Pierre Lescure

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Pierre Lescure
Marques
& Pubs
cultes
Années 1940-1960
Pierre Lescure
Sonia Buchard
Marques
et Pubs
cultes
Années 1940-1960
SOMMAIRE
p. 6
P. 12
P. 20
P. 23
P. 24
P. 26
P. 29
P. 32
P. 36
P. 39
P. 42
P. 44
P. 45
P. 46
INTRODUCTION
L’ÉQUIPEMENT DE LA MAISON
BIC
BUTAGAZ-PROPAGAZ
CALOR
FRIGIDAIRE
MOULINEX
PHILIPS
RADIOLA
SEB
TEFAL
TEPPAZ
VEDETTE
LES AFFICHISTES
P. 119
P. 128
P. 131
P. 132
P. 134
P. 135
P. 136
P. 137
P. 138
P. 140
P. 146
P. 68
P. 70
P. 72
P. 74
P. 78
P. 81
P. 83
P. 84
P. 87
P. 91
P. 92
P. 96
P. 97
P. 101
P. 103
P. 104
P. 108
P. 113
P. 114
L’ALIMENTATION
AMORA
BADOIT
BANANIA
COCA-COLA ET PEPSI-COLA
DUBONNET
EVIAN
FLORALINE ET BLÉDINE
HOLLYWOOD
LA VACHE QUI RIT
LIEBIG
LU
LUSTUCRU
MAGGI
MIKO
ORANGINA
OVOMALTINE
PERRIER
RIVOIRE & CARRET
LES SLOGANS
Page 2
Publicité Renault pour la R8, 1962.
À gauche
Salon des Arts ménagers, Grand Palais, Paris, 1950.
BOURJOIS
CADUM
COLGATE
DIM
GEMEY
GUERLAIN
HERMÈS
LA REDOUTE
PETIT BATEAU
SCANDALE
P. 150
LES LOGOS
P. 154
LES TRANSPORTS
P. 164
P. 59
LA MODE, LA BEAUTÉ
P. 168
P. 169
P. 172
P. 174
P. 178
P. 182
P. 187
P. 190
AIR FRANCE
GENERAL MOTORS
PANHARD & LEVASSOR
MICHELIN
PEUGEOT
RENAULT
SNCF
VELOSOLEX
BIBLIOGRAPHIE
L’équipement
de la maison
Au cours des années 1950 et 1960, la vie quotidienne
des Français (et surtout des Françaises !) est totalement
bouleversée par l’apparition d’appareils révolutionnaires :
réfrigérateurs, machines à laver, fers à repasser vapeur,
aspirateurs et machines à coudre permettent aux mères
de famille de gagner un temps considérable. Tandis que
les ménagères savourent le progrès technologique qui les
débarrasse de nombreuses corvées, toute une génération
découvre avec délice les joies de la radio, de la télévision…
et du stylo à bille.
Une jeune femme montre
comment essorer son linge
avec l’une des premières
essoreuses électriques, 1949.
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La guerre ayant détruit des milliers d’infrastructures et de foyers, la priorité, au lendemain de la
Libération, a consisté à se retrousser les manches
pour reconstruire le plus rapidement possible.
100 000 logements par an sortent de terre dans les années 1950,
puis le rythme s’accélère à plus 550 000 logements par an jusqu’à
la crise pétrolière de 1973. Alors qu’avant guerre, seul un foyer sur
dix disposait d’une douche ou d’une baignoire (on faisait sa toilette
dans l’évier de la cuisine), les nouveaux appartements sont conçus
selon les normes du confort moderne :
douche, WC, arrivée d’eau, gaz de ville
et raccordement au tout-à-l’égout…
Avec la généralisation du chauffage
au gaz ou à l’électricité, les corvées
d’approvisionnement en charbon disparaissent. Dans le même temps, des
techniques industrielles innovantes
permettent aux entreprises de produire à moindre coût des appareils manufacturés, en utilisant de nouveaux matériaux comme le
plastique. Le niveau de vie augmentant constamment, toutes les
conditions sont alors réunies pour que le pays entier s’équipe massivement en électroménager.
