Dossier pédagogique SAISON 2014 I 2015 BERLINER ENSEMBLE BERTOLT BRECHT I CLAUS PEYMANN Mère Courage Mutter Courage und ihre Kinder Bertolt Brecht Paul Dessau MISE EN SCÈNE Claus Peymann DÉCOR Frank Hänig COSTUMES Maria-Elena Amos DRAMATURGIE Jutta Ferbers LUMIÈRES Karl-Ernst Herrmann & Ulrich Eh ARRANGEMENTS & DIRECTION MUSICALE Rainer Böhm ASSISTANTE À LA MISE EN SCÈNE Miriam Lüttgemann ASSISTANT AU DÉCOR Norman Heinrich ASSISTANTE AUX COSTUMES Wicke Naujoks SOUFFLEUSE Sonja Behrens RÉGISSEUR Rainer Manja DIRECTEUR TECHNIQUE Stephan Besson CHARGÉ DE PRODUCTION Mirko Baars DANS L’ORDRE D’ENTRÉE EN SCÈNE : DE Carmen-Maja Antoni KATTRIN, SA FILLE MUETTE Karla Sengteller EILIF, SON FILS AÎNÉ Raphael Dwinger SCHWEIZERKAS, SON CADET Michael Rothmann LE RECRUTEUR Martin Schneider L’ADJUDANT Veit Schubert LE CUISINIER Manfred Karge YVETTE POTTIER Ursula Höpfner-Tabori LE GÉNÉRAL Axel Werner L’AUMÔNIER AUX ARMÉES Martin Seifert LE SOLDAT Marko Schmidt LE BORGNE AU BANDEAU Michael Kinkel UN AUTRE ADJUDANT Veit Schubert LE VIEUX COLONEL Martin Schneider DEUX PORTEURS DE CIVIÈRE Marko Schmidt & Hannes Lindenblatt DEUX SOLDATS Martin Schneider & Michael Kinkel LA PAYSANNE Gudrun Ritter LE PAYSAN Axel Werner UNE VOIX Marko Schmidt UNE VOIX DANS LE PRESBYTÈRE Axel Werner UNE VOIX DE FEMME QUI CHANTE Claudia Burckhardt L’ENSEIGNE Martin Schneider DEUX SOLDATS Veit Schubert & Axel Werner LA PAYSANNE Gudrun Ritter LE PAYSAN Roman Kaminski LE JEUNE PAYSAN Marko Schmidt MUSIQUE DE MÈRE COURAGE DIRECTION DES COSTUMES & DES MAQUILLAGES Barbara Naujock MAQUILLAGES Ulrike Heinemann SON Alexander Bramann RÉDACTION & RÉGIE DES SURTITRES Michel Bataillon Mère Courage et ses enfants de Bertolt Brecht, dans la mise en scène de Claus Peymann, a été créée le 26 novembre 2005. La distribution initiale a évolué au fil du temps et des tournées, notamment au Fadj-Festival 2008 à Téhéran, aux Nuits de Fourvière 2009 à Lyon et au Festival Porto Alegre em cena 2012 au Brésil. L’Arche est éditeur et agent théâtral de l’œuvre de Bertolt Brecht traduite en français. www.arche-editeur.com EN ALLEMAND, SURTITRÉ DURÉE 1 PARTIE : 1 h 40 I ENTRACTE : 20 mn I LES MUSICIENS : Matthias Erbe VIOLON Cathrin Pfeifer ACCORDÉON Silke Eberhard SAXOPHONE ALTO, RE CLARINETTE, CLARINETTE BASSE Michael Yokas VIOLON, PIANO Clemens Rynkowski PIANO & DIRECTION D’ORCHESTRE Manfred Wittlich GUITARE photos Monika Rittershaus 2 2E PARTIE : 1 h 20 SOMMAIRE Introduction Un séisme nommé Courage p. 4 I B. Bataillon p. 6 Mère Courage et ses enfants, Chronique de la guerre de trente ans p. 8 Extrait tableau 5 p. 9 La Courage n’apprend rien p. 10 Entretien avec un jeune spectateur p. 11 Forme épique / Forme dramatique du Théâtre p. 12 Bertolt Brecht p. 15 Chronologie Bertolt Brecht p. 16 La musique de scène de Paul Dessau p. 22 Parcours d’acteurs p. 23 Et le requin, il a des dents p. 26 Repères bibliographiques p. 29 3 INTRODUCTION De 1618 à 1648, la guerre de Trente Ans a dévasté l’Europe. Pour Brecht, cette guerre est « l’une des premières guerres gigantesques que le capitalisme a attirées sur l’Europe. » Mère Courage reconnaît l’essence mercantile de cette guerre : elle suit les armées avec sa carriole de marchandises et fait de bonnes affaires. Mais cette marchande a aussi des enfants, c’est là que le bât blesse et que la dialectique passe à l’attaque. Brecht écrivit Mère Courage en exil, à l’automne 1940, à une époque où le peuple allemand était aussi peu capable que Mère Courage de tirer les leçons de ses malheurs et de surmonter ses contradictions. Mais aujourd’hui, les Mère Courage ont-elles disparu ? La mise en scène de la pièce par Brecht en 1949, avec le Berliner Ensemble, a pour la première fois fait connaître concrètement au public, et avec un immense succès, le théâtre épique et dialectique, tel que Brecht l’avait conçu pendant son exil. BERTOLT BRECHT VOUS CONSEILLE… CE QU’UNE REPRÉSENTATION DE MÈRE COURAGE ET SES ENFANTS DOIT ESSENTIELLEMENT MONTRER : → Que les grandes affaires au cours des guerres ne sont pas faites par les petites gens. → Que la guerre, qui est une continuation des affaires par d’autres moyens, rend mortelle les vertus humaines, pour leurs possesseurs également. → Que pour combattre la guerre, aucun sacrifice n’est trop grand. Bertolt Brecht Introduction, Mère courage et ses enfants, Bertolt Brecht, L’Arche Éditeur 4 « Tout au long de la pièce, Mère Courage a les yeux collés, elle n’arrive pas à le voir ; pour elle, le négoce est extensif à la guerre, la guerre est contingente au négoce. Roland Barthes 5 » UN SÉISME NOMMÉ COURAGE Bertolt Brecht était alors peu connu en France… En 1954, voilà tout juste soixante ans, les représentations parisiennes de Mère Courage et ses enfants, avec Helene Weigel et la troupe de ce qui était déjà le Berliner Ensemble, révolutionnèrent la conception de l’art dramatique. Retour sur une histoire au long cours, que Claus Peymann réactualise avec Carmen-Maja Antoni, pour fêter au Théâtre de la Ville l’anniversaire d’une légende. sait capable d’entraîner pendant plus de trois heures la machine épique inventée par Brecht et puis elle peut chanter juste les mélodies complexes de Paul Dessau. Le 18 décembre 1951, la charrette de Mère Courage fait ses premiers tours de piste, tirée par ses garçons, le vertueux P’tit Suisse – Jean Negroni et Eilif le bagarreur – Gérard Philipe, sur la scène du théâtre de la Cité-Jardins de Suresnes où, la veille, il avait exalté l’audace chevaleresque du Cid. Vilar avait bien « pensé » son diptyque inaugural. Dans le droit fil de ses grandes « régies », il avait su marier les talents: grâce à la palette du peintre Édouard Pignon, qui voyait les horreurs de la guerre en haillons colorés, le spectacle était pittoresque et il était sonore grâce à « La Montero ». Elle jouait la vivandière avec panache, « âpre et marchandeuse comme une romanichelle, cynique, vivante, misérable et résignée », telle que la décrit Elsa Triolet. Pour la nouvelle génération de spectateurs qui accompagnaient la naissance du T.N.P., Dans la France théâtrale du début des années 1950, le nom de Bertolt Brecht est à peine connu. Seuls quelques amateurs savent que, dès 1949, un explorateur nommé Jean-Marie Serreau, sa femme Geneviève et leur compère Benno Besson ont traduit, édité, mis en scène et joué sur plusieurs scènes d’avant-garde de la Rive Gauche, L’Exception et la Règle, une petite « pièce didactique » qui, par sa logique paradoxale, dévoile les mécanismes de l’exploitation de l’homme par l’homme. Ce sont eux qui ont fait découvrir à Jean Vilar Mère Courage et ses enfants. Intrépide, Vilar met au programme du premier week-end de son T.N.P. la création de cette pièce inconnue d’un auteur qu’on dit « moscoutaire ». Parmi les comédiens fondateurs du Festival d’Avignon, il y a Germaine Montero, comédienne française prise d’amour pour l’Espagne républicaine, amie de Federico García Lorca, et chanteuse de cabaret, interprète de Bruant, Prévert, Mac Orlan, Léo Ferré… Vilar la EN JUIN 1954, LE BERLINER ENSEMBLE, DIRIGÉ PAR BERTOLT BRECHT, PRÉSENTE À PARIS, AU THÉÂTRE SARAH BERNHARDT, DANS LE CADRE DU FESTIVAL DU THÉÂTRE DES NATIONS, MUTTER COURAGE UND IHRE KINDER 6 la « Chanson de la Mère Courage » rivalisa bientôt avec la « Complainte de Mackie » de L’Opéra de quat’sous. EN 1954 À PARIS, UNE RÉVOLUTION DANS L’ART DRAMATIQUE Le 30 juin 1954, le Théâtre Sarah-Bernhardt – qui avait encore son architecture intérieure Second Empire et ne devint Théâtre de la Ville qu’après sa rénovation de 1968 – fut à l’épicentre d’un séisme dont les ondes se propagèrent pendant plusieurs décennies, fissurant toutes les strates du paysage théâtral français. La métaphore grandiloquente n’est pas excessive. Les quatre représentations de Mutter Courage und ihre Kinder par Helene Weigel et « l’Ensemble » théâtral de Berlin-Est dirigé par Bertolt Brecht, et les tournées du Berliner Ensemble qui suivirent en 1955, 1957 et 1960, furent à l’origine d’une révolution dans l’art du récit dramatique et scénique. Pour cette première expérience de « Théâtre des Nations », les organisateurs du Festival international d’art dramatique de la Ville de Paris eurent bien du mal à séduire un public parisien rebuté par la langue allemande et peu curieux de découvrir ce qui se passait au-delà du « rideau de fer ». Joué le premier soir devant une salle clairsemée, le spectacle remporta un double premier prix, pour la pièce et pour la mise en scène. Des témoins parlent de vingt-six rappels pour – qui, sortant de scène, aurait dit en coulisse à l’une de ses amies : « Tu vois que je sais faire autre chose que des kouglofs ! » Car telle était la Weigel. Et Brecht avait le trac. Du fond d’une loge de corbeille, il assista au triomphe : il fut réclamé et acclamé. Dans les jours et les semaines qui suivirent, hormis quelques irréductibles anticommunistes grincheux, partisans d’un théâtre académique ou boulevardier, les commentateurs admettent avoir assisté ce soir-là à un événement théâtral majeur. Bernard Dort parle de l’avènement d’un spectacle d’un type radicalement neuf… Un théâtre nouveau qui n’est plus un théâtre de texte, ni un théâtre de mise en scène ; Marcel Brion, académicien, y voit une date dans l’histoire du théâtre; Morvan-Lebesque, un spectacle d’où l’on sort hanté, halluciné ; Roland Barthes une révolution théâtrale, un théâtre désaliéné… qui s’est trouvé devant nous en un jour dans sa forme adulte et déjà parfaite. Et le peintre René Allio résume ainsi le sentiment général : « À la sortie de Mère Courage…, je n’étais pas le même qu’à l’entrée : je voyais, je comprenais le théâtre autrement. » HÉLÈNE WEIGEL DANS LA LOGE DE SARAH BERNHARDT EN 1955 © Roger Pic Tout participe de la couleur lucide de la mort… », écrivait Guy Dumur, au lendemain de ce 30 juin 1954. Car, dans l’art scénique du metteur en scène Bertolt Brecht, tout participait. Tout était signe. Et tous les signes formaient faisceau pour raconter l’histoire et ses contradictions. Précisément cette cohérence des signes concrets était stupéfiante. Du jour au lendemain – ou presque – la cohérence dramaturgique d’un spectacle devint une exigence, un mot d’ordre. Le beau théâtre d’art tel que l’avaient pratiqué les grands du Cartel avait fait son temps. De cette révolution demeurent les images saisissantes du Leica de Roger Pic qui, selon Roland Barthes, « aident à découvrir l’intention profonde de la création ». Tirant sa charrette à contre-courant du plateau tournant, à contre-sens, d’abord dans les ruines de Berlin, puis à Paris, Londres, Moscou…, cinq cent quatre fois de 1949 à 1961, Helene Weigel avait ouvert « l’ère brechtienne ». Elle mourut le 6 mai 1971, quelques semaines après son retour à Berlin. DANS LES RUINES DE BERLIN, PUIS À PARIS, LONDRES, MOSCOU… « Couleur de la mort, ces mots, je ne sais pourquoi, qualifient dans ma mémoire le spectacle de Bertolt Brecht… Michel Bataillon 7 MÈRE COURAGE ET SES ENFANTS, CHRONIQUE DE LA GUERRE DE TRENTE ANS Mère courage et ses enfants, Bertolt Brecht, L’ARCHE ÉDITEUR, PARIS Pièce en douze tableaux, inspirée des Aventures de Simplicius Simplicissimus, roman de Hans Jakob Christoffel von Grimmelshausen (1669). Aventures d’un jeune paysan naïf, éternel innocent mais pas idiot, qui est happé dès l’enfance dans cette interminable et cauchemardesque succession d’absurdités sanguinaires que fut, pour les populations allemandes, la guerre de Trente Ans (1618-1648)*. I. II. Printemps 1624. En Dalécarie, le grand capitaine Oxenstierna recrute des troupes pour la campagne de Pologne. À la cantinière Anna Fierling, connue sous le nom de Mère Courage, on enlève un fils (Eilif). Au cours des années 1625 et 1626, Mère Courage traverse la Pologne avec le train des armées suédoises. Devant la forteresse de Wallhof, elle retrouve son fils. — Heureuse vente d’un chapon et grand jour pour le fils audacieux. III. Trois ans plus tard, Mère Courage se retrouve en captivité, avec les restes d’un régiment finnois. Sa fille pourra être sauvée, ainsi que sa carriole, mais son fils honnête va mourir. IV. Mère Courage chante la « Chanson de la grande capitulation ». V. Deux années se sont écoulées. La guerre couvre de plus en plus de territoires. La petite carriole de Courage traverse sans relâche la Pologne, la Moravie, la Bavière, l’Italie et de nouveau la Bavière. 1631. La victoire de Tilly à Magdebourg coûte quatre chemises d’officier à Mère Courage. VI. Devant la Ville d’Ingolstadt en Bavière, Courage assiste à l’enterrement du grand capitaine d’empire Tilly qui vient d’être tué. Discussions qui portent sur les héros et la durée de la guerre. L’aumônier déplore que ses talents soient inemployés et Catherine la muette reçoit des chaussures rouges. On est en l’an de grâce 1632. VII. Mère Courage au faîte de sa carrière commerciale. VIII. La même année le roi de Suède Gustave Adolphe tombe à la bataille de Lützen. La paix menace de ruiner le commerce de Mère Couarge. Le fils audacieux (Schweizerkas) de Courage accomplit un exploit de trop et trouve une fin honteuse. IX. Voilà seize ans que dure la grande guerre de religion. L’Allemagne y a perdu plus de la moitié de ses habitants. De gigantesques épidémies tuent ce que les carnages ont épargné. La faim sévit dans les régions jadis florissantes. Des loups rôdent dans des villes réduites en cendres. À l’automne 1634, on rencontre Courage dans le Fichtelgebirge bavarois, à l’écart de la route stratégique où se déplacent les armées suédoises. Cette année-là l’hiver a été précoce et il est sévère. Les affaires vont mal, si bien qu’il ne reste plus qu’à mendier. Le cuisinier reçoit une lettre d’Utrecht et il est congédié. X. Durant toute l’année 1635, Mère Courage et sa fille Catherine sillonnent les routes de l’Allemagne du centre, à la suite d’armées de plus en plus déguenillées. XI. Janvier 1636. Les troupes impériales menacent la ville protestante de Halle. Les pierres se mettent à parler. Mère Courage perd sa fille et continue seule. La guerre est loin d’être terminée. XII. Approche de l’aube. On entend les tambours et les fifres de troupes en marche qui s’éloignent. * La guerre de Trente Ans est un conflit religieux (affrontement entre protestantisme et catholicisme) et politique (affrontement entre féodalité et absolutisme) né en Allemagne en 1618 et qui s’étendit à l’Europe occidentale jusqu’en 1648. La guerre peut être divisée en 4 phases : Palatinat-Bohême (1618-1625), Danemark (1625-1629), Suède (1630-1635) et France (1635-1648). 