Rapport Etude CRIEF-DREAL « Les acteurs microéconomiques de l’économie régionale verte et en verdissement dans leur territoire » 2013 Résumé de l’étude La Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) a lancé en 2012 un vaste programme d’études sur l’économie verte en région Poitou-Charentes, afin d’éclairer la puissance publique sur les moyens d’action et les leviers d’intervention pouvant faciliter l’adaptation de l’économie régionale. Pour approfondir la connaissance des mutations en cours, la DREAL a conclu un partenariat avec l’Université de Poitiers, précisément avec le Centre de Recherche sur l’Intégration Economique et Financière (CRIEF) qui est le laboratoire de la Faculté de Sciences économiques. Dans le cadre de cette convention avec la DREAL, le CRIEF mène en 2013 une étude auprès d’acteurs microéconomiques de la région pour mieux connaître les dynamiques à l’œuvre, les besoins d’accompagnement et les difficultés que peuvent rencontrer ces acteurs dans leur territoire. Les entreprises sont les acteurs de premier plan du « verdissement » ou du « nonverdissement » de l’économie d’un territoire. Elles peuvent fournir les éléments précis pour la compréhension et l’analyse des dynamiques locales, et sur l’évolution des activités, y compris dans la perspective d’une économie plus verte. Quatre territoires de la région, qui diffèrent entre autres par leur degré de verdissement et leur dynamisme, sont définis. Au sein de chacun, un échantillon d’acteurs économiques, eux-mêmes très divers quant à leur engagement dans l’économie verte ou dans le verdissement de leur activité, est sollicité par des questionnaires et entretiens. L’objectif est double : accroître la connaissance des démarches et processus décisionnels des unités microéconomiques à cet égard, et différencier éventuellement les besoins et les actions possibles compatibles avec leurs stratégies et le territoire dans lequel elles sont implantées selon leur cas. Il s’agit de montrer la diversité des configurations à considérer, dans la mesure où l’étude s’intéresse aux différents facteurs de motivation, de déclenchement de projets et de mise en œuvre, aux divers facilitations et freins ainsi qu’aux contexte et perspectives économiques locaux. Les acteurs sont interviewés sur leur territoire de mars à mai 2013. L’étude est placée sous la responsabilité scientifique de Mme Anne-Marie Crétiéneau et mobilise des chercheurs au sein du CRIEF*, dont Julie Raveleau, ingénieure d’études et Fabien Grelaud, stagiaire du Master 2 Territoires, Entreprises et Développement Durable. L’étude commencée en décembre 2012 s’achève en décembre 2013, avec des réunions régulières d’échanges « techniques » CRIEF-DREAL et de travail en comité restreint (13/02 ; 10/04 ; 16/05 ; 06/09). (CRIEF, EA 2249, Université de Poitiers. Contact : [email protected] 1 & ' Connaissance des études antérieures du programme DREAL Travail d’enquête Périmètre de l’étude = I+II Définition des quatre territoires d’étude de la région I Recension des acteurs présents sur les territoires Détermination mination des échantillons d’acteurs à interviewer II Elaboration de la grille d’entretien Entretiens semi semi-directifs dire ectifs de face à face avec les acteurs microéconomiques Traitement, synthèse et analyse Exploitation et résultats Rapport d’étape 1 sur le verdissement des territoires et des entreprises Rapport d’étape 2 ssur le verdissement des territoires et des entreprises Rapport final de l’étude 2 Sommaire du présent rapport I. Contexte de l’étude II. Méthodologie de l’étude III. Résultats sur la dynamique de verdissement des territoires IV. Résultats sur la dynamique de verdissement des entreprises dans leur territoire V. Conclusions de l’étude 3 I. Contexte de l’étude Il s’agit de mieux connaître les dynamiques à l’œuvre, les besoins d’accompagnement, les difficultés que les acteurs économiques peuvent rencontrer sur leur territoire, en se situant à leur niveau microéconomique, voire infra-microéconomique quand on tient compte de considérations relevant « de l’atelier », des conditions très concrètes de l’activité. Acteurs de premier plan du verdissement ou du non-verdissement d’un territoire, les entreprises peuvent fournir des éléments sur la compréhension et l’analyse des principales dynamiques locales et sur l’évolution des activités dans la perspective d’une économie régionale plus verte. Le contexte de l’étude est constitué de l’état de l’art aux niveaux des concepts et de la grille analytique, qui se consolide aujourd’hui dans la littérature scientifique sur le sujet, d’une part, et des études antérieures du programme sur l’économie verte dans la région Poitou-Charentes lancé par la DREAL en 2012, d’autre part. I.1. Les apports des études sur l’économie régionale verte et en verdissement du programme 2012 de la DREAL Les études lancées en 2012 par la DREAL Poitou-Charentes, notamment celles des cabinets Alcimed sur les filières vertes en région1, et D&Consultants sur le verdissement de l’économie régionale2, constituent le point de départ du présent travail, non seulement par leurs résultats mais aussi par des éléments d’ordre méthodologique et des matériaux comme par exemple des comptes rendus d’entretien d’acteurs proches des entreprises. Est prise en compte aussi l’étude réalisée par l’INSEE sur la quantification et la caractérisation de l’économie verte en Poitou-Charentes en 20123. Référence est faite par la suite dans le rapport aux trois études, notamment pour montrer leur influence sur nos choix méthodologiques et relier nos résultats à leurs conclusions, dans la perspective de capitaliser les connaissances de l’économie verte et en verdissement régionale. Précisons d’ores et déjà que trois grands apports ont conditionné fortement notre étude. 1 Alcimed (2012), Etude sur les filières vertes en région Poitou-Charentes : potentialités, faisabilité, pistes d’action. 2 D&Consultants (2012), Vers une économie verte en Poitou-Charentes, le verdissement de l’économie régionale. 3 INSEE (2013), « En Poitou-Charentes, de 3 600 emplois verts à 102 000 emplois verdissants », Décimal, Insee Poitou-Charentes, n°324, janvier. 4 Tenir compte de la présence et du stade de développement différent des filières vertes dans la région Poitou-Charentes : malgré la forte volonté et la motivation de nombreux acteurs et structures, il est impossible de construire et/ou développer également toutes les filières de l’économie verte. Il faut distinguer, en s’appuyant sur le regroupement des filières fait par Alcimed : - les filières existantes (socle) qui contribuent à l’emploi régional, avec des acteurs sur l’ensemble des maillons de la chaîne de valeur et qui ont besoin d’être consolidées par des actions de sensibilisation/concertation et de formation en plus d’actions sur le plan financier ou sous la forme de commandes publiques : (1) Bâtiment basse consommation : bâtiment à faible impact environnemental, biomasse énergie - bois énergie, géothermie superficielle (2) Recyclage et valorisation des déchets (3) Eau / assainissement / génie écologique - les filières avec quelques acteurs en région sur un ou plusieurs maillons de la chaîne de valeur, et qui, avec un renforcement des maillons par la création de réseaux scientifiques et technologiques, de partenariats industriels, et aussi par des actions de sensibilisation/concertation, pourront contribuer à la création de valeur et à l’emploi à terme : (1) Bioraffinerie intégrée : Chimie verte et biomasse matériaux, Biocarburants 2G, Biomasse énergie - méthanisation (2) Energies 2030 : Biocarburants 3G, Photovoltaïque, Energies marines (3) Electricité décentralisée (Smart Grids – Metering et Infrastructures et stockage) (4) Véhicules décarbonés (y compris filière Batteries) (5) Eolien on-shore / Micro-éolien, Solaire thermique / thermodynamique - les filières « de moindre importance » en région qui exigent études de potentiel, et définition d’une stratégie de positionnement : Eolien offshore, Biocarburants 1G, Géothermie intermédiaire et profonde (haute énergie) - les filières transversales à l’ensemble du tissu régional (les filières en verdissement) 5 Tenir compte de l’importance des secteurs TPE/Artisanat/Commerce et BTP dans l’activité économique régionale et donc du rôle majeur qu’ils peuvent jouer dans le verdissement de l’économie. Douze secteurs économiques clés pour la région ont constitué l’objet d’étude de D&Consultants. Ils se situent dans les quatre branches suivantes : - Agriculture ; - Construction (BTP/Construction) ; - Industries : Industries agro-alimentaires, sous-traitance automobile et aéronautique, Industrie nautique, fabrication d’équipements électriques, Industrie du bois (seconde transformation), Industrie minérale (carrièrescimenteries ; - Tertiaire marchand : assurances, mutuelles et économie sociale ; tourisme ; transports. Figure 1 : Analyse comparée de la dynamique de verdissement par secteur Source : D&Consultants (2012) L’étude de D&Consultants est menée à un niveau macroéconomique, qui fait ressortir une dynamique de verdissement juste émergente dans la région et différemment engagée selon les secteurs économiques. L’appréciation de cette dynamique s’est faite en considérant les réseaux existants, des certifications, labellisations, des politiques d’entreprises, des nouvelles technologies, de l’offre de formation Notons que les transports, le BTP, l’IAA, et l’agriculture sont particulièrement ciblés par des financements régionaux ou des réglementations contraignantes, qui probablement tirent les 6 entreprises vers une dynamique de verdissement. Les TPE Artisanat Commerce sont des acteurs qui, malgré leur poids économique important dans la région (emploi > 115 000 et valeur ajoutée > 5,5 Md€), font très peu d’efforts de verdissement. Mais le secteur est diffus en termes d’activités sur l’ensemble du territoire régional, et ses impacts environnementaux (émissions de GES, consommations énergétiques, impacts sur les ressources naturelles) sont perçus comme négligeables par les acteurs eux-mêmes. Sensibiliser ces décideurs économiques et savoir les accompagner constituent de fait un enjeu majeur pour le verdissement de l’économie régionale. « Tester » à l’occasion de notre enquête les conclusions en termes de priorités d’actions établies par D&Consultants pour le verdissement de la région. Trois axes de réflexion ont été proposés à partir des actions recensées par les auteurs de l’étude : - Assurer lisibilité et promotion des actions ; - Structurer le verdissement sur le territoire ; - Accompagner les entreprises. Notre objet n’est pas toutefois de tester les résultats des études antérieures mais bien plutôt de les compléter en adoptant le point de vue des unités économiques elles-mêmes d’une part, et en ajoutant des acteurs (établissements publics par exemple) qui n’étaient pas pris en compte alors qu’ils peuvent représenter une part importante de l’emploi local, que leur impact environnemental peut être lui-même élevé, et qu’ils peuvent compter beaucoup aussi localement pour leur exemplarité dans le domaine environnemental. I.2. L’état de l’art L’état de l’art par rapport à l’objet de notre étude consiste essentiellement à clarifier les notions utilisées et à éclairer sur les analyses mobilisées ou qui influenceront le regard porté par le chercheur. Sur les notions utilisées La notion d’« économie verte », comme par le passé celle de « développement durable » ou récemment encore celle de « responsabilité sociale/sociétale » trouve différentes acceptions selon les acteurs ou auteurs, y compris dans les milieux académiques. Parce que les enjeux pour la survie de la planète et de nos sociétés, pour l’avenir de l’humanité sont majeurs, parce que le défi de la transition écologique concerne tous les acteurs/citoyens, les diverses et multiples pratiques et connaissances de 7 terrain, ainsi que les nombreuses mesures des décideurs (privés ou publics) pour favoriser ce vaste changement, alimentent continûment la conceptualisation pendant que d’autres se l’approprient et cherchent à leur tour à apporter des réponses. L’institutionnalisation de ces notions se fait sans accord sur la définition, ou même sur l’idée profonde qu’elles portent. Dénoncées comme oxymores (développement-durable ou soutenable, croissance-verte), elles ont malgré tout été transcrites, codifiées, et ont donné lieu à des textes, normes, à des indicateurs, référentiels, à des stratégies, des politiques, des instruments qui sont quant à eux bien définis et mis en œuvre4. Globalement, nous avons là des notions qui, dans tous les cas, sont introduites pour exprimer l’existence de contraintes devant peser sur la croissance et le développement. Sur cette base, deux courants se sont maintenus : dans l’optique d’une durabilité « faible », on admet qu’il est possible de substituer au capital naturel du capital créé par les hommes, alors que, excluant cette substituabilité, la durabilité « forte » met en avant les risques de pertes irréversibles et donc en question la notion même de développement (thèses de l’écologie politique, de la décroissance par exemple). On retrouve ces deux sens appliqués aujourd’hui à la notion de « territoire vert », mais c’est le premier qui domine usuellement, faisant donc du territoire vert un biotope d’une très grande complexité5 puisque l’espace (naturel) à préserver comprend des éléments valorisables monétairement et que les activités humaines de production et de consommation le modifient en permanence. Moins controversée en elle-même, la notion d’économie verte fait référence à un nouveau modèle de développement qui, tout en cherchant à être efficace sur le plan économique, s’engage à respecter les grands équilibres naturels et sociaux6. On vise une économie à la fois sobre et décarbonée, utilisant moins ou mieux la ressource énergétique et les matières premières non renouvelables, émettant beaucoup moins de GES, donnant la priorité aux écotechnologies, pratiquant la consommation et la production responsables (éco-conception), avec des transports « raisonnés », des villes et des territoires durables, protégeant et rétablissant les services écosystémiques des sols, de l’eau et de la biodiversité, évaluant les effets des décisions sur les générations futures. Dans le contexte de crise économique et financière de 4 Aubertin C. et Vivien F.D. (2010), Le développement durable, Enjeux politiques, économiques et sociaux, La Documentation française. 5 Techniquement, la durabilité faible s’appuie sur la possibilité d’effectuer, pour un espace donné, un calcul de l’épargne nette ajustée permettant la transmission à la génération suivante du stock global de capital (physique, humain et naturel). Cf. Cardebat J.M. et D. Uzunidis D. (2012), « Territoire vert – Entreprises, institutions, innovations », Marché et organisations, n°16, L’Harmattan, en particulier l’introduction « Innovation verte et durabilité des territoires ». 6 Définition du Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie (MEDDE) 8 ces dernières années, le MEDDE insiste davantage dans sa définition actuelle sur les nouvelles opportunités qui se présentent aux entreprises et les créations d’emplois à en attendre. La définition institutionnelle est importante parce qu’indiquant les grandes orientations politiques et stratégiques, elle constitue le cadre pour nombre d’actions et politiques publiques. Pour autant, l’ambiguïté sur le terme subsiste car la priorité que l’on continue d’accorder à la dimension économique ne peut permettre, pour certains, de rompre avec le mode de développement industriel suivi jusque-là. La définition de l’économie verte proposée par le PNUE (Programme des Nations-Unis pour l’Environnement) met en avant l’amélioration du bien-être et de l’équité sociale, autant que la réduction considérable des risques de pénuries écologiques. Elle présente alors trois caractéristiques principales : faibles émissions de CO2, gestion durable des ressources, socialement inclusive. La notion d’économie verte, principal thème de la Conférence Rio+20 des Nations Unies en juin 2012, a été très discutée ; elle apparaît en pratique le plus souvent comme la mise en œuvre concrète des principes de développement durable dans l’activité économique. Elle désigne toutes les activités économiques qui cherchent à respecter l’environnement dans les anciens secteurs de notre système industriel par le verdissement (tels que le bâtiment, l’agriculture, les transports), ainsi que dans les nouveaux secteurs du système éco-industriel (les filières vertes). Comme dans la problématique du développement durable7, sur un territoire donné l’économie verte implique plusieurs espaces, des populations et acteurs hétérogènes, des organisations et institutions diverses, positionnées de surcroît à des niveaux différents avec des interactions possibles. L’approche territoriale de l’économie verte doit, elle aussi, relever des défis importants concernant la coordination des acteurs, l’articulation entre les échelles territoriales et les mécanismes de la gouvernance multi-niveaux 8 . Elle est renforcée dernièrement par deux tendances très fortes. D’une part, les questions écologiques deviennent plus englobantes, et c’est en ce sens qu’il faut entendre l’expression « au-delà du développement durable » comme l’illustrent les débats sur l’énergie ; d’autre part, le territoire apparaît de plus en plus comme un acteur réel de changement, capable de créativité et d’innovations. 7 Sur la question de la nouvelle économie portée par le DD, cf. notre introduction à l’ouvrage Développement durable : pour une nouvelle économie, Laperche B., Crétiéneau A.M. et Uzunidis D. (dir.), Peter Lang, Bruxelles, 2009. 8 Cf. Brot J., Gérardin H. et Hamdouch A. (2012), « Développement durable et processus de développement : contraintes institutionnelles et expériences territoriales », Développement durable et territoires, Vol.3, n°3, décembre. 9 Sur les approches mobilisées La grille analytique mobilise, outre les outils classiques de l’économiste travaillant au plus près des entreprises et sur les territoires, trois approches plus récentes d’origines diverses en terme de courant économique, qui viennent se compléter et s’enrichir dans le cadre de notre étude. 1. L’écologie industrielle dans le prolongement des travaux de Suren Erkman9 et des développements en retour des projets mis en œuvre sur le terrain, nous offre une vision territoriale de la problématique du développement de l’ensemble des activités économiques. On s’appuie alors sur la notion d’économie circulaire, qui rompt avec le schéma linéaire des processus de production du système industriel traditionnel (prélèvements – production – rejets) qui conduisent à l’épuisement des ressources naturelles et à la dégradation de l’environnement. On s’inspire du cycle naturel (circuit non ouvert) et de la conception de l’écosystème, qui comprend les espèces (biocénose) et leur milieu (biotope) et impose la vision sous la forme de flux de matière et d’énergie permettant le maintien et le développement de la vie. « Le modèle simpliste actuel d’activité industrielle doit être remplacé par un modèle plus intégré : un écosystème industriel » (Frosch R. et Gallopoulos N.,1989). Les stratégies d’action consistent à : . Boucler (optimiser l’usage des ressources) . Intensifier (dématérialiser l’économie) . Equilibrer (décarboniser l’énergie) . Etanchéifier (réduire les pertes dissipatives) 9 Cf. notamment Erkman S. (2001), L’écologie industrielle, une stratégie de développement, Gallimard. 10 Figure 2 : Les symbioses industrielles Source : Massard G. (2011), Les symbioses industrielles : une nouvelle stratégie pour l'amélioration de l'utilisation des ressources matérielles et énergétiques par les activités économiques, Université de Lausanne. L’écologie industrielle propose à la fois un cadre conceptuel général et rigoureux (écologie scientifique), une stratégie opérationnelle (mise en oeuvre du développement durable) et une stratégie collective et coopérative (échelle systémique). L’écologie industrielle suppose, concrètement 10 , dans une première étape des méthodologies de quantification et de diagnostic, puis des procédures d’amélioration et d’optimisation (c’est là qu’interviennent l’écodesign, l’éco-efficacité et les symbioses industrielles), et, enfin seulement des procédures de mises en œuvre, c’est-à-dire la stratégie d’application à l’échelle d’un territoire. Considérant les différents types de développement et de gestion de projet, la démarche peut relever de l’initiative privée (Bottom-up) comme à Kalundborg au Danemark, de l’initiative publique (Top-Down) comme à Genève ou aux Etats-Unis, ou encore de l’initiative mixte (Side Approach) comme en Europe ou en Australie. La France compte quelques projets d’écologie industrielle dont celui sur l’Estuaire de la Seine11. 10 Massard (2011). Sont impliqués dans ce vaste projet l’association OREE (http://www.oree.org) et le cabinet SOFIES (http://www.sofiesonline.com) dont nous nous sommes inspirés pour ce résumé. 11 11 L’écologie industrielle n’apporte pas seulement une autre façon de concevoir l’action sur le terrain, en re-conceptualisant le développement durable autour de cette idée d’économie circulaire et d’un modèle de développement vertueux pour tous, elle parvient à sensibiliser autrement des acteurs, des entreprises devenues réticentes aux actions environnementales. En France existe d’ailleurs depuis peu un Institut d’Economie circulaire, et l’écologie territoriale est en train de se constituer en champ disciplinaire. 2. L’économie de la proximité appliquée à l’environnement est relativement récente (depuis le début des années 2000) et n’est pas encore finalisée sur le plan de la recherche en terme de grille d’analyse. L’intérêt qu’elle présente est de faire jaillir à partir de la question de la proximité géographique la problématique de la proximité organisée, car celle-ci semble pertinente pour appréhender un certain nombre de problèmes posés par le verdissement d’un territoire. A la confluence de l’économie industrielle et de l’économie spatiale, l’économie de la proximité propose une grille originale qui, partant des limites d’une approche en terme de proximité géographique seule (distance spatiale entre deux entités, pondérée par le coût du franchissement), intègre un autre type de proximité d’essence relationnelle qui traduit la capacité qu’offre une organisation de faire interagir ses membres. Ce diptyque proximité géographique/proximité organisée permet de mieux expliquer les dynamiques productives sur les territoires. Dans la proximité organisée jouent une logique d’appartenance (interactions facilitées) et une logique de similitude (système de représentations partagées). Les débats théoriques au sein de ce courant sont nombreux et les champs d’application potentiellement larges. Cette grille s’applique au domaine de l’environnement et à la gestion de ses problèmes, car ceux-là sont principalement territorialisés (proximité géographique), et parce que des éléments constituant la proximité organisée y jouent aussi un grand rôle : partage de préoccupations, de croyances, d’informations, de savoirs, importance des coordinations d’acteurs, du cadre de résolution, par exemple. Dans un article très complet sur la question, A Torre et B. Zuindeau (2009) avaient dressé un bilan de cette application qu’ils résumaient dans le tableau suivant. 12 Ce champ de recherche est encore en plein développement et le tableau précédent montre quels axes sont approfondis. Si la proximité organisée peut faciliter le traitement d’un problème environnemental, elle n’est pas nécessairement bénéfique par rapport à un problème productif sur un territoire. Les proximités organisées peuvent être sources de conflit d’usage autour de ressources, et plus largement peuvent rendre compte de problématiques environnementales qui s’articulent autour de valeurs partagées, de référentiels cognitifs, d’intérêts communs La proximité institutionnelle 12 peut faciliter l’émergence de dispositifs territorialisés de coordination des acteurs et faire converger les intérêts individuels et permettre ainsi la structuration de l’action collective. 3. Les travaux sur les objectifs et la responsabilité environnementale des firmes présentent un intérêt certain pour notre étude, mais ils sont très abondants, de différentes disciplines scientifiques, et de nature et qualité relative diverses. Partons d’une problématique simplifiée, la double dimension de l’économie verte qui a des effets ambivalents sur les entreprises : d’un côté, la dimension réglementaire joue plutôt négativement, évoquant une contrainte (environnementale) et une menace sur l’activité et la croissance de la firme ; de l’autre côté, elle comporte une dimension économique avec des opportunités de profit, d’investissement, de croissance. Comment du point de vue de l’entreprise transformer la contrainte en opportunités ? Comme l’a montré D. Boullet dans sa thèse sur la gestion de l’environnement dans les entreprises industrielles en France jusqu’en 1990, trois termes définissent les degrés successifs de leur implication croissante dans la prise en compte de la contrainte environnementale13: – inattention (jusqu’à la fin des années 1950) – adaptation – intégration (à partir de la seconde moitié des années 1980) L’auteur note que la conjoncture économique générale n’a jamais inversé la tendance, mais trois types d’influence semblent par contre avoir joué fortement sur cette évolution : l’action de la puissance publique (de façon indirecte ou directe, par la réglementation ou les incitations) ; l’influence de l’opinion ; et des influences extérieures, européennes et internationales. Ce 12 Les institutions sont ici « les valeurs que partagent les acteurs dans le projet collectif de préservation des ressources naturelles et dans l’émergence d’un dispositif de création de ressources cognitives destinées à résoudre les problèmes posés », Beaurain C. et al. (2009), « La proximité institutionnelle, condition à la reconquête de la qualité de l’environnement. L’exemple de l’agglomération dunkerquoise », Natures Sciences Sociétés, vol. 17, n° 4, p. 374. 13 Boullet D. (2006), La gestion de l’environnement dans les entreprises industrielles en France : une mise en perspective historique (1950-1990), ESKA. 13 n’est donc pas seulement par nécessité réglementaire que l’entreprise a cherché à s’adapter, mais aussi en réponse à des incitations et pressions sociologiques. La prise de conscience de l’impératif sur le plan économique est ce qui arrive le plus tardivement dans ce processus d’évolution et n’a certainement pas encore aujourd’hui atteint toutes les entreprises. Historiquement l’action collective à travers des organismes variés a participé aussi à l’intégration de la question environnementale dans l’industrie en France, et parmi ceux-là l’action collective des entreprises elles-mêmes : que ce soit dans le syndicalisme patronal (en particulier les syndicats de branche) ou dans des associations créées par les entreprises, le premier objectif, celui de la défense des intérêts industriels, n’a pas empêché la prise en compte, à des degrés divers, d’objectifs de protection de l’environnement. Brièvement (cf. Laperche in Laperche, Crétiéneau et Uzunidis, 2009), la théorie économique sur les objectifs de la firme enseigne que (1) les objectifs de l’entreprise dépendent de la définition donnée à l’entreprise, (2) le profit est un objectif essentiel mais non unique, (3) des objectifs divers, internes, interviennent également (croissance des ventes, taille de l’entreprise, prouesses techniques). La prise en compte de facteurs externes dans leur comportement relève de « questions nouvelles », et, du point de vue théorique a priori, c’est-à-dire sans les pressions sociales et les attentes des parties prenantes, l’entreprise n’a pas à adopter un comportement « responsable » sur les plans environnemental et social 14 . Pourtant, les entreprises ont commencé en réalité à intégrer ces considérations il y a fort longtemps, c’est ce que montrent l’analyse de la pensée managériale et les pratiques des entreprises. Ce qui est récent, c’est l’institutionnalisation de cette responsabilité sociale, et des approches théoriques nouvelles ont été développées par conséquent (cf. Acquier et Aggeri, 2008). Dans l’ouvrage de l’Américain H.R. Bowen, Social Responsabilities of the Businessman, datant de 1953, la responsabilité sociale apparaît comme un ensemble d’obligations vis-à-vis de la société, un outil de régulation de l’économie. Des entreprises ont dans les décennies suivantes appris à « s’autoréglementer » en prenant en charge certains problèmes sociaux (dans le domaine du travail notamment) et environnementaux. La théorie de Freeman (1984) en définissant les parties prenantes (stakeholders) a constitué une avancée importante : il s’agit de « tout groupe ou individu qui peut affecter ou qui peut être affecté par la réalisation des objectifs de l’entreprise ». La responsabilité première de l’entreprise reste le profit généré par l’activité, mais les entreprises ont intérêt à poursuivre des objectifs sociaux 14 Rappelons que pour l’économiste Milton Friedman, la seule responsabilité de l’entreprise est de faire des profits, et cela conduit selon lui à la maximisation du bien-être collectif. 14 et environnementaux. Cette responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) présente une valeur économique directe et, à ce titre, elle entre au cœur et dans toutes les activités de l’entreprise (investissement stratégique, stratégie commerciale, outils de gestion). En même temps que se sont répandues des pratiques « socialement responsables » dans le monde de l’entreprise, l’environnement de l’entreprise a renforcé des pressions : normes, actions/décisions des pouvoirs publics, stratégies des autres acteurs Au total, bien qu’étant a priori un engagement volontaire de la part de l’entreprise, la RSE répond pour une part aux contraintes légales. Selon des enquêtes (Laperche, 2009, p. 156), « les entreprises les plus « responsables » sont celles qui font de la responsabilité envers les salariés, envers la société civile et envers l’environnement un instrument de sauvegarde et de réalisation des profits ». L’entreprise y trouve trois intérêts (vision utilitaire, instrumentale de la RSE) : la baisse des coûts et des risques (énergies par exemple), la construction d’un potentiel d’innovation (produits bio par exemple), et le renforcement de sa légitimité (stratégie de communication). Trois points se sont précisés concernant la responsabilité sociale depuis quelques années. - La terminologie retenue officiellement par ISO 26000 est Responsabilité Sociétale des Organisations (RSO) qui désigne ainsi la responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et l’environnement. - On observe désormais une différence d’approche entre l’Europe et le reste du monde : la première la définit maintenant comme « la contribution des entreprises au développement durable », et l’évalue donc à l’aune des trois piliers que sont la prospérité économique, la justice sociale et la viabilité écologique. Ce couplage traduit un transfert de la responsabilité des Etats vers les entreprises et « participe donc d’un mouvement d’institutionnalisation du rôle de l’entreprise dans la prise en compte, voire la prise en charge, des questions de développement durable »15. - Les résultats de l’enquête16 sur la RSE auprès d’entreprises de 10 salariés ou plus réalisée par l’INSEE fin 2011 montrent qu’il s’agit d’une démarche répandue qui modifie vraiment les pratiques des sociétés. Elles sont généralement de taille plus importante que les autres, et appartiennent le plus souvent aux secteurs de l’énergie, de l’environnement, et de l’industrie agroalimentaire, et le moins souvent dans le commerce et l’industrie 15 Quairel F. et Capron M. (2013), « Le couplage responsabilité sociale des entreprises et développement durable : mise en perspective, enjeux et limites », Revue Française de Socio-Economie, n° 11, p. 126. Notons que le Centre des Jeunes Dirigeants d’entreprise (CJD) traduit et décline le concept de DD en notion de « performance globale ». 16 Ernst E. et Honoré-Rougé Y. (2012), « La responsabilité sociétale des entreprises : une démarche déjà répandue », Insee Première, n° 1421, novembre. 15 manufacturière. Pour certaines actions, comme la prévention ou le recyclage des déchets, les entreprises y sont sensibilisées sans même connaître ou appliquer la démarche RSE, même les petites. Hors déchets, c’est pourtant sur le pilier environnemental que les écarts entre les sociétés engagées dans la RSE et les autres sont les plus marqués. Le pilier social (lutte contre les discriminations, conditions de travail, gestion des emplois) est celui qui concentre le plus d’initiatives, que les entreprises soient impliquées ou non dans la RSE. Ce tour d’horizon des travaux qui intéressent le sujet de notre étude montre la richesse et l’actualité des réflexions sur les questions de « verdissement » de l’économie et les notions connexes d’une part, et l’intérêt de la double entrée, par les territoires et par les entreprises, d’autre part. Précisément quatre territoires de la région Poitou-Charentes seront définis pour élaborer l’échantillon d’entreprises soumises à l’enquête. La partie II expose la méthodologie suivie dans notre étude. 16 II. Méthodologie de l’étude Nous distinguons deux phases dans l’étude. Dans la première phase, se réalise tout le travail préparatoire à l’enquête de terrain : - détermination du périmètre de l’étude : territoires et acteurs choisis ; - élaboration de la grille de l’entretien ; Dans la seconde phase, les entretiens semi-directifs sont menés de face à face en allant à la rencontre des acteurs microéconomiques sur leur territoire. A l’issue de ce travail de terrain sur le comportement des entreprises, sur les enjeux, les opportunités, les freins à leur niveau, une problématique peut être construite pour dégager les potentialités de développement de l’économie verte localement dans chaque territoire, pour identifier les dynamiques de verdissement éventuelles à l’œuvre, et pour en déduire des pistes pour l’action de la puissance publique. II.1. La définition des territoires retenus par l’étude Une première étape exige de définir les territoires tests de la région PoitouCharentes qui seront retenus dans l’étude. L’objectif à ce stade est, en croisant les activités antérieurement identifiées et des territoires bien spécifiés, de permettre l’entrée par les entreprises qui sont des acteurs de premier plan de l’économie verte. Les territoires choisis sont nécessairement de nature différente, à tous les niveaux, mais surtout ils divergent par leur degré de verdissement. Considérés ensemble, ils représentent autant que possible les divers cas de figure observables dans la région Poitou-Charentes. Une contrainte de surcroît est de choisir un territoire par département afin que puissent être pris en compte tous les contextes et perspectives locaux, et au maximum les facteurs d’impulsion, de déclenchement, de facilitation, ou au contraire de frein et d’obstacle tenant à ces divers contextes. Les critères de choix sont donc : un degré de verdissement du territoire établi a priori à partir de la connaissance des activités économiques de la région et des apports des trois études du programme DREAL 2012 sur l’économie verte, le triptyque urbain/périurbain/rural, l’engagement dans une démarche territoriale, ainsi que d’autres éléments de différenciation plus communs comme la superficie, la population ou la densité, ou même l’emploi. Ainsi définis, ils ne correspondent pas non plus à des délimitations administratives ou à un regroupement quelconque d’entités économiques. L’ensemble des quatre territoires n’étant pas établi à des fins de comparaison, c’est une hétérogénéité reflétant celle de la région qui est recherchée. 17 De prime abord, aucun territoire n’est exclu. L’échelle géographique intervient en ce qu’elle doit permettre de disposer des acteurs économiques suffisants en nombre et selon les activités pour mener une enquête représentative sur le territoire en question. Certains critères découlant des études antérieures jouent fortement. C’est le cas du poids important des TPE/PME dans le tissu économique régional et de l’atout potentiel qu’elles représentent dans la dynamique régionale de verdissement. Cette place occupée en réalité doit se retrouver dans l’échantillon d’acteurs interviewés dans la phase 2 de notre étude. Quant aux filières vertes, parmi les seize retenues dans la précédente étude, certaines ont une moindre importance, comme la géothermie ou l’éolien off-shore, pour notre région et peuvent donc être négligées dans l’étude. Enfin, les secteurs économiques en verdissement sont à prendre en compte à la hauteur de l’importance qu’ils ont dans la transition vers une économie régionale verte. Au vu de tous ces éléments, il a pu être procédé à un premier repérage cartographique des différentes configurations croisées quant au degré d’urbanisation, au niveau de la concentration de l’emploi, à la localisation régionale des métiers verts et verdissants, s’appuyant pour cette dernière, et à titre indicatif, sur la carte de l’INSEE « Répartition géographique des métiers verts et verdissants en Poitou-Charentes » (cf. annexe 1). Le repérage s’est affiné « visuellement » avec le répertoire des « éco-entreprises »KQ qui, bien que non exhaustif, peut confirmer l’existence de zones de concentration des éco-entreprises ou au contraire de « déserts » d’éco-entreprises. Est utile aussi la recension des acteurs par les thématiques )C+-)0$/. / )C .-2$.; acoustique, vibrations air et odeur, déchets recyclage, eau, maîtrise de l’énergie et énergies renouvelables, management environnemental, urbanisme, risques, paysage et développement durable. La définition des territoires a exigé un tâtonnement inévitable avec tests successifs et application de critères complémentaires relatifs aux codes activités 100% environnementales 18 , secteurs d’activités, à la taille des entreprises et présence de réseaux d’entreprises. Le degré de verdissement des territoires a été apprécié aussi en tenant compte de la présence de démarches vertes ou d’acteurs verts. Au final, les quatre territoires de l’étude, tous différents, répondant aux critères précédents, à la fois séparément et pris ensemble, sont qualifiés ainsi : 17 http://www.eco-entrepreneurs.org/eco-entreprise.html En recourant par exemple à Unistatis qui fournit le nombre d’emplois salariés du privé et le nombre d’établissements par code NAF : http://unistatis.orsid.com 18 18 T1 : territoire où absence de dynamique de verdissement T2 : territoire où dynamique de verdissement « faiblement émergente » T3 : territoire où dynamique de verdissement « fortement émergente » T4 : territoire où forte dynamique de verdissement Et le choix, par département et par ordre croissant de verdissement, est précisé dans le tableau suivant : Tableau 1 : Territoires d’étude : localisation T1 T2 T3 T4 Territoire Canton VilleboisLavalette Chauvigny et communes au Nord et à l’Est Thouars et sa proche périphérie La RochellePérignyAytré en partie Département Charente (16) Vienne (86) Deux-Sèvres (79) CharenteMaritime (17) Des cartes précisant les territoires se trouvent en annexe 2. Pour chacun des territoires, on prend en compte les démarches territoriales mises en place : Plan Climat Energie Territoire (PCET), Agenda 21, actions réalisées dans le cadre de la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD). Tableau 2 : Territoires d’étude : démarches territoriales T1 T2 T3 T4 PCET Non Non CLIC Pays Thouarsais (démarche volontaire) Ville de La Rochelle et CA de la Rochelle (obligatoire) Agenda 21 Oui (CC de la Vallée de l’Echelle : Dignac, Sers et Torsac) Non (CC d’Horte et la Valette) Non (uniquement à l’échelle du département) Non CA de la Rochelle Fiches territoriales SNDD Aucune Aucune Aucune Charte de développement durable Port Atlantique La Rochelle 19 II.2. Recension des acteurs présents sur les territoires préalablement définis Certes, le choix des quatre territoires ne s’est pas fait indépendamment des acteurs qui y sont présents, mais il est indispensable de procéder ensuite à une recension plus rigoureuse des acteurs. Des listes d’acteurs peuvent être dressées à partir de divers répertoires en ligne : Pôle des Eco-industries, Cluster éco-habitat, l’Annuaire des entreprises de France (CCI), et, de manière plus informelle, grâce aux Pages Jaunes et à des moteurs de recherche Internet. Tableau 3 : Territoires d’étude : présence d’acteurs « verts » et « verdissants » 7 8 9 : $/$&%' '%&$ 3&& J K K LM $/$&%' !% 3'%&$% J L J KP $/&$"$%% $"$& $% 0 3&$"$%%1 J N Q MR &'$%" &&% 0$($&1 M KO KP NS On introduit l’hypothèse que l’adhésion d’acteurs à un réseau d’entreprises impliqué dans le verdissement de l’économie contribue à renforcer la dynamique de verdissement du territoire lui-même. La vérification de la cohérence des territoires préalablement définis s’opère de fait aussi lors de la recension des acteurs des filières vertes présents sur chaque territoire. 20 Tableau 4 : Acteurs répertoriés par territoire selon les filières vertes Filière verte T1 T2 T3 T4 Bâtiment basse consommation (interaction avec d'autres filières > verdissement) 0 2 2 5 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 1 2 7 3 13 0 1 2 3 0 0 0 1 1 5 8 21 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 1 3 15 16 49 Biocarburants 1,2 et 3G Biomasse matériaux Chimie verte Déchets (recyclage et valorisation) Eau/ assainissement Énergies marines ENR (Photovoltaïque, bois énergie) Éolien Géothermie Méthanisation Smart grids/Stockage de l’énergie Véhicule / Transport « décarboné » Total Ce tableau vient confirmer le degré relatif de verdissement établi pour les quatre territoires, le nombre d’acteurs répertoriés étant croissant de T1 à T4. Notons que les filières vertes présentes sur nos territoires apparaissent plutôt représentatives des filières vertes en région Poitou-Charentes : on dénombre peu d’acteurs appartenant à une filière verte lorsque la filière est "de moindre importance", et des acteurs plus nombreux lorsqu'il s'agit de filières "socles" en région (cf. l’étude sur les filières vertes du Cabinet Alcimed, 2012). Ces 21 dernières sont, de façon générale, des filières existantes dans la région avec des acteurs sur l’ensemble des maillons de la chaîne de valeur. La recension des entreprises sur chaque territoire, sans viser l’exhaustivité, doit toutefois permettre d’atteindre in fine l’échantillon d’acteurs attendu sur chaque territoire étant donné le taux probable non connu a priori des nonréponses aux demandes d’entretien. Notamment, les acteurs enquêtés doivent permettre à l’étude de couvrir les trois cas possibles : l’entreprise a entrepris des actions dans le domaine du verdissement ou a des activités relevant de l’économie verte ; l’entreprise a des projets dans ce domaine ; l’entreprise n’a rien fait, ni projeté dans ce domaine. II.3. Détermination de l’échantillon d’acteurs La taille de l’échantillon d’entreprises est fixée de 15 à 20 sur chaque territoire. Outre ces acteurs de premier plan dans le verdissement de l’économie, l’étude s’appuie aussi dans un premier temps sur des acteurs « relais » pour la constitution des quatre échantillons. Il s’agit d’acteurs institutionnels ou d’organisations ayant une présence et un impact potentiellement important sur les décisions microéconomiques, tels les Communautés de Communes et d’Agglomération, les Pays, les Chambres de Commerce et d’Industrie, les Chambres de Métiers et de l’Artisanat, les Chambres d’agriculture, les Clubs d’entreprises... Ces contacts sont source d’informations concernant le degré de verdissement et les projets des acteurs locaux. Ils ont été informés en général du déroulement de l’étude et peuvent permettre de faciliter la prise de contact avec les entreprises auprès desquelles seront menés les entretiens par la suite. Les acteurs « relais » recensés au préalable pour chaque territoire figurent en annexe 3. A l’issue des entretiens avec les entreprises, donc à la fin de l’enquête, ces acteurs jouant eux-mêmes un rôle important sur le terrain et dans le verdissement de l’économie sont susceptibles d’apporter des éléments complémentaires pour affiner l’analyse des comportements des entreprises et des interactions favorables ou non au verdissement d’un territoire. II.4. Elaboration de la grille d’entretien L’entretien semi-directif exige d’établir une grille préalable tenant compte de la diversité des cas possibles et de toutes les nuances nécessaires à introduire dans ce que nous avons auparavant désigné « degré de verdissement ». En particulier, le cas du projet d’action ou d’activité verte peut concerner 22 l’entreprise ayant déjà mené au moins une action concrète, comme celle n’ayant rien engagé du tout. Sur la totalité des échantillons, il fournira une indication sur la tendance en matière de dynamique de verdissement dans la région, en plus de celle donnée par chaque échantillon. Aussi, après des questions générales sur l’entreprise, sur son positionnement par rapport aux préoccupations environnementales, et sur son ancrage territorial, le questionnaire comporte trois parties pour distinguer les trois cas : action(s) entreprise(s) ; projet existant ; aucune action ni projet. Dans le dernier cas, l’entretien est moins directif afin de pouvoir mieux cerner les motivations et les freins et obstacles, et de mieux comprendre les processus à l’œuvre au niveau de l’unité. Les entretiens sont réalisés autant que possible de face à face. La grille d’entretien est jointe en annexe 4. En voici la structure : Une notice accompagne, pour l’enquêteur, la grille d’entretien ; elle définit les notions clés (économie verte, RSE, parties prenantes), et comporte une liste d’acteurs intervenant localement, et une liste d’aides et de dispositifs à suggérer en exemple dans la discussion si besoin après la réponse spontanée de l’entreprise. Les entretiens complémentaires réalisés auprès d’autres acteurs microéconomiques que les entreprises sont a priori libres mais dépendent des réponses faites par les entreprises enquêtées du même territoire. II.5. Seconde phase de l’étude : la réalisation des entretiens Une fois dressée la liste des acteurs à solliciter sur chaque territoire, une cinquantaine d’entreprises sont contactées sur T1, T2 et T3, puis un réajustement, tenant compte des secteurs d’activité, est effectué en fonction 23 des réponses négatives. Sur T4, l’aide particulière apportée en amont par le Club des Entreprises explique en partie le meilleur taux de réponses positives. Ailleurs, il est en moyenne d’environ un quart. Tableau 5 : Taux de réponses positives à une demande d’entretien T1 T2 T3 T4 Total 226 60 68 57 41 Entreprises contactées (dont 46 par lettre postale) (dont 13 par lettre postale) (dont 2 par lettre postale) (dont 8 contactées en amont) Réponses positives 14 17 17 16 64 Taux de réponses positives 24,3% 25,0% 29,8% 39,0% 28,3% Les entretiens auprès des entreprises sont réalisés en quasi-totalité de face à face19 de mars à avril 2013. Et dans la très grande majorité des cas (quatre sur cinq), le dirigeant lui-même a été interviewé20. L’échantillon d’entreprises est réparti sur chaque territoire en termes d’effectif comme suit : Tableau 6 : Distribution de l’échantillon par territoire et par effectif Effectif Territoire 1à9 10 à 49 > à 49 Total T1 11 3 0 14 T2 14 3 0 17 T3 5 6 6 17 T4 9 2 5 16 Total 39 15 10 64 Les deux tableaux suivants fournissent le détail des entretiens réalisés, respectivement par secteur d’activité et par filière verte. Ils respectent dans la 19 Sur la totalité, deux entretiens ont été réalisés par téléphone. Pour 8 entreprises, le responsable qualité/sécurité/environnement a répondu à l’enquête. Et pour les 4 dernières, des personnels divers mais proches de la direction nous ont répondu. La durée de l’entretien d’une heure environ a pu aller jusqu’à une heure et demie. 20 24 mesure du possible les exigences que nous nous étions fixées sur le plan méthodologique. Tableau 7 : Distribution de l’échantillon par secteur d’activité et par territoire Nombre d'entreprises par territoire Secteurs d'activité T1 T2 Agriculture 2 3 IAA 1 BTP 2 Déchets T3 1 2 2 Eau et assainissement 2 2 Artisanat 1 Commerce et réparation automobile 3 Autre commerce 1 2 Industrie textile 1 1 Industrie chimique 1 Industrie du bois 1 1 1 6 2 4 1 4 2 6 6 3 1 4 2 2 1 2 Blanchisserie industrielle 1 1 Autres services personnels 3 2 3 1 1 1 Industrie plastique et métal Imprimerie 3 1 1 5 3 1 2 1 2 1 2 1 Services : bureaux d'études 2 2 2 Santé humaine et action sociale 1 1 Transport terrestre 2 2 Transport maritime Total Total 1 Artisanat ENR (installation) Hôtellerie T4 14 17 17 2 2 16 64 25 Tableau 8 : Distribution de l’échantillon par filière verte et par territoire Nombre d’entreprises par territoire Filières vertes T1 T2 T3 Bâtiment à faible impact environnemental T4 Total 1 1 Recyclage et valorisation des déchets 2 1 2 5 Energies renouvelables 2 1 4 7 Eau et assainissement 1 Transport décarboné Total 0 4 3 1 2 2 9 16 Le profil des entreprises interrogées étant précisé en termes d’effectifs et par secteur d’activité, pour chaque territoire, rappelons que ces entretiens sont complétés par des échanges avec des acteurs relais 21 qui apportent les précisions manquantes, et complètent notre information en délivrant leur point de vue et d’éventuels attentes qu’ils ont et freins qu’ils constatent relativement au verdissement de l’économie régionale. Dans la partie suivante, les résultats de l’enquête esquissent une présentation de chaque territoire au regard de sa dynamique de verdissement. 21 Parmi ceux-là, les Communautés de Communes et d’Agglomération, Pays, Chambres de Commerce et d’Industrie, Chambres de Métiers et de l’Artisanat, Chambres d’agriculture, Clubs d’entreprises, peuvent faciliter la prise de contact avec les entreprises pour les entretiens, et nous informer sur les projets des acteurs locaux. 26 III. Résultats sur la dynamique de verdissement des territoires La dynamique de verdissement des territoires est dégagée à partir de l’échantillon d’entreprises interrogées sur chacun des quatre territoires. Le territoire en verdissement ainsi caractérisé, de T1 à T4, est dépendant des choix méthodologiques faits auparavant. Les résultats doivent donc être relativisés et appréhendés avec les précautions qui s’imposent dans une étude ne visant pas l’exhaustivité et s’appuyant sur le déclaratif. Des résultats bruts par territoire sont en outre fournis en annexe 5. De manière générale, on peut associer l’avancée d’un territoire en matière de verdissement à des prismes qui, considérés ensemble, décriront un degré minimal de verdissement. Une des raisons formelles est la réglementation, qui est la même sur tous les territoires. Une des raisons informelles est qu’a priori la « vague verte » (la problématique verte ou de verdissement) peut atteindre, potentiellement sensibiliser via les médias, tous les acteurs. Il s’agit de mettre en évidence la dynamique de verdissement d’un territoire partant du point de vue des entreprises, avec l’idée donc que si celles-ci en sont les premiers acteurs économiques, elles sont au cœur d’un maillage émanant de structures, d’organisations, et de réseaux, et, ceci, à des niveaux différents d’action et de coopération, qui s’est lui-même constitué autour des activités microéconomiques. Ce maillage donne une spécificité au territoire bien au-delà du diptyque rural/urbain, et amène à poser de façon différenciée le verdissement d’un espace à l’autre. En toile de fond, les aides et incitations à l’échelle de la région (Conseil Régional et ADEME principalement), sont globalement relayées par des acteurs institutionnels locaux, mais la puissance publique n’est pas également présente et volontariste sur tous les territoires en matière de verdissement. Son exemplarité est un enjeu pour la mobilisation de l’ensemble des acteurs (D&Consultants, 2012, p.42). Plus encore qu’à travers le verdissement des collectivités (Agenda 21 notamment) et des établissements publics, la puissance publique peut montrer, en s’engageant sur une politique concrète de verdissement et en affichant clairement cette priorité, comment sur son territoire le développement économique à venir est à associer à celui de l’économie verte. Les entreprises implantées ont, quel que soit le territoire, besoin de bénéficier de cette dynamique insufflée et de cette vision d’avenir éclairée. Nous verrons que, sur ce plan, les territoires sont très inégaux. Enfin, considérant les quatre territoires simultanément, nous observerons la progressivité en terme de dynamique, et l’évolution discontinue, graduée du maillage et de l’interaction entre les diverses 27 structures et organisations et réseaux présents, quand on passe d’un territoire à l’autre. III.1. Dynamique observable sur le territoire T1 Figure 3 : Entretiens réalisés sur T1 : Sud-Est Charente Les contours du territoire T1 sont tracés par la localisation des entreprises implantées relevant de l’étude : elles sont situées sur le canton de VilleboisLavalette (Charente), en milieu rural et sont quasi-exclusivement des microentreprises22. Bien qu’à une vingtaine de kilomètres du chef-lieu Angoulême, ce territoire apparaît comme un espace économique « enfermé », avec un déficit de mise en relation des acteurs. Pour autant, il n’y a pas en réalité, et 22 La Commission européenne a pris une recommandation (6 mai 2003 - 2003/361/CE) qui définit les micro-entreprises comme des entreprises de moins de 10 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel ou le total du bilan n'excède pas 2 millions d'euros. Sur les 14 entreprises de notre échantillon, 11 ont un effectif de 1 à 9, et les trois plus grandes entreprises n’excèdent pas les 49 salariés. 28 contrairement à notre hypothèse de départ, absence de dynamique de verdissement. Et les entreprises les plus proches d’Angoulême ne sont pas les plus vertes ou verdissantes de l’échantillon. Les observations qui suivent traduisent la réalité du verdissement de ce territoire. Première observation : des éléments particulièrement sur ce territoire de contexte généraux pesant Le contexte économique général contraint fortement les choix des entreprises et les met, pour certaines, dans une situation difficile en raison de la contraction nécessaire des effectifs. Au manque de temps du personnel s’ajoute la préoccupation majeure permanente d’assurer la survie de l’unité. Ce contexte est défavorable aussi parce qu’il ne facilite pas les relations entre les entreprises ; les rapports sont plus tendus, la concurrence s’étant plutôt exacerbée sur le territoire sous l’effet de la crise récente. Des éléments d’ordre structurel ou sectoriel jouent également de façon négative. Notamment la problématique de verdissement pour les entreprises du secteur agricole apparaît complexe du fait de la crise structurelle profonde, des adaptations significatives attendues justement de ce secteur dans l’optique de la transition écologique, sans parler d’incitations ou de réglementations globalement incohérentes aux yeux de l’exploitant. Pour la filière bois, des éléments comme la concurrence internationale (pays de l’Est) ou des problèmes de gestion des stocks (erreurs ou gestion discutée de la Coopérative Agricole et Forestière Sud-Atlantique CAFSA ou de l’ONF) sont mis en avant par les entreprises. Le tableau suivant rappelle les secteurs d’activité concernés par l’échantillon d’entreprises du territoire T1. 29 Tableau 9 : Les secteurs d’activités des entreprises interrogées sur T1 Secteur d’activité Nombre d'entreprises Commerce et réparation Automobile 3 Agriculture 2 BTP 2 Artisanat 1 Commerce 1 Industrie agroalimentaire 1 Industrie du bois 1 Industrie chimique 1 Industrie textile 1 Hôtellerie 1 Total 14 Notons également les besoins particuliers des entreprises vertueuses renforcés sur un territoire où celles-ci se sentent isolées. D’une part, le besoin de « reconnaissance » des efforts de verdissement entrepris se traduit par des attentes sous la forme d’encouragements à poursuivre, et de notoriété auprès des parties prenantes (de la clientèle surtout). D’autre part, elles expriment un besoin d’être « protégées » de la concurrence des acteurs qui ne respectent pas les nouvelles normes (en produisant localement ou en important) ou de ceux assez « gros » sur le marché pour pouvoir diversifier leurs offres (du système « industriel » classique au vert) et conserver ainsi des marges plus confortables sur les produits non écologiques. Deuxième observation : un ancrage fort des activités sur un territoire qui présente peu d’éléments de dynamisation en général La question de l’attractivité du territoire T1 ne saurait se poser en termes économiques. Dominent largement des déterminants d’ordre sociologique pour expliquer le choix de s’implanter sur le territoire : les dirigeants d’entreprises ont souhaité rester à proximité de leur famille ou pérenniser l’entreprise familiale dont ils ont hérité. Dans les entretiens, l’attachement au territoire ressort nettement avec parfois mise en exergue de compétences locales traditionnelles spécifiques pour justifier ce choix de localisation. 30 Toutefois, les entreprises sont très fortement centrées sur elles-mêmes et majoritairement isolées des autres acteurs microéconomiques, elles éprouvent un faible sentiment d’appartenance à un territoire qui, de leur point de vue, ne connait aucune dynamique collective et où rien n’est mutualisé. La tendance à l’isolement et à l’enclavement a été renforcée par la conjoncture économique défavorable et la morosité. Le pessimisme sur l’avenir des activités économiques sur le territoire affecte tous les secteurs. La plupart des unités n’envisagent pas de recrutement de personnel, et si elles le pouvaient elles privilégieraient des compétences en informatique, commerce, gestion plutôt que dans le domaine du verdissement. La moitié des entreprises interrogées affirment n’appartenir à aucun réseau23. Et la plupart ne sont pas en relation avec les chambres consulaires ni avec les collectivités territoriales (communes, pays ou communautés de Communes), pourtant importantes pour l’information sur les dispositifs d’aide ou d’accompagnement existants dans la région Poitou-Charentes. Ces observations ont été confirmées au cours d’entretiens menés auprès des organisations en question. Les dispositifs régionaux d’aide au financement ne ciblant pas a priori directement les acteurs du territoire, rendre visibles ces dispositifs ne suffirait pas, il conviendrait de les rendre véritablement accessibles aux microentreprises et entreprises de services. Le territoire ne dispose pas d’acteur de la recherche ou de la formation susceptible de jouer spontanément en faveur d’un développement local. Les collectivités territoriales ont face à elles des petites entreprises dispersées spatialement et dans une assez grande diversité de secteurs. Pour impulser une dynamique, s’engager pour « montrer l’exemple » ne saurait suffire ; et comme créer une zone d’activité « vitrine » inspirée de l’économie circulaire n’est pas envisageable, le regroupement d’entreprises à l’échelle intercommunale pourrait être source de dynamisation du territoire. Mais la création d’un club d’entreprises par exemple dépend de la volonté des chefs d’entreprise eux-mêmes. De leur côté, ceux-là expriment une conscience aigüe des besoins de dynamisation et d’animation locales et, pour la plupart, réaffirment leur volonté de maintenir l’emploi et l’économie locale, insistant sur le caractère vital du circuit court. La diversification des activités par un même entrepreneur, qui semble se développer aujourd’hui, le positionne sur plusieurs métiers ou dans l’interprofessionnel, facilitant les échanges et les 23 Spontanément, les réseaux évoqués par les personnes interrogées sont les suivants : CAPEB d’Angoulême, Charentes Alliance (coopérative agricole), Fédération française de la chaussure, Centre des Jeunes Dirigeants, Alliance entreprises, Charente export, Chambre de Commerce et d’Industrie (en charge de l’export), Chambre des Métiers et de l’Artisanat (membre du bureau), Confédération charcutier traiteur de la Charente, Association du grillon charentais. Une entreprise est particulièrement impliquée et appartient à 4 réseaux. 31 relations entre activités auparavant cloisonnées et donc favorise potentiellement le verdissement de l’économie locale. Enfin, les entreprises insérées dans des réseaux au-delà du canton bénéficient d’impulsions qui mériteraient d’être davantage « exploitées » localement. Troisième observation : une réglementation et une gestion des aides éloignées du terrain De façon générale, les petites structures rappellent avant tout leur faible marge d’action sur les processus y compris au niveau le plus décentralisé. Et elles demandent aussi de tenir compte de la différence entre l’entreprise unipersonnelle et la TPE, comme entre la TPE et la PME, ou entre la PME et le grand groupe. Pour faciliter l’application de la réglementation et la mise en œuvre des aides prévues notamment dans le domaine du verdissement, les TPE suggèrent qu’elles aient affaire à un seul « centre administratif », une sorte de « guichet unique » auprès duquel toutes les démarches pourraient être réalisées, ou qu’au moins un soutien global et déterminant pour cette réalisation puisse leur être apporté. Un dirigeant d’entreprise d’origine étrangère, habitué à un système plus simple, éprouve plus de difficultés encore pour connaître et appliquer la réglementation dans le contexte français. Selon certains acteurs, de nouvelles normes sont l’occasion pour les autorités d’exercer sur le terrain des contrôles plus étroits sur les activités microéconomiques. De plus, l’existence de normes identiques à celles d’un territoire urbain est parfois mal comprise (récupération des eaux de pluie ou installation de production photovoltaïque par exemple). La réglementation évoque pour certains le non-sens, voire arrive parfois en seconde position, juste après la contrainte financière, pour justifier l’absence d’action verte ou de projet verdissant, avec notamment le problème du recyclage à la source (ceci est également relevé à propos des cartons et des pneus). Enfin, la réglementation peut devenir pour certains le seul moteur de verdissement, directement à travers des obligations auxquelles doivent se soumettre les unités ; elle agit aussi de façon indirecte, en s’imposant via les « produits » livrés par les fournisseurs, ou en transformant une opportunité commerciale ou faible contrainte de marché en obligation de s’adapter à la demande nouvelle des clients. L’attitude des entreprises à l’égard de la réglementation est de fait ambivalente mais, sauf exception, elle ne saurait être proactive sur ce territoire. 32 Quant aux aides dont peuvent bénéficier les entreprises, ces dernières ont connaissance de certaines, quand l’information est relayée sur le territoire24, mais celles-ci ne sont pas exclusivement ciblées « environnement », comme les Bourses Régionales Désir d’Entreprendre (BRDE) ou les dispositifs Cordee TPE ou LEADER. Et tout en sachant que la Région Poitou-Charentes et d’autres décideurs et autorités publiques ont prévu techniquement des soutiens conséquents à l’activité et au développement économique et social en milieu rural, les acteurs microéconomiques ne sont pas persuadés de disposer de l’information nécessaire sur ces soutiens, et que les aides bénéficient bien en priorité à ceux qui en ont le plus besoin25. En particulier dans le domaine du verdissement, l’entreprise ignore en général quelles doivent être sa situation économique et financière, et sa capacité de financement pour bénéficier d’aides et d’accompagnement26. Elles auraient besoin d’un suivi personnalisé technique, pointu parfois, de temps et de pouvoir prendre un peu de recul. Un accompagnement dans la durée, par la mutualisation par exemple d’une personne, pourrait probablement favoriser la pérennité du verdissement. Quatrième observation : une innovation concentrée principalement sur l’acquisition de nouvelles compétences Dans un tissu économique constitué principalement de TPE appartenant pour beaucoup au commerce et à l’artisanat, l’innovation et l’évolution des activités exigent de l’acteur microéconomique qu’il soit lui-même « en mouvement ». L’accès à des formations nouvelles, rénovées, et l’acquisition de compétences nouvelles sont jugés nécessaires par les entreprises souhaitant verdir leur activité. Et continuer à acquérir des compétences leur semble indispensable pour avoir des projets. Pour certains acteurs, cela vient en complément de la démarche visant le recyclage, la coopération et les pousse à mieux suivre les goûts des consommateurs (exemple du charcutier traiteur). Pour d’autres, c’est pour capitaliser les acquis de l’expérience antérieure dans l’activité actuelle, ou pour mieux maîtriser l’usage des nouveaux matériaux ou des dernières technologies. Le couplage information/formation semble évident dans les activités en rapport avec le bâtiment, l’isolation ou l’économie 24 Par la CMA par exemple ; celle-ci serait même prête, avec un financement de la DREAL, à développer un partenariat pour mettre en place des actions spécifiques auprès des entreprises. 25 Le Pays d’Horte et Tardoire a quelques contacts avec les entreprises (création et transmission), mais ne joue pas de rôle particulier dans le domaine du verdissement. La CC d’Horte et Lavalette n’a pas de relations proches avec les entreprises du territoire semble-t-il, et la CC de la Vallée de l’Echelle (Agenda 21) n’a pas a priori d’actions particulières pour/avec les entreprises. 26 Pour ce qui est de Charente Développement (CG 16), les entreprises doivent les contacter si elles en éprouvent le besoin. 33 d’énergie où on vise une offre verte globale. La mise en place d’un système de veille accompagne les besoins importants de formation continue (exemple de l’éco-artisan). Dans le cas de l’agriculture, s’ajoutent des besoins techniques plus spécifiques (suivi personnalisé, adapté à l’exploitation et aux sols, et parfois très pointu). Et contrairement à d’autres milieux professionnels, des contacts réguliers entre agriculteurs ne suffisent pas pour inciter à l’innovation verte, ou à des pratiques limitant l’impact environnemental de l’activité. Ferrand SAS : une entreprise pleinement innovante avec une dynamique de verdissement à moteur exclusivement interne La PME connaît un dynamisme économique et commercial, à partir d’une production traditionnelle et d’un savoir-faire historique charentais : la fabrication d’articles chaussants. Elle travaille avec la Région PoitouCharentes (domaine de l’export et Webschool). Elle a initié une démarche d’innovation permanente, en cherchant à être « toujours en progrès », et insère ses efforts de verdissement dans une démarche globale intégrant le sociétal (dont éthique et ressources humaines) et l’économique. Le projet lean vise à modifier la culture en travaillant sur les points de gaspillage ; outre sa dimension économique, son impact environnemental est certain. A travers une politique de développement durable, l’entreprise a mené beaucoup d’actions et a des bonnes pratiques œuvrant dans le sens de l’émergence d’une écologie industrielle sur le territoire et au-delà. Elle est d’ailleurs ouverte aux « idées nouvelles » relevant de l’économie circulaire. Cinquième observation : quelques organismes et acteurs institutionnels présents et actifs sur le territoire L’importance des échanges en « business to business » (B to B) est à souligner dans le contexte de ce territoire. Les entreprises se côtoient principalement lors de réunions organisées par les fournisseurs, quand elles se croisent chez le marchand de matériaux, ou en tant que clientes les unes des autres. Connaître les entreprises à proximité n’implique pas des relations régulières. Les relations sont le plus souvent occasionnelles quand il s’agit d’entreprises d’autres secteurs. Les structures et corporations professionnelles jouent un rôle majeur sur ce type de territoire : nationales, régionales ou même départementales, elles rompent l’isolement de l’entreprise lorsque le secteur est peu présent ou peu développé localement (Fédération française de la chaussure, Confédération des charcutiers, Coop des bouchers) ; pour des secteurs plus représentés sur le territoire, les regroupements et fédérations professionnels jouent un rôle clé dans l’information, la formation, l’accompagnement et la mise en œuvre des initiatives prises au niveau inframicroéconomique. A travers cette présence et la dynamisation relative qu’ils 34 insufflent, ils constituent les premiers acteurs du verdissement auprès des entreprises locales. Dans le bâtiment par exemple, la CAPEB (Confédération de l'Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment) d’Angoulême, constitue avec la CMA (Chambre des Métiers et de l’Artisanat), un des rares réseaux ou structures proches des entreprises du territoire ; elle est très active et réactive aux dires des entreprises du secteur. Les attentes sont grandes à l’égard des chambres consulaires, et notamment les entreprises soulignent le peu de contact qu’elles ont avec la Chambre de Commerce et d’Industrie. De leur point de vue, les chambres consulaires sont certainement les mieux placées pour la coordination et la mise en relation des entreprises sur le territoire. Les quelques réseaux auxquels appartiennent les entreprises sont donc principalement des fédérations de filières (bâtiment, charcuterie, chaussure, agriculture). Outre l’information sur les nouvelles normes, la sensibilisation aux matériaux écologiques, l’organisation de formations Développement durable, l’appui dans le domaine technologique, ce sont aussi des incitations financières qu’a mises en place la CAPEB, en partenariat avec TOTAL : les professionnels du bâtiment sont incités à devenir ECO Artisan® en bénéficiant d’une éco-prime lorsqu’ils réalisent des travaux améliorant la performance énergétique d’un bâtiment. Aussi notons de façon générale le lien qui ressort entre l’appartenance à un réseau d’entreprises quel qu’il soit et la mise en place d’actions en matière environnementale, alors que l’isolement peut être considéré comme un facteur dissuasif pour une entreprise d’avoir des projets, dans le domaine environnemental ou non. Excepté la déchetterie CALITOM (service public des déchets en Charente) située à Villebois-Lavalette, il existe peu de services liés à l’environnement sur ce territoire. Les prestataires les plus proches sont sur Angoulême ou en Dordogne voire sur Poitiers ou Bordeaux. Globalement sur ce territoire, il manque un ou plusieurs acteurs capables de relayer l’information sur les subventions, formations ou diagnostics existants, de sensibiliser et d’assurer la communication sur les actions déjà menées, mais également de fournir un suivi personnalisé technique et pointu en termes de verdissement et de mutualisation. Observation finale : la réalité du verdissement du territoire au niveau microéconomique La réalité du verdissement du territoire T1 se situe d’abord dans l’absence d’associations d’influence régionale mobilisées sur les questions environnementales, telles VEE, EI2S, le Pôle des Eco-industries, Cluster Eco- 35 Habitat Les entreprises locales ignorent les services proposés par ces structures. Toutefois la moitié des entreprises interrogées ont entrepris des actions pour verdir leur activité ou ont un projet de ce type. Une faible dynamique de verdissement émerge sur ce territoire. Ceci s’observe à travers les actions entreprises et au niveau des motivations. Les démarches en question relèvent d’une approche plus large, voire intégrée, comme le Développement durable ou la Responsabilité sociétale, plutôt que de l’économie verte. à travers les actions La sensibilisation au problème des déchets est intégrée dans les préoccupations des entreprises. Le tri sélectif est devenu évident pour tous qui reconnaissent à cet égard la force de la réglementation. Sont entrés dans les pratiques autant que possible : le ramassage, le recyclage, le traitement. Le recyclage est d’autant plus développé qu’il s’inscrit dans des pratiques traditionnelles de secteur (comme le BTP) où des entreprises différentes travaillent ensemble sur un même chantier d’une part, et qu’il est largement facilité par des dispositions claires (quoi, qui) et un service retirant sur le lieu même de production des déchets et rejets d’autre part. Au-delà de la récupération des huiles usagées (alimentation, garage), de la reprise des pneus, nombreuses sont les questions en suspens sur le traitement possible, les coûts de la valorisation relativement à la destruction, l’écoconception La logique de l’économie circulaire gagne du terrain, notamment chez les artisans, en même temps que grandit la conscience que les moyens à mobiliser pour un système satisfaisant sur les plans technique/technologique, organisationnel/logistique, relationnel/partenarial dépassent ceux dont disposent séparément les acteurs microéconomiques sur un territoire comme celui-ci. Sans un vaste projet relevant de l’écologie territoriale, c’est seulement à la marge que peuvent se développer des pratiques vertueuses, relevant parfois d’une forme de débrouillardise. Arrivent en seconde position des actions celles relatives aux bâtiments, et le projet en cours porte aussi là-dessus (isolation extérieure). Via ces travaux et les demandes formulées aux architectes, ce sont les économies d’énergie qui sont visées, mais aussi d’autres objectifs comme l’amélioration de l’hygiène, du confort C’est dans le domaine des transports ensuite que les entreprises commencent à faire des efforts (limiter les déplacements, covoiturage). Et, enfin, l’attention portée à la ressource en eau est très variable selon les secteurs, et c’est surtout l’agriculture, sensibilisée à la question de ses intrants, et convaincue que la réglementation sera renforcée pour l’eau, qui en fait un domaine prioritaire. 36 à travers les motivations D’un côté les entreprises qui n’agissent pas évoquent principalement des raisons économiques défavorables et pensent que pour mener des actions en matière environnementale il est nécessaire d’investir des sommes élevées dont elles ne disposent pas. D’un autre côté, c’est davantage l’accompagnement à la mise en œuvre d’un projet de verdissement qui semble devoir être privilégié plutôt qu’un soutien financier. Sur le second point, nous retrouvons une observation faite dans les études précédentes sur l’économie verte dans la région : l’absence de structures ayant des missions d’accompagnement des entreprises dans leur processus de verdissement sur ce territoire. En premier lieu, il s’agit donc déjà de coordonner les structures existantes ayant une action départementale telles que les chambres consulaires et de faire en sorte qu’elles soient davantage présentes sur ce territoire en particulier. Il est possible que l’association Charente Entreprise Environnement (C2E) créée fin 2012 s’inscrive dans une telle démarche, et qu’au niveau de la CCI d’Angoulême, les grandes manifestations de 2013 comme le forum en mars, le Salon de la Croissance verte en novembre, ou des thématiques fortes comme l’innovation viennent renforcer cette présence. Dans un contexte économique difficile, les chambres consulaires ne peuvent se concentrer sur les seuls prédiagnostics (énergie-ADEME, déchets, RSE) et accompagnement aux pratiques environnementales, en négligeant la mobilisation sur la trésorerie, la recherche de nouveaux marchés Historiquement en France, les organismes consulaires, pour reprendre les termes de Daniel Boullet (2003), ont constitué des « foyers de réactions, de réflexion et d’initiatives », comptant ainsi parmi les canaux d’introduction de la préoccupation environnementale dans la vie des entreprises. Au contact des entreprises et des pouvoirs publics, elles jouent un rôle d’interface en contribuant, d’une part, à officialiser les questions environnementales dans le monde de l’entreprise (besoins, problèmes et inquiétudes d’entreprises face à l’environnement soumis à l’organisme ; sensibilisation à ces questions) et en exerçant, d’autre part, un rôle important à partir de 1970 dans le domaine de la formation permanente appliquée à l’environnement. L’instauration de partenariats entre acteurs afin de mener des actions spécifiques sur le plan environnemental auprès des entreprises du territoire T1 pourrait peut-être constituer une réponse adaptée au fait que les entreprises ne poursuivent pas un objectif unique. Avant tout, et de façon générale, les entreprises souhaitent que soient prises en compte les contraintes fortes administratives et financières (charges importantes). Quand elles agissent, elles le font parce que les dirigeants ont cette fibre environnementale (question de valeurs ou d’expériences), mais aussi pour la prospérité de 37 l’entreprise. Ceux-là sont convaincus qu’assurer un avenir à leur entreprise passe ou passera, quand ils anticipent un durcissement de la réglementation, par la préservation de l’environnement, et que les « coûts de rattrapage » seront élevés dans la mesure où les effets du dérèglement climatique se font déjà sentir. Autant donc être proactif quand financièrement, matériellement, techniquement ou sur le plan des compétences, il est déjà possible d’agir. On vise alors en même temps des objectifs tels que l’amélioration des conditions de travail et de la qualité de la vie (hygiène, santé). La motivation principale d’une certification (Eco-artisan, certification bien-être animal et qualification d’élevage, Origine France Garantie) est de se démarquer de la concurrence. DD et RSE plutôt qu’économie verte La sensibilisation en amont, à travers la formation professionnelle ou par l’expérience acquise préalablement dans une autre organisation, crée un cadre favorable au verdissement. Sur un territoire dominé par la microentreprise, comment faire prendre conscience à chaque acteur économique de ses impacts environnementaux, et du rôle qu’il peut jouer dans le verdissement de l’économie locale ? Pour les ECO artisans, on « fait partie de l’économie verte » car on sait qu’il faut anticiper même quand on ne travaille pas dans une grande entreprise du secteur de l’habitat. Mais la démarche est loin d’être appropriée par les autres artisans et commerçants. Les entreprises inscrites à la Chambre de Métiers et de l’Artisanat pourraient bénéficier d’un diagnostic « environnement », mais celles rencontrées ne sont pas informées de son existence. Même s’ils ont pour un certain nombre d’acteurs entendu la notion d’« économie verte » prononcée dans les médias ou par des politiques, ils se retrouvent principalement dans l’une ou l’autre des idées suivantes. Du fait de leurs préoccupations sur les plans humain ou social/sociétal, ils adhèrent plutôt à une approche plus large ou intégrée, comme celle du Développement durable (DD) ou de la Responsabilité sociétale des organisations (RSO), la dimension économique de leur activité restant une préoccupation de premier plan. Ils participent à la dynamique de verdissement « à leur manière » : l’un améliore le « bilan écologique » par la réparation de véhicules ; l’autre a une activité agricole qui aide à la survie de l’humanité Globalement, les entreprises qui sont dans la dynamique de verdissement n’avancent pas sur le seul terrain de l’environnement, et notamment la dimension économique n’est jamais perdue de vue. Peut-être que ceci pourrait expliquer que le territoire T1 semble avoir une dynamique bloquée à un « premier stade », qui correspondrait à une problématique des déchets et 38 rejets « non surmontée » par les acteurs - certains insinuant même un recul dans leurs pratiques ces dernières années. Les conditions tarifaires et quantitatives de la déchetterie Calitom sont mises en avant par les entreprises, et de façon générale celles-ci ont du mal à intégrer les coûts (financiers mais aussi en temps, transports, stocks) liés à leurs déchets et rejets dans leur logique de calcul économique. L’externalisation reste la règle dans les mentalités, et ceci constitue probablement un obstacle majeur au passage à un degré supérieur de verdissement, insurmontable par les seuls acteurs microéconomiques que sont les très petites entreprises, de surcroît de secteurs d’activités différents. III.2 Dynamique observable sur le territoire T2 Figure 4 : Entretiens réalisés sur T2 : Est Vienne Le territoire T2, situé dans la Vienne, en zone périurbaine de la périphérie de Poitiers, regroupe des entreprises sur Chauvigny et ses environs, au nord et à l’est. T2 n’intègre, dans l’échantillon d’entreprises interrogées, aucune des quelques entreprises industrielles de plus de cinquante salariés comprises dans cet espace27. Les secteurs du commerce, de l’artisanat et de l’agriculture sont fortement présents, et on dénombre cinq zones d’activité. Prédéfini dans notre étude comme un territoire présentant une dynamique de verdissement 27 Aucune n’ayant souhaité être interviewée. L’échantillon sur T2 se limite donc à des unités dont l’effectif est inférieur à 50, dont 14 sont des microentreprises. 39 « faiblement émergente », la dynamique de T2 apparaît, suite aux entretiens, bien réelle et se renforce actuellement avec quelques projets verts portés par les entreprises locales, et des acteurs déjà sensibilisés sur les questions environnementales. Les observations qui suivent s’inscrivent toutes dans une perspective relativement favorable. Première observation : éléments généraux montrant a priori qu’une dynamique de verdissement est enclenchée Sur les dix-sept entreprises interrogées sur T2, trois appartiennent à un groupe, mais la totalité comporte un effectif inférieur à cinquante personnes, et quatorze ont moins de dix salariés. La situation économique générale peut jouer négativement : la période est plutôt difficile pour engager des actions ou projets. Les secteurs sont affectés différemment par la conjoncture, et surtout ils sont dans des configurations d’évolution structurelle qui les rendent plus ou moins sensibles au ralentissement d’activité. Le détail des secteurs est rappelé dans le tableau qui suit. Tableau 10 : Les secteurs d’activités des entreprises interrogées sur T2 Secteur d’activité Agriculture 3 Artisanat ENR 2 BTP 2 Commerce 2 Déchets 2 Artisanat 1 Hôtellerie 1 Imprimerie 1 Industries du bois 1 Industrie textile 1 Autres services personnels 1 Total Nombre d'entreprises 17 40 Nous retrouvons certains éléments évoqués au sujet de T1 : les difficultés majeures de l’adaptation de l’agriculture, y compris dans le secteur bio, où l’incertitude reste grande pour les petites structures, et ce, malgré les acteurs qui les accompagnent sur T2 ; des secteurs sont touchés par les changements dans les habitudes de consommation (l’hôtellerie par exemple), d’autres au contraire bénéficient de conditions plus favorables, concernant par exemple le chauffage, le bâtiment. On retrouve également le constat attendu que les petites unités n’ont pas les capacités R&D, et que les charges sur les salaires, les contraintes sur l’emploi constituent un obstacle majeur aux initiatives dans le domaine environnemental. Les entretiens ne se sont toutefois pas concentrés sur les difficultés, et des entreprises parlent de « bon sens » au sujet du verdissement de leur activité. Dans le détail et de leur point de vue, leur activité « évolue d’elle-même » et il suffit de se laisser porter par cette évolution (matériaux du bâtiment par exemple), ou constitue une activité d’avenir dont l’importance devrait croître, comme la valorisation des déchets électriques et électroniques (DEEE) par exemple, ou encore figure parmi les activités visées directement par la transition écologique (pour un chauffage plus écologique et plus économique par exemple), ou même indirectement qu’il est évident de verdir (l’imprimerie par exemple). Les entreprises appartenant à un groupe bénéficient de services et ressources en interne, et c’est à ce niveau que, selon elles, se situent les actions les plus significatives : veille réglementaire, personnel qualifié DEEE multisite, service environnement pour l’accompagnement, les études et diagnostics, réflexion pour l’organisation de la mutualisation (collecte, livraison) Deux points forts se détachent au premier abord sur T2. D’une part, des entreprises sur ce territoire parviennent à se distinguer par leurs efforts en faveur de l’environnement et/ou à travers leur engagement RSE. De façon non exhaustive, il s’agit de Trophée CJD performance globale ; de certifications ISO 9001, ISO 14001, ISO 12647-2, Qualisol, Qualibois ; de labellisations (Imprim’Vert, AB Ecocert, par exemple) bien que l’image de l’entreprise ne soit pas la seule, ni même la première des motivations, puisque la priorité accordée à la prospérité de l’affaire est rappelée par un certain nombre d’entre elles, ou elles soulignent que l’action au quotidien est primordiale sur ces questions environnementales. D’autre part, T2 est un territoire de projets. Et ceux-là sont source de dynamique, pas tant par leur ampleur que dans la détermination qu’affichent les acteurs et l’échéance (relativement courte) qu’ils visent, et ce, malgré la 41 forme de préprojet ou d’« idée » qu’ils revêtent pour certains au moment de l’entretien : méthanisation, installation de panneaux photovoltaïques, chauffage à granulés, récupération d’eau de pluie et de surplus d’arrosage Et c’est plutôt, en interne au niveau de la direction de l’entreprise qu’émerge le projet. Deuxième observation : des acteurs et réseaux locaux actifs Les raisons qui ont amené les entreprises de notre échantillon à s’implanter sur le territoire sont soit familiales (héritage, lieu de naissance), soit liées à des opportunités locales : marché potentiel à proximité avec la centrale de Civaux, espace à coût attractif en zone d’activité, compétences. Trois entreprises sur quatre sont situées sur la commune de Chauvigny. Au sujet du développement et du dynamisme économique sur le territoire, sont souvent cités le Groupement des Entreprises du Chauvinois (GEC) et son « Café des entrepreneurs » (mensuel, coorganisé avec la CMA à la Communauté de Communes du Pays Chauvinois), et aussi l’animateur économique de la Communauté de communes. Le GEC est un réseau d’entreprises (35 adhérents) dont il faut souligner la démarche. Il s’agit pour les entreprises de se faire connaître sur leur territoire, et de rencontrer et échanger avec les autres acteurs économiques du pays chauvinois (entreprises, élus, organismes de formation). Il est d’ailleurs à l’origine d’un forum biennal des métiers. Dynamique lui-même, le rôle joué concrètement par le GEC est important aux yeux des entreprises : il s’informe et il informe, il anime, sensibilise, parfois coordonne, accompagne et permet même de créer une synergie sur le territoire. C’est parce qu’il aborde des thématiques diverses, qu’il a été amené à informer sur les questions environnementales (intervention du Pôle des EcoIndustries par exemple). Pour les quelques adhérents sur Chauvigny du Club des Entreprises du Sud Vienne (CESV), ces deux réseaux peuvent agir de façon complémentaire sur le territoire. Enfin, l’association des commerçants « Les Vitrines de Chauvigny-Jardres » participe à la promotion et à la dynamisation des activités commerciales sur les deux communes. Mais, bien que quelques commerçants aient entrepris des actions de verdissement, la redynamisation du centre ville de Chauvigny constitue leur préoccupation principale. Un peu moins d’une entreprise sur trois n’appartient à aucun réseau, alors que les réseaux et organisations évoqués par les autres sont relativement 42 nombreux ), . Des acteurs exercent en arrière-plan une action significative selon des entreprises sur le verdissement de leur activité, comme Sorégies, Vienne Energie, Construction 86 Des fédérations professionnelles hors territoire (aux niveaux départemental et national) peuvent aussi influencer l’évolution de certaines activités (Fédération du textile, Fédération du bâtiment). Dans le domaine du bâtiment, on observe, comme sur T1, le rôle important que joue la CAPEB dans le verdissement de ce secteur, et des métiers via la formation d’ECO Artisan®. Les exploitants agricoles se sentent relativement bien accompagnés par Agrobio Poitou-Charentes (fédération régionale de développement de l’agriculture biologique), la Chambre d'Agriculture, et le Centre d’Etudes Techniques Agricoles (CETA) auprès desquels ils bénéficient de conseils techniques. Ils soulignent la présence sur Archigny d’une station expérimentale entièrement dédiée à l’agriculture biologique, expérimentation menée conjointement par Agrobio PoitouCharentes, la chambre d’agriculture de la Vienne et où intervient également l’ITAB (Institut Technique de l’Agriculture Biologique), reconnu officiellement comme institut technique de recherche agricole. Dans l’ensemble sur ce territoire, très peu d’acteurs spécialisés sur les questions environnementales accompagnent les entreprises pour les orienter vers des actions, leur indiquer comment procéder, et apporter des solutions concrètes à la problématique du verdissement telle qu’elle se pose à leur niveau. Quelques entreprises seulement connaissent l’association VEE (Veille Environnement Entreprises). Et les acteurs effectifs du verdissement auprès des entreprises, outre la CAPEB et la CMA vues plus haut, sont souvent les fournisseurs organisant même des formations et offrant de nombreux conseils, les groupements d’artisans, Maison du Tourisme (par la formation) Les pouvoirs publics, précisément l’Etat par la réglementation et les incitations (crédits d’impôt), représentent l’acteur principal pour le déclenchement des actions de verdissement. Les clients, dont les marchés publics, et les collectivités territoriales par d’autres voies, encouragent le verdissement, y compris par des actions exemplaires à leur niveau (contre les pesticides, par exemple). 28 GEC, Confédération Paysanne, coopérative ACEM79, Vienne Agro Bio, CETA (Centre d’étude technique agricole), CIVAM (Centre d'initiatives pour valoriser l'agriculture et le milieu rural), ENR Ouest Coop, CAPEB, Construction 86, Mode Grand Ouest, Fédération du textile, groupement d’achat MCD, CNAIB (fédération esthétique), MEDEF, Soregies, Vienne Energie, Pôle des Eco-Industries, CESV, “ Les Vitrines de Chauvigny-Jardres ”. 43 Troisième observation : des actions et motivations suggérant un verdissement à la base Sans surprise, la question des déchets arrive en tête des préoccupations liées à l’environnement au niveau microéconomique. Toutefois quelques entreprises n’engagent pas d’action au-delà de celles exigées par la réglementation, et on reconnaît que certaines pratiques devraient être améliorées (acheminer des déchets de bois à 250 km, par exemple), mais on n’est pas prêt encore à faire l’effort correspondant aujourd’hui. Hors groupe, où le tri est organisé à une autre échelle, nombreuses sont les entreprises locales qui réalisent dans ce domaine des actions : tri sélectif, cotation, classement, conditionnement, revente, recyclage, valorisation, concernant les verre, plastique, métal, papier, bois, carton pour lesquels ces actions semblent « normales » pour les acteurs eux-mêmes. Aussi, ce territoire dispose de services liés aux déchets. Le service de déchetterie à Chauvigny géré par le Syndicat Interdépartemental Mixte pour l’Equipement Rural (SIMER) est largement utilisé par les TPE ; PAPREC D3E offre un service assez connu sur le territoire pour le démantèlement d’équipements électriques et électroniques, et pour le recyclage et la valorisation de ces déchets, qu’ils soient produits par l’industrie ou les collectivités. Pour l’analyse de certains rejets (eau, poussières, par exemple), ce sont nécessairement des services extérieurs au territoire T2 qui sont utilisés (comme le laboratoire d’analyses environnementales IANESCO à Poitiers). Les transports constituent certainement la deuxième préoccupation des acteurs microéconomiques sur le plan environnemental, qui souvent regrettent qu’il ne soit pas possible de faire beaucoup mieux, étant donné la dispersion spatiale, pour les limiter et en améliorer la gestion. Les entreprises sont, pour certaines, sensibles à la consommation de ressources naturelles, à l’usage de produits chimiques, économisant l’eau, l’énergie, et privilégiant même, pour les plus avancées d’entre elles, une démarche d’éco-conception ou l’utilisation de matériaux recyclés (bois, inox). Une économie sur les coûts est associée à ces actions qui sont considérées comme « évidentes » par leurs auteurs. Comme au sujet des déchets, les entreprises semblent avoir admis la logique d’internalisation de tous les coûts induits par leur activité sur l’environnement. Une réserve toutefois concerne les entreprises dont les activités vertes sont le cœur de métier. Elles ne sont pas portées à faire des efforts environnementaux supplémentaires, ayant plutôt tendance à considérer que la mise aux normes de leur activité qui, de fait, limite leurs impacts négatifs, vaut « engagement volontaire » de leur part. 44 Concernant les bâtiments, même si des travaux pour optimiser (isolation, lumière, chauffage et performance énergétique principalement) sont souhaités, peu ont les moyens de concrétiser leur projet dans ce domaine. Parfois des contraintes techniques fortes viennent augmenter le budget nécessaire pour ces investissements ou même empêchent le déménagement pour un site plus performant voire plus grand pour pouvoir stocker davantage. Les entreprises n’ayant rien engagé en matière de verdissement avancent des raisons diverses : la situation défavorable, le manque de temps, la concurrence, le fait que les changements se fassent en amont dans leur activité ou qu’il s’agisse d’une trop petite structure (pas de capacités d’innovation technologique). Les autres insistent au contraire sur la conviction personnelle du dirigeant, l’objectif de préserver l’environnement, mais tout en l’associant aux améliorations visées en termes de qualité de vie, de confort et de santé des salariés. Elles ont adopté une démarche de performance globale (dans le sens du développement durable appliqué au niveau de l’entreprise) plutôt qu’environnementale, et mettent en avant l’intérêt pour l’entreprise de se différencier de la concurrence, donc associent prospérité et compétitivité dans une démarche qu’elles veulent proactive. Aucun effet notable n’apparaît pourtant en matière de recrutement de personnel (sauf dans les filières vertes) et de formation continue (y compris dans les filières vertes). Elles soulignent surtout la nécessité d’informer le personnel. Un souci est largement partagé : être informé des lois et des réglementations (veille salariale et réglementaire). Quatrième observation : un territoire d’entreprises sensibilisées « qui bouge » De façon générale, les entreprises ont plutôt pris conscience qu’il faut s’organiser localement, et recourir aux services à proximité s’ils existent et aux complémentarités qu’elles ont pu repérer entre elles, à travers une meilleure connaissance réciproque. Elles évoquent le « troc des palettes », mentionnent également les groupements d’achat à titre d’exemple, et comprennent l’intérêt de la mutualisation sur un même territoire. Cela se fait de façon plutôt spontanée, grâce aux rencontres, échanges entre entreprises, et ne relève pas d’un projet territorial défini et porté par une collectivité (même si l’animateur économique territorial semble y jouer un rôle actif). Comme sur T1, travailler sur un même chantier ou se croiser chez un fournisseur facilite la circulation de l’information en lien avec l’économie verte, mais là encore les entreprises d’un même secteur ont peu de contacts entre elles. le point de vue exprimé par les entreprises pour verdir leur territoire Les entreprises interrogées et leurs réseaux influençant les interactions entre acteurs microéconomiques, ont émis quelques observations sur les acteurs et 45 les actions souhaitables de leur point de vue pour verdir leur territoire. Avant tout, le verdissement ne peut se faire à l’échelle du seul réseau chauvinois. Sont jugées pertinentes les interventions des pouvoirs publics locaux (animateur économique), régionaux (même sous la forme indirecte d’incitation à une demande finale plus écologique), ou étatique. En particulier la réglementation est présentée comme une forme efficace d’action publique dans la mesure où on fait appliquer les règles, ainsi que les crédits d’impôt qui relèvent d’une « logique qui fonctionne ». On souligne les diverses aides, non spécifiquement en matière environnementale, de la Région et de l’ADEME entre autres, et les différents types d’accompagnement et soutiens d’organismes divers, y compris sur le plan technologique, dont ont pu bénéficier un certain nombre d’entreprises. Mais les autres ont reçu peu d’aides voire aucune. Globalement sur la question des aides, le ressenti est que leur attribution manque de transparence, que l’information des entreprises à ce sujet est très inégale, et qu’il faut réfléchir à une répartition plus équitable : les aides n’ontelles pas tendance à se concentrer sur quelques entreprises ? Comment s’assurer qu’elles ne servent pas à subventionner l’activité d’entreprises « faibles » face à la concurrence ? Ne faut-il pas chercher à amener toutes les unités économiques à un certain degré de verdissement plutôt que d’en privilégier certaines ?... Les entreprises ont en outre besoin qu’une information sur leur démarche responsable, et leur nouvelle offre verte ou leurs produits plus verts, soit organisée, et que soient valorisées leurs initiatives et reconnus leurs efforts dans ce domaine. Elles expriment aussi des besoins de formation, d’acquisition de compétences comparativement avantageuses par rapport aux concurrents, et souhaiteraient des solutions techniques adaptées (pour l’économie d’énergie par exemple). L’aide doit être concrète, financière (en cas de projet d’ampleur surtout) ou non, mais surtout quand il s’agit de diagnostics, audits ou études d’expertise, ne pas rester sans suite. l’atout que représente un territoire qui bouge L’idée avancée ici est que l’on peut profiter du développement économique d’un territoire pour y intégrer des éléments de verdissement. En l’occurrence, sur la Zone d’Activités du Planty au sud de Chauvigny, il est prévu l’implantation d’un Viennopôle. Les Viennopôles mis en place par le Conseil Général de la Vienne sont des territoires destinés à accueillir des zones d’activités (artisanales, industrielles, de services) afin de rendre des territoires ruraux attractifs. Pour bénéficier de cette labellisation de haute qualité technologique et environnementale, l’aménagement doit notamment respecter 46 des exigences environnementales fortes. La Communauté de Communes du Pays Chauvinois devra auparavant acquérir les terrains (sur 25 ha). Faciles d’accès par les grands axes de transports, les zones labellisées Viennopôle (7 sont conventionnées actuellement) ne visent pas que la réhabilitation de zones d’activités existantes, elles misent sur l’attractivité et donc l’implantation d’entreprises sensibles à la grande qualité des services et des équipements offerts. La commune de Chauvigny a signé la Charte Terre Saine et obtient ses trois papillons contre les pesticides. Les entreprises locales attendent beaucoup de la municipalité et la Communauté de Communes, qui apparaissent comme les acteurs les mieux placés pour mettre en relation et coordonner les entreprises. Mais tout en exprimant ce besoin de dynamisation de la part des pouvoirs publics locaux, elles reconnaissent leur part de responsabilité dans le développement économique du territoire, revendiquent une marge d’initiatives, et souhaitent des relations partenariales entre les différents acteurs intervenant sur le territoire. Du côté du « monde de l’entreprise », les acteurs mis en avant sont sans surprise le GEC, les chambres consulaires La puissance publique nationale (y compris les DDT) et régionale (excepté via des antennes locales) est peu évoquée sur cette question de la coordination locale des acteurs économiques. A travers la conception qu’ont les entreprises du processus de développement de leur territoire, on retrouve d’une part la double dimension organisationnelle (le monde de l’entreprise) et territoriale (proximité spatiale), et d’autre part, en intégrant les diverses institutions présentes et actives, la notion de « tissu ». Celle-ci rend compte des relations et réseaux créés par les entreprises entre elles, et permet de penser l’ensemble tel un triptyque : entreprise-tissuinstitutions. Dans ce cadre-là, c’est l’ensemble qui doit tirer la dynamique de verdissement pour surmonter des difficultés que rencontrent les entreprises dans leur démarche, comme l’absence de fournisseurs localement répondant à des exigences environnementales. l’implication des entreprises dans le verdissement du territoire Les entreprises qui n’ont rien entrepris dans le domaine du verdissement évoquent toutes une situation économique défavorable. Et même quand elles disent manquer de temps, très peu ne sont pas sensibilisées déjà à la question de l’environnement. Elles ont plutôt en général entendu parler de l’économie verte, mais pour un certain nombre la démarche qu’elles ont engagée relève de la RSE. A cet engagement marqué, on associe l’existence d’arbitrages permanents. Ceci est certainement une caractéristique importante de la dynamique de verdissement au niveau de l’entreprise sur ce territoire. L’ensemble (le triptyque précédent) est en mouvement et, s’il y a ancrage 47 territorial29, ceci ne peut être contraire, aux yeux des entreprises elles-mêmes, à la « dynamique firme-territoire ». Les acteurs économiques s’impliquent dans le verdissement de leur territoire, en plus de connaître les entreprises à proximité qui mènent des actions environnementales. Ils constituent des forces vives actrices du développement durable de leur territoire quand ils participent à des actions de sensibilisation, n’hésitant pas éventuellement à aller exposer ce qu’ils ont entrepris aux élèves des écoles, ou à participer à une animation sur la croissance verte. Se sentant concernées par l’impact de leur activité économique sur l’environnement, les personnes interrogées ont été réceptives à notre questionnaire, certaines précisant même qu’il les faisait réfléchir à toutes ces questions. Les structures d’accompagnement en matière environnementale peuvent certainement tirer parti de la présence du groupement d’entreprises et de la sensibilisation à la problématique du verdissement qu’il a amorcée. 29 Définition de l’ISO 26000 : « L’ancrage territorial est le travail de proximité proactif d’une organisation vis-à-vis de la communauté. Il vise à prévenir et à résoudre les problèmes, à favoriser les partenariats avec des organisations et des parties prenantes locales et à avoir un comportement citoyen vis-à-vis de la communauté. » ; l’articulation à laquelle nous nous référons précisément ici est plus ancienne, cf. Zimmermann J.B. (1995), L’Ancrage territorial des activités industrielles et technologiques, La documentation Française. 48 III.3 Dynamique observable sur le territoire T3 Figure 5 : Entretiens réalisés sur T3 : Nord Deux-Sèvres Le territoire T3 se situe en Nord Deux-Sèvres et dessine sur la ville de Thouars un triangle comprenant Louzy au Nord, pointé vers l’ouest sur MauzéThouarsais. Ce territoire localisé sur une aire urbaine avec des zones d’activité30 connait par hypothèse une dynamique de verdissement « fortement émergente ». Un tiers des entreprises répondantes sur T3 sont des microentreprises, un autre tiers ont un effectif compris entre 10 et 49, et dans le dernier tiers, dont les effectifs dépassent 50, les quatre plus importantes en taille ont entre 140 et 200 salariés. La moitié des entreprises interrogées appartiennent à un groupe, le secteur de l’industrie étant particulièrement présent comme le montre le tableau suivant. 30 Sur la Communauté de Communes du Thouarsais, on compte 11 zones d’activités dans des secteurs d’activités très diversifiés. Un guichet unique a été mis en place, un accompagnement et des aides sont prévus pour renforcer l’attractivité du territoire et faciliter l’installation de nouvelles entreprises. 49 Tableau 11 : Les secteurs d’activités des entreprises interrogées sur T3 Secteur d’activité Nombre d'entreprises Industrie plastique et métal 3 Déchets 2 Industries du bois 2 Industrie chimique 2 Transport terrestre 2 IAA 1 Artisanat ENR 1 Commerce 1 Blanchisserie industrielle 1 Santé humaine et action sociale 1 Autres services personnels 1 Total 17 Comme pour les deux territoires précédents de notre étude, les résultats des entretiens sur T3 font ressortir un territoire en verdissement plus avancé dans le processus que supposé au préalable. Le processus est largement le produit d’unités microéconomiques ayant une vision stratégique à moyen voire à long terme, dont l’engagement environnemental connu des autres entreprises procure autant d’exemples d’actions concrètes pour verdir les activités existantes ou éventuellement se lancer dans de nouvelles activités vertes. Certes, aucune entreprise de l’échantillon n’a de projet, et une sur trois n’a même rien entrepris du tout sur le plan écologique. Toutefois la configuration particulière tient aussi à l’économie locale historiquement forte, fonctionnant comme un écosystème ouvert sur d’autres écosystèmes (sur le Maine-et-Loire voisin par exemple), et appartenant lui-même à des écosystèmes plus vastes (Nord Deux-Sèvres, régional). Première observation : un territoire dynamique d’entreprises reliées Les entreprises interrogées sont localisées sur les zones d’activités situées à proximité de Thouars. L’échantillon répond au mieux aux exigences et contraintes que nous nous sommes fixées dans cette étude (cf. supra), mais 50 notons l’intérêt économique plus général de ce territoire qui présente des industries et activités nombreuses et diverses, importantes relativement à la population locale. Au vu des raisons données par les entreprises à l’implantation sur ce territoire, celui-ci fait preuve d’une certaine attractivité économique, que la Communauté de Communes a d’ailleurs cherché à renforcer ces dernières années. Cette relative attractivité de l’environnement offert aux entreprises a pu jouer en plus des liens entre activités (à titre d’exemple, les transporteurs routiers sont nombreux du fait aussi des carrières proches), de l’évolution d’activités anciennes (depuis le début 20ème siècle), de la transmission familiale d’affaires, de l’essaimage et tout simplement de la volonté de rester pour des dirigeants natifs. Le contexte économique récent défavorable affecte l’activité localement et, là encore, certains secteurs souffrent davantage ou émettent des craintes quant à l’avenir de leur activité en raison d’une concurrence étrangère plus forte ou de dispositions à venir comme l’écotaxe (ou TPL - Taxe Poids Lourds). On « reporte ce qui est facultatif », comme « investir » ! Ceci peut certainement expliquer en partie l’absence de projet dans le domaine environnemental sur la totalité de l’échantillon. Une autre et double raison est avancée par les dirigeants nombreux ayant mené des actions auparavant : le besoin de pérenniser ces actions et le fait que les premières actions sont les plus faciles à mettre en œuvre alors que l’amélioration continue demande du temps pour des résultats moins visibles. Autre effet probable du contexte défavorable : certaines entreprises affirment avoir besoin d’allègements fiscaux et non d’aides. Priorité à l’économie est rappelée par celles ayant quelques difficultés, qui mettent en avant la pérennisation de l’emploi et la préoccupation sociale plutôt que l’écologie. Un tiers seulement des entreprises n’a rien entrepris ni projeté sur ce dernier plan. Excepté quatre entreprises qui déclarent n’appartenir à aucun réseau, toutes les autres évoquent spontanément un grand nombre de réseaux. Le Club des entreprises du Thouarsais est largement mentionné ; arrivent ensuite l’Union des commerçants, artisans et industriels de Thouars et l’UIMM (Union des Industries et des Métiers de la Métallurgie). Globalement les entreprises sont intégrées dans les réseaux professionnels et sectoriels, au sein de groupements d’entreprises pour quelques unes, au niveau national (textile) ou européen (transport). Le Club des entreprises du Thouarsais, qui date de 1995, a pour principal objectif la mise en relation des entreprises sur son territoire. Plus de 200 entreprises de la Communauté de communes du thouarsais y sont adhérentes. Elles sont de toutes tailles et de tous secteurs d’activité. Présent 51 et important sur le territoire, il organise des plénières tous les 3-4 mois avec des visites d’entreprises locales, et informe ses adhérents notamment sur le plan juridique. La thématique de l’environnement fait partie des sujets abordés, ni plus ni moins que d’autres thématiques 31 . Si le Club aborde certaines questions, relatives notamment aux déchets ou aux économies d’énergie, il n’a par contre en son sein aucun projet de type écologie industrielle, et n’est pas en lien avec un quelconque projet relevant de l’économie circulaire. En outre les acteurs sont amenés également à se rencontrer dans le cadre de leurs activités économiques (carrières, chantiers, relations clients/fournisseurs) ou à travers d’autres activités (autres responsabilités, culture, loisirs) : « Thouars, c’est petit » ; « on connaît tout le monde ! ». Parfois même, cela va jusqu’à la mutualisation, quand une entreprise rencontre des problèmes, ou pour des informations, achats, échanges de marchandises, sous la forme de réunions mensuelles ou de façon tout à fait informelle. Enfin, les personnes interrogées ont aussi souligné la place qu’occupe le réseau EI2S. L’association Environnement Industries Deux-Sèvres, créée en Nord Deux-Sèvres en 2002, est devenue en 2008 Environnement Industries Synergie Solidaire, avec la création en 2010 de l’Institut de l’Excellence Managériale (IEM) du Poitou-Charentes. Surtout connu des entreprises industrielles, EI2S apporte un soutien important à la mise en place d’actions en matière environnementale. Deuxième observation : des actions environnementales pluridirectionnelles Les deux tiers des entreprises interrogées ont entrepris des actions dans le domaine du verdissement. Plus que sensibilisées aux questions environnementales, les entreprises qui ont engagé des actions, l’ont généralement fait dans plusieurs directions et atteignent parfois des niveaux avancés dans la démarche. Sur la question des déchets, les entreprises qui n’ont rien engagé volontairement veillent à respecter la réglementation. Les autres qui sont majoritaires ne se limitent pas à une simple gestion des déchets. Globalement le tri est jugé important et certaines unités font un tri « très poussé » ; la récupération, le traitement et le recyclage semblent évidents aux yeux des entreprises. Elles ne mettent pas spécialement les actions dans ce domaine à 31 Le Club des entreprises confirme la remarque d’un dirigeant d’entreprise exprimée ainsi : « On ne sent pas la fibre, il y a des thèmes mais pas franchement sur ça ». 52 leur actif, considérant que celles-ci sont facilitées par les structures et acteurs nécessaires qui sont présents sur le territoire ou dans un rayon proche. Le défi est placé par un certain nombre d’entreprises à un autre niveau : passer à une logique de valorisation des déchets (textiles, palettes, cintres) en quittant le système de récupération classique mis en place à l’époque où il fallait payer pour se débarrasser de ses déchets. La réflexion est menée depuis chacune des entreprises concernées, intégrant autant que possible les avancées de la recherche sur la valorisation des déchets, et les informations qu’elles peuvent obtenir des derniers développements techniques sur cette question. Et cette réflexion n’exclut aucun type de déchets a priori (métaux, bois, plastique, carton, papier, textile), ni même les huiles et autres produits exigeant collecte et traitement. La règle des trois R (Réduire/Réutiliser/Recycler) semble scrupuleusement suivie par des entreprises qui, selon leurs dires, veillent à limiter les déchets sur toute la chaine de production, réduisent les emballages, et récupèrent en interne notamment pour la chaudière entre autres, le bois et des déchets qu’elles peuvent réutiliser elles-mêmes. Ce peut être aussi une réutilisation en externe sans vente ni processus de transformation, comme le linge offert aux clients comme chiffons. La préoccupation forte à l’égard des rejets polluants pousse certaines entreprises à s’interroger sur l’action possible au-delà de la surveillance et du contrôle imposés. La réduction forte des inputs (quantité et nocivité) et le suivi des rejets relèvent de la responsabilité de l’acteur microéconomique selon ces mêmes entreprises. On retrouve aussi appliqués à l’eau ces principes, ainsi que les recherches et décisions pour traduire concrètement et au mieux cette préoccupation. La sensibilité locale est forte sur cette question et les pratiques pour économiser la ressource en eau se sont multipliées. Pour réduire sa consommation, on recourt, si l’activité s’y prête (lavage des camions par exemple), à la récupération des eaux de pluie ; on a pu mettre en place aussi un système de circuit fermé pour le refroidissement, ou réutiliser la chaleur des eaux usées, avec un échangeur thermique. La surveillance et la recherche de substances dangereuses dans l’eau s’accompagnent d’efforts en amont pour limiter les molécules chimiques (par les produits de nettoyage par exemple). Certaines actions environnementales concernant l’eau sont couplées avec celles visant des économies d’énergie. Réduire autant que possible sa consommation de gaz ou d’électricité va de soi pour un grand nombre d’entreprises. Cela peut se faire en récupérant la vapeur de l’unité de méthanisation pour le process de fabrication (au lieu du gaz de ville), en 53 investissant dans du matériel, des équipements et des installations moins énergivores pour le chauffage des bâtiments ou l’éclairage des locaux. Cela va de pair donc aussi avec des travaux d’éco-rénovation ou la construction de bâtiments éco-responsables. Et pour quelques entreprises, des actions devaient être réalisées en même temps au niveau des énergies renouvelables (utilisation de bois PEFC, production par le photovoltaïque ou l’éolien). Sur les transports et les déplacements, la sensibilisation est forte également, et s’est traduite par la recherche d’optimisation pour les trajets des tournées, des actions et des pratiques vertueuses autour de la performance des véhicules, sur la base de la charte CO2 de l’ADEME, et en formant à l’écoconduite, y compris dans des entreprises dont l’activité principale n’est pas le transport. Enfin, des acteurs microéconomiques thouarsais poussent la réflexion et voudraient agir au-delà des thématiques et des réponses habituelles : sur les techniques d’élevage, sur l’insertion paysagère, sur la valorisation nouvelle des rebuts Ils soulignent des contradictions auxquelles sont confrontées certaines activités : activité ancienne dans des bâtiments datant d’une époque où peu d’attention était accordée à l’environnement, donc exigeant de très lourds investissements ; activité où la thermisation est nécessaire pour des raisons sanitaires contraignant donc les objectifs en matière énergétique ; la question du recyclage des panneaux solaires Les entreprises abordent aisément les bilans carbone et énergétique de l’ADEME ou de cabinets privés. Quatre avaient eu la certification ISO 9001, cinq ont pu obtenir celle ISO 14001, et une ou deux sont dans une démarche de type ISO 26000. Sur la base du prédiagnostic réalisé avec EI2S, un plan d’actions est envisagé par certaines qui pourtant déclarent par ailleurs ne pas avoir actuellement de projets ! Deux disposent du certificat NIMP 15 pour le respect de normes internationales phytosanitaires, d’autres de PEFC ou de Certiphyto, de Qualimat, ou des 3 Qualit’ (Qualibois, Qualisol, Qualipac), d’autres encore de labels comme Qualival. En matière de formation sur l’environnement, les entreprises semblent trouver ce dont elles ont besoin. Parmi elles, très peu ont poussé la formation d’un des personnels sur le management environnemental, l’éco-conception ou la communication environnementale. Par contre, la phase de sensibilisation semble acquise, et pour la plupart elles ont cherché à monter en compétences sur la gestion et la valorisation des déchets et sur tout ce qui concerne la sécurité environnement (déversements accidentels, risques sanitaires, prévention de pollutions). 54 Au total, ces actions sont plutôt connues des autres entreprises du territoire. En même temps, elles sont envisagées pour une grande part comme devant être autant que possible reliées aux activités économiques et actions environnementales des autres unités locales. La présence sur le territoire d’entreprises appartenant aux filières vertes des déchets, de l’assainissement et des énergies renouvelables participe beaucoup à la dynamique de verdissement enclenchée. Troisième observation : les entreprises, agents du verdissement à besoin d’accompagnement Les entreprises du Thouarsais sont les acteurs de premier plan du verdissement du territoire. Celles dont l‘effectif dépasse 30 salariés32 ont au moins un responsable Qualité ou QSE (Qualité, Sécurité, Environnement) ; cela représente la moitié de l’échantillon. Les dirigeants sont conscients de l’intérêt d’avoir dans l’entreprise une personne s’occupant de la veille réglementaire. Pour les autres, ce besoin de veille environnementale, y compris pour l’information sur les aides, se fait sérieusement sentir. Il exige du temps et de l’argent, une aisance que n’ont pas naturellement les dirigeants d’entreprises face à une information fournie, parfois très technique, et surtout vite périmée, à des démarches lourdes et aux difficultés administratives. des entreprises particulièrement motivées Les entreprises qui n’ont rien fait en matière environnementale sont majoritairement des entreprises dont l’effectif est inférieur à dix personnes ou des entreprises de service qui ne se sentent pas concernées. La principale motivation des autres est la préservation de l’environnement en soi. Et pour certaines activités, le dirigeant considère que ce n’est pas contraire à l’objectif de prospérité de son entreprise. En économie, cela correspond à une vision stratégique de moyen terme, ce qui explique que certains enjeux soient considérés essentiels : environnement et sécurité sanitaire, transports. L’image de l ‘entreprise compte aussi beaucoup, mais on est loin d’un greenwashing dans le sens où il s’agit de communiquer autant pour, en interne, être positif sur l’adaptation à la contrainte écologique, et, en externe, montrer l’exemple, surtout dans une activité verte comme les déchets, que pour se présenter à une clientèle et des prospects plus sensibles qu’auparavant à ce type d’engagement. La volonté personnelle du dirigeant et sa conviction jouent un rôle important, avec une attitude ne relevant pas de l’attentisme. Car bien au contraire, l’entreprise se fait acteur du changement 32 A l’exception de l’une mais incluant une très petite entreprise appartenant à un groupe. 55 en provoquant, autant que possible à son niveau, les évolutions technologiques, organisationnelles ou de compétences favorables. Deux aspects se dégagent nettement, en cohérence avec les actions vues précédemment. D’abord, d’autres acteurs participent au déclenchement d’actions, comme les fournisseurs (sous la forme de propositions) ou les clients à travers des appels d’offre, les pouvoirs publics (réglementation) en général, la DREAL (obligation) en particulier, la Région, l’ADEME, une entreprise avec laquelle on travaille régulièrement (Chimirec par exemple) ou sur un chantier, un syndicat ou une structure comme EI2S, relativement présente sur T3. Les mêmes acteurs ont tendance à faciliter les actions engagées, que favorisent également des prestataires R&D, architecte, SDIS C’est toutefois en interne que se trouve le véritable moteur du verdissement, avec la volonté du dirigeant et les contributions spécifiques fortes apportées par les responsables qualité ou QSE, des stagiaires ou des salariés. Ensuite, une tendance forte ressort des entretiens avec les firmes qui ont agi sur le plan écologique, à savoir une certaine « créativité environnementale ». Par là, il faut entendre que, face aux problèmes qu’elles (se) posent ou qui se posent, elles cherchent des solutions (concrètes) qui ne relèvent pas nécessairement de l’innovation environnementale au sens de développement en R&D et dernières technologies, mais parfois simplement de l’astuce ou de l’ingéniosité. Ce peut être la recherche d’une idée porteuse en réponse à une question ou réflexion plus large ou plus abstraite que se pose l’entreprise en interne (sur la valorisation ou le recyclage des déchets par exemple). Certes les entreprises ne sont pas toutes dans une démarche créative, certaines réaffirmant même qu’elles ne visent que la mise en conformité et le respect de la réglementation. des besoins majoritairement d’accompagnement Bien qu’assez précises sur leurs besoins, et que différents cas se présentent, on constate que les entreprises du Thouarsais éprouvent un besoin important d’accompagnement dans le domaine environnemental. Elles reconnaissent bénéficier d’aides, de dispositifs ou d’outils d’accompagnement et obtenir avec une relative facilité des soutiens d’institutionnels ou de structures environnementales, par exemple Région/ADEME pour l’énergie ou l’Agence de l’eau pour une aide technique, une subvention ou pour une station d’épuration. Certains dirigeants insistent toutefois sur le fait qu’ils manquent d’informations sur les aides en général et les outils d’accompagnement. 56 Au besoin d’accéder à une information plus fine, plus spécialisée, plus technique parfois aussi, en matière environnementale, s’ajoute celui d’être assuré que l’on dispose bien de l’information la plus large sur les aides possibles au sein du secteur d’activité. Des secteurs se considèrent comme non concernés par l’économie verte, dans les services par exemple, et affirment pour preuve que les aides sont négligeables par rapport à celles prévues pour l’industrie. Les subventions ne sont pas déterminantes, mais constituent un élément incitatif. Plusieurs cas de figure se présentent relativement à l’aide financière : manque d’information ; soutien régional perçu trop tardivement in fine (au bout des 3 ans) ; aide espérée d’un montant faible relativement aux coûts pour l’entreprise (temps, argent, complexité..) ; nette insuffisance des financements accordés, notamment pour les investissements les plus lourds. Mais c’est surtout sur l’appui attendu et l’accompagnement nécessaire que les dirigeants insistent. Informations supplémentaires, conseils précis et soutiens techniques sont souhaités pour appliquer les nouvelles réglementations (écotaxe par exemple), pour éclairer sur les risques et les dangers (reprise des déchets par exemple), pour réduire les gaspillages (celui de l’eau par exemple). Certains avouent avoir besoin d’interprétation et d’explication des textes ; beaucoup soulignent le souhait d’avoir un appui technologique et technique à la demande, un suivi personnalisé et des conseils appropriés à la situation précise de l’entreprise. La demande d’accompagnement se justifie du point de vue des entreprises par la grande complexité et les difficultés administratives, la lourdeur des procédures, les délais, le traitement technocratique des dossiers, et l’interlocuteur qui change ou est peu au fait du dossier. Ce besoin s’exacerbe pour des activités ou projets à autorisations particulières (transports de déchets, Installation Classée pour la Protection de l’Environnement). Il est au contraire moins fort si on simplifie dossiers, procédures et législations, et si la même personne suit la totalité du projet ou du dossier en question du début jusqu’à son aboutissement. Quatrième observation : un processus spontané, décentralisé de verdissement de l’économie locale Deux constats ressortent nettement du cas thouarsais de verdissement d’un territoire. Le premier se trouve dans l’importance d’avoir au moins une entreprise vertueuse comme représentation sur le territoire de la firme exemplaire, indiquant concrètement ce que sont les bonnes pratiques. L’entreprise Sothoferm est spontanément évoquée à titre d’exemple par un 57 grand nombre d’acteurs, mais elle n’est pas la seule. Le second constat est le fait que le verdissement apparaît le fruit des efforts menés par une vaste communauté d’acteurs, agissant comme autant de « petites mains », les entreprises elles-mêmes en tête, posant les soubassements d’un territoire vert. Par définition, celui-ci doit parvenir à mettre en synergie les différents acteurs, privés et institutionnels, pour les porter vers les innovations de produits, de services, organisationnelles, ou même de nature sociale, en faveur d’un développement vert de l’économie locale. Avant tout, la présence de prestataires de services « à l’environnement » sur le territoire contribue à la dynamique de verdissement locale. des services « à l’environnement » sur le territoire Les services liés à l’environnement mentionnés par les entreprises interrogées sont plutôt nombreux par rapport aux territoires T1 et T2. Et il s’agit de prestataires situés sur Thouars, Niort et Poitiers, ainsi que dans la région Pays de Loire pour les cabinets d’études. En voici la liste tous confondus : C Brangeon-FERS (déchets) C EI2S C Chimirec-Delvert (déchets) C Paprec (déchets) C Etablissements Gaurit (boues de lavage) C Baudry Michelin (pneus) C SNAM (huiles et filtres) C Cabinet Qualeader (Bilan Carbone) C Burgeap (étude pour la future station d’épuration) C Autres bureaux d’études C Cabinet Ricoacher (aide à la création des modules de formation) C Veka (antenne recyclage pour le PVC) Les actions réalisées par les entreprises dans le domaine environnemental ont été facilitées par l’existence de ces différents services à l’environnement. Les entreprises en sont conscientes, et ne mentionnent à cet égard aucun besoin important en particulier. Si nécessaire, elles élargissent le rayon et recourent à des prestataires plus éloignés. Soulignons que selon les entretiens, on retrouve des acteurs qui semblent jouer un rôle plus diffus mais bien réel dans ce domaine, comme des structures professionnelles ou sectorielles, ou des réseaux (CAPEB, MEDEF), ou de façon plus ou moins informelle des fournisseurs, une carrière Et parmi les structures et associations environnementales, EI2S exerce une forte influence, bien loin devant le Pôle des Eco-Industries, très peu connu localement, et même VEE. Beaucoup d’entreprises insistent sur ce que leur apporte EI2S en termes de soutien et de conseils, déterminant parfois 58 pour la démarche environnementale et/ou la certification obtenue. On mentionne l’existence de groupes de travail avec EI2S (implantation de filières textiles, BTP, Menuiseries industrielles). En même temps, pour un certain nombre d’entreprises souhaitant un accompagnement très poussé, EI2S ne satisfait pas leurs attentes. une économie locale en verdissement avec une orientation spontanément circulaire Même une entreprise n’ayant rien entrepris dans le domaine environnemental sait que des actions sont menées par des entreprises localement « mal identifiées » à son niveau. Nombreuses sont les entreprises données en exemple lors des entretiens, avec en tête Sothoferm (fermetures), dont le dirigeant est une « locomotive » pour d’autres chefs d’entreprise, et les transports Landry. Ces derniers ont une triple implication : (1) des initiatives (rencontres/échanges) sur les possibilités de mutualisation liées aux transports, s’appuyant sur la connaissance large de ces possibilités à travers sa propre clientèle ; (2) partenariat avec Anett et ESAT (Etablissement et services d’aide par le travail) ; (3) groupe de travail (EI2S et Ateliers du Bocage – Insertion Emmaüs). Enfin, est citée aussi en exemple la blanchisserie Anett, dont le Club des entreprises avait organisé une visite en 2007. La liste continue car d’autres acteurs microéconomiques évoquent l’engagement environnemental aux yeux des entreprises locales : Loeul et Piriot, Laboratoire Rivadis, Socoplan, Super U, FERS ; et d’autres encore ont été mentionnés une fois : Leul Menuiseries, Delpayrat, fromagerie Riblaire, France Champignon, Elevage de chèvres, Electricité Fraddin Bretton, Wesco (Cerizay), Rouvreau (Niort), et « toutes celles d’EI2S » qui sont « de très bons conseillers ». Les entreprises très actives voire proactives en matière environnementale affirment ne pas pouvoir répondre à toutes les sollicitations (dont celles de la CCI), devant pour elles-mêmes, dans l’optique d’une certification par exemple, consacrer du temps, de l’énergie, se former, et se faire également accompagner de près. Pour les entreprises locales, il va de soi qu’il faut chercher à faire évoluer l’économie dans un sens plus écologique autant sur le territoire qu’en interne. Cela signifie sensibilisation, rencontres/échanges, mobilisation des autres acteurs sur des projets éventuels, répondant à une conception émergente en termes de flux de matières et d’énergie. La logique évoquée est bien celle de l’économie circulaire (optimisation, étude des circuits, contacts établis entre entreprises par rapport aux matières, estimation des quantités). Elle s’appuie sur une culture que partagent les entreprises locales pour qui la 59 mutualisation peut apparaître évidente. Elles peuvent « mutualiser » spontanément des problèmes, des informations, des achats, échanger des marchandises, se réunir tous les mois On nous cite à titre d’exemples des initiatives spontanées de recherche de lien entre activités dans l’objectif soit de mutualisations, mais on se heurte potentiellement à une législation/réglementation stricte telle celle concernant les DASRI (Déchets des Activités de Soin avec Risques Infectieux), soit de complémentarités, notamment entre les déchets de uns et les inputs des autres, mais là des recherches et innovations techniques ou technologiques s’avèrent indispensables. Des organisations comme Futurobois ou le CRITT agroalimentaire, des groupements d’entreprises, d’employeurs... constituent des facilitateurs pour les entreprises sur ces problématiques. Il s’agit seulement d’une démarche d’agents décentralisés car, pour autant, aucun vaste projet de type écologie industrielle n’est à notre connaissance en préparation sur T3. Elément important de la dynamique économique et du « développement vert » du thouarsais, le projet TIPER** méthanisation vise la production d’énergie renouvelable à partir de produits organiques fermentescibles, en provenance de l’agriculture et des IAA. Il a mobilisé particulièrement différents acteurs locaux, dont des élus et des fonds publics (Région, ADEME, FEDER, MAAP), et associe en plus des Apporteurs de Biomasses du Bassin Thouarsais (association ABBT qui réunit 90 actionnaires) et de l’entreprise Bellanné (par le réseau de chaleur), une vingtaine d’entreprises au chantier. Sont impliquées 60 exploitations agricoles et 6 IAA, Methaneo et Séolis (fournisseur d’électricité). La dimension collective d’un tel projet qui réussit à rassembler des acteurs très différents d’un même territoire, et parfois même des concurrents dans un secteur d’activité, exerce un effet mobilisateur plus large, conscientisant du même coup des entreprises qui n’avaient rien entrepris jusque-là. La dynamique de verdissement s’ancre donc sur une économie locale qui existe véritablement hors questions environnementales. Le sentiment d’appartenir à un tissu économique et social est répandu ; celui-ci est dense et constitué de différents types d’acteurs répondant aux besoins autant sociaux qu’économiques, les structures d’insertion en particulier avec lesquelles travaillent des entreprises. Sur le territoire et dans cette dynamique de verdissement interviennent aussi des collectivités locales. A partir de 2007, le Pays Thouarsais34 s’était engagé volontairement dans un plan climat territorial, 33 Technologies Innovantes pour la Production d’Energie Renouvelable. La centrale de biométhanisation, inaugurée le 26 avril 2013, vise à traiter 80 000 tonnes de biomasse par an. 34 Le syndicat est dissous le 31 décembre 2013 suite à l’élargissement de la Communauté de Communes du Thouarsais. 60 un CLIC (Contrat Local Initiatives Climat) en partenariat avec l’ADEME et le Conseil régional. Il a offert un Espace Info Energie, lieu d’informations et de conseils concernant les énergies, à destination des particuliers (public privilégié), des entreprises et des communes, ainsi que des subventions à travers Proxima et le Contrat Régional de Développement durable. D’autres actions ou vastes manifestations menées aussi par des communes ou la Communauté de communes du Thouarsais montrent que les autorités et les pouvoirs publics mobilisés sur les questions environnementales participent ainsi à la dynamique de verdissement et prennent des décisions pour préserver l’environnement. Certains projets présentent simultanément d’autres dimensions : économique, touristique, pédagogique dans le cas de TIPER. Deux remarques enfin à propos de l’économie « verdissante » thouarsaise. D’une part, il existe une proximité entre ce territoire et la région Pays de Loire et un certain nombre d’entreprises se tournent naturellement vers le Maine-etLoire voisin, que ce soit dans l’optique de relations interentreprises selon une logique circulaire, ou pour les services de la CCI 49. Ceci est confirmé par la chargée de mission hygiène, sécurité, environnement, accessibilité de la CMA qui intervient peu sur le Thouarsais. D’autre part, pour leur stratégie de verdissement, la logique d’organisation des groupes, y compris coopératifs, est extra-territoriale : des solutions générales établies sans tenir compte des spécificités territoriales et des structures et associations environnementales présentes localement. La mutualisation est prévue en interne : collecte des déchets par les camions en même temps éventuellement que livraison, fournisseurs du groupe, relations minimales avec les autres acteurs économiques (seulement les clients, la banque). Bien que déclarant ne pas exclure la participation à un éventuel projet local, la filiale d’un groupe s’en remet en général au groupe pour toutes les décisions concernant l’environnement, pour établir des dossiers comme pour être informée. L’avantage dans l’absolu est qu’un groupe très engagé dans le développement durable ou la RSE « irrigue » en quelque sorte ses filiales et leur apporte le nécessaire pour que soient mises en œuvre à leur niveau des pratiques vertueuses. Sans être a priori incompatibles, ce type de verdissement microéconomique extra-territorial a besoin à un moment donné d’être articulé avec la dynamique de verdissement du territoire qui repose, quant à elle, sur des entreprises reliées entre elles et formant un écosystème. Comment renforcer la dynamique de verdissement du territoire selon les entreprises ? Les entreprises de notre échantillon font part de leurs besoins, des difficultés qu’elles rencontrent dans leur démarche environnementale et des acteurs sur qui elles comptent pour favoriser le verdissement du territoire. Elles en restent 61 à des considérations pragmatiques, conformément à la dynamique de verdissement sur T3 qui se fait sans formalisation préalable ni projet d’écologie industrielle et territoriale. Quelques entreprises insistent sur la nécessité de mettre en exergue dans la communication sur cette question environnementale les arguments économiques. En respectant des normes environnementales, on peut réaliser un gain économique surtout si l’aide peut fonctionner par étapes, une première étape consistant en diagnostics légers offerts par la Région par exemple. Il s’agit aussi plus concrètement de s’appuyer sur des dispositions réglementaires, jugées plutôt efficaces, ou des incitations fortes, y compris au niveau de la Communauté de communes à travers des mesures concernant le recyclage des déchets ou sa politique du logement (contre l’insalubrité par exemple). Enfin, cela retentit à un niveau plus élevé de réflexion : le défi est d’« allier écologie et relance de l’emploi » et d’éviter, comme dans certains secteurs, que les réglementations ne deviennent, prises ensemble, contreproductives en matière environnementale, parce que déjà trop nombreuses hors environnement ou parce qu’établies auparavant sans prendre en compte l’environnement et peu compatibles avec les normes pour préserver celui-ci. Par exemple, la problématique de verdissement de structures d’accueil des personnes âgées est très compliquée, à cause des normes déjà existantes, des coûts et de la prise en charge financière des patients, du fait que l’on répond en priorité à un besoin social, alors que se développe aujourd’hui ce secteur des services à la personne. Pour des résultats, il faut « coupler écologie et économie » ! Mais les dépenses d’investissement environnemental exigent dans de nombreux cas beaucoup de temps pour produire le retour attendu ; on s’inscrit donc dans une vision à moyen terme, à laquelle beaucoup d’acteurs, y compris des salariés, ne sont pas habitués, sans compter les délais pour certains dossiers. Ces freins sont plutôt d’ordre culturel. Au sein d’un même secteur les avis peuvent être très partagés. C’est le cas des transports. Certains transporteurs affirment que cette activité ne fait pas partie de l’économie verte, et qu’elle n’est aucunement concernée par ces questions. D’autres, au contraire, la présentent comme un secteur clé de la transition écologique et se disent prêts à relever le défi pour que l’activité ait un avenir. Aux dires des entreprises, une communication et des explications peuvent être apportées aux secteurs concernés par des acteurs ou un réseau proches des entrepreneurs. Là encore, la contrainte qui se durcit dans certains secteurs, sous l’effet de REACH par exemple, doit être, avec un accompagnement adapté, transformée en opportunité pour l’entreprise sur son territoire. 62 Sont désignés par les entreprises comme les mieux placés pour intervenir auprès d’elles et favoriser le verdissement du territoire les acteurs suivants : CCI (par la moitié des entreprises interrogées), Pays thouarsais, Club des entreprises du Thouarsais, un directeur de site (via le Club d‘entreprises), CMA, Chimirec (prestataire déchets), DREAL, Région, CDC, UIMM. Les entreprises ont besoin en outre, et pour répondre à tous les freins mentionnés, de visibilité à long terme en général. Cela peut inciter celles qui n’ont pas encore franchi le pas à se lancer. Les microentreprises sont sensibles aussi aux mesures renforçant l’activité locale en général. Les deux tiers des entreprises qui ont intégré les préoccupations environnementales dans leurs activités ont besoin d’être confortées dans leur engagement environnemental, et que soit encouragé le management environnemental à leur niveau. Quelques-unes, pionnières sur leur territoire, en sont déjà à ce stade et peuvent « tirer » les autres. D’autres n’ont pas choisi l’intégration au cœur de l’activité principale, mais ont introduit des activités vertes (installations d’énergie renouvelable par exemple) à côté des activités traditionnelles. Grâce à la dynamique territoriale thouarsaise particulière, tous ces acteurs se trouvent reliés et s’en apprennent mutuellement sur les stratégies possibles. 63 III.4 Dynamique observable sur le territoire T4 Figure 6 : Entretiens réalisés sur T4 : Nord-Ouest Charente-Maritime T4 représente dans notre étude le territoire qui connaît une forte dynamique de verdissement. Les seize entreprises qui composent l’échantillon sont situées en Charente-Maritime à proximité du littoral sur le territoire de la Communauté d’Agglomération de la Rochelle (CdA). Plus précisément elles sont localisées sur les communes de La Rochelle et Périgny, aucune de celles contactées sur Aytré n’ayant accepté l’entretien. Neuf sont des microentreprises ; cinq ont un effectif de plus de 49 salariés. Dans le détail, trois entreprises ont respectivement 50, 52 et 63 ; l’une comporte une centaine de salariés sur le territoire, mais 400 dans toute la France, l’autre est une ETI*+ avec un effectif atteignant 400 localement et 720 dans toute la France. Sur le total, cinq entreprises appartiennent à un groupe. Les secteurs couverts par l’échantillon sont variés et se conforment aux objectifs méthodologiques fixés en amont dans l’étude. 35 Entreprise de Taille Intermédiaire : entre la PME et la Grande entreprise, elle compte de 250 à 4 999 salariés, un CA qui n’excède pas 1,5 Mds d’euros et un bilan n’excédant pas 2 Mds d’euros [définition de l’INSEE] ; seule la variable effectif est prise en compte ici. 64 Tableau 12 : Les secteurs d’activités des entreprises interrogées sur T4 Secteur d’activité Nombre d'entreprises Artisanat ENR 3 Déchets 2 IAA 2 Services aux entreprises (bureaux d’études) 2 Transport maritime 2 Agriculture 1 Blanchisserie industrielle 1 BTP 1 Imprimerie 1 Industrie du bois 1 Total 16 Outre le fait qu’il se situe au cœur de l’agglomération de la deuxième aire urbaine de la région Poitou-Charentes, le territoire T4 présente deux caractéristiques fortes qui le distinguent des autres territoires de notre étude. La première est sa grande attractivité économique 36 . La seconde tient au projet d’écologie industrielle Biotop lancé en 2010 par le Club d’Entreprises de Périgny. Ces deux éléments de contexte jouent fortement dans l’analyse de la dynamique de verdissement à l’œuvre sur ce territoire. De surcroît, en termes de perspectives, il convient d’intégrer, d’une part, la stratégie de développement économique de la CdA, visant à soutenir l’innovation, le développement des entreprises locales et la création d’entreprises, et, d’autre part, l’ambition à terme que Biotop se déploie sur l’ensemble des zones d’activités de la CdA. Le point de vue des entreprises est alors particulièrement pertinent parce qu’elles restent dans ce contexte les premiers acteurs du verdissement des activités et les mieux placées pour indiquer comment le processus peut être soutenu et renforcé sur leur territoire. 36 Le regain d’attractivité de l’aire urbaine de La Rochelle date des années 1990 et se traduit par un dynamisme à la fois économique et démographique. 65 Première observation : un territoire attractif, d’entreprises dynamiques en terme de verdissement Les trois quarts des firmes de l’échantillon, soit 12 au total, ont entrepris des actions verdissant leurs activités. Trois n’ont rien fait ni projeté, et une entreprise a un projet. L’attractivité du territoire ne fait aucun doute quand on observe les raisons de l’implantation de l’activité à cet endroit : venus pour les études, certains y sont restés pour les facilités offertes par la CdA aux jeunes diplômés créateurs d’entreprise, notamment à travers l’hôtel d’entreprises à loyer préférentiel. D’autres y ont trouvé des opportunités de business (contrat avec la CdA, carnet de clients constitué) ou des avantages en s’installant dans la zone industrielle : proximité favorable sur le plan de la stratégie industrielle, proximité des fournisseurs, accès rapide à la rocade. L’espace disponible est en général très apprécié. La moitié des entreprises ont un attachement familial localement, certains entrepreneurs ayant choisi de venir vivre ici. Toutes les entreprises se sentent au minimum concernées par les questions environnementales et une sur deux se considère même comme faisant partie de l’économie verte. Toutefois les trois entreprises qui n’ont mené aucune action sont des microentreprises qui appartiennent à des filières vertes. C’est principalement la taille de l’entreprise qui est avancée comme constituant un frein37, mais il est clair aux yeux du dirigeant que « l’entreprise ne souffre pas d’un problème d’image vu son activité ! ». En matière de formation, les réponses des entreprises sont partagées entre celles qui reconnaissent un besoin à ce niveau, et celles qui n’en voient pas ; et pour les premières, il s’agit surtout d’un besoin de sensibilisation ou d’information. Il faut dire que certains personnels sont déjà compétents du fait de leur formation initiale, et que l’on recherche encore beaucoup plus des compétences transversales (métiers du développement durable, de la QSE), quand l’entreprise n’a pas déjà ce profil de personnel en poste. Quelques entreprises expriment des attentes d’ordre éthique ou d’adaptabilité à l’égard des salariés ou des candidats à l’embauche (déjà sensibilisés au tri des déchets par exemple). Les entreprises de l’échantillon ont déjà mené une palette assez vaste d’actions dans le domaine environnemental. Pour ce qui est de la gestion des déchets, qui est généralement ce que l’entreprise met en avant parmi ses actions environnementales, se retrouvent le tri (carton, plastique, emballages) et le recyclage (bois, papier de bureau) y compris sur les 37 L’effectif de ces entreprises est au plus de cinq personnes. 66 chantiers (câbles, gaines). Des prestataires externes sont sollicités en outre pour la collecte des métaux et des déchets dangereux, l’incinération de certains déchets, le traitement des huiles usagées et le recyclage des batteries. Les entreprises cherchent plutôt à aller plus loin que ce minimum, par le traitement et la valorisation en interne si possible (déchets de bois recyclés pour le chauffage par exemple), en étendant à d’autres matières la valorisation (marc de café, sacs de jute par exemple), ou en adoptant en amont un comportement visant à réduire les déchets (livraison par les fournisseurs dans des contenants beaucoup plus grands, mise en place d’un système de distributeurs rechargeables de produits comme l’encre, de consignes d’emballages), en privilégiant des solutions meilleures à l’enfouissement ou à l’incinération si elles existent. Certaines souhaitent limiter strictement l’utilisation de produits chimiques et composés volatils dangereux (produits nettoyants, encre) et même, pour l’une, étendre la précaution à des produits non encore répertoriés dangereux. L’une pratique l’agriculture raisonnée. Des dirigeants relient vigilance sur les approvisionnements et origine, française ou européenne, des produits ou matériels qu’ils achètent. Si une seule firme évoque directement la réduction des gaspillages, trois parlent d’appliquer la méthode ACV, et parmi elles, l’une recourt à la sous-traitance d’un bureau d’études et a même acquis l’outil informatique pour faire les ACV en interne. L’adoption de plaques thermiques en remplacement des argentiques dans le système CTP (Computer-to-Plate) en imprimerie participe de cet effort, ainsi que le choix du papier certifié FSC ou le bois PEFC. Pour deux des entreprises interrogées, le choix de l’éco-conception conditionne déjà nettement leur offre de produits. A travers leurs actions environnementales, les entreprises apparaissent sensibles aussi aux différents rejets et à l’eau. Les premiers peuvent inclure les fumées et échappements de combustion, les rejets gazeux et liquides. Outre les efforts pour l’économie de la ressource en eau, les acteurs sont portés globalement à prévoir, si les coûts ne s’avèrent pas trop élevés, un système de récupération. Là encore, pour l’eau, l’écart est grand entre l’entreprise d’un secteur d’activité grand consommateur d’eau qui a investi pour le traitement et le maintien de son niveau de qualité, et d’autres dont l’action dans ce domaine peut rester marginale ou se limiter à celle obligatoire (mise aux normes par rapport aux réseaux de collecte). En matière d’économies d’énergie, quand les rénovations de bâtiments et travaux d’isolation n’ont pas encore été entrepris pour diminuer sensiblement la consommation, l’entreprise est déjà sensibilisée et agit en conséquence : elle peut aller jusqu’à renoncer à chauffer un local totalement non isolé et/ou ne pas utiliser un bureau en hiver. Un audit énergétique réalisé est déjà pour 67 un dirigeant l’occasion de sensibiliser ses collaborateurs sur les déperditions et de les associer à l’objectif d’améliorer leurs conditions de travail dans les bâtiments. Des efforts d’investissement ont été faits par plusieurs entreprises pour des matériels moins énergivores et des récupérateurs de chaleur. Et outre le fait de se fournir davantage en énergie verte, trois entreprises de l’échantillon ont choisi de produire de l’énergie renouvelable (essentiellement PV). Pour ce qui concerne les transports et tous déplacements, les actions sont diverses et bien réelles : optimisation (géolocalisation, regroupement de commandes, préparation et organisation des approvisionnements des chantiers, pas de dispersion géographique des chantiers), éco-conduite, les transports doux (vélos sur le site), les transports collectifs (train, bus), les véhicules récents, électriques ou hybrides. Une entreprise a poussé l’engagement dans ce domaine à travers un PDE (avec la CdA) sur lequel elle communique, une application informatique pour le co-voiturage, et des actions auprès des transporteurs (pour des camions à double plancher, pour le bilan carbone Charte ADEME). Enfin, plusieurs entreprises encouragent leur personnel à dématérialiser tout ce qui peut l’être. Pour les deux tiers des entreprises la démarche RSE a déjà du sens en interne. Toutefois, soit elles l’ont surtout engagée sur certains aspects (pour le personnel par exemple) et très peu sur d’autres, soit elles n’ont pas encore formalisé du tout la démarche, soit elles ne communiquent pas ni ne valorisent leurs efforts dans le domaine. Deuxième observation : le rôle du Club d’entreprises de Périgny et l’éco-réseau Biotop Les acteurs interrogés citent en exemple à proximité pour les actions environnementales « les entreprises de Biotop », et à de nombreuses reprises Léa Nature a été mentionnée. Celle-ci, spécialisée dans la conception et la vente de produits bio et naturels dans les domaines de l’alimentation, la cosmétique, la santé et la diététique, s’est engagée sur la Labellisation Ecocert 26000 en RSE niveau Excellence et Engagement Climat. Comportant environ 700 collaborateurs sur huit sites de production en France dont trois dans la région Poitou-Charentes, Léa Nature a son siège et son site principal en effectif à Périgny. Avec 125 millions de chiffre d’affaires, la société offre l’image de la réussite économique brillante, ayant même un statut de locomotive bien au-delà de T4, tant ses pratiques en faveur des valeurs environnementales sont fortes et connues en France. Après vingt années d’existence de l’entreprise et autant d’engagement de son fondateur-dirigeant 68 Charles Kloboukoff, elle confirme d’abord que le bio et le retour aux produits naturels relèvent davantage d’un mouvement de fond que d’un phénomène de mode, et elle prouve aussi, à travers les parts de marché gagnées, que dans l’alimentation comme pour les produits autres qu’alimentaires, la dynamique économique de ces produits est favorable, tendance que n’a pas stoppée la crise. Léa Nature mène une communication externe pour éveiller les consciences sur les questions environnementales et soutient le tissu associatif, en plus des innombrables actions en interne tant sur le plan social qu’environnemental. Huit entreprises sur les seize que comprend notre échantillon sont adhérentes du Club d’Entreprises de Périgny. Il s’agit donc du réseau le plus important sur le territoire selon les entreprises. Le Pôle des Eco-industries pourtant présent est loin derrière, évoqué par trois entreprises seulement. De nombreux autres réseaux sont mentionnés mais une fois seulement (cf. annexe 5). Et seules deux entreprises disent n’appartenir à aucun réseau. Sans être la seule, le rôle joué par le Club d’Entreprises de Périgny constitue une caractéristique fondamentale du verdissement du territoire T4. Il s’agit d’un réseau d’échanges s’adressant à toutes les entreprises de la zone d’activités de Périgny et du territoire de la CdA. Sur la base de problématiques communes, les adhérents, au nombre de 120, peuvent partager leurs expériences et développer leur réseau professionnel. Le Club cherche en outre à faciliter l’intégration des jeunes entreprises localement, et les rencontres avec d’autres clubs d’entreprises38. Impliqué dans les réflexions concernant le développement économique local, et notamment l’aménagement et l’équipement, il est à l’initiative du projet Biotop qui émerge en 2011. Celui-ci est une démarche d’écologie industrielle visant à réduire les impacts environnementaux de la zone industrielle de Périgny d’abord, et à terme de l’ensemble des zones d’activités de la CdA. Dix bénévoles constituent le bureau du club, mais c’est surtout à travers la présence et l’implication concrète d’un animateur que les entreprises parlent de cet écoréseau. La majorité d’entre elles relie directement leurs actions environnementales à la dynamique impulsée par Biotop et surtout son animateur. D’abord, précisons ce qu’apporte à l’entreprise a priori et globalement l’adhésion à Biotop : un accompagnement personnalisé et un pré-diagnostic environnemental ; des services et solutions mutualisés pour une gestion environnementale facilitée ; l’appartenance au réseau d’écologie industrielle 38 Il est membre de l’UCER qui est l’Union des 7 Clubs d’Entreprises de l’agglomération rochelaise. 69 soutenu par l’ADEME, le Pôle des Eco-industries, la Région Poitou-Charentes, le Conseil Général de la Charente-Maritime et la CdA. Dans le détail, outre les pré-diagnostics environnement et pré-études en partenariat avec le Pôle des éco-industries, l’entreprise y trouve concrètement des collectes de déchets organisées, des ateliers de formation ou d’information sur le développement durable, des formations intra ou inter-entreprises à tarifs avantageux, des achats groupés pour des équipements ou des prestations (conseil ou analyse des risques), et de l’aide aux financements (montage des demandes, veille). En adhérant 39 , les entreprises disposent donc d’emblée d’un cadre assez fourni favorisant leur engagement et facilitant la mise en œuvre d’une démarche environnementale à leur niveau. L’existence d’un tel cadre ressort nettement des entretiens à travers la présentation que font les entreprises des actions qu’elles ont menées. Par comparaison, puisque ce ne sont pas les mêmes, les entreprises appartenant plutôt à un réseau professionnel ou sectoriel, et soutenues par ce réseau pour leurs actions de verdissement, ont davantage à prendre en charge et à organiser par elles-mêmes au niveau de la démarche globale. Par contre, elles bénéficient d’un accompagnement et d’une veille informationnelle et réglementaire cœur de métier. Notre enquête montre que l’adhésion au Club d’Entreprises de Périgny n’implique pas nécessairement un engagement de l’entreprise sur le plan environnemental. Ensuite, la logique circulaire de l’économie prévaut dans Biotop, et ceci dès l’origine du projet. En 2008, une commission Achats du Club s’est fixée l’objectif d’optimiser les coûts, notamment en matière de gestion des déchets. L’idée du recyclage a incité la commission à rechercher les synergies possibles entre les entreprises, puis à élaborer la démarche, assistée du Pôle des Eco-industries, et à s’appuyer aussi par la suite sur les diagnostics environnementaux réalisés. L’identification de synergies éco-industrielles s’est faite récemment, et dans nos entretiens quelques entreprises seulement font référence à la récupération et au recyclage de déchets entre elles (sacs de conditionnement réutilisés par une autre entreprise par exemple). Au-delà, les collaborations au sein de Biotop pourront, avec la participation éventuellement de centres ou structures pour la recherche et l’innovation, donner lieu à de nouveaux produits ou matières. Il s’agit essentiellement ici des CRITT horticole et agroalimentaire régionaux ; une entreprise formule des attentes en particulier à l’égard du CRITT Matériaux. Enfin, la réussite manifeste de Biotop est dans la mise en relation d’entreprises qui, bien qu’acteurs de proximité, ne se côtoyaient pas auparavant, et dans les solutions trouvées ensemble pour que les déchets des 39 Elles sont 55 à s’être engagées en 2012, avec une trentaine de diagnostics environnementaux réalisés dès cette première année. 70 unes puissent servir de matières premières à d’autres. Sur ce plan, Biotop réalise, en partie au moins, son objectif de « participer activement, sur le terrain, au développement durable du territoire ». Une entreprise pose directement la question de la pérennisation de l’emploi de l’animateur dans la mesure où, de son point de vue comme selon d’autres, celui-ci joue un rôle très important dans la dynamique de verdissement de T4, donc non seulement sur la zone industrielle de Périgny mais potentiellement sur le territoire de la CdA. Troisième observation : au-delà du Club d’Entreprises de Périgny : des acteurs présents et engagés sur ce territoire La présence d’acteurs dans les services liés à l’environnement constitue un atout important et les entreprises organisent leurs efforts environnementaux aussi en fonction de ces services à proximité. Arrivent en tête les bureaux d’études mentionnés par le tiers des entreprises interrogées sur T4, puis NCI environnement. Filiale du groupe PAPREC, celle-ci intervient sur toute la filière déchets (collecte, tri, traitement, recyclage, valorisation, stockage), l’agence de la Rochelle ayant un effectif de l’ordre de 100 salariés. La déchetterie est évoquée à deux reprises. D’autres acteurs interviennent dans le domaine des déchets : Derichebourg à La Rochelle pour les métaux, Adivalor pour la collecte et l’élimination des déchets phytosanitaires, qui fait également de l’information et de la prévention en amont. Viennent ensuite des structures et personnes très variées, signalées à titre de prestataires dans le domaine environnemental : Apave à Périgny qui propose un accompagnement sur la maîtrise des risques, Dekra Industrial pour le contrôle et l’inspection des installations et bâtiments, les fournisseurs, « un stagiaire de l’Université de la Rochelle », le CRITT agroalimentaire, l’ADEME et la CCI (veille réglementaire). On retrouve l’ADEME signalée parmi les acteurs ayant déclenché des actions verdissantes. Certes en elle-même la zone industrielle de Périgny constitue un pôle économique dynamique, qui regroupe 250 entreprises sur 300 hectares. Mais le dynamisme de T4 tient aussi à la présence de nombreux réseaux sur le territoire de l’agglomération d’une ville qui, très tôt, eut des initiatives relevant de l’écologie urbaine : vélos en libre service, voitures électriques en libre service, bus électriques Une des priorités de l’agglomération reste la ville durable de demain, par le développement de l’éco-mobilité et aussi de l’écohabitat. Et la filière des éco-activités se trouve nettement encouragée par des structures, infrastructures, dispositifs, soutiens et accompagnement à l’innovation et la recherche, en faveur de la création et du développement d’activités innovantes. Des compétences dans les structures de formation 71 supérieure et des laboratoires de recherche liés aux thématiques environnementales s’offrent à proximité. Des réseaux régionaux entretiennent également des relations avec les acteurs du territoire. De Poitiers interviennent le Pôle des éco-industries, en tant que partenaire de Biotop et directement auprès d’entreprises et de centres de recherches, et le Cluster Eco-Habitat, ou des Deux-Sèvres Futurobois. En termes de projets et programmes, les collectivités territoriales sont impliquées dans la transition écologique : PCET obligatoire lancé en juin 2012, Agenda 21 lancé en 2010, projet d’aménagement d’un éco-quartier, appel à projets SoWATT® (pépinière d’entreprises dédiées aux éco-activités), soutien financier à Biotop, Yélo pour les transports doux Il faut y ajouter la Charte de développement durable Port Atlantique La Rochelle, le Comptoir du développement durable (CDD) de l’agglomération (Point Info Environnement auparavant) qui est un centre de ressources et d’animation, les nombreuses manifestations en lien avec l’environnement (Salon de la Croissance Verte en 2012, 2ème symposium international de la Chimie Verte en 2013, l’éco-festival Notes en vert), l’opération « Vague bleue » lancée en janvier 2012 par la CMA 17, avec la CdA, L’Agence de l’eau Loire-Bretagne et le Port de la Rochelle pour améliorer la gestion des déchets des professionnels du nautisme (entretien, réparation et construction de bateaux), le vaste programme de réhabilitation énergétique des bâtiments, et les formations initiales et continues sur les énergies renouvelables, les bâtiments BBC, les déchets ou le management environnemental. Cet ensemble d’engagements concrets, de dispositifs, d’animations, la mobilisation et l’action concertée d’un certain nombre d’acteurs sur des actions, manifestations et opérations de grande envergure font de ce territoire T4 un cadre propice, stimulant pour le verdissement des activités des entreprises, l’implantation et la création d’entreprises vertes ou vertueuses. D’ailleurs, pour le déclenchement de leurs propres actions, les entreprises de notre échantillon mettent en avant le rôle très important joué par la CdA. Or la CdA ne conseille pas directement les entreprises sur les questions environnementales, elle les oriente vers la CCI ou la CMA et s’appuie sur ses partenaires pour offrir aux entreprises services, compétences et expertise en général, et sur l’environnement en particulier. Dans l’appel à projets PULPE, le service Développement économique de la CdA a d’ailleurs prévu un prix spécial « environnement ». 72 Quatrième observation : quelles perspectives quant à la dynamique de verdissement ? Eléments apportés par les entreprises Ce territoire présente un cadre particulier pour la problématique de verdissement des entreprises en raison notamment du dynamisme du Club d’Entreprises de Périgny portant un projet de type écoIogie industrielle, de la présence d’acteurs et de services dans le domaine environnemental et d’un fort engagement de collectivités territoriales comme la CdA. Dans les déclarations des entreprises au sujet de leurs motivations, de leurs attentes, des freins et obstacles qu’elles rencontrent, ainsi que dans leurs remarques libres, elles fournissent des précisions sur la dynamique de verdissement créée et sur ses perspectives d’évolution de leur point de vue. Vu la taille de l’échantillon par rapport à la totalité concernée potentiellement par l’enquête sur ce territoire, il ne s’agira toutefois que d’indication ou suggestion. Ce sont des éléments jouant positivement et négativement qui sont mis en évidence. des entreprises convaincues qu’il faut agir pour l’environnement Y compris celles qui n’ont rien engagé dans le domaine environnemental, les entreprises sur ce territoire sont sensibilisées et s’intéressent à la question. Et parmi celles ayant agi, les motivations principales sont l’avenir de la planète ou la préservation de l’environnement. Mais la firme n’exprime jamais une seule motivation : elle combine cette première motivation à la prospérité de l’entreprise ou à l’amélioration de la qualité de vie ou de la santé, ou à la conviction du dirigeant. Sans en faire nécessairement une question d’image de l’entreprise, quelques-unes se présentent comme militantes, convaincues que cela s’impose à elles comme « le sens de l’histoire » ou que cela justifie et accompagne le progrès technologique aujourd’hui. L’aspect financier en tant que tel ne ressort pas parmi les motivations, et ne saurait être déterminant vu la façon dont se positionnent les entreprises en terme de responsabilité de chacun à l’égard de l’environnement. Ce sont aussi des opportunités de compétences qu’elles entendent bien saisir dans ce domaine. Hormis ces cas et ceux où la réglementation a fait naître une démarche dans l’entreprise, l’idée de « franchir le pas » peut se concrétiser grâce au réseau d’entreprises ou à la CdA, et dans une moindre mesure aux différents acteurs mentionnés précédemment. Une ETI précise son point de vue ainsi : on « préfère être acteur et pionnier que suiveur et contraint ». Etre motivée peut signifier chercher à surmonter tout frein ou difficulté qui se présente et qui pourrait compromettre le projet, et c’est le cas sur le territoire T4. Les entreprises qui ont mené des actions évoquent de nombreuses difficultés à l’exception de deux. Ces difficultés sont d’ordres variés, et doivent 73 être reliées aux besoins spécifiques de chacune, et aux aides et soutiens divers obtenus ou pas. Par rapport au marché, elles tiennent : - au contexte économique défavorable (bâtiment par exemple) ; - au fait que nous sommes sur des nouveaux marchés encore émergents à des prix parfois prohibitifs pour la clientèle potentielle donc très sensibles aux dispositifs d’incitations financières soutenant lesdits marchés ou à une réglementation forçant le développement de ces marchés (véhicules électriques et hybrides par exemple) ; - au fait que les marchés publics et les appels d’offre en général tiennent insuffisamment compte des aspects environnementaux et encore trop souvent exclusivement des prix ; - au manque de visibilité et de reconnaissance dont souffrent ces entreprises plutôt vertueuses relativement à leurs concurrents. Un autre type de difficulté rencontré est l’opacité de l’information et la complexité du « système sur tout ce qui touche de près ou de loin à l’environnement ». Il existe un réel besoin de clarifier au niveau microéconomique « qui fait quoi » et d’orienter de façon efficace vers le service, la structure ou l’institution compétent autant pour les problèmes rencontrés que pour les aides auxquelles pourraient prétendre les entreprises. Entre l’ADEME, la DREAL et la Région, les petites entreprises expriment le souhait d’avoir un seul interlocuteur, de préférence local, et de pouvoir bénéficier d’un suivi personnalisé. En lien avec la réglementation que de nombreuses entreprises jugent par ce côté défavorable aux initiatives dans le domaine environnemental, les contrôles et les demandes de mise aux normes ou d’aménagements sont plutôt mal vécus (« police industrielle », « rôle répressif »), et les pouvoirs publics ont de fait du mal à apparaître comme pouvant jouer un rôle positif de conseil et d’encouragement auprès de ces unités. Les plus grandes, au contraire, s’estiment plutôt bien informées, savent traiter l’information, sont plus à l’aise avec les dispositifs d’aide et avec les structures d’appui et d’accompagnement, et reconnaissent que des aides financières « correctes » (50% du montant), sans être déterminantes, facilitent vraiment la mise en œuvre des actions verdissantes. Le problème technologique est souligné à plusieurs reprises dans des secteurs d’activités pourtant différents. L’entreprise fait évoluer dans ce cas autant que possible à son niveau, et sur la base de ses besoins spécifiques (qualité, performance, autonomie) les composants et matériaux par exemple. Elle se tourne vers les centres de recherche ou les structures de R&D et d’innovation. Mais le problème d’ordre technologique relève le plus souvent d’un hiatus créé par le caractère très avancé de ce qu’a installé 74 l’entreprise ou de ce qu’elle souhaite mettre en place. Le Réseau de Développement Technologique Poitou-Charentes fait partie des acteurs qui jouent un rôle actif à travers notamment la Prestation Technologique Réseau (PTR) pour les entreprises qui souhaitent innover ou se développer. A l’inverse, il arrive que l’entreprise se trouve face à des dispositifs qu’elle juge trop innovants. La présence à proximité d’acteurs de la recherche et de la formation supérieure stimulant l’initiative en matière d’innovation et l’entrepreneuriat est un facteur jouant favorablement quand le lien établi organise véritablement une coproduction entre les deux milieux tenant compte des conditions concrètes de l’industrie et des activités économiques dans tous les domaines qui ont un impact sur l’environnement. Les entreprises mentionnent évidemment le manque de temps et de moyens financiers pour mener davantage d’actions mais rarement au titre de principal écueil. Le besoin en matière de communication est par contre souligné, et explicité même, par plusieurs entreprises : à destination d’un public très large et divers, devrait être développée une communication pour informer mais aussi pour présenter l’intérêt de se tourner vers les « bons » produits et les « bons » marchés, et de s’adresser aux établissements ayant les meilleures pratiques. Cela ne peut se réduire à des plaquettes ou des discours, il faudrait montrer concrètement que ces actions (1) sont reconnues, valorisées (labellisées par exemple) ; (2) vont dans le sens de l’avenir que se fixe la société dans son ensemble ; (3) sont économiquement opportunes. Enfin, « mutualiser » ou « mutualisation » sonne comme un maître-mot dans les déclarations des entreprises quand il s’agit d’envisager l’avenir. L’existence d’un éco-réseau d’entreprises a certainement contribué à répandre cette nouvelle vision des relations entre entreprises et à ouvrir l’étendue des possibilités de coopération et de (re)groupement. Désormais, outre la mutualisation dans les domaines des déchets ou des transports, certaines entreprises pensent à l’appliquer pour les aides, pour embaucher une personne qualifiée pour monter les dossiers des projets liés à l’environnement, pour la démarche ISO, pour la veille technologique De la même manière que l’écoconception semble faire son chemin, il semblerait que, plus largement, la logique de l’économie circulaire soit en train de s’inscrire dans des pratiques d’entreprises et, à ce stade surtout, dans les modes de pensée et dans la définition des stratégies possibles. Cela confirmerait que le cadre offert par les autres acteurs sur le territoire, y compris le Club d’Entreprises de Périgny, est propice à un processus d’apprentissage des entreprises. 75 quels acteurs pour favoriser la dynamique et la renforcer selon les entreprises ? Se pose sur ce territoire le problème des petites entreprises dans les filières vertes qui éprouvent des besoins particuliers. D’un côté, davantage qu’une veille réglementaire au niveau d’un réseau ou d’une institution proche des acteurs microéconomiques, certaines activités devraient, selon leur dirigeant, être directement informées lorsque la loi ou de nouvelles décisions publiques affectent directement leur activité : par exemple, lorsqu’est modifié le tarif de rachat de l’énergie renouvelable et qu’il est certain que leur clientèle potentielle adaptera en conséquence ses projets d’investissement. D’un autre côté, ces entreprises souffrent particulièrement du fait qu’elle sont soumises à la même loi que les grandes entreprises, alors qu’elles ne disposent pas des moyens équivalents pour démarcher et se faire de la publicité. Elles doivent s’en remettre à la communication organisée autour de l’Artisanat, dont elles ignorent l’efficacité. Autre élément, la plupart des entreprises du territoire ont des activités liées au développement de l’économie verte et donc aux politiques pour soutenir cette croissance verte (par exemple une part non négligeable de bio dans l’IAA, des moteurs électriques dans les transports, de l’ENR dans les bureaux d’étude, de bois dans le BTP). A travers l’évolution récente, elles prennent conscience de leur dépendance à l’égard des réglementations (dont RT 2012), et des dispositions fiscales ou des aides incitatives régionales, de l’évolution des mentalités, et des médias s’ils relaient ces préoccupations ou diffusent l’information sur les éco-produits ou les éco-technologies. Les perspectives de développement des activités des entreprises ne sont pas négatives en général sauf concernant l’énergie solaire photovoltaïque, la collecte des déchets ménagers ou l’imprimerie. Les pouvoirs publics en général, et la réglementation particulièrement, jouent un rôle non négligeable dans la dynamique locale de verdissement. Les entreprises en sont conscientes, mais c’est le plus souvent sous l’angle négatif qu’elles l’abordent. Elles mettent en avant les obstacles qu’érige la réglementation, et les incitations défavorables à l’environnement qu’elle induit, en les déresponsabilisant dans les faits sur ces questions. Ce résultat tient dans quelques cas aux coûts financiers importants, parfois non anticipés pour la mise en conformité d’installations. Des entreprises ne comprennent pas les contraintes réglementaires sur certaines questions qui leur semblent pourtant simples, relativement à l’installation de panneaux photovoltaïques ou à la récupération des eaux de pluie par exemple. 76 Pour l’avenir, les avis divergent sur la question de savoir quel acteur est le mieux placé pour coordonner les actions de verdissement sur le territoire. Pour un tiers des unités économiques, le Club des entreprises était bien placé et l’a très bien fait, donc il faudrait lui conserver ce rôle important et l’animateur. Pour un autre bon tiers, on considère que c’est un ensemble d’acteurs qui répond à la question : la CdA, la Région et le Pôle des Ecoindustries, et les CCI, en plus du Club et autres réseaux d’entreprises (dont CGPME). Les autres entreprises mentionnent des acteurs divers, de façon parfois imprécise, mais insistent sur la nécessité que l’acteur (ou les) acteur(s) connaisse(nt) le monde de l’entreprise. Plusieurs acteurs locaux ont eu l’idée de la création d’une sorte de Pôle des industries nautiques et environnementales pour la communication (produits, réglementations, fournisseurs) et pour la mutualisation (veille technologique par exemple). La CdA pourrait accompagner, selon les mêmes acteurs, ce type de projet. En dehors des questions ouvertement posées sur les acteurs déclenchant ou favorisant les actions environnementales au sein des entreprises ou dans « l’espace mutualisation », celles-ci expriment largement l’importance de Biotop qui constitue un projet mobilisant ouvrant le champ des possibles pour des entreprises manquant de moyens, et qui produit un espace réel pour travailler ensemble : en plus des ateliers thématiques et formations offerts dans ce cadre, il crée l’opportunité pour que se fassent des échanges et que puissent exister des groupes de travail ou de réflexion d’acteurs microéconomiques souhaitant s’engager davantage. Deux souhaits ont été émis par les entreprises elles-mêmes relativement à Biotop : d’une part, que cette démarche puisse essaimer vers les autres clubs d’entreprises ; d’autre part, qu’elle soit soutenue également, l’éco-réseau ayant besoin directement de moyens pour ce qu’il leur apporte en termes de services et pour avancer dans le développement durable du site, donc sur le plan du management environnemental. Cette question du soutien financier et du financement du poste de l’animateur pour l’avenir du projet, confirmée par le Président du Club, se pose au moment de notre enquête. En même temps selon celui-ci, la vitalité du projet, sa réussite et son développement à l’avenir dépendent largement du dynamisme d’un certain nombre d’entreprises du réseau. 77 III.5 Dynamique observable sur les territoires : essai de comparaison et synthèse globale Il ne s’agit pas ici de présenter et développer les constantes qui sont ressorties de la totalité des entretiens puisque ce sera l’objet de notre partie suivante. Après l’exposé de la dynamique de verdissement qui caractérise chaque territoire, on peut s’interroger sur les principaux éléments qui la différencient quand on passe d’un territoire à l’autre, et tirer quelques résultats de synthèse sur ce qu’est un territoire en verdissement dans la région PoitouCharentes. Rappelons au préalable, dans le tableau et les schémas suivants, la répartition des entreprises de l’enquête entre : A : celles qui ont entrepris des actions dans le domaine du verdissement ; B : celles ayant un (ou des) projet(s) dans ce domaine ; C : celles n’ayant rien fait ni projeté dans ce domaine. 78 Tableau 13 : Répartition des entreprises par territoire selon leur verdissement A l’issue de notre analyse par territoire, il est clair que les dynamiques observées sur chacun des territoires d’étude ne sont pas exactement conformes à nos hypothèses posées préalablement quant au degré de verdissement respectif : le territoire T1 connaît une dynamique de verdissement certes faible mais bien réelle ; T2 a une dynamique émergente plus forte que prévue ; T3 et T4 sont deux territoires ayant une dynamique de verdissement relativement forte. La gradation supposée au départ ne se retrouve donc pas telle quelle dans les résultats. En même temps, on constate des constances et des dissimilarités qui permettent d’établir qu’il existe à la fois une certaine progression et une différenciation visible entre les territoires en verdissement. Une dynamique plus forte ne signifie pas simplement avoir 79 davantage d’entreprises actives en matière environnementale sur le territoire. Les quelques observations suivantes synthétisent les principaux résultats. Première observation : la progression s’apprécie à travers les actions menées par les entreprises Les projets ne permettent pas d’établir une hiérarchie de degré de verdissement. Le territoire T2 arrive en tête avec des projets dans les secteurs de l’artisanat et l’agriculture, et des acteurs facilitant (Chambre d’agriculture et CETA) pour le projet de méthanisation. Le contexte de crise économique n’est pas propice au lancement de nouveaux projets et il a affecté davantage le secteur industriel, l’artisanat dont le bâtiment, et le petit commerce, moins représentés sur T4. A l’opposé l’impact de la crise s’est fait durement sentir sur T1. Pour ces raisons, rien ne peut être déduit sur la base des projets uniquement. Par contre, au sein des actions menées s’affiche nettement la différence entre les territoires, et ceci par le cumul de deux phénomènes : davantage d’entreprises impliquées et davantage d’actions par entreprise impliquée. Premier domaine d’actions des entreprises en matière environnementale, la sensibilisation à la gestion de déchets n’a pas partout atteint ses objectifs. L’étape de l’internalisation des coûts de gestion des déchets est la première significative dans le processus de verdissement des activités sur un territoire, et celle-ci n’est pas encore franchie sur T1. A partir de T2, cette problématique est internalisée : les bonnes pratiques en matière de tri, collecte et recyclage peuvent se développer. L’effort de réduction des déchets, le développement de la récupération et du recyclage ainsi que la recherche de nouvelles façons et nouvelles techniques de valorisation s’observent quant à eux en T3 et T4. La sensibilité aux rejets et pollutions de toutes sortes liés à l’activité n’est acquise qu’en T4. La conception circulaire sous la forme de flux de matières ou d’énergie entre entreprises à proximité, et relative à l’efficacité de la consommation de ressources gagne du terrain en T3 et T4. Les unités microéconomiques y sont d’ailleurs sensibilisées au cas de la ressource en eau. De façon générale, alors que la valorisation des externalités (eau, chaleur, déchets) avec réinjection en interne ou dans le procédé industriel d’autres entreprises locales est éloignée des réalités de T1 et des préoccupations de ses entreprises, elle prend aujourd’hui la forme d’un défi à relever pour un certain nombre d’entreprises de T3 et T4. En lien avec l’objectif d’économie d’énergie et de réduction de coûts parfois aussi, les actions relevant des transports (durables) et des déplacements (doux) plus fortes et plus nombreuses sur T4 sont 80 facilitées par les infrastructures et les services à la mobilité durable offerts par le cadre urbain et la politique de la CdA (PDU). La sensibilisation à l’efficacité et la maîtrise de la consommation d’énergie atteint d’autant plus facilement son objectif que les entreprises y voient une façon de réduire des coûts et, dans une moindre mesure, des risques en matière d’approvisionnement. Une distinction importante entre les territoires s’opère cependant au niveau du domaine des possibilités à cause du coût très élevé de la rénovation et de l’aménagement des bâtiments, et d’une aisance relative de certaines entreprises par rapport au système d’aides à la décision et de soutiens financiers. Sur T3 et T4, les entreprises vont plus loin, sensibilisées pour une partie d’entre elles à l’efficacité énergétique des process et usages transversaux. Ceci est à mettre en relation de façon plus générale avec la montée de la démarche ACV, et de la vision en terme de synergies de secteurs et d’acteurs. Deuxième observation : la dynamique de verdissement des entreprises est corrélée à la présence de services à l’environnement et à l’implication de structures environnementales sur le territoire et de réseaux et organismes représentant les entreprises Le tableau 14 rassemble quelques résultats qui suggèrent un lien entre les actions et projets environnementaux des entreprises d’une part et leurs principaux réseaux. Part des entreprises dans le total de chaque territoire : - ayant mené des actions et des projets de verdissement - n’appartenant à aucun réseau Principales structures Intervenues dans le verdissement Réseau d’entreprises locales T1 T2 T3 T4 50% 59% 65% 81% 50% 29% 23% 12% CAPEB Agrobio/Chambre agriculture/CETA EI2S Aucun Groupement des Entreprises du Chauvinois (GEC) : l’environnement, une thématique parmi d’autres Club des entreprises du pays thouarsais : l’environnement, une thématique parmi d’autres Pôle des Ecoindustries Biotop Club d’entreprises de Périgny : engagement à travers l’écoréseau Biotop 81 Les entreprises sur T1 se sentent relativement isolées, même celles appartenant à un réseau. Sur T1 ce sont des réseaux et organisations professionnels et sectoriels qui relient des entreprises aux autres acteurs socioéconomiques, et indirectement aux sphères décisionnelles. A partir de T2, le club ou groupement d’entreprises locales va jouer un rôle dans le verdissement, mais c’est en T4 seulement que l’environnement n’est plus abordé comme n’importe quelle autre problématique commune et donne lieu à un projet mobilisateur au-delà du réseau. Une meilleure connaissance des entreprises entre elles, avec visites éventuelles de sites, organisées par le club, apparaît un préalable intéressant. Les organismes consulaires quant à eux ont une implication en matière environnementale auprès des entreprises très variable selon les départements. Soulignons l’importance des services à l’environnement présents à proximité. Quand cet enjeu n’est pas bien perçu par les autorités sur un territoire, comme l’illustre la gestion des déchets sur T1, un recul des bonnes pratiques peut être provoqué par un durcissement des conditions d’accès aux services (tarif, quantité, nature). Car tant que le seuil de sensibilisation n’est pas totalement franchi et que l’internalisation de tous les coûts liés à son activité ne va pas de soi pour l’entreprise, l’intérêt économique prime encore. La gradation observée en général sur ce plan entre les différents territoires d’étude invite à penser de plus en plus en terme de management environnemental à l’échelle du territoire. Dans cette optique, des infrastructures et des services partagés sont souhaitables pour la mutualisation d’approvisionnement, de traitement, et même pour l’échange d’informations ou de co-produits. La réponse à ce type de besoins ne se confine pas au périmètre des entreprises ou de l’action commune qu’elles peuvent mener ; elle interpelle directement les acteurs qui ont des responsabilités publiques. Troisième observation : le rôle des collectivités territoriales Par rapport aux actions des collectivités territoriales et au constat qu’elles peuvent jouer un rôle clé dans le verdissement de leur territoire, rappelons les paramètres qui leur échappent : les grandes orientations nationales en matière de politique industrielle et environnementale ; les évolutions au niveau des dispositions réglementaires et des dispositifs de soutien propres à chaque filière ; les conditions d’application des lois favorables à l’environnement. Elles disposent malgré cela d’une marge de manœuvre et donc de leviers d’action sur leur territoire. Leur problématique est alors de pouvoir étendre leur champ d’interventions à l’intérieur de leur périmètre de compétence. Depuis le point de vue adopté dans notre étude, nous n’avons que peu d’éléments pour 82 éclairer directement cette question, hormis à travers les exemples fournis par les entreprises. Quant à ces dernières, certaines sont prêtes à s’engager audelà de leur propre périmètre économique d’action, et le font déjà sur T3 et T4. Parmi les collectivités jouant un rôle dans le verdissement des activités des entreprises, quel que soit le territoire, le rôle du Conseil général n’est pas significatif, excepté peut-être en Charente (sur T1) où il a été mentionné à deux reprises, et où les entreprises ont très peu d’interlocuteurs par ailleurs. Quant au Conseil régional, les mêmes dispositifs de soutien existent a priori partout, mais les territoires les utilisent différemment, voire les sous-utilisent pour les moins verdissants d’entre eux. Les entreprises sont en général perdues au milieu de toute l’information en lien avec l’environnement et face à la complexité des dossiers. La présence d’une interface ou d’un relai sur le terrain et au plus près des microentreprises se révèle alors indispensable. Ce peut être une structure associative (Pôle des éco-industries pour T4, EI2S pour T3) ou un établissement public (ADEME, Chambres consulaires) ou tout autre prestataire dans le domaine de l’environnement, de la RSE ou du développement durable. Le territoire T1 semble totalement étanche aux dispositifs régionaux, alors que T3 et T4 de façon différente parviennent à mobiliser des fonds régionaux et à bénéficier de services de soutien technique et d’accompagnement pour des actions ou projets liés à l’environnement. Le besoin d’interfaces recherche/entreprise se fait plus sentir au niveau microéconomique quand le territoire est plus verdi (sur T3 et T4). Quant au rôle des autres collectivités territoriales dans le verdissement, il transparait comme le montre le tableau suivant quand on compare les territoires en distinguant quatre niveaux d’engagement : aucun, écoexemplarité, facilitation, politiques actives de développement vert. La démarche d’éco-exemplarité signifie un minimum d’actions (par rapport à l’usage des pesticides par exemple) engagées dans ce sens par la collectivité, connues des entreprises qui les interprètent alors comme un signal. Sur T1, ce signal semble faire défaut, les entreprises n’évoquant aucune action de la part des collectivités elles-mêmes dans le domaine environnemental ; sur T2 il serait trop faible, les entreprises ayant l’impression d’évoluer sur le plan environnemental pendant que les politiques ont l’air plutôt « figé ». Alors que sur T4, on va au contraire jusqu’à mettre en œuvre des politiques actives prenant en compte les différentes dimensions d’un développement économique respectueux de l’environnement, de type développement durable du territoire. 83 Tableau 15 : Engagement des collectivités locales (ville centre et intercommunalité) selon les territoires T1 - T2 Ecoexemplarité T3 T4 . Eco-exemplarité . Eco-exemplarité . Actions de facilitation . Politiques de facilitation - projet TIPER (méthanisation) . Politiques actives sur le territoire aux niveaux des financements, des interactions entre les diverses parties prenantes de projets, réhabilitation et exploitation du patrimoine, valorisation du potentiel d’innovation, stimulation des initiatives et incubation Considérons T1 et T2 suite à l’observation des deux derniers tableaux. Bien qu’ils aient en commun de souffrir d’un manque de valorisation des initiatives des entreprises locales, une caractéristique qui distingue fortement ces deux territoires tient aux actions et à l’implication à un niveau plus collectif : regroupement ou réseau d’acteurs économiques, décideurs publics locaux. Quatrième observation : deux modes différents de verdissement en présence Sur différents plans, T3 et T4 ne sont pas comparables. Ils ne le sont pas par définition, mais aussi en terme de dynamique de verdissement ils décrivent deux processus engagés différemment. En effet, a priori deux interprétations sont possibles. Soit on privilégie la question de savoir de quels moyens peut disposer la puissance publique pour renforcer, intensifier, accélérer la dynamique de verdissement. L’implication de la collectivité directement dans le champ microéconomique, en s’appuyant sur une communication adaptée, permettrait éventuellement l’émergence d’un projet d’économie circulaire ou d’écologie industrielle. T4 représente alors le stade le plus avancé, le stade ultérieur du processus de verdissement par rapport à T3. On court toutefois le risque de stopper ou de contrarier le processus existant, peut-être ancré luimême dans une résilience territoriale. Dans ce cas de figure, on romprait avec la résistance et l’adaptation qui prévalent dans la philosophie d’un territoire qui se veut durable et qui a développé à cette fin les contre-forces nécessaires. Soit on accorde davantage d’importance à la nature des processus à l’œuvre, et alors le territoire résilient présente des mécanismes jouant de façon endogène, renforçant par eux-mêmes la dynamique de verdissement 84 enclenchée. Comparant les territoires de l’étude, on est face alors à deux modalités différentes pour parvenir à un territoire vert. Dans le cas de T3, il s’agit d’un processus spontané « qui s’ancre » dans une économie locale d’entreprises reliées et sur un territoire dynamique et fonctionnant déjà comme un écosystème. Le processus est le résultat d’un grand nombre d’actions et démarches réellement engagées de façon décentralisée par des acteurs motivés à leur niveau. Ce sont des initiatives émanant d’acteurs différents (MEDEF, CCI, Communauté de communes), et pas seulement des entreprises elles-mêmes, agissant comme des « petites mains » avec des actions parfois mineures mais participant à créer ce terreau favorable au verdissement. Le processus ne s’inscrivant pas dans un projet préalable échappe à la formalisation et atteint un degré de complexité élevé dû à l’intégration sociale des activités et au caractère diffus des sources de pression ou d’incitation. Les firmes exemplaires permettent aux autres acteurs microéconomiques d’avoir une représentation concrète des bonnes pratiques, ce qui « tire » le processus. Par contre, T4 est un territoire d’expérimentation in vivo et in situ avec des réalisations déjà à son actif en matière de verdissement, produit à la fois d’un projet d’écologie industrielle du Club d’entreprises et d’une politique volontariste en matière d’environnement, d’innovation, de mobilité, et aussi de concertation entre acteurs. C’est donc un processus « conduit » par essentiellement deux types d’acteurs ; il est « conduit » aussi parce qu’il se produit dans le cadre d’un projet local pensé dans sa globalité et offrant la possibilité de phase d’extension (spatiale) ou d’intensification (sous la forme de symbioses industrielles). Aucun des deux territoires n’est « vert », même si la dynamique de verdissement est relativement forte sur chacun. Elle gagnerait certainement à ce que le processus devienne mixte : - celui qui s’ancre a besoin de décoller, d’être davantage tiré ou accompagné : par un projet territorial d’écologie industrielle ? Quel rôle peut jouer très concrètement le club des entreprises ?... - celui qui est conduit a besoin d’être consolidé, de s’ancrer davantage : comment le pérenniser, le développer au-delà de la démarche du club des entreprises ? Comment sensibiliser les entreprises aux enjeux économiques du verdissement qui sont en même temps des enjeux de territoire ? Cette approche par les territoires d’étude ne permet pas de rendre compte des problématiques qui traversent les territoires et ressortent de la totalité des 85 entretiens accordés par les entreprises de la région. La partie suivante adopte un tel point de vue afin de compléter ces premiers résultats et de dégager de façon plus précise les besoins des entreprises régionales en matière de verdissement. 86 IV. Résultats sur la dynamique de verdissement des entreprises dans leur territoire Il convient désormais de considérer dans sa totalité l’échantillon d’entreprises objet de l’étude, et de mettre en évidence les éléments clés des stratégies environnementales tirés des entretiens. Ils seront exposés ici sous la forme de moteurs du verdissement puis de freins au verdissement. En toile de fond se trouvent les dynamiques de verdissement qui caractérisent les différents secteurs d’activité au niveau macroéconomique, telles que D&Consultants les a qualifiées auparavant, et qui sont de façon schématique : - une dynamique exogène, liée aux financements et réglementations dans les transports, la construction, l’agriculture et l’industrie agroalimentaire ; - une dynamique volontariste, en lien avec la nature des activités dans l’industrie du bois, dans l’industrie minérale, et le secteur des mutuellesassurances ESS ; - une dynamique stratégique due aux grandes entreprises ou à une clientèle spécifique dans les secteurs suivants : industrie nautique, tourisme, fabrication d’équipements électriques, sous-traitance automobile et aéronautique ; - une faible sensibilité des microentreprises de l’artisanat et du commerce, acteurs économiques subissant surtout des freins au verdissement. Ce dernier groupe d’acteurs est conformément à nos objectifs très représenté dans notre échantillon d’entreprises. Notre étude éclaire donc sur ces freins et en même temps sur les moteurs qui peuvent jouer favorablement y compris chez les plus petites entreprises de la région. Le premier point à rapporter est l’ambivalence qui s’exprime dans les entretiens au sujet de la réglementation en général. IV.1. La réglementation à la fois source de progrès et de retard La réglementation exerce un effet ambivalent : elle peut favoriser le verdissement de l’économie en incitant fortement les entreprises à orienter leurs comportements de façon à intégrer l’environnement dans leurs préoccupations et elle est source de difficultés additionnelles qui peuvent être lourdes de conséquences quand la configuration du moment et la logique économique de l’activité ne s’y prêtent pas. 87 Première observation : la réglementation favorise le progrès La réglementation est parfois source de progrès dans le sens où de contrainte initiale elle devient pour l’entreprise une nécessité associée à sa pérennité, voire elle est perçue comme une opportunité pour un nouveau développement de l’activité. une contrainte heureuse La réglementation constitue une « contrainte heureuse » dans les contextes suivants. D’une part, pour le dirigeant intégrer les dispositions environnementales est un élément positif mais il ne les aurait pas appliquées sans une contrainte réglementaire car elles se situent hors de ses préoccupations et de ses priorités actuellement (industrie métallurgique par exemple). D’autre part, le chef d’entreprise ne souhaite pas se soucier de la problématique environnementale mais, par le biais de la réglementation, s’en trouve contraint et l’associe dans l’équation de sa stratégie. Porter et van der Linde (1995)40 expliquent que la réglementation est source d’amélioration des performances économiques et écologiques par l’intermédiaire du développement d’innovations environnementales. Au-delà de préserver l’environnement, ces actions génèrent de nouvelles opportunités commerciales, ce que la théorie appelle « win win effects ». Les nouveaux profits dus à la dynamique d’innovation dépassent alors les coûts engendrés par la mise en conformité. un tremplin L’entreprise peut voir dans la réglementation une opportunité de se différencier dans une démarche qualitative (BTP par exemple). La volonté de se conformer aux nouvelles normes vient du fait que l’entreprise a identifié une corrélation entre respect de l’environnement et performances économiques. Le client, à travers ses exigences environnementales, conditionne l’offre de l’entreprise et l’oblige à se positionner sur ce marché. A un second niveau, il est porté à anticiper lui-même l’évolution de la réglementation et exige, dès sa commande, les prestations et produits actuellement les plus performants sur le plan environnemental. Lorsque les deux parties sont dans une telle relation, la pérennisation de l’activité est favorisée. L’expérience démontre les bienfaits de la réglementation. Dans l’industrie, de façon générale, les dispositions réglementaires ont incité très tôt les 40 Porter M.E. et van der Linde C. (1995), « Toward a new conception of the environment competitiveness relationship », The Journal of Economic Perspectives, vol. 9, n°4, p.97-119. 88 entreprises à faire évoluer leur comportement, surtout vis-à-vis de l’environnement. Historiquement et avec le renforcement de la réglementation s’est mis en place un processus d’apprentissage. De nos entretiens il ressort que les entreprises industrielles sont davantage réceptives à l’évolution réglementaire que dans d’autres secteurs. Elles reconnaissent, même si elles soulignent que de nouvelles dispositions sont parfois difficiles à mettre en œuvre, qu’il s’agit d’un mal nécessaire qui créera un contexte global plus favorable dont elles tireront profit. Dans tous les secteurs on confirme que du moment où l’entreprise perçoit un gain potentiel futur lié à son engagement dans la problématique environnementale elle orientera ses choix stratégiques en conséquence. Deuxième observation : la réglementation conditionne un retard De contrainte sur les décisions microéconomiques, la réglementation environnementale peut devenir source de handicaps pour l’entreprise essentiellement pour trois raisons : parce que celle-ci n’a pas les moyens d’appliquer la réglementation ; parce que se plier à la réglementation induit un désavantage concurrentiel pour l’unité ; enfin à cause d’une disproportion entre les exigences réglementaires d’une part et la taille et le fonctionnement de type atomistique des entreprises en question d’autre part. l’entreprise n’a pas les moyens d’appliquer la réglementation Une partie des acteurs de l’échantillon ne respecte pas la réglementation parce qu’ils rencontrent des difficultés, avant tout d’ordre économique, et que le contexte actuel défavorable exacerbe. L’entreprise a du mal à respecter les normes (hors environnement) qui apparaissent comme élémentaires pour son activité. Il lui est difficile de concevoir qu’elle pourra se mettre à jour quant à la réglementation environnementale. Le sentiment de ne pas pouvoir investir domine, et la pérennité de l’activité reste la principale préoccupation (par exemple dans l’hôtel-restauration). Parmi les raisons avancées en général figure l’isolement d’un point de vue relationnel sur le territoire par opposition aux entreprises qui, intégrées dans des réseaux, peuvent bénéficier d’une plus grande stabilité et d’une certaine capacité à traiter la complexité liée à la réglementation. Pour les jeunes entreprises (moins de 5 ans d’activité) le manque de moyens financiers et extra-financiers (technique, humain, technologique, juridique, etc.) est rédhibitoire ; pour elles, l’environnement est un luxe auquel elles ne peuvent accéder. 89 la réglementation est assimilée à un désavantage concurrentiel Pour certaines entreprises interrogées il serait souhaitable d’harmoniser les normes et la législation environnementales, d’autres pays européens ne souffrant pas des mêmes exigences. En France la contrainte de la réglementation est assimilable à un coût, à une perte de compétitivité, pouvant même favoriser des comportements contraires. Sur un même territoire la réglementation peut être perçue comme facteur de concurrence déloyale : si une entreprise s’engage à la suivre il faudrait que toutes le fassent, l’égalité dans le respect de la réglementation est ouvertement revendiquée par certains dirigeants. Parfois l’entreprise ne perçoit pas d’avantage(s) à avoir appliqué la réglementation par rapport à des concurrents qui ne s’y sont pas soumis. L’entreprise se trouve pénalisée parce qu’elle a engagé des dépenses pour se mettre aux normes, procurant ainsi un gain relatif à ses concurrents. Pour contrer ce défaut d’égalité entre les professionnels, il est possible d’agir via la demande du client, qui est un élément majeur pour l’introduction d’innovations dans un objectif écologique41, notamment lorsque l’activité est en phase de maturité sur le marché42. Pour cela il faut que les consommateurs soient prêts à changer leur mode de consommation 43 , d’où le rôle de la réglementation et l’enjeu de sa lisibilité. la réglementation manque de lisibilité pour les TPE D’un point de vue général les très petites entreprises se plaignent de la lourdeur administrative. Elles ont le sentiment que les normes sont trop nombreuses, qu’elles se superposent, se contredisent parfois, entre des niveaux différents et sur des points plus ou moins précis. D’une part, cela autorise des entreprises à ignorer certaines dispositions et, d’autre part, elles affirment que la probabilité est forte de se heurter à des normes contrecarrant leurs efforts particuliers si elles s’engagent dans une démarche positive allant dans le sens d’un verdissement de leur activité. Même si, avec le recul, des entrepreneurs sont fiers d’avoir réalisé un projet ou mené une action de verdissement, ils soulignent toutefois que, si c’était à refaire et connaissant le flou avec lequel ils ont dû avancer, ils n’investiraient pas et ne perdraient pas autant de temps, y compris lorsqu’il s’agit d’initiatives qui relevaient d’une conviction. 41 Florida R. (1996), « Lean and Green: The move to environmentally conscious manufacturing », California Management Review, Vol. 39, n° 1, p.80-105. 42 Pavitt K. (1984), « Sectoral patterns of technical change: Towards a taxonomy and a theory », Research Policy, Vol. 13, n° 6, December, p.343–373. 43 De l’homme B., Filippi M. et Ugaglia A. (2009), « Une approche évolutionniste de la réduction des pesticides en viticulture », 3ème Journée de la recherche en sciences sociales, INRA SFER CIRAD, 11 décembre, Montpellier. 90 Après observation des effets positifs et négatifs de la réglementation sur le comportement des acteurs microéconomiques, il convient d’identifier les moteurs de l’économie verte et en verdissement au niveau microéconomique sur le territoire de la Région Poitou-Charentes. IV.2. Les moteurs de l’économie verte et du verdissement au niveau microéconomique dans la région Un certain nombre de moteurs ont été relevés lors des entretiens. Il s’agit tout d’abord des dispositifs mis en place afin d’inciter les entreprises à adopter une démarche verdissante dans le cadre de leur activité. Ensuite ont été distingués des volets spécifiques dans des dispositifs génériques existants, n’ayant pas principalement vocation à impulser une dynamique de verdissement. Enfin les entreprises rencontrées ont fait ressortir d’autres facteurs pouvant affecter la problématique environnementale tels que la personnalité du dirigeant, l’identité de l’entreprise, ou encore l’influence des réseaux, structures et plateformes diverses. Cet ordre de présentation des différents moteurs ne traduit pas une hiérarchie quelconque entre eux. Premier moteur : les dispositifs incitatifs mis en place Il est important que les dispositifs mis en place dans le but d’inciter les entreprises soient évalués par les acteurs qui en bénéficient. Pour rendre compte de la situation actuelle, l’établissement d’un état des lieux et des différentes formes d’incitation visant à promouvoir le verdissement des diverses activités s’impose. état des lieux Rappelons auparavant les trois catégories d’entreprises qui se sont dégagées des questionnaires : A - L’entreprise a déjà des activités et/ou des actions dans le domaine ; B - L’entreprise a des projets (pas d’actions réalisées) ; C - L’entreprise n’a rien fait et ni projeté dans le domaine. 91 Tableau 16 : Le recours à une aide environnementale en fonction du degré de verdissement Cas Aides Ayant bénéficié d’une aide A B C Total Entreprises 14 4 0 18 En % 39% 80% 0% 28% Dont pas satisfaites 3 0 0 3 N’ayant pas bénéficié d’une aide En % 22 1 23 46 Total Entreprises 36 61% 100% 20% 5 100% 23 100% 100% 72% 64 100% L’analyse des données récoltées donne les premiers éléments sur la place des aides, comme déterminant ou non des actions vertueuses des entreprises. Plus d’un quart des acteurs interrogés ont bénéficié d’une aide, que des actions soient réalisées ou en projet. La plupart d’entre eux sont satisfaits. L’insatisfaction proviendrait de difficultés structurelles auxquelles sont confrontés certains secteurs, comme les professions agricoles (production, transformation, commercialisation). Dans ce secteur les motifs d’insatisfaction concernent le montant des aides qui, selon les acteurs, seraient réduits, ou le retour sur investissement jugé trop long. De plus les aides leur apparaissent en général peu égalitaires, semblant soutenir davantage l’activité d’exploitations déjà pérennes. Ces soutiens sont vécus aussi comme trop contraignants, voire « liberticides ». Les acteurs qui ont entrepris des actions sans avoir profité d’une aide sont les plus nombreux. Soit ils ont considéré ne pas avoir besoin d’aide, quelle qu’en soit la forme ; soit ils ignoraient que des dispositifs étaient en place pour soutenir les initiatives de verdissement ; soit encore, s’il y a eu aide, c’est au niveau du groupe auquel appartient l’entreprise que celle-ci a été accordée. Parmi les cinq entreprises ayant des projets, une seule n’a, pour l’instant, pas eu recours à un tiers pouvant l’aider. Cet aspect est intéressant car complétant le point précédent, il suggèrerait qu’aujourd’hui les entreprises ont intégré l’existence de dispositifs d’aide et ont davantage d’attentes précises pour soutenir et concrétiser leurs actions. Les différentes aides identifiées en Région Poitou-Charentes prennent essentiellement la forme de financements, informations, conseils et 92 formations. Nous présentons ces dispositifs tels que les acteurs rencontrés les ont mis en avant en raison de leur efficacité pour enclencher une démarche verdissante. aides et incitations financières Parmi les aides et incitations financières l’un des dispositifs qui a su répondre aux besoins des entrepreneurs est le Fond Régional d’Excellence Environnementale (FREE). Ce dernier a permis tout d’abord de susciter une demande des particuliers vers les énergies renouvelables (poêle-chaudière à bois, solaire thermique et photovoltaïque) par des forfaits, ce qui a redonné de l’activité aux professionnels producteurs et installateurs spécialisés et constitué un soutien indirect, par la consommation, aux entreprises du secteur. Ensuite les entreprises elles-mêmes ont pu profiter d’aides (pour des études de faisabilité, des certifications, des audits énergétiques). Ce FREE a réellement impulsé des actions de verdissement et fait émerger des idées de projets pour l’avenir. La Région Poitou-Charentes et l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME) participent à la réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) en permettant à certaines entreprises de mieux maitriser leur consommation d’énergie. Ainsi, un certain nombre d’acteurs ont pu, grâce au concours de la Région et de l’ADEME, faire l’acquisition d’équipements plus performants. Le Fonds Régional de Développement des Eco-Industries et des Véhicules Electriques a permis à des professionnels d’acheter un véhicule électrique. Dans leurs exploitations, des agriculteurs ont fait le choix de l’électromobilité, étant donné leurs nombreux déplacements courts. Des repreneurs d’activités ont pu bénéficier de la Bourse Régionale Désir d’Entreprendre (BRDE) et ainsi investir pour développer une attitude écoresponsable. Car, grâce à ce dispositif, des coûts ont été évités et des sommes ont ainsi pu être affectées à des actions plus respectueuses de l’environnement. La BRDE touche des artisans qui ont décidé de se doter d’énergies renouvelables, des TPE du BTP, des professionnels de l’impression qui ont choisi d’intégrer une démarche environnementale à chaque poste de leur activité, des exploitants agricoles... Une aide aux industries de la région a été fournie par l’Agence de l’Eau. Elle a concerné des subventions pour des études sur la recherche de substances dangereuses pouvant être présentes dans l’eau (blanchisserie) ou pour l’installation de barrières de rétention d’eau en cas d’incendie (industries chimiques). Les porteurs de projet relèvent l’efficacité et l’importance de dispositifs tels que l’Incubateur de la Charente-Maritime qui offre un support technique et financier 93 pour la création d’entreprises innovantes. L’Incubateur a participé à l’élaboration de projets (par exemple, véhicule décarboné pour le transport de marchandises, production et installation d’énergies renouvelables). Il s’agit d’un programme de suivi, étape par étape, de manière personnalisée, comprenant la prise en charge de certaines prestations (intellectuelles, techniques, logistiques) jusqu’à la création effective de l’activité. La Région Poitou-Charentes et OSEO participent au Fond Régional de Garantie Poitou-Charentes (garantie d’emprunt) dans le but de favoriser la mise en œuvre des projets de création, de transmission-reprise et de développement technologique et immobilier d’entreprises régionales. L’innovation est encouragée par un Fond Régional. Par ce biais les entreprises qui ont exprimé le souhait de se développer et d’innover ont ainsi pu obtenir le soutien financier du Réseau de Développement Technologique de Poitou-Charentes. De jeunes entreprises (TPE ou PME <50 salariés) ont contacté cette association avec laquelle elles ont pu mener à bien leur projet que ce soit dans le cadre du dépôt de brevet ou de l’étude de faisabilité par la Prestation Technologique Réseau. information, conseil et formation Outre l’aspect financier, l’aide revêt la forme d’information, de conseil et de formation en vue d’accompagner les professionnels dans l’intégration de la problématique environnementale. Différentes organisations participent à cet effort, qu’il s’agisse d’acteurs institutionnels, de structures porteuses de l’action régionale ou bien d’associations environnementales. (1) les acteurs institutionnels Les acteurs institutionnels mis en avant par les entreprises pour leur action en faveur de l’environnement sont les Chambres Consulaires en PoitouCharentes. Pour les professions agricoles, les Chambres d’Agriculture (CA) sont les intervenants qui arrivent en tête pour leur rôle d’accompagnement. Grâce à la CA des actions sont initiées, via le « Programme Re-Source » par exemple, et des soutiens techniques sont apportés à la constitution des projets (étude de faisabilité, viabilité, formation). De nombreux artisans (BTP, construction) bénéficient de l’aide des Chambres des Métiers et de l’Artisanat, le plus fréquemment dans des zones qui se dévitalisent. Ils sont ainsi informés de la diversité des aides existantes en matière environnementale proposées par la Région. Ils sont sensibilisés à l’organisation du tri, au stockage et à l’élimination des déchets et effluents. 94 Dans la Vienne la CMA propose un diagnostic environnemental gratuit aux professionnels des pressings. En Charente les entreprises artisanales de l’éco-construction et de l’éco-rénovation sont répertoriées au sein d’un annuaire. Des réunions d’information ont lieu sur la thématique de l’environnement et plus largement sur celle du développement durable. Le problème pointé par les chefs d’entreprises à cet égard est l’horaire inadéquat, qui ne facilite guère leur venue. Quand l’entreprise formule une demande de diagnostic, la Chambre des Métiers, après l’étude du cas, est en mesure de quantifier les émissions de GES et de permettre ainsi aux professionnels désireux d’agir positivement en interne d’engager des actions de verdissement. Les Chambres de Commerce et d’Industrie semblent, aux yeux des TPE, très éloignées de « leur monde ». On souligne de façon générale leur manque de proximité à l’égard des plus petites structures. Les industriels peuvent toutefois compter sur le rôle d’information et d’accompagnement des CCI pour être en conformité avec la réglementation européenne, notamment le règlement REACH obligeant les industriels à déclarer les substances qu’ils fabriquent ou importent, à établir quelles sont celles sans danger et à ne plus les utiliser en cas de risque non maîtrisé. Plusieurs fois les interviewés ont souligné ce rôle de facilitateur dans un souci de minimiser l’impact environnemental. (2) les structures porteuses de l’action régionale En complément de ses dispositifs propres, la Région Poitou-Charentes a créé des structures porteuses de son action comme le Pôle des Eco-Industries, le Cluster Eco-Habitat ou Valagro et collabore avec l’ADEME. Plusieurs entreprises ont eu recours aux services de l’ADEME pour de l’information et des conseils dans le domaine énergétique (Bilan Carbone, gestion des déchets ou offres de communication). De tels échanges favorisent l’intégration de l'environnement dans leur stratégie de développement comme facteur de performance globale (exemple : industrie de torréfaction). Le Pôle des Eco-Industries est connu des entreprises pour son rôle structurant sur le territoire, par sa participation au montage de l’éco réseau « Biotop » sur la zone d’activités de Périgny. La plupart du temps les acteurs qui côtoient le Pôle ont tout d’abord rencontré l’association EI2S (cf. infra). Le Pôle réalise, auprès de ses adhérents, un suivi grâce à des indicateurs et un travail de sensibilisation pour un comportement plus vertueux. Son existence est reconnue de façon très inégale sur le territoire régional. Des entreprises industrielles ont évoqué la place de Valagro et des recherches menées en collaboration avec cette plateforme de recherche et 95 développement, qui a pour objectif de promouvoir des plastiques biodégradables. Valagro accompagne les industriels dans le processus d’innovation, pour une chimie verte respectueuse de l’environnement (chimie végétale, carbone renouvelable). Enfin le Cluster Eco-Habitat regroupe les acteurs de l’éco-construction. Les professionnels de la construction et du BTP, parmi d’autres adhérents, y mènent des réflexions pour un développement responsable des matériaux et une évolution des méthodes de travail dans une optique de durabilité. Cela permet notamment de se tenir informé des dernières techniques, innovations et perspectives de développement dans le monde de la construction, et d’être, de plus, en interaction avec des acteurs économiques locaux. Ce cluster est davantage représenté au nord de la région, dans les Deux-Sèvres et la Vienne. (3) les associations environnementales Les acteurs économiques de la région peuvent favoriser leur verdissement en faisant appel à quelques associations dont la mission ou la priorité est l’environnement. L’association Veille Environnement Entreprise (VEE) est connue dans la partie ouest de la région, en Deux-Sèvres et Charente-Maritime. Les entreprises adhérentes sont en majorité du secteur industriel et ont, dans notre échantillon, plus de 50 salariés. Les acteurs insistent sur l’accompagnement réalisé par cette association sur des questions liées à l’environnement et au développement durable : veille réglementaire pour les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), conseil et information pour l’ISO 14001. Les entreprises qui connaissent de l’association EI2S se situent presque toutes dans le département des Deux-Sèvres, et en majorité dans le secteur industriel. Elles considèrent cette association comme une référence sur la thématique environnementale. Les adhérents distinguent les différents services offerts : le conseil et l’accompagnement dans l’optique d’une certification (ISO 14001, ISO 26000) ; l’apport de son expérience pour des pré-diagnostics et diagnostics suivis de plans d’action ; le système de collecte des déchets D3E. Par convention, les adhérents d’EI2S sont aussi adhérents du Pôle des Eco-Industries. Les entreprises affirment que, via le réseau de l’association EI2S, elles ont pu intégrer un réseau plus large dans la région, plus dense et au-delà de leur secteur. De l’information et du conseil sont fournis par le Centre Régional des Energies Renouvelables. Les professionnels de ce domaine confirment les actions de sensibilisation (animation), d’accompagnement (études), de formation et de 96 communication (salons, expositions, conférences). Les installateurs trouvent en cette association une aide précise et des réponses de qualité. Deuxième moteur : les volets spécifiques dans des dispositifs génériques existants Pour renforcer des dispositifs incitatifs et répondre aux besoins nés de la pratique, les acteurs régionaux issus de filières spécifiques ont créé des laboratoires et associations dont le but est de soutenir des entreprises appartenant à ces filières. La réduction de l’impact environnemental est l’un des services proposés aux entreprises. Ce qui suit est issu des diverses remarques émises par les entreprises interrogées au regard de leurs expériences. un accompagnement opérationnel des laboratoires indépendants Trois laboratoires sont sollicités à l’échelle régionale pour leur expertise et la connaissance des préoccupations concrètes des professionnels dans les secteurs concernés. Le secteur de l’agro-alimentaire doit faire face à de nombreux défis dont celui de l’environnement et les préoccupations se concentrent sur le conditionnement, les rejets et la conformité réglementaire. Dans ce cadre certains chefs d’entreprises soulignent le rôle moteur du Centre Régional d’Innovation et de Transfert de Technologies Agro-Alimentaire (CRITTAA). Au départ il s’agissait d’être conseillé par rapport à la question des rejets d’exploitation. Après la réalisation d’un pré-diagnostic le CRITTAA a permis que soient valorisés des déchets devenus des coproduits. Il a également participé à l’optimisation des consommations d’énergie et a assuré une veille réglementaire pour des ICPE. Les professionnels du nautisme rencontrent de façon similaire des difficultés dans leur activité quant au recyclage et à l’utilisation de matériaux plus propres. Souhaitant agir pour une plus grande durabilité, ces entreprises ont sollicité un laboratoire de R&D, le Centre Régional d'Innovation et de Transfert de Technologies Matériaux en Poitou-Charentes. Celui-ci a pu donner une seconde vie aux déchets collectés (composites verre et polyester), revalorisés par une étape de broyage mécanique suivi d’une préparation spéciale nécessaire à la fabrication d’un nouveau produit par des moyens de transformation traditionnels (breveté en 2012). Partant d’une collaboration sur le thème des éco-matériaux avec des bureaux d’études, cette action collective de 8 entreprises a ensuite été assortie d’une phase de développement puis d’accompagnement. 97 Des entreprises industrielles (collecte des déchets et recyclage, impression) sont en contact avec un autre laboratoire, Ianesco, pour les analyses environnementales. Celui-ci fournit un ensemble de services : analyses et essais normalisés, études, conseils, expertises, recherche appliquée, formations et informations. Les entreprises ont obtenu des analyses relatives à la qualité de l’eau, de l’air et du sol ainsi que sur des produits d’entretien utilisés (détergents par exemple). la proximité des associations professionnelles La proximité des associations professionnelles s’établit dès lors que les entrepreneurs estiment que les meilleurs interlocuteurs sont les autres professionnels de la filière. En fonction des différents secteurs d’activité, ces associations participent à la plus-value en matière environnementale. Il s’agit des organismes, fédérations ou groupements professionnels qui, à travers leur fonctionnement, contribuent à diffuser les enjeux de cette problématique de verdissement. Sont enregistrées en Poitou-Charentes des associations qui relèvent de la filière du bois, de l’agriculture, de l’artisanat ainsi que des PMEPMI. (1) la filière du bois Le bois étant une énergie renouvelable, les professionnels de cette filière en Poitou-Charentes se sont regroupés en une association interprofessionnelle Futurobois. Les entrepreneurs sont convoqués à des réunions d’information, de sensibilisation (prévention des risques), de formation. Au niveau de la région, des opérations sont montées de manière dynamique (actions collectives ou individuelles), et les acteurs sont éclairés par une veille réglementaire. Malgré la grande variété des métiers concernés, puisque cela va de l’exploitation forestière jusqu'aux architectes, en passant par les scieries, les tonneliers, les charpentiers-menuisiers, tous les adhérents sont soutenus. Cette aide va jusqu’à la commercialisation de produits régionaux à base de bois, l’organisation de salons professionnels et même l’aide à l’exportation. Futurobois fédère les entreprises régionales du bois (projets structurants, ressources humaines) et représente les professionnels du bois auprès des différentes institutions. (2) l’agriculture La filière agricole en Poitou-Charentes est organisée via des groupes coopératifs pour, d’une part, peser davantage dans les échanges avec l’extérieur et, d’autre part, créer un esprit de solidarité et de réciprocité. Au 98 sein de ces structures les professionnels disposent d’un appui en matière de conseil, de réflexions sur l’évolution des démarches et enjeux (exemple : réduire les molécules chimiques et les intrants), d’accompagnement et de formation (exemple : développement d’un projet de méthanisation). Les groupes qui impulsent ces dynamiques dans la Région Poitou-Charentes sont : Terrena, les Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole (CUMA), la Fédération Régionale des Centres d'Initiatives pour Valoriser l'Agriculture et le Milieu Rural en Poitou-Charentes (CIVAM), la Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (FNSEA), la Confédération Paysanne, le Syndicat National des Entreprises Bio (SynaBio). D’autres structures sont spécialisées en éducation à l’environnement : Vienne AgroBio, le Groupement Régional pour l’Entretien des Espaces Naturels (GREEN). (3) l’artisanat et les PME-PMI Au niveau régional plusieurs groupements artisanaux sont actifs et structurent les professions. Parmi eux la CAPEB (Confédération de l'Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment), l’ACEM79 (Artisans Charpentier Ebéniste des Deux Sèvres), la CNAIB (Confédération Nationale Artisanale des Instituts de Beauté), le SNFPSA (Syndicat National de la Fermeture, de la Protection Solaire et des Professions Associées). Les adhérents de ces différentes associations ont en commun d’avoir accès à des informations, un accompagnement, des formations sur demande, dans certains cas autour de la problématique environnementale (réglementation, choix de matières premières, minimisation de l’impact). D’autres groupements sont aussi présents dans des PME et PMI de secteurs d’activité variés comme le transport et la logistique (Astre), le textile (Groupement des Entreprises Industrielles de Service Textile), les métiers de la métallurgie (Union des Industries et Métiers de la Métallurgie), de l’industrie chimique (Union des Industries Chimiques), de l’imprimerie (Union Nationale de l’Imprimerie et de la Communication). Troisième moteur : la personnalité du dirigeant La personnalité du dirigeant est l’un des principaux moteurs d’une démarche verdissante. Au chef d’entreprise incombe la responsabilité de faire prospérer son activité. Il est libre de choisir d’intégrer ou non l’environnement dans la stratégie de son entreprise. Il peut le faire en ayant à l’esprit la logique économique avec les forces du marché (répondre à une demande) sur laquelle peut se greffer une conviction environnementale inébranlable. 99 positionnement de marché Par son positionnement le dirigeant est animé par la volonté d’être à la tête d’une entreprise qui évolue en accord avec des préoccupations environnementales. Il est persuadé qu’en se plaçant sur ce type de marché il va attirer une clientèle particulière attentive à sa démarche qualitative qui va le démarquer de la concurrence (exemple de l’activité de rénovation). Il associe prospérité de l’entreprise et préservation de l’environnement et met en avant, par ce biais, l’image de l’entreprise. Le dirigeant espère que ses efforts seront reconnus. En effet la reconnaissance pousse les entreprises à l’innovation en matière environnementale et cela est encore plus marqué lorsque l’acteur économique anticipe une augmentation de la demande de produits respectueux de l’environnement44. par conviction La conviction du dirigeant est à prendre en compte, notamment dans le cas d’une reprise d’entreprise. Au nouveau dirigeant s’offrent de nouvelles perspectives : soit celui-ci assure la continuité de la politique conduite jusquelà ; soit il créé une rupture. Parfois la reprise prend tout son sens lorsque le nouveau dirigeant vient, par exemple, d’un grand groupe et que cette expérience a fait naître chez lui une prise de conscience des enjeux environnementaux. Après tant d’années à ne pas y avoir prêté attention, il a voulu quitter son ancien emploi dans le but de se « mettre dans le sens de la marche ». Son expérience lui permet de bien en cerner les enjeux et sa motivation est forte pour faire face à ce nouveau défi. Quatrième moteur : l’identité de l’entreprise Au regard de son identité l’entreprise peut devenir une force motrice sur le plan environnemental. De surcroît l’entreprise agit en minimisant son impact par son activité elle-même (activité en verdissement) ou en optimisant ses choix aux différents niveaux de son action (activité à verdir). changement d’identité, l’environnement comme une seconde nature Dans le cas d’une activité à verdir, où a priori l’environnement n’est pas la priorité immédiate, celui-ci peut devenir comme une seconde nature. Par exemple dans le BTP, la Réglementation Thermique de 2012 exige de 44 Horbach J. (2008), « Determinants of environmental innovation – New evidence from German panel data sources », Research Policy, Vol. 37, n° 1, February, p.163-173. 100 nouvelles pratiques de la part des artisans. Dans le prolongement certaines TPE qui jusque-là suivaient la réglementation de façon contraignante vont alors réaliser des efforts et aller plus loin : au niveau de la formation (ECO Artisan®) ; dans la stratégie d’achat ; dans un engagement de qualité (Qualit’EnR) ; dans le choix des matériaux plus propres et plus respectueux des hommes et de l’environnement. L’idée mise en avant est clairement la volonté de travailler autrement. Par ailleurs des artisans qui n’avaient pas spécialement une sensibilité environnementale ou du moins pas appliquée au sein de leur entreprise se redécouvrent et ont tendance à en parler autour d’eux, diffusant ainsi de bonnes pratiques et une dynamique de verdissement même à petite échelle. Cela vient confirmer qu’intégrer les préoccupations environnementales peut d’une façon ou d’une autre être valorisé stratégiquement et qu’il existe une relation étroite entre la volonté du dirigeant et l’identité de l’entreprise. Oltra et Saint-Jean 45 expliquent que les démarches environnementales n’échappent pas à la logique économique de l’entreprise. Il doit y avoir une compatibilité entre d’un côté l’objectif de minimiser les impacts environnementaux et de l’autre celui d’augmenter les profits et les parts de marché. cas du verdissement lié à la nature des activités de l’entreprise Les entreprises ayant une activité verte ou en verdissement ont des actions en faveur de l’environnement d’un point de vue général, mais lorsqu’on sort de l’activité économique de l’entreprise on s’aperçoit qu’elles réalisent moins d’efforts que d’autres entreprises dont l’activité n’est pas directement liée à l’environnement et qui pourtant mènent des actions positives. L’exemple d’une entreprise spécialisée dans la récupération de métaux et le recyclage illustre ce constat. Celle-ci participe, à travers son activité, à réduire l’impact environnemental global. Mais l’examen des pratiques pour le transport de ces déchets met en évidence des incohérences. Ces pratiques ne sont pas optimisées : les poids lourds ne sont pas complètement chargés, les tournées ne tiennent pas compte de la localisation des clients. Cela vient donc contrebalancer les effets positifs attendus de l’activité même de l’entreprise. A l’opposé on rencontre des professionnels qui a priori ont une activité qui va à l’encontre des perspectives de verdissement mais qui, par leur action, tentent au mieux de minimiser leur impact écologique. Par exemple, les 45 Oltra V. et Saint-Jean M. (2011), « Innovations environnementales et dynamique industrielle », in Belis-Bergouignan M.C. et alii. (coord.), Industries, Institutions, Innovations Eléments de dynamique industrielle, Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, p. 297 346. 101 entreprises de graphisme et d’impression essaient de minimiser l’influence négative de leur activité sur l’environnement. Les efforts portent tout d’abord sur les matières premières, avec l’utilisation d’une encre à base végétale, d’un papier français issu pour une partie du recyclage provenant des collectes sélectives de la région parisienne, d’un papier certifié (PEFC, FSC). Ensuite, un tri rigoureux des différents déchets est réalisé. Enfin, de la sensibilisation et de l’information, en interne et en externe, notamment à destination des populations jeunes, complètent ces actions. Ces professionnels ont su tirer profit de leurs efforts dans le domaine environnemental pour qu’ils deviennent stratégiques pour le développement de leur activité. La logique économique est vertueuse à partir du moment où l’accroissement des parts de marché et la réduction des coûts de production conduisent à innover pour l’environnement46 . Ceci s’illustre quand les forces du marché poussent les acteurs économiques à des innovations environnementales en se différenciant par le développement d’un produit dit « vert » et/ou en rationalisant son process de production dans le but d’afficher des prix inférieurs aux concurrents47. Cinquième moteur : place des réseaux, structures et plateformes Le réseau est indispensable pour l’entreprise qui veut accéder à un certain nombre de connaissances. Similairement, comment pourrait-elle, en ayant une marge de manœuvre limitée par son poids ou son envergure, investir dans une optique de verdissement de son activité ? Si aucune opportunité technologique ne s’offre à la firme, elle ne sera pas encouragée à intégrer l’environnement puisque cela requiert un effort de R&D élevé en interne48. Les opportunités technologiques sont liées à l’accumulation des connaissances au sein de l’entreprise49 et au degré de diffusion et d’appropriation des réseaux, structures et plateformes (entre les entreprises, et entre les laboratoires de recherche et les entreprises)50. Les interactions entre les acteurs jouent le rôle de diffuseur de connaissances et de savoir-faire, notamment en matière environnementale. 46 Green K., McMeekin A. et Irwin A. (1994), « Technological trajectories and R&D for environmental innovation in UK firms », Futures, vol. 26, n° 10, p. 1047-1059. 47 Porter M.E. (1982), Choix stratégiques et concurrence, Economica. 48 Brouillat E. (2008), Dynamique industrielle et innovation environnementale : le cas de la prévention des déchets, Thèse de doctorat, Université Montesquieu - Bordeaux IV. 49 Rosenberg N. (1974), « Science, innovation and economic growth », Economic Journal, vol. 84, p. 90-108. 50 Taillant P. (2005), L’analyse évolutionniste des innovations technologiques : l’exemple des énergies solaire, photovoltaïque et éolienne, Thèse de doctorat, Université de Montpellier I. 102 Après un état des lieux sur le terrain, nous présenterons des exemples de réseaux, structures et plateformes. état des lieux sur le terrain Une perspective de développement s’ouvre à partir des remarques émises au sujet du rôle moteur des fédérations professionnelles et clubs d’entreprises. Le relais que constituent ces réseaux est à affirmer et à renforcer. Cela peut être une opportunité et une réponse possible aux problèmes évoqués par les entreprises de petite taille. Tableau 17 : L’appartenance à un réseau selon le verdissement des entreprises Cas Total A B C 17 0 5 22 7 0 4 11 8 0 2 10 32 0 11 43 Entreprises Appartenance à Un Groupement d’Achat ou une Fédération Professionnelle Un Club d’Entreprises A la fois à une Fédération et à un Club Total Entreprises appartenant à un réseau En % 89 % 0% 48 % 67 % Rappelons les trois catégories d’entreprises : A - L’entreprise a déjà des activités et/ou des actions dans le domaine ; B - L’entreprise a des projets (pas d’actions réalisées) ; C - L’entreprise n’a rien fait ni projeté dans le domaine. Il apparait nettement que les entreprises de la catégorie A appartiennent en majorité à un réseau. En comparaison avec les entreprises qui n’ont rien fait 103 ou projeté (C), l’absence de réseau, et donc l’isolement, semble être l’un des facteurs de l’inaction. De plus ces réseaux, lorsqu’ils existent, se situent davantage sur un territoire dynamique économiquement. On recense un plus grand nombre d’adhérents dans les groupements ou fédérations professionnelles. Au manque de proximité dû à l’étalement géographique et à l’inégale répartition des acteurs correspond une présence plus forte de ces derniers garantissant une solidarité qui s’opère au sein de la filière. Les clubs d’entreprises sont généralement circonscrits à une zone d’activité préexistante. Dès lors ils expriment le souhait d’un échange intra- et intersectoriel dans le but d’une collaboration, d’une veille informationnelle sur un même territoire préalablement défini par leur localisation. Lorsque les entreprises font partie à la fois d’un Club et d’un Groupement ou Fédération, elles intègrent davantage les préoccupations environnementales dans leur activité. Car l’accès à l’information est amplifié et facilité. Et aussi parce que l’accompagnement et l’expérience du collectif sont perçus comme plus efficients que s’ils provenaient d’un tiers qui pourrait moins bien appréhender la situation réelle de l’entreprise. exemple du Club d’Entreprises de Périgny En prenant l’exemple du Club d’Entreprises de Périgny, la plupart des acteurs rencontrés ont évoqué l’influence positive de cette structure sur leur action et sur leur vision, notamment au travers du projet « Biotop ». C’est un projet d’écologie industrielle visant à réduire l’impact environnemental. Les adhérents peuvent profiter alors des services d’un expert pour un prédiagnostic environnemental, d’une pré-étude pour identifier les actions à mener. Une mutualisation est organisée pour la collecte des déchets, pour établir une stratégie d’achats groupés. Des ateliers thématiques sur des sujets prioritaires du développement durable, des formations et des aides au financement sont également accessibles aux adhérents. La réflexion menée dans le cadre de ce projet d’écologie industrielle fait son chemin et mène déjà à quelques applications. Parmi les exemples prometteurs, mentionnons la récupération des déchets PVC sur la zone industrielle de Périgny qui, après des échanges entre diverses entreprises, a pu conduire au broyage et à la revalorisation de ces déchets pour donner vie à de nouveaux tubes PVC recyclés. Les entreprises ayant le sentiment d’être engagées dans une démarche en cohérence avec l’environnement expriment leur souhait d’apporter un soutien au poste d’animateur du réseau « Biotop », avant même de pouvoir bénéficier directement d’une quelconque aide. La place de l’animateur économique est à valoriser car il diffuse une réelle dynamique collective. 104 Il convient de mener des réflexions sur la diffusion de ce type de projet sur des zones test, de doter de moyens d’action les clubs d’entreprises existants et d’en étudier les bienfaits étendus à l’ensemble de la Région Poitou-Charentes et en particulier dans des zones qui semblent se dévitaliser et où règne un sentiment d’abandon, d’indifférence ou de méfiance à l’égard des acteurs économiques. exemple d’une Fédération Professionnelle Les Fédérations Professionnelles garantissent une intégration des membres notamment par une offre de formation et un suivi de l’actualité aux niveaux réglementaire, technique ou technologique. Ce type de formation apporte des compétences additionnelles en comparaison avec les autres professionnels de l’activité qui sont hors du champ d’action de ces fédérations. La Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment joue ce rôle auprès des TPE du Bâtiment (construction, rénovation) en proposant des informations, une mise à jour sur les nouveaux enjeux de la profession que le Grenelle de l’Environnement impose, sur les performances énergétiques, la Réglementation Thermique, une gestion plus propre des chantiers en réduisant les nuisances (tri des déchets, choix des matériaux). Pour ses adhérents elle réalise des formations pour favoriser l’intégration d’un public en difficulté ; elle conseille sur comment se positionner sur un marché ; elle apporte une aide à la gestion de l’entreprise, au développement d’une marque, à la labellisation ou certification (ECO Artisan®) qui sont un gage de qualité et de performance en terme d’énergie dans la construction de logements. Les adhérents rencontrés mettent en avant l’accès facile à une information et une sensibilisation qui leur fait souvent défaut. Une réponse est apportée à chacune des questions qu’ils se posent, ce qui les incite à s’engager davantage dans le sens du verdissement de leur activité. On remarque des différences de comportement importantes selon que les professionnels adhèrent ou non à un réseau. S’ils sont dans un réseau, ils seront plus réactifs aux évolutions de la législation et aux innovations, voire les anticiperont. A l’inverse ne pas appartenir à un réseau conditionne des difficultés et un certain retard eu égard aux nouvelles réglementations. S’ils restent isolés, ils perdront des parts de marché et n’auront pas les moyens d’agir dans des perspectives environnementales, quelle qu’en soit la portée. Le rôle informel des fournisseurs L’accent est mis sur le rôle informel d’informateur des fournisseurs puisqu’en communiquant sur leurs produits, les nouveautés, ce qui va évoluer et dans quel sens, cela contribue à tisser des liens entre les divers professionnels d’un 105 même secteur d’activité. Ceci est d’autant plus important lorsque les acteurs sont isolés, notamment en milieu rural où la continuité des dispositifs informationnels n’est pas assurée. la place des établissements bancaires La place des banques est soulignée. Pourquoi ne pas faciliter les emprunts qui relèvent d’une volonté de minimiser l’impact environnemental (Prêts Verts) ? Peu importe le secteur et la taille des entreprises. De plus, dans la mesure où des conditions de garantie seront demandées, pourquoi ne pas fournir une étude de faisabilité et de viabilité pour ce genre de projet ? Cette étude pourrait être assurée de façon collaborative entre la puissance publique et un organisme complémentaire (pour le diagnostic). On déduit des déclarations des entreprises qu’elles regrettent plutôt que les banques ne se positionnent pas sur les questions environnementales de par leur poids dans le financement de l’économie. Mentionné du côté des moteurs parce que les entreprises le voient comme un facteur susceptible de jouer positivement en favorisant leurs stratégies environnementales, le rôle des banques est donc vécu en réalité comme un frein au processus de verdissement au niveau microéconomique. D’autres freins agissant fortement méritent d’être soulignés maintenant. IV.3. Les freins à l’économie verte et au verdissement au niveau microéconomique dans la région Les particularités propres aux moteurs de l’économie verte et en verdissement ont été démontrées mais des difficultés ont aussi été dégagées. Ces freins à la dynamique de verdissement sont variés : tout d’abord la taille et la structure de l’entreprise qui confèrent une organisation spécifique aux TPE ; la définition du rôle de l’entreprise peut générer des incertitudes en fonction des différentes perceptions possibles ; la méconnaissance et le problème d’identification des acteurs, réseaux et dispositifs favorisant l’inaction ; les démarches sans suite qui ont la spécificité d’orienter mais de ne pas concrétiser les projets ; enfin les difficultés relatives à la communication. Cet ordre de présentation ne traduit pas rigoureusement une hiérarchie entre les freins. Premier frein : taille et structure La taille de l’entreprise et son appartenance ou non à un groupe apparaissent comme le premier frein au verdissement de son activité. 106 caractéristiques structurelles Lorsqu’on croise la taille des entreprises aux trois cas (A, B et C) qui se sont dégagés des questionnaires, on obtient le tableau suivant : Tableau 18 : Les entreprises selon leur taille et leur verdissement (en données brutes et en %) Total Cas A Effectif B En % 1à9 En % 17 44 % 10 à 49 10 % En % > à 49 31 % Entreprises En % 56 % 1 0% 8% 19 % 100 % 23 100 % 8% 12 5% 5 100 % 20 % 100 % 0% 36 13 17 % 0 92 % Total 4 8% 11 61 % 100 % 20 % 31 % En % 78 % 1 61 % 39 46 % 22 % En % 18 80 % 8 Entreprises En % 4 47 % En % C 64 100 % 36 % 100 % 100 % Alors que 61 % des entreprises rencontrées sont des TPE, ces dernières représentent plus des trois quarts (78 %) de celles n’ayant rien fait ou projeté (C). Les TPE se répartissent de la même manière, qu’elles aient ou non une sensibilité environnementale (44 % dans le cas A contre 46 % dans le cas C). Par contre, plus l’effectif s’accroit, plus les entreprises sont proportionnellement nombreuses à intégrer l’environnement dans leurs préoccupations (cas A : 61 % des entreprises de 10 à 49 salariés, et 92 % de celles ayant 50 salariés et plus). A peine une entreprise sur deux (47 %) qui a, ou a eu, des actions positives sur le plan environnemental est une TPE, alors que celles-ci représentent 61 107 % de l’échantillon. Par contre, les grandes structures, qui ne représentent que 19 % des entreprises interrogées, sont relativement nombreuses (31 %) à se situer dans le cas A. Pour des TPE-PME, les principaux arguments mis en avant pour ne pas enclencher le verdissement reste le manque de temps et de ressources. Il faudrait créer un poste spécifique (qui peut être commun à plusieurs entreprises) pour tout ce qui est lié à l’environnement, les doter d’une capacité de R&D et les mettre en relation avec les bons interlocuteurs d’un point de vue territorial, notamment des groupements d’entreprises, avec la conviction que, peu importe l’activité, des efforts peuvent être faits et, par corrélation, des économies réalisées. Des disparités existent en termes de possibilités d’innovation selon les secteurs d’activité et l’effort consacré à la R&D. Des secteurs comme l’aéronautique, la pharmacie seraient plus enclins à innover tandis que l’industrie du bois, du papier, le textile ou les matériaux de construction affichent une plus faible propension à le faire51. appartenance à un groupe Sur les 64 entreprises interrogées, 18 appartiennent à un groupe, soit 28% d’entre elles. 51 Barlet C., Duguet E., Encaoua D. and Pradel J. (1998), « The commercial success of innovations : an econometric analysis at the firm level », Annales d'Economie et de Statistique, n°49-50, p. 457-478. 108 Tableau 19 : Les entreprises appartenant à un groupe selon leur taille et leur verdissement (en données brutes et en %) Total Cas A Effectif B En % 1à9 En % 2 29 % 10 à 49 14 % > à 49 Total des entreprises appartenant à un groupe En % Total des entreprises interrogées En % 56 % 0% 1 6 18 100 % 33 % 5 8% 50 % 100 % 100 % 36 9 0% 6% 11 % 100 % 0% 100 % 61 % 33 % 0 0% 11 2 100 % 0 100 % 100 % 0% 9 39 % 2 0% 82 % En % 67 % 0 0% 7 57 % 0% En % En % 4 100 % 0 Entreprises En % 1 18 % En % C 100 % 100 % 23 36 % 64 100 % Tout d’abord on observe que les entreprises appartenant à un groupe sont soit des TPE (39 %), soit des PME de plus de 49 salariés (50 %). On remarque également que ces dernières ont toutes enclenché une dynamique de verdissement et qu’elles représentent 82 % des entreprises menant, ou ayant mené, des actions dans ce domaine (cas A). Un tiers des entreprises appartenant à un groupe n’ont rien fait ni projeté (cas C) et, parmi elles, les deux tiers sont des TPE et un tiers des PME de moins de 50 salariés. Au total, les entreprises participant à la réduction de l’impact environnemental représentent plus de 60 % de celles appartenant à un groupe. Le fait d’appartenir à un groupe influence de façon positive le verdissement. En effet, lorsqu’on considère l’ensemble des entreprises, qu’elles appartiennent ou non à un groupe, elles ne sont que 56 % à mener des actions dans le domaine de l’environnement. Inversement, elles sont proportionnellement un peu plus 109 nombreuses à n’avoir rien fait ni projeté (cas C), car les entreprises sous la gouvernance d’une société mère y sont plutôt sous-représentées. L’appartenance à un groupe implique un certain nombre d’obligations. En conséquence, si l’entreprise souhaite conserver le nom de l’enseigne, elle doit réaliser les investissements que cela impose, et respecter les choix du groupe. Il est donc logique que l’entreprise mène des actions conformes à la volonté du groupe, notamment si celui-ci est engagé dans un verdissement de son activité. A contrario si le groupe n’entreprend rien, il n’est pas évident que l’entreprise réalise ces mêmes investissements. Au-delà de la politique du groupe, d’autres enjeux peuvent être pris en considération : le rapport à la dynamique économique propre au territoire ; un contexte difficile rendant ce type d’actions non stratégiques, au moins à court terme ; des difficultés à trouver du personnel qualifié et motivé et des contraintes de mobilité géographique52. Le fait d’appartenir à un groupe peut être assimilé à une option afin d’impulser une dynamique de verdissement. Il est nécessaire d’avoir une vision bien plus large de l’appartenance à un groupe. Au-delà du point de vue strictement économique de filiale, le groupe peut être conceptualisé comme un lieu d’échanges, d’interactions, d’externalités, qui apportent en interne des possibilités de regard sur ce qui a lieu à l’extérieur et sur son impact, notamment environnemental. Le constat, comme l’a présenté Boullet (2006), est le suivant : à partir du moment où l’entreprise s’organise dans le but de suivre la problématique environnementale, en créant un poste (technique, sécurité ou juridique) ou en aménageant une structure nouvelle, alors celle-ci l’intègre dans sa stratégie. Ce choix stratégique apparaît nettement dans les structures de taille plus importante, notamment au sein des groupes, où l’environnement devient alors une composante additionnelle dans l’organisation. Deuxième frein : définition du rôle de l’entreprise En temps de crise, l’objectif premier de l’entrepreneur est d’assurer la pérennité de son activité, voire d’assainir la situation de son entreprise si celleci est confrontée à des difficultés financières. Cet accent mis sur la dimension économique peut constituer un obstacle à la prise en compte de l’environnement. Et si l’entreprise émet le souhait d’intégrer de nouvelles dispositions, celles-ci seront sociales. 52 « Les gens de la campagne veulent travailler à la ville mais pas l’inverse ». Citation relevée lors d’un entretien avec un professionnel du secteur de l’automobile. 110 la vocation première de l’entreprise reste économique L’argument que leur vocation première est économique ressort chez les entreprises qui rencontrent des problèmes de marché, de trésorerie et qui ne peuvent investir sereinement. Le problème se pose aussi pour des professionnels qui côtoient de près l’environnement par leur activité. Dans l’industrie du bois, par exemple, certaines entreprises préfèrent jeter les résidus plutôt que de les donner ou de les valoriser du fait de la difficulté liée au stockage. Le coût est plus important (transport, stockage) que le gain. Lorsqu’une telle une vision à court terme domine, cela est préjudiciable pour la gestion et l’avenir des forêts : les buissons ne sont pas ramassés, les machines utilisées détruisent les sols où le potentiel est présent Cette priorité donnée à l’économique, à travers une vision unidimensionnelle du rôle de l’entreprise, tend à instaurer une opposition avec les deux autres piliers du développement durable que sont l’environnement et le social. si une autre dimension doit être intégrée, elle sera sociale Le constat d’une dimension sociale négligée peut être fait dans des zones qui se dévitalisent ou qui perdent en attractivité. Cela montre aussi les difficultés d’ordre social qui peuvent régner au sein de certaines entreprises, concernant les conditions de travail, l’attention portée au salarié, les relations professionnelles, l’épanouissement individuel, le développement du lien social... Mais lorsque l’entreprise privilégie la dimension économique, est-ce davantage au détriment de l’environnemental que du social ou l’inverse ? Pour avoir des éléments de réponse, la question a été posée de savoir si les entreprises avaient connaissance ou avait déjà entendu parler de RSE (Responsabilité Sociale/Sociétale des Entreprises), et si elles avaient le sentiment d’être en accord avec cette démarche après explication. 111 Tableau 20 : Connaissance/pratique de la RSE selon la taille et le verdissement des entreprises (en données brutes et en %) Cas A Effectif 1à9 En % B En % C En % En % Total des Total des entreprises entreprises dans une interrogées démarche RSE En % En % 12 2 4 18 43 % 100 % 57 % 39 % 67 % 11 % 22 % 100 % 10 à 49 6 0 39 61 % 13 20 % En % 67 % 3 9 0% 43 % 11 % 33 % 100 % > à 49 10 0 0 10 36 % 0% 0% 50 % 100 % 0% 0% 100 % 12 19 % 21 % En % Total des entreprises dans une démarche RSE En % Total des entreprises interrogées En % 0% 28 2 100 % 75 % 100 % 5% 36 56 % 5 8% 7 37 100 % 100 % 20 % 100 % 23 36 % 64 100 % 100 % 58% des acteurs (37 sur 64 interrogés), affirment avoir une démarche RSE au sein de leur entreprise. L’argument social pour avancer que l’action environnementale n’est pas la priorité tient, mais est à nuancer. La connaissance ou la pratique de la RSE concerne trois entreprises sur quatre parmi celles engagées dans une démarche de verdissement (cas A), ce qui sous-entend que l’entreprise qui est en adéquation avec la RSE est également, avec une forte probabilité, sensibilisée sur son impact environnemental. Cela montrerait le lien de complémentarité et non d’éviction entre ces deux dimensions. 112 la priorité économique met à mal les tentatives de collaboration Une vision unidimensionnelle pose problème dès lors que l’on mène une réflexion quant à une éventuelle mutualisation et que se posent des questions relatives à une collaboration en vue d’établir les bases d’une économie circulaire. Inévitablement la concurrence rend cette option difficile pour les TPE car elle soulève des inquiétudes liées à la méfiance à l’égard des voisins, surtout lorsque la conjoncture économique n’est pas satisfaisante pour ces entreprises et attise le « chacun pour soi ». Ceci s’observe quand les entreprises géographiquement proches ne disposent pas d’une personne morale supérieure (club d’entreprises) pouvant les mettre en relation, afin qu’elles prennent connaissance de leur existence mutuelle et que soit ouvert un dialogue entre les chefs d’entreprise. En zone rurale où la dynamique de verdissement est moins marquée, on relève certaines initiatives qui, dans la pratique, s’apparentent à des actions de type « écologie industrielle », même si c’est à une échelle moindre et de façon tacite. Il s’agit, par exemple, de donner certains déchets de chantier (chute de bois, gravas) à l’exploitant agricole d’à côté. Plutôt que de les déposer en déchetterie, ce qui entraine d’ordinaire un coût pour l’entreprise, cette initiative vient ici satisfaire deux acteurs. Troisième frein : méconnaissance et problème d’identification des acteurs, réseaux et dispositifs Le problème du relais entre institutionnels et professionnels constitue l’une des entraves à la dynamique de verdissement. En effet, il ressort des entretiens qu’un certain nombre de démarches avortent avant même que les acteurs enclins à apporter des réponses ne se soient rencontrés. Il existe un flou lié, d’une part, à la multiplicité des acteurs pouvant intervenir et, d’autre part, à la charge administrative incombant à ce type de démarche. lourdeur administrative Le nombre important de normes et de contrôles rend la situation complexe pour une TPE. Il semble indispensable de simplifier les procédures et de laisser une marge de manœuvre à ces entreprises. Certains professionnels ont émis l’idée de créer un type d’entreprise supplémentaire pour celles ayant 4 ou 5 salariés maximum : la TTPE. Les témoignages sont radicaux : « c’est étouffant, cela pousse à contourner la réglementation ». Il existe une réelle méfiance. Même si des entreprises sont éligibles à des aides, elles vont faire le choix de ne pas entreprendre de démarches et préfèrent ne pas en bénéficier plutôt que de faire face aux contrôles qui en découleront. De la même manière, des professionnels qui ont pris le temps et investi pour des 113 démarches vertueuses font le bilan et affirment que, s’ils avaient su avant combien cela leur en aurait coûté en temps à consacrer, ils n’auraient rien fait. Le constat d’une différence de traitement entre les entreprises selon leur taille dissuade de faire appel à des acteurs, réseaux ou dispositifs. Les entreprises expriment un mécontentement relatif à une absence de souplesse et de liberté, qui seraient pourtant nécessaires, et un manque de clarté. Tout en étant conscientes qu’il ne faut pas laisser faire n’importe quoi, certaines soulignent l’erreur de s’enfermer dans un carcan de réglementations, ce qui va à l’encontre de la logique attendue et a pour conséquence de freiner la création d’emplois (dans l’industrie). En réaction quelques acteurs ne veulent pas que l’aide soit systématique, éventuellement par étape, ou selon diverses tranches en fonction de l’avancée du ou des projets. problèmes d’identification des acteurs liés aux différents rôles et niveaux de décision Par exemple, au sein de la filière du transport de marchandises et de voyageurs, certains acteurs ont eu le sentiment d’être laissés pour compte car, lorsqu’ils se sont adressés à une institution locale afin d’être renseignés, ils n’ont pas obtenu satisfaction, l’institution en question n’étant pas concernée par cette situation a priori. Cet exemple témoigne du flou que peuvent rencontrer les entreprises Le manque d’information et de clarté conduit en réalité à un malentendu. En Poitou-Charentes, l’ADEME dispose d’un outil clef en main pour apporter un soutien aux entreprises qui souhaitent réduire leurs émissions de GES. En effet, la signature d’une Charte CO2 permet aux entreprises d'engager sur 3 ans un plan d'actions concrètes et personnalisées en vue de diminuer leur consommation de carburant en agissant sur les véhicules, les carburants, les conducteurs, l’organisation des flux et le management. L’accompagnement des entreprises dans la réalisation de cette Charte est assuré par l’ADEME et la DREAL au niveau régional. Par conséquent se pose la question de savoir si les acteurs institutionnels sont correctement identifiés ou connus dans leur fonction par les entreprises et également par d’autres institutions pouvant jouer le rôle de relais. Il s’agit d’un sujet délicat mais bien réel. Un certain nombre d’entreprises menant des actions ou ayant pour projet d’en effectuer connaissent la DREAL d’un point de vue répressif mais pas comme organisme pouvant prodiguer un conseil ou avoir un quelconque autre apport. Cela crée donc une certaine distance et diffuse une méfiance vis-à-vis d’acteurs en charge du verdissement de l’économie locale. 114 Ce problème d’identification (à qui s’adresser ? pour quoi ?) peut être abordé autrement. Des entreprises ne comprennent pas pourquoi les organismes spécialisés n’entrent pas en contact avec elles. En effet, si les pouvoirs publics souhaitent développer un verdissement chez les acteurs microéconomiques, beaucoup d’entreprises pensent que c’est à eux de les solliciter, de les contacter personnellement, et non l’inverse. L’angle par lequel le verdissement est appréhendé est donc une source d’incompréhension. De plus, le recensement des activités et entreprises sur un territoire donné n’est pas toujours en adéquation avec la réalité du terrain. Aujourd’hui il est indispensable de recréer une proximité entre les acteurs économiques sur le territoire et de rendre visibles et attractifs les outils et dispositifs pour verdir l’activité des entreprises. L’établissement de liens entre les différentes Chambres (CCI, CMA, CA) ainsi qu’avec les clubs d’entreprises pourrait permettre d’assurer une cohésion d’ensemble et de développer les relations de travail favorables. En parallèle les professionnels attendent des mesures exemplaires de la part des collectivités, et une éco-conditionnalité à la fois des soutiens financiers et dans les appels d’offres (au plus responsable), dans le cadre des marchés publics. Domine l’idée qu’aucun organisme nouveau ne doit être créé et qu’il faut agir avec l’existant de façon plus efficace. Quatrième frein : démarches sans suite Le problème posé par les démarches sans suite provient de l’absence de solution apportée en aval du travail de prévention ou de sensibilisation, que l’entreprise ait ou non agi dans le cadre d’une action verdissante pour son activité. rien ne prolonge l’action de sensibilisation L’entreprise a fait appel à un tiers en vue d’obtenir des éclaircissements sur ce qu’il serait judicieux de faire pour réduire l’impact de son activité sur l’environnement. Elle a été sensibilisée sur les postes les plus émetteurs de GES et informée sur les enjeux du développement durable de façon générale. Dans le prolongement elle aurait aimé accéder à des audits environnementaux, un suivi personnalisé, un pré-diagnostic avec un programme d’actions définissant les premières étapes. Pour poursuivre l’action de sensibilisation l’entreprise souhaite, à partir d’un état des lieux, savoir ce qui peut être fait à court terme et quelles petites actions peuvent déjà favoriser un progrès et des économies d’énergie. Il est également indispensable de valoriser toutes les actions, notamment au niveau des TPE afin qu’elles puissent se dire que « c’est accessible, pas très contraignant et 115 qu’il existe des interlocuteurs fiables pour nous accompagner. Si mon voisin le fait alors je peux le faire »53. Un point très important s’est révélé très préjudiciable pour certaines professions. Ce sont les signaux contradictoires des politiques. L’erratisme dont a souffert l’activité photovoltaïque perdure aujourd’hui encore, notamment pour les TPE. L’engagement de mettre en place une majoration tarifaire visant à inciter les producteurs d’énergie solaire à installer des panneaux français a été abandonné alors que les professionnels de la filière avaient investi et entrepris des efforts en ce sens. Un grand nombre a déposé le bilan. Depuis, les entreprises sont face à des difficultés de trésorerie, de confiance par rapport aux annonces faites par les politiques. Conduire une concertation avec les acteurs de la filière afin de développer qualitativement un plan d’action54 est un passage obligé en identifiant et valorisant les savoir-faire des TPE isolées sur le territoire. Les professionnels mettent l’accent sur le manque de formation en Région Poitou-Charentes. Eux-mêmes se sont formés à l’extérieur du territoire. A présent le relais (conseil, information, veille) se fait par des groupements d’acteurs et des interrogations subsistent quant à pousser l’initiative à travers des projets de SCOP. Il est nécessaire d’avoir ponctuellement un regard extérieur sur l’activité, par une antenne, une entité qui connait bien le milieu et les défis auxquels sont confrontées les entreprises. de nouveaux freins sont apparus après la mise en place d’actions Au départ l’engagement a pu être facilité par des diagnostics et les actions les plus simples à mettre en œuvre ont été réalisées. Si, dans un premier temps, des obstacles se sont présentés, ils ont été contournés par un accompagnement. Mais, dans un second temps, de nouveaux freins sont apparus et l’entreprise ne sait plus quoi faire ni vers qui se tourner pour aller plus loin. Dans la poursuite de son engagement le chef d’entreprise a besoin d’un soutien novateur pour viabiliser sont projet (exemple : transport maritime décarboné), de s’adresser à des personnes qui sauront apporter des outils nouveaux, pour répondre à de nouvelles attentes. Avec le temps et les efforts accomplis dans la dynamique de verdissement apparait une complexification des actions. Les difficultés s’accroissent avec les avancées. On note que les entreprises qui ont réalisé des actions n’ont plus de projet en vue, comme si la dynamique s’essoufflait au bout d’un certain nombre d’actions. 53 54 Citation relevée lors d’un entretien avec un professionnel de l’Industrie Alcimed (2012). 116 A cela s’ajoute des complications conjoncturelles liées au contexte économique actuel. Pour ne pas perdre en compétitivité les entrepreneurs préfèrent avoir du recul sur leurs actions, et prendre le temps de faire le point sur l’apport généré par l’intégration du verdissement dans la stratégie de l’entreprise. A terme, il convient de valoriser les actions et projets par un effort de communication pour supplanter le manque de reconnaissance dont souffrent de nombreux acteurs du verdissement en Poitou-Charentes. Cinquième frein : la communication Deux comportements antagonistes ont pu être observés quant à la façon dont l’entreprise communique relativement à ses actions sur le plan environnemental. Soit elle mène des actions positives qu’elle ne valorise pas ou très peu. Soit elle met en avant des actions qui restent relativement minimes. l’entreprise réalise des actions mais ne communique pas Des entreprises intègrent naturellement l’environnement dans leur démarche, principalement par conviction, et ne voient pas l’intérêt de communiquer. Dans le cas des TPE, c’est surtout le manque de moyens, en temps et en argent, qui limite la communication de ces entreprises, quelle qu’en soit la forme, sur leurs actions dans ce domaine. En outre, certaines entreprises ne savent pas communiquer, ce qui pose un vrai problème, car, tant qu’aucune action n’est valorisée en externe, il ne peut y avoir de positionnement stratégique à ce sujet. Boullet (2006) souligne cependant que la volonté d’une communication environnementale ne peut se substituer à l’action réelle et qu’une telle communication ne peut exister sans actions concrètes. l’entreprise communique beaucoup relativement à ce qu’elle entreprend Soulevons le cas des entreprises qui se sont engagées a minima sur le fil de l’économie verte ou du développement durable, par « effet de mode ». Cellesci ont saisi une opportunité d’obtenir un gain économique même si ses actions sont marginales, voire nocives, sous couvert d’un soi-disant effort sur tel ou tel type de produit ou action. Les entreprises ont un besoin de reconnaissance particulier dans les activités vertes. Pour aller plus loin, il faut dépasser le sentiment d’en faire suffisamment car l’activité, verte au départ, doit se développer tout en restant « exemplaire » et en prenant appui sur les différents dispositifs en place. La communication en externe aura le mérite de sensibiliser d’une part, les clients 117 et, d’autre part, les autres entreprises pouvant être en interaction 55 , notamment celles qui ne se sentent pas concernées par la stratégie environnementale. Différents médias peuvent être utilisés : télévision, presse locale ou régionale, radio, internet ou autres. Il faut susciter l’intérêt et diffuser en permanence, même à une petite échelle. Les acteurs de l’économie verte ont également besoin, pour leur développement économique, d’une communication faite par l’extérieur (la société). La communication fait partie des volets qui appellent un abord particulier pour trois raisons au moins : elle est à lier au besoin de reconnaissance et de valorisation des actions environnementales et des bonnes pratiques, fondamental dans la dynamique de verdissement d’une économie ; elle joue comme un encouragement pour la firme en même temps qu’elle lui renforce sa clientèle ; elle ne peut être organisée et menée par la TPE elle-même. Les acteurs économiques ont besoin de signaux clairs et relativement stables, et peut-être d’une innovation radicale dans la communication sur les questions d’économie verte. A travers la totalité des moteurs et des freins qui sont ressortis des entretiens ainsi que dans les propos tenus à l’égard de la réglementation, s’exprime largement une double attente des entreprises, augurant un équilibre vertueux difficile à trouver. Elles souhaitent d’une part conserver leurs marges de manœuvre et inscrire leurs efforts environnementaux dans une démarche volontaire. Elles voudraient d’autre part un cadre stable offrant une vision de l’avenir de leur territoire, fixant les conditions de la prise de décision microéconomique, et précisant le rôle respectif des différents acteurs et leurs interrelations. Les intégrer à un projet territorial, relevant par exemple de l’économie circulaire, peut répondre à la nécessité à leur niveau de se représenter ce que les différents acteurs pourraient construire ensemble dans une économie de proximité. On comprend mieux les enjeux de cette coconstruction, de cette « participation construite », en termes de possibilités de transformations socioéconomiques réelles, à travers ce qui est rappelé ici en filigrane relativement à la prise de décision en entreprise : la complexité qui tient à la multiplicité des normes, réglementations, mesures plus ou moins incitatives diverses, sans compter les signaux et incitations variés horizontaux (marché, concurrents, fournisseurs, banques) ; la part de créativité, marge de manoeuvre irréductible, qui est nécessaire au quotidien autant pour les décisions opérationnelles que stratégiques. Ces deux caractéristiques générales qui vont de pair puisque la seconde permet de gérer la première, 55 Alcimed (2012). 118 retentissent fortement quand il s’agit de la problématique environnementale. S’appuyer sur la part de créativité plutôt que de chercher à la réduire, permet d’éviter que ne s’accroisse la complexité ou que ne diminuent les moyens de la gérer. 119 V. Conclusions de l’étude L’objet de cette étude est une meilleure connaissance des démarches et processus décisionnels des entreprises dans leur territoire en matière d’économie verte. Elle apporte des précisions sur les besoins des acteurs microéconomiques, qu’elle a cherché à cerner au mieux en respectant un cadre méthodologique défini par rapport aux études régionales de 2012 du programme sur l’économie verte de la DREAL, et exposé dans le présent rapport. Une série de remarques conclusives générales s’imposent d’abord à l’issue des résultats développés. Ensuite seulement peuvent être résumés les principaux facteurs qui conditionnent la mise en œuvre de stratégies environnementales par les firmes. remarques conclusives générales - L’introduction et le développement des actions environnementales dans les stratégies des firmes dépendent de différents types d’innovation : . technique et technologique : cet aspect est important mais il est connu ; l’étude confirme sur ce plan la supériorité des innovations radicales, le caractère primordial de la relation entre la recherche et le monde socioéconomique, et la nécessité d’avoir un processus dynamique (majoritairement) endogène. . organisationnelle et sociale : au-delà de celles managériales qui doivent accompagner les précédentes, des outils innovants de gestion ou de financement, les innovations concernent aussi les interrelations entre acteurs (nouveaux projets, coopérations et synergies) et désignent ainsi les nouvelles relations avec les parties prenantes et avec les territoires. En 2008, Hamdouch et Depret synthétisaient ainsi dans un tableau les différentes innovations environnementales d’ordre technologique et d’ordre organisationnel. La prise en compte des innovations sociales élargit encore le champ des actions et stratégies possibles. 120 - Le comportement des entreprises en réponse aux mesures, dispositifs et soutiens en faveur de l’économie verte, variable selon le degré de verdissement du territoire, dépend aussi du seuil de sensibilité, lui même fonction de la politique environnementale menée auparavant par l’entreprise elle-même et donc de son apprentissage. Fonctionnant comme un seuil de réception minimum, si l’entreprise se situe au-delà, elle se positionne en acteur du verdissement au niveau de ses activités et dans son territoire, et peut participer donc à dynamiser le processus localement en tant qu’organisation responsable. En deçà, elle a grand besoin que soit maintenu un cadre normatif et réglementaire avec des incitations financières, un accompagnement spécifique et un suivi personnalisé (qui tiendront compte éventuellement de la difficulté de la mise en œuvre par les microentreprises par exemple). - Même si les acteurs microéconomiques semblent diversement concernés à travers leurs actions et pratiques, un changement de paradigme économique a bien lieu, et désormais on ne pense plus la contrainte environnementale imposée de façon exogène à l’entreprise. La protection de l’environnement, l’avenir de la planète, l’adaptation au changement climatique deviennent des 121 préoccupations réelles y compris chez les dirigeants qui n’agissent pas sur le plan environnemental. Deux aspects accompagnent ce changement. D’un côté, la logique de l’économie circulaire et l’ancrage territorial gagnent du terrain. De plus en plus l’écologie territoriale devient le cadre dans lequel on pense les changements à réaliser au niveau microéconomique. De l’autre côté l’évolution du point de vue des entreprises se traduit (sans formalisation) par (1) le fait qu’elles adoptent, pour un nombre croissant d’entre elles, plusieurs objectifs, avec pondération différente éventuellement, à poursuivre simultanément, vecteurs de performance globale, (2) le fait qu’elles se pensent de plus en plus dans leurs relations aux autres acteurs socioéconomiques, (3) le fait qu’elles visent davantage des actions à portée globale (élargissement de l’approche ACV par exemple), des transformations radicales, souhaitant de plus en plus agir à tous les niveaux, partout où l’activité et ses conditions le permettent. - Vu les perspectives qui se sont dégagées des entretiens, les entreprises intègrent le contexte global dans la définition de leurs stratégies environnementales. Joue défavorablement le contexte de crise économique, bien qu’il faille nuancer le poids de la contrainte financière, durcie en temps de crise, dans la décision environnementale étant donné la complexité de la prise de décision des sociétés soulignée plus haut. Agissent au contraire de façon bénéfique des évènements nationaux (Conférence environnementale, création de l’Institut d’économie circulaire) et régionaux (Salon de la croissance verte, forums) qui vont dans le sens des besoins exprimés par les entreprises : la démarche environnementale n’est plus l’affaire d’une entreprise répondant à une contrainte, isolée sur son territoire ; les efforts environnementaux (temps, énergie humaine, finance) peuvent être en partie mutualisés, et cette mutualisation peut porter sur d’autres domaines que l’environnement. facteurs conditionnant les stratégies environnementales des entreprises et leviers d’action possibles La mise en œuvre d’une stratégie environnementale est conditionnée par divers facteurs qui interviennent à trois niveaux interdépendants et qui déterminent ensemble le système incitatif optimal, et le cadre formel et informel des interrelations le plus favorable pour un verdissement de l’économie d’un territoire. Ce qui suit peut être considéré comme des pistes à privilégier pour l’action. 122 - au niveau de l’entreprise elle-même . Dans l’objectif du verdissement d’un territoire, le désenclavement peut passer par un décloisonnement entre les diverses activités opérant sur un même territoire. Au minimum les entreprises ont des relations locales suivant la chaîne de valeur et leur marché ; en se regroupant, en s’associant au sein d’un club, elles peuvent se connaître, se faire connaître, et envisager d’autres actions collectives, ou même un projet commun, sur le territoire répondant à des besoins collectifs mais aussi individuels. Lieu d’information et d’échanges entre les entreprises sur la thématique environnementale, il s’agit d’un moyen facile de rompre la solitude du dirigeant face aux questions environnementales entre autres. . L’Environnement ne devrait pas ajouter à la bureaucratie et à la complexité, et venir renforcer aux yeux des entreprises les occasions de contrôle et répression via les nouvelles normes et réglementations. Pourquoi ne pourrait-il pas être au contraire l’opportunité d’alléger les procédures, de gagner en cohérence (sur l’ensemble des diverses réglementations et des mécanismes incitatifs), d’établir un accompagnement personnalisé, global ou transversal, mais surtout avec continuité et suivi pour une réelle démarche environnementale ? Admettre la complexité de la décision microéconomique invite à ne pas ramener à un modèle simple le jeu d’acteurs sur un territoire donné, et partant de l’existant à adopter une vision de type plutôt évolutionnaire. . Le choix d’un business modèle (modèle d’affaires ou modèle d’entreprise) approprié peut orienter l’action et le comportement de l’entreprise dans le sens du verdissement. Cadre pour la réflexion, il facilite la prise de décision tout en étant support de créativité. Le modèle de base GRP (Génération de valeur, Rémunération, Partage) peut être spécialement adapté pour intégrer l’objectif environnemental et s’appliquer aussi à la microentreprise. La vision qui domine encore le plus souvent chez les acteurs et institutionnels proches des entreprises est celle résumée dans le schéma suivant adapté de C. de Perthuis (2003) : au-delà de la mise aux normes, le positionnement stratégique amène l’entreprise soit à prévenir des risques, dont celui de réputation, soit à saisir l’opportunité d’une plus grande création de valeur par la vente de produits ou la réduction de coûts. La stratégie des entreprises pionnières a consisté à prendre en compte tous ces aspects à la fois en misant sur les innovations durables. Elles participent par là-même à la construction des normes sociales et environnementales. 123 Figure 7 : Suite à notre enquête, nous proposons un schéma différent, un « triptyque gagnant », représentant un business modèle fondé aussi sur l’innovation durable, donc visant à améliorer la performance de l’organisation sur les plans environnemental, social et économique, et adapté aux petites et moyennes unités. Figure 8 : Le triptyque gagnant # "" # "! # $ "- % Notre représentation suggère d’être proactif, en cherchant à tirer des avantages à la fois concurrentiels, liés aux ressources et compétences, liés aux partenariats et réseaux. Les TPE disposent aussi d’avantages liés à leur taille humaine, dont la flexibilité et la créativité, et peuvent s’appuyer sur les 124 réseaux pour « externaliser » certaines fonctions ou tâches, et bénéficier de certaines compétences. Elles peuvent chercher de plus à tirer profit de la tendance éco-localiste. L’adoption d’un business modèle favorable, et la communication en interne sur cette base, peut aider à surmonter les difficultés d’ordre culturel et les réticences des collaborateurs que rencontrent certaines entreprises quand il s’agit de décisions environnementales. Enfin, les acteurs relais intervenant au plus près des entreprises (réseaux d’entreprises, organismes consulaires), eux-mêmes formés à cette approche des performances de l’unité microéconomique, pourraient la diffuser largement (par des sessions de formation, ateliers). . Le cas des entreprises appartenant à un groupe qui n’a pas son siège dans la région exige une approche particulière. Précisément le cas de figure le plus courant est celui du groupe engagé dans une démarche RSE qu’il applique de façon « extra-territoriale ». Les entreprises locales concernées avouent le peu de marge de manœuvre à leur niveau, bénéficiant de l’organisation en interne de la politique environnementale du groupe. En terme d’optimisation, cela peut soulever un double problème localement, car cela peut s’avérer contreproductif sur le plan environnemental (collecte et transport de déchets, livraisons et approvisionnements organisés sur toute la France), et cela peut se faire au détriment du développement économique local que favorisent potentiellement des circuits courts de proximité. . De façon générale, parmi les facteurs conditionnant les stratégies environnementales des entreprises, il faut tenir compte de ce qu’apportent les groupements ou réseaux d’entrepreneurs. - au niveau du groupement d’entreprises ou sur un site d’activités . Quand il est créé localement, le club ou groupement d’entreprises est déjà, selon les objectifs qu’il se fixe, bien placé pour répondre à une partie des besoins des dirigeants en matière environnementale : rompre l’isolement ; informer, échanger, partager sur des sujets peu habituels et des problématiques d’actualité ; favoriser les synergies entre entreprises. Une telle structure représente, partiellement au moins, l’activité économique d’un territoire et peut participer à dynamiser le tissu économique local. Différents types de réseaux oeuvrent en ce sens en réalité, en plus des clubs d’entreprises et des associations de zones d’activité : pôles de compétitivité, grappes, clusters et même des réseaux virtuels. 125 . Il arrive que parmi tous les réseaux d’entreprises existants56 (par filières ou sectoriels, thématiques, territorialisés), aucun ne réponde aux besoins d’un certain nombre d’entreprises. Le réseau permet de formaliser un projet d’action collective pour répondre à ces besoins, partant de chefs d’entreprise mobilisés autour d’un projet qu’ils partagent, et s’appuyant sur une méthode participative et des échanges collaboratifs. Les CCI peuvent aider à la structuration et au développement de tels réseaux57. . Vont compter particulièrement dans l’optique d’un verdissement de l’économie locale : - la création de synergies avec les autres acteurs socioéconomiques locaux impliqués sur les questions environnementales, d’un espace collaboratif avec les autres structures, associations environnementales et établissements publics visant l’émergence et le développement de services à l’environnement répondant aux besoins locaux dans ce domaine ; - l’animation locale : un personnel clairement identifié pour l’accompagnement des entreprises du réseau sur toutes les questions environnementales, dédié au projet d’économie circulaire s’il y a lieu, et à la coordination des projets des adhérents, interlocuteur privilégié des partenaires et jouant un rôle dans la mise en relation des acteurs, des divers réseaux et des projets qui concernent son territoire ; - la réalisation d’études préalables, de diagnostics sur le métabolisme économique territorial par exemple peut mettre en évidence les interrelations, synergies et mutualisations possibles ; elle permet aussi de détecter plus précisément les besoins en termes d’infrastructures, aménagements divers, nouveaux services, ou sous la forme de soutiens à la R&D ou pour l’accès aux dernières technologies par exemple. . Le dernier niveau à préciser quant aux facteurs conditionnant les stratégies environnementales des entreprises, découlant directement des deux précédents, n’a pas besoin d’être étayé davantage. Il s’agit de se situer cette fois au niveau du territoire, posant ainsi plus directement la question de l’action publique favorable. 56 En 2010, les CCI sont impliquées dans près de 2 000 réseaux d’entreprises en France, cf. ACFCI (2010), Réseaux d’entreprises : une valeur ajoutée pour les entreprises, une nécessité pour les territoires, une priorité pour les CCI, novembre. 57 ACFCI (2012), Création et animation de réseaux d’entreprises. Guide méthodologique à l’usage des CCI, février. 126 - au niveau des territoires . Au niveau du territoire, il est possible de déduire ce qui pourrait donner lieu à des pistes pour l’action en considérant simplement toutes les remarques précédentes transposées à ce niveau. Certaines observations s’imposent comme une évidence : ne pas délaisser la question environnementale à propos de secteurs d’activité (dans les services par exemple) ou types d’entreprises (microentreprises en particulier) ou territoires infra-régionaux (« forces vives » absentes) ; s’orienter vers un système de guichet unique pour tous les besoins en matière environnementale (aides, accompagnement, formation, compétences spécifiques, R&D) surtout pour les très petites entreprises ; inciter et soutenir les démarches de management environnemental à tous les niveaux, et dans la gestion des zones d’activités ; faciliter l’accès aux services liés à l’environnement (gestion et valorisation de déchets, études et diagnostics ponctuels, compétences spécifiques, innovations environnementales) ; stimuler la création de synergies entre acteurs et structures territoriales, et le partage et les mutualisations (déchets, ressources dont eau, énergie, les biens, services et flux en général) ; renforcer autant que possible la cohérence de l’ensemble des actions ayant des conséquences dans les stratégies environnementales des firmes ; décloisonner et coordonner au mieux tous les acteurs exerçant une influence sur ces stratégies ; faciliter les processus d’apprentissage collectifs, la diffusion et les échanges d’informations et retours d’expérience sur le territoire . Apparaît comme un point particulier la communication parce que celle-ci doit être revue pour tout et à tous les niveaux : elle échoue relativement en matière environnementale pour de multiples raisons du point de vue des entreprises. Elle véhicule beaucoup d’informations. Difficile de dire qu’elle en diffuse trop dans la mesure où la veille informationnelle à ce sujet est très importante pour les entreprises. Elle ne permet pas une identification facile des aides, des possibilités d’accompagnement et de conseil, ni des structures, organisations, institutions, collectivités qui interviennent dans « un système » qui pourtant semble avoir été mis en place pour les soutenir dans leurs démarches environnementales. Le fait de passer par des acteurs relais sur le terrain ajoute parfois à la confusion. Qui fait quoi ? Qui offre quoi ? Qui a financé ? Quel est le nom du dispositif ?... Autant de questions qui illustrent le manque de lisibilité, de simplicité et qui sont liées aussi au caractère lourd et compliqué des démarches et dossiers. En matière de communication environnementale, les entreprises ont besoin aussi que leur engagement et leurs pratiques vertueuses soient davantage valorisés. 127 . L’existence de stratégies environnementales au niveau des firmes, et la complexité à laquelle elles font face au quotidien, doivent être prises en compte dans l’élaboration de projets territoriaux, dans le fond comme dans la forme. Associer davantage les acteurs microéconomiques est même souhaitable quand il s’agit de stratégies d’économie circulaire. Il est difficile d’imaginer à l’issue de cette enquête qu’un projet d’écologie industrielle de type Top-down, donc de l’initiative publique seule, puisse avoir toutes les chances de réussite. Participer activement, au même titre que d’autres acteurs du territoire (population locale, autres acteurs socioéconomiques), à l’élaboration de ce type de projet, dont elles ont besoin comme cadre pour leurs activités mais aussi comme perspective pour leur propre vision de l’avenir, les engage en même temps dans la réalisation des efforts de verdissement possibles. De leur côté, les autorités publiques territoriales peuvent à travers cette implication bénéficier d’une meilleure connaissance des entreprises et de leur point de vue de parties prenantes, certainement utiles pour définir un projet territorial. Rappelons enfin que ces conclusions, établies à partir de notre enquête, sont dépendantes des territoires d’étude choisis, de l’échantillon d’entreprises et du moment auquel ont été réalisés les entretiens. Aussi, la présente étude s’inscrit en complément de celles effectuées en 2012 dans le cadre du programme d’études de l’économie verte de la DREAL Poitou-Charentes. 128 $% $"#'% 129 ACFCI (2010), Réseaux d’entreprises : une valeur ajoutée pour les entreprises, une nécessité pour les territoires, une priorité pour les CCI, novembre. ACFCI (2012), Création et animation de réseaux d’entreprises. Guide méthodologique à l’usage des CCI, février. Acquier A. et Aggeri F. (2008), « Une généalogie de la pensée managériale sur la RSE », Revue Française de Gestion, janvier, n° 180, p. 131-159. ADEME (2004), Entreprises : comment bien gérer vos déchets. ADEME (2012), Chiffres clés Déchets 2012. Alcimed (2012), Etude sur les filières vertes en région Poitou-Charentes : potentialités, faisabilité, pistes d’action. Aubertin C. et Vivien F.D. (2010), Le développement durable, Enjeux politiques, économiques et sociaux, La Documentation française. Barlet C., Duguet E., Encaoua D. and Pradel J. 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Contexte de l’étude... 4 I.1. Les apports des études sur l’économie régionale verte et en verdissement du programme2012 de la DREAL.. 4 Tenir compte de la présence et du stade de développement différent des filières vertes dans la région Poitou-Charentes 5 Tenir compte de l’importance des secteurs TPE/Artisanat/Commerce et BTP dans l’activité économique régionale et donc du rôle majeur qu’ils peuvent jouer dans le verdissement de l’économie. 6 « Tester » à l’occasion de notre enquête les conclusions en termes de priorités d’actions établies par D&Consultants pour le verdissement de la région... 7 I.2. L’état de l’art 7 Sur les notions utilisées 7 Sur les approches mobilisées.. 10 1. L’écologie industrielle. 10 2. L’économie de la proximité appliquée à l’environnement 12 3. Les travaux sur les objectifs et la responsabilité environnementale des firmes... 13 II. Méthodologie de l’étude......................................... 17 II.1. La définition des territoires retenus par l’étude. 17 II.2. Recension des acteurs présents sur les territoires préalablement définis.. 20 II.3. Détermination de l’échantillon d’acteurs 22 II.4. Elaboration de la grille d’entretien.. 22 II.5. Seconde phase de l’étude : la réalisation des entretiens 24 III. Résultats sur la dynamique de verdissement des territoires. 27 III.1. Dynamique observable sur le territoire T1 28 1ère observation : des éléments de contexte généraux pesant particulièrement sur ce territoire. 29 2ème observation : un ancrage fort des activités sur un territoire qui présente peu d’éléments de dynamisation en général.. 30 3ème observation : une réglementation et une gestion des aides éloignées du terrain 32 ème 4 observation : une innovation concentrée principalement sur l’acquisition de nouvelles compétences.. 33 5ème observation : quelques organismes et acteurs institutionnels présents et actifs sur le territoire 34 162 Observation finale : la réalité du verdissement du territoire au niveau microéconomique................................................................................................. 35 à travers les actions 36 à travers les motivations 37 DD et RSE plutôt qu’économie verte... 38 III.2 Dynamique observable sur le territoire T2. 39 ère 1 observation : éléments généraux montrant a priori qu’une dynamique de verdissement est enclenchée 2 ème 40 observation : des acteurs et réseaux locaux actifs 42 3ème observation : des actions et motivations suggérant un verdissement à la base... 44 4ème observation : un territoire d’entreprises sensibilisées « qui bouge » ..... 45 le point de vue exprimé par les entreprises pour verdir leur territoire 45 l’atout que représente un territoire qui bouge. 46 l’implication des entreprises dans le verdissement du territoire.. 47 III.3 Dynamique observable sur le territoire T3. 49 1ère observation : un territoire dynamique d’entreprises reliées... 50 2ème observation : des actions environnementales pluridirectionnelles...... 52 ème 3 observation : les entreprises, agents du verdissement à besoin d’accompagnement 55 des entreprises particulièrement motivées. 55 des besoins majoritairement d’accompagnement. 56 4ème observation : un processus spontané, décentralisé de verdissement de l’économie locale. 57 des services « à l’environnement » sur le territoire... 58 une économie locale en verdissement avec une orientation spontanément circulaire... 59 Comment renforcer la dynamique de verdissement du territoire selon les entreprises ? ... 61 III.4 Dynamique observable sur le territoire T4. 64 1ère observation : un territoire attractif, d’entreprises dynamiques en terme de verdissement 66 2ème observation : le rôle du Club d’entreprises de Périgny et l’éco-réseau Biotop 68 3ème observation : au-delà du Club d’Entreprises de Périgny : des acteurs présents et engagés sur ce territoire 71 ème 4 observation : quelles perspectives quant à la dynamique de verdissement ? Eléments apportés par les entreprises 73 des entreprises convaincues qu’il faut agir pour l’environnement.. 73 quels acteurs pour favoriser la dynamique et la renforcer selon les entreprises ?.. 76 III.5 Dynamique observable sur les territoires : essai de comparaison et 163 synthèse globale 78 ère 1 observation : la progression s’apprécie à travers les actions menées par les entreprises. 80 ème 2 observation : la dynamique de verdissement des entreprises est corrélée à la présence de services à l’environnement et à l’implication de structures environnementales sur le territoire et de réseaux et organismes représentant les entreprises.. 81 3 ème observation : le rôle des collectivités territoriales.. 82 4 ème observation : deux modes différents de verdissement en présence... 84 IV. Résultats sur la dynamique de verdissement des entreprises dans leur territoire. 87 IV.1. La réglementation à la fois source de progrès et de retard... 87 1ère observation : la réglementation favorise le progrès................................ 88 une contrainte heureuse 88 un tremplin 88 2ème observation : la réglementation conditionne un retard...... 89 l’entreprise n’a pas les moyens d’appliquer la réglementation 89 la réglementation est assimilée à un désavantage concurrentiel 90 la réglementation manque de lisibilité pour les TPE. 90 IV.2. Les moteurs de l’économie verte et du verdissement au niveau microéconomique dans la région 91 er 1 moteur : les dispositifs incitatifs mis en place... 91 état des lieux 91 aides et incitations financières.. 93 information, conseil et formation.. 94 (1) les acteurs institutionnels.. 94 (2) les structures porteuses de l’action régionale 95 (3) les associations environnementales 96 2ème moteur : les volets spécifiques dans des dispositifs génériques existants 97 un accompagnement opérationnel des laboratoires indépendants 97 la proximité des associations professionnelles.. 98 (1) la filière du bois 98 (2) l’agriculture... 98 (3) l’artisanat et les PME-PMI. 99 3ème moteur : la personnalité du dirigeant.. 99 positionnement de marché 100 par conviction.. 100 4ème moteur : l’identité de l’entreprise..... 100 164 changement d’identité, l’environnement comme une seconde nature... 100 cas du verdissement lié à la nature des activités de l’entreprise 100 5ème moteur : place des réseaux, structures et plateformes..... 102 état des lieux sur le terrain 103 exemple du Club d’Entreprises de Périgny 104 exemple d’une Fédération Professionnelle 105 Le rôle informel des fournisseurs. 105 la place des établissements bancaires 106 IV.3. Les freins à l’économie verte et au verdissement au niveau microéconomique dans la région 106 er 1 frein : taille et structure.. 106 caractéristiques structurelles. 107 appartenance à un groupe 108 ème frein : définition du rôle de l’entreprise... 110 la vocation première de l’entreprise reste économique 111 si une autre dimension doit être intégrée, elle sera sociale. 111 la priorité économique met à mal les tentatives de collaboration 113 frein : méconnaissance et problème d’identification des acteurs, réseaux 3 et dispositifs.. 113 2 ème 4 lourdeur administrative... 113 problèmes d’identification des acteurs liés aux différents rôles et niveaux de décision. 114 ème frein : démarches sans suite.. 115 rien ne prolonge l’action de sensibilisation. 115 de nouveaux freins sont apparus après la mise en place d’actions... 116 ème frein : la communication...... 117 l’entreprise réalise des actions mais ne communique pas... 117 l’entreprise communique beaucoup relativement à ce qu’elle entreprend 117 V. Conclusions de l’étude.. 120 5 remarques conclusives générales.. 120 facteurs conditionnant les stratégies environnementales des entreprises et leviers d’action possibles.. 122 - au niveau de l’entreprise elle-même... 123 - au niveau du groupement d’entreprises ou sur un site d’activités. 125 - au niveau des territoires 127 Références bibliographiques 129 Annexes... 133 165 Annexe 1 – Carte : territoires retenus et répartition géographique des métiers verts et verdissants dans la région (INSEE) 134 Annexe 2 – Cartes des territoires choisis 136 Annexe 3 – Listes des acteurs relais (début de l’étude) . 141 Annexe 4 – La grille d’entretien 143 Annexe 5 – Résultats bruts par territoire.. 154 166