« Ménagères, vous ne blanchirez
plus votre linge à la force du poignet,
une machine y pourvoira. »
Le Salon des Arts ménagers,
symbole de modernisation
Et, en ces années d’après guerre, l’électroménager est une véritable affaire d’État ! Tous les ans, le président de la République
vient s’émerveiller devant les dernières innovations du Salon des
Arts ménagers, qui a rouvert ses portes au Grand Palais en 1948.
Créé à l’initiative d’un haut fonctionnaire en 1923, ce Salon placé
sous la tutelle du CNRS revendique une mission pédagogique et
sociale : il s’agit ni plus ni moins d’éduquer les foules au progrès.
Des milliers de visiteurs s’empressent d’y découvrir les nouveautés
qui vont leur garantir plus de confort au quotidien : le réfrigérateur
et la machine à laver bien sûr, mais aussi l’essoreuse, le grille-pain,
la yaourtière et même les napperons en plastique lavables à l’eau.
Au cinéma, les actualités diffusées en première partie font miroiter
le rêve d’un confort tout neuf, comme en témoigne ce reportage de
1949 : « Ménagères, vous ne blanchirez plus votre linge à la force du
poignet, une machine y pourvoira. Comme celle-ci vous fera désormais échapper à la corvée de la vaisselle. Le Frigidaire, toujours
Quel bonheur d’utiliser
un nettoyant vapeur
Electrolux dans sa cuisine !
Photographie de 1965.
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amélioré dans sa conception, vous évitera les marchés quotidiens. »
Si, au début des années 1950, le budget des familles françaises
ne leur permet pas encore d’accéder à tout ce luxe, l’augmentation du pouvoir d’achat accélère le taux d’acquisition dès 1954, qui
s’envole littéralement dans les années 1960. Alors que 7,5 % des
ménages ont un réfrigérateur en 1954, ils sont dix fois plus nombreux en 1968 !
Quand l’électroménager libère les femmes
La cuisine moderne
des années 1950,
avec son confort d’un strict
minimum : trois machines,
une petite batterie
d’ustensiles… et le linge
qui sèche au plafond.
Il suffit de lire les argumentaires des publicités de l’époque pour
comprendre que le véritable enjeu de l’acquisition de ces nouveaux
équipements, c’est le gain de temps. Sur une annonce presse de
1955 pour la marque de réfrigérateurs FNAF, une maîtresse de
maison en tablier explique que son frigo lui fait gagner un temps
fou 365 jours par an : « J’ai fait le compte, dit-elle, je gagne au
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moins sept heures par semaine et au bout de l’an, ça fait plus de
trente journées de travail… plus d’un mois de loisirs !… et combien
de pas inutiles évités. » Alors que, quelques années auparavant, il
fallait aller au marché chaque matin pour acheter le dîner du soir
et cuisiner les restes dès le lendemain
midi, passer des heures à éplucher
les légumes et préparer le repas, puis
encore une heure à faire la vaisselle de
toute la famille, les épouses à qui les
maris ont pu offrir un réfrigérateur,
une Cocotte-Minute, un presse-purée
ou une poêle qui n’attache pas gagnent plusieurs heures par jour
et peuvent prendre du temps pour elles. Ce cadeau, elles le doivent
à Frigidaire, SEB, Moulinex et Tefal, des marques qui deviennent
leurs meilleurs alliés culinaires. Pour entretenir leur maison, les
femmes s’appuient sur Vedette, Radiola ou Calor qui les aident à
passer l’aspirateur, laver le linge, l’essorer et le repasser. Un slogan
culte résume cette formidable évolution du mode de vie : « Moulinex libère la femme ! »
Mi-bourgeoises, mi-pin-up,
elles semblent radieuses devant tant
de merveilles domestiques.
Scène de vie des
années 1960 : la collection
de 33 tours, le téléviseur,
les couleurs de la déco et
de la tenue… et la coupe de
cheveux de Madame !
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Une salle de séjour
moderne en 1954.
Entre le début des années 1950 et la fin des années 1960, les femmes
représentées dans les publicités pour l’électroménager changent de
coupe de cheveux et de look, mais continuent d’incarner à la perfection le stéréotype de la maîtresse de maison qui fait mijoter la
blanquette de veau en attendant que son mari rentre du bureau.
