cahier du forum

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Ouestaf.com
Tel: (221) 33 824 17 20
Fax: (221) 33 824 00 27
Email: [email protected]
Site web: www.ouestaf.com
Edité par ACC
L’EDITO de H. Tidiane SY*
Un aveu : ce fut laborieux, ce fut
coûteux, mais surtout que ce fut
motivant et exaltant !
Au finish, le tout premier Forum
Ouestaf
organisé sur le thème de
« l’entreprenariat social » et « Les
Cahiers du Forum Ouestaf », que vous
avez sous les yeux et qui en sont le
prolongement.
Il en sera ainsi désormais de manière
épisodique: un Forum sous forme de
débat public pour discuter d’une
problématique et les Cahiers pour
approfondir la réflexion par des
contributions écrites, partager les idées
débattues et élargir le cercle des
participants.
Pour les « Amis du Forum », il peut
s’agir d’une nouveauté. Pour nous, ce
n’est qu’une simple continuité : celle
du travail entamé il y a bientôt deux
ans, par la création du site web
Ouestaf.com et de l’agence de presse
« en
ligne »
Ouestafnews
qui
l’accompagne.
Derrière tous ces projets, qui en réalité
n’en forment qu’un, un objectif et une
ambition :
diffuser
et
partager
l’information et le savoir sans lesquels
L’Afrique –ni aucune société du reste ne peut compter se développer, plus
encore en ce XXIème siècle.
Lorsque nous lancions Ouestaf, pour
offrir une plateforme d’information
avec une perspective toute africaine –
loin des clichés et des
prismes
déformants -, nous étions mus par la
volonté, d’apporter notre petite
contribution citoyenne à la construction
de nos nations, de notre continent.
En cela nous étions
inspirés par
d’autres qui avant nous – et parfois
dans des conditions plus difficiles - ont
fait bien plus, se sont donné corps et
âme à l’idéal panafricain et à
l’édification d’une Afrique libre et
prospère.
Pour nous c’est bien de cela qu’il
s’agit. Permettre à l’Afrique et aux
Africains de saisir les enjeux du monde
contemporain pour mieux faire face aux
défis. Bonne lecture
*Hamadou Tidiane SY
est le fondateur d’Ouestaf
Les cahiers du
Forum Ouestaf
Bulletin gratuit des Amis du Forum
orum N°001, Mai - Juin 2008
Afrique terreau fertile pour l’entreprenariat social
L’Afrique constitue un terreau fertile
pour l’entreprenariat social. C’est
l’une des principales conclusions des
experts qui ont animé le 17 mai
dernier un panel à l’invitation
l
du
Forum Ouestaf sur le thème
« Entreprenariat social : une
perspective africaine
afric
».(Lire le
compte rendu en page2).
page2)
Ce premier numéro des cahiers du
Forum Ouestaf,
Ouestaf continue la réflexion
et approfondit le débat.
A propos de textes…
N’y a-t-il
a
pas lieu de promouvoir une
réglementation de « l’entreprise
sociale » dans le cadre de l’OHADA
pour faire conformer son éventuel
statut « d’entreprise » et sa finalité
sociale ? Le juriste M Ndao pose le
débat. Lire page 8
Du concept à la pratique en Afrique
Faire le bond du social à l’économie
marketing
L’entreprenariat
social reconfigure la
fonction de production des entreprises
et s’impose dans les stratégies
marketing comme nouveau créneau à
exploiter
estime l’universitaires
I.Dankoco. Lire page 4
L’Africain et la notion d’entreprise
Les italiens, comme les américains,
les anglais et les français définissent
l’entrepreneuriat social de manière
relativement différente en Afrique
la réflexion ne fait que s’amorcer
selon EL.H.Diouf spécialiste de
l’analyse économique.
économique Lire page 7
Le point de vue le plus récurrent et
qui mérite, la plus grande attention
est celui du défaut de « culture
entrepreneuriale » que présentent
nos sociétés.
sociétés C’est ce que pense la
consultante en Communication M.
Tall. Lire page 3
Sommaire
L’Afrique : terreau fertile pour entrepreneurs sociaux……………...................Page
sociaux……………..
2
Et notre pouvoir d’entreprendre ?.......................................................Page 3
Du social à L’économie.....................................................................Page 4
Et l’école dans tout ça !....................................................................Page
....................................................................Page 6
Entreprenariat social en Afrique de l’Ouest...........................................Page 7
Le cadre normatif en question............................................................Page
question...........................................................
8
www.ouestaf.com
Le n°1 de l’information Ouest Africaine
Le Cahier du Forum Ouestaf
Page 2 sur 8
Afrique terreau fertile pour l’entreprenariat social
Par Assane Diagne*
L'universitaire sénégalais Ibrahima
Samba Dankoco estime que l'Afrique
est un ‘'champ sur lequel on peut
expérimenter l'entreprenariat social
avec des offres au vrai sens du terme''
pour relever le défi du
développement du continent.
Les modèles en cours ne prennent
pas en compte l'Afrique qui
représente moins de 2 pour cent des
échanges internationaux.
Mamadou
Khoulé
Modérateur
des débats
De nouvelles offres devraient être
inventées pour exploiter le marché
africain'' qui fait près de 800 millions
d'habitants, a dit le professeur
Dankoco, enseignant à l'Université
Cheikh Anta Diop.
Ibrahima Samba Dankoco participait
samedi à Dakar au premier Forum
Ouestaf sur le thème :
‘'Entreprenariat social : quelle
perspective pour l'Afrique ?
Relevant que l'entreprenariat social
est ‘'un concept nouveau dont les
contours ne sont pas encore
clairement définis'', le professeur
Dankoco a indiqué qu'il cherche à ‘'réhumaniser les rapports économiques''
et à ‘'trouver de nouvelles
opportunités'' pour l'économie ;
Il a cité le cas de la Société nationale
de télécommunications (SONATEL) au
Sénégal avec le système de recharge
Seddo qui met le téléphone à la
portée des usagers à faibles revenus.
‘’Ce que la SONATEL a réussi, les
banques ne l'ont pas encore réussi,
parce que le taux de bancarisation
tourne autour de 6 pour cent au
Sénégal’’
‘'L'entreprenariat social a mené vers
l'émergence du marketing moderne.
Toute entreprise africaine qui ne
prend pas en compte le faible revenu
Le 17 Mai 2008 s’est tenue à Dakar la
première édition du « Forum
Ouestaf » sur le Thème
« Entreprenariat Social : quelle
perspective pour l’Afrique ».
Le panel était composé d’El Hadj
Alioune Diouf, spécialiste de l’analyse
économique, professeur à L’Ecole
National d’Administration (ENA) et fin
connaisseur du Commerce
International. A ses cotés Ibrahima
Samba Dankoco Professeur agrégé des
des populations africaines va vers des
difficultés'', a-t-il averti.
‘'L'entreprenariat social ne doit pas être
réduit à la micro-entreprise ou à
l'économie sociale ou à l'économie
solidaire'', a-t-il souligné, avant de
préciser que ‘'l'orientation sociale n'est
pas toujours présente pour ce qui est de
la micro-entreprise''. ‘'Il ne s'agit pas
uniquement de régler des problèmes
sociaux. L'entreprenariat social doit
permettre de gérer des aspects
économiques.
Il y a une sorte d'antinomie entre le
caractère social et le caractère
économique'', a-t-il fait valoir.
L'entreprenariat social basé sur une
éthique sociale s'oppose à
l'entreprenariat économique basé sur une
éthique économique'', a dit le professeur
Dankoco pour qui l'entrepreneur social
‘'peut aller là où l'entrepreneur
économique est incapable d'aller. C'est
un faiseur de miracles''. Il a ainsi cité
l'exemple de l'inventeur du "café Touba",
qui a mis le café la portée des petites
bourses, en plus d'avoir créé des emplois.
Dans le domaine du commerce, son
activité consiste, entre autres, à
‘'fractionner l'offre pour la mettre à la
disposition des populations, pour
atteindre les segments les plus faibles de
la société.
Pour sa part, El Hadji Alioune Diouf
Économiste et enseignant à l'Ecole
nationale d'administration (ENA) a invité
à faire la distinction entre
‘'entreprenariat économique et
entreprenariat social, affirmant que
‘'pour l'entrepreneur social, la finalité
c'est le développement social, tandis que
pour l'entrepreneur économique, la
finalité c'est le profit, sous entendu les
bénéfices financiers.
Rejoignant le professeur Dankoco, M.
Diouf expert en relations commerciales
internationales a soutenu que l'accès aux
marchés des pays développés ‘'n'est pas
la bonne stratégie'' pour le
développement de l'Afrique.
Selon lui, ‘'la bonne stratégie, c'est le
développement du marché intérieur
africain''.
Quant à Coumba Touré, représentante
en Afrique de l'ouest de l'ONG
internationale Ashoka qui cherche à
promouvoir l'entreprenariat social dans
le monde, elle a défendu que ‘'quand on
parle d'entrepreneurs sociaux, on ne
peut pas se fixer sur un thème
particulier''.
culier''. Les solutions des
entrepreneurs sociaux vont au-delà
au
des
solutions qui ont été apportées avant.
Sans l'aide extérieure et sans aide
financière, ‘'ils apportent la preuve qu'il
est possible d'avoir des solutions
endogènes et durables. Ils ont une vision
claire de comment faire pour trouver des
solutions durables'', a soutenu Coumba
Touré.
Universités enseignant à la Faculté des
Sciences Economiques et de Gestion
(FASEG) de l’UCAD.
Ce spécialiste du marketing enseigne
également dans quelques autres
universités du monde.
Enfin il y’avait Madame Coumba Touré
Représentante régionale de ASHOKA
Sahel une organisation qui identifie et
soutien des innovateurs sociaux.
Quelques dizaines de personnes étaient
présentes, parmi lesquelles des
représentants diplomatiques des pays
pa de
l’Afrique de l’Ouest, des étudiants, des
chercheurs des journalistes, et de
simples observateurs…
Pendant environ 3 heures d’horloge
d’
panélistes
listes et participants ont eu des
échanges riches
ri
et animés sur un thème
jusque là peu effloré.
Hormis la sono par moments défectueuse
de la salle du Café de Rome les
participants ont, à l’unanimité, apprécié
la bonne organisation de l’événement.
l’événement
Images
de
quelques
participan
ts aux
débats
‘'Nous ne voyons pas l'entreprenariat
dans le sens traditionnel du terme. Chez
nous le profit est social, il se mesure à
travers l'impact social'', a précisé
pré
Mme
Touré. Lors du débat qui a suivi,
plusieurs questions ont été soulevées par
le public dont notamment celle de
l'existence ou non d'un "cadre normatif"
qui réglementerait l'entreprenariat
social, la prise en compte des réalités
culturelles africaines,
africain
la question de
l'intégration dans les programmes
d'enseignement de cette nouvelle
discipline déjà largement enseignée en
Europe et en Amérique du Nord, y
compris par les universités les plus
prestigieuses.
*Journaliste APS
Page 3 sur 8
Le Cahier du Forum Ouestaf
Croire en notre pouvoir d’entreprendre
Professeur
Malick
Ndiaye
Participant
aux débats
Par Minielle Tall*
Il était temps que l’espace public
sénégalais (et africain) se saisisse enfin
d’un concept que le Monde entier (ou
presque) a sur le bout des lèvres :
l’entreprenariat social !
Entrevue comme une solution aux
problèmes variés et aux multiples crises
que connaissent le Monde et l’Afrique –
qui à défaut d’en être l’épicentre n’y
échappe guère - il était somme toute
crucial qu’un débat opposant opinions
favorables et grands sceptiques soit
organisé.
Entre ceux qui voudraient pouvoir, pour
simplifier
les
choses,
rattacher
davantage le concept d’entreprenariat
social à celui d’Economie sociale (qui
est peut être un peu mieux circonscrit
mais ne fait pas assez état de la notion
d’inventivité
et
d’innovation
qui
caractérisent les entrepreneurs sociaux)
et ceux qui doutent que ce concept soit
réellement une solution transférable au
contexte (archi complexe) africain, il y a
forcément des opinions à recadrer et
des arguments à détailler.
Le point de vue le plus récurrent et qui
mérite, à mon avis, la plus grande
attention c’est sans doute celui du
défaut de « culture entrepreneuriale »
que présentent nos sociétés trop
enclines à décourager la moindre
initiative détonante.
Nous ne nous faisons pas assez
confiance, et c’est peut-être
Il était temps que l’espace public
sénégalais (et africain) se saisisse enfin
d’un concept que le Monde entier (ou
presque) a sur le bout des lèvres :
l’entreprenariat social !
Entrevue comme une solution aux
problèmes variés et aux multiples crises
que connaissent le Monde et l’Afrique –
qui à défaut d’en être l’épicentre n’y
échappe guère - il était somme toute
crucial qu’un débat opposant opinions
favorables et grands sceptiques soit
organisé.
Entre ceux qui voudraient pouvoir, pour
simplifier
les
choses,
rattacher
davantage le concept d’entreprenariat
social à celui d’Economie sociale (qui
est peut être un peu mieux circonscrit
mais ne fait pas assez état de la notion
d’inventivité
et
d’innovation
qui
caractérisent les entrepreneurs sociaux)
et ceux qui doutent que ce concept soit
réellement une solution transférable au
contexte (archi complexe) africain, il y a
forcément des opinions à recadrer et
des arguments à détailler.
Le point de vue le plus récurrent et qui
mérite, à mon avis, la plus grande
attention c’est sans doute celui du
défaut de « culture entrepreneuriale »
que présentent nos sociétés trop
enclines à décourager la moindre
initiative détonante.
Nous ne nous faisons pas assez
confiance, et c’est peut-être ce qui nous
pousse, en matière de développement
global comme pour autre chose, à
chercher ailleurs, les réponses aux
problèmes d’ici.
Et
c’est
pourtant
là
que
la
débrouillardise légendaire des Africains
pourrait trouver une légitimité puisque
le concept d’entreprenariat social
stipule – implicitement - que tout
individu qui, dans une situation ou ni le
privé ni le public n’a pu fournir de
réponses adéquates, a proposé une
alternative qui profite à la communauté
entière,
peut
être
affublé
du
qualificatif « d’entrepreneur social ».
Petite illustration. Souvenez-vous dans
les années 90, de ces artisans sénégalais
qui, à partir de boîtes de conserves
qu’aucune entreprise de recyclage ne
pouvait trier (puisqu’il n’y en a jamais
eue), se sont mis à confectionner de
drôles de malles et mallettes dont les
locaux ne voulaient
pas (autre
illustration du défaut de croire en soi)
mais qui faisaient le bonheur des
touristes et autres étrangers de passages
dans la capitale.
Ces hommes avaient assurément, bien
avant la vague «écolo » qui secoue la
planète aujourd’hui, trouvé une réponse
qui, si elle avait été mieux valorisée par
l’Etat (ou le grand secteur privé) aurait
pu leur mériter les lauriers de nombreux
groupes écologiques.
Ce type d’initiatives marginalisées mais
qui pourtant apportent une réponse
efficace
aux
préoccupations
communautaires sont légion dans ce
continent que l’on dit honteusement
pauvre !
Face à une méconnaissance de nos
propres ressources inventives, je crois
fortement en la nécessité d’instituer le
self-made esteem comme une discipline
que l’on enseignerait dès le bas âge
plutôt que de décourager les élans de
nos jeunes prodiges en leur faisant
croire qu’il ne peut y avoir de salut que
dans les filières classiques.
Bref, accordons-nous pour dire que
d’autres initiatives sur ce même thème
devraient être entreprises afin d’élargir
le débat et de trouver réponses à toutes
les interrogations qu’il suscite.
*Consultante en communication
Mamadou
Ndao
Juriste
Minielle Tall
Consultante en
Communication
Qui a dit utopique?
C’est sans tambours ni gros sous
qu’Ouestaf, nous a gratifiés d’une
rencontre riche d’enseignements ce samedi
17 mai 2008 au Café de Rome.
D’aucuns
pourraient
croire
utopique
d’organiser de tels débats, un samedi et, de
surcroît, sur un thème aussi peu débattu,
presque « aérien » comme disait un invité
avant l’amorce des débats !
Et justement, c’est bien parce que les
quelques douzaines d’âmes
d’âm
réunies dans
cette salle cherchaient à en apprendre
davantage sur un secteur émergent
(entreprenariat
social)
qu’une
telle
entreprise a été bien inspirée et qu’il est
maintenant fondamental de systématiser de
tels fora…tous les samedis du mois,
pourquoi pas ?
Quant à l’équipe d’Ouestaf, je crois qu’un
grand merci leur est dû. Car pour une
première, c’était décidément une belle
consécration !
Longue vie à cette initiative et aux
perspectives pour l’entreprenariat social
qu’elle nous offre et que nous aurions
auri
tort
de ne pas exploiter.
Gardons espoir que les banquiers,
universitaires,
responsables
d’ONG,
directeurs d’école, étudiants… présents à la
rencontre du 17 mai dernier sauront relever
le défi et nous valoir, tout au long de
l’année le plaisir d’assister
d’assist
à des
manifestations aussi stimulantes.
M.T
Page 4 sur 8
Du social à L’économie
Le Cahier du Forum Ouestaf
?
Par Ibrahima.S.Dankoco*
L’entreprenariat social traduit un
acte d’entreprenariat permettant de
faire tomber les barrières à l’entrée
des marchés pour la population à
faibles revenus. S’agit-il d’une
nouvelle prise de conscience
(marketing) ou simplement d’un
souci d’équité pour ces populations,
vivant en marge des marchés
importants du monde ?
Difficile de trancher mais tenons nous
en aux explications données par les
tenants de l’émergence d’un nouveau
paradigme de l’entreprenariat dans
un monde caractérisé par la
domination d’un modèle libéral.
L’entreprenariat social ne saurait se
réduire à l’économie sociale et
solidaire, l’orientation économique
étant ici un mobile essentiel de
l’action de création d’entreprise. Il
ne s’agit pas de régler uniquement
des problèmes sociaux et
environnementaux ; il est
fondamentalement question de
résultats économiques.
Les relations économiques ont
supplanté les relations sociales, dans
la plupart des sociétés du monde.
Ainsi, beaucoup de gratuités sociales
sont devenues payantes.
Tous les besoins sociaux sont
concernés par cette évolution
(Cuisine, Logement, Transport,
Education, etc.).
La recherche de l’efficacité
économique par la croissance et les
économies d’échelle a conduit à
réduire au maximum le social au
profit de l’économique.
Le calcul économique (coût/
avantage) est devenu l’instrument de
décision par excellence, en matière
d’allocation des ressources.
On peut considérer comme entrepreneur
social cette dame qui crée un service de
placement et de soutien en ville aux
domestiques en mal de repères.
Les services d’une société
soci
d’intérim ou
de GRH leur est inaccessible.
L’entreprenariat social (éthique sociale)
s’oppose à l’entreprenariat économique
(éthique économique, utilitariste).
Ainsi, dès que la motivation de
l’entrepreneur est à dominante sociale
ou sert une cause sociale
so
avérée,
l’action de création d’entreprise revêt
un caractère social et non
« principalement » économique.
Professeur Ibrahima Samba
Dankoco
UCAD
des expériences, c’est l’idée elle-même
elle
et son impact social.
Par rapport à un contexte donné,
l’innovation peut être une innovation de
rupture ou une innovation par
transposition (Micro-finance).
(Micro
Compte
tenu
de
ce qui précède, on
o peut
Peut
Peut-ont
alors considérer que toutes les
retenir plusieurs exemples
problématiques de l’entreprenariat
« d’entreprenariat social » au Sénégal :
économique se posent aussi à
finance, micro-détail,
micro
microl’entreprenariat social : la question de la micro-finance,
jardinage
avec
les
femmes
;
la
micro
microtaille de l’entreprise, l’absence d’un
téléphonie
est
un
exemple
:
Seddo,
IZI au
statut juridique spécifique, etc.
Sénégal.
Ces questions ne sont pas encore
Avec ces exemples, on est tenté d’opposer
tranchées mais méritent d’être
micro-entrepren
entreprenariat social à macro ou
débattues pour faire avancer la
méso-entreprenariat
entreprenariat social. L’approche
réflexion.
micro permet de fractionner l’offre pour
Les bénéficiaires en entreprenariat
l’adapter à un segment particulier du
social sont à la fois l’entrepreneur luilui
marché.
même et les consommateurs visés.
La problématique sociale en matière
Mais du fait de la puissance de la
d’entreprenariat semble donc se réduire à
nouvelle offre, lorsque l’expérience
(adaptatio de l’offre
réussit, une grande entreprise pourrait la un fractionnement (adaptation)
qui
s’oppose
à
la
recherche
d’une
récupérer pour exploiter
exploite le segment de
dimension
conduisant
aux
économies
de
marché concerné notamment en utilisant
coût.
de petits exploitants comme relais.
Sans prétendre réaliser un consensus sur On peut dés lors s’attendre à ce que cet
la définition, nous avons préféré adopter « entreprenariat social » soit aux
antipodes des économies de coûts et,
une approche marketing de la notion
ainsi, expose les bénéficiaires à des coûts
d’entreprenariat social en espérant
élevéss pour compenser des pertes
qu’elle traduit correctement ce
La fonction de production s’enrichit
paradigme nouveau de l’entreprenariat. d’efficacité et d’efficience économiques.
Le bénéfice recherché ici n’est pas
du « besoin de socialiser » et devient
Tous les exemples cités ici partent
économique mais social, avec un accès du
alors : Y= F (K, L, S)
d’une idée : les besoins sociaux sont
divers et aussi indispensables les uns que plus grand nombre aux commodités de la
Avec : K=capital ; L= travail ;
vie moderne, dans une société où les
les autres : consommer, communiquer,
S= Socialisation
travailler. L’offre des produits servant à relations sociales restent encore vivaces
(tiers-monde,
monde, pays du Sud).
L’entreprenariat ne pouvait ainsi être les satisfaire est souvent trop
Un
paradoxe
peut alors être constaté
cons
dans
envisagé, que selon une perspective
sophistiquée dans les marchés officiels
la logique de l’accès qui mène aux
économique.
(légaux) pour être adaptée aux moyens
surcoûts.
Ce qui conduit inévitablement à la
des pauvres et des exclus de la société.
mise à l’écart de nombreuses
Pour chaque exemple, une innovation En effet, c’est une baisse des coûts qui
devrait permettre la massification de
populations eu égard aux contraintes a permis d’opérer l’ajustement qu’il
l’offre et non le contraire.
posées par les divers marchés de
était nécessaire de réaliser pour établir
Cependant, les mécanismes d’adaptation
biens et services.
le lien avec la demande spécifique des
On a souvent rétorqué aux objecteurs non consommateurs relatifs (ou demande dans beaucoup de cas permettent d’agir
sur les prix nominaux au consommateur
sociaux qu’en matière d’affaires, il
sociale).
grâce à un ajustement à l’intérieur du mix
n’y a point de sentiment. Pourtant,
Il peut être gênant toutefois, de
marketing.
l’homme n’est pas que rationalité, il constater que dans certains cas, l’idée
Un équilibre global est assuré dans la
ait été celle d’une entreprise formelle
est envahi par des sentiments qui
perception de l’offre qui arrive à opérer
ayant pignon sur rue !
donnent un sens à sa vie.
(Suite page 5)
Mais ce qui est important dans chacune
C’est tout le marketing mix d’un
produit qui est concerné par
l’innovation conduisant à
l’entreprenariat social.
Page 5 sur 8
Du social à… (Suite de la page 4)
une compensation acceptée par le
consommateur
(La qualité s’ajuste ainsi au prix et à
la distribution).
Mais le simple fait de fractionner
l’offre peut suffire pour masquer
L’effet-prix.
Il peut arriver enfin que le
consommateur soit conscient des
surcoûts et des prix qui en résultent,
mais accepte de payer une prime à
l’adaptation (Seddo, IZI dans la
téléphonie ; microcrédit).
Avec l’idée d’entreprenariat social,
l’homme est remis au centre des
théories et modèles économiques. De
cette manière, on ré-humanise les
rapports économiques.
On considère alors que c’est l’homme
qui crée la valeur ; mais que, sans
accès à la valeur, il ne peut pas jouir
de toute sa dignité.
La fonction de production s’enrichit du
« besoin de socialiser » et devient
alors :
Y= F (K, L, S) Avec : K=capital ;
L= travail ; S= Socialisation
La base de consommation s’élargit
donc et l’économie trouve de
nouvelles opportunités de croissance.
En effet, l’essentiel des nonconsommateurs du monde se trouvent
dans le tiers-monde. Leur accès aux
marchés ne pourrait qu’être bénéfique
à la croissance mondiale.
Ainsi c’est la fonction de production
du monde qu’il serait nécessaire de
modifier pour mettre l’économie
mondiale sur une nouvelle rampe de
croissance.
Cela permettrait en même temps de
régler la question de la pauvreté et du
développement durable.
Grâce à l’entreprenariat social, le
social devient un facteur de
production dans la chaîne de valeur
d’un bien économique.
A ce propos, il faut que l’on
comprenne que depuis les années 50 la
valeur a quitté l’entreprise pour
s’installer dans l’espace marché.
D’où la nécessité de prendre en
compte les caractéristiques de
l’environnement de marché dans la
fonction de production et de vente des
entreprises.
Toute entreprise qui intègre le niveau
faible des revenus des populations
pauvres, dans sa fonction de
production et de vente, fait donc
œuvre d’entreprenariat social ; car,
grâce à cela, elle arrive à briser les
barrières qui maintiennent ces
populations hors des marchés
classiques du bien (service) considéré.
Le Cahier du Forum Ouestaf
?
De cette manière, en considérant les
masses pauvres des pays sous développés,
on pourrait avoir quelques espoirs de voir
se développer dans ces pays de véritables
marchés pour les entreprises.
Pour améliorer l’économie des pays du
tiers monde, il serait nécessaire donc de
repenser les bases même de ces
économies notamment dans le sens d’un
entreprenariat social permettant
d’impliquer les populations dans les
structures d’offre et de demande.
IL s’agira de réinventer l’activité et les
produits pour les rendre accessible au plus
grand nombre d’africains. Cela passera par
une appréciation plus juste et plus réaliste
du fonctionnement des sociétés visées.
IL serait nécessaire pour réussir un tel pari
de réformer les législations nationales des
pays pour plus d’ouverture et de
souplesse, et les adapter aux conditions
qu’impose cet « entreprenariat ».
Ainsi, il est urgent de réformer le
commerce africain dans le sens d’une plus
grande adaptation aux conditions de vie et
d’existence des populations.
De ce point de vue, on peut considérer la
vente ambulante, dans sa forme actuelle
et son évolution, comme un type
d’entreprenariat social, dans la mesure où
la distribution traditionnelle formelle est
rendu accessible à tous.
Pourtant, les vendeurs ambulants ne sont
pas reconnus dans la législation qui tente
de formaliser tout le commerce sous la
pression de la Banque Mondiale.
C’est tout le marketing mix d’un produit
qui est concerné par l’innovation
conduisant à l’entreprenariat social.
Le produit (en entreprenariat social) est
différent de celui du marché traditionnel.
Il s’agit donc d’une innovation produit
visant à élargir le marché à d’anciens non
consommateurs relatifs (Clayton
Christensen) du produit de référence.
La valeur des produits de l’entreprenariat
social est inférieure à celle des produits
des marchés d’origine.
C’est ainsi que leur compétitivité dans les
marchés originels est minée par leur
caractère dérivé et simplifié. (Exemple :
du terranga et du Diamono)
Le fractionnement de l’offre augment les
coûts de transaction.
Toutefois, la simplification de l’offre
permet de compenser la hausse des coûts
pour donner, dans certains cas, des prix
largement plus faibles que ceux du produit
originel.
Les conditions de distribution et de
circulation des biens et services changent
aussi radicalement.
La commodité de l’accès conduit dans
beaucoup de cas à des situations
d’illégalité et de non conformisme par
rapport à la législation en vigueur.
Les formes de communication adoptées
sont révolutionnaires et reposent,
généralement, sur l’interpersonnel et
le bouche à oreille.
La diffusion de l’information se fait
avec une grande efficacité auprès des
personnes et groupes concernés.
Organiser la promotion de
l’entreprenariat social en Afrique
constitue un enjeu de taille pour le
développement. Ainsi, nous pensons
que l’expérience de ASHOKA,
(organisation créé par l’Américain Bill
Drayton, en Inde en 1984) est à
encourager et à répliquer partout où
c’est nécessaire.
Il faut tout de même poursuivre et
approfondir l’idée même
d’entreprenariat social, pour en faire
un instrument de développement
économique et non seulement
l’expression d’actions d’éclat ou des
exploits exceptionnels réalisés par des
personnages rares dans leur capacité
d’innovation et d’imagination. Il serait
bon de ramener l’idée à la hauteur de
l’homme ordinaire pour en faire une
source d’inspiration fertile en vue de
résoudre les problèmes de survie et
d’émancipation des hommes et des
femmes qui peuplent le continent.
A travers cette contribution, nous
avons voulu lancer un certain nombre
de débats à propos de l’entreprenariat
social. Nous espérons que quelques
réactions nous permettrons
d’approfondir et d’élargir le débat
ainsi posé.
*Professeur agrégé, UCAD
Merci... et à la prochaine!
L’équipe du Forum Ouestaf remercie toutes
les personnes qui ont d’une manière ou
d’une autre contribué à la tenue de la
première édition du Forum qui a eu lieu le
Samedi 17 Mai 2008.
Tout d'abord, les panélistes, El Hadji
Alioune Diouf, Ibrahima Samba Dankoco et
Coumba Touré ainsi que le modérateur,
Mamadou
Khoulé
pour
leur
apport
inestimable à la richesse et à la qualité des
débats.
Nos remerciements vont également à tous
les invités ayant répondu présent et ayant,
par leur participation, enrichi les échanges.
Nous ne saurions oublier de remercier
doublement, ceux qui après avoir répondu
présent au Forum, ont encore pris de leur
temps et de leur expertise pour participer à
la rédaction des présents Cahiers.
A vous tous, Ouestaf dit MERCI et vous
donne rendez-vous au prochain Forum qui
portera sur les TICs et les PME/PMI.
Ainsi renaîtra l'Afrique!
L’équipe Ouestaf.
Le Cahier du Forum Ouestaf
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Et pourquoi ce débat ?
Difficile de cerner avec
exactitude un concept qui évolue
et pour la définition duquel il n’y
pas encore d’unanimité. Plusieurs
définitions existent, selon l’usage
qu’on fait du concept ou alors les
appréhensions qu’il suscite.
Pratique née en Inde dans les
années 80 selon les promoteurs
de cette nouvelle idée, encore
dénommée Innovation Sociale,
elle a ensuite été théorisée par
des chercheurs aux Etats Unis.
Aujourd’hui en Europe et ailleurs
dans le monde développé, c’est
une discipline enseignée dans les
Universités et dans les grandes
écoles de management, ou
certaines ont ouvert des chaires
spécialement dédiées à cette
discipline. C‘est dire l’importance
qu’elle a acquise au fil des ans.
Dans le continent qui a le plus
besoin de changements, les
entrepreneurs sociaux ont-ils
conscience de leur existence et
de leur rôle ? Faute de
conceptualisation ou de
vulgarisation, certains se
demandent même « c’est quoi un
entrepreneur social ? ».
L’objectif de cette première
édition du Forum Ouestaf c’est de
poser le débat à partir d’une
double perspective, d’abord
l’entreprenariat et ensuite le
changement ou l’innovation
sociale.
A partir de ces deux paramètres,
il s’agira d’abord de dire qui est
entrepreneur social et qui ne
l’est pas. Ensuite et partant de
là, répondre à plusieurs autres
interrogations :
Comment concilier des objectifs
sociaux et des objectifs
économiques (profit)
traditionnellement jugés
distants ?
L’entreprenariat social serait-il
un compromis entre plusieurs
logiques antagonistes ? Peut-il
déboucher sur un nouveau modèle
économique?
Peut-il enfin être la clé aux
nombreux défis qui se posent à
nos sociétés dans la bataille du
développement ? Peut-il être
créateurs d’emplois, être
générateur de richesses?
Bref, dans le contexte actuel
d’inflation généralisée et de crise
multiforme et multisectorielle,
l’entreprenariat social peut-il
être une réponse aux défis qui se
posent à nos nations et à nos
sociétés?
Pour sa première édition, Le
Forum Ouestaf a posé le débat !
L’entreprenariat social à l’école
Par Yakhya Ba*
Le social entrepreneurship (entreprenariat social est un concept d’origine Anglo-Saxon.
C’est un concept qui a commencé à attirer l’attention depuis l’exemple de la Grameen
Bank de Mouhamed Yunus (prix Nobel de la paix en 2006) au Bengladesh au début des
années 90.
Si l’entreprenariat social a été initié dans le micro crédit avec la Grameen bank, il est loin
aujourd’hui de se limiter à la seule activité bancaire (la micro finance en particulier). Il
touche tous les secteurs économiques.
Cet intérêt croissant pour l’entreprenariat social émane du caractère novateur du concept
dans son traitement et son apport pour ce qui est des problèmes sociaux tels que le
développement durable, le chômage, les inégalités dans l’accès aux denrées de premières
nécessités, la santé, l’exclusion sociale et la liste est encore longue. L’impact socio
économique de ce type d’entreprenariat à favorisé donc la multiplication d’entreprises
« sociales » sous forme de projets, associations, coopérative etc. Ces entreprises de type
nouveau utilisent le plus souvent les mécanismes traditionnels du marché. Suffisant pour
que des chercheurs s’intéressent à ce phénomène.
Ainsi, le canada fait parti l’un des premiers pays à prendre très au sérieux l’impact positif
en terme d’alternative pour une croissance économique que pourrait procurer
l’entreprenariat social. Très tôt donc, le gouvernement canadien a mis sur place le
Canadian Center for Social Entrepreneurship (CCSE) pour mener des recherches, donner
l’info, et régler des problèmes liés à l’entreprenariat social. Et la CCSE sera logée dans la
faculté de commerce de l’Université d’Alberta à EDMONTON.
Aux Etats-Unis d’Amérique, l’une des plus grands business school au monde va s’intéresser
le premier au concept. Il s’agit de la HARVARD Business School qui lance en Janvier 1993 un
programme de recherche et d’enseignement, sur l’entreprenariat social, dénommé : Social
Entreprise Initiative. Elle sera suivie dans cette lancée par la plupart des universités
américaines d’Oxford à New York en passant par Columbia et Yale.
En Europe et plus particulièrement en France ce n’est qu’un peu plus tard que le concept
d’entreprenariat social intègre la sphère universitaire.
Néanmoins, une place très importante lui a été attribuée avec notamment l’ESSEC qui a été
la première école de management française à créer en janvier 2003, un pôle d’expertise
sur le thème de l’entreprenariat social. La CHAIRE entreprenariat social de l’ESSEC
s’impose aujourd’hui comme l’une des meilleures dans le monde. C’est un programme
d’enseignement et de recherche appliquée dans la création d’organisations à finalité
sociale ; dans la stratégie et le management en économie sociale ; et dans la responsabilité
sociale et le développement de l’entreprise
En Belgique, la prise en compte de l’entreprenariat social dans les programmes de
l’enseignement supérieur s’est fait un peu plus tôt qu’en France.
En 2000, le centre d’économie Social Belge, en partenariat avec l’université de Liège et le
groupe financier coopérative CERA, crée la CHAIRE CERA qui est un programme
d’entreprenariat et de Management en économie sociale.
L’ensemble de ces programmes universitaires mis en place un peu partout dans le monde
ont pour objectif commun une meilleure rentabilisation de la pratique de l’entreprenariat
social.
Une comparaison du contenu des différents programmes montre que la perception que
l’on a de l’entreprenariat social et les attentes qu’on en a diffèrent selon les zones, et la
culture entrepreneuriale. Ce qui est probablement à l’origine du caractère polysémique du
concept.
Maintenant si en Amérique et en Europe les outils pour le bon développement de
l’économie sociale sont entrain d’être mis en place, qu’en est il pour le continent africain ?
Les plus optimistes diront certainement que la pratique de l’entreprenariat social est bien
réelle.
Mais il faut cependant convenir que jusqu'à présent aucun programme de recherche aucun
pole d’enseignement d’initiative africaine n’a été constaté dans nos universités. Les seuls
programmes qui s’intéressent à ce type d’entreprenariat sous nos cieux sont du ressort
exclusif d’organismes venus d’ailleurs. Les programmes d’encadrement et de renforcement
de capacité de ces organismes sont conçus et mis en œuvre sans que nos réalités socio
économiques ne soient adaptées à ces programmes « importés » même s’il est coutume de
dire que tout programme qui réussi peut être copié partout. Seulement comme évoqué plus
haut l’entreprenariat social à ses spécificités et pour que son efficacité soit réelle il faut
absolument qu’il réponde à des besoins disparates pour une communauté réduite
contrairement aux programmes structurelles de développement jadis connus. Il serait
intéressant, donc, pour une fois dans l’histoire que nos chercheurs ne soient pas dans la
position d’attente et de prendre les choses en main pour doter nos universités et écoles de
commerces de programmes qui permettent la mise en place de chaire de formation
professionnelle dans le domaine de l’économie sociale et solidaire compte tenu des besoins
et les spécificités de l’entreprenariat social « africain » et Sénégalais en particulier pour
que celui-ci devienne le catalyseur du développement.
Assistant Marketing Ouestaf*
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Le Cahier du Forum Ouestaf
De l’entreprenariat social en Afrique de l’Ouest
Par El. Hadji Alioune Diouf*
Malgré le formidable développement
des forces productives du capitalisme
triomphant, une partie importante
du monde est plongée dans une
pauvreté révoltante. Et en dépit des
progrès technologiques sans
précédent,
la pauvreté caractérise la partie la
plus importante du monde. La
répartition du revenu mondial
montre que la moitié de la
population mondiale vit avec moins
de 5% du revenu mondial. Cette
pauvreté est inégalement répartie
dans le monde car elle est surtout
présente en Asie et en Afrique
subsaharienne.
C’est pourquoi l’Afrique de l’Ouest
n’est pas épargnée.
Malgré toutes les tentatives connues
et répertoriées par toute la
littérature économique, la pauvreté
continue de se répandre dans les
centres urbains et surtout dans le
monde rural. Face donc à l’échec des
solutions préconisées, des
mécanismes de survie ont été
imaginés par les populations dans le
cadre de l’économie populaire,
sociale et solidaire.
Dans ce sens, l’entrepreneuriat
social est une innovation sociale
apparue dans les années 70 en
Amérique, Europe, Asie et surtout
Afrique ; innovation sociale qui ne
peut être définie qu’à partir de la
culture entrepreneuriale et de
l’élément social qui est l’élément
fondamental de la démarche ; et
enfin innovation sociale qui a des
principes qui déterminent sa ligne de
conduite et qui fait face à des défis
importants pour son développement.
employé.
Pour le mot entrepreneurial, FORTIN pense
qu’il s’applique à plusieurs réalités qui vont
de la création à la gestion d’une entreprise
donc du démarrage d’une activité
entrepreneuriale. Il peut s’agir aussi des
interventions sociales et innovatrices
innovatr
permettant de saisir des occasions
d’affaires, et même parfois de recherches
d’emplois pour les sans-emplois.
sans
El .H. A. Diouf, lors du Forum
Cette première étape franchie, qu’est ce
que l’entrepreneuriat social ? Il y a
beaucoup de définitions de cette notion. Il
n’y a pas une définition générale reconnue.
Les italiens, comme les américains, les
anglais et les français définissent
l’entrepreneuriat de manière relativement
différente. Néanmoins cette notion
présente partout une double perspective :
entrepreneuriat et social.
so
La première facette, l’entrepreneuriat fait
référence au démarrage d’entreprise ; et
également aux innovations sociales
permettant d’atteindre des objectifs
d’affaires.
La deuxième facette est la composante
sociale qui est la mission centrale qui
distingue
tingue l’entrepreneuriat social et qui
oriente l’ensemble des décisions.
Ainsi donc le concept d’entrepreneuriat
social est très important quand il met en
Pour cerner la notion
exergue la propension à agir contre les
problèmes auxquels les populations sont
d’entrepreneuriat social, il est utile
de commencer par préciser ce qu’est confrontées, surtout quand ces problèmes
sont ignorés par les puissances publiques.
la culture entrepreneuriale.
Selon Muhammed YUNUS, prix Nobel 2006,
Paul FORTIN, de passage à Dakar en
toute « initiative innovante destinée à
2004, et lors d’une conférence
venir en aide à des individus peut-être
peut
publique sur la culture
qualifiée d’entrepreneuriat social ».
entrepreneuriale soutenait que le
Donc la réponse à des besoins sociaux
soc
et
mot entrepreneurial pouvait
l’innovation sont des éléments importants
s’appliquer à plusieurs réalités.
et même déterminants dans la définition
Selon FORTIN, en parlant de culture
du concept.
dans l’entrepreneuriat on fait
Pour Coumba TOURE, Représentante
référence à des attitudes et des
Régionale Ashoka Sahel on appelle
valeurs comme l’autonomie, la
entrepreneuriat social l’action des
responsabilité, la créativité et la
« individus qui réagissent et essaient de
solidarité ; à des connaissances, des trouver des solutions à des problèmes de
compétences de savoir-faire, de
leur communaut ».
savoir-être et de savoir-agir
Cette définition est conforme à la tradition
appropriées pour relever les défis
chez Ashoka
As
où on estime que les
comme entrepreneur, associé ou
entrepreneurs sociaux sont «des individus
qui proposent des solutions innovantes aux
problèmes sociaux les plus cruciaux de
notre société. Ils proposent des idées
neuves capables de provoquer des
changements à grande échelle ».
L’entrepreneuriat
entrepreneuriat social est donc une
initiative privée au service de l’intérêt
collectif dont la finalité sociale est
supérieure ou égale à la finalité
économique.
L’entrepreneuriat social combine 3
dimensions :
Un projet économique quand par exemple
il s’agit
git de répondre à une demande là où
il y a défaillance des services publics
Une finalité sociale dès qu’il faut lutter
contre la pauvreté, la marginalisation et
l’exclusion, valoriser un territoire, assurer
une équitable rémunération aux
producteurs.
Une gouvernance
ouvernance participative dans la
mesure où le processus de prise de
décision n’est pas lié à la propriété du
capital.
L’ambition au niveau de l’entrepreneuriat
social est d’entreprendre autrement et de
répondre autrement.
Les entrepreneurs sociaux sont des
d
innovateurs sociaux.
Dans la classification des entrepreneurs
sociaux, on distingue des critères
économiques et des critères sociaux selon
l’OCDE.
Parmi les critères économiques le premier
critère retenu sera la production de biens
et services de manière
manièr continue.
Au niveau des critères sociaux, il y a lieu
de retenir l’objectif explicite de service à
la collectivité, le pouvoir de prise de
décision non basé sur la détention de
capital et la limitation de la distribution
des bénéfices.
Une des différences essentielles entre les
entrepreneurs sociaux et les entrepreneurs
économiques réside dans le traitement des
bénéfices. Chez les entrepreneurs
économiques, l’activité de l’entreprise se
traduit par la distribution des bénéfices
aux actionnaires, le bénéfice étant
considéré comme une fin. Tandis que les
entrepreneurs sociaux considèrent le
bénéfice comme un moyen qui doit être
réinvesti pour le développement des
capacités de l’entreprise.
Pour illustrer nos propos nous donnerons en
exemple ASHOKA et SONGAI.
Bill DRAYTON, créateur de ASHOKA est le
véritable pionnier de l’entrepreneuriat
social. En effet, ASHOKA, qui a été créé en
Inde au début des années 80, cherche à
identifier et financer des individus qu’on
peut
considérer comme innovateurs sociaux.
socia
Aujourd’hui ASHOKA est présente dans 60
pays et compte plusieurs entrepreneurs
sociaux qui interviennent dans
(Suite
Suite page 8)
8
Le Cahier du Forum Ouestaf
Page 8 sur 8
Entreprenariat… (Suite de la page7)
l’éducation, la santé publique,
l’environnement, la pêche et le
développement économique.
Monsieur Aly Haidar de l’Océanum est
considéré comme fellow ASHOKA depuis
2002, donc comme entrepreneur social
dans le domaine de la gestion marine. Il
a comme ambition de promouvoir le
repos biologique et la gestion durable
des ressources halieutiques par la
création de plusieurs parcs marins.
Fondé en 1985, le projet Songhaï était
au début un centre de formation pour
jeunes béninois rejetés par l’école.
Aujourd’hui c’est un réseau national de
fermiers, de centres informatiques, de
centres de formation agricole. SONGHAI
c’est aussi un centre de réhabilitation
de l’environnement et un système de
crédit.
Son fondateur est Monsieur Goodfrey
Nzamujo. Dans la charte fondatrice, il
est écrit que Songhaï a pour ambition de
favoriser l’émergence d’une nouvelle
société fondée sur une culture
d’entreprise socio-économique durable,
valorisant les ressources locales et
capable de s’insérer dans l’économie
internationale.
Dans les pays sous-développés et
particulièrement en Afrique de l’Ouest
plusieurs défis doivent être relevés pour
donner à l’entrepreneuriat social l’élan
qu’il lui faut pour être à la hauteur des
ses ambitions. Ces défis sont :
Créer un environnement juridique
favorable à la création d’entreprises
sociales
Développer de manière urgente la
sensibilisation à l’entrepreneuriat social
au niveau des professionnels de la
création d’entreprises, au niveau des
marchés financiers et des acteurs
sociaux du secteur privé et du monde
rural
Créer des dispositifs d’appui à la
création d’entreprises sociales
Appuyer les entreprises sociales dans
des secteurs à fort potentiel de
créations d’entreprises, d’activités
économiques et sociales, d’emplois dans
les secteurs des services, des droits de
la propriété intellectuelle, de la pêche,
de l’agriculture, de la santé publique,
de l’environnement, de la promotion
économique, de l’éducation et de
l’artisanat.
Encourager les entrepreneurs sociaux
dans le sens du renforcement de
l’autonomie des populations dans le
développement local
Appuyer particulièrement les
entrepreneurs sociaux qui interviennent
dans le domaine de l’apprentissage.
Le cadre normatif en question
Par Mamadou Ndao*
L‘entrepreneuriat social est une notion
relativement jeune qui a fait son
apparition en Amérique du Nord et en
Europe dans les années 1990. Sa
définition actuelle ne fait pas encore
l’objet de consensus.
Certains chercheurs en général,
tentent une définition théorique qui
distingue l’entrepreneuriat social des
autres structures de l’économie
solidaire (qui combinent un projet
économique et une finalité sociale) et
celle de l’économie sociale (alliant un
projet économique et une gouvernance
participative).
Sous certains cieux, comme au Québec,
en Espagne… pragmatisme oblige, la
réalité de l’entreprise sociale se
présente sous des formes juridiques
assez variées, allant des mutuelles aux
coopératives, des entreprises
collectives aux organismes
communautaires à but non lucratif
(ONG, Fondations, etc.)
Pour les Africains, le débat conceptuel
sur l’entreprenariat social n’est pas
encore posé, on semble même
l’évacuer, du moins sous la forme
d’une opposition doctrinale, (il y a peu
d’écrits).
Mais en pratique, l’entrepreneuriat
social se comprend comme un
ensemble d’activités convergentes
vers des valeurs qui animent les
initiatives socio économiques portées
par des individus et des groupes. Le
but visé étant, pour ces entrepreneurs
de type nouveau, de régler les
questions de pauvreté et d’exclusion,
de droits humains, au profit de
certaines franges de la population.
En cela, on peut supposer que
l’initiative privée doit en être le
moteur pour porter une innovation
susceptible de produire un bien ou un
service marchand.
Cependant un certain nombre de
questions demeurent pour ces Africains
engagés aujourd’hui dans un processus
d’intégration régionale, et surtout avec
des normes juridiques qui ont tendance
à s’uniformiser.
Vu sous ces deux angles, les formes
juridiques que devraient ou pourraient
revêtir les « entreprises sociales » et le
statut des « entrepreneurs sociaux » ne
sont pas sans poser des interrogations.
La plupart des dynamiques novatrices,
dans les domaines aussi divers que la
micro finance, l’éducation, l’habitat,
la communication… sont souvent
enclenchées par le mouvement
associatif dans ses différentes
déclinaisons (coopératives, mutuelles,
etc.).
Or, le statut d’association est un vieil
héritage de la loi française de 1901.
Ce dernier qui est en vigueur dans la
plupart des pays francophones
d’Afrique n’autorise ces associations à
mener que des activités à but non
lucratif (ABNL). La question qui se
pose alors est de savoir - face à
l’opportunité de booster le
développement local qu’offre
« l’entreprenariat social » - comment
concilier l’interdiction d’activités à
but non lucratif et « l’entreprenariat
social » qui, dans son acception la plus
large suppose aussi l’exercice
d’activités marchandes complètement
inscrites dans l’économie de marché.
N’y a-t-il donc pas lieu de promouvoir
une nouvelle réglementation de
« l’entreprise sociale » dans le cadre
de l’Organisation pour l’Harmonisation
du Droit des Affaires en Afrique,
OHADA pour faire conformer son
éventuel statut « d’entreprise » et sa
finalité sociale - et au besoin
d’inclusion, de gouvernance et de
développement ?
Le statut d’association ne requiert-il
pas aujourd’hui d’être mieux légiféré
pour lever les obstacles liés
essentiellement à l’ambigüité
entretenue entre l’activité à but non
lucratif, et l’activité de production de
biens et services marchands, l’une et
l’autre constituant des leviers pour
régler la question de l’emploi (ou de
l’auto-emploi) et la mobilisation de
l’épargne, tout en stimulant l’action
citoyenne sociale ? Au Sénégal par
exemple on désigne souvent ce
phénomène par secteur informel dans
un langage fourre tout. Et
l’entrepreneuriat social subit de ce
point de vue les contraintes de la
bureaucratie, et de la méfiance à
l’endroit de ce tiers secteur à qui on a
du mal à trouver un statut juridique
convenable comme l’on fait certains
pays du Nord.
L’initiative de l’APIX qui vise à
faciliter la création d’entreprises dans
un temps très réduit pourrait prendre
en compte cette perspective, mais
pour l’instant ne règle pas la question
de la rigidité du cadre législatif.
Il semble alors que la réforme du
cadre législatif soit aujourd’hui, une
urgence et un préalable.
A ce titre des leçons peuvent être
tirées de l’expérience des radios
communautaires dans leur domaine,
qui ont pu réussir cela dans la plupart
des pays, et ce à l’échelle mondiale
par l’adoption d’une « charte de
valeurs ».
*Juriste, coordonnateur de Média
Dev Africa
Email: [email protected]
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