N° d'ordre : ANNEE 2016 THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1 FACULTÉ DE MEDECINE sous le sceau de l’Université Européenne de Bretagne THÈSE EN VUE DU DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN MEDECINE présentée par Jessica PEDUZZI-RAT Née le 12 juillet 1987 à Saint-Brieuc. Évaluation des besoins en formation des médecins généralistes en Ille-et-Vilaine sur l'Anorexie mentale à partir d'un état des lieux des pratiques des médecins généralistes : du diagnostic au suivi et de leur coordination avec les différentes structures de soins Thèse soutenue à RENNES le 4 octobre 2016 devant le jury composé de : Ronan THIBAULT PU-PH - CHU de Rennes / Président Dominique DRAPIER PU-PH - CHU de Rennes / Juge Didier MYHIE Maitre de conférence - CHU de Rennes / Juge Richard LAUVIN Praticien – Clinique Saint Yves de Rennes / Directeur de thèse David BRIARD Praticien – CHU de Rennes / Co-directeur de thèse 1 PROFESSEURS DES UNIVERSITES – PRATICIENS HOSPITALIERS NOM Prénom AFFECTATION ANNE-GALIBERT Marie Dominique Laboratoire de Biochimie et biologie moléculaire BELAUD-ROTUREAU Marc-Antoine Service de cytologie génétique et biologie cellulaire BELLISSANT Eric Pharmacologie BELLOU Abdel Fédération d'accueil et de traitement des urgences BELOEIL Hélène Anesthésiologie et Réanimation Chirurgicale, médecine d'urgence BENDAVID Claude Laboratoire de Biochimie et biologie moléculaire BENSALAH Karim Service d'Urologie BEUCHEE Alain Pédiatrie Génétique Médicale BONAN Isabelle Médecine physique et de réadaptation fonctionnelles BONNET Fabrice Département de médecine de l'adulte - Service d'endocrinologie BOUDJEMA Karim Département de chirurgie viscérale BOUGET Jacques Fédération d'accueil et de traitement des urgences BOURGUET Patrick Service de Médecine Nucléaire - CRLCC BRASSIER Gilles Neurochirurgie BRETAGNE Jean-François Service des maladies de l'appareil digestif BRISSOT Pierre Service de maladies du foie 2 CARRE François Médecine du Sport CATROS Véronique Biologie cellulaire CHALES Gérard Rhumatologie CORBINEAU Hervé Chirurgie Thoracique et Cardio Vasculaire - C.C.P. CUGGIA Marc Biostatistiques, Informatique Médicale et technologies de la communication DARNAULT Pierre Anatomie Organogénèse DAUBERT Jean-Claude Cardiologie DAYAN Jacques Pédopsychiatrie - Centre Médico-Psychologique - 154 rue de Chatillon Rennes DAVID Véronique Laboratoire de génétique moléculaire et hormonologie DE CREVOISIER Renaud Cancérologie et Radiothérapie - CRLCC. DECAUX Olivier Médecine Interne ; gériatrie et biologie du vieillissement DELAVAL Philippe Pneumologie DESRUES Benoît Pneumologie DEUGNIER Yves Service des maladies du foie DONAL Erwan Département de cardiologie et maladies vasculaires DRAPIER Dominique Psychiatrie d'adultes DUPUY Alain Dermatologie 3 ECOFFEY Claude Service d'Anesthésie-Réanimation Chirurgicale II EDAN Gilles Clinique Neurologique FERRE Jean Christophe Service de radiologie et d'imagerie médicale FEST Thierry Laboratoire d'Hématologie biologique et Immunologie FLECHER Erwan Service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire FREMOND Benjamin Chirurgie Infantile GANDEMER Virginie Service de médecine de l'enfant et de l'adolescent GANDON Yves Département de radiologie et d'imagerie médicale GANGNEUX Jean-Pierre Parasitologie et Zoologie appliquée GARIN Etienne Service de médecine nucléaire - CRLCC GAUVRIT Jean-Yves Service de radiologie et d'imagerie médicale GODEY Benoit O.R.L. et Chirurgie Maxillo-Faciale GUGGENBUHL Pascal Rhumatologie - Pôle Orthopédie, traumatologie, rhumatologie GUIGUEN Claude Parasitologie GUILLÉ François Directeur du CRLCC Centre Anti-Cancéreux GUYADER Dominique Hépatologie, Gastro-Entérologie HOUOT Roch Hématologie, Transfusion option Hématologie 4 HUGE Sandrine Médecine Générale HUSSON Jean Louis Chirurgie Orthopédique et Traumatologique HUTEN Denis Fédération de chirurgie orthopédique JEGO Patrick Médecine Interne ; gériatrie et biologie du vieillissement JEGOUX Franck O.R.L. et Chirurgie Maxillo-Faciale JOUNEAU Stéphane Pneumologie ; Addictologie KAYAL Samer Bactériologie-Virologie KERBRAT Pierre Cancérologie et Radiothérapie - CRLCC. LAMY DE LA CHAPELLE Thierry Hématologie Clinique CRLCC LAVIOLLE Bruno Pharmacologie fondamentale; Pharmacologie clinique LAVOUE Vincent Gynécologie obstétrique et médicale LE BRETON Hervé Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires LE GUEUT Maryannick Service de Médecine Légale et de médecine pénitenciaire LE TULZO Yves Réanimation Médicale LECLERCQ Christophe Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires LEGUERRIER Alain Département de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire LEJEUNE Florence Biophysique et Médecine Nucléaire 5 LEVEQUE Jean Gynécologie et Obstétrique LIEVRE Astrid Gastroentérologie ; Hépatologie, Addictologie MABO Philippe Département de Cardiologie et Maladies Vasculaires MALLEDANT Yannick Anesthésie-Réanimation I - SAMU 35 MEUNIER Bernard Chirurgie digestive MICHELET Christian Clinique des Maladies Infectieuses et Réanimation Médicale MOIRAND Romain Unité fonctionnelle d'Addictologie - Service d'hépato-gastro-entérologie MORANDI Xavier Anatomie - Service de Neurochirurgie MORTEMOUSQUE Bruno Ophtalmologie MOSSER Jean Biochimie et Biologie Moléculaire MOULINOUX Jacques Histologie-Embryologie-Cytogénétique MOURIAUX Frédéric Service d'ophtalmologie ODENT Sylvie Service de Génétique Médicale OGER Emmanuel Pharmacologie Clinique PERDRIGER Aleth Rhumatologie PLADYS Patrick Pôle médico-chirurgical de pédiatrie et de génétique clinique POULAIN Patrice Département de Gynécologie-Obstétrique et Reproduction Humaine 6 RAVEL Célia Nadège Cytologie et Histologie - Pôle cellules et tissus RIFFAUD Laurent Neurochirurgie ROBERT-GANGNEUX Florence Laboratoire de parasitologie et mycologie SAINT-JALMES Hervé PRISM SEGUIN Philippe Anesthésiologie et Réanimation Chirurgicale Pôle anesthésie réanimation - SAMU SEMANA Gilbert INSERM 4917 SIPROUDHIS Laurent Service des maladies de l'appareil digestif SOMME Dominique Service de médecine gériatrique LA TAUVRAIS SULPICE Laurent Chirurgie Générale TARTE Karin INSERM 4917 TATTEVIN Pierre Maladies infectieuses, maladies tropicales THIBAULT Ronan Nutrition THIBAULT Vincent Bactériologie ; Virologie THOMAZEAU Hervé Chirurgie Orthopédique et Traumatologique TORDJMAN Sylvie Pédopsychiatrie - Addictologie VERHOYE Jean-Philippe Département de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire CCP VERIN Marc Neurologie 7 VERGER Christian - (Professeur émérite) Médecine et Santé au travail - Centre antipoison VIEL Jean-François Epidémiologie, économie de la santé et prévention VIGNEAU Cécile Service de néphrologie VIOLAS Philippe Chirurgie Infantile - Pôle pédiatrique médico-chirurgical et génétique clinique WATIER Eric Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique ; Brûlologie WODEY Eric Service d' Anesthésie-Réanimation chirurgicale II 8 MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES –PRATICIENS HOSPITALIERS NOM Prénom AFFECTATION AME-THOMAS Patricia Immunologie AMIOT Laurence Hématologie BARDOU-JACQUET Edouard Gastroentérologie ; Hépatologie BEGUE Jean-Marc Physiologie Médicale BOUSSEMART Lise Dermatologie - Vénérologie CABILLIC Florian Biologie cellulaire - Pôle cellules et tissus CAUBETAlain Médecine et Santé au Travail DAMERON Olivier (Maître de Conférence) Laboratoire d'Informatique Médicale DE TAYRAC Marie Biochimie et Biologie moléculaire DEGEILH Brigitte Parasitologie et Mycologie DUBOURG Christèle Biochimie et Biologie moléculaire DUGAY Frédéric Histologie-Embryologie et Cytogénétique EDELINE Julien Cancérologie ; Radiothérapie GALLAND Françoise Endocrinologie - Diabétologie ; Gynécologie médicale GUILLET Benoit Département d'Hématologie Immunologie HAEGELEN Claire Anatomie Service de neurochirurgie 9 JAILLARD Sylvie Cytologie et Histologie LAVENU Audrey (Maître de Conférence) Biostatistique Laboratoire de pharmacologie LE GALL François Département d'Anatomie et Cytologie Pathologiques LE RUMEUR née FERRET Elisabeth Physiologie Médiale MAHÉ Guillaume Service d'Imagerie médicale MARTINS Raphaël Cardiologie MATHIEU SANQUER Romain Urologie MENARD Cédric Immunologie MENER Eric Département de Médecine Générale MILON Joëlle Anatomie Organogénèse MOREAU Caroline Biochimie et biologie moléculaire MOUSSOUNI Fouzia INSERM U 49 MYHIE Didier Département de Médecine Générale PANGAULT Céline Hématologie ; Transfusion RENAUT Pierric Département de Médecine Générale RIOU Françoise Département de Santé Publique ROBERT Gabriel Psychiatrie adultes - Addictologie 10 ROPARS Mickaël Anatomie Organogénèse SAULEAU Paul Neurologie 5ème étage TADIÉ Jean Marc Réanimation médicale, Médecine d'urgence TATTEVIN-FABLET Françoise Département de Médecine Générale TURLIN Bruno Département d'Anatomie et Cytologie Pathologiques VERDIER-LORNE Marie clémence Pharmacologie VINCENT Pascal Bactériologie-Virologie 11 TABLE DES MATIERES Tableaux et figures...………………………………………………………………….....................17 Liste des abréviations………………………………………………….……….………………….18 1-Introduction………………………………………………………….……….……...…...……...19 2-Matériels et Méthode…………………………………………………….…………...…………22 2.1 Objectifs………………………………………………………………………...……....22 2.2 Type d’étude……………………………………………………………………….……22 2.3 Lieu, temps de l'étude et médecins interrogés..................................................................22 2.4 Questionnaire et recueil des données…………………………………………………...23 2.5 Analyse statistique……………………………………………………………………...24 3- Résultats…………………………………………………………………….................………...25 3.1 Analyse descriptive des médecins généralistes interrogés...............................................25 3.1.1 Données démographiques des médecins généralistes……………......