Deux nouvelles espèces de Nematodes parasites de Hoplerythrinus Camallauina unitaeniatus (Characidac, Cypriniformes) en Guyane; création d'une nouvelle famille : les Guyanemidae par A n n i e J. (Dracunculoidea) PETTER * Résumé. — D e s c r i p t i o n d e d e u x n o u v e l l e s e s p è c e s parasites d e Hoplerythrinus unitaeniatus (Spix) (Characidac, Cypriniformes). Spirocamallanus krameri n. s p . , a p p a r t i e n t a u g r o u p e des Spirocamallanus sud-américains à spicules p e t i ts et s u b é g a u x . Guyanema seriei n. g., n . s p . , est un D r a c u n c u l o i d e a d o n t l ' e n s e m b l e des c a r a c t è r e s nécessite la c r é a t i o n d ' u n e n o u v e l l e famille : les G u y a n e m i d a e ; p a r la p r é s e n c e d ' u n a n u s e t d ' u n e v u l v e n o n a t r o p h i é s , m ê m e c h e z les femelles m û r e s , elle p e u t être c o n s i d é r é e c o m m e é t a b l i s s a n t un lien a v e c les C a m a l l a n o i d e a . Abstract. — D e s c r i p t i o n o f t w o n e w species o f N e m a t o d e C a m a l l a n i n a f r o m Hoplerythrinus unitaeniatus ( S p i x ) ( C h a r a c i d a e , C y p r i n i f o r m a ) f r o m f r e n c h G u i a n a . Spirocamallanus krameri n . s p . , b e l o n g s t o t h e s o u t h - a m e r i c a n g r o u p of Spirocamallanus c h a r a c t e r i z e d b y t h e i r small a n d s u b - e q u a l s p i c u l e s . Guyanema seriei n . g., n . s p . , is a D r a c u n c u l o i d e a , for w h i c h a n e w f a m i l y , G u y a n e m i d a e . is c r e a t e d . B y t h e p r e s e n c e , e v e n in m a t u r e f e m a l e s , o f n o n a t r o p h i e d a n u s a n d v u l v a , it establishes a link b e t w e e n C a m a l l a n o i d e a a n d D r a cunculoidea. Au cours d'une mission en G u y a n e effectuée en d é c e m b r e 1971, nous a v o n s récolté un certain n o m b r e de N é m a t o d e s parasites de P o i s s o n s . N o u s d é c r i v o n s ici d e u x espèces parasites d'un unitaeniatus (Spix) P o i s s o n d'eau douce, Hoplerythrinus (Characidae, C y p r i n i f o r m e s ) . Spirocamallanus krameri n. sp. M A T É R I E L : N o m b r e u s e s femelles et d e u x mâles récoltés chez Hoplerythrinus 20 H A , p é c h é dans un ruisseau U n mâle et au m a r c h é LOCALISATION * 75231 1. tué la une femelle sur la r o u t e d e L a r i v o t récoltés chez Hoplerythrinus 1 unitaeniatus (matériel-type). unitaeniatus 344 B A , acheté de Cayenne. : intestin. Laboratoire de Zoologie (Vers) associé au CNRS, Muséum national d'Histoire naturelle, 43, rue Cufier, Paris-Cedex 05. Nous remercions vivement M. KRAMER qui nous a procuré ces Poissons et M. Ch. R o u x qui a effecdétermination. ANNIE J. PETTEK DESCRIPTION (Fig. Spirocamallanus 1, 2, 3) longs de 14 m m à 20 m m chez les femelles et 7 m m chez les mâles. Ouverture buccale hexagonale à angles arrondis et bordée par une m e m b r a n e transparente ; quatre grosses papilles céphaliques, quatre papilles labiales externes disposées au même niveau que les amphides et six papilles labiales internes (fig. 1, A ) . La capsule buccale est de forme différente chez les mâles et les femelles (fig. 1, C, D ) : chez les femelles, sa hauteur égale presque sa plus grande largeur et l'ornementation en FIG. 1- — Spirocamallanus krameri n. sp. A , femelle, vue apicale superficielle ; B, femelle, coupe optique au niveau de la capsule buccale (l'anneau externe en grisé représente la section de la capsule buccale au niveau où elle est la plus large, l'anneau interne représente la section de l'anneau chitinoïde sousjacent) ; C, capsule buccale de la femelle, vue latérale ; D , capsule buccale du mâle, vue dorsale. NEMATODES CAMALLANINA 805 spirale couvre presque toute la hauteur de la capsule ; chez les mâles, elle est b e a u c o u p plus large que haute et l'ornementation ne c o u v r e que la moitié inférieure d e la capsule. L'ornementation c o m p r e n d de 16 à 20 crêtes ; certaines sont interrompues et ne p a r c o u rent pas toute la hauteur de la capsule. L'anneau chitinoïde situé à la base de la capsule porte 3 dents internes (fig. 1, B ) . Œ s o p h a g e musculaire et œsophage glandulaire sont enflés en a m p o u l e à leur extrémité postérieure ; la branche postérieure gauche de l'appareil excréteur est épaissie dans FIG. 2. — Spirocamallanus krameri n. sp. A , femelle, région antérieure, vue latérale ; B, mâle, extrémité caudale, vue latérale ; C, mâle, extrémité caudale, vue ventrale ; D , larve ; E, extrémité postérieure d'une larve ; F , femelle, extrémité caudale, vue latérale. A : éch. 500 u. ; B, C, D , F : éch. 100 u. ; E : éch. 50 \x. 806 ANNIE J. PETTER sa région antérieure, constituant une glande excrétrice allongée en fuseau, accolée au c h a m p latéral gauche (fîg. 2, A ) ; les deirides sont fines, mais n e t t e m e n t visibles. Femelle : L'appareil génital est du type habituel chez les Camallanides : la v u l v e est située un peu en dessous du milieu du corps ; l'ovéjecteur (fîg. 3, A ) , long d'environ 1,5 m m , est dirigé vers l'arrière et s'ouvre dans d e u x énormes utérus ; l'utérus antérieur s'étend j u s q u ' a u niveau de la j o n c t i o n œsophago-intestinale, il se p r o l o n g e par un réceptacle séminal en forme d ' a m p o u l e o v o ï d e , puis par un o v i d u c t e et un ovaire bien développés (fig. 3, FIG. 3. — Spirocamallanus krameri n. sp. A , ovéjecteur ; B, extrémité distale de l'utérus postérieur, réceptacle séminal et ovaire postérieurs atrophiés ; C, extrémité distale de l'utérus antérieur, réceptacle séminal, oviducte et portion de l'ovaire antérieur. NEMATODES CAMALLANINA 807 C) ; l'utérus postérieur se termine un peu en avant de l'anus ; le réceptacle séminal et l'ovaire postérieur sont atrophiés (fig. 3, B ) . La queue se termine en pointe conique (fig. 2, F ) . Dimensions d'une femelle longue de 14 m m : largeur m a x i m u m : 460 p ; anneau nerv e u x , pore excréteur et deirides situés respectivement à 250 p, 500 p et 140 p de l'extrémité antérieure ; œsophage musculaire : 400 p ; œsophage glandulaire : 575 p ; capsule buccale haute de 100 p et d'une largeur m a x i m u m de 100 p ; queue : 150 p ; v u l v e située à 5,9 m m de l'extrémité postérieure. Larve (fig. 2, D , E) : Les larves ont l'aspect habituel des larves de Camallanides (fig. 2, D) ; l'extrémité de la queue est tronquée et se termine par des petits crochets recourbés vers l'avant (fig. 2, E ) . Longueur d'une larve : 550 p ; œsophage : 110 p. ; queue : 130 p ; pore excréteur, anneau nerveux et ébauche génitale situés respectivement à 65 p , 70 p et 135 p de l'extrémité antérieure ; phasmides à 160 p de l'extrémité postérieure. Mâle (fig. 2, B , C) : Les papilles sont disposées en d e u x rangées régulières subventrales : quatre paires précloacales et cinq paires postcloacales, plus une paire de phasmides terminales situées plus latéralement. Il n ' y a pas d'ailes caudales. Spicules petits et subégaux. Dimensions d'un mâle long de 7 m m : largeur m a x i m u m : 250 p ; anneau nerveux, pore excréteur et deirides situés à 180 p, 475 p et 100 p de l'extrémité antérieure ; œsophage musculaire : 325 p ; œsophage glandulaire : 450 p ; capsule b u c c a l e haute de 50 p et large de 90 p ; queue : 280 p ; spicules longs de 80 p et 75 p . DISCUSSION La plupart des espèces du genre Spirocamallanus Olsen, 1952, ont des spicules inégaux. Il en existe seulement sept, toutes brésiliennes, qui ont des spicules égaux o u subégaux et de petite taille ; par les ailes caudales faiblement développées ou absentes et le petit nombre de papilles précloacales, ces espèces constituent un groupe h o m o g è n e auquel appartient notre espèce. S. hilarii (Vaz et Pereira, 1934), S. cearensis (Pereira, Vianna Dias et A z e v e d o , 1936) et S. incarocai (Freitas et Ibânez, 1970) s'en différencient par un œsophage glandulaire très long ; S. wrighti (Pereira, 1935) a des spicules nettement plus petits ; chez S. barroslimai (Pereira, 1935), S. fariasi (Pereira, 1935) et S. inopinatus (Travassos et al., 1928), la capsule buccale est de forme différente, surtout chez le mâle. L'espèce est donc nouvelle et nous la n o m m o n s Spirocamallanus krameri n. sp. Guyanema seriei n. g., n. sp. M A T É R I E L : Plusieurs mâles et femelles récoltés chez Hoplerythrinus (matériel-type) et 344 B A , achetés au marché de Cayenne. unitaeniatus 321 B A L O C A L I S A T I O N : cavité générale. 232, 3 808 ANNIE J. PETTER DESCRIPTION (Fig. 4 et 5) Nématodes filiformes, non amincis à l'extrémité antérieure qui est b r u s q u e m e n t tron- quée ; les mâles sont b e a u c o u p plus petits que les femelles (femelles d ' e n v i r o n 15 m m , mâles d'environ 8 m m ) . L'extrémité antérieure forme d e u x élévations latérales d'aspect rectangulaire aussi bien en vue latérale qu'en vue apicale. Elles portent les amphides, les quatre papilles cépha- FIG. 4. — Guyanema seriei n. g., n. sp. A , femelle, vue apicale ; B, femelle, extrémité antérieure, vue latérale ; C, femelle, extrémité antérieure, vue médiane ; D , femelle, région antérieure, vue latérale ; E, femelle, extrémité caudale, vue latérale ; F , ovéjecteur et début de l'utérus ; G, larve. A : éch. 20 p ; B, C : éch. 50 p ; D , E, F : éch. 500 u. ; G : éch. 100 p . NEMATODES CAMALLANINA 809 liques et les quatre papilles labiales externe s ; celles-ci se trouvent ainsi déplacées vers les a x e s latéraux ; il existe de plus quatre papilles labiales internes qui sont au contraire déplacées vers les a x e s médians. L'ouverture buccale est petite et triangulaire (fig. 4, A , B, C ) . Il n ' y a pas de p h a r y n x ; l'œsophage musculaire est légèrement dilaté à son extrémité antérieure ; il est suivi par un long œsophage glandulaire ; les glandes œsophagiennes sont uninucléées. Le pore excréteur est situé légèrement en a v a n t de la j o n c t i o n des d e u x parties de l'œsophage ; il est en relation a v e c une grosse g l a n d e excrétrice allongée en fuseau, a c c o lée au c h a m p latéral gauche (fig. 4, D ) . De minuscules deirides peuvent être observées aux forts grossissements du microscope. Femelle : La v u l v e est située au niveau de la j o n c t i o n des deux parties de l ' œ s o p h a g e . Chez les femelles mûres, la paroi du corps fait une saillie i m m é d i a t e m e n t en dessous de l'ouverture vulvaire et le corps s'élargit brusquement à partir de ce niveau (fig. 4, D et 5, A ) . L'appareil génital est impair (fig. 4, F) : il c o m p r e n d un long ovéjecteur (environ 1 500 p) dirigé vers l'arrière, d o n t la paroi s'épaissit à environ 70 p de la v u l v e p o u r former un « sphincter » long d'une trentaine de p ; l'utérus s'étend j u s q u ' à l'extrémité postérieure du corps chez les femelles mûres, il est empli de larves dans la région voisine de l'ovéjecteur et d ' e m b r y o n s dans la région voisine de l'ovaire. L'anus et le rectum sont présents m ê m e chez les femelles mûres (fig. 5, C) ; la queue est très longue et effilée (fig. 4, E ) . Dimensions d'une femelle longue de 14 m m : largeur m a x i m u m : 190 p ; anneau nerv e u x , pore excréteur et deirides situés respectivement à 250 p , 340 p et 70 p de l'extrémité antérieure ; œsophage musculaire : 420 p ; œsophage glandulaire : 1 200 p ; v u l v e située à 400 p de l'extrémité antérieure ; queue : 900 p . Larve (fig. 4, G ) : Les larves ont une extrémité apicale arrondie et une queue très longue effilée. Dimensions d'une larve longue de 390 p : largeur : 20 p ; œsophage : 90 p ; queue : 50 p . et Mâle (fig. 5, B, D) : La région postérieure est recourbée en crosse et munie de larges ailes caudales ; elle se divise à son extrémité en deux longues pointes qui portent la dernière paire de papilles post-cloacales. Il existe quatre paires de papilles pré-cloacales et cinq paires de post-cloacales. Les deux spicules sont é g a u x ; il n ' y a pas de gubernaculum. Dimensions d'un mâle long de 8 m m : largeur m a x i m u m : 90 p ; anneau nerveux, pore excréteur et deirides situés respectivement à 220 p , 300 p et 120 p de l'extrémité antérieure ; œsophage musculaire : 320 p ; œsophage glandulaire : 900 p ; queue : 170 p ; ailes caudales longues de 350 p et larges d'environ 20 p ; pointes caudales longues de 30 p ; spicules : 100 p . DISCUSSION Par sa localisation tissulaire, sa structure apicale et la forme de ses larves, l'espèce appartient à la superfamille des Dracunculoidea. Elle présente certaines affinités avec les 810 ANNIE J. PETTER FIG. 5. — Guyanema seriei n. g., n. sp. A , femelle, région antérieure, vue latérale ; B , mâle, extrémité postérieure, vue ventrale ; C, femelle, région anale ; D , mâle, extrémité postérieure, vue latérale. A, C, D : éch. 100 jx ; B : éch. 50 y.. NEMATODES 811 CAMALLANINA Micropleurinae, parasites de la cavité générale des Reptiles : présence d'un œ s o p h a g e glandulaire long et cylindrique, extrémité caudale du mâle ; ces affinités nous ont été confirmées par l'étude de la structure apicale d'une femelle de Micropleura sp. récoltée en Guyane chez un Caïman crocodilus (fig. 6) ; elle s'éloigne cependant des Micropleurinae par sa monodelphie et le d é v e l o p p e m e n t de l'ovéjecteur et de la v u l v e chez les femelles mûres, et doit être placée dans une famille nouvelle : les G u y a n e m i d a e . Les Dracunculoidea sont des Camallanina qui, par suite de l'adaptation à la vie tissulaire, ont suhi par rapport a u x Camallanoidea un certain n o m b r e de modifications : une réduction ou une disparition complète de la capsule buccale et une atrophie de l'anus, de la v u l v e et du vagin chez les femelles mûres. Notre espèce est un Dracunculoidea t y p i q u e par sa structure apicale et l'absence de capsule buccale, mais elle a conservé des caractères de Camallanoidea : présence d'un anus, d'une v u l v e et d'un vagin parfaitement développés même chez les femelles mûres ; elle établit ainsi une transition entre les deux superfamilles. 50 FIG. 6. — Micropleura '00 U H 1 sp. A , femelle, vue apicale ; B , femelle, extrémité antérieure, vue médiane ; C, femelle, extrémité antérieure, vue latérale. | DÉFINITION —| D E LA F A M I L L E I DES G U Y A N E M I D A E Guyanemidae, n. fam., Dracunculoidea. Extrémité apicale munie de quatre papilles céphaliques, quatre papilles labiales externes et quatre papilles labiales internes. Papilles céphaliques et papilles labiales externes déplacées vers les axes latéraux. A b s e n c e de c a p sule buccale chitinoïde. Œ s o p h a g e divisé en œsophage musculaire court et œsophage glan- 812 ANNIE J. PETTER dulaire cylindrique b e a u c o u p plus long. Anus présent même chez les femelles adultes mûres. Queue de la femelle longue. V u l v e présente m ê m e chez les femelles mûres, située antérieurement. Monodelphie. Queue du mâle longue, munie d'ailes caudales et de papilles pré- et post-cloacales. D e u x spicules égaux. Vivipares. Parasites de Poissons. Genre-type : Guyanerna Espèce-type : Guyanerna n. g., caractères de la famille. seriei, n. g., n. sp. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES FREITAS, J. F . TEIXEIRA DE, et H . N. IBÁÑEZ, 1970. — Fauna helmintológica del Perú — nuevo nematodo Camallanideo parásito de pez. Archos perú. Patol. Clin., 24 : 205-210. PEREIRA, C , 1935. — Ascaridata e Spirurata parásitos de peixes do Nordeste Brasileiro. Archos Inst. biol., Sao Paulo, 6 : 53-62. PEREIRA, C , M. V I A N N A D Í A S et A. P E N N A DE A Z E V E D O , 1936. — Biologia do ncmatoidc « Pro- camallanus cearensis » n. sp. Archos Inst. biol., Suo Paulo, 7 : 209-226. TRAVASSOS, L., P. ARTIGAS et C. PEREIRA, 1928. — Fauna helmintológica dos peixes de agua doce do Brasil. Archos Inst. biol., Sào Paulo, 1 : 5-68. V A Z , Z., et C. PEREIRA, 1934. — Contribuiçâo ao conhecimento dos nematoides de peixes iluviais do Brasil. Archos Inst. biol., Sào Paulo, 5 : 87-103. Manuscrit depose le 20 juin 1973. e Bull. Mus. natn. Hist, nat., Paris, 3 sér., n° 232, juillet-août 1974, Zoologie 156 : 803-812. Achevé à"imprimer le 15 février 1975.