Les nombres parfaits

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Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Département de Mathématiques
Université de Béjaia
Algérie
[email protected]
http://www.bakir-farhi.net
Béjaia, le 7 décembre 2014
I
Introduction
Nous commençons par donner quelques définitions :
Définition 1. Un entier strictement positif est dit parfait ( ÐA K ) s’il est égale à la somme de
ses diviseurs propres (i.e. ses diviseurs, autre lui même). Mathématiquement, on a :
déf
n ∈ N∗ est parfait ⇐⇒
∑
d = n.
d/n
d̸=n
Par exemple, le nombre 6 est parfait car ses diviseurs propres sont 1, 2 et 3 et on a bien
1 + 2 + 3 = 6.
Les premiers nombres parfaits sont : 6, 28, 496, 8128, . . .etc.
Définition 2. Un entier strictement positif est dit déficient ( ‘¯AK ) si la somme de tous ses
diviseurs propres est strictement inférieure à lui même. Mathématiquement, on a :
déf
n ∈ N∗ est déficient ⇐⇒
∑
d < n.
d/n
d̸=n
Par exemple, le nombre 8 est déficient car ses diviseurs propres sont 1, 2 et 4 et on a bien
1 + 2 + 4 = 7 < 8.
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Bakir FARHI
Définition 3. Un entier strictement positif est dit abondant ( Y K@ P ) si la somme de tous ses
diviseurs propres est strictement supérieure à lui même. Mathématiquement, on a :
déf
n ∈ N∗ est abondant ⇐⇒
∑
d > n.
d/n
d̸=n
Par exemple, le nombre 12 est abondant car ses diviseurs propres sont 1, 2, 3, 4 et 6 et
on a bien 1 + 2 + 3 + 4 + 6 = 16 > 12.
Faisons remarquer que ces trois définitions se complètent, c’est-à-dire que tout entier
strictement positif est ou bien parfait, ou bien déficient, ou bien abondant.
Les propriétés suivantes sont immédiates :
• Tout diviseur d’un nombre déficient est déficient.
• Tout multiple d’un nombre abondant est abondant.
• Tout diviseur propre d’un nombre parfait est déficient.
• Tout multiple propre d’un nombre parfait est abondant.
La deuxième propriété (et la quatrième aussi) montre qu’il existe une infinité de nombres
abondants. D’autre part, tout nombre premier (et même toute puissance d’un nombre premier)
est déficient ; d’où l’existence d’une infinité de nombres déficients. En revanche, pour les nombres
parfaits, on ne sait toujours pas s’il y en a une infinité ou non (voir plus loin).
Historiquement, les nombres parfaits sont apparus pour la première fois à l’école pythagoricienne (vers 500 Av J.C) chez laquelle les nombres sont sacrés (c’est à Pythagore que
l’on doit la citation “tout est nombre”). C’est cette école grecque, à la fois philosophique et
mathématique, qui a attribué à ces nombres la qualité de perfection. L’essentiel de cette philosophie arithmétique des nombres parfaits est exposé par le néo-pythagoricien Nicomaque
de Gérase (vers l’an 100 ap J.C) dans son ouvrage intitulé “Introduction Arithmétique”. Cependant, les traditions néopythagoricienne et euclidienne sont complètement différentes, étant
donnée que l’euclidienne est fondée sur des raisonnement rigoureux alors que la néopythagoricienne est fondée sur l’intuition et l’expérience. Ainsi, dans l’ouvrage de Nicomaque, rien n’a
été démontré 1 et on en trouve même des propositions erronées ! À titre d’exemple, Nicomaque
énonce qu’il existe un unique nombre parfait dans chaque rang décimal (c’est à dire dans chaque
intervalle du type [10n , 10n+1 [). Pour convaincre, Nicomaque fait constater que sa proposition
est, en effet, vraie pour les 4 premiers rangs (il existe un unique nombre parfait composé d’un
chiffre, un unique nombre parfait composé de deux chiffres, un unique nombre parfait composé
de trois chiffres et un unique nombre parfait composé de quatre chiffres) et il conclut (par
induction incomplète) qu’elle reste vraie pour tous les rangs ! Ce n’est qu’un millénaire (environ) après Nicomaque que certains mathématiciens arabes (comme al-Baghdadi) ont réfuté la
proposition de Nicomaque en signalant qu’elle tombe à défaut pour le cinquième rang.
Influencés par l’ouvrage de Nicomaque, certains hommes de religions monothéistes ont
récupéré et ont développé la philosophie néopythagoricienne des nombres parfaits. Selon eux,
1. Sauf quelquefois en utilisant des figures géométriques.
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Dieu a choisi de créer la terre en 6 jours car le nombre 6 est parfait !
Les nombres parfaits ont été étudiés aussi par Euclide (vers le 3ème siècle Av J.C) mais
sans qu’ils soient mêlés à une quelconque philosophie. Bien au contraire, Euclide a démontré
(presque rigoureusement) un théorème fondamental sur ces nombres, qui est le suivant :
Le théorème d’Euclide. Soit n un entier strictement positif. Si le nombre p = 2n − 1 est
premier, alors le nombre N = 2n−1 p est parfait.
En prenant par exemple dans le théorème d’Euclide n = 2, on trouve le nombre parfait N = 6
et en prenant n = 3, on trouve le nombre parfait N = 28 mais on ne peut pas prendre dans
ce théorème n = 4 car le nombre 24 − 1 = 15 n’est pas premier. On peut montrer que dans
le théorème d’Euclide, le nombre n doit être obligatoirement premier, ce qui est une condition
nécessaire mais loin d’être suffisante. Il semble aussi que tous les nombres parfaits s’obtiennent
par la formule d’Euclide mais ceci n’a pas encore été démontré ! Cependant, on sait que tout
nombre parfait pair est de la forme donnée par Euclide dans son théorème. Cet important
résultat fut énoncé pour la première fois par le grand savant arabe Ibn al-Haytham (avec même
une tentative de démonstration) mais il ne fut démontré rigoureusement qu’en 1747 par Euler :
Le théorème d’Euler. Tout nombre parfait pair est de la forme :
N = 2n−1 p,
avec n ∈ N∗ et p = 2n − 1 premier.
Quant aux nombres parfaits impairs, on n’en a découvert aucun jusqu’à présent mais sans qu’on
puisse fournir de preuve de leur inexistence ! On a juste montré que si un nombre parfait impair
existe alors il est strictement plus grand 2 que 101500 . La conjecture des nombres parfaits impairs
s’énonce :
La conjecture des nombres parfaits impairs. Il n’existe pas de nombre parfait impair.
Après Euclide, c’est dans la civilisation musulmane que les nombres parfaits ont trouvé
leur essor. Les savants musulmans se sont occupé non seulement de la recherche de nombres
parfaits de plus en plus grands mais aussi de leur étude théorique et de leur généralisation.
Un des concepts généralisant les nombres parfaits (qui existait déjà chez les pythagoriciens) est
celui des nombres amicaux ( éK. AjJÖÏ @
X@Y« B@).
2. Ce résultat a été prouvé en 2012 par P. Ochem et M. Rao
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Définition 4. Deux entiers strictement positifs x et y sont dits amicaux si la somme des diviseurs propres de x donne y et la somme des diviseurs propres de y donne x. Mathématiquement,
on a :
(x, y) ∈ N∗2 est un couple de nombres amicaux
⇐⇒
∑
d = y et
d/x
d̸=x
⇐⇒
∑
d/x
d=
∑
∑
d=x
d/y
d̸=y
d = x + y.
d/y
On constate que si x ∈ N∗ est un nombre parfait alors le couple (x, x) est un couple
de nombres amicaux. C’est pour cette raison qu’on considère le concept des nombre amicaux
comme une extension du concept des nombres parfaits. Cependant, la plupart des auteurs
ne considèrent comme couples (x, y) de nombres amicaux que ceux qui vérifient x ̸= y. Le
∑
premier exemple de tels couples est (220, 284) (on vérifie aisément que d/220,d̸=220 d = 284 et
∑
d/284,d̸=284 d = 220).
Les savants grecques n’ont pas réussi à trouver de formules closes pour les couples de
nombres amicaux. La première formule sur ces couples est due au mathématicien arabe Thabit
áK @ IK
. . AK) :
Ibn Qurra ( èQ¯
Le théorème de Thabit Ibn Qurra. Soit n ≥ 2 un entier. Si les trois nombres p =
3 · 2n−1 − 1, q = 3 · 2n − 1 et r = 9 · 22n−1 − 1 sont premiers alors les deux nombres x = 2n pq
et y = 2n r sont amicaux.
Noter que le couple (220, 284) s’obtient par ce théorème pour n = 2. Le prochain couple
de nombres amicaux qu’on obtient par le théorème de Thabit Ibn Qurra correspond à n =
4 et c’est le couple (17296, 18416), qui est découvert par le mathématicien arabe al-Farisi
áK YË@
ÈAÒ»)
( úæ…PA®Ë@
au 13ème siècle. Le couple suivant s’obtient en prenant n = 7 et c’est
le couple (9363584, 9437056), qui est découvert par le mathématicien iranien Mouhammad
Baqir Yazdi au 16ème siècle. Cependant, il existe bien des couples de nombres amicaux qui
ne s’obtiennent pas par le théorème de Thabit Ibn Qurra, comme par exemple (1184, 1210),
(2620, 2924), (5020, 5564), . . .etc.
Après les mathématiciens musulmans, ce sont les mathématiciens occidentaux qui se sont
préoccupés des nombres parfaits et ce à partir du 17ème siècle. Parmi ceux du 17ème siècle, on
peut citer : Descartes, Frenicle, Mersenne, Fermat, Wolf et bien d’autres. Mais ce n’est qu’à
partir du 18ème siècle que des résultats nouveaux commencent à paraı̂tre sur ce sujet, notamment
avec Euler (au 18ème siècle) et Sylvester (au 19ème siècle).
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Les recherches actuelles sur les nombres parfaits se dirigent toutes dans la direction de la
conjecture des nombres parfaits impairs. À défaut de pouvoir démontrer cette conjecture, qui
est apparemment très difficile, les mathématiciens tentent de prouver des résultats de l’un des
types suivants :
— Si N est un nombre parfait impair, on a N > N0 (où N0 ∈ N∗ est un grand nombre
explicité) ;
— Si N est un nombre parfait impair alors N possède au moins un facteur premier > p0
(où p0 ∈ N∗ est un grand nombre explicité) ;
— Si N est un nombre parfait impair, alors N contient au moins k facteurs premiers
distincts (où k ∈ N∗ est explicité)
ou d’un autre type semblable. Néanmoins, on doit noter que les recherches actuelles menées sur
ce domaine sont souvent accompagnées de machines informatiques puