en place d’une coordination approfondie au niveau mondial 30
Responsabiliser les industriels
31
Promouvoir l’intérêt des consommateurs et des utilisateurs
31
CONCLUSIONS
32
ANNEXE
33
RESUME SYNTHETIQUE
33
3
INTRODUCTION
A la veille d’entrer dans le 3ème millénaire, l’Europe se trouve, avec ses
forces, ses faiblesses, son marché, ses traditions et ses valeurs, confrontée
à une accélération de la mondialisation des économies. Ce défi requiert non
seulement une adaptation des entreprises, mais également une réponse
politique.
Dans l’incertitude créée par les mouvements récents de l’économie
mondiale, le pôle de stabilité économique et de croissance non inflationniste
que constitue l’Union illustre les bénéfices déjà retirés de la dynamique de la
construction européenne. L’expérience acquise, les efforts consentis dans
le cadre de la construction du Marché intérieur et la création de l’Euro
s’avèrent autant d’atouts positifs.
La mondialisation est, pour l’Europe, une chance à saisir plutôt qu’une
menace. Loin d’être la cause du chômage en Europe, elle est source
potentielle de création d’emploi. Il existe un lien étroit entre le
développement des échanges mondiaux, la croissance économique et
l’emploi : la majeure partie de la prospérité de l’Union repose aujourd’hui sur
le commerce et l’investissement international. Mais pour en tirer le meilleur
parti, pour l’influencer au mieux des intérêts de ses citoyens et de l’économie
européenne, l’Union doit s’adapter sans attendre à ce nouvel état de fait, et
se doter des meilleurs outils pour l’exploiter.
Il est clair toutefois que ce processus de mondialisation comporte des
phases d’ajustement qui peuvent susciter des inquiétudes voire des risques,
par exemple sur le plan social ou environnemental. C’est pourquoi la
protection des valeurs de l’Europe doit, parallèlement à cette adaptation,
constituer à la fois un objectif et un atout pour aborder dans de bonnes
conditions le phénomène de la mondialisation. De même, pour l’Europe, le
développement soutenable et durable doit viser à créer simultanément les
conditions économiques et sociales pour préserver l’environnement, soutenir
la compétitivité et contribuer à la création d’emplois.
La compétitivité des entreprises, c’est aussi l’affaire des citoyens : elle
concerne leur emploi présent et futur, les conditions de travail, la protection
sociale, l’impact sur l’environnement, toutes choses auxquelles ils sont
attachés ; elle dépend de la qualité de leurs compétences, de leur créativité,
de leur aptitude à prendre le risque d’innover et d’entreprendre.
L’Europe s’est dotée d’une politique industrielle qui vise à accroître la
compétitivité de ses entreprises dans une économie ouverte et
concurrentielle et qui contribue à renforcer la priorité donnée à la politique
d’emploi. Les exigences de la mondialisation ainsi que les préoccupations
des citoyens imposent de s’interroger sur sa pertinence et sur les moyens de
renforcer la capacité à stimuler l’innovation et l’esprit d’entreprise en Europe.
Cette Communication est un document de réflexion qui décrit les principaux
défis que l’Union européenne devrait relever pour tirer profit de la
mondialisation. Elle indique les pistes à explorer par l’Union, les instruments
à mettre en œuvre et identifie les priorités pour les actions futures. Ces
orientations s’intègrent dans la politique générale de l’Union de renforcement
4
de la croissance et de création d’emploi, dans le cadre du processus de
réforme économique, des lignes directrices pour l’emploi et des grandes
orientations de politique économique.
I.
TENDANCES : LE PHENOMENE DE LA MONDIALISATION
Phénomène déjà ancien, la mondialisation a connu une accélération de son
développement au lendemain de la seconde guerre mondiale, en trois
vagues successives :
L'internationalisation du commerce (ce dernier croissant plus rapidement
que la production depuis les années 50) ;
l’internationalisation des flux de capitaux (ceux-ci augmentant beaucoup
plus vite que le commerce depuis les années 80) ;
et, récemment, la mondialisation des flux d'information (ceux-ci croissant
beaucoup plus rapidement que le commerce ou les capitaux). La
mondialisation est devenue un élément fondamental de développement pour
l’ensemble des économies industrialisées et émergentes, ainsi que pour
l’essentiel des entreprises manufacturières ou des services.
Depuis 1950, la croissance du commerce mondial de marchandises a dépassé chaque
année celle de la production de marchandises mondiale (6,3% en moyenne annuelle
contre 4% pour la production).
Entre 1985 et 1997, les flux d’investissements directs à l’étranger des pays de l’OCDE
ont été multipliés par sept, passant d’environ 50 à 382 milliards de dollars.
Les paiements transfrontières (honoraires, redevances…) ont plus que quadruplé depuis
1983, pour dépasser les 50 milliards de dollars.
L'ouverture des marchés mondiaux à la concurrence est une réalité
quotidienne pour les firmes européennes, une tendance historique pour
l’évolution des sociétés et des mentalités, un facteur de remise en cause et
une incitation pour les pouvoirs publics à l’adaptation des réglementations
gouvernementales. Caractérisée par l'intensification des flux transfrontaliers,
la mondialisation signifie plus encore la transformation en profondeur des
structures, de l'organisation et de la nature du commerce international.
Pratiquement tous les secteurs industriels connaissent de profondes
transformations de structures. Ces phénomènes sont particulièrement
marqués dans les secteurs incorporant une part croissante de technologies
avancées, comme les industries automobiles, pharmaceutiques et les
télécommunications. L’impact de la mondialisation touche également les
secteurs manufacturiers plus traditionnels, comme l’industrie textile, qui font
l’objet de tensions internationales récurrentes.
Un des aspects majeurs de la mondialisation est l'importance croissante que
prennent les services par rapport aux produits manufacturés et, plus
récemment, l'émergence d’une nouvelle forme d’économie basée sur la
“mise en réseaux”.
5
Figure 1 : Valeur ajoutée et emploi en 1995 par grands secteurs :
comparaison Union – Etats-Unis
100%
15
13
51
60
21
16
45
61
80%
60%
40%
20%
31
28
25
19
0%
Source:
EC
1998
UE
EU
UE
EU
PNB aux coûts des facteurs Emploi total
Agriculture
Services March.
Industrie
Services publics
ème
General Electric (2
capitalisation boursière mondiale, avec 223 milliards de $) réalise
désormais 60% de ses bénéfices grâce aux services, notamment les services financiers
de GE Capital. Une autre branche du groupe, GE Information services (700 millions de $
chiffre d’affaire en 1997) génère la meilleure marge opérationnelle du groupe (23%).
En 1996, les industries de haute technologie ont représenté 6,1% du PNB américain,
dont 3,85% dans les services et 2,27% dans l’industrie manufacturière.
I.1
LES ELEMENTS MOTEURS DE LA MONDIALISATION
Quatre éléments moteurs alimentent le phénomène de mondialisation : des
éléments technologiques, “entrepreneuriaux”, financiers et institutionnels.
L’évolution technologique favorise la mondialisation. Le développement de la
société de l’information joue ici un rôle moteur par la mise en place de
réseaux numériques globaux liant entre eux une multitude d’acteurs. Elle
contribue ainsi à créer une nouvelle économie globale basée sur les réseaux
et l’immatériel.
Le développement des multinationales a consolidé la mondialisation des
échanges. Pour améliorer leur compétitivité, les entreprises ont intégré la
dimension internationale dans leur organisation et dans leur stratégie, en
“externalisant” certaines de leurs activités, en relocalisant leur production et
en promouvant la diffusion de leurs produits sur de multiples marchés pour
en tirer des économies d’échelle. En témoignent la segmentation de leurs
opérations en activités distinctes, effectuées dans différents sites et pays, et
les importants rapprochements, sous forme de fusions, acquisitions ou
alliances stratégiques, aujourd’hui observés. Notamment dans le commerce
et les industries de haute technologie, de nouvelles formes de collaboration
entre entreprises internationales apparaissent, donnant lieu par exemple à
des accords de licence, de recherche ou à des prestations de services
destinées à assurer un meilleur transfert des technologies.
6
En 1998, le nombre des entreprises transnationales s’élève à plus de 45.000 ; celles-ci
contrôlent plus de 280.000 filiales dans le monde entier. En 1994, ces firmes
représentaient près du tiers de la production mondiale, et leurs échanges internes
environ le tiers du commerce mondial.
En 1997, la quantité totale de biens et services produits par les multinationales sur les
marchés locaux s'est élevée à 6000 milliards de $, soit plus que le volume du commerce
international mondial.
Avec leurs volumes et leurs liquidités, les marchés financiers internationaux
contribuent également à la mondialisation en facilitant la multiplication des
fusions et des acquisitions à travers les frontières. L'instantanéité et la
volatilité des flux financiers, comme le prouvent les turbulences monétaires
et financières en Russie, en Asie et dans d’autres pays émergents, affectent
directement la conduite des entreprises et des économies nationales. A cet
égard, l’arrivée de l’euro crée un pôle de stabilité monétaire qui favorisera la
croissance et l’emploi au sein du marché unique. L’euro sera, par ailleurs, un
outil permettant à l’UE d’œuvrer pour une plus grande stabilité du système
monétaire international.
Ces tendances économiques et financières ont été permises par des
facteurs institutionnels, notamment la libéralisation et l’ouverture des
marchés, ainsi que le démantèlement des tarifs douaniers (40 % en 1948 ;
4 % en 1997) dans le cadre du GATT. Les accords successifs sur la
libéralisation dans le contexte de l’OMC ont apporté une contribution
significative à la croissance économique, à l’amélioration des niveaux de vie
et, par exemple dans le secteur des télécommunications, ont créé de
nouvelles opportunités d’emplois.
I.2
LES NOUVEAUX FACTEURS CLEFS DE LA COMPETITIVITE
Dans le nouvel environnement des marchés libéralisés et des réseaux
ouverts, les compagnies européennes sont directement confrontées à la
concurrence existante, qui transcende les frontières sectorielles et
géographiques. Les facteurs de compétitivité évoluent : la qualité, la rapidité,
la personnalisation, l’image des produits, les services après vente prennent
le pas sur les facteurs-coûts traditionnels. Ces nouvelles données exigent
souvent des investissements immatériels
tels que l’organisation, les
ressources humaines, la recherche.
L'environnement multilatéral : un nouveau cadre institutionnel
La mise en place de nouvelles structures et processus multilatéraux pour
réglementer le commerce mondial remplace graduellement le contrôle
national ou régional traditionnel. La mondialisation, en soi, n’affecte pas
la souveraineté juridique, mais elle réduit
les marges d’action
unilatérales et leur efficacité pour les gouvernements nationaux. En
revanche, elle accroît les marges d’action de l’Union sur le plan
multilatéral. La politique commerciale aborde aujourd’hui les questions
relatives aux obstacles non tarifaires, dans le cadre notamment de
l’Organisation Mondiale du Commerce. A côté du Marché intérieur de
l’Union, on voit par ailleurs se constituer graduellement une intégration
régionale des échanges commerciaux, avec l’émergence de l’ALENA, du
MERCOSUR, de l’ASEAN ou de l’APEC.
La création de l’OMC illustre cette évolution. Les Etats parties négocient
des accords multilatéraux par lesquels ils décident de s’imposer des
7
obligations dans certains domaines. Cette régulation internationale tend à
se substituer à des formes d’action ou d’intervention nationale, rendant
ainsi urgente la définition de priorités et d’idées novatrices pour gérer
l’environnement multilatéral et garantir des règles du jeu équilibrées au
plan international en matière de concurrence (« Level playing field »).
Plusieurs accords, préparant la voie à une plus grande ouverture des
marchés mondiaux, peuvent être mentionnés : les accords de l’OMC sur
les services et les télécommunications, l’accord sur les technologies de
l’information, les accords de reconnaissance mutuelle, ainsi que les
accords TRIPS sur les droits de la propriété intellectuelle. L’exemple de
la mise en œuvre de l'accord de 1997 sur les télécommunications montre
toutefois qu’une grande vigilance est requise pour contrôler et assurer la
pleine application des engagements multilatéraux pris par les partenaires
de l'Europe.
Industries de la connaissance : le nouvel enjeu
Les industries basées sur la connaissance, et notamment les industries
reposant particulièrement sur la possession de droits d'auteur ou le
savoir-faire (par exemple divertissement, logiciel, services aux
entreprises) dépassent les secteurs plus traditionnels en termes de
croissance, de capitalisation et de capacité à l’exportation.
Dans ces domaines, les investissements se concentrent sur les pays
industrialisés ; les principaux concurrents de l'Europe ne sont pas les
économies en développement à faibles coûts de main d’œuvre, mais les
partenaires disposant des technologies les plus avancées.
En compétition pour les ressources financières, compagnies et pays se
concurrencent également pour les ressources intellectuelles : la valeur
d’une firme se détermine désormais plus par rapport à son potentiel
intellectuel et la qualité de son organisation que par rapport à ses actifs
traditionnels.
Les mesures prises par les gouvernements (par exemple l’accroissement
des contingents de visas “haute technologie" permettant aux étrangers
qualifiés de résider et travailler aux Etats-Unis) et les incitants
économiques offerts par l’industrie (particulièrement les “stock-options”)
sont utilisés pour attirer et conserver les compétences, qu’elles
proviennent d’Europe ou des pays en voie de développement.
Basée sur une évolution permanente des connaissances, l’économie
mondialisée crée des besoins en compétences techniques mais aussi en
capacités d’adaptation aux diversités culturelles, auxquels les systèmes
existants d’enseignement et de formation doivent encore répondre.
Internet, commerce électronique : nouveau media, nouvelles pratiques
La notion de distance devenant caduque, l'accès aux marchés mondiaux
dont bénéficient les entreprises de l'Union a pour contrepartie un accès
semblable de nos concurrents aux marchés européens. Les sites web
utilisés pour commercialiser biens et services sont visités pour comparer
et analyser les prix, les stratégies des entreprises ; les informations sur
les salaires pratiqués circulent également plus rapidement.
Le commerce électronique agit comme un catalyseur, synonyme de plus
grande transparence des marchés et de concurrence mondiale
immédiate ; il représente un facteur essentiel de mutation et d’incitation
8
à la concurrence, y compris pour des secteurs traditionnels tels que les
industries à forte intensité de main-d'œuvre. Il favorise la diffusion de
produits et services variés valorisant ainsi la diversité du tissu productif et
les savoir-faire européens. Pour les PME, les marchés-niches, leurs
cibles traditionnelles, peuvent désormais être exploités globalement :
start-ups innovantes et PME peuvent accéder aux marchés mondiaux et
acquérir une dimension internationale dès leur origine.
Simultanément, le commerce électronique engendre l’apparition
d’activités
entièrement
nouvelles,
notamment
des
services
d’intermédiation (par exemple entreprises de logistique, services de
certification et d'authentification, agences de notation pour l’octroi de
crédits). En 1996, Internet a suscité la création de 1,1 millions d’emplois
nouveaux dans le monde, dont 760 000 aux Etats-Unis.
Recherche et développement technologique : un cycle de temps plus
resserré
La recherche est de plus en plus mondialisée : les firmes américaines
investissent par exemple annuellement plus de 10 milliards de dollars en
recherche et développement hors des Etats-Unis.
Par ailleurs, bien qu’il y soit encore fait référence, notamment par
l’Organisation Mondiale du Commerce, le modèle classique séquentiel de
la recherche (“recherche précompétitive fondamentale recherche
industrielle activité de développement préconcurrentielle”) devrait à
terme faire l’objet d’une réflexion tenant compte de l’évolution future dans
ce domaine.
Comme dans le cas de la biotechnologie, des produits, parfois non
prévus, peuvent résulter directement de travaux de recherche
fondamentale. Par ailleurs, les nouvelles techniques de communication
accélèrent notablement la diffusion des connaissances ; les projets sont
menés via un échange d'informations permanent entre les différents
intervenants (universités, laboratoires, industriels, utilisateurs).
L’organisation des entreprises en général et leur gestion technologique
en particulier changent aussi sous la pression de cette interactivité
croissante des domaines de recherche : les entreprises ne pouvant plus
couvrir par leurs propres moyens tous les domaines de recherche et
d’innovation, elles coopèrent de plus en plus, soit entre elles à travers
des alliances stratégiques ou des entreprises communes, soit avec les
universités et les centres de recherche publics et privés.
Petites et moyennes entreprises : de nouveaux acteurs globaux
La mise en place des réseaux numériques abaisse le coût d’entrée sur
les marchés mondiaux. Aux États-Unis, l'économie numérique se fonde
sur une masse critique de PME et de start-ups innovantes mises en
réseau. Aidées par un accès facile aux capitaux, quelle que soit l’étape
de leur développement, ces entreprises sont à même de passer
rapidement de l’état de simple concept à celui de société mondiale leader
dans son domaine. Bien qu’il y ait trois fois plus de PME en Europe
qu’aux États-Unis (15 millions contre 5), l'Europe tarde dans ce
processus.
L’enjeu est celui de la création d’emploi : aux États-Unis, deux tiers des
nouveaux emplois créés au cours de ces quatre dernières années
9
proviennent des entreprises de haute technologie, dont la moitié dans
des PME ; en Europe, 50% de nouveaux emplois ont été créés par 4%
de petites et moyennes entreprises à fort potentiel de croissance.
Emploi et qualité de la vie
La conjonction des nouvelles technologies et de la mondialisation des
marchés augmente les avantages comparatifs des économies
industrialisées qui se spécialisent dans les produits à fort contenu de
connaissance et de compétences organisationnelles. Cela implique un
accroissement important des investissements en recherche, éducation
et des dépenses de services aux entreprises, activités caractérisées par
un taux de dépenses salariales très élevé. Contrairement à une idée
reçue, si l'adaptation à ces nouvelles conditions de compétitivité est
conduite de façon active, cela devrait donc se traduire par une
diminution du taux de chômage. C'est d'ailleurs ce que l'on a constaté
ces dernières années aux Etats-Unis. Les firmes de haute technologie
représentent 40% de la croissance américaine de ces deux dernières
années. Les Orientations pour l’emploi de 1999 et le récent rapport de la
Commission sur les opportunités d’emplois dans la société de
l’information ont mis en lumière le potentiel qui existe dans ces secteurs
pour la croissance et l’emploi dans l’Union ; ils ont souligné le besoin
d’une action concertée afin d’optimiser ce potentiel.
Par ailleurs, l'accélération de l'émergence des nouvelles technologies,
en créant des besoins de nouvelles formations, crée des pénuries
temporaires locales de certaines qualifications. Ces besoins non
satisfaits coexistent avec un chômage élevé dans d'autres zones.
Un développement soutenable et durable
Le concept d’« éco-efficacité » signifie mieux prendre en compte
l’objectif de produire plus à partir de moins, et donc d’accroître la
productivité des ressources naturelles à un coût plus faible. Le concept
d’« éco-innovation » cherche à sensibiliser l’entreprise à une meilleure
prise en compte de la protection environnementale dans la fabrication de
ces produits tout au long de sa durée de vie.
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que la capacité des entreprises
européennes à anticiper sur des normes ambitieuses en matière
d’environnement constitue un atout sur les marchés mondiaux, tant pour
les produits finis que pour les technologies propres ainsi développées.
Cela peut également contribuer à maintenir, voire à attirer une main
d’œuvre qualifiée en Europe.
L’ensemble des politiques liées à ces objectifs est mené en cohérence
en Europe ; elles se renforcent mutuellement et doivent ainsi permettre
d’offrir aux consommateurs les produits qu’ils désirent, aux citoyens les
conditions de vie auxquelles ils aspirent, et aux entreprises les moyens
d’accroître leur compétitivité.
II.
LES POSITIONS DES ENTREPRISES EUROPEENNES FACE A LA
MONDIALISATION : ELEMENTS DE DIAGNOSTIC
Face à la mondialisation, la compétitivité des entreprises européennes
demeure élevée et progresse même en certains domaines. Ce constat doit
toutefois être nuancé, car la spécialisation de l’industrie européenne
10
présente des faiblesses. Ceci concerne notamment les industries de haute
technologie.
Les firmes européennes font également un usage plus modeste et ont un
accès plus limité aux instruments porteurs de l’innovation (recherche,
brevets, capital-risque, alliances). L’organisation et les règles de
fonctionnement de ceux-ci au niveau européen restent sujettes à
amélioration.
II.1
COMPÉTITIVITÉ : LE BESOIN DE NOUVELLES DEFINITIONS
L'accélération de la mondialisation et l'émergence rapide de nouvelles
formes de concurrence, la remise en cause des frontières traditionnelles
entre secteurs industriels, imposent une révision du concept de compétitivité.
Les entreprises segmentant “la chaîne de valeur” de leurs produits et
services au travers de marchés distincts, les critères traditionnels de
séparation selon les différents secteurs industriels perdent de leur
pertinence : la véritable mesure de la compétitivité ne devrait pas être celle
des secteurs, mais plutôt celle des activités et des marchés.
La compétitivité nationale ou régionale devient également difficile à
mesurer : avec l'augmentation des investissements croisés trans-frontières,
la relocalisation des opérations, les changements rapides de propriété et
l’avènement du télétravail, l’identité géographique devient de plus en plus
diffuse.
Enfin, il faut noter que les positions compétitives établies sur une maîtrise
technologique avancée ou un savoir-faire intellectuel important, si elles
s’avèrent capables d’engendrer rapidement une création de valeur élevée,
sont également beaucoup plus volatiles.
II.2
UN POSITIONNEMENT TRADITIONNEL PLUTÔT QUE “PORTEUR”
SUR LE PLAN INDUSTRIEL
Une industrie européenne compétitive, mais présentant des faiblesses
dans sa spécialisation
Globalement, les entreprises manufacturières de l’Union européenne ont
maintenu de bonnes performances sur les marchés à l’exportation,
démontrant un haut niveau de compétitivité dans un environnement de plus
en plus mondial (voir le rapport sur la compétitivité, 1998). Leurs parts de
marché sont restées stables sur la décennie 90 aux alentours de 27% des
marchés mondiaux, alors que les Etats-Unis et le Japon voyaient les leurs se
contracter Simultanément, le surplus commercial de l’Union européenne
faisait plus que quadrupler pour atteindre 130 milliards d’ECU en 1996, soit
2% du PIB européen. Cet excédent provient du commerce de l’Europe avec
les pays autres que les Etats-Unis et le Japon. Avec ces deux pays, la
balance commerciale européenne est respectivement approximativement
équilibrée, et en déficit marqué.
En dehors des Etats-Unis et du Japon, l’Union européenne bénéficie de
termes de l’échange avantageux lui permettant de faire payer ses
exportations à un prix supérieur à ses importations. Cela résulte d’une
spécialisation européenne dans les produits à valeur ajoutée relativement
haute. Il s’agit soit de produits traditionnels pour lesquels l’Europe utilise son
savoir-faire technologique, sa richesse culturelle et la compétence de sa
main d’œuvre pour se spécialiser dans le haut de gamme et la haute qualité
11
(par exemple le textile, l’habillement, l’ameublement, les produits de sport, le
tourisme culturel ou l’artisanat), soit de produits techniquement sophistiqués
et intenses en recherche (par exemple la machine-outil, les véhicules à
moteur et la chimie). Ces trois derniers secteurs à eux seuls génèrent un
excédent commercial supérieur à l’excédent total de l’Union européenne.
Par contraste, l’Union européenne se montre insuffisamment performante et
en conséquence mal spécialisée dans les segments de marché à croissance
rapide qui se caractérisent par un progrès technologique très rapide, tels que
l’industrie des technologies de l’information. C’est également le cas dans les
segments qui sont l’objet de changements rapides dans les goûts des
consommateurs qui nécessitent une forte différenciation des produits et des
stratégies poussées de marketing (par la publicité notamment). Comparée
aux Etats-Unis, l’Union européenne ne dispose ainsi que de parts de
marchés relativement faibles dans les industries intenses en recherche et en
publicité.
Entre 1995 et 1996, les industries des technologies de l’information et l’électronique ont
ajouté 250 000 emplois à l’économie américaine. 2 millions d’emplois dérivent actuellement
de l’industrie du logiciel, qui compte plus de 44 000 compagnies. Sur le plan des salaires,
ces industries offrent des emplois rétribués 73% de plus que la moyenne des salaires du
secteur privé aux Etats-Unis.
Les entreprises de haute technologie “tirent” la croissance et entraînent les
autres secteurs de l’économie. Or, dans un certain nombre de domaines
innovants à très forte valeur ajoutée, l’industrie européenne ne joue pas les
premiers rôles.
Figure 2 : Soldes commerciaux de l'UE par produits de haute technologie, 1997.
8
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Une utilisation modeste des technologies de l’information
Dans le domaine de l'utilisation des technologies de l’information, les
marchés de l'Union et des Etats-Unis sont aujourd'hui tous deux
caractérisés par une croissance élevée, mais partant de niveaux très
différents.
L'importance économique de ces technologies, leur diffusion dans les
différents secteurs et la part d’investissement qu’elles représentent pour
les entreprises sont plus élevées aux États-Unis qu'en Europe.
12
Figure 3 : La croissance de l’usage des technologies de l’information et des
communications
Source: EITO, 1998
#
!"
Etats-Unis
Certaines entreprises européennes excellent dans le bon usage de ces
technologies. Toutefois, en moyenne, les entreprises européennes
investissent moins que leurs homologues américaines ou japonaises en
équipements et infrastructures, et ceci depuis de nombreuses années.
De plus, l’usage qui en est fait est trop souvent resté traditionnel (par
exemple traitement de texte, automatisation des chaînes de production),
alors que ces technologies sont devenues un outil commercial et
décisionnel.
Figure 4 : Relation entre le nombre de connexions internet et leur coût d’utilisation
Connexions Internet
en relation aux coûts
120
EL
80
E
A
IRL
UK
60
t
NL
40
I
i t
Coût de connexion internet
100
D
B
F
DK
USA
SE
20
FIN
Canada
0
0
5
10
15
20
25
30
35
Pénétration Internet (%)
Source: Calcul de la Commission à partir de OCDE et NUA Ltd
L’effet combiné du traitement du “bogue du millénaire”, de la mise en
place de l’euro et du décollage du commerce électronique doit toutefois
permettre aux entreprises européennes de moderniser leurs systèmes et
de rivaliser avec les États-Unis.
La mondialisation tardive des services aux entreprises
Dans de nombreux domaines, l’Europe n’a pas développé “d’esprit de
services”, rares étant les compagnies européennes en position de
leadership mondial sur ce secteur. Ce retard reflète des traditions
différentes dans l'organisation du processus productif : ce n’est souvent
13
que très récemment que les entreprises européennes ont découvert les
avantages qu’il pouvait y avoir à déléguer certaines fonctions de service.
Il est également la conséquence de la fragmentation relative et de
l’ouverture tardive à la concurrence de certaines activités gérées par les
pouvoirs publics. On peut citer en exemple les services liés aux
transports, aux télécommunications et à la poste.
Au total, un atout des firmes américaines par rapport à l’Europe réside
dans leur supériorité dans le domaine des services aux entreprises, en
particulier dans la logistique, la consultance d'affaires et juridique, les
entreprises d’audit. En ce qui concerne le secteur spécifique des services
financiers, des comparaisons récentes avec les Etats-Unis montrent que
la productivité du capital est en Europe inférieure d’environ 30%. En
outre, l’emploi s’inscrit dans l’Union européenne à un niveau
significativement inférieur à celui des Etats-Unis dans tous les secteurs
des services. Une action pour exploiter le potentiel d’emploi dans le
secteur des services constitue un élément important d’une stratégie
européenne pour l’emploi.
II.3
IDENTITE CULTURELLE ET SECTEUR AUDIOVISUEL - UN DEFI ET
UNE CHANCE
Il est un fait que le secteur audiovisuel européen éprouve des difficultés à
tirer parti du vaste potentiel de création d’emplois lié à l’avènement des
nouvelles technologies et à la mondialisation des marchés. Dans des
domaines comme le développement du numérique ou la vente/distribution
de produits audiovisuels, l’Europe se trouve en position défavorable (une
augmentation de la part de marché du film américain de 56% à 78% en dix
ans contre une diminution de la part européenne de 19% à 10%). Elle doit
donc créer les conditions pour une meilleure compétitivité de son industrie
de production audiovisuelle et affirmer sa présence sur les marchés, toujours
en expansion, des programmes.
Il existe aujourd’hui un débat important au niveau mondial sur la
reconnaissance d’une spécificité du secteur audiovisuel et sur l’application
du principe de l’exception culturelle dans les négociations internationales sur
le commerce et les échanges. La diversité des cultures et des langues
européennes n’est pas un frein à l’évolution de ce secteur mais peut être à
l’origine d’une véritable "valeur ajoutée européenne" en garantissant une
variété de programmes où le consommateur pourra puiser dans ce qui
correspond le mieux à ses attentes.
II.4
POLITIQUE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE : UN EFFORT
INSUFFISANT ET UNE ORGANISATION PERFECTIBLE
Dans chacune des régions de la Triade, la conscience existe qu'une
politique de recherche et développement technologique efficace est
indispensable pour développer le potentiel compétitif des entreprises. Par
rapport à ses grands concurrents, l’Europe est en position défavorable sur
trois plans :
Un niveau et un accroissement de ressources inférieur
Le Japon, et surtout les Etats-Unis, investissent plus en valeur absolue que
les Européens, depuis plusieurs décennies.
14
Figure 5 : Dépenses RDT en pourcentage du PIB dans la Triade, 1996
3,50%
Source: Second rapport européen sur les indicateurs de S&T, 1997, CE
2,78% (1)
3,00%
2,55%
2,50%
2,00%
1,85%
1,50%
1,00%
0,50%
0,00%
UE
US
Japon
(1) : Données 1995
Les États-Unis consacrent à la recherche un volume de ressources
beaucoup plus élevé que l'Europe (en 1997, 179 milliards d’ECU, contre
127 pour l’Union) ou le Japon, une part importante allant au
développement de produits et à certaines industries hautement
performantes (par exemple aéronautique et informatique).
En 1997, les crédits budgétaires publics de R&D ont augmenté de 6,8%
au Japon et de 2,8% aux Etats-Unis ; ils ont baissé en revanche
d’environ 1% dans l’Union européenne.
Figure 6 : L’accroissement de dépenses en RDT dans la Triade
8,00
6,84
7,00
6,00
5,00
%
4,00
2,81
3,00
2,00
1,00
0,00
-1,00
-1,03
-2,00
UE
Etats-Unis
Sources : EUROSTAT(NEWCRONOS),OCDE(MSTI-98-2).
15
Japon
Une politique fragmentée et peu coordonnée
Alors que la politique japonaise est organisée de manière centrale, avec
un plan (“Plan de base pour la science et la technologie” adopté en
1996), et que les Etats-Unis disposent d’un système d’Agences,
largement autonomes mais toutes déterminées à promouvoir la
compétitivité américaine, le système de recherche européen est partagé
entre les États membres (ces derniers disposant de l’essentiel des
ressources) et la Communauté. La politique et l'organisation de la
recherche varient considérablement entre les États membres, et il existe
des duplications d’efforts importantes entre les programmes nationaux.