8 EXTRAIT DU TABLEAU 5 Mère courage et ses enfants, Bertolt Brecht, L’ARCHE La carriole de Mère Courage se trouve dans un village bombardé. Vague musique militaire dans le lointain. Deux soldats au comptoir, servis par Catherine et Mère Courage. L’un d’eux a jeté sur ses épaules un manteau de fourrure de femme. ÉDITEUR, PARIS LA PAYSANNE, faiblement. Notre ferme. MÈRE COURAGE. Ceux-là, pour laisser quelque chose ! Mais maintenant c’est à moi de faire les frais. Je marche pas. LE PREMIER SOLDAT. Ce sont des protestants. Pourquoi faut-il qu’ils soient protestants ? MÈRE COURAGE. Ils s’en moquent, de ta religion. Ils ont perdu leur ferme. LE DEUXLÈME SOLDAT. Ils sont pas du tout protestants. Ils sont eux-mêmes catholiques. LE PREMIER SOLDAT. Avec le bombardement, on ne peut pas chipoter. UN PAYSAN, que l’aumônier ramène. Mon bras est fichu. L’AUMÔNIER. Où est la toile ? Tous regardent Mère Courage qui ne bouge pas. MÈRE COURAGE. Je peux rien donner. Avec toutes ces taxes, droits de douane, redevances et pots de vin ! Catherine ramasse une planche pour en menacer sa mère, en émettant des sons gutturaux. Tu perds la tête ? Lâche cette planche, sans ça je vais te mettre une tartine, crampon ! Je donne rien, je veux pas, il faut que je pense à moi L’aumônier la soulève du marchepied de la carriole pour l’asseoir par terre ; puis il fouille et exhume des chemises et en fait de la charpie. Mes chemises ! À un demi-florin pièce ! Je suis ruinée ! […] MÈRE COURAGE. Quoi, tu peux pas payer ? Pas d’argent, pas de schnaps. Ils se mettent à jouer des marches triomphales, mais la solde, ils ne la paient pas. UN SOLDAT. Je veux mon schnaps. Je suis arrivé trop tard au pillage. Le capitaine nous a baisés et il a donné qu’une heure pour le pillage de la ville. Il a dit qu’il était pas un monstre ; la ville a dû l’acheter. L’AUMÔNIER, arrive en trébuchant. Il y en a encore dans la ferme. La famille du paysan. Que quelqu’un m’aide. J’ai besoin de toile. Le deuxième soldat s’éloigne avec lui. Catherine est prise d’une grande excitation et essaie d’amener sa mère à donner de la toile. MÈRE COURAGE. J’en ai pas. J’ai vendu tous mes bandages au régiment. Je ne vais pas déchirer mes chemises d’officier pour ceux-là. L’AUMÔNIER, crie de loin. J’ai dit que j’ai besoin de toile. MÈRE COURAGE, barrant l’entrée de la carriole à Catherine en s’asseyant sur le marchepied. Je donne rien. Ceuxlà ne paient pas, pourquoi, parce qu’ils n’ont rien. L’AUMÔNIER, penché sur une femme qu’il vient de ramener. Pourquoi êtes-vous restée sous le feu des canons ? 9 LA COURAGE N’APPREND RIEN Pendant la guerre des paysans, le plus grand malheur de l’histoire allemande, a été arrachée la canine de la Réforme, pour ce qui est du social. Restèrent le commerce et le cynisme. La Courage – ceci est dit pour aider la représentation théâtrale – reconnaît de concert avec ses amis et ses hôtes, et à peu près tout le monde, l’essence purement mercantile de la guerre : c’est précisément ce qui l’attire. Elle croit à la guerre jusqu’au bout. Pas une fois elle ne comprend que pour se tailler son morceau dans la guerre, il faut avoir une grande paire de ciseaux. Les spectateurs s’attendent, dans les catastrophes, certes à tort, à ce que ceux qui en ont été affectés en apprennent quelque chose. Aussi longtemps que la masse est l’objet de la politique, elle ne peut considérer ce qui lui arrive comme une expérience, mais seulement comme un destin ; elle apprend aussi peu de la catastrophe que le cobaye apprend sur la biologie. Il n’incombe pas à l’écrivain de théâtre d’ouvrir à la fin les yeux à la Courage – elle s’avise de quelque chose, vers le milieu de la pièce, à la fin de la scène 6, et de nouveau ne voit plus –, ce à quoi il tient, c’est que le spectateur voie. B. B., Mère Courage et ses enfants, notes, L’Arche Éditeur 10 ENTRETIEN AVEC UN JEUNE SPECTATEUR Certains ont dit qu’à la fin la pièce n’est pas tout à fait juste, parce qu’elle se termine sur le fait que la cantinière, en dépit des malheurs qu’elle a eus, n’a rien appris. L’ÉCRIVAIN DE THÉÂTRE : Regarde autour de toi, il y a assez de gens auxquels la guerre a apporté le malheur. Combien d’entre eux ont-ils appris quelque chose ? Je veux dire : appris eux-mêmes, sans aide, comme la Courage le devrait ? LE SPECTATEUR : Tu veux dire que tu entends simplement montrer la vérité ? L’ÉCRIVAIN DE THÉÂTRE : Oui, la guerre de Trente Ans est l’une des premières guerres gigantesques que le capitalisme a attiré sur l’Europe. Et dans le capitalisme, pour l’isolé, que la guerre ne soit pas nécessaire, c’est monstrueusement difficile, car dans le capitalisme, elle est nécessaire, c’est-à-dire pour le capitalisme. Ce système économique repose sur la lutte de tous contre tous, des grands contre les grands, des grands contre les petits, des petits contre les petits. Il faudrait donc déjà reconnaître que le capitalisme est un malheur, pour reconnaitre que la guerre apportant le malheur est mauvaise, c’est-à-dire inutile. LE SPECTATEUR : B. B., Mère Courage et ses enfants, notes, L’Arche Éditeur 11 FORME ÉPIQUE / FORME DRAMATIQUE DU THÉÂTRE Repères, Théorie du drame moderne, Peter Szondi, LA FORME DRAMATIQUE DU THÉÂTRE Incarne, une action Implique le spectateur dans une action scénique et Épuise son activité Lui fait avoir des sentiments Lui fournit une expérience Affective Le spectateur est plongé dans une action On opère avec la suggestion Les impressions sont conservées telles quelles Le spectateur est à l’intérieur, il participe ÉDITIONS L’ÂGE DE L’HOMME, LAUSANNE, 1983 LA FORME ÉPIQUE DU THÉÂTRE Elle raconte Fait du spectateur un observateur, mais Éveille son activité L’oblige à des décisions Lui fournit des connaissances Le spectateur est placé devant elle On opère avec les arguments Les impressions sont poussées jusqu’à devenir des connaissances Le spectateur est placé devant, il étudie L’homme est supposé connu L’homme immuable L’homme est l’objet de l’enquête L’homme qui se transforme et transforme Intérêt passionné pour le Déroulement Intérêt passionné pour le dénouement Une scène pour la suivante Croissance organique Chaque scène pour soi Montage Progression sinueuse Facit saltis Le monde tel qu’il devient Les contraintes de l’homme Ses motifs L’être social détermine la Pensée 12 LE THÉÂTRE ÉPIQUE SELON BERTOLT BRECHT in Écrits, Bertolt Brecht, pp 260-261, L’ARCHE ÉDITEUR, PARIS LE SPECTATEUR DU THÉÂTRE DRAMATIQUE DIT : LE SPECTATEUR DU THÉÂTRE ÉPIQUE DIT : Oui, cela, je l’ai éprouvé, moi aussi. - C’est ainsi que je suis. - C’est une chose bien naturelle. - Il en sera toujours ainsi. Je n’aurais jamais imaginé une chose pareille. - On n’a pas le droit d’agir ainsi. - Voilà qui est insolite, c’est à n’en pas croire ses yeux. - Il faut que cela cesse. - La douleur de cet être me bouleverse parce qu’il n’y a pas d’issue pour lui. - C’est là du grand art : tout se comprend tout seul. - Je pleure avec celui qui pleure, je ris avec celui qui rit. - La douleur de cet être me bouleverse parce qu’il y aurait tout de même une issue pour lui. - C’est là du grand art: rien ne se comprend tout seul. - Je ris de celui qui pleure, je pleure sur celui qui rit. 13 14 BERTOLT BRECHT Esquisse d’une biographie Bertolt Brecht par Geneviève Serreau, L’ARCHE ÉDITEUR sur la liste noire des Nazis, il est contraint de fuir, se réfugie en Suisse, passe à Paris, à Copenhague, en Suède, à Londres, en Finlande. À Paris en 1937, il met en scène quelques Scène de la vie hitlérienne et Les Fusils de la Mère Carrar (en allemand). En 1941, après un bref séjour à Moscou, il se rend aux U.S.A. et se fixe en Californie. En Amérique, il retrouve un grand nombre d’intellectuels allemands réfugiés