Mi-bourgeoises, mi-pin-up, elles semblent radieuses devant tant de
merveilles domestiques et rêvent d’un robot ménager pour la fête
des mères… Les marques s’adressent exclusivement aux hommes,
qui tiennent les cordons de la bourse et ont la délicate mission d’investir pour le bonheur familial. La publicité reflète la réalité des
femmes de la classe moyenne, tandis que les plus aisées se font
aider et les plus modestes travaillent. Au cours des années 19501960, elles sont néanmoins nombreuses à trouver un emploi dans
le tertiaire. En 1965 (il y a donc seulement cinquante ans…), une
loi est votée, qui autorise enfin les femmes à travailler sans l’accord de leur mari, à gérer leur argent et à ouvrir un compte en
banque à leur nom ! Libérées des fourneaux, les femmes ont encore
un long chemin à parcourir vers la parité, mais le mouvement est
en marche et trouve une visibilité à la fin des années 1960 avec le
MLF (Mouvement de libération des femmes).
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À nouvelles technologies, nouvelle culture
Dans cette société en plein bouleversement sociologique, les modes
et les goûts changent. La modernité doit s’afficher, et la décoration
vieillotte d’avant guerre est remplacée par un mobilier aux lignes
épurées. Les Français s’équipent de tables en Formica, de mobilier
en bois et métal, d’accessoires en Bakélite et de tissus orange ou
jaune moutarde… Le design s’invite dans le living-room, où l’on
aime recevoir pour revendiquer son statut social en montrant ses
nouvelles acquisitions inspirées de Eames, Jacobsen ou Le Corbusier. Mais l’achat le plus important, celui qui fait immédiatement
basculer dans une autre époque, est bien sûr celui d’une télévision.
« Le monde s’ouvrira devant vous », assure d’ailleurs la publicité
pour les téléviseurs Singer. S’équiper d’une télévision Philips, d’un
poste Radiola ou d’un tourne-disque à piles Teppaz, c’est accéder
d’un coup à toute la culture des années 1960 en écoutant « Salut
les Copains » sur Europe 1, en regardant « Dim, Dam, Dom » sur
la deuxième chaîne de l’ORTF ou en usant ses vinyles à force de
passer en boucle les tubes de Jacques Dutronc, Françoise Hardy et
Johnny Hallyday.
Lorsque la société de consommation
faisait encore rêver
Aujourd’hui, la société de consommation a depuis longtemps
atteint son paroxysme, et ses dérives nous amènent à remettre en
cause notre modèle économique. La quête perpétuelle de nouveautés génère une frustration permanente, la surproduction épuise nos
réserves naturelles, les déchets génèrent une pollution considérable,
tandis que l’obsolescence programmée
des objets plonge notre civilisation
dans une absurdité sans fond. Mais
ces interrogations qui sont les nôtres
sont à mille lieues de l’état d’esprit
des consommateurs des années 1950
et 1960, qui n’avaient pas la moindre
idée de ce que pourrait signifier le
concept d’achat responsable au début
du XXIe siècle. Les appareils électroménagers étaient conçus pour
durer, les objets avaient le réel pouvoir de changer la vie et les
marques tenaient leurs promesses. Les publicités de l’époque vendaient du bonheur, et les consommateurs y adhéraient sans réserve,
heureux de céder au plaisir tout simple d’acheter des produits qui
leur faisaient profiter du progrès technologique.
S’équiper d’une télévision
Philips, d’un poste Radiola,
c’est accéder d’un coup à toute
la culture des années 1960.
L’ÉQUIPEMENT DE LA MAISON
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BIC
L ANC É E N 1 95 0, L E ST YLO À
BIL LE B I C CR I STA L a révolutionné
Le succès est immédiat : 10 000 exemplaires
sont vendus chaque jour la première année,
250 000 trois ans plus tard. Très vite,
la vie quotidienne et totalement transformé
Marcel Bich part à la conquête des marchés
notre rapport à l’écriture. En quelques
étrangers et ouvre des filiales dans le monde
années, la plume qui gratte, l’encrier
entier. Les affiches drôles, ludiques
et le buvard rose laissent place à la bille
et colorées de Raymond Savignac jouent
qui glisse à l’infini sur le papier. Le stylo
un rôle majeur dans la création de l’image
ne se recharge plus, il affiche 2 kilomètres
de la marque : en 1952, la campagne remporte
d’autonomie au compteur !
même le premier oscar de la publicité.
L’entreprise BiC est créée à la Libération
Huit ans plus tard, l’affichiste dessine
par le baron Marcel Bich, épaulé par
le bonhomme BiC qui deviendra le logo
sa femme et son associé Édouard Buffard.
officiel : un écolier en cravate et culotte
Spécialisé dans la sous-traitance d’éléments
courte, qui semble détenir toute
de stylographe, le baron Bich décide
d’améliorer le brevet du Hongrois László Biró la connaissance du monde dans sa bille
ronde… Depuis, le BiC est devenu le stylo
(un stylo à bille qui fuit et tache) et trouve
à bille le plus vendu, il est entré dans
l’équilibre parfait entre la taille de la bille,
le Larousse des noms communs et a trouvé
la formule d’encre et la pression du tube
sa place au sein des collections de design
réservoir. Sur les conseils du président
des musées. Dans les années 1970, la petite
de l’Agence française de propagande,
entreprise de Clichy diversifie son offre,
il supprime le H de son nom pour baptiser
faisant de BiC l’une des marques françaises
son stylo BiC.
les plus connues au monde.
Ci-dessus
« La signature du patron…
à la pointe “BiC” bien
entendu ! » Publicité pour
le BiC Cristal parue dans le
magazine Paris-Match en
1954 (illustrateur anonyme).
À droite
« Nouvelle bille BiC ».
Affiche de Savignac pour
la promotion des stylosbilles dans les écoles,
1961. L’image de l’écolier
sera reprise comme logo
officiel de la marque l’année
suivante.
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L’ÉQUIPEMENT DE LA MAISON
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BUTAGAZ-PROPAGAZ
CI NQ A NS A PRÈS L A
LI BÉ RATIO N, les Français font une
À gauche
« Butagaz, le premier
butane français ». Publicité
illustrée par Bleuer,
fin des années 1940.
Ci-dessus
« Comme c’est pratique
l’eau chaude sur l’évier avec
un chauffe-eau alimenté
par Butagaz Propagaz ».
Dans les années 1950,
la publicité met en scène
la révolution domestique
de l’eau chaude au robinet.
millions d’usagers, la bouteille bleue entre
dans le paysage quotidien. Les camions
et les utilitaires Butagaz sillonnent
découverte qui va changer leur vie : l’eau
les nationales, et chacun prend l’habitude
chaude. Non celle qu’il faut chauffer, mais
celle qui coule du robinet et permet de faire de déposer sa bouteille vide à la consigne
avant d’en acheter une nouvelle…
la vaisselle, la lessive et, surtout, la toilette…
Comme toutes les innovations techniques
La production d’eau chaude sanitaire
majeures, l’arrivée du gaz domestique
se généralise en effet dans les années 1950
marque aussi la fin d’une époque.
grâce à de petites bouteilles de butane
À Paris, disparaissent ainsi les bougnats
bleues de 13 kilos, au pied carré :
et les magasins « Vins & Charbons »,
les bouteilles Butagaz. Les ingénieurs
où le patron livrait les sacs de combustible
de la Société pour l’utilisation rationnelle
pendant que sa femme servait un coup
du gaz (URG) les ont créées vingt ans
à boire. En 1951, Butagaz lance la bouteille
auparavant, mais la guerre en a interrompu
Propagaz, qui contient du propane et offre
la production jusqu’en 1949, faute d’acier
et de main-d’œuvre. Chaque bouteille comble un meilleur débit en cas de grands froids.
Le marché explose dans les années 1960,
alors les besoins d’une famille de quatre
marquées par la multiplication des citernes
personnes pendant un mois, lui permettant
de gaz dans les campagnes
de cuisiner et d’avoir de l’eau chaude
au robinet, mais aussi d’alimenter le système et l’automatisation de la distribution.
La mascotte Butagaz fait alors son apparition
de chauffage de l’habitation. L’hiver
dans les publicités de la marque, toujours
est désormais vaincu : la maison est enfin
chaleureuses, colorées et ludiques.
chaude… En quelques années, avec deux
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