Une moindre efficacité dans l’exploitation des résultats de la recherche
La plupart des programmes de recherche américains sont exécutés sous
forme de contrats de marchés publics. Les universités et les laboratoires
fédéraux bénéficient quant à eux d’une très grande flexibilité dans
l’établissement de partenariats avec l'industrie. Le gouvernement
japonais pour sa part encourage également des coopérations de
recherche et développement entre entreprises japonaises via
l’établissement de consortia à vocation technologique.
Figure 7 : Pourcentage des dépenses de R&D des entreprises commerciales
financées par le gouvernement
Source: Second rapport européen sur les indicateurs de S&T, 1997, CE
35,00%
31,60%
30,00%
25,60%
25,00%
20,00%
19,50%
16,40%
14,50%
15,00%
9,60%
10,00%
5,00%
1,90%
1,60%
1,30%
(1)
0,00%
1981
(1) Données 1995
1990
UE
Etats-Unis
1996
Japon
En Europe, les organismes nationaux de recherche n'utilisent pas les
marchés publics pour promouvoir certaines industries de haute
technologie : par exemple, les gouvernements européens ayant encore
chacun leur propre politique de défense et d’achats, aucune institution ne
peut jouer un rôle comparable à celui du DoD américain.
A quelques exceptions près (telles que l'institut Fraunhofer en Allemagne)
les partenariats entre institutions de recherche et universités publiques
16
d'une part, et industries d’autre part, restent moins développés qu'aux
États-Unis et au Japon.
II.5
UN SYSTEME PEU PERFORMANT DANS LE DOMAINE DES
BREVETS ET DU COMMERCE DES LICENCES
Pour une entreprise opérant dans un monde ouvert, les droits de propriété
intellectuelle (brevets, marques, licences) sont des instruments qui
permettent de protéger et valoriser les résultats de ses travaux de recherche
et sa créativité, de négocier en position favorable des coopérations
technologiques, voire d’assurer une domination sur le marché.
Le déséquilibre entre les États-Unis et l'Europe, à la fois en termes de
nombre de brevets et de royalties perçues, s’accentue, en particulier dans
les secteurs à forte intensité en recherche, notamment en technologies de
l'information, produits pharmaceutiques et biotechnologie.
De 1985 à 1995, la part européenne de brevets accordés aux États-Unis est passée
de 21% à 16% ; dans le même temps, la part des brevets américains accordés à des
inventeurs américains est restée stable autour de 55%.
De 1985 à 1995, les dépôts américains à l'Office européen des brevets ont augmenté
de 27% à 34%, tandis que la part européenne s’est réduite de 50% à 44%.
La "reconquête technologique" américaine peut également être observée dans le
nombre total de brevets : entre 1985 et 1995 : de 15 244 à 16 095 pour les
entreprises européennes aux États-Unis ; de 9 918 à 29 330 pour les entreprises
américaines en Europe.
Les États-Unis sont exportateur net dans le commerce de la propriété
intellectuelle : les redevances et les honoraires reçus des entreprises
étrangères ont été, en moyenne, trois fois ceux payés par les entreprises
américaines aux firmes étrangères pour l'accès à leur technologie.
Figure 8 : Les royalties et redevances américaines générées par les échanges de
procédés industriels entre compagnies non-affiliées en 1995 (en dollars).
Source: US-NSF, S&T Indicators 1998
recettes
paiements
3.500
3.000
2.500
2.000
1.500
1.000
500
0
1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995
Tous pays
1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995
Union européenne
Japon
Les PME américaines bénéficient d’un système rapide et bon marché de
prise de brevets ; la législation fédérale encourage les universités à
commercialiser leurs efforts de recherche en les autorisant à accorder les
licences de leurs inventions à l’industrie et en constituant des partenariats
17
avec celle-ci sur base de leur propriété intellectuelle. On constate toutefois
des coûts élevés de maintien de ces droits, compte tenu de la tradition
procédurière et des difficultés qu’il y a parfois à prouver le critère du “first to
invent” spécifique au système américain.
En Europe, le coût élevé et la complexité des procédures pour obtenir une
protection valable dans tout le Marché intérieur dissuadent nombre de PME
et d’universités de s’engager sur cette voie.
II.6
ALLIANCES, FUSIONS ET ACQUISITIONS DANS LES DOMAINES
AVANCES : UNE CERTAINE INHIBITION
Confrontées à la complexité croissante des systèmes technologiques, au
raccourcissement des cycles de vie des produits de haute technologie et au
coût exponentiel de leur conception et de leur développement, les
entreprises sont amenées à nouer des alliances pour se ménager un accès
à des savoir-faire complémentaires, partager les risques, et étendre leurs
réseaux de distribution sur le plan régional et mondial. Ces opérations sont
également un moyen de créer rapidement de la valeur vis-à-vis des
marchés.
Fusions et Acquisitions
Les fusions et les acquisitions dans les diverses industries
technologiques, au niveau mondial, ont augmenté de 25% en 1997. Les
acquéreurs américains sont à l’origine des deux tiers de ces transactions,
dont l’essentiel s’effectue par échanges de titres.
En 1993, les principales firmes de défense américaines ont été invitées par le Secrétaire
d’Etat à la défense à se regrouper. Sur le plan juridique, un assouplissement dans
l’instruction des dossiers de fusions et acquisitions a permis d’accepter plusieurs
importantes consolidations dans des secteurs industriels déjà oligopolistiques. Sur le
plan financier, le gouvernement a subventionné les fusions en prenant à son compte une
part importante (jusqu’à 50% dans certains cas) des coûts associés aux restructurations.
A l’heure actuelle, il existe un déséquilibre marqué entre entreprises américaines et
européennes : les ventes “défense” des premières compagnies américaines, Lockheed
Martin et Boeing, sont trois fois supérieures à celles du premier européen, British
Aerospace ; la balance commerciale des ventes d’équipements de défense entre
européens et américains est défavorable dans un rapport de 1 à 6.
Partenariats de recherche
Les partenariats de recherche ont progressé dans le monde au taux
moyen annuel de près de 11% entre 1980 et 1994, en particulier dans les
domaines des technologies de l'information, de la biotechnologie et des
nouveaux matériaux. Les accords de recherche et développement sans
prise de participation au capital sont devenus, depuis le milieu des
années 1980, le mode le plus répandu de coopération industrielle en
matière de recherche au niveau global.
Les entreprises américaines concluent près de 5 fois plus d’alliances
technologiques entre elles que les entreprises européennes, lesquelles ont,
en règle générale, une stratégie de défense plutôt que de conquête par
rapport à la concurrence mondiale.
18
Figure 9 : Les 10 premiers pays en termes de nombre d’alliances technologiques nationales
de 1988 à 1995
10000
3377
1078
1000
Nombre d'alliances
(échelle log.)
320
85
100
1988-91
82
1992-95
52
47
37
34
29
18
13
11
10
10
9
6
3
3
3
AU
RU
SG
0
1
US
JP
CA
UK
D
CN
F
Légende : US : Etats-Unis JP : Japon CA : Canada UK : Royaume-Uni D : Allemagne
CN : Chine
Sources :
F : France AU : Australie RU : Féd. De RussieSG : Singapour
2ème Rapport sur les indicateurs S&T 1997: Commission européenne
Cette faiblesse reflète en partie les difficultés qu’il peut y avoir en Europe à
mettre en place des projets communs de recherche ou à former des
alliances dans des domaines de technologie avancée.
II.7
L'EUROPE NE VALORISE PAS ASSEZ LE RISQUE
L’Europe a trop peu d’entrepreneurs. Ceci est dû à plusieurs raisons
économiques mais également culturelles, sociales, historiques et légales. Le
document de la Commission sur le capital-risque a identifié les plus
importantes d’entre elles, comme le manque de culture entrepreneuriale
dans les écoles, universités et autres institutions de formation, une sanction
excessive de « l’échec », la peur d’une perte de « contrôle » d’une société,
le manque d’importance attachée à la gestion d’entreprises, enfin une
attitude peu enthousiaste à l’égard de la prise de risque et des « stock
options ».
Au cours des vingt dernières années, l'économie américaine a développé les
instruments financiers ad hoc facilitant l'accès aux capitaux pour des startups en haute technologie, lesquelles ont contribué à la création de plusieurs
millions d'emplois.
Les investissements totaux réalisés par les fonds de capitaux à risques
européens en 1997 ont atteint un montant de 9,6 milliards d'ECU,
comparable au niveau atteint aux États-Unis, où les fonds de capitaux à
risques ont investi un total de 10,3 milliards d'ECU. Cependant, jusqu’à
présent, les sommes investies sur les hautes technologies ont été minimes.
19
Technologies de l’information : dans la seule Silicon Valley, 11 nouvelles entreprises
sont créées chaque semaine, et une est introduite en Bourse tous les 5 jours ; 300
firmes de capital-risque y investissent chaque année de 1 à 3 milliards de $ dans des
start-ups. Entre 1981 et 1990, la valeur de l’industrie des PC est passée de 0 à 100
milliards de $, dont 70% des firmes étaient soutenues par le capital-risque. Compaq,
Cisco, Sun, Oracle, Apple sont nés avec l’aide du capital-risque et n’existaient pas il y a
20 ans.
Biotechnologies : cette industrie repose sur des petites entreprises innovantes et
dynamiques, associant à la recherche de base, émanant des universités, une capacité
d’exploitation immédiate des résultats de la recherche (environ 1 200 firmes aux EtatsUnis, un millier en Europe). Ces start-ups sont des partenaires essentiels dans la
stratégie d’innovation des grandes entreprises, en particulier les multinationales
pharmaceutiques. Parmi les facteurs jouant en défaveur des start-ups européennes
figurent la difficulté d’accéder au capital-risque et à financer leurs travaux de recherche
et développement (2 milliards de $ investis en Europe, contre 8,5 aux Etats-Unis, pour
des revenus respectivement de 3 et 16,5 milliards de $).
Depuis quelques années, l’Europe a mis en place des mesures correctrices
visant à développer les marchés du capital-risque, mais celles-ci ne
porteront leurs fruits qu’à moyen terme. Les performances européennes
restent insuffisantes sur trois plans :
Les entreprises encore aux premiers stades de leur développement n’ont
reçu que 7,4% des investissements totaux de capital-risque des fonds
européens, contre 34% aux Etats-Unis. Les start-ups américaines ont
accès à une série de modes de financement (capital d’amorçage, capitalrisque, business angels, partenariats stratégiques) adaptés aux
différentes phases de leur développement, qui leur permet de croître plus
rapidement que leurs consœurs européennes et de prendre plus vite des
positions fortes sur le marché mondial ;
La disponibilité d’un volume suffisant de projets réellement innovants,
susceptibles de générer une création de valeur rapide, n’est pas toujours
assurée ;
En Europe, les entrepreneurs ont un accès plus difficile au marché, plus
fragmenté et moins “liquide” : en 1997, le NASDAQ a réuni 7 fois plus de
capitaux que l’EASDAQ, l’Euro-NM et l’AIM combinés (le NASDAQ a été
créé en 1970, ses équivalents européens 25 ans plus tard). Certains
signes positifs de regroupement ou de coordination apparaissent
toutefois.
III.
ORIENTATIONS POUR UNE NOUVELLE POLITIQUE
INDUSTRIELLE
L’analyse des tendances mondiales et des positions européennes montre la
pertinence d’une adaptation de la politique industrielle, notamment pour
généraliser le goût de la culture entrepreneuriale et de la prise de risque, et
stimuler l’émergence d’entreprises innovantes capables et désireuses de
conquérir le marché mondial.
Dans cette perspective, un effort urgent et important d’adaptation doit être
mené par l’ensemble des acteurs économiques, sociaux et institutionnels.
La mise en réseau entre ces acteurs, favorisée par les technologies de
l’information, constitue un atout important pour renforcer les synergies et
accroître la compétitivité de l’ensemble du tissu économique et social de
20
l’Union, en particulier en renforçant les échanges d’informations et les
partenariats, et en promouvant les réseaux trans-européens. Pour entraîner
leur adhésion à ce mouvement, un soin particulier doit être accordé à la
négociation au niveau international de règles du jeu équitables qui
respectent le modèle économique et social européen.
III.1 PROMOUVOIR LA COMPÉTITIVITÉ DANS UNE PERSPECTIVE
MONDIALE
Pour améliorer l'environnement des entreprises, l’accent doit être mis sur
l’investissement immatériel et l'esprit d'entreprise, avec les priorités
suivantes :
Adapter les systèmes d’acquisition des compétences et susciter l’esprit
d’entreprise
La distinction entre éducation et formation devient plus floue ; de
nouvelles formes de transition apparaissent entre l'enseignement et le
marché du travail. Ces évolutions rendent nécessaire l’adaptation du rôle
respectif des organismes publics d'enseignement et des entreprises, et
leur plus grande collaboration.
Parmi les compétences et les mécanismes requis pour aborder la
mondialisation dans les meilleures conditions, il est nécessaire :
-
De revaloriser les compétences technologiques, et d’assurer la remise
à niveau tout au long de la vie professionnelle des individus ; ceci
passe par l’établissement de grilles de types et de niveaux de
compétence permettant la mise en place de systèmes d’accréditation,
pour la formation scolaire et universitaire de base et pour les
formations complémentaires et continues (on estime qu’il manque à
l’heure actuelle 500 000 professionnels de l’informatique et des
télécoms en Europe, la projection étant d’1,2 million en 2002, si
aucune mesure correctrice n’est mise en œuvre) ;
-
De renforcer la connaissance de l’usage des technologies de la
société de l’information. Les initiatives visant à l’introduction des
technologies de l'information et l'utilisation d'Internet dans les écoles
en Europe doivent notamment être poursuivies ;
-
D’apprendre à travailler en groupes virtuels, si nécessaire à distance,
avec davantage d’autonomie, de créativité et d’engagement de la part
de l’individu, et une approche moins hiérarchique de la part des
organisations ;
-
D’exposer les étudiants à la culture entrepreneuriale. La proximité et
l'exemple d’entrepreneurs ayant réussi influence les attitudes
culturelles et stimule le goût de la prise de risque parmi les nouveaux
diplômés. Il faut encourager en Europe des initiatives de type “écoles
d'entrepreunariat”, comme cela est pratiqué aux Etats-Unis ;
-
De développer des réseaux associant l'industrie et les universités, en
vue d'élargir la capacité des entreprises à absorber les transferts de
technologies, dans lesquels des PME innovatrices de haute
technologie travaillent de concert avec des capital-risqueurs et des
universités. Des résultats positifs ont été obtenus dans un certain
nombre de “pôles d’entreprise”, telle que la zone d’entreprises de
21
Cambridge, où 1.200 entreprises de haute technologie emploient plus
de 4.000 personnes.
Améliorer le système “recherche - exploitation des résultats ”
Parallèlement aux mécanismes mis en place au niveau national (par
exemple incitations fiscales, mobilité des chercheurs vers l’entreprise), et
au développement de l’utilisation des marchés publics pour stimuler
l’émergence de marchés innovants, trois axes doivent être développés en
priorité au niveau européen :
-
Améliorer le rendement et les ressources de la recherche ; le concept
“d’actions-clés” introduit dans le 5ème programme-cadre devrait
entraîner une collaboration plus poussée entre industriels, chercheurs
et utilisateurs et une concentration des efforts de recherche et
développement sur un nombre restreint d’objectifs socioéconomiques. A terme, une meilleure coordination doit être introduite
entre recherche communautaire et entre les différents programmes
nationaux entre eux ;
-
Encourager le capital à risque à valoriser les résultats de la recherche
communautaire ; au cours des derniers mois, l'Union européenne a
multiplié les initiatives pour stimuler l'utilisation du capital à risque
pour des activités technologiques. Au Sommet européen
d'Amsterdam de juin 1997, il a été décidé qu'un milliard d'ECU du
budget de la Banque Européenne d'Investissement serait alloué, par
l'intermédiaire du Fonds Européen d'Investissement, à des projets
innovants. Un des objectifs essentiels de la politique communautaire
de recherche est par ailleurs de favoriser l'utilisation et la diffusion des
résultats de la recherche. Il est important que dans ce but soient
poursuivies et élargies les actions du programme-cadre de recherche
en faveur de l'innovation, en particulier celles visant à encourager
l'orientation des fonds de capital à risque vers les phases précoces de
l'investissement innovant. Le succès de l'initiative pilote I-TEC, qui a
déjà permis de sélectionner 28 fonds d'investissement s'engageant à
mobiliser 1,3 milliards d'euros de fonds privés, dont 500 millions
seront spécifiquement consacrés à de nouvelles entreprises de haute
technologie, permet d'envisager d'élargir ce type d'initiatives dans le
cadre du 5ème PCRD ;
-
Assurer un meilleur système de protection de la propriété
intellectuelle, en modernisant le fonctionnement du système européen
des brevets, en développant les services d’intermédiation, et en
adoptant au niveau communautaire les mesures nécessaires pour
assurer un accès plus facile à la protection (création d’un instrument
communautaire unitaire pour la protection des brevets, harmonisation
complémentaire dans le domaine des programmes d’ordinateur,
réduction des coûts et des délais de procédure, mesures spécifiques
pour les PME). Dans le cadre du suivi du Livre vert sur les brevets, la
Commission va proposer des initiatives importantes dans ce but.
Faciliter la prise de risque
Le principal défi ici est de surmonter l’éclatement qui caractérise le
marché du capital-risque en Europe. Non seulement les investisseurs,
mais également les marchés, qui font se rencontrer investisseurs et
firmes en forte croissance, doivent améliorer la liquidité, la transparence
22
et la sécurité de ce marché. Surmonter ce défi est essentiel en termes
de création d’emplois. L’Europe doit parvenir à constituer un bloc
suffisamment grand d’entreprises en forte croissance afin de permettre
une diversification appropriée du risque.
La prise de risque ne sera toutefois permise que par le retrait des
barrières institutionnelles et réglementaires à son développement et par
l’amélioration du régime fiscal relatif au capital-risque. En outre, les lois
européennes sur l’insolvabilité et la banqueroute devraient autoriser un
« droit à l’échec », qui est indispensable dans le processus continu
d’apprentissage des affaires.
Réorienter l'aide publique aux entreprises vers l’investissement
immatériel
La compétitivité de l'industrie européenne dépendra davantage de sa
capacité à investir dans la recherche, la formation et le bon usage des
technologies de l’information plutôt que dans de nouvelles capacités
productives. Ceci se reflète dans la politique d'aides d'État de la
Commission. Il convient par ailleurs d’encourager les Etats-membres à
développer un environnement financier, fiscal et réglementaire favorable
aux investissements des entreprises en recherche et développement et
en formation de leur personnel. La Commission a déjà commencé à
modifier sa politique en matière d'aides d'État en vue de passer d’une
attention portée sur l’investissement (régional) matériel et sur la
restructuration vers davantage de soutien à la RDT et à la formation. La
Commission a adopté récemment des orientations pour l'aide à la
formation, qui en augmentent la flexibilité et l'intensité.
En ce qui concerne les aides à la recherche et au développement, la
révision future de leur encadrement devra être en phase avec les
évolutions du processus de recherche (tout en tenant compte des deux
contraintes suivantes : cohérence avec les définitions de l’Organisation
Mondiale du Commerce et caractère opérationnel des concepts retenus).
La possibilité d’aides pour promouvoir les recherches entre différents
acteurs en vue de la réalisation de projets importants d’intérêt européen
est prévue par le Traité et pourrait être invoquée par les Etats membres
plus fréquemment, dans le respect des critères établis par la
Commission. Enfin, il faut rappeler qu’une aide ne peut être autorisée
que pour autant qu’elle présente un caractère incitatif – c’est-à-dire
qu’elle permette à l’entreprise de mener une recherche qualitativement
ou quantitativement plus ambitieuse ou de la réaliser plus rapidement.
Pour l’usage des technologies de l’information, un effort devrait
également être mené pour diffuser les meilleures pratiques, notamment
au travers des investissements de type Fonds structurels et de
campagnes publiques d’information.
Valoriser le capital humain
Face à l'évolution démographique en Europe, il est essentiel de favoriser
l'éducation tout ou long de la vie, ou encore d'étudier des stratégies pour
ne pas perdre le savoir-faire et les compétences acquises notamment
grâce aux formules de retrait progressif et non brutal de la vie active,
permettant d'utiliser ces compétences dans des activités non
marchandes. Ce même impératif de valorisation du capital humain
23
explique pourquoi la préservation ou l'amélioration du cadre de vie et de
la cohésion sociale deviennent un des principaux facteurs positifs de la
compétitivité des entreprises européennes : la politique sociale est un
facteur productif qui apporte des bienfaits à l’économie, à l’emploi et la
compétitivité. La stratégie européenne pour l’emploi, fondée sur les
quatre piliers de l’employabilité, de l’adaptabilité, de l’entrepreunariat et
de l’égalité des chances, a ici une contribution majeure à faire. L’objectif
est de mesurer les opportunités permises par la croissance et la stabilité
macro-économique, de renforcer les réformes structurelles et de
significativement améliorer le taux d’emploi en Europe, afin de l’amener
au niveau de ses principaux compétiteurs et de la sorte souligner la
prospérité européenne et la soutenabilité à long terme du modèle social
européen. D'autres priorités, telles l'amélioration de l'habitat urbain (qui
fait l'objet d'une action-clé dans le cinquième programme-cadre),
diverses formes d'innovation sociales (par exemple le micro-crédit, le
multi-salariat) ou la valorisation de sa richesse et de sa diversité
culturelle, devraient également à terme être considérées comme
essentielles à la compétitivité européenne.
Accroître la mobilité des personnes
Ainsi qu’il est souligné dans le Plan d’action de la Commission pour la
libre-circulation des travailleurs, il est important à la fois pour la
compétitivité européenne et pour le niveau global d'emploi que la mobilité
intra-communautaire des personnes soit accrue. Un des enjeux
importants pour la compétitivité consiste à accroître le taux
particulièrement bas de la mobilité de la main d'œuvre intracommunautaire.
III.2 PROMOUVOIR
MONDIAL
L'ACCES
DES
ENTREPRISES
AU
MARCHE
Pour aborder les marchés mondiaux dans la position la plus favorable, les
entreprises européennes doivent pouvoir bénéficier de nouveaux progrès du
Marché intérieur et d’un cadre, conforme au Traité, qui permettent les
restructurations nécessaires. La solidarité, l’égalité des chances, les services
d’intérêt général, constituent des valeurs fondamentales pour l’Europe. En
renforçant sa cohésion économique et sociale, l’Europe sera mieux à même
de défendre et de promouvoir ces valeurs.
Poursuivre la mise en valeur des avantages concurrentiels du Marché
intérieur
Le cadre du Marché intérieur fournit aux firmes de l’Union un avantage
compétitif, dans la mesure où celles-ci sont incitées à acquérir une
expérience transfrontalière et une taille critique. En effet, depuis la
création de l’Union, le commerce de marchandises entre les Etats
membres a doublé jusqu’à représenter environ 17% du PNB de l’UE,
alors que les échanges entre l’UE et le reste du monde sont restés
stables autour de 8-9% du PNB.
Ce cadre peut constituer un point d’appui vers l’établissement d’un
consensus au niveau mondial. Dans des cas de plus en plus nombreux
présentant une dimension globale, l’Union élabore des cadres cohérents
pour l’Europe et, en parallèle, négocie avec ses partenaires pour en
garantir la compatibilité la plus large au niveau planétaire. A titre
d’exemples, on peut mentionner :
24
-
La normalisation européenne : celle-ci agit comme support à la
réglementation européenne et comme plate-forme intermédiaire vers
l’établissement de normes mondiales.
Traditionnellement basée sur des organismes de normalisation
officiels assurant aux spécifications légitimité et visibilité, elle doit faire
participer plus activement l’industrie et mettre en place d’autres
mécanismes moins formels, là où le besoin d’un consensus large
passe au second plan derrière le besoin d’une réponse rapide.
Dans le domaine des télécommunications par exemple, l'efficacité de
la normalisation européenne a été démontrée par le succès mondial
du système GSM. Cette approche pourrait être appropriée pour la
génération suivante de téléphonie mobile, UMTS.
-
Le statut de la société européenne : en chantier depuis une vingtaine
d’années, ce projet paraît proche d’aboutir. De pair avec les travaux à
venir sur la coordination des politiques fiscales, il devrait permettre la
constitution plus aisée d’entreprises réellement européennes. Il s’agit
d’un enjeu essentiel notamment pour faciliter les regroupements
européens nécessaires pour être davantage concurrentiels sur les
marchés mondiaux, comme dans le cas de l’aéronautique.
-
La coordination des systèmes de taxation : les quinze différents
systèmes de taxation affectent négativement le fonctionnement des
marchés des biens et services, des capitaux et du travail. Ils se
traduisent par des obstacles aux échanges et une fragmentation du
Marché unique et, par conséquent, par une allocation sous-optimale
des ressources. Cela affecte ainsi directement la compétitivité globale
européenne sur les marchés mondiaux, mais aussi accroît les risques
d’encourager une concurrence fiscale entre les Etats membres pour
attirer les investissements, sans effet positif direct pour l’ensemble de
l’Europe. C’est pourquoi il s’avère nécessaire d’assurer d’une part une
coordination au niveau européen des politiques fiscales et d’autre part
de poursuivre l’harmonisation des impôts indirects.
-
Les services aux entreprises : le Marché intérieur peut encore être
valorisé par la mise en place de services (par exemple avocats,
comptables), de classe mondiale, s’étendant au travers des
frontières ; ceci implique l’intensification des efforts dans la
reconnaissance mutuelle des qualifications.
-
Les accords de reconnaissance mutuelle : cette approche, qui a été
appliquée avec succès pour l’établissement du Marché intérieur,
pourrait être utilisée à l’égard des partenaires commerciaux, pour
autant qu’un cadre légal existe, que le bénéfice mutuel soit assuré et
que la négociation porte sur un “paquet” de dispositions, plutôt que
sur des mesures isolées. A ce jour, des accords de reconnaissance
mutuelle ont déjà été signés avec l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le
Canada et les Etats-Unis. Leurs effets bénéfiques ont principalement
été ressentis par les PME, entreprises les plus sensibles aux
obstacles de nature réglementaire et normative sur les marchés
d’exportation.
-
L’adaptation du cadre réglementaire à la société de l’information : un
travail législatif important a été réalisé par l’Union européenne et se
prolongera pour adapter la protection de la propriété intellectuelle,
25
garantir la protection de la vie privée et mettre en place un cadre
favorable au développement du commerce électronique et à la libre
circulation des services en ligne (signature électronique, contrats en
ligne, responsabilité des intermédiaires).
-
La création de l’euro : elle a pour vocation d'assurer une certaine
prospérité et stabilité sur notre continent et de permettre à l’Europe de
faire entendre sa voix sur la scène internationale. Un impact positif sur
l’activité économique est attendu, en particulier sur la croissance,
l’emploi et la compétitivité des entreprises. Ainsi, la nouvelle monnaie
améliorera la rentabilité des entreprises exportatrices et abaissera le
coût des investissements.
La transparence accrue générée par l’introduction de l’euro
accentuera en retour la pression sur la compétitivité de l’économie de
l’Union, de même que le besoin de marchés efficaces et performants.
L’exercice de réforme économique accompagnera ce processus
d’amélioration des structures économiques, tant du marché unique
que des marchés nationaux.
Les entreprises ayant des activités à l'exportation réduiront bon
nombre de leurs coûts comme les coûts de conversion monétaire au
sein de l’UEM. L'euro fera disparaître également les coûts de
couverture contre le risque de change au sein de la zone euro et, au
fil des progrès enregistrés dans l'utilisation internationale de l'euro,
avec beaucoup de nos partenaires non-européens.
La monnaie unique pourra aussi faciliter l’accès des entreprises
européennes à des marchés dans des zones monétaires ayant des
relations privilégiées avec des pays européens (Europe centrale et
orientale, bassin méditerranéen, Afrique de l’Ouest). Enfin, en libérant
l'épargne européenne et en attirant l'épargne mondiale, l'euro offrira
aux entreprises la possibilité de financer leurs investissements de
façon moins onéreuse (augmentation de la masse monétaire
disponible, accroissement de la concurrence entre organismes
financiers).
Par ailleurs, les pays souhaitant devenir membres de l’Union, en
reprenant l’acquis communautaire, vont élargir progressivement la
dimension du Marché intérieur. Ceci renforce d’autant la reconnaissance
et l’attrait sur la scène internationale de l’approche qui y est suivie et des
mesures et consensus élaborés dans ce cadre.
Assurer une concurrence efficace qui permette de tenir compte de la
nature mondiale et innovatrice des marchés
La politique de concurrence communautaire joue un rôle important dans
la façon dont les industries se structurent à l’échelle européenne mais
également mondiale. Son rôle est de susciter un environnement
concurrentiel bénéficiant aux consommateurs tant en termes de prix que
d’innovation. La politique de concurrence est en outre propice à
l’innovation, aux investissements, et en définitive à la croissance et à
l’emploi. La politique de concurrence prend déjà en compte l’évolution
technologique et la mondialisation ; l’accélération et l’amplitude des
mouvements de restructuration actuels dans les différents domaines
industriels au niveau mondial montrent cependant le caractère
26
dynamique de ce processus, et impliquent de poursuivre la réflexion en
ce sens.
En général, les entreprises qui évoluent dans un environnement
hautement compétitif sur leur marché d’origine s’avèrent mieux armées
pour affronter la mondialisation. Politiques de concurrence et de
compétitivité sont complémentaires : leur interaction contribue au succès
de l’industrie européenne face à la mondialisation.
Face à la pression compétitive croissante, la politique de concurrence
européenne continuera d’être modernisée afin de rester en phase avec la
mondialisation, en particulier sur les aspects suivants :
-
La délimitation géographique du marché pertinent : dans de
nombreuses industries, les facteurs entrepreneuriaux, technologiques,
financiers et institutionnels de la mondialisation conduisent à élargir le
marché géographique pertinent d’un niveau européen à un niveau
mondial. Les principes contenus dans la récente communication de la
Commission sur la définition du marché pertinent permettent une
approche dynamique dans la détermination du marché géographique
en cause. Dans ces industries, une part croissante des notifications
de fusions et d’alliances en Europe résulte de la volonté des
entreprises européennes de se concentrer sur leurs métiers de base
et d’y acquérir une taille critique à l’échelle mondiale. A travers le
récent encadrement multisectoriel sur les aides régionales pour les
grands projets d’investissement, de même que dans les prochaines
nouvelles règles concernant les aides aux entreprises en difficultés, la
Commission établit clairement que, le cas échéant, le marché
géographique pertinent peut être considéré comme mondial.
-
L’étape du cycle de développement dans lequel se trouve un marché
particulier : lors de l'évaluation de la domination sur le marché, dans
le cas d’un produit ou d’un service entièrement nouveau (par exemple
des nouveaux services audiovisuels), une alliance ou une fusion
d’entreprises peut se trouver temporairement en position de quasimonopole, sans pour autant qu’il faille considérer qu’elle pourra
exercer une domination durable.
