La grammaire… Elodie Bayle. 2015

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Synthèse "Acquisition et Dysfonctionnement" (SCLF14 TC), Licence 3, AMU, Faculté ALLSHS d'Aix-en-Provence
Synthèse du livre
LA GRAMMAIRE EST UNE CHANSON DOUCE
d’Erik ORSENNA
Elodie Bayle
L’acquisition du langage est une étape importante pour le développement de la communication de l’enfant.
Généralement, l’oralisation précède l’écrit mais s’étoffe et se précise avec l’apprentissage de ce dernier.
Souvent, rébarbatifs, les cours de grammaire ou d’apprentissage de langue sont mis sur la sellette par les
enfants et même par certains enseignants de l’Education Nationale. Ces côtés désuets et répétitifs ne sontils pas les maîtres maux d’un apprentissage en déclin et d’une mauvaise utilisation de la langue française,
qui entraînent des problèmes de communication ? Pour cela, Erik Orsenna, de l’Académie Française, traite
de l’importance de l’apprentissage du langage dans son livre La grammaire est une chanson douce (2001).
L’auteur a une vision de la langue comparable à certains points à celle des linguistes. Il propose une
méthode ludique d’apprentissage de la langue aux enfants. Ainsi, Erik Orsenna critique l’Education
Nationale et son système d’apprentissage.
Les mots (oraux ou signés) sont l’essence de la communication. Sans eux il y a un sentiment de perdition et
d’affolement. Erik Orsenna met ce sentiment en jeu lorsque ses deux jeunes personnages Jeanne et Thomas
ne peuvent plus parler après une tempête. Jeanne et Thomas mettent en place une communication gestuelle
préalablement instaurée lorsqu’ils étaient nourrissons. L’auteur reprend donc un axiome de PALO ALTO :
« on ne peut pas ne pas communiquer » (extrait du cours « discours et interaction » de Béatrice Priego,
Université d’Aix-Marseille, 2014). Une réalité linguistique est reprise, lorsque l’académicien donne son
explication poétique du désert. Il compare le silence à la mort c’est-à-dire à l’oubli d’une langue et à sa
désuétude. Il rappelle le chiffre alarmant de 25 disparitions de langues par an. Il ajoute qu’en plus de ces
langues, ce sont des cultures et des hommes qui meurent de l’oubli. Ainsi, son point de vue rejoint celui des
linguistes. En effet, ces derniers ont pour but de sauvegarder des langues en danger et effectuent de
nombreux voyages au sein de contrées reculées. Lorsqu’ Erik Orsenna parle de Nécrole et de sa dictature
où seulement 500 à 600 mots sont autorisés, il fait référence à la mondialisation et à son effet néfaste sur la
survie des langues rares. Dans le cas de la dictature de Nécrole, les mots sont vus comme de simples outils
de communication qui arrangent les hommes d’affaires, les banquiers ou encore les économistes. Ainsi,
l’auteur dénonce ce phénomène et défend la langue française et sa richesse au même titre que les linguistes
le font pour les langues en danger. Un autre clin d’œil à la linguistique est fait lorsque le narrateur explique
à Jeanne pourquoi il est important qu’elle parle. Il mentionne le fait que le cerveau droit est le lieu de
naissance des phrases et que si elle ne parle pas, il deviendra un désert au même titre que sa langue
deviendra toute plate. Le fait que l’auteur soit en accord sur ces points de linguistique montre la réflexion
sur la langue en elle-même. La conscience de sa langue par l’enfant a une importance capitale dans un bon
apprentissage et lui permettra de la voir autrement. Pour l’auteur, cette prise de conscience ne suffit
toutefois pas et n’est pas innée. Il faut pour cela que la langue soit présentée sous un angle poétique aux
enfants.
L’auteur sensibilise les jeunes enfants aux problèmes du vocabulaire et de la grammaire grâce à une
histoire simple où règnent exotisme et poésie. Il utilise un cadre imagé, le marché aux mots, l’hôpital des
mots, l’usine des mots, puis il intègre un procédé d’imagerie et d’illustration qui explique la signification
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des mots et leur importance. L’explication des mots permet d’éviter un mauvais emploi du vocabulaire,
comme pour les paronymes « agonir » et « agoniser ». Ce procédé permet aussi de pallier le manque de
vocabulaire donc d’éveiller la curiosité des enfants. De plus avec la petite phrase « je t’aime », l’auteur met
en avant l’aspect sémantique et pragmatique des mots qui ont un grand impact sur l’allocutaire et il ne faut
pas les employer à tort ou à travers. L’écrivain rend ludique et didactique la découverte de cette richesse de
la langue, qu’est le vocabulaire. Il renforce cela avec l’énonciation de la « Nommeuse ». Elle correspond à
une vieille dame qui prononce les mots pour continuer à les faire exister ; en d’autres mots, elle redonne
naissance aux mots rares. Lorsque l’héroïne, Jeanne, se rend chez la Nommeuse, elle apprend des mots
rares sans s’en rendre compte grâce à sa curiosité. L’image de la main qui apparaît avec une cloque après le
mot « échauboulure » est un moyen mnémotechnique imagé. Après ce passage, Jeanne décide de se plonger
dans le dictionnaire tous les soirs pour s’évader. C’est par ces procédés que l’auteur veut faire prendre
conscience que le vocabulaire n’est pas juste une très longue suite de mots à apprendre par cœur. Ainsi je
vois dans ce livre deux visées : une pour les enfants et une pour les adultes. Les enfants doivent prendre
conscience que le vocabulaire est enrichissant et essentiel ; quant aux adultes enseignants, ils doivent
réaliser que le dégoût de l’apprentissage du vocabulaire peut venir de leur façon d’enseigner. Les clefs
seraient donc un apprentissage ludique et pédagogique pour susciter la curiosité des enfants. L’auteur
sensibilise à la grammaire en la définissant le plus simplement et astucieusement possible : les mots ont
besoin de règles pour être harmonisés et organisés. Pour expliquer les accords entre les noms, les adjectifs
et les articles, il commence par attribuer un métier au mot qui est de poser une étiquette sur une chose : les
noms. Ils sont compliqués, car ils changent souvent et constituent la plus grande catégorie de mots. Les
articles, quant à eux, annoncent le genre et sont une petite catégorie de mots. Les adjectifs permettent de
déguiser les noms, et se trouvent dans un magasin. Erik Orsenna définit les liens : le nom et l’article sont
indissociables. Une fois l’adjectif choisi, il y a « mariage à la mairie » pour l’accord de l’adjectif avec le
nom. C’est donc une fois de plus grâce à une image que l’auteur explique un point de grammaire. Il va
peaufiner son explication de la grammaire à l’aide de son « usine à fabriquer des mots ». Il y explicite les
catégories grammaticales ainsi que leurs fonctions au sein de la phrase :
- les pronoms sont prétentieux car peuvent remplacer un nom
- les adverbes sont une classe qui se désintéresse de la mairie, ils ne veulent pas de mariage donc sont
invariables
- les verbes sont des maniaques du labeur et sont comparés à des fourmis. L’auteur reprend l’étymologie
des auxiliaires être et avoir : auxilium signifie secours, ainsi on peut dire que les auxiliaires volent au
secours de tous les verbes pour les aider.
- des distributeurs de préposition pour les compléments indirects
- des distributeurs des conjonctions et des interjections.
L’académicien explique des notions de syntaxe comme le premier élément est sujet et le dernier élément
complète l’idée commencée par le verbe. Il faut dater le verbe pour savoir quand cela s’est passé : pour cela
l’écrivain utilise l’image des horloges dont celle du présent, passé (avec distinction entre passé simple et
imparfait avec l’image du diplodocus qui mange tout le temps ou exceptionnellement à cause d’une
indigestion) et celle du futur. L’horloge folle correspond au conditionnel où tout est souhait, désir et
hypothèse. L’auteur présente la grammaire d’une phrase comme un jeu. Il faut attraper dans une volière un
nom, pêcher un verbe dans la fourmilière et prendre à un distributeur un article. L’auteur renforce cette
idée par cette métaphore : « une phrase c’est comme un arbre de noël : tu la décores mais attention à ne pas
trop la charger sinon elle s’écroule ». Il met donc en garde sur les phrases trop longues. Une fois que
Jeanne a su construire une phrase correcte, elle a pu retrouver sa voix. Aussi, on peut y voir l’image
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suivante : maîtriser la grammaire permet de s’exprimer correctement. L’auteur a
montré que
l’apprentissage de la grammaire et du vocabulaire peut ne pas être rébarbatif. Peut-être suffit-il de les
transmettre d’une façon ludique, imagée et didactique pour assurer un bon apprentissage de la langue.
Erik Orsenna dans son livre La grammaire est une chanson douce commence son livre par une critique de
l’inspection de l’Education Nationale. En effet, les professeurs sont tenus à un conformisme, pas toujours
productif ni judicieux ; tel est l’avis de l’auteur. Il décrit une professeure Mme Laurencin
comme « amoureuse » de Jean de La Fontaine et la dote d’une grande sensibilité aux mots et à la
grammaire. Elle essaie de transmettre sa passion linguistique à ses élèves en les sensibilisant à la beauté de
la langue française. N’est-ce pas le rôle d’un professeur ? Pourquoi le système éducatif la brime-t-elle ?
Cette enseignante va devoir faire un stage de remise à niveau. Ce clin d’œil commence au moment où
Jeanne doit réapprendre à parler, entourée de professeurs qui suivent ce stage. Celle qui enseigne au sein de
ce stage utilise un jargon professoral-linguistique inadapté à de jeunes enfants apprenant le français.
Souvent, des notions inutiles priment au détriment de la pédagogie.
En somme pour l’auteur, les maîtres mots d’un apprentissage réussi sont la prise de conscience de la langue
en tant que richesse (point de vue des linguistes), un enseignement ludique, didactique et imagé suscitant
la curiosité et l’éveil à la langue de l’enfant. Un système d’éducation rigide et uniforme n’est pas la clef
d’un apprentissage réussi. Ce livre La grammaire est une chanson douce d’Erik Orsenna permet aux
enfants d’apprendre à aimer leur langue et permet aux adultes d’appréhender l’enseignement sous un autre
angle. Du même auteur et dans le même esprit, on peut trouver les ouvrages suivants : Les chevaliers du
subjonctif, La révolte des accents, Et si on dansait ? et La fabrique des mots. Ces ouvrages sont de réels
appels à la découverte et à l’amour de la langue française. Pour certains, ces livres sont un peu trop
puristes, utopiques et enfantins. Mais quel que soit l’avis, ces livres permettent de s’évader au sein de la
langue française. Lire, écrire, parler, réfléchir, apprendre, communiquer, n’est-ce pas d’abord rêver ?
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Bibliographie
Orsenna, E. (2001). La grammaire est une chanson douce. Edition Broché, Paris.
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