et attend impatiemment, sept années durant, le moment de regagner sa patrie. Il continue d’écrire au rythme environ de deux pièces par an, mais elles sont peu jouées sur des scènes professionnelles et ne rencontrent qu’un succès médiocre – même La vie de Galilée adaptée et jouée par Charles Laughton. Grâce à Eric Bentley qui traduit et monte plusieurs de ses pièces dans des théâtres universitaires, Brecht conquiert une certaine partie de la jeunesse intellectuelle aux U.S.A. En 1947, il subit à Washington un interrogatoire devant la commission des « activités anti-américaines ». Il quitte les U.S.A. en décembre de cette même année et attend de longs mois à Zurich que les forces d’occupation occidentales l’autorisent à rentrer chez lui. D’une mère originaire de la Forêt Noire et d’un père bavarois, Bertolt Brecht naît à Augsbourg en 1898. Son père appartient à la bourgeoisie protestante d’Augsbourg, et donne à son fils une bonne éducation dans le sens le plus conventionnel de ce mot. Il suit l’école primaire, puis le lycée, passe son bachot et entre à l’université de Munich à 18 ans pour y suivre les cours de médecine. Nous sommes en 1916. Deux ans plus tard Brecht est enrôlé comme infirmier dans un hôpital de l’arrière. C’est pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de révolte ; il les chante lui-même en s’accompagnant à la guitare. Pour finir il gagne Berlin-Est où il fonde, en 1949, avec sa femme l’actrice Helene Weigel, le groupe théâtral « Berliner Ensemble ». D’abord hébergé au Deutsches Theater, il est installé depuis 1954 au Schiffbauerdamm Theater. Brecht met lui-même en scène ses pièces : Mère Courage, Puntila (1949), La Mère, Lucullus (1951), Les Fusils de la Mère Carrar (1952), Le Cercle de craie caucasien (1954). Entouré d’une solide équipe de techniciens, de musiciens, de décorateurs, il forme des acteurs et de jeunes metteurs en scène à qui il confie la régie de certains spectacles. La réputation de Brecht ne cesse de croître en Allemagne et dans le monde entier. Après la guerre, il retourne à Munich où il retrouve ses amis : le poète Becher, le peintre Caspar Neher, etc. Il écrit ses premiers poèmes, dont La légende du soldat mort qui fait scandale dans un cabaret de Munich. Il écrit Baal, sa première pièce, à 20 ans. Il reçoit en 1922 le prix Kleist pour sa troisième pièce : Tambours dans la nuit, et, deux ans plus tard, fait sa première mise en scène au Kammerspiel de Munich avec La Vie d’Edouard II, adaptée par lui de Marlowe. Il décide d’aller vivre à Berlin. Il abandonne l’attitude anarchique et cynique qui caractérise l’immédiate aprèsguerre pour adhérer au marxisme. Il écrit Homme pour homme, monte Baal et travaille en collaboration avec Reinhardt et Piscator. Jusqu’en 1933, date où il est tenu de s’exiler, Brecht écrit quatorze pièces qu’il monte lui-même bien souvent, sur différentes scènes d’Allemagne, et dont plusieurs font scandale. Inscrit Surmené, Brecht songe à se reposer, à abandonner quelque peu ses activités de metteur en scène pour se remettre à écrire. Le 10 août 1956, il répète une dernière fois La vie de Galilée avec le Berliner Ensemble. Quelques jours plus tard, le 14 août, il meurt d’un infarctus dans la nuit. 15 BERTOLT BRECHT EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES n 10 février: Naissance à Augsbourg, Bavière, dans une famille bourgeoise et catholique. n Premier Congrès du P.O.S.D.R. (Parti Ouvrier Social-Démocrate de Russie) à Minsk. n Lénine fonde le Parti social ouvrier. n Construction d'une flotte de guerre allemande. n Zola : J'accuse. n Il écrit son premier texte, Les Sermons domestiques, publié dans un quotidien. n Attentat à Sarajevo de l'archiduc héritier du trône. n Ultimatum autrichien à la Serbie. n Guerre austro-serbe. n Guerre germano-russe. n Guerre franco-allemande. n Invasion de la Belgique. n Guerre anglo-allemande. n Blocus économique de l'Allemagne par l'Angleterre et la France. n Entrée en guerre de la Turquie. n Ouverture du canal de Panama. LETTRES, SCIENCES, ARTS n Fauré : Pelléas et Mélisande. n Huysmans : La Cathédrale. n Lugné-Poe : première expérience de théâtre au cirque (Mesure pour mesure au Nouveau Cirque à Paris). n Hauptmann: Le Voiturier Henschel. n Pierre et Marie Curie : le radium. 1898 1914 n Obtention de son baccalauréat. n Il entreprend des études de philosophie dans sa ville natale, puis il va à Munich et se tourne vers la médecine. n L'Allemagne décide la guerre sousmarine sans restriction. n Rupture des relations diplomatiques germano-américaines. n Abdication du tsar de Russie. Les Bolcheviks prennent le pouvoir. n Mutinerie dans la flotte allemande. n Ministère Clemenceau. n Entrée en guerre des États-Unis. n Mutinerie dans l'armée française. n Bolcheviks demandent l'armistice. n Valéry : La Jeune Parque. n Duhamel : La Vie des martyrs. n Il est mobilisé et prend part au conflit mondial en qualité d’infirmier. n Écriture de Baal. (Il y invente le personnage de Galgei, qui deviendra par la suite Galy Gay dans Homme pour homme) n Grèves générales à Vienne et à Berlin. n Offensives allemandes sur la Somme et la Flandre. n Rupture des négociations germano-russes. n Armistice Bulgare. n Armistice de Rethondes. n Les Bolcheviks envahissent les pays baltes. n Rutherford : l'atome. n Écriture, entre Augsbourg et Munich, de Tambours dans la nuit (Trommeln in der Nacht), inspiré par le mouvement spartakiste (mouvement socialiste puis communiste allemand, dirigé Rosa Luxembourg). Premier succès. n Proclamation de la République en Irlande : guerre civile. n Iinstauration de la « République des Conseils » par les Bolcheviks en Hongrie. n Signature du Traité de Versailles. n Promulgation de la Constitution de Weimar. n Les Allemands évacuent les pays baltes. n Giraudoux : Elpénor. n Gide : La Symphonie pastorale. n Écriture de Dans la jungle des villes (Im Dickicht der Städte), dernière œuvre de jeunesse où l’influence de Rimbaud est manifeste. n Harding : président des États-Unis. n Ultimatum des alliés à l'Allemagne sur ses dettes de guerre. n Mort de Pierre 1er de Serbie. n Famine en Russie. n Gide : Si le grain ne meurt. 1917 1918 1919 1921 désintégration de BERTOLT BRECHT n Ministère Poincaré en France. n Fin du protectorat anglais sur l'Égypte. n Staline : secrétaire du Parti communiste soviétique. n Grève générale en Italie, Mussolini prend le pouvoir. n Mauriac : Le Baiser aux lépreux. n J. Joyce : Ulysses. n Martin Du Gard : Les Thibault. n Rejoint, avec l’actrice Hélène Weigel, le Deutsches Theater de Max Reinhardt à Berlin où Elisabeth Hauptmann devient sa maîtresse et son “nègre”. Ses premières œuvres, marquées par le nihilisme et l’anarchisme, y sont montées. En plus de ses œuvres sociales, à coloration marxiste grandissante, il développe sa théorie de “théâtre épique”. Se base sur l’œuvre de Christopher Marlowe pour écrire La vie d’Edouard II d’Angleterre. n Mort de Lénine. n Cabinet Mac Donald en Angleterre : 1er ministère travailliste. n En France élection du Cartel des Gauches. Ministère Herriot. n La France reconnaît l’Union soviétique. n Valéry : Eupalinos. n Romains : Knock. n Th. Mann : La Montagne magique. n Eisenstein : Le Cuirassé Potemkine. n Écriture d’Homme pour homme (Mann ist Mann). n Instaure une nouvelle esthétique pour inciter le spectateur à la réflexion. n Ministère Painlevé en France. n Création des SS en Allemagne. n