A cet effet, le marché doit rester ouvert à de potentiels “nouveaux
entrants” et ne pas faire l’objet d’importantes barrières à l’entrée.
L’accessibilité du marché devra assurer qu’aucune entreprise ne
puisse acquérir une position dominante durable.
-
Les accords verticaux entre producteurs et distributeurs sont
actuellement profondément révisés pour tenir compte des
changements au sein des marchés et des systèmes de distributions.
Les changements sont provoqués par un certain nombre de facteurs
parmi lesquels la mondialisation et les progrès dans les technologies
de l'information. La dynamique sous-jacente à cette révision est
d’adopter une approche plus économique grâce à laquelle seuls
seront individuellement contrôlés les accords pour lesquels les parties
concernées ont une présence sur le marché relativement élevée.
-
L’existence d’accords horizontaux de recherche et développement
entre entreprises bénéficie déjà d’un traitement favorable dans les
règles de concurrence. Un traitement davantage simplifié et plus
rapide reste nécessaire pour les cas impliquant de tels accords, dans
27
la mesure où ils ne créent pas de distorsion à la concurrence et
stimuleraient les entreprises européennes à rattraper leur retard par
des alliances internationales dans le domaine technologique. Une
telle procédure accélérée est déjà en place depuis mars 1998
concernant les entreprises communes (« joint-ventures ») de plein
exercice, qui sont à présent examinées selon les délais courts et
déterminés applicables aux concentrations.
Continuer les efforts positifs dans la libéralisation du secteur public
Les politiques de l’Union européenne de libéralisation de secteurs
publics, tels que l’électricité, le gaz et les télécommunications, ont été
mises en œuvre ces dernières années avec succès. L’exemple du
secteur des télécommunications montre que l’ouverture à la concurrence
de marchés antérieurement monopolistiques a permis l’arrivée de
nouveaux entrants. Ainsi, la libéralisation du marché des lignes
téléphoniques fixes et mobiles a non seulement conduit à une baisse
des prix et à de meilleurs services au profit des consommateurs, mais a
également encouragé l’industrie à se positionner en dehors d’Europe et
à rechercher avec succès des alliances internationales.
III.3 PROMOUVOIR UN CONSENSUS ET DES REGLES DU JEU
EQUITABLES AU NIVEAU MONDIAL
L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), en tant qu’institution
reconnue pour la mise en œuvre des règles économiques mondiales, est le
cadre le plus approprié pour le traitement des questions liées à ce domaine.
Dans la perspective du nouveau cycle de négociations à l’OMC (“Millenium
Round”), il importe par conséquent de réfléchir à la stratégie et aux
instruments à mettre en place pour établir un “level playing field” sur le plan
de la concurrence internationale, tout en permettant de favoriser
l’émergence d’alliances stratégiques au niveau européen. Plus
généralement, il s’agit d’instaurer un cadre réglementaire adapté au défi de
la mondialisation, des mécanismes de contrôle et des disciplines globales.
Promouvoir l’établissement d’un cadre concurrentiel mondial
Afin de prévenir des conflits de loi et de juridiction, l'Union promeut
activement un accord sur les règles de concurrence concernant le
traitement des pratiques anticoncurrentielles des entreprises comportant
des implications internationales. L’Union et ses Etats membres ont
proposé, pour le prochain cycle de négociations à l’OMC, la mise en
place d’un cadre sur les règles concurrentielles.
Des principes communs minima devraient être développés pour les
autorités antitrust des pays participants à l’OMC, et la coopération entre
autorités de concurrence européennes et américaines devrait être
renforcée pour traiter des risques d’établissement de positions
dominantes. De plus, dans les domaines où l’Etat détient un rôle actif, tel
que dans les marchés publics, l’action de l’Union devrait viser à ce que
les règles de jeu (dans ce domaine) de nos partenaires commerciaux
soient d’abord transparentes, et ensuite qu’elles facilitent la concurrence
sur le marché.
28
Contrôler l’application des règles
Une grande vigilance est nécessaire pour contrôler l'application et la
mise en œuvre des engagements multilatéraux pris par les partenaires
de l'Union.
L'Union est actuellement le seul membre de la Triade appliquant un
système interne de contrôle des subventions, plus strict que les règles
du code des subventions à la recherche et au développement établies
par l'OMC. Cette situation résulte bien évidemment de l’absence de
coordination aux niveaux fédéral ou national des décisions d’octroi
d’aides publiques, comme cela existe dans des pays tiers.
En raison du fait que les concurrents des industries européennes ne
sont pas soumis à un tel système de contrôle national de subvention, et
que l'OMC manque d’un système de contrôle approprié, la Commission
pourrait proposer de développer un système d’observation des soutiens
publics notamment à la recherche et au développement dans les pays
industrialisés, et devrait mener des études approfondies comparant les
approches européennes, américaine et japonaise en la matière.
Défendre les positions européennes : renforcer la vigilance, préparer les
négociations, travailler ensemble
Pour être efficace, l’action communautaire doit être soutenue par les
États membres et les firmes européennes, qui devraient communiquer
les informations dont elles disposent sur des cas de pratiques et de
règles discriminatoires. Ce principe est mis en œuvre dans la stratégie
de l’Union pour l’accès aux marchés qui reposent sur une coopération
étroite entre la Commission, les administrations nationales et les
entreprises pour identifier les barrières aux échanges et s’y attaquer.
Dans la mesure où de longues négociations sont toujours nécessaires
pour obtenir un résultat global, la résolution de ces difficultés ne peut pas
être laissée entièrement aux organisations mondiales telles que l'OMC ou
l'OCDE. Les actions de l’Union devraient, le cas échéant, aussi être
entreprises dans le cadre de la coopération bilatérale et des accords
commerciaux entre l'Union et les tierces parties, sans pour autant
compromettre les positions de l’Union dans le contexte multilatéral.
L’objectif général de l’Union est d’assurer pour les entreprises
européennes, et en particulier aux PME, des possibilités
d’investissements et d’échanges sur des marchés tiers. A ce titre, le
Règlement sur les barrières commerciales représente un instrument utile
pour les PME désireuses d’étendre leur activité sur les marchés
émergents. Cette réglementation permet aux entreprises elles-mêmes,
outre les Etats membres et les secteurs industriels, de dénoncer les
distorsions commerciales restantes et à la Commission de prendre les
mesures appropriées pour supprimer l’ensemble des barrières à l’accès
aux marchés tiers.
Une collaboration entre les acteurs publics et privés européens est en
outre nécessaire pour aider l'Union à clarifier et définir ses principaux
domaines de négociations. La préparation et l’expression de positions
communes sur des aspects internationaux, par exemple les services,
l’espace (GNSS) ou l’allocation des fréquences, renforcent largement la
capacité européenne à faire valoir ses intérêts et points de vue.
29
Pour faciliter l’élimination des entraves techniques aux échanges, il
pourrait, par exemple, être utile :
-
de signer de nouveaux accords avec les entités économiques
régionales qui n'ont pas encore été couvertes par les accords
spécifiques ;
-
d’élargir l'étendue des accords existants à de nouveaux domaines, tel
que l'homologation et la conformité des produits, principalement dans
le cadre des accords de reconnaissances mutuelles.
En préparation de la réunion ministérielle de l'OMC de 1999, où l’on doit
s’attendre à des confrontations sur un certain nombre de questions, il
s’agira de bâtir un consensus et une base d’alliance large autour des
positions de l'Union, notamment avec les pays en voie de
développement, tout en tenant compte des contraintes particulières liées
à la situation économique et sociale dans les pays les moins avancés.
L’Union européenne mène, depuis ces trois dernières années, une
stratégie dynamique d’ouverture multilatérale des marchés destinée à
favoriser les entreprises de l’Union, notamment les PME. Il s’agit, d’une
part, de consolider les acquis de l’Uruguay round en s’assurant
notamment du respect de leurs engagements par les signataires de
l’Acte final ; d’autre part d’un recours actif aux mécanismes d’arbitrage de
l’OMC ; enfin d’identifier les domaines devant encore être ouverts à la
concurrence et à l’investissement international.
L’Union s’attachera, lors des négociations commerciales qui s’ouvriront
dans le cadre de l’OMC, à aborder de nouveaux thèmes de discussion
comme ceux inscrits dans le programme de travail arrêté lors de la
Conférence interministérielle de Singapour (sur la concurrence, la
facilitation des échanges, les normes sociales et environnementales et
l’investissement). Elle cherchera à consolider et à étendre les accords de
démantèlement des tarifs, notamment sur les produits industriels. Elle
s'attachera à maintenir la spécificité européenne culturelle (notamment
dans le secteur audiovisuel) dans les négociations sur la libéralisation
des services.
Œuvrer pour la mise en place d’une coordination approfondie au niveau
mondial
L’intérêt que suscite l’exemple du commerce électronique a amené
plusieurs organisations internationales (OCDE, OMC, OMPI et UIT) à
investir ce sujet. Cela peut aboutir à une multiplication du travail, la
persistance de “zones grises”, et la perspective de réponses divergentes
sur un même sujet. En réponse à ces difficultés, l'Europe a pris la tête
en demandant une coordination mondiale.
Sur ce type de thèmes très ouverts, l'approche proposée est de chercher
des solutions dans un contexte multilatéral, sur la base de positions et de
cadres de travail communautaires établis, plutôt qu’au travers d’initiatives
nationales ou bilatérales.
A titre d’exemple, un accord mondial non contraignant, de type “Charte
internationale”, a été proposé par la Commission pour tenter d’assurer
des solutions cohérentes sur un certain nombre de questions essentielles
pour le développement du commerce électronique (par exemple taxation
et sécurité des transactions) et la préservation des intérêts européens (cf.
30
le débat actuel entre européens et américains sur la protection des
données personnelles).
Responsabiliser les industriels
La compétitivité est de la responsabilité première des entreprises. La
Commission et les États membres doivent s'assurer que la mise en
œuvre des accords internationaux n'impose pas des contraintes plus
strictes à l'industrie européenne qu'aux industries de ses principaux
partenaires commerciaux, notamment développés.
Dans ce contexte, il peut être bénéfique d’examiner la possibilité de
réaliser les objectifs convenus en promouvant des initiatives volontaires
de l'industrie (au niveau mondial, à celui de l'OCDE, ou à celui d’accords
bilatéraux ou multilatéraux), en faisant participer pouvoirs publics et
fédérations industrielles. Ces actions volontaires ont l’avantage d'éviter
les délais bureaucratiques liés à l’institution de nouvelles normes et au
contrôle de leur mise en œuvre.
Plus généralement, les milieux d'affaires pourraient utilement lancer un
nouveau forum mondial pour définir leur auto-régulation et leurs attentes,
dans la lignée du “Global Business Dialog” initié par la Commission,
auquel l'industrie européenne participe activement. En parallèle des fora
industriels, un “Global Government Dialog” pourrait être proposé par
l’Union pour examiner la prise en compte politique de leurs
recommandations.
Promouvoir l’intérêt des consommateurs et des utilisateurs
La mondialisation offre aux consommateurs et aux utilisateurs un choix
plus vaste, mais elle s’accompagne pour eux d’incertitudes nouvelles,
parfois complexes à appréhender et encadrer sur le plan réglementaire.
Il en ressort que de nouveaux garde-fous doivent être mis en place au
niveau global, incluant par exemple des formes d’auto-régulation de la
part des industriels.
Si la mondialisation est jusqu’à présent largement le fait de ces derniers,
les consommateurs et les utilisateurs doivent pouvoir bénéficier de fora
au niveau global leur permettant de faire valoir leurs droits et leurs
aspirations.
Il est également important d’assurer dans le moyen terme pour les
consommateurs européens, mais aussi pour les entreprises, un
approvisionnement durable à des sources énergétiques, notamment
fossiles, aux meilleures conditions de prix. Une coopération internationale
renforcée entre acteurs privés et publics devrait donc être encouragée.
31
CONCLUSIONS
De nouvelles formes de concurrence sont en train d’apparaître sous la
pression de la mondialisation, davantage tournées vers la maîtrise des
technologies, l’accès aux marchés mondiaux, la rapidité d’action, l’innovation
et l’investissement immatériel.
L’Europe, renforcée par l’euro, doit tirer parti du potentiel de ces mutations
économiques pour libérer ses forces entreprenantes et créer une nouvelle
dynamique de l’emploi. Elle doit promouvoir dans les enceintes
internationales ses valeurs, en particulier l’intégration des marchés, l’identité
culturelle et la protection sociale. L’ambition des firmes européennes doit
être d’améliorer leur compétitivité sur tous les marchés mondiaux et d’être
présentes dans les secteurs industriels et services porteurs.
Pour atteindre ces objectifs, une priorité doit être donnée à une adaptation
rapide, à une coopération active et à un partage des responsabilités entre
les différents acteurs politiques, économiques et sociaux de l’Union
européenne : aussi la Commission invite-t-elle le Conseil, le Parlement
européen, le Comité des Régions et le Comité Economique et Social à
lancer un débat ouvert à ces acteurs sur les futures orientations d’une
nouvelle politique industrielle en mesure de faire face aux défis de la
mondialisation et du changement technologique accéléré, et, notamment, à
un débat sur le choix des instruments communautaires à réviser, tels
qu’identifiés dans la partie III de la présente communication.
32
ANNEXE
RESUME SYNTHETIQUE
ELEMENTS DE
DIAGNOSTIC
ELEMENTS DE REPONSE
COMPETITIVITE DES ENTREPRISES EUROPEENNES SUR LES MARCHES
MONDIAUX
L’Europe est peu présente dans le
secteur des services aux
entreprises.
Renforcer le Marche intérieur :
normalisation européenne
Les entreprises européennes
recourent insuffisamment à
l’externalisation.
La spécialisation reste
insuffisante dans les secteurs à
croissance rapide et à forte
différenciation des produits,
nécessitant une stratégie poussée
de marketing.
Le secteur audiovisuel européen
est dans une position
concurrentielle défavorable.
Les entreprises européennes
forment peu d’alliances dans les
domaines de technologies
avancées.
Le volume de ressources consacré
au total à l’investissement est
moindre qu’aux Etats-Unis et au
Japon.
Marché intérieur :
société européenne
coordination des politiques fiscales
intensification des efforts dans la
reconnaissance mutuelle des
qualifications (secteur des services).
Poursuite de la libéralisation des secteurs
industriels publics (électricité, gaz,
télécommunications, transports notamment).
S’appuyer sur le marché intérieur pour, à
l’échelle planétaire : réduire les barrières à
l’entrée et notamment les obstacles de nature
réglementaire et normative sur les marchés
d’exportation (par le biais notamment
d’accords de reconnaissance mutuelle).
Profiter des avantages de l’Union
Economique et Monétaire, notamment la
réduction des coûts et un accès facilité aux
marchés proches de la zone euro (Europe
centrale).
Poursuivre la stratégie de coordination des
politiques en faveur de la création d’emplois.
Politique de concurrence :
Continuer à moderniser la politique de
concurrence afin de rester en phase avec la
mondialisation (délimitation du marché
pertinent, identification de l’étape de
développement dans lequel se trouve un
marché particulier, révision de la politique de
contrôle des accords verticaux, traitement des
accords horizontaux de recherche et
développement entre entreprises).
Continuer dans la mise en œuvre de la
politique d’aides d’Etat à orienter l’aide
publique vers l’investissement immatériel.
33
Développement de principes internationaux
en matière de concurrence.
Etats membres et firmes européennes
devraient communiquer les cas de
discrimination dont ils ont connaissance.
Politique commerciale :
Défendre les positions européennes :
renforcer la vigilance ;
préparer les négociations ;
mettre en place un cadre pour la
concurrence au niveau mondial.
Etablir un « level playing field » et des règles
du jeu équitables à l’échelle internationale.
Poursuite des accords multilatéraux et
bilatéraux pour l’ouverture de marchés tiers,
introduction de nouveaux thèmes de
discussions, consolidation des accords de
démantèlement des barrières au commerce
international.
Défense de la spécificité culturelle (secteur
audiovisuel).
Développement du dialogue industriespartenaires publics (global business dialog),
de formes d’auto-régulation (protection des
consommateurs et utilisateurs).
ACTIVITES ET ENTREPREUNARIAT EN EUROPE
L’Europe ne valorise pas assez le
risque et l’entrepreunariat :
-
La culture entrepreunariale
n’est pas valorisée.
-
Concernant l’adaptation des
financements :
Exposer les étudiants à la culture
entrepreunariale ; initiatives du type
"écoles-entrepreunariat »
Développer les réseaux associant l’industrie
Les sommes investies par les
fonds de capital-risque restent peu
orientées vers les industries
naissantes et à haute technologie.
Les entreprises européennes
accèdent difficilement aux
marchés financiers primaires.
En termes de formation :
et les universités dans lesquels des PME
innovatrices travaillent de concert avec des
capital-risqueurs et des universités.
Améliorer le financement par la mise en
œuvre du plan d’action pour le capitalrisque :
Intégration des marchés de capital-risque en
Europe par :
l’élimination des barrières
institutionnelles et réglementaires au
développement du capital-risque ;
révision des lois relatives à la
34
banqueroute et à la solvabilité ;
l’amélioration du régime fiscal appliqué
au capital-risque.
l’euro facilite le développement d’un marché
du capital-risque à l’échelle européenne.
effet indirect de l’euro (attraction de
l’épargne mondiale).
ENTREPRISES EUROPEENNES ET NOUVELLES TECHNOLOGIES
L’industrie européenne est
insuffisamment spécialisée dans
les segments de marchés à
croissance rapide qui se
caractérisent par un progrès
technologique très rapide.
Les industries européennes font
un usage insuffisant et trop
traditionnel des technologies de
l’information.
Décloisonner le rôle des organismes
publics d’enseignement et des entreprises en
favorisant leur partenariat pour la formation en
vue de :
Revaloriser les compétences technologiques.
La valorisation du capital humain :
favoriser l’éducation et la remise à niveau
tout au long de la vie ;
stratégies de retrait progressif de la vie
active ;
amélioration du cadre de vie et cohésion
sociale (amélioration de l’habitat urbain
comme action clef du 5ème programme
cadre) ;
s’appuyer sur la stratégie européenne
pour l’emploi ;
accroître la mobilité des personnes ;
renforcer la connaissance de l’usage des
technologies de la société de
l’information (initiatives en faveur
d’internet dans les écoles) ;
apprendre à travailler en groupes virtuels.
Adaptation des règles relatives à la société
de l’information et au commerce
électronique (accord de type « Charte
internationale »).
35
RECHERCHE EUROPEENNE
Le niveau des dépenses de R&D
dans le PIB européen reste
inférieur à celui de ses principaux
partenaires économiques
mondiaux.
La politique européenne de R&D
est fragmentée et peu coordonnée.
Collaboration plus poussée entre industriels,
chercheurs et utilisateurs ;
Concentration des efforts de recherche et
développement sur un nombre restreint
d’objectifs économiques.
L’exploitation des résultats de la
recherche n’est pas assez efficace,
comme l’illustre un partenariat
public/privé insuffisant pour la
recherche.
Coût élevé et complexité des
procédures pour obtenir une
protection de la propriété
intellectuelle en Europe.
Les entreprises européennes
mettent en place peu de projets
communs de recherche
Meilleure focalisation du PCRD (5ème
programme-cadre) :
Valoriser les résultats du PCRD et de la
recherche européenne par le capital-risque
et le renforcement de l’initiative I-Tec.
Mieux utiliser les possibilités offertes par
les Traités :
d’aides en vue de promouvoir les recherches
entre différents acteurs pour la réalisation de
projets importants d’intérêt européen ;
pour favoriser la diffusion des meilleures
pratiques (investissements de type fonds
structurels et campagnes publiques
d’information) ;
pour développer les réseaux associant
l’industrie et les universités en vue d’élargir
la capacité des entreprises à absorber les
transferts de technologies.
Moderniser le fonctionnement du système
européen des brevets :
en développant les services d’intermédiation
par la création d’un instrument
communautaire unitaire pour la protection du
brevet
par une harmonisation complémentaire dans
le domaine des programmes d’ordinateurs
par une réduction des coûts et des délais de
procédure
par des mesures spécifiques à destination des
PME.
Renforcer la législation européenne :
révision future de l’encadrement des aides à
la recherche.
Travail législatif réalisé par l’Union
36
européenne pour adapter le cadre
réglementaire à la société de l’information
(signature électronique, contrats en ligne,
responsabilité des intermédiaires).
Améliorer les politiques publiques :
Coordination entre les Etats membres et
effort conjoint pour une amélioration de
l’adéquation entre les commandes publiques
et la recherche.
Politique de concurrence : traitement
simplifié et rapide des accords horizontaux
de recherche et développement entre
entreprises.
Politique commerciale : proposer dans le
cadre de l’OMC de développer un système
d’observation des soutiens publics à la
recherche et au développement dans les pays
industrialisés.
37
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