……..................25 3.1.2 Caractéristiques de la patientèle.....................................................................................27 3.1.3 Connaissances sur la prise en charge de l'anorexie mentale..........................................29 3.2 Circonstances du diagnostic d'anorexie mentale..............................................................30 3.3 Difficultés rencontrées par les médecins généralistes...............................................................32 3.3.1 Difficultés rencontrées avec ces patients anorexiques...................................................32 3.3.2 Place de l'entourage autour du patient anorexique.........................................................33 3.4 Place des examens complémentaires................................................................................33 3.5 Modalités de prise en charge de l'anorexie mentale par le médecin généraliste..............35 3.5.1 Rythme de suivi spécifique des patients anorexiques en consultation.......................35 3.5.2 Rôle du médecin traitant dans la prise en charge des patients anorexique.................36 3.5.3 Recours à un avis spécialisé.......................................................................................36 3.5.4 Suivi des patients par le médecin généraliste.............................................................37 3.5.5 Rôle du médecin généraliste.......................................................................................38 3.6 Supports de formation.......................................................................................................39 3.7 Remarques et commentaires éventuels sur le sujet 12 4- Discussion……………………………………………………………………………………......40 4.1 Limites..............................................................................................................................40 4.2 Difficultés d'un diagnostic précoce...................................................................................41 4.3 Difficultés de prise en charge et perspectives...................................................................42 4.4 Rôle du médecin généraliste.............................................................................................44 4.5 Amélioration des pratiques professionnelles grâce aux formations.................................45 4.6 Thèses antérieures............................................................................................................46 5- Conclusion………………………………………………………………………………..…...…48 6- Bibliographie…………………………………………………………………………….….......51 7-Annexes…………………………………………………………………………………………..54 Présentation du projet de thèse et de l'enquête...................................................................................54 Questionnaire......................................................................................................................................55 Commentaires libres laissés en fin de questionnaire..........................................................................59 13 Remerciements À Monsieur le Professeur THIBAULT, Qui m’a fait l’honneur d’accepter la présidence de cette thèse. Aux membres du jury: À Monsieur le Professeur DRAPIER, À Monsieur le Docteur MYHIE, Qui ont accepté de juger ce travail. À Messieurs les Docteur LAUVIN et Docteur BRIARD qui ont accepté de diriger cette thèse. Merci de m’avoir soutenue dans mon projet de thèse depuis dans son élaboration jusqu'à sa réalisation et sa présentation, j'espère que ce travail sera à la hauteur de vos attentes. À tous les médecins généralistes que ce sujet a intéressé et qui ont pris le temps de répondre au questionnaire, rendant ce travail possible. À mes différents maîtres de stage. Aux différents services dans lesquels je suis passée, en particulier la Médecine Gériatrique à SaintBrieuc. 14 A ma famille, A mes parents, je vous remercie pour tout, si j'en suis là aujourd'hui c'est grâce vous, merci de votre soutien et votre accompagnement tout au long de ces années, A mes sœurs Mélanie et Margaux et mon frère Bruno, à ma belle-soeur Marie-Anaïs, Merci pour tous ces moments de bonheur en famille si précieux Je vous aime. A mon mari Damien, qui m’accompagne depuis maintenant 8ans, les mots ne suffisent pas pour qualifier notre relation. Tu m'as offert le plus beau des trésors, notre fils Raphaël, je n'imagine pas la vie sans vous. Merci à mes grands-parents, mes oncles et tantes, mes cousins et cousines, on ne se voit pas assez souvent mais j'apprécie toujours autant les moments à vos côtés et la Belgique est dans mon cœur. Merci à toute ma famille. A ma belle famille, en particulier Nelly toujours là pour nous épauler, Arnaud, Carole, Léanore, Ysaline et Calista Aurélie, Anthony, Maylis et Marilou Didier et Solange Emmanuel, Sarah, Léo et Mathis Sébastien, Olivia et Coline et tous les autres. Vous savez à quel point la famille est importante pour nous, vous m'avez accueillie à bras ouverts et nous apprécions toujours les moments partagés ensemble. 15 A mes amis, Merci Cécile et Steven, on a partagé ensemble tant de moments depuis le lycée et tant encore à venir, on ne se voit pas assez mais on espère votre retour en Bretagne Merci Martin, la médecine nous a permis de nous rencontrer et depuis une amitié sans faille est née Merci Camille et Benoît, malgré la distance notre amitié est toujours là, je suis heureuse de votre retour, des moments forts nous attendent encore prochainement et je m'en réjouis Merci Antoine et Caro, Damien te connaîs depuis longtemps, vous êtes devenus des amis comme on en a peu, et maintenant bien plus en acceptant d'être le Parrain de Raphaël Merci Valentine et Antoine, Julie R et Nico, Julie A, Marianne et Rouf, Cécile et Baptiste, Charlotte, Arnaud et Mélinda, Jeremy et Anne, Toby et Margaux, Pierre, Sophie et Elena, Jojo, Hélène et Arthur, Fred et Johann, Pedrus... merci pour ces formidables années d’études passées à vos côtés Merci Aude, on se suit toujours de près ou de loin mais quand on se voit rien ne change, on sait chacune qu'on peut compter sur l'autre, j'admire ton courage Merci à Charlotte B, notre rencontre est plus récente mais de nombreux moments vécus, merci aussi pour tes précieux conseils Merci à la bande de Damien, qui sont devenus des amis au fil du temps, Brian et Anne-So, PierreFrançois et Anne-Clémence, Marine, Benjamin et Pierre-Louis, Anthony et Anabelle, Arnaud, Coraline et Faustine, Caroline, Jeremy (désolé si je t'ai embêté avec mes questions sur la thèse!) et Eliott, Gaëtan, Marianne et Marin, Tommy et Elena, Simon et Marion, Paul, Mathieu. Et à certains que j'ai dû oublier... Merci à tous les co-internes que j’ai pu croiser au cours de ces années de Saint-Brieuc et Rennes, Olivier, Simon, Mathilde, Ana, Geoffroy, Elodie, Laure... Enfin, je dédie cette thèse à ma grand-mère, Mady Clément, tu aurais été fière d'être Arrière grandmère et aujourd'hui d'assister à ma thèse pour devenir Docteur en Médecine. Tu nous manques chaque jour. 16 Tableaux et figures Figure 1 Répartition du type d'exercice des médecins généralistes 26 Figure 2 Mode d'exercice des médecins généralistes 26 Figure 3 Participation à des réunions de FMC et groupes qualités 27 Figure 4 Types de TCA rencontrés en médecine générale 28 Figure 5 Taille de la file active de patients suivis, atteints d 'anorexie mentale 28 Figure 6 Sources des connaissances sur la pathologie de l'anorexie mentale 29 Figure 7 Circonstances du diagnostic d'anorexie mentale 30 Figure 8 Symptôme motivant la consultation 30 Figure 9 Signes d'alarme retenus dans cette pathologie 31 Figure 10 Difficultés rencontrées 32 Figure 11 Place de l'entourage 33 Figure 12 Examens complémentaires prescrits 34 Figure 13 Rythme de suivi des patients anorexiques en consultation de médecine générale 35 Figure 14 Prise en charge mise en place 36 Figure 15 Recours à un autre avis 36 Figure 16 Orientation après le diagnostic en médecine générale 37 Figure 17 Suivi des patients anorexiques 37 Figure 18 Rôle du médecin généraliste dans la prise en charge des patients anorexiques 38 Figure 19 Besoins en formation sur l'anorexie mentale 39 17 Liste des abréviations AM : Anorexie mentale ARS : Agence Régionale de Santé CDOM: Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins DIU : Diplôme Interuniversitaire DPC : Développement Professionnel Continu DU : Diplôme Universitaire ECN : Examen National Classant FMC : Formation Médicale Continue IMC : Indice de Masse Corporelle NGAP : Nomenclature Générale des Actes Professionnels TCA : Trouble du Comportement Alimentaire UE : Union Européenne WONCA : World Organization of National College Academic 18 1- Introduction L'anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire d'origine polyfactorielle, incluant des facteurs génétiques et psychologiques individuels en étroite interaction avec des facteurs environnementaux, familiaux et socioculturels. [1,2] Le diagnostic est essentiellement clinique : amaigrissement, aménorrhée et troubles du comportement alimentaire de type restrictif, avec éventuellement vomissements associés. La prévalence dans les pays occidentaux se situerait entre 0,5 et 2,2% chez les femmes, autour de 0,3% chez les hommes (ratio classiquement de 1 homme pour 10 femmes), avec une prédominance dans la population caucasienne. [3,4,5,6,7,8] Elle survient le plus souvent à l'adolescence avec un pic de fréquence à 14 et 18ans [1,2,3 et 4] bien que l'âge semble avancer avec des patients de plus en plus jeunes [9]. Les troubles du comportement alimentaire concernent 1% des adolescents soit 30 à 40 000 jeunes en France et sont la 3e cause de maladie chronique après l'asthme et l'obésité dans cette population. [10, 11] Les données d'autres pays vont dans le même sens, avec des chiffres équivalents. [12] Malgré la médiatisation et la sensibilisation des professionnels, la moitié des sujets ne sont pas pris en charge [3,8] alors que les complications somatiques et psychiatriques sont fréquentes et graves. [13,14] Avec une mortalité de 5% par décennie d'évolution, l'anorexie mentale représente l'une des pathologies psychiatriques avec le plus fort taux de mortalité, en particulier par suicide. [1,3,4,12] De plus, il est estimé qu'entre 20% [12,13] et 30% [14] des patients anorexiques souffrent de troubles chroniques. Un repérage précoce et un traitement rapide et adapté permettent une amélioration du pronostic de l'anorexie mentale [1,2] en évitant une chronicisation de la pathologie et ses possibles complications ultérieures. [4, 11,12,13,15] Cependant, les professionnels de santé, en particulier les médecins généralistes de premier recours, restent insuffisamment informés, ce qui complique le repérage et l'accompagnement précoce [1], renforcé par le déni initial de la pathologie par la patiente. De plus, la récupération complète ou partielle du trouble ne préserve pas d'une rechute, qui concerne la moitié des patients, surtout en l'absence de suivi régulier au long cours. [16] Ces éléments en font un problème de santé publique. La HAS en partenariat avec l'AFDAS-TCA a publié des recommandations de bonnes pratiques autour de la prise en charge de l'anorexie mentale. [17,18,19] Elles visent à repérer plus précocement le trouble et à améliorer d'une part, la prise en 19 charge et l'orientation hospitalière ou post-hospitalière des patients souffrant d'anorexie mentale, et d'autre part, l'accompagnement des patients et de leur entourage. Cette prise en charge est complexe et pluridisciplinaire dans les formes compliquées. Le rôle des médecins généralistes, nutritionnistes, psychiatres et pédiatres notamment et leur coordination sont essentiels à chacune des étapes du suivi de la maladie. [12] Il ne semble pas y avoir de réponse univoque à cette pathologie, les soins doivent être adaptés à chaque patient, la prise en charge ambulatoire étant toujours privilégiée. Le médecin généraliste reste au cœur de l'approche thérapeutique en tant que premier interlocuteur des patients en ville, mais aussi en tant qu'intervenant « référent » et « relais» pour les spécialistes comme pour ses patients. Il paraît donc utile de s’intéresser au rôle actuel que joue le médecin généraliste dans le diagnostic initial et le suivi de cette pathologie ainsi que dans l'orientation vers les autres intervenants. L'accès aux soins pour les patient(e)s atteint(e)s d'Anorexie mentale en Ille-et-Vilaine Selon WONCA Europe, le médecin généraliste est un médecin de premier recours, gérant à la fois les pathologies chroniques et aiguës et assurant par la suite, si besoin, une coordination des soins. Il prend en charge les patients dans sa globalité et développe avec celui-ci une relation durable. Il assure également un rôle de promotion et de prévention en santé publique. [20, 21] Ces caractéristiques sont renforcées en France par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie avec obligation de déclaration du médecin traitant. Les dernières données du recensement des médecins généralistes révèlent que 946 médecins généralistes sont actuellement en activité régulière (activité libérale et mixte) en Ille-et-Vilaine en 2015. [21,22] Concernant la prise en charge spécialisée, elle est hétérogène sur le département et se concentre essentiellement à Rennes. Il s'agit principalement de médecins somaticiens : pédiatres, nutritionnistes, endocrinologues, et de psychiatres. [23] 20 Les centres publiques: CHU de Rennes : pour les adultes → Urgences, Nutrition pour les enfants et adolescents jusqu'à 16ans → Pédiatrie / Grands-enfants / Adolescents CH Guillaume Régnier Equipe mobile TCA : pour les patients de plus de 16ans Les centres privés : CHP Saint-Grégoire : pour les patients de plus de 13ans Clinique Saint-Yves / Rennes : à partir de 16ans et IMC > 12 Centre Rey Leroux / La Bouexière : jusqu'à 17ans (en projet) Clinique du Moulin / Bruz : à partir de 18ans et IMC >14 Les patients doivent souvent attendre plusieurs semaines avant l’obtention d’une consultation dans ces centres. L’accès aux soins spécialisés est donc très inégalitaire du fait des distances géographiques qui rendent les suivis plus difficiles et donc plus rares pour les patients les plus éloignés, d'où l'importance du médecin généraliste de proximité. 21 2- Matériels et méthodes 2.1 Objectifs L’objectif principal de cette étude est d'analyser les pratiques des médecins généralistes en Ille-et-Vilaine du diagnostic au suivi de l'anorexie mentale, mais aussi la coordination de ceux-ci avec les spécialistes (somaticiens ou psychiatres) et les différentes structures de soins du département. A partir de cet état des lieux, l'objectif secondaire est de repérer les éventuelles difficultés rencontrées par les médecins généralistes lors de ces prises en charge. Ceci afin d'identifier les besoins en formation des médecins généralistes dans ce domaine et d'optimiser la prise en charge des anorexiques, par un suivi en libéral plus performant et une orientation adaptée vers les structures spécialisées avec pour finalité la création d'un réseau de soins adapté. 2.2 Type d’étude Un questionnaire a été envoyé aux médecins généralistes inscrits au Conseil Départemental de l'Ordre des médecins d'Ille-et-Vilaine afin d'étudier leurs pratiques vis à vis des patients anorexiques. L'étude est descriptive, observationnelle et transversale sur les pratiques des médecins généralistes en Ille-et-Vilaine concernant la prise en charge de l'anorexie mentale. 2.3 Lieu, temps de l’étude et médecins interrogés L'étude est réalisée à partir d'une population de médecins généralistes inscrits au Conseil de l'Ordre d'Ille-et-Vilaine. Sont inclus, les médecins généralistes installés en secteur libéral en Ille-et-Vilaine ayant répondus. Les médecins généralistes exerçant en milieu hospitalier ou clinique spécialisée, les médecins généralistes spécialisés en nutrition, les remplaçants sont exclus de l’étude. Via le Conseil de l'Ordre, une liste de 573 médecins généralistes, ayant accepté d'être sollicités pour les thèses, est obtenue. Le recueil a débuté le 19/01/2016 par l'envoi du questionnaire, avec une relance unique le 10/03/2016 afin d'augmenter le taux de réponses. Il a été clôturé le 29/03/2016 soit une durée totale de 10 semaines de recueil. Cette relance a permis d'obtenir 24 réponses supplémentaires. 22 2.4 Questionnaire et recueil de données Les médecins ont été interrogés par le biais d’un questionnaire standardisé et anonymisé (cf. annexes), à remplir en ligne via le logiciel Google Sheet, entre janvier et avril 2016. Il a été envoyé aux 573 médecins généralistes d'Ille-et-Vilaine ayant fourni leur adresse e-mail au Conseil de l'Ordre des médecins. La diffusion du questionnaire aux médecins généralistes a été réalisée par mail, avec l'aide du Conseil de l’Ordre des Médecins d’Ille-et-Vilaine, le lien vers le questionnaire était accompagné d'une présentation du projet de thèse et de l'enquête. (cf. annexes) Les données ont été recueillies au fur et à mesure des questionnaires à l’aide d’un tableur Microsoft Excel. Le questionnaire cible les patients anorexiques. Les médecins ont donc pris en considération les patients présentant cette pathologie parmi leur patientèle. Comme il s’agit d’une étude rétrospective, nous nous sommes intéressés aux patients atteints d'anorexie mentale et déjà traités avant avril 2016, date de clôture du recueil de données. 22 questions réparties en 13 volets ont été posées avec des réponses fermées, certaines étant obligatoires pour poursuivre l’étude. Un espace de texte libre était possible en fin de questionnaire pour des remarques ou commentaires éventuels sur le sujet. La première partie du questionnaire visait à établir les caractéristiques des médecins interrogés , démographiques (âge) et professionnelles (mode et secteur d'activité, patientèle). La deuxième partie analysait leurs connaissances et leurs pratiques, notamment via les différents points abordés dans le questionnaire : _ les connaissances sur la pathologie ou niveau de formation − les circonstances du diagnostic et signes d'alarme recherchés − le déroulement de la consultation : les examens complémentaires prescrits en 1e intention et la prise en charge proposée − le recours à un avis spécialisé et la gestion du suivi des patients Par ailleurs à la fin du questionnaire, nous cherchions à identifier les éventuelles difficultés rencontrées lors de ces prises en charge et les besoins ressentis en formation dans ce domaine. 23 2.5 Analyse statistique Les résultats ont été envoyés directement sur un tableau Sheets (équivalent d’un tableur Excel) en lien avec le questionnaire et ont été exprimés par les effectifs et leurs pourcentages. Remarques Toutes les questions n'avaient pas un caractère obligatoire c'est pourquoi tous les médecins n'ont pas répondu à chaque question. Ainsi lorsque l'on fait le total des réponses à chaque question, on n'obtient pas toujours 112 réponses mais parfois moins. A l'inverse, certaines questions sont à choix multiples et totalisent donc plus de 112 réponses. Par ailleurs, les pourcentages tiennent compte du nombre de réponses et s'appliquent sur le total des médecins ayant répondu à chaque question séparément (globalement entre 109 et 112 réponses) et non le nombre total de médecins ayant participé. Enfin, sur plusieurs questions, les réponses exprimées sont des données qualitatives à interpréter comme telles. Par exemple, sur le type de TCA rencontrés, un médecin répond être confronté à l'anorexie mentale et l'obésité, sans laisser présager du nombre de patients qu'il suit pour chaque pathologie. 24 3- Résultats Au total, le questionnaire a été diffusé aux 573 médecins généralistes d'Ille-et-Vilaine ayant fourni leur adresse e-mail au Conseil de l'Ordre des médecins. Dans ces 573, 71 adresses e-mail étaient erronées donc n'ont pu recevoir le questionnaire. Parmi les 502 restants, 4 de ces médecins ayant une activité exclusivement de nutrition se sont exclus eux-même, 1 dernier n'étant pas généraliste. 1 médecin généraliste n'a pas souhaité répondre car ne suit aucun patient atteint de TCA mais il a quand même été inclus. Soit au final, 497 médecins généralistes ont reçu le questionnaire. 112 questionnaires remplis ont été comptabilisés, ce qui correspond à un taux de réponses de 22,53%. La relance a permis de passer de 17,7% à 22,53% avec 24 réponses supplémentaires. Voici donc les résultats aux différentes questions, exprimés en pourcentage (arrondis au décimal près). 3.1 Analyse descriptive des médecins généralistes interrogés 3.1.1 Données démographiques des médecins généralistes Au total 112 médecins ont répondu au questionnaire. Ils ont majoritairement plus de 40ans (57,1%). Ils exercent davantage en cabinet de groupe et en secteur semi-rural (51,8%) puis urbain (31,3%). Ils participent à la FMC plusieurs fois par an pour la plupart d'entre eux (81,1%). 