Le partenariat et les réseaux

publicité
AR.I.A.NE / Initiatives
1
LE PARTENARIAT et LES RESEAUX
1. Les nouveaux visages du partenariat dans l’action sociale et
médico-sociale
a. Le schéma traditionnel
Des établissements ou des structures ont été fondés pour fournir des soins ou
des services spécialisés, dans le secteur public ou privé.
Chaque usager s’adresse ou est adressé à l’un de ces établissements ou services
selon la nature de sa maladie ou de son handicap.
Les établissements ou services peuvent fonder d’autres établissements ou
services, en fonction des besoins constatés.
• Un hôpital psychiatrique pouvait se préoccuper du retour en milieu
professionnel. Il était ainsi amené à créer un ou plusieurs CAT (ce que
l’on appelle aujourd’hui un ESAT) pour ses anciens patients.
• Une association qui gère un Foyer d’enfants handicapés ou un IME peut
créer un établissement pour adolescents, puis pour jeunes adultes, puis
pour adultes vieillissants…
L’ensemble de ces structures est souvent peu cohérent. Les structures les plus
performantes recrutent sur une zone géographique étendue, les autres dans leur
environnement immédiat : les hôpitaux locaux par exemple perdent leur
clientèle de malades et deviennent des hospices pour personnes âgées
« démentes », ces hospices recevant également des malades mentaux
chroniques et des handicapés mentaux.
Les pratiques sont enseignées à l’origine par imprégnation : ce sont les groupes
d’intervenants qui forment les jeunes. Un diplôme national est souvent créé par
la suite, assurant ainsi la reconnaissance d’un nouveau métier (ex. Assistantes
sociales)
Ces filières de recrutement qui peuvent coexister ont tendance à privilégier le
statu quo et le corporatisme.
Les partenariats restent limités à ce qui paraît indispensable à tel ou tel chef de
service ou directeur d’établissement particulièrement bien informé et novateur.
Les réseaux peuvent être développés : fournisseurs, lieux de séjour, praticiens
médicaux et paramédicaux figurant dans les carnets d’adresses des intervenants.
Ils peuvent parfois infléchir en partie les objectifs institutionnels eux-mêmes.
Le travail éducatif ainsi que le travail social ont toujours généré des réseaux,
même si ces réseaux n’étaient pas désignés comme tels. Une journée portes
ouvertes, une exposition de travaux réalisés par les personnes accueillies, a
toujours été l’occasion d’élargir le réseau des amis de l’établissement.
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
2
• Un ESAT, par exemple, peut devenir fournisseur de main d’œuvre ou de
pièces pour des artisans ou de petites entreprises de son environnement.
• Une pharmacie locale peut acquérir le monopole de la fourniture des
médicaments dans une maison de retraite, ou un hôpital local.
• Un directeur d’établissement pour handicapés peut passer des contrats
avec une compagnie de taxis.
Le risque principal est bien sûr la méconnaissance des ressources et des besoins
réels des personnes accueillies ou accompagnées. L’exemple des établissements
pour « sourds-muets » qui ont longtemps refusé la langue des signes est
particulièrement parlant mais on peut en dire autant de ceux accueillant des
enfants autistes ou des services psychiatriques enfermant les malades de façon
quasi définitive1. Le poids de l’institution constitue alors un frein tel que
l’expérimentation et l’innovation en matière d’accompagnement ou de soin en
sont exclues quelles que soient la compétence et la volonté de chacun des
acteurs.
Jusqu’en 1975 et 1989 (actualisation du décret de 56 diminuant la place dévolue
au « soin » dans le secteur médicosocial), les acteurs du soin monopolisent le
pouvoir dans la majorité des services et établissements.
b. De nouvelles logiques
Dès avant 2002, mais de manière irréversible depuis la loi 2002-22, les politiques
sociales et médico-sociales affichent la volonté de changer radicalement leurs
logiques.
Bien entendu, l’introduction de ces nouvelles logiques ne va pas de soi et les
institutions résistent toutes au changement, même s’il est légitime.
La première de ces logiques est que l’intervention doit répondre aux besoins et
aux demandes de la personne elle-même ou représentée par sa famille ou par
une personne de son choix (la personne de confiance).
La nécessité de répondre aux besoins et aux demandes de la personne concernée
est rendue visible et opérationnelle dans le cadre d’un « projet personnel » dont
les caractéristiques essentielles sont :
• d’être un projet global, incluant les aspects environnementaux,
organiques et psychiques du handicap ou de la pathologie en cause.
• d’être le projet de l’usager lui-même, quel qu’il soit, puisque son opinion
« éclairée » est requise et que ses choix doivent être respectés.
• Dans certains cas, ce sont les proches, famille ou familiers, de l’usager
qui seront consultés.
1
Un peu comme si les sanatoriums avaient réussi en 1945 à interdire le traitement de la tuberculose par la
pénicilline !
2
La loi de 2002 a été longuement préparée par les décideurs politiques. Elle fut suivie par d’autres lois et
recommandations qui vont dans le même sens, en précisant certaines de ses conséquences vis-à-vis de secteurs
ou de publics particuliers. Citons la loi sur les majeurs vulnérables (appelés autrefois « incapables »), le plan
Santé Mentale, le plan Alzheimer, et la loi Hôpital, Patient, Santé, Territoire.
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
3
La deuxième de ces logiques est que toute personne doit pouvoir trouver dans
son environnement un « panier de services » pouvant la concerner, compte-tenu
de l’évolution de son état et/ou de son projet et l’aider à mettre de projet en
œuvre.
Ce « panier de services » devra permettre de choisir parmi l’offre de services
ceux qui correspondent le mieux à ses demandes et à ses besoins, au projet qui
est le sien.
La troisième logique est que toute pratique ou intervention, médicale,
médicosociale ou sociale, doit être reconnue comme porteuse d’effets positifs
pour telle ou telle personne, chaque pratique suivie par la personne, chaque
activité proposée doit pouvoir être évaluée en fonction de ces effets positifs.
Cette reconnaissance peut être octroyée par des instances comme l’ANESM
(Agence Nationale de l’Evaluation Sociale et Médico-sociale) qui valide les « bonnes
pratiques ». Ces « bonnes pratiques » sont celles qu’une commission d’experts a
désignées comme telles et qui sont proposées à l’ensemble des intervenants dans un
domaine précis.
(Il peut exister également une autre forme de reconnaissance établie par le
consensus des équipes. Il en est ainsi souvent des activités « artistiques » ou de celles
concernant les animaux familiers dans les établissements pour personnes âgées. Dans
un autre domaine, une ostéopathe a été récemment recrutée dans une maternité alors
que cette discipline est encore ignorée et contestée par beaucoup de praticiens.)
Les conséquences de ce remaniement considérable de la prise en soin et de
l’accompagnement des personnes dans les structures sanitaires ou sociales sont
particulièrement évidentes en ce qui concerne le partenariat. Il est évident qu’aucun
service ou établissement ne peut désormais prétendre disposer seul de toutes les
réponses au projet personnalisé d’une personne, aussi bien dans le présent qu’en tenant
compte de ses modifications prévisibles.
Des partenariats sont à envisager de façon organique :
• avec les services situés en amont
• avec d’autres structures dans le moment actuel
• avec d’autres personnes et d’autres services en anticipant le futur, ce qui,
après tout, est la caractéristique essentielle d’un projet.
De la même façon, la plupart des échecs des projets d’insertion ou de rééducation
son à imputer au non partenariat entre acteurs du soin et acteurs de l’éducation ou de
l’insertion.
2. Les conséquences organisationnelles des nouvelles logiques du
partenariat
Partenariat décrétés et partenariats observés
Pour permettre aux personnes concernées de bénéficier de ce « changement de
paradigmes », il s’est avéré nécessaire d’organiser les réponses à l’échelle du
territoire, ou plutôt des territoires, en allant du territoire local à la Région, en passant
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
4
par le département. Ces territoires ont été définis à la fois sur des bases administratives
et politiques, et sur les tendances fournies par les observatoires démographiques,
épidémiologiques et sociaux existants ou créés dans ce but. La territorialité inscrit l’ac
et l’équité des réponses proposées comme des principes organisateurs.
C’est le pouvoir politique qui a la charge de déterminer l’organisation de la
solidarité, de la santé, de la protection sociale à l’échelle qui est la sienne.
Chaque personne concernée devra trouver, au moins au niveau de son
département3, une instance où exprimer ses demandes et où ses besoins seront évalués.
Cette personne devrait également pouvoir disposer de propositions et d’orientations
vers les établissements et services les plus pertinents vis-à-vis de sa pathologie, mais
aussi des ressources de son environnement et de son histoire particulière :
Les Maisons Départementales pour les Personnes Handicapées (MDPH), les
Maisons pour l’Autonomie et l’Intégration des Malades Alzheimer (MAIA) ont été
inventées pour fournir aux personnes concernées un lieu où exprimer leurs souhaits et
leurs démarches, un lieu de bilan global et un lieu pour les aider à choisir dans le
« panier de services » du territoire. Ces structures sont relativement récentes et l’une
de leurs missions est « d’organiser le partenariat » en fonction des besoins et des
demandes des personnes concernées.
Peut-on « organiser le partenariat » ? Certains se sont légitimement posé la
question puisque le partenariat suppose, en dépassant la définition du Petit Robert4, un
accord sur les finalités de l’intervention, ainsi que sur les pratiques de suivi éducatif ou
thérapeutique. Si l’on veut aller au-delà d’un accord formel, il est évident que les
pratiques éducatives des établissements et équipes réelles sont parfois très éloignées
les unes des autres.
Cette disparité entre les établissements et les services ne peut être ignorée :
comment, par exemple, envisager un partenariat entre une équipe hospitalière qui s’est
enkystée depuis de nombreuses années dans des appartements thérapeutiques n’offrant
d’autres finalités que celle de fournir un abri à des malades mentaux chroniques et une
autre équipe considérée comme novatrice en matière de réhabilitation psychosociale de
personnes sortant de traitement psychiatrique ? Comment parler de partenariat entre tel
CER (Centre d’Education Renforcée) et tel Foyer de l’enfance, ces deux structures
relevant d’instances différentes et se situant sur des options éducatives pratiquement
opposées ?
L’expérience est pourtant là pour démontrer que l’incitation au partenariat peut
amener les équipes à revisiter leurs projets de service et à s’accorder sur des
« principes supérieurs communs »5 à partir desquels les professionnels peuvent
refonder des pratiques cohérentes.
L’incitation au partenariat par les politiques et par les textes et documents
législatifs est souvent suffisante pour permettre des changements qui n’auraient pu se
faire dans le cadre d’équipes ou d’institutions « closes » ou simplement habituées à
l’isolement.
3
Ou de son « bassin de vie »
« Association d’entreprises, d’institutions en vue de mener une action commune »
5
Boltanski et Thévenot : « De la justification : les économies de la grandeur», NRF Essais, Gallimard, avril
1991
4
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
5
Pour que le « partenariat » recherché favorise la mise en mouvement des équipes
dans la recherche en commun de l’intérêt réel des enfants ou des adultes qui leur sont
confiés, plusieurs conditions doivent être réunies sur lesquelles nous reviendrons.
Avant de passer à ce point, nous pouvons évoquer quelques partenaires habituels ou
souhaitables.
3. Les acteurs des structures éducatives, sociales ou médicosociales qui peuvent devenir partenaires en co-opérant.
a. La personne « aidée », accompagnée, soignée »…
Au premier rang des partenaires d’une intervention sociale ou médico-sociale, on
doit trouver la personne concernée elle-même.
Cette affirmation, qui est celle de l’O.M.S. (Organisation Mondiale de la Santé)
quand elle affirme que le malade est le principal expert de sa maladie, est transposable
dans tous les domaines de l’intervention sociale ou médico-sociale. Dans le domaine
des psychothérapies par exemple où l’on sait que les théories sont souvent en
opposition les unes avec les autres et que les pratiques sont parfois divergentes, un
point essentiel paraît faire consensus : aucune démarche n’est possible en dehors d’une
« alliance » entre le thérapeute et son patient. On peut noter que la notion « d’alliance
thérapeutique », qui prend acte du fait que la personne concernée est dotée d’un
psychisme, d’intelligence et d’imagination, est admise dans le cadre de traitements
médicaux de maladies organiques graves.
On peut donc parler, par exemple, « d’alliance éducative » avec les enfants, ou
les adultes en ce qui concerne les démarches d’insertion, de réhabilitation
psychosociale, etc... Sans ce principe, l’éducation serait assimilable à du dressage.
Mais on peut objecter qu’il existe des mesures éducatives « contraintes » de même
qu’il existe des « obligations de soin ». Cette objection est bien entendu prise en
compte, notamment dans le cadre des mesures actuelles concernant la psychiatrie.
Dans certains cas limites, il est difficile de parler de « partenariat » comme dans
le cas de ceux nommés autrefois les « incapables majeurs » ou les personnes âgées
atteintes de la maladie d’Alzheimer, ou encore les enfants mineurs gravement
handicapés ou perturbés. Malgré la difficulté pour engager alors un véritable dialogue,
il est cependant possible, dans la pratique de soin ou d’accompagnement, de maintenir
la relation, de chercher à connaître les attentes, les goûts, les habitudes et les refus des
personnes. Il est également indispensable de s’adresser à elles, de leur parler et de les
informer de ce qui peut les concerner. Par ailleurs, une telle démarche peut être mise
en œuvre avec la coopération d’autres partenaires : la famille et les familiers.
b. Sa famille, son entourage
Le partenariat avec la famille ou les familiers a longtemps été sous-estimé : la
psychiatrie a longtemps attribué les problèmes psychiques à des perturbations
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
6
d’origine familiale et les travailleurs sociaux parlent volontiers des familles
pathogènes, des pères absents et des mères abusives… Le changement de perspectives
qui nous fait naturellement parler des « enfants en danger » plus que des parents
maltraitants nous incite à solliciter le partenariat des parents en matière de soins
comme sur le registre éducatif. Naturellement, cette collaboration souhaitée n’est pas
toujours au rendez-vous. Elle doit cependant rester un objectif de la prise en charge.
Elle est désormais garantie par les textes qui parlent par exemple du rôle de « la
personne de confiance » en ce qui concerne les personnes âgées, ou qui affirment le
maintien de l’autorité parentale dans tous les cas où celle-ci n’a pas été remise en
question par la justice.
c. Les personnes et dispositifs situés en amont et en aval dans
l’environnement actuel de l’intervention
C’est avec ces services et structures que l’absence de collaboration est le plus
visible. Les phénomènes de « patate chaude », d’absence de cohérence et de continuité
dans les prises en charge ont été suffisamment dénoncés. On retiendra au contraire les
partenariats entre dispositifs qui débouchent sur de réels travaux de collaboration à
propos d’un projet personnalisé. Exemple d’un ITEP (Institut Thérapeutique Educatif
et Pédagogique) et d’une MECS (Maison d’Enfants à Caractère Social) engagés dans
un GCSMS (Groupement de Coopération Sociale et Médico-Sociale) en Haute Loire.
On sait que les dispositifs réglementaires favorisant la collaboration entre
dispositifs et services de secteurs différents ont été créés à cet effet :
- les GCS (Groupement de Coopération Sanitaire)
- les GCSMS (Groupements de coopération sanitaire et médico-sociale)…
- On peut citer également les outils du dialogue de gestion entre établissement et
financeurs comme le CPOM (Contrat Pluriannuel d’Objectif et de Moyen)
Non seulement ces dispositifs laissent subsister les entités concernées sans les
faire fusionner ni les absorber, mais ils peuvent concerner en même temps des
structures publiques et privées, ainsi que des structures médicales et sociales.
Outre la possibilité de réaliser des économies d’échelle sur certains secteurs, ce
cadre organisationnel permet un travail de coopération entre les équipes.
Ces groupements sont validés par l’ARS (Agence Régionale de Santé) ou par
l’Etat (préfecture du département)
d. Partenariat, réseau et niveaux de coordination
Les concepts de partenariat et de réseau ne peuvent trouver une légitimité dans le
travail social que s’ils sont intégrés dans des logiques finalisées par la qualité des
services rendus aux usagers. Ils doivent donc être mis en œuvre à trois niveaux : celui
de l’usager et de son projet personnalisé, celui du service ou de l’établissement, dans le
cadre du projet de service ou d’établissement, celui du territoire : territoires de santé,
territoires sociaux.
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
7
Sur chacun de ces niveaux, certains acteurs devront assurer des fonctions et des
tâches de coordination : coordination des partenariats nécessaires au projet
individualisé, coordination des partenaires et des réseaux du service ou de
l’établissement, coordination des structures d’un territoire (cf. le cours sur la
coordination)6.
e. Les services relevant des instances de gouvernement national, régional
ou départemental
Le rapport entre les établissements, services et les services de l’Etat, de la Région
ou du Conseil Général du Département est parfois perçu comme du contrôle ou de la
tutelle. On observe cependant, dans de nombreux cas, que de véritables partenariats
peuvent s’engager. On peut évoquer ici un rôle nouveau, confié à des agents de santé
ou du travail social : celui de « gestionnaire de cas ».
f. Les associations d’usagers
Un travail de coopération peut également être conclu avec les associations
d’usagers : les associations locales France Alzheimer travaillent ainsi avec les
structures d’aide et de soins à domicile de leur département comme avec les
établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Elles participent
également à la création des MAIA et à différentes instances des Agences Régionales
de Santé.
On peut citer également le rôle tenu par l’UNAFAM (Union Nationale des Amis
et des Familles de Malades psychiques), la FNAPPSY (Fédération Nationale des
Associations d’ (ex)Patients en Psychiatrie), ainsi que la place prise actuellement par
l’association « Le Fil d’Ariane».
On sait que le rapport entre les associations d’usagers, les instances politiques et
les structures d’accueil et de soins fut longtemps conflictuel. Actuellement, il tend à
prendre les formes de partenariats efficaces et constructifs, qui, tout en n’éludant pas
les tensions et les possibles conflits, parviennent à construire du consensus et à éviter
l’ignorance et les ruptures.
4. Les obstacles au partenariat
Les obstacles au partenariat sont multiples.
- Les résistances au changement
Elles ont toutes un rapport avec la tentation des institutions à limiter au maximum
les « zones d’incertitude » et à se défier de ce qui vient de l’extérieur. Une équipe
6
Lire à ce sujet l’étude réalisée par la Fondation Paul Bennetot en Février 2011 : « La coordination dans le
champ sanitaire et médico-social - Enjeux organisationnels et dynamiques professionnelles »
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
8
ou un établissement forme un petit monde où chacun a pu trouver une position
professionnelle et affective (les deux registres sont toujours articulés, n’en déplaise
aux puristes) qui lui convient. Pourquoi changer cette situation dont on connaît les
avantages et les inconvénients au profit d’une autre situation que l’on ne connaît
pas ? La seule réponse est bien sûr l’élaboration participative du projet
d’établissement ou du projet de service.
L’incitation au travail en réseau peut également prendre la forme de résistances…
au travail en réseau.
- Les arguments d’ordre éthique
Parmi les obstacles au changement, on peut trouver également des arguments qui
se présentent comme éthiques.
On s’interrogera par exemple sur le droit d’une autorité politique sociale, comme
l’Etat, un Conseil Général, une Mairie à intervenir dans « le colloque singulier » ou
la relation éducative, etc…
On évoquera aussi la règle de confidentialité, redéfinie pour l’usage en « secret
professionnel », pour éviter de transmettre à ses partenaires des informations
concernant un enfant ou un adulte dont on est référent7.
Dans tous les cas, les relations entre services et le travail de coopération s’en
trouveront largement compromis, au nom d’une « éthique » au service du pouvoir
de tels ou tels professionnels et non au service de la personne concernée.
- La concurrence
Citons en dernier ce qui est sans doute le plus important et parfois le fait des
instances de décision elles-mêmes : l’objectif de trouver des réponses aux besoins
et aux demandes des personnes concernées sur un territoire déterminé aboutit
parfois à compromettre le partenariat au profit de son opposé : la concurrence.
concurrence entre services ou entre établissements,
remplacement dans l’organisation de la solidarité sociale de l’évaluation des
pratiques réelles par le recours au procédé commercial de l’appel d’offre qui a
pour effet d’avantager « le mieux disant » sur des critères où les valeurs
économiques devenues prépondérantes l’emportent parfois sur les critères de
pertinence ou même d’efficience. Ce phénomène qui a affecté depuis longtemps
le « marché » de la formation a tendance, libéralisme oblige, à disloquer
également les domaines de la santé, et du travail social, même si l’on a pu
penser que les décisions du Conseil Général des Hauts de Seine (92) de faire
appel à une société d’insertion sociale…islandaise pour faire de l’insertion de
chômeurs de longue durée n’était qu’une mauvaise plaisanterie destinée à
secouer les structures d’insertion déjà présentes sur le territoire.
Fort heureusement, cette tendance paraît actuellement le plus souvent contenue
tant par les opérateurs de terrain que par les décideurs, ainsi que par les services
en charge de la solidarité8.
7
Se reporter sur ce sujet au cours de Martine HADDAD : « Le secret professionnel »
Ceci est peut-être un peu optimiste (voir la lettre d’info du site ASH n° 523 - jeudi 25 août : « Les personnes en
perte d’autonomie font les frais de la rigueur »)
8
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
9
confusion chez les décideurs entre les besoins et les demandes. Les demandes
étant ignorées parce que trop complexes, les personnes sont réduites à un
ensemble de besoins dont la satisfaction est répartie entre des « fournisseurs
sociaux » différents.
5. Les limites de l’injonction gestionnaire au travail en réseau et
en partenariat
a. L’injonction au partenariat et au travail en réseau est présente dans la plupart
des textes relatifs à l’organisation du travail en secteur médicosocial, et social, alors
même que, jusqu’à la période actuelle se sont accentuées la balkanisation des espaces
du social ainsi que l’émiettement des pratiques de professionnels souvent assignés à
une spécialisation relevant plus du Taylorisme que des finalités d’une action éducative
qui demeurent globales.
De nombreux praticiens ont dénoncé les limites de ces injonctions qui semblent
parfois proches des injonctions paradoxales rencontrées dans les processus
pathologiques.
En revenant sur les précautions à prendre quand nous parlons de partenariat et de
réseau, nous nous appuierons sur deux textes qui éclairent bien les écueils que
rencontre, pratiquement, la recherche de partenaires : le premier texte est de Jean
Maisondieu, psychiatre et géronto-psychiatre, dans un article de l’ouvrage « La Santé
Mentale des Français », paru en 2002.9
Le deuxième texte est de Fabrice Dhume, paru en 200510.
Jean Maisondieu montre que les formes actuelles de la « prise en soin » des
personnes âgées démentes risquent d’être assignées au traitement d’un symptôme
particulier. Lorsque des partenariats institués associent des acteurs qui ne perçoivent
qu’un seul élément de la situation, le symptôme leur est désigné comme tel. Or, dit
Jean Maisondieu, la personne démente se sert de ses symptômes pour communiquer.
« Malheureusement les membres du réseau sont incapables de déchiffrer (ces
comportements régressifs), car n’imaginant pas le dément comme un interlocuteur, ils
ne peuvent aucunement considérer ces comportements comme les messages à décoder
d’un sujet à l’expression embarassée par sa pathologie…. »11 La logique du besoin
s’oppose ici à la problématique de la demande.
Jean Maisondieu est rejoint dans cette analyse par Fabrice Dhume (Institut Social
et coopératif de Recherche Appliquée). Dans son article, Fabrice Dhume montre en
outre que l’injonction gestionnaire de travail en réseau, ou en partenariat, lorsqu’elle
intervient dans un espace social émietté entre institutions, établissements et acteurs
séparés, risque fort d’en rester à « l’organisation de la séparation », ce qui rend
inaccessible la finalité du travail social et médicosocial (ainsi que l’intervention en
9
Jean Maisondieu : La Santé Mentale des Français, p.270 – article « Des réseaux pour les personnes âgées »,
Mars 2002
10
Fabrice Dhume : Le travail social en réseau, Avril 2005
11
Jean Maisondieu, ouvrage cité, p.274
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
10
Santé Mentale) : prendre en compte la globalité de la personne humaine et des
phénomènes sociaux.
Patrice LORROT
Revu en septembre 2014
b. Quelques expressions et les questions qu’elles posent
Coopérer
•
•
Travailler conjointement avec quelqu’un
Participer à une œuvre commune
Petit Robert
Coordonner
1. Disposer selon certains rapports en vue d’une fin
2. Lier, réunir
Petit Robert
3. Co-ordonner
Croiser les points de vue
•
•
•
Opposer
Hybrider, mâtiner, métisser,
Aller et venir
Exécuter
•
Mener à effet – ce qui est conçu par soi : projet
par d’autres : ordre
(ex sequi poursuivre)
Petit Robert
Externaliser (un problème, une difficulté)
•
Confier à une entreprise extérieure
Mettre en tension les différences entre acteurs et lieux institutionnels
= ouvrir les questions
• Interface
intermédiaire
Organiser
•
•
•
Mettre chacun dans une fonction déterminée et coordonner des fonctions
Soumettre à une méthode
Diriger
Petit Robert
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
11
Partenariat
« Associations d’entreprises, d’institutions en vue de mener une action commune »
Le Petit Robert
« Le partenariat peut se définir comme un rapport complémentaire et équitable entre
deux parties différentes par leur nature, leur mission, leurs activités, leurs ressources
et leur mode de fonctionnement. Dans ce rapport, les deux parties ont des
contributions mutuelles différentes mais jugées essentielles. Le partenariat est donc
fondé sur un respect et une reconnaissance mutuelle des contributions et des parties
impliquées dans un rapport d’interdépendance. De plus, le partenariat laisse place à
des espaces de négociation, où les parties peuvent définir leur projet commun. »
Dictionnaire critique d’action sociale, Bayard, p.272
Prestataire
Personne ou entreprise qui fournit des services contre paiement (Ne pas confondre
avec partenaire)
Procédures
•
•
•
Manières de procéder pour aboutir à un résultat
Série de formalités qui doivent être remplies
Ensemble des procédés utilisés dans la conduite d’une opération complexe
Petit Robert
Réseau
« Le réseau est un ensemble de flux d’échanges matériels ou relationnels qui relient
des individus ou des groupes »
Dictionnaire critique d’action sociale, Bayard, p.336
La théorie des graphes est centrée sur l’étude des liens entre les éléments d’un
ensemble.
Elle caractérise ces liens :
par leur fréquence
par leur intensité : liens forts et faibles (durée, intensité émotionnelle,
services réciproques, intimité)
Elle permet de connaître les structures des liens dans un groupe
Exemple des diagrammes : Degenne et Forsé – Les réseaux sociaux,
p.32 et 130.
La dynamique des forces intérieures dans les groupes (triangle des
alliances de Caplow)
Elle permet de cartographier les réseaux entre individus et groupes
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
12
Le réseau articule des points en les maintenant à distance et en organisant
l’espace social de séparation (F. Dhume)
Rhizome
•
(prolongements multiples et non ordonnés
versus
maillage coordonné)
Deleuze et Guattari
•
Tige souterraine des plantes vivaces qui développent des racines adventives et
des tiges feuillues aériennes
• Le rhizome s’oppose à l’ordre hiérarchique de certains réseaux
Petit Robert
Sous traiter
•
Sous traitant : personne qui est chargée d’un travail pour le compte et selon les
directives d’un entrepreneur principal : le donneur d’ordres
Petit Robert
Structurer
•
Organiser les différentes parties de…
Petit Robert
__________________________________________________________________________________
Association de Sociologie et de Psychologie Cliniques ARIANE – 46 rue Raspail 94140 ALFORTVILLE
01 43 96 05 42 –
[email protected] – http://www.aspsariane.fr
Téléchargement