Pacte de Locarno. n Traité sovieto-japonais. n Suffrage universel institué au Japon. n Fondation du Cartel avec Jouvet, Dullin, Baty, Pitoëff. n Ballanchine devient chorégraphe des ballets russes. n Première exposition de peintures surréalistes, rue Bonaparte. n Suis l’enseignement de Karl Kosh, théoricien marxiste et membre communiste du Reichstag. n Première version d’Homme pour homme, transposée en Inde sous l’impulsion de Rudyard Kipling. n Première représentation simultanée d’Homme pour Homme au Landestheater de Darmstadt et au Schauspielhaus de Düsseldorf. n Ministère Poincaré. n Mussolini prend le pouvoir en Italie. n Traité de non-agression germanosoviétique. n L’Allemagne est admise à la SDN. n Baty : Le Masque et l’Encensoir, introduction à une esthétique du théâtre. Bloud et Gay n Ravel/Colette : L’Enfant et les Sortilèges. n Max Ernst : première exposition de ses œuvres à la Galerie Van Leer à Paris. n Membre dirigeant d’un groupe de théâtre prolétarien, fondé par Erwin Picastor. n Il fait la connaissance du compositeur Kurt Weill. n Première version publiée d’Homme pour Homme aux éditions Propyläen, Berlin. n Fin du contrôle allié en Allemagne. n Éxécution de Sacco et Vanzetti aux États-unis. n Trotski exclu du parti en URSS. n Collectivisation de l’agriculture en URSS. n Antonin Artaud et Roger Vitrac fondent le Théâtre Alfred Jarry et montent “le Songe” de Strindberg. n Stravinski/Cocteau : Œdipus Rex. n Aragon, Eluard, Breton adhèrent au PCF. n Lindbergh traverse l’Atlantique en avion. n Avec Kurt Weill, ils font une réinterprétation de L’Opéra des gueux de John Gay, œuvre du 18e siècle: L’Opéra de quat’sous (Die Dreigroschenoper), livret de B. Brecht d’après J. Gay, partition de K. Weill d’après Pepusch. Ce sera l’un des plus grands succès théâtraux de la République de Weimar, le Theater am Schiffsbauerdamm est désormais à sa disposition. n Pacte Briand-Kellog mettant la guerre hors la loi. n Lois sur les assurances sociales obligatoires en France. n Massacres de Juifs en Palestine. n Hoover : président des États-Unis. n Grande-Bretagne : droit de vote étendu aux femmes. n Giraudoux : Siegfried (mis en scène par Jouvet à la Comédie des Champs-Élysées). n Murnau : Nosferatu le vampire. n Serge Lifar à l’Opéra. 1925 1926 1927 1928 LETTRES, SCIENCES, ARTS n Il reçoit le prix Kleist pour les trois pièces expressionnistes Baal, Tambours et Dans la jungle des villes, qui seront toutes créées dans la foulée. 1922 1924 EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES BERTOLT BRECHT 1929 1930 1931 1933 EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES LETTRES, SCIENCES, ARTS n Mariage avec Hélène Weigel. Suite n Création de l’État du Vatican. au jeudi noir, il opère des modifications n Ministère Briand. sur le texte d’Homme pour n Jeudi noir : effondrement homme. Élaboration de Pièces de Wall Street. didactiques, (Lehrstücke) qui ont pour but une tentative unique et particulière d’insérer les pensées philosophiques et politiques marxistes dans son œuvre comme éléments esthétiques et dramatiques. L’Importance d’être d’accord, présentée au festival de Baden-Baden. n n n n n Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny (Das Badener Lehrstücke von Einverständnis). En annexe, il formule théoriquement sa théorie du Théâtre épique, esthétique nouvelle initiée l’année précédente, et continue son écriture de Lehrstückes : Sainte Jeanne des abattoirs, Celui qui dit oui, celui qui dit non, La Décision et L’exception et La Règle. n Campagne de boycott des produits anglais en Inde. n Arrestation de Gandhi. n Arrêt total de l’immigration aux États-Unis. n Élections en Allemagne : le parti nazi devient le second parti allemand. n Cocteau : La Voix humaine. n Buñuel : L’Âge d’or. n Ouverture du Théâtre Pigalle. n La Mère (Die Mutter). n Nouveau remaniement d’Homme pour homme. Première représentation de la version de 1931 au Staatliches Schauspielhaus de Berlin. n Ministère Laval. n Accords Gandhi-Lord Irwin sur la fin de la désobéissance civile en Inde. n Crise financière sur toute l’Europe. n Le Japon s’empare de la Mandchourie. n Exposition coloniale à Paris. n Giraudoux : Judith. n Guitry : Franz Hals ou l’admiration. n Pagnol : Fanny. n Fondation de la Fédération du Théâtre ouvrier français. n Arrivée au pouvoir des nazis: interdiction et autodafés de ses œuvres jugées progressistes, retrait de sa nationalité. Brecht décide de s’exiler. Il passe par Prague, Vienne et Zurich et s’établit à Svendborg en Scandinavie. Il va écrire une grande partie de son œuvre pendant cette période. n Têtes rondes et têtes pointues n Incendie du Reichstag. n Daladier : président du Conseil. n Hitler chancelier d’Allemagne, puis obtient les pleins pouvoirs. n Roosevelt : message du New Deal. n Ouverture du camp de Dachau. n Les États-Unis reconnaissent l’URSS. n Abrogation de la prohibition aux États-Unis. n Antonin Artaud : Le Théâtre de la cruauté. n Mort de Gemier. n Brecht se rend à New York pour la première américaine de La Mère. n Rétablissement du service militaire en Allemagne. n L’armée italienne envahit l’Éthiopie. n Lois antisémites de Nuremberg. n Traités d’assistance mutuelle franco-soviétique et soviéto-tchécoslovaque. n Giraudoux : La Guerre de Troie n’aura pas lieu. n Jean-Louis Barrault : Autour d’une mère (premier spectacle). n Les Fusils de la mère Carrar (Gewehre der Frau Carrar). n Mère Courage et ses enfants (Mutter Courage und ihre Kinder). n Bombardement de Guernica par l’aviation allemande. n Démission de Blum auquel le sénat a refusé les pleins pouvoirs financiers. n Les armées japonaises occupent Pékin. n L’Italie quitte la SDN. n Giraudoux : Electre n Anouilh : Le Voyageur sans bagages. n Cocteau : Les Chevaliers de la Table Ronde. n Jean Zay fait transformer le Théâtre du Trocadéro en salle du Palais de Chaillot. Giraudoux : Amphitryon 38. Achard : Jean de la Lune. Pagnol : Marius. Mort de Diaghilev. (Die Rundköpfe und die Spitzköpfe). 1935 1937 BERTOLT BRECHT 1938 n Anschluss : annexion de l’Autriche au Reich. n Fin du font Populaire. n Gouvernement Daladier. n Législation antisémite en Italie. n Hitler exige le retour des Sudètes à l’Allemagne. n Cocteau : Les Parents terribles. n Baty : Dulcuné. n Honegger/Lifar : Cantique des Cantiques Opéra-Ballet. n Artaud : Le théâtre et son double. n Le Procès de Lucullus (Das Verhör des Lucullus). n Les franquistes s’emparent de Barcelone. n Hitler réclame le retour de Dantzig et du Corridor à l’Allemagne. n Pacte de non-agression germanosoviétique. n Déclaration de guerre de la GB et de la France à l’Allemagne. n Invasion soviétique de la Pologne. n La Poznanie est annexée à l’Allemagne. n L’URSS est exclue de la SDN. n Giraudoux : Ondine. n Invasion du Danemark par l’Axe. n Brecht et sa femme se réfugient en Suède puis en Finlande. n Formation du cabinet P. Reynaud. n Offensive générale allemande. n L’Italie déclare la guerre à la GB et à la France. n Entrée des troupes allemandes à Paris. n Gouvernement Pétain à Vichy. n Appel du 18 Juin par de Gaulle. n Loi sur le statut des juifs en France. n Hitler décide l’invasion de l’URSS. n Laval : renvoyé du gvt et arrêté. n Cocteau : Les Montres sacrés. n Anouilh : Léocadia. n Après leur errance scandinave, ils élisent domicile à New York. n Maître Puntila et son valet Matti (Herr Puntila und sein Knecht Matti). n La Résistible Ascension d’Arturo Ui (Der aufhaltsame Aufstieg des Arturo Ui). n Création à Zurich de Mère Courage, version sans chansons. n Charte de l’Atlantique entre Roosevelt et Churchill. n Attaque japonaise à PearlHarbour. n L’Allemagne et l’Italie déclarent la guerre aux États-Unis. n Début de la contre-offensive soviétique. n Jouvet quitte Paris. n Dullin dirige le Théâtre de la Cité (ex Sarah Bernhardt). n Comme beaucoup d’écrivains en exil, il va vivre à Hollywood et travailler pour le cinéma, notamment sur une adaptation de La vie de Galilé avec Charles Laughton. n Les Visions de Simone Machard (Die Gesichte des Simone Machard). n Port de l’étoile jaune imposé aux juifs de la zone occupée. n Occupation de la zone libre par l’armée allemande. n Bataille de Stanlingrad. n Mobilisation des Lorrains et des Alsaciens dans l’armée allemande. n Camus : L’Étranger. n Schweik dans la Seconde Guerre mondiale (Schweyk im zweiten Weltkrieg). n Capitulation allemande à Stalingrad. n Instauration du service de travail obligatoire en France. n Staline devient Maréchal de l’URSS. n Capitulation germano-italienne en Tunisie. n Capitulation de l’Italie qui déclare la guerre à l’Allemagne. n Sartre : Les Mouches. n Giraudoux : Sodome et Gomorrhe. n Mort d’André Antoine. 1940 1942 1943 LETTRES, SCIENCES, ARTS n Grand-peur et misère du IIIe Reich (Furcht und Elend des Dritten Reiches). n La vie de Galilée (Leben des Galilei). n La Bonne âme du Sichuan (Der gute Mensch von Sezuan). n Nouvelle édition d’Homme pour homme, version de 1931 encore modifiée dans le 1er volume des œuvres complètes, éditions Malik, Londres. 1939 1941 EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES BERTOLT BRECHT n Le Cercle de craie caucasien (Der kaukasische Kreidekreis). 1948 1949 LETTRES, SCIENCES, ARTS n Conférence de Yalta. n Mort de Roosevelt, Truman pdt. n Organisation de L’ONU. n Pétain se constitue prisonnier. n Execution de Mussolini. n Suicide d’Hitler. n Capitulation sans condition du IIIe Reich à Reims et à Berlin. n Bombe atomique sur Hiroshima et Nagasaki. n Le Japon demande l’armistice. n Gouvernement de Gaulle. n Camus : Caligula. n Giraudoux : La Folle de Chaillot n Vilar met en scène La Danse de mort de Strindberg n Mort de Paul Valery et de Bela Bartók. n Adoption du Plan Monnet. n Vincent Auriol : président de la République. n Plan Marshall. n Exodus : 5000 juifs clandestins partent pour la Palestine. n Indépendance de l’Inde et du Pakistan. n Grèves violentes en France. n Plan de partage de la Palestine par l’ONU. n Genet : Les Bonnes. n Camus : La Peste. n Gide reçoit le Prix Nobel. n 1er Festival d’Avignon : Vilar monte Richard II. n Jean-louis Barrault met en scène Le Procès. n Petit Organon pour le théâtre. Dans cette œuvre, Brecht va exprimer sa théorie du Théâtre épique et de la distanciation, thèmes qu’il avait déjà abordés dans ses Lehrstückes. n Assassinat de Gandhi. n Terrorisme arabe et juif en Palestine. n Création de l’OECE. n Proclammation de l’Etat d’Israël, reconnu par les États-unis et l’URSS. n Début du blocus de Berlin. n Truman réélu président des États-unis. n Suicide d’Antonin Artaud n Sartre : Les Mains sales n Vian : J’irai cracher sur vos tombes n Claudel : Partage de midi n Brecht obtient la nationalité autrichienne, s’installe à Berlin Est et fonde avec Hélène Weigel le “Berliner Ensemble”, leur troupe officielle, installée au Deutches Theater. n Les Jours de la Commune (Die Tage der Commune). n Signature du Traité de l’Atlantique Nord. n Israël admis à l’ONU. n Les soviétiques lèvent le blocus de Berlin. n Promulgation de la loi fondamentale de la RFA. n Mao : président de la République populaire chinoise. n Proclamation de la RDA. n n n n n La Dialectique au théâtre, Essai. n Fondation du FLN en Algérie. n Retour au pouvoir de Churchill. n Emeutes anti-françaises à Casablanca. n Ionesco : La Leçon. n Sartre : Le Diable et le Bon Dieu n Vilar au TNP. n Mort de Gide, Jouvet et de Ludmilla Pitoëff. n Nouveau remaniement d’Homme pour homme, édition de la version de 1953 dans le volume 2 des Premières pièces, éditions Suhrkamp, Berlin/ouest. n Mort de Staline. n Démission de David Ben-Gourion en Israël. n René Coty : président de la République Française. n Intervention de l’armée soviétique en RDA et à Berlin-Est. n Beckett : En attendant Godot. n Ionesco : Victimes du devoir. n Claudel : Christophe Colomb. n Giraudoux : Pour Lucrèce. n Mort de Colette, Bernstein, Prokofiev, Dufy. n Découverte des manuscrits esséniens de la mer morte. 1945 1947 EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES n Antigone. n En octobre, dans une Amérique où le Maccarthysme bat son plein, il comparait devant la “Commission des activités anti-américaines” à cause de ses idées marxistes. Il va décider son retour en Europe. Il transite par la Suisse, les autorités alliées lui refusant son entrée en Allemagne de l’ouest. Claudel : Le Pain dur. Genet : Haute surveillance. Pitoëff : Notre théâtre. Mort de Dullin, de Copeau. 1951 1953 BERTOLT BRECHT 1954 LETTRES, SCIENCES, ARTS n Turandot, ou le congrès des blanchisseurs (Turandot oder der Kongress der Weisswäscher). n Brecht reçoit le prix Staline et entreprend da publication de ses œuvres complètes. n Le Berliner Ensemble présente Mère Courage de Brecht au Premier festival international de Paris (ex-Théâtre de la Ville). n Campagne contre la misère lancée par l’abbé Pierre. n Gouvernement Pierre MendèsFrance. n Accords de Genève : Armistice en Indochine et partage du Viêt-nam. n Autonomie interne de la Tunisie. n Vague d’attentats en Algérie. n Fin du Mac Carthisme. n Dernière édition de la version de 1953 dans le volume 2 des Pièces, éditions Aufbau, Berlin/DDR. n L’Égypte interdit le canal de Suez aux navires israëliens. n Chute du gouvernement Mendes-France : gouvernement Edgar Faure. n Apartheid n Churchill quitte le pouvoir. n Attaque du FLN contre des centres européens du Constantinois. n Indépendance du Cambodge n Fin du protectorat sur le Maroc. n Ionesco : Jacques ou la soumission. n Beckett : Nouvelles et textes pour rien. n Mort de Claudel, Honneger et Einstein. n Voyage à Milan pour voir la mise en scène de L’Opéra de quat’sous par Giorgio Strehler. n 14 août, Brecht meurt à Munich. Sa femme continuera à diriger le Berliner Ensemble. n Gouvernement Guy Mollet. n Indépendance du Maroc et de la Tunisie. n Programme de révolution algérienne du FLN. n Insurrection de Budapest. n L’armée soviétique est en Hongrie. n Seconde guerre israëlo-égyptienne. n Eisenhower élu président des États-Unis. n Genet : Les Bonnes. n Ionesco : L’Impromptu de l’Alma. n Mort d’Utrillo. 1955 1956 EVÉNEMENTS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES LA MUSIQUE DE SCÈNE DE PAUL DESSAU Extrait de Histoire de la musique occidentale, Brigitte et Jean Massin, FAYARD « Le plus exclusivement « brechtien » des compositeurs de Brecht est sans doute Paul Dessau (1894-1979), qui se plaisait à reconnaître comment, grâce au dramaturge, il avait pu définir enfin clairement son art et sa conscience politique. Après avoir fait une carrière de direction dans l’Allemagne de Weimar (Hambourg, Cologne, Mayence, Berlin) et un début comme compositeur de musique de film, il s’était frotté au sérialisme grâce à Leibowitz, rencontré à Paris en 1933, et fit la connaissance de Brecht aux USA en 1942. Il compose la partition musicale d’une des plus belles pièces de Brecht, Mère Courage (1946), ainsi que celle de deux autres pièces (Le Cercle de craie caucasien, 1954 ; Maître Puntila, 1966). Marxiste convaincu, il s’installe à Berlin-Est après la guerre et cherche à transposer ses convictions politiques sur son champ d’action professionnel. Comme chez Eisler, la musique doit pour lui « provoquer » et mettre les sens en éveil ; elle ne doit ni prendre le pas sur le texte, ni lui être bêtement soumise, mais doit en revanche « interpréter » le réel et aider le spectateur à prendre position. » 22 PARCOURS D’ACTEURS CARMEN-MAJA ANTONI, en 1956, fait ses débuts à la télévision pour enfants, elle a 11 ans. En 1962, elle entre à l’École du Film de Babelsberg. En 1964, au théâtre, elle joue Groucha dans Le Cercle de craie caucasien. Elle est couronnée comédienne de l’année 1975 pour son interprétation d’Eva dans Maître Puntila et son valet Matti, au Berliner Ensemble, où elle est engagée en 1977. Elle y a plus de cinquante rôles à son actif, dont la Chen Té de La Bonne Âme du Sé Tchouan, ou Lucy de L’Opéra de quat’sous. Sous la direction de Claus Peymann, elle joue Mère Courage depuis 2005. Sa présence dans des productions télévisées et des séries policières contribue à son succès populaire. Elle enseigne à la Ernst-Busch Schule, l’école de comédie et de mise en scène la plus réputée d’Allemagne. MANFRED KARGE a été engagé au Berliner Ensemble par Helene Weigel en 1963 à l’âge de 25 ans, tout comme son ami Matthias Langhoff. Immédiatement, ils y réalisent ensemble Petit Mahagonny, puis Le Commerce de pain et inventent une nouvelle façon de lire et de porter Brecht à la scène. Après le Berliner Ensemble, pendant vingt ans, leurs noms semblent inséparables, à la Volksbühne avec Benno Besson et Heiner Müller, puis aux côtés de Claus Peymann au Schauspielhaus Bochum où ils signent leur dernière mise en scène commune en 1984. Manfred Karge accompagne alors Claus Peymann au Burgtheater à Vienne, puis revient avec lui au Berliner Ensemble. En France, depuis 1972, Manfred Karge est bien connu des amateurs de théâtre, comme metteur en scène : Le Commerce de pain, La Bataille, Le Prince de Hombourg… ; comme acteur : Woyzeck au Festival d’Avignon… Et comme auteur dramatique: Marief Guittier, depuis vingt-cinq ans, dirigée par Michel Raskine, joue Jacke wie Hose/Max Gericke… Aujourd’hui au Berliner Ensemble, il met en scène Schweyk dans la Seconde Guerre mondiale ou Les Dialogues d’exilés de Bertolt Brecht, et interprète de grands rôles comme celui de Mauler dans Sainte Jeanne des abattoirs. CLAUDIA BURCKHARDT est née en 1953 à Berne. Après ses études au Conservatoire de musique et de théâtre de Berne, elle joue aux théâtres de Bochum, de Cologne et de Stuttgart. Elle est membre du Berliner Ensemble depuis 2011. RAPHAEL DWINGER est né en 1986 à Munich. Formé à la Folkwang-Schule, à Bochum, il est engagé au Berliner Ensemble en 2013 où il joue le Templier dans Nathan le Sage de Lessing et vient de participer à la création par Claus Peymann du Procès de Kafka. MICHAEL KINKEL est né en 1950 à Leipzig. Après un apprentissage de serrurier, il fait ses études de comédien à l’École supérieure Ernst Busch de Berlin. De 1974 à 1983, il joue au Landestheater de Halle. Puis, pendant quelques années, il travaille au cabaret, avant d’être engagé au théâtre de Meiningen. Depuis 2000, il est membre du Berliner Ensemble. URSULA HÖPFNER-TABORI est originaire de Hanovre où, de 1967 à 1971, elle se forme à la danse. Elle entre aux ballets Kresnik à Brême, puis au théâtre de Hanovre. Compagne de travail et de vie de George Tabori, elle est associée à la plupart de ses aventures théâtrales. Claus Peymann l’engage d’abord au Burgtheater à Vienne puis, en 1999, au Berliner Ensemble. GUDRUN RITTER, née en 1936 à Marienberg, a fait ses classes de comédie à l’École supérieure de théâtre de Leipzig. Elle a joué pendant de longues années à Berlin au Deutsches Theater et au Berliner Ensemble et collaboré à de nombreux films et productions de télévision. ROMAN KAMINSKI est né en 1951 à Dresde. Après un apprentissagede typographe, il fait ses études de comédien à l’École supérieure Ernst Busch de Berlin. Il débute au Deutsches Theater, à Berlin, puis il joue au Burgtheater, à Vienne. Avec Claus Peymann, en 1999, il entre au Berliner Ensemble. 23 MICHAEL ROTHMANN, comédien amateur à Erfurt depuis l’âge de 14 ans, a été formé à la Ernst-Busch Schule. Engagé en 2000 au Berliner Ensemble, il y a déjà tenu plus de 40 rôles, sous la direction de Peter Stein dans Wallenstein de Schiller, de Robert Wilson dans Léonce et Léna de Büchner, de George Tabori dans En attendant Godot de Beckett et de Claus Peymann dans Richard II de Shakespeare. MARKO SCHMIDT, né en 1977 à Prenzlau, fait ses études de comédien à l’École supérieure de théâtre Ernst Busch à Berlin. Depuis 2003, il est membre du Berliner Ensemble. MARTIN SCHNEIDER, né en 1959, fait ses études à l’École supérieure de musique et de théâtre de Hanovre. Il a joué, entre autres lieux, au Landestheater de Tübingen, au Städtische Bühnen de Nuremberg, au Théâtre de Bâle et au Schauspielhaus de Düsseldorf. Depuis 2006, il est membre du Berliner Ensemble. VEIT SCHUBERT est né en 1960 à Pirna. Après une formation de comédien, il joue pendant trois ans au Staatstheater de Schwerin. Depuis 1989, il est membre du Berliner Ensemble. Depuis 1997, il enseigne à l’École supérieure de théâtre Ernst Busch. KARLA SENGTELLER est née à Brême en 1990. Formée à l’université des Arts de Berlin, elle est engagée en 2013 au Berliner Ensemble où, sous la direction de Jutta Ferbers, elle joue dans Lait noir de l’aube - Le poète Paul Celan. Elle a commencé à reprendre divers rôles du répertoire, dans La Cruche cassée d’Heinrich von Kleist, dans L’Éveil du printemps de Frank Wedekind et dans Mère Courage. MARTIN SEIFERT, élève de la Ernst-Busch Schule de 1971 à 1974, est comédien permanent du Berliner Ensemble depuis 1978. Il a joué dans La Résistible Ascension d’Arturo Ui, mis en scène par Heiner Müller et présenté au TNP de Villeurbanne et au Théâtre de la Ville de Paris. AXEL WERNER, né en 1945 à Berlin, quitte l’école en cours de scolarité et, pendant trois ans, travaille comme boulanger. Il débute au théâtre comme machiniste, joue de petits rôles et finit par faire des études de comédien à la Staatliche Schauspielschule de Berlin. Il joue à Senftenberg, Magdebourg, Schwerin, puis à Berlin, d’abord à la Volksbühne et, depuis 1988, au Berliner Ensemble. 24 CLAUS PEYMANN metteur en scène & intendant général Le nom de Claus Peymann est inséparable de très grandes dates de la mise en scène et de l’écriture dramatique de langue allemande : le 8 juin 1966, par exemple, date à laquelle il entre dans l’histoire du théâtre, à l’âge de 29 ans, en créant Outrage au public, la toute première « pièce parlée » de Peter Handke au Theater am Turm de Francfortsur- le-Main. © Peter Sierigk Du même Peter Handke, La Chevauchée sur le lac de Constance marque sa brève participation à la fondation de la Schaubühne am Halleschen Ufer à Berlin en 1971. Puis ce fut, au Schauspielhaus de Hambourg, la création des Hypochondres, la première pièce de Botho Strauss, et Une fête pour Boris, la première pièce de Thomas Bernhard. Depuis lors, c’est-à-dire depuis le début des années 1970, où qu’il fût, Claus Peymann apporta à Thomas Bernhard les moyens de production dont il disposait, son énergie, son talent de metteur en scène et les meilleurs interprètes de langue allemande pour assurer la première publique d’une douzaine de pièces. Il assura ainsi la naissance au public de l’œuvre de Thomas Bernhard, mais aussi celle de Peter Handke, d’Elfriede Jelinek, de Peter Turrini, de Franz Xaver Kroetz, de Christoph Ransmayr… Intendant général du Württembergisches Staatstheater de Stuttgart de 1974 à 1979, du Schauspielhaus de Bochum de 1979 à 1986, du Burgtheater de Vienne de 1986 à 1999 et maintenant du Berliner Ensemble, ses spectacles ont été présentés aux festivals de Téhéran et de Tokyo, au Shakespeare Festival de Stratford, à la Biennale de Venise, au Bitef de Belgrade et au Holland Festival. À vingt reprises, ils ont figuré dans la très rigoureuse sélection du Theatertreffen de Berlin. L’Odéon-Théâtre de l’Europe l’invita à donner la première représentation en France d’une pièce rare de Heinrich von Kleist, La Bataille d’Arminius, car son engagement radical aux côtés des poètes dramatiques contemporains ne l’a jamais détourné des classiques européens, en particulier Shakespeare, Kleist, Schiller et Goethe. Récemment, il a monté une version théâtrale du Procès de Kafka. Depuis qu’il dirige le Berliner Ensemble, le répertoire est constitué à parts égales d’œuvres classiques et de pièces de dramaturges contemporains allemands. Trente-six spectacles sont actuellement à l’affiche dans cinq lieux, signés par Claus Peymann et une douzaine de metteurs en scène invités, notamment Robert Wilson, Peter Stein, Peter Zadek, Luc Bondy, Thomas Langhoff, Manfred Karge… JUTTA FERBERS dramaturge Née en 1957 à Cologne, Jutta Ferbers est engagée en tant que dramaturge d’abord à Landshut puis, à partir de 1983, au Schauspielhaus de Bochum que dirige alors Claus Peymann. En 1986, elle accompagne Claus Peymann et Hermann Beil à Vienne. Elle y participe notamment à la production de Richard III de Shakespeare, de Place des héros de Thomas Bernhard, ainsi qu’à la création des pièces de Peter Handke, L’Heure où nous ne savions rien l’un de l’autre. Outre sa collaboration permanente avec Claus Peymann, elle travaille également avec les metteurs en scène Ruth Berghaus, Achim Freyer, Leander Haußmann, Hans Neuenfels, Tamás Ascher, Peter Zadek, George Tabori et Robert Wilson. Depuis 1999, elle est dramaturge et membre de la direction du Berliner Ensemble. Elle y met en scène des pièces de Peter Handke, Kurt Tucholsky, Jean Anouilh, et des soirées Wilhelm Busch, Frank Wedekind, Heinrich Heine et Paul Celan. 25 26 ET LE REQUIN, IL A DES DENTS… Depuis sa première apparition sur la scène du Berliner Ensemble en 1963 sur le ring d’un Petit Mahagonny où il jouait Joe-Loup de l’Alaska, Manfred Karge a mis en scène dix-sept pièces de Brecht dont il a interprété – et chanté – quelques-unes des grands rôles, il a exploré les recoins secrets des œuvres fragmentaires, il s’est construit son répertoire de comédien-chanteur… Pour cette tournée d’automne du Berliner Ensemble à Paris, Manfred Karge a passé en revue les œuvres dramatiques de Brecht pour y cueillir au passage des songs, des poèmes, des ballades, des chœurs, et tracer avec le concours de neuf comédiens-chanteurs et quatre musiciens un parcours théâtral, lyrique et musical : de la prime jeunesse à l’âge mûr, de la rébellion à l’engagement, de la complainte populaire à la marche militante, du plus connu – La Complainte de Mackie ou Le Chant des Canons… au plus secret – La Ballade de la comtesse et du garde forestier que chantent les femmes du domaine de Puntila ou la petite Chanson du Père Josèphe dans Les Jours de la Commune. Ce programme comporte quelques airs majeurs extraits de pièces fort peu jouées en France comme Têtes rondes et têtes pointues ou Schweyk dans la Seconde Guerre mondiale. Manfred Karge sera lui-même en scène en compagnie d’Alain Libolt qui conduira en français cette revue sur des airs de Kurt Weill, Paul Dessau, Hanns Eisler, Hans Dieter Hosalla, Tobias Schwencke… n La Condamnation de Lucullus / Claudia Burckhardt, Ursula Höpfner-Tabori, Karla Sengteller, Katharina Susewind, Roman Kaminski, Manfred Karge, Michael Rothmann, Martin Schneider, Veit Schubert, Jörg Thieme & Alain Libolt AVEC PAUL DESSAU / TOBIAS SCHWENCKE Le Grand Lucullus est mort n Têtes rondes et têtes pointues / HANNS EISLER De l’action vivifiante de l’argent La Chanson de la prostitution Ah, comme je souhaitais que ne finisse jamais mon enfance n La Résistible Ascension d’Arturo Ui / Tobias Schwencke PIANO Silke Eberhard SAXOPHONE, CLARINETTE Cathrin Pfeifer ACCORDÉON Jo Bauer PERCUSSIONS HANS DIETER HOSALLA La Chanson du coup de peinture n Mère Courage et ses enfants / PAUL DESSAU La Chanson de la femme et du soldat La Chanson de la fraternisation n La Bonne Âme du Sé-Tchouan Manfred Karge Bertolt Brecht, Kurt Weill, Paul Dessau, Hanns Eisler, Hans Dieter Hosalla DIRECTION MUSICALE Tobias Schwencke COSTUMES Wicke Naujoks CONCEPTION & MISE EN SCÈNE MUSIQUES DE PAUL DESSAU / TOBIAS SCHWENCKE La Chanson de la vulnérabilité des Dieux et des Bons n Maître Puntila et son valet Matti / PAUL DESSAU La Chanson du forestier et de la belle comtesse n Dialogues d’exilés Les hommes, voilà ce qui fait échouer toutes les grandes idées n Schweyk dans la Seconde Guerre mondiale / PROGRAMME n Baal / BERTOLT BRECHT Choral de l’homme Baal n Un homme est un homme Monsieur Brecht l’affirme… n L’Enfant d’éléphant / TOBIAS SCHWENCKE Ah, ce qu’on s’amusait en Ouganda n Mahagonny / KURT WEILL Havannas Lied n L’Opéra de quat’sous / KURT WEILL Complainte de Mackie Messer Chant des canons La fiancée du pirate ou le rêve d’une fille de cuisine n Happy End / KURT WEILL Ball de Bill à Bilbao n La Mère / HANNS EISLER Ils ont des lois et des décrets… HANNS EISLER La Chanson de la femme du soldat nazi Le Miserere allemand La Chanson de la Moldau n Le Cercle de craie caucasien / PAUL DESSAU Toi que j’aime, toi que j’aime… n Les Jours de la Commune / HANNS EISLER Aucun ou bien tous La Chanson de l’extra Jour de Pâques à Bal-sur-Seine & Happy End / KURT WEILL La Chanson de Surabaya Johnny 27 28 REPÈRES BIBLIOGRAPHIQUES ŒUVRES THÉÂTRALES • Brecht, Bertolt, Gesammelte Werke, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1967. • Brecht, Bertolt, Werke. Grosse kommentierte Berliner und Frankfurter Ausgabe, Suhrkamp Verlag et l’Aufbau Verlag, 1988. • Brecht, Bertolt, Théâtre complet, Paris, L’Arche Éditeur, 1975-1979. • Brecht, Bertolt, Fatzer, fragment, montage de Heiner Müller, Paris, L’Arche Éditeur, 1989. POÈMES • Brecht, Bertolt, Poèmes, Paris, L’Arche Éditeur, 9 volumes. ÉCRITS THÉORIQUES ET CRITIQUES • Brecht, Bertolt, Écrits sur le théâtre, Paris, L’Arche Editeur, 1972 et 1979 (2e édition), 2 volumes. ÉTUDES CRITIQUES PORTANT SUR L’ENSEMBLE DE L’ŒUVRE • Benjamin, Walter, Essais sur Bertolt Brecht, Paris, Maspero, 1969 • Dort, Bernard, Lecture de Brecht, Paris, Seuil, 1960. • Szondi, Peter, Théorie du drame moderne, Lausanne, L’Âge d’Homme, 1983, p. 97-103. • Bertolt Brecht, I et Il, sous la direction de B. Dort et J.F. Peyret, Cahiers de l’Herne, n° 35/1 et 35/2, l’Herne, Paris, 1979-1982. REVUES • La Nouvelle critique 1970. Entretiens avec Bernard Sobel et Jacques Rosner, page 89. • Le destin de Brecht, du brechtisme et du Berliner Ensemble par Jean Jourdheuil. Théâtre Public N°195 Théâtre et politique : la crise tombe-t-elle du ciel ? mars 2010 29