25 Figure 1 Répartition du type d'exercice des médecins généralistes 17,0 31,3 Urbain Semi Rural Rural 51,8 Une unité urbaine est une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants. Sont considérées comme rurales les communes qui ne rentrent pas dans la constitution d'une unité urbaine : les communes sans zone de bâti continu de 2000 habitants, et celles dont moins de la moitié de la population est dans une zone de bâti continu. La zone semi-rurale correspond à toutes les zones démographiques ne rentrant pas dans les critères de la zone rurale et urbaine. [24] Figure 2 Mode d'exercice des médecins généralistes 25 20 15 17 10 5 0 5 11 0 3 Urbain Semi Rural Groupe Seul 5 Rural 26 Compte-tenu du nombre plus faible de réponses, les résultats ne sont pas exprimés en pourcentages. Seul 8, soit 7,1% En Groupe 34, soit 30,4% Concernant le caractère seul – en groupe, les pourcentages sont calculés sur le nombre total de médecins ayant répondu soit 112 donc peu interprétables. Du fait du caractère à choix multiple de la réponse, ils n'ont pas tous répondu à cette partie de la question. On observe tout de même que ceux exerçant seuls sont majoritairement installés en secteur semi rural ou rural. Figure 3 Participation à des réunions de FMC et groupes qualités 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 80,4 13,4 5,4 une fois par an ou moins plusieurs fois par an 0,9 Pas de réponse jamais Un médecin n'a pas répondu à cette question, il reste comptabilisé dans les résultats. La grande majorité des médecins suit donc régulièrement des formations au cours de son exercice professionnel. 3.1.2 Caractéristiques de la patientèle Les médecins généralistes suivent pour la quasi totalité, 109 d'entre eux (97,3%), des patients atteints de TCA. Les médecins généralistes ne suivant aucun patient, 3 d'entre eux (2,7%) n'ont pas répondu à cette partie de la question. 27 La représentation qualitative des TCA, exprimée en pourcentages, est montrée dans la figure suivante. Figure 4 Types de TCA rencontrés en médecine générale 71,6 93,6 Anorexie Boulimie avec vomissements Surpoids avec TCA Pourcentage 39,4 On observe donc que les médecins généralistes sont très régulièrement confrontés à la gestion des troubles du comportement alimentaires. Ils sont confrontés à la pathologie de l'anorexie mentale pour 71,6% d'entre eux. Compte tenu des pourcentages, on pourrait croire que la boulimie est moins fréquente mais il s'agit d'un trouble plus difficile à identifier car de nombreuses patientes gardent un poids normal. Figure 5 Taille de la file active de patients suivis, atteints d 'anorexie mentale 90 80 70 60 50 Pourcentage 40 30 20 10 0 <3 3à5 5 à 10 >10 28 84% des médecins généralistes suivent moins de 3 patients anorexiques, 14,2% suivent entre 3 et 5 patients anorexiques et 3,8% en suivent entre 5 et 10. La majorité des médecins généralistes suivent donc moins de 5 patients anorexiques à un instant t dans leur patientèle, dans 88,2% des cas. 3.1.3 Connaissances sur la prise en charge de l'anorexie mentale Figure 6 Sources des connaissances sur la pathologie de l'anorexie mentale 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 90,0 Théoriques au cours des études 84,8 Acquises au cours de l'exercice pratique 52,7 Provenant de relations privées Formations complémentaires spécifiques Autre 17,0 Pourcentage 8,9 10,7 La majorité des connaissances concernant l'anorexie mentale proviendrait des connaissances théoriques acquises au cours des études, dans 84,8% des cas. Par ailleurs, l'expérience professionnelle permettrait pour plus de la moitié des médecins généralistes (52,7%) d'enrichir leurs connaissances sur l'anorexie mentale. Dans ceux ayant répondu autre : 2 précisent le DU d'addictologie, 2 précisent les revues médicales, 1 des lectures personnelles sur le sujet, 3 sont passés dans des services prenant en charge l'anorexie mentale de façon régulière, 2 ont suivi des formations DPC. 29 3.2 Circonstances du diagnostic d'anorexie mentale Figure 7 Circonstances du diagnostic d'anorexie mentale 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 Consultation systématique 39,3 Consultation motivée par un symptôme 60,7 Pourcentage Consultation motivée par un proche 72,3 Autre 10,7 Il s'agit d'une réponse à choix multiples donc le nombre de réponses est supérieur au nombre de participants. Les consultations systématiques représentent celles concernant les certificats de sport ou les vaccinations. On observe donc que majoritairement, le diagnostic est posé au décours d'une consultation motivée par un proche ou par un symptôme, puis lors de consultations systématiques. Pour ceux ayant répondu autre : 7 précisent que le diagnostic est antérieur à leur prise en charge. Figure 8 Symptôme motivant la consultation 0,0 10,0 20,0 30,0 Asthénie 40,0 60,0 70,0 32,6 Problème de poids 61,1 Problème alimentaire 38,9 Malaise 38,9 Troubles digestifs Autre 50,0 Pourcentage 25,3 12,6 30 Les symptômes motivant la consultation sont en premier lieu les problèmes de poids (61,1%), puis les problèmes alimentaires et malaise (38,9% pour chaque), puis l'asthénie (32,6%) et les troubles digestifs (25,3%). Dans ceux ayant répondu autre : 2 précisent des troubles psychiatriques associés, les autres circonstances évoquées sont des signes carentiels, des troubles du sommeil , des conflits familiaux, des perturbations biologiques. A noter que les pourcentages sont calculés sur 95 réponses, et qu'il s'agit de réponses à choix multiples. Figure 9 Signes d'alarme retenus dans cette pathologie 12,5 54,5 28,6 62,5 93,8 Anorexie Amaigrissement ou stagnation pondérale au cours de la croissance Aménorrhée Hyperactivité Constantes générales Autre 79,5 Les signes d'alarme principaux sont donc l'amaigrissement (93,8%), l'aménorrhée (79,5%) et l'anorexie (54,5%), ce qui correspond à la triade diagnostique, mais l’hyperactivité arrive en troisième position (62,5%). Ensuite les constantes générales : pouls, température... sont représentées dans près d'un tiers des cas (28,6%). Dans ceux ayant répondu autre, les signes d'alarme précisés sont : l'état psychologique pour 4 d'entre eux, les troubles obsessionnels, les œdèmes des membres inférieurs, les troubles buccodentaires, les troubles ioniques pour 2 d'entre eux. 31 3.3 Difficultés rencontrées par les médecins généralistes Les médecins généralistes expriment certaines difficultés lors de la prise en charge des patients anorexiques. 3.3.1 Difficultés rencontrées avec ces patients anorexiques Figure 10 Difficultés rencontrées 100,0 90,0 80,0 70,0 60,0 50,0 40,0 30,0 20,0 10,0 0,0 86,6 Déni/Anosognosie 48,2 Dysmorphophobie 39,3 Manque de temps 32,1 Sentiment d'isolement dans la prise en charge 30,4 Déception en l'absence d'amélioration 1,8 Aucune Pourcentage Les principales difficultés des médecins généralistes avec ces patients reposent sur l'anosognosie (86,6%) c'est-à-dire le déni de la pathologie, puis la dysmorphophobie c’est-à-dire le trouble de l'image de soi (48,2%). Ils soulignent également un manque de temps dans la gestion de ces patients dans plus tiers des cas (39,4%). Enfin, le sentiment d'isolement dans la prise en charge et la déception en l'absence d'amélioration sont aussi des écueils dans près d'un tiers des cas. 32 3.3.2 Place de l'entourage autour du patient anorexique Figure 11 Place de l'entourage 70,0 61,3 60,0 50,0 41,5 40,0 Pourcentage 30,0 18,9 20,0 10,0 0,0 Présent Envahissant Absent Il s'agit d'une réponse à choix multiples donc certains médecins ont répondu plusieurs fois. On observe tout de même qu'en général l'entourage est présent voire envahissant. 3.4 Place des examens complémentaires La première partie de la question interrogeait sur la prescription d'examens complémentaires face à un IMC inférieur à 15. 96,4% des médecins généralistes en prescrivent systématiquement, 1.8% des médecins n'en prescrivent pas et 1.8% des médecins sont indécis et répondent oui et non à la question. Pour ceux qui en prescrivent, il leur a été demandé de préciser ceux qui sont prescrits en première intention. 33 Figure 12 Examens complémentaires prescrits 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 NFS 100,0 97,2 Ionogramme Albumine 94,5 Bilan Hépatique 87,2 Bilan vitaminique Bilan phosphocalcique 68,8 ECG 23,9 TSH Autre Pourcentage 49,5 97,2 11,0 On observe que la NFS est demandée dans tous les cas. La TSH (97,2%), le ionogramme sanguin avec urée, créatinine (97,2%), l'albumine (94,5%) et le bilan hépatique (87,2%) sont presque toujours demandés. Le bilan phosphocalcique (68,8%) puis le bilan vitaminique (49,5%) ne sont pas constants. L'ECG est fait dans moins d'un quart des cas (23,9%). Dans la partie autre, la glycémie est rajoutée la plupart du temps à la recherche d'un diabète. Concernant le bilan complémentaire chez un patient anorexique, les examens prescrits sont donc très variables et ne suivent pas toujours les recommandations, en tout cas pas en totalité. 34 3.5 Modalités de prise en charge de l'anorexie mentale par le médecin généraliste 3.5.1 Rythme de suivi spécifique des patients anorexiques en consultation Figure 13 Rythme de suivi des patients anorexiques en consultation de médecine générale 12,8% 26,5% 31,6% Jamais ou presque Tous les 6 mois Tous les 3 mois Une fois par mois plusieurs fois par mois 9,4% 19,7% A noter que pour cette question, cinq médecins ont répondus deux fois. Ceci reflète que le suivi des patients anorexiques échappe dans un tiers des cas au médecin généraliste. Dans 35,9% des cas les patients anorexiques sont vus tous les 6 mois ou moins, ce qui est à priori insuffisant dans le suivi d'une pathologie chronique. Dans 44,4% des cas les patients sont vus au moins 1 fois par mois par le médecin généraliste, ce qui témoigne d'un investissement de ces derniers. 35 3.5.2 Rôle du médecin traitant dans la prise en charge des patients anorexiques Figure 14 Prise en charge mise en place 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 Recommandations nutritionnelles générales 70,0 80,0 90,0 63,1 Compléments Nutritionnels Oraux 17,1 Supplémentation vitaminique et/ou Phosphore 37,8 Traitements médicamenteux par psychotropes/antidépresseurs 8,1 Psychothérapie 84,7 Autre 25,2 La prise en charge mise en place par le médecin généraliste repose sur la psychothérapie (84,7%) en association avec des recommandations nutritionnelles générales (63,1%). Un traitement complémentaire peut-être proposé : supplémentation vitaminique et/ou phosphore (37,8%), compléments nutritionnels oraux (17,1%), traitement médicamenteux (8,1%). Par ailleurs, dans ceux ayant répondu « autre », 15 médecins ont recours à un avis spécialisé en particulier nutritionniste et psychiatre (13,4%), 1 préconise l'hospitalisation comme prise en charge et 2 autres précisent le recours à l'hypnothérapie et l'approche psycho corporelle. 3.5.3 Recours à un avis spécialisé Figure 15 Recours à un autre avis 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Autre avis systématique Parfois Pourcentage Jamais 36 Ils adressent systématiquement le patient anorexique aux spécialistes dans presque 8 cas sur 10 et parfois dans 2 cas sur 10. Figure 16 Orientation après le diagnostic en médecine générale D'emblée vers une institution spécialisée 36,4 Urgences hospitalières 13,6 Consultation programmée avec un psychiatre 54,5 Somaticien : nutritionniste ou pédiatre Pourcentage 58,2 Confrère/soeur généraliste 0,9 0 10 20 30 40 50 60 70 Le plus souvent dans plus d'un cas sur deux, il s'agit d'un somaticien nutritionniste ou pédiatre (58,2%), psychiatre (54,5%), puis une institution spécialisée (36,4%), enfin aux urgences hospitalières en dernier recours. 3.5.4 Suivi des patients par le médecin généraliste Figure 17 Suivi des patients anorexiques 80 64,2% 70 2 60 50 40 32,1% 68 30 20 Exclusif par le médecin généraliste En collaboration avec le spécialiste Non 35 10 4 0 Non Oui Oui et non 37 Le suivi est assuré dans plus de deux tiers des cas par le médecin traitant mais presque toujours en collaboration avec le spécialiste (97,3%), dans moins d'un tiers des cas il n'est pas assuré par le médecin traitant. Dans ceux qui les suivent, seulement 2 d'entre eux assurent un suivi exclusif. Certains médecins, 4 d'entre eux, ont répondu à la fois oui et non à la question. Afin de ne pas biaiser les résultats il paraît plus transparent de les faire apparaître dans une colonne distincte. 3.5.5 Rôle du médecin généraliste Figure 18 Rôle du médecin généraliste dans la prise en charge des patients anorexiques 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 90,0 100,0 Dépistage 89,3 Orientation 89,3 Prise en charge avec le suivi 44,6 Coordination avec les différents spécialistes Autre 77,7 8,0 Pourcentage Concernant la vision des médecins généralistes dans leur rôle vis à vis de ces patients, il est majoritairement dans le diagnostic et l'orientation (89,3%), puis dans la coordination avec les différents spécialistes (77,7%), et tout même pour près de la moitié dans le suivi (44,6%). Dans la partie « autre », il est mentionné l'importance de l'écoute, de l'accompagnement et le maintien de la confiance, du lien thérapeutique. L'un d'entre eux précise qu'il se sent exclus du suivi. 38 3.6 Supports de formation Figure 19 Besoins en formation sur l'anorexie mentale Amélioration de la formation médicale initiale 38,4 FMC sous forme de réunion à thème 55,4 DU dédié 6,3 Référentiel pratique (anamnèse, axe de suivi, prescriptions...) 56,3 Autre 7,1 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 Pourcentage Concernant les besoins en formation et leurs modalités, les médecins généralistes sont majoritairement demandeurs d'une amélioration de la formation en privilégiant une FMC (55,4%) ou un référentiel pratique (56,3%). Une amélioration de la formation médicale initiale serait aussi souhaitable (38,4%). Pour les médecins ayant précisé « autre », ils souhaiteraient des rencontres avec les médecins spécialistes, une meilleure présentation du réseau de soins spécialisé. 3.7 Remarques et commentaires éventuels sur le sujet cf Annexes 39 4- Discussion Au cours de cette étude l’objectif principal était d’analyser les pratiques des médecins généralistes sur l'anorexie mentale en Ille-et-Vilaine. L'objectif secondaire était d'évaluer les besoins en formation des médecins généralistes et leur attentes concernant cette pathologie. L'étude met en évidence le fait que le médecin généraliste soit régulièrement confronté à la gestion des TCA, l'anorexie mentale mais également le surpoids avec TCA qui n'a pas été développé mais pourrait faire l'objet d'un prochain travail. Les dernières recommandations de bonnes pratiques datent de juin 2010. [17,18,19] 4.1 Limites Il existe des limites à notre étude. Il s’agit d’une étude observationnelle réalisée sur une courte période. L’étude s'est consacrée au département d'Ille-et-Vilaine mais une étude à l’échelle régionale voire nationale serait souhaitable afin d'obtenir un échantillon plus représentatif ; plus particulièrement à l'échelle régionale où l'obtention de résultats significatifs pourraient influencer certaines décisions de l'ARS. L’effectif des médecins ayant répondu est satisfaisant, de l’ordre de 22,53%. Pour un questionnaire envoyé via internet un taux de réponses entre 20 et 30% est considéré comme correct. [25] La relance réalisée au décours de l'enquête nous a permis d'obtenir un taux de réponses conforme à nos attentes, ce qui corroborent nos résultats . Cependant nous ne détenions pas l’ensemble des adresses mail de tous les médecins généralistes en Ille-et-Vilaine, mais seulement ceux inscrits au Conseil de l'Ordre d'Ille-et-Vilaine et acceptant d'être sollicités. De plus, certaines adresses mail étaient erronées. Il a aussi été constaté que certains praticiens n’avaient pas répondu à l'ensemble des questions ou bien partiellement. Ceci a sans doute modifié un peu les répartitions des différentes réponses ; mais probablement pas suffisamment pour en inverser les tendances et donc les conclusions. On peut alors se demander si l'échantillon est réellement représentatif de la population des médecins généralistes d'Ille-et-Vilaine. Il existe probablement un biais de représentativité car il est possible que les médecins ayant répondu 40 au questionnaire soient les médecins les plus intéressés par le sujet et donc les plus renseignés. En revanche, l'envoi par mail risque de sélectionner une plus jeune génération de médecins ayant par conséquent peut-être moins d'expérience si l'on part du principe que les plus anciennes générations sont moins sensibles à l'utilisation de l'informatique au quotidien. Selon les dernières données du recensement des médecins généralistes en 2015, le département d'Ille-et-Vilaine recense un effectif global de 1369 médecins généralistes avec une moyenne d'âge de 50ans. Le mode d'exercice à l'échelle départementale est réparti de la façon suivante : 60,8% en activité libérale, 5,6% en activité mixte et 33,6% en activité salariée. 946 médecins généralistes sont actuellement en activité régulière (activité libérale et mixte) en Ille-et-Vilaine. [21,22] Ces données n'ont malheureusement pas pu être confirmées par le CDOM d 'Ille-et-Vilaine qui les jugent confidentielles. Cependant via le CDOM, nous avons obtenus 573 adresses e-mail de médecins généralistes inscrits au CDOM et ayant acceptés d'être sollicités pour les travaux de thèse. Concernant les données démographiques des médecins généralistes ayant répondu au questionnaire, 57,1% ont plus de 40ans ce qui est en accord avec les données actuelle et nous conforte dans l'idée que l'échantillon obtenu est bien représentatif. Par ailleurs, les questions sont orientées avec des choix multiples afin de faciliter leur analyse statistique, mais influencent les réponses. Il s’agit d’un biais de subjectivité. On peut imaginer que les résultats n'auraient pas été les mêmes lors d'un questionnaire avec libre choix des réponses. Enfin, les résultats ont été consignés dans un fichier Excel. Un calcul de pourcentage leur a été appliqué et ils ont été arrondis à 0,01 près. 4.2 Difficultés d'un diagnostic précoce Plusieurs paramètres ont été avancés comme mauvais facteurs pronostiques : le retard de prise en charge, le jeune âge lors du début de la maladie, une anorexie avec purge et une perte de poids importante. [13] L'étude confirme que le médecin généraliste est le médecin de première ligne, c'est donc lui qui doit dépister ce trouble. Il est régulièrement confrontés aux TCA comme le souligne la figure 4 qui met en évidence que 93,6% des médecins généralistes prennent en charge des patients atteints de surpoids avec TCA et 71,6% des médecins généralistes des patients atteints d'anorexie mentale. Le dépistage est réalisé par le recueil systématique des données anthropométriques (poids et taille) et leur report sur les courbes de croissance avec le calcul de l'IMC, à chaque consultation. Ainsi, il 41 est plus facile de repérer une anomalie d'évolution et d’interroger sur le comportement alimentaire. Seulement, la consultation regroupe souvent plusieurs motifs et le manque de temps est important, comme le montre la figure 10 (pour 39,3% d'entre eux). De plus, les adolescents consultent peu et souvent n'ont pas apporté leur carnet de santé. Ceci met ainsi en évidence l'importance des consultations systématiques de suivi des enfants, adolescents et adultes : certificat de sport, vaccination qui permettent de faire le point sur la croissance. Ils sont les circonstances du diagnostic d'anorexie mentale dans plus d'un tiers des cas, d'autant plus qu'il existe un déni fréquent de la pathologie ce qui retarde la consultation pour ce motif. Les circonstances du diagnostic d'anorexie mentale en consultation de médecine générale sont illustrés par la figure 7. On observe ainsi le caractère essentiel de ces consultations de dépistage en médecine générale alors que le décret du 24 août 2016 rallonge la validité du certificat du sport à 3ans. [26] Le diagnostic d'anorexie mentale est donc plus ou moins facile en fonction de sa présentation clinique stéréotypée et de son ancienneté. Les signes d'alarme retenus dans l'anorexie mentale et représentés par la figure 9 confirment le rôle primordial du médecin généraliste devant un tableau davantage somatique (anorexie, amaigrissement, aménorrhée, hyperactivité) que psychiatrique. Cependant, même posé tardivement, c'est davantage le suivi qui met en difficulté le médecin généraliste. Or, le suivi ambulatoire étant privilégié, la place du médecin généraliste est donc centrale et essentielle, dans le dépistage et l'orientation, la coordination avec les différents spécialistes et le suivi, comme le montre la figure 18. 4.3 Difficultés de prise en charge et perspectives Notre étude fait ressortir un certain nombre de difficultés rencontrées lors de la prise en charge des patients anorexiques en médecine générale. Dans l’ensemble, on peut dire que la fréquence de ces patients en consultations est relativement faible, bien que presque tous en suivent, ce qui les rend d’autant plus compliqués à prendre en charge. − Difficultés lors de la prise en charge de ces patients : déni de la pathologie ou anosognosie, dysmorphophobie − Difficultés propres au médecin généraliste : manque de temps, sentiment d'isolement, déception lors de l'absence d'amélioration, manque de connaissances 42 Ces difficultés mises en évidence vont permettre d'adapter les formations ultérieures sur ces thématiques. Les critères et le rythme de surveillance ne suivent pas toujours les recommandations de bonnes pratiques [17,18,19], comme le montre la figure 13 où 9,4% des patients anorexiques ne sont pas suivis pas le médecin généraliste et 26,5% le voient tous les 6 mois. Pourtant le suivi régulier est un élément important pour construire une relation de confiance avec le sujet anorexique, d'autant plus que le médecin généraliste occupe une place privilégiée car il connaît souvent le patient et sa famille depuis plusieurs années et assure alors un véritable lien thérapeutique. Dans 44,4% des cas, ils sont suivis au moins une fois par mois par leur médecin généraliste ce qui prouve que près de la moitié d'entre eux prennent le temps de suivre ces patients de manière rapprochée. Par ailleurs, la durée moyenne des consultations dans l'anorexie mentale est généralement plus longue (complexité de la consultation, manque d'expérience). Il est primordial de surveiller à chaque consultation l'apparition des complications et les critères d'urgence imposant une hospitalisation. Le médecin généraliste servira alors de relais entre l'équipe hospitalière et la famille. Il s’agit donc de consultations plus chronophages que celles qui sont ordinairement réalisées en cabinet de ville. Ceci pose le problème de la bonne prise en charge de ces patients, du fait de la charge de travail déjà importante des médecins généralistes. Finalement, peu de médecin généralistes assurent seuls le suivi des patients anorexiques car ils ont souvent recours à des spécialistes comme l'expose la figure 15, pour plus des trois quart d'entre eux. Mais il n’en reste pas moins que ceux-ci expriment des difficultés à adresser leurs patients pour un suivi spécialisé, avec un sentiment d'isolement dans la prise en charge souligné par 32,1% d'entre eux comme le montre la figure 10. L'étude révèle que les médecins généralistes appliquent dans l'ensemble les recommandations de l'HAS sur la gestion des patients atteints d'anorexie mentale. La HAS a émis en juin 2010 des recommandations concernant la prise en charge de l'anorexie mentale, elles préconisent des soins en ambulatoire sauf en cas de signe de gravité, une multidisciplinarité, des soins coordonnés et une alliance thérapeutique avec le patient et sa famille. [17,18,19,27] Comme le montre la figure 16, la prise en charge en ville est privilégiée avec une priorité mise aux consultations spécialisées, seulement 13,6% des patients adressés aux urgences. Le suivi est dans deux tiers des cas assuré par le médecin traitant en collaboration avec les spécialistes comme l'indique la figure 17. 43 Concernant l'offre locale de soins sanitaire pour les TCAs, une plaquette a été élaborée en 2010 et adressée aux médecins du territoire de santé n°5 afin de les aider à orienter ces patients mais elle n’est peut-être pas suffisamment diffusée et connue pour être couramment utilisée. [23] 4.4 Rôle du médecin généraliste Malgré les nombreuses publications sur l'anorexie mentale, il existe peu de données bibliographiques concernant le rôle du médecin généraliste et ses difficultés face à une pathologie de plus en plus fréquente. De plus, les dernières thèses bretonnes sur le sujet [28,29] sont des études qualitatives dont la plupart sont antérieures aux nouvelles recommandations de l'HAS. Bien qu'ils réfèrent beaucoup aux spécialistes (majoritairement des somaticiens ou psychiatres), deux tiers des médecins généralistes assurent le suivi des patients anorexiques, presque toujours en collaboration avec le spécialiste, et dans un tiers des cas il n'est pas assuré par le médecin traitant, comme le montre la figure 17. Concernant la vision des médecins généralistes sur leur rôle vis à vis de ces patients, il est à l'unanimité dans le diagnostic et l'orientation (100%), la coordination avec les différents spécialistes (77,7%) et malgré tout dans le suivi (44,6%), ce qui représente tout de même près de la moitié de l’échantillon, comme l'expose la figure 18. Concernant le bilan complémentaire chez un patient anorexique, presque tous en prescrivent mais ne suivent pas toujours les recommandations, en tout cas pas en totalité. Si les bilans biologiques usuels sont assez communément réalisés, le bilan vitaminique et surtout l'ECG sont bien souvent délaissés, comme le montre la figure 12. Pour l'ECG, il est possible qu'un manque d’accessibilité à l'examen en réduise sa réalisation en première intention, tous les cabinets n'étant pas équipés. Les grands axes de prise en charge des médecins généralistes, illustrés par la figure 14, reposent sur la psychothérapie préconisée dans plus de 8 cas sur 10. Il existe l'approche cognitivo-comportementale, l'approche psychanalytique [30,31] et la thérapie familiale. [31,32,33] En effet, l’anorexie mentale altère la qualité de vie familiale et amplifie les dysfonctionnements familiaux. Les familles expriment alors un besoin d'information sur la pathologie, de guidance et de soutien tout au long de la maladie. [34,35] La nécessité d’une « alliance thérapeutique » avec la famille et, dès que possible, avec le patient et l’intérêt d’une collaboration étroite entre les différents intervenants est essentielle. [27] La place de l'entourage est 44 représentée par la figure 11, ils sont généralement présents voire envahissants. La psychothérapie est associée aux recommandations nutritionnelles générales dans plus de 6 cas sur 10. Les objectifs nutritionnels à terme sont : atteindre et maintenir un poids et un statut nutritionnel adaptés pour les adultes, ou une vitesse de croissance adéquate pour les enfants et les adolescents ; obtenir une alimentation spontanée, régulière, diversifiée avec un retour à des comportements, des choix alimentaires, des apports énergétiques plus adaptés, et la capacité à s’alimenter en société ; obtenir une attitude détendue et souple face à l’alimentation ; obtenir la réapparition des sensations de faim et de satiété ainsi qu’une réponse adaptée à l’éprouvé des patients [17,18,19] ; éviter les complications potentielles de la renutrition, en cas de dénutrition sévère. [36] Un traitement complémentaire peut-être proposé : supplémentation vitaminique et/ou phosphore (37,8%), compléments nutritionnels oraux (17,1%), traitement médicamenteux (8,1%) selon la clinique et les données para cliniques. [31] Le recours à une nutrition entérale et à l'hospitalisation peuvent être nécessaire en cas de dénutrition sévère ou de critères somatiques, psychiatriques et environnementaux précis. [27,31,37,38,39] 4.5 Amélioration des pratiques professionnelles grâce aux formations La consultation dédiée à l’anorexie mentale est tout de même peu fréquente dans la pratique quotidienne des généralistes ; en effet 84% des médecins généralistes interrogés ont moins de 3 patients anorexiques dans leur patientèle, 14,2% en ont entre 3 et 5 patient(e)s et 3,8% entre 5 et 10 patients. Ces chiffres sont en accord avec la prévalence dans les pays occidentaux (0,5 à 2,2% chez les femmes, autour de 0,3% chez les hommes) [3,4 ,5] et confortent aussi le caractère représentatif de l’échantillon. Cela représente donc dans une patientèle de médecine générale à un instant t, 2 à 3 patients identifiés en moyenne. L'étude confirme donc bien la difficulté de toucher les médecins généralistes par rapport à d'autres pathologies plus fréquentes en pratique quotidienne. Le faible nombre de patients peut expliquer en soi que les médecins généralistes soient peu formés et disponibles à une FMC, bien qu’ils disposent de peu d'expérience avec ces patients. Les médecins généralistes ont donc le plus souvent recours à un avis spécialisé. Mais il faut rappeler que même si le nombre de patients est faible, les consultations se doivent d'être régulières. Compte tenu de la durée d'évolution moyenne de la pathologie, cela représente néanmoins un certain volume de consultations. On peut aussi imaginer que l'offre de formation sur l'anorexie mentale est faible car plus de 80% des 45 médecins généralistes suivent des réunions de FMC (figure 3) et 55,4% sont demandeurs d'une FMC sur ce thème (figure 19). Le diagnostic, le suivi avec bilan et la prise en charge de l'anorexie mentale nécessitent pourtant des connaissances précises. Durant le 3ème cycle des études médicales, seul un item à l’ECN est consacré aux TCA et leurs prises en charge. Comme en témoigne la figure 6, les connaissances sur l'anorexie mentale reposent sur la formation théorique au cours des études (84,8%), puis majoritairement sur les connaissances acquises au cours de l'exercice (52,7%) ou les expériences provenant des relations privées (17%). Les formations complémentaires spécifiques sont rares (8,9%), parfois les médecins deviennent nutritionnistes mais sont alors considérés comme spécialistes, ils ont donc dans ce cas précis été exclus de l'étude. Les modalités de cette formation restent alors à préciser , ils reposent soit sur une amélioration de la formation médicale initiale (38,4%), soit sur une FMC sous forme de réunions à thème (55,4%), ou bien un référentiel pratique facilitant l'anamnèse, les axes de suivi et les prescriptions (56,3% d'entre eux) comme le montre la figure 19. 4.6 Thèses antérieures En Bretagne, plusieurs thèses ont déjà traité le sujet de l'anorexie mentale en médecine générale, mais il s'agissait d'études qualitatives. [28,29] L'une présentée en 2007 [28] étudiait le rôle du médecin généraliste dans la prise en charge de l'anorexie mentale, en réalisant une enquête auprès de 30 médecins de la ville de Rennes. Elle a mis en évidence plusieurs difficultés dans la prise en charge : diagnostic précoce, suivi en particulier pluridisciplinaire, et un besoin d'une meilleure formation adaptée à leur pratique. L'autre présentée en 2011 [29] étudiait aussi le comportement de médecins généralistes confrontés à l'anorexie mentale au moyen d'une étude qualitative auprès de 36 médecins généralistes. Elle présente les prises en charge proposées par les médecins et dégage des axes de travail afin d'améliorer la prise en charge. Une thèse sur le sujet a également été publiée dans le bassin Lillois en février 2011 [40], elle reprenait les mêmes axes : évaluation des modalités et difficultés de prise en charge de l'anorexie mentale par les médecins généralistes exerçant en cabinet de ville, et identification des besoins en formation concernant la prise en charge de cette pathologie. Elle démontre clairement les difficultés de prise en charge de l'anorexie mentale par les médecins 46 généralistes et la nécessité d'une formation complémentaire. La majorité des études menées ces dernières années sur le rôle du médecin généraliste dans la prise en charge de l'anorexie mentale sont des travaux qualitatifs réalisés sur de faibles échantillons (<40) à l'exception de la thèse de Marc Doucet qui se base sur un questionnaire quantitatif et exhaustif (36 questions) sur un vaste échantillon avec un fort taux de réponses. Pour autant, les conclusions de ces différents travaux se rejoignent. Connaissant déjà ces éléments de réponses, le questionnaire utilisé était volontairement plus court et ciblait plus spécifiquement les besoins en formation et les moyens attendus à partir de l'état des lieux des pratiques des médecins généralistes. Le prochain travail pourrait consister à élargir ce type d'études à l'échelle nationale afin de voir s’il existe des disparités régionales, ou bien même plus largement d'uniformiser des réseaux de soins. Un dernier travail retient notre attention, il s'agit d'une thèse soutenue en 2013 [41] qui porte sur la place du médecin généraliste dans le parcours de soins des patientes atteintes d'anorexie mentale, approche qualitative mais à partir d'entretiens réalisés auprès des patientes (et non des médecins généralistes). Cette place semble être variable au fil du parcours de soins des patientes mais le médecin généraliste reste un des intervenants majeurs dans cette prise en charge. 47 Conclusion L'anorexie mentale est donc une pathologie difficile à prendre en charge tant par le médecin généraliste que par les spécialistes. En médecine générale, l’organisation de la prise en charge globale d'un patient anorexique est encore insuffisante, le rôle du médecin généraliste étant pourtant central dans le diagnostic et le suivi de cette pathologie. Il coordonne les soins autour du sujet anorexique et reste l'interlocuteur privilégié des différents spécialistes. Il assure également le suivi rapproché et régulier du patient anorexique. Grâce à cette enquête de pratique nous pouvons donc observer ce qui est réalisé au quotidien par les médecins généralistes d'Ille-et-Vilaine et analyser leurs besoins afin d’améliorer, encourager, accompagner et poursuivre les prises en charge sur l’anorexie mentale. Ceci a permis de déterminer les besoins en formation de ces derniers tant sur les items à aborder que la forme à utiliser. Le nombre de spécialistes étant insuffisant pour assurer un suivi rapproché de ces patients en ambulatoire, le rôle du médecin généraliste est donc essentiel pour assurer la continuité des soins dans l'intervalle des consultations spécialisées. L'attitude des médecins généralistes vis-à-vis de l'anorexie mentale semble suivre les recommandations de l'HAS mais une meilleure connaissance de celles-ci par le biais d'une FMC dédiée pourrait permettre d'optimiser et de diminuer les délais de prise en charge et donc d'améliorer le pronostic de ces patients. Seulement, l'offre de formation complémentaire est faible car l'anorexie mentale représente peu de patients dans l'absolu, bien que ceux-ci nécessitent des consultations régulières. Il s'agit pourtant d'une pathologie de médecine générale puisque la grande majorité des généralistes y est confrontée (>7/10 dans cette étude). Les médecins généralistes ne se désengagent pas, ils sont en demande de davantage de formations et d'un travail en collaboration avec les spécialistes. Par ailleurs, le réseau de soins doit être amélioré afin de permettre aux médecins généralistes un meilleur accès aux avis spécialisés. La prise en charge doit être somatique, nutritionnelle et psychologique, ce dernier volet étant essentiel. Un autre axe d’amélioration important concernerait la poursuite de l’éducation de la population générale, afin que l'environnement familial et scolaire/universitaire puisse également dépister les signes précoces de l'anorexie mentale, d'autant plus que le déni est marqué chez les patients atteints. 48 Ainsi, afin de répondre aux attentes des médecins généralistes brétiliens ayant répondu à l’étude, les fiches disponibles sur le site de l’HAS concernant la prise en charge de l’anorexie mentale leurs ont été envoyées afin de faire le point sur cette pathologie. Le dernier objectif de ce travail était d'apporter une réponse concrète au problème soulevé, en proposant de réaliser un temps de formation, d'information et de discussion entre les principaux acteurs de la prise en charge de l'anorexie mentale. 49 50 Bibliographie [1] I. Nicolas, C. Lamas, M. Corcos. 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L'anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire d'origine polyfactorielle (génétiques, psychologiques, environnementaux, familiaux et socioculturels). La prévalence dans les pays occidentaux se situerait entre 0,5 et 2,2% chez les femmes, autour de 0,3% chez les hommes. Elle survient le plus souvent à l'adolescence avec un pic de fréquence à 14 et 18 ans bien que l'âge semble avancer. Un repérage précoce et un traitement rapide et adapté permettent une amélioration du pronostic de l'anorexie mentale en évitant la chronicisation de la pathologie et ses complications ultérieures. Par conséquent, le médecin généraliste se retrouve en première ligne face à ces patient(e)s en difficulté et sa réponse doit être adaptée pour accompagner ses patient(e)s dans un parcours long et difficile. Ce travail de thèse a pour but d’étudier la pratique des médecins généralistes en Ille et Vilaine sur la consultation de prise en charge de l’anorexie mentale, leurs examens et prescriptions. Il s'agit là d'un état des lieux (et non d'un jugement) visant à améliorer les prises en charge proposées ; avec pour objectif secondaire de connaître leur besoin en formation afin d’optimiser et aider à ce suivi. Je vous propose donc de participer à une enquête de pratique à l’aide d’un court questionnaire en ligne (moins de 3 minutes). https://docs.google.com/forms/d/1avVTZMeHxXAh181Rz18HL7kkdjBiLzkwnjkc8vHrxdM/viewform? usp=send_form Les résultats de l’enquête ainsi que les conclusions de ma thèse vous seront communiqués par mail si vous le souhaitez en le mentionnant à la fin du questionnaire. Je vous remercie par avance pour le temps que vous accorderez à mon étude. 54 Questionnaire 1 État des lieux des pratiques des médecins généralistes sur l'Anorexie Mentale en Ille et Vilaine Du diagnostic au suivi de l'Anorexie mentale et de la coordination avec les différentes structures de soins en Ille et Vilaine *Obligatoire 1. Quel est votre âge? Age < 40 ans Age > 40 ans Quel est votre mode d'activité? * Secteur urbain Secteur semi-rural Secteur rural Seul en Groupe Participez-vous à des réunions de FMC (Formation Médicale Continue) ou à des « groupes qualité » ? Plusieurs fois par an Une fois par an, ou moins d'une fois par an Jamais 2. Suivez vous des patient(e)s atteint(e)s de Troubles du Comportement alimentaires? et si oui, de quels types? * Anorexie Boulimie avec vomissements Surpoids Aucun patient Quelle est la file active de patient(e)s que vous suivez pour Anorexie? <3 3-5 5-10 >10 A quel rythme suivez-vous spécifiquement ces patient(e)s souffrant d'Anorexie mentale en consultation? Jamais ou presque Tous les 6 mois Tous les 3 mois Une fois par mois Plusieurs fois par mois 55 3. Quelles sont vos connaissances sur la pathologie de l'Anorexie mentale? * Connaissances théoriques au cours des études Formations complémentaires spécifiques (DU nutrition, adolescence...) Connaissances acquises au cours de l'exercice Expériences provenant de relations privées avec une personne atteinte : proche / famille ou amis Autre : 4. Quelles ont été les circonstances du diagnostic d'Anorexie mentale? * Consultation systématique : certificat de sport, vaccination Consultation motivée par un symptôme Consultation motivée par un proche Autre : Dans le cas d'une consultation motivée par un symptôme, de quoi s'agit-il? Asthénie Problème de poids Problème alimentaire Malaise Trouble digestif Autre : 5. Quels sont les signes d'alarme qui retiennent votre attention dans cette pathologie? * plusieurs réponses possibles Anorexie, baisse de l'appétit Amaigrissement ou stagnation pondérale en cours de croissance / IMC Aménorrhée Hyperactivité physique Constantes : pouls, température... Autre : 6. Quelles difficultés rencontrez-vous avec ces patient(e)s? * plusieurs réponses possibles Déni de la pathologie ou anosognosie Dysmorphophobie Manque de temps Sentiment d'isolement dans la prise en charge de la patiente Déception lors de l'absence d'amélioration Aucune 56 7. Quelle est la place de l'entourage autour du / de la patient(e) anorexique? Présent Envahissant Absent 8. Un(e) patient(e) vient vous voir avec un IMC inférieur à 15. Prescrivez-vous des examens complémentaires? * Oui Non Si oui, lesquels? plusieurs réponses possibles NFS ionogramme sanguin avec urée, creat albumine bilan hépatique bilan vitaminique bilan phosphocalcique ECG TSH Autre : 9. Quelle prise en charge mettez-vous en place? * plusieurs réponses possibles Recommandations nutritionnelles générales Compléments nutritionnels oraux Supplémentation vitaminique et/ou phosphore Traitement médicamenteux par psychotropes ou antidépresseurs Psychothérapie Autre : 10. Avez-vous recours à un autre avis? * Autre avis systématique Parfois (précisez dans "Autre") Jamais Autre : 57 Si oui, vers quel spécialiste? quelle structure? Confrère/soeur Généraliste Consultation programmée avec un somaticien : nutritionniste ou pédiatre Consultation programmée avec un psychiatre Urgences hospitalières Orientation d'emblée vers une institution spécialisée 11. Le suivi des patient(e)s est-il assuré par vous même (en tant que médecin traitant)? Oui Non Si oui, Suivi exclusif par le médecin traitant Suivi en collaboration avec le spécialiste 12. Quel est le rôle du médecin traitant dans la prise en charge de ces patient(e)s? * plusieurs réponses possibles Dépistage Orientation Prise en charge avec suivi Coordination avec les différents spécialistes Autre : 13. Quels sont les besoins en formation dans ce domaine et sous quelle forme? * Amélioration de la formation médicale initiale FMC sous forme de réunions à thème DU dédié Référentiel pratique facilitant l'anamèse, les axes de suivi et les prescriptions Autre : Vos remarques et commentaires éventuels sur le sujet. Possibilité de laisser un mail pour recevoir des informations sur les formations ou sur le travail de thèse. Fourni par Google Forms 58 Commentaires libres laissés en fin de questionnaire Pour rappels, les réponses ont été anonymisées. Les commentaires ont été regroupés par items. Faible fréquence en médecine générale « Une patiente anorexique en 20 ans d'exercice... » « Peu de patient concerné (ou alors je ne les dépiste pas...) » « Faible prévalence » « Pathologie très rarement rencontrée dans ma pratique (2-3 cas avérés en 30 ans dont 1 cas très sévère) » « Curieusement je n'ai pas eu de cas à suivre mais j'ai une patientèle âgée » « Difficile de répondre car non concernée dans ma patientèle » « Installé depuis 1an 1/2, je n'ai pas eu l'occasion de suivre de patient anorexique (ou non diagnostiqué) j'ai donc indiqué ce que je ferai si j'en avais » « Questionnaire délicat à remplir tant qu'on n'a pas de patient atteint du trouble » Coordination avec les spécialistes et différentes structure du territoire « Le médecin traitant se retrouve seul au début de la prise en charge difficile, ce qui nécessite une collaboration entre les médecins mais il manque de structure adaptée et trop de délai, faute de place, pour une prise en charge par psychothérapie » « Nécessite de mettre en place un centre ou une consultation de référence d'accès facilité afin d' éviter les prises en charges inadaptées et les dérives dans les pratiques... » « Je fais appel à la pédiatrie pour les moins de 16 ans, à l'équipe mobile des TCA (Envol) pour les plus de 16 ans. J'aimerais connaître l'ensemble des acteurs pour une prise en charge et une orientation plus fournie » « Grande disponibilité à Rennes de l'unité des TCA de la clinique Saint Yves » 59 « Prise en charge pluridisciplinaire plus que nécessaire / savoir passer la main à des établissements de soins spécialisés » « Vous n'abordez à aucun moment le problème de l'accès au spécialiste, aux structures spécialisées, ce qui est la plus grande difficulté dans notre pratique quotidienne. Vous pouvez toujours former les médecins généralistes, tant que la mise en place de la prise en charge pluridisciplinaire prendra autant de temps à se mettre en route (parfois plusieurs mois...) et qu'il n'y aura pas de place pour accueillir ces personnes dans des structures adaptées, cela ne changera rien » Envie de formation « Merci de m'envoyez votre thèse ou au moins un résumé en pdf » « Je souhaite recevoir un résumé de votre thèse » « Merci de me tenir informer de vos résultats » « Excellent thème pour une FMC » « Merci de me tenir au courant du résultat de votre thèse » « Il y a un manque de référentiel » « C'est une problématique qui m'interpelle, je serais intéressée d'avoir vos résultats et de lire votre travail » « Nécessité d'une FMC et aussi d'un annuaire de référent vers où diriger les patients » « Je veux bien les résultats de ta thèse... Super travail... » « Bon courage pour ta thèse, c est un très bon sujet ! » « Je veux bien avoir les suites de ton travail ! » Expériences vécues, témoignages « Ne pas méconnaître d'autre patho sous-jacente chez ces jeunes patients : le mois dernier, appelé pour des sensations de froid intense sans point d'appel clinique chez une patiente en permission d'une structure, les examens ont retrouvé une pyélonéphrite sur insuffisance rénale connue (bactériémie probable) » « Le rôle du médecin généraliste est très important dans ce cas, car le plus souvent il connaît le ou la patient(e) depuis longtemps, dès sa petite enfance, et aussi il est souvent le médecin de la famille, connais son histoire et chacun de ses membres » 60 « Prise en charge longue et souvent émaillée de rechutes, le médecin doit accepter la difficulté voire l’impossibilité de Guérir , mais accompagner ... » « L'anorexie est une maladie plus que complexe, déjà pour nous, médecins. Une difficulté importante est le temps nécessaire à l'accompagnement des familles, tenter de répondre à leurs questions de plus en plus précises. Et … tenter de ne pas rentrer involontairement en contradiction avec l'opinion des spécialistes! La cohérence du suivi "en prend un coup"! » « J'insiste sur l'importance des groupes : - Groupes autonome de ville (d'entraide à l'instar de ceux des anciens buveurs et anciens toxicomanes). J'informe toujours les patient(e)s de l'existence de groupes et les encourage à aller "voir". Accès libre gratuit et chaleureux. - Les témoignages de ceux qui s'en sont sortis, très porteurs. Dans les institutions il devrait y avoir un témoignage par semaine !. - Les groupes de paroles encadrés, pas assez nombreux. - Le modèle du Minesotta est expert en matière de groupes de thérapie. » « Je suis installée depuis 1an et j'ai eu très peu de cas alors que c'est un sujet qui me préoccupe. Une patiente s'est améliorée seule rapidement, une n'est plus suivie par moi car le suivi psychiatrique est extrêmement lourd, une autre est probablement anorexique depuis 30 ans et est anosognosique, j'ai actuellement une suspicion chez une enfant que je revois bientôt. Somme toute peu d'expérience pour répondre comme il faut à ce questionnaire. (Mais ce sont toutes des femmes....) » « Difficulté de la compliance des patients quand le déni est présent » « Lorsque nous mettons en place une prise en charge ou un suivi, il n'est pas toujours respecté avec souvent des perdues de vue » « Le suivi de ces patient(e)s est délicat, chez l'ado, la prise en charge multidisciplinaire de mes patientes est faite en milieu hospitalier, et ces patientes sont très peu demandeuses de suivi de ma part (la reprise de contact a été longue après la première hospitalisation, avec un ressentiment envers moi de la part de ces jeunes filles qu j'avais faites hospitaliser). Chez les adultes, diagnostiquées avant mon installation, suivies par d'autres médecins, la prise en charge me paraît aussi très difficile car je ne les connais pas bien, et je pense que je pourrais passer "à côté" de signes de rechute subtils (modifications du comportement notamment), d'autant plus que dans ces cas précis, l'entourage familial n'est pas conscient du problème » 61 « Prise en charge incompatible avec la charge de travail actuelle et le peu de rémunération d'une consultation qui ne doit maintenant pas excéder 7 à 15 min maximum, et plus ça va pire c'est, trop de patients pas le temps » Commentaires des médecins exclus Quatre médecins nutritionnistes se sont d'eux-même exclus de l'étude car spécialistes. « J' ai une orientation nutrition exclusive, je prend donc en charge à ce titre des patients atteints de TCAs qui me sont adressé par des confrères. Je vous souhaite un bon recueil d'éléments pour votre thèse que j aurais j 'espère le plaisir de pouvoir lire » « Désolée, je ne peux rentrer dans l'enquête. Je suis médecins nutritionniste, les patients me sont adressés par les généralistes. Je suis intéressée cependant par les conclusions de votre thèse. Bon courage à vous » « Je ne suis pas généraliste mais nutritionniste et médecin à Saint-Yves. Je reçois beaucoup d'anorexiques mais c'est le but des consultations donc je ne fais pas de "dépistage". Je préfère donc ne pas répondre à votre questionnaire, mon activité n'étant en rien comparable à celle d'un généraliste » 62 U.F.R. DE MEDECINE DE RENNES N° PEDUZZI-RAT. - Evaluation des besoins en formation des médecins généralistes en Ille-et-Vilaine sur l'Anorexie mentale à partir d'un état des lieux des pratiques des médecins généralistes : du diagnostic au suivi et de leur coordination avec les différentes structures de soins. 60 feuilles., illustrations., 19 figures, 30 cm.- Thèse : Médecine ; Rennes 1; 2016 ; N° Résumé français Titre: Évaluation des besoins en formation des médecins généralistes en Ille-et-Vilaine sur l'Anorexie mentale à partir d'un état des lieux des pratiques des médecins généralistes : du diagnostic au suivi et de leur coordination avec les différentes structures de soins. Introduction: L'anorexie mentale est une pathologie complexe et grave . Un repérage précoce, une prise en charge rapide et adaptée permettent une amélioration du pronostic de l'anorexie mentale en évitant la chronicisation et les complications ultérieures. Le médecin généraliste de premier recours a un rôle central dans le diagnostic et le suivi de cette pathologie. L'objectif principal est d'établir un état des pratiques des médecins généralistes brétiliens afin d'évaluer les besoins en formation sur l'anorexie mentale. Méthode: Il s’agissait d’une étude descriptive et observationnelle, réalisée sur une période de 10 semaines à partir du 19 janvier 2016, avec une relance unique. Les critères d’inclusion étaient de pratiquer la médecine générale libérale en Illeet-Vilaine et d’être inscrit sur la liste des mails du CDOM. Le critère de jugement principal était les modalités de suivi de patients atteints d'anorexie mentale. Résultats: 112 médecins généralistes ont participé à l’étude sur les 497médecins généralistes inclus. Sur l’ensemble des médecins traitants interrogés, 71,6% suivent des patients anorexiques, sur une file active de moins de 5 patients pour 88,2% d'entre eux. Deux tiers des médecins généralistes en assurent le suivi, le plus souvent en collaboration avec les spécialistes (97,3%). Ils expriment certaines difficultés et sont favorables à une formation complémentaire sur l'anorexie mentale par le biais d'une FMC (55,4%), d'un référentiel pratique (56,3%) ou par l'amélioration de la formation médicale initiale (38,4%). Conclusion: L'attitude des médecins généralistes vis-à-vis de l'anorexie mentale semble suivre les recommandations mais reste perfectible. Ce constat va permettre de mettre en place une formation adaptée aux attentes des médecins généralistes tant sur les items que la forme de celle-ci. Résumé anglais [facultatif] Rubrique de classement : Étude observationnelle descriptive Mots-clés : anorexie mentale médecine générale Ille-et-Vilaine Mots-clés anglais MeSH : anorexia nervosa general practitioners Ille-et-Vilaine Président : JURY : Assesseurs : Monsieur Ronan Thibault Monsieur Monsieur Monsieur Monsieur Richard Lauvin [directeur de thèse] David Briard [co-directeur de thèse] Dominique Drapier Didier Myhié Adresse de l’auteur : 10 boulevard Jeanne d'Arc, 35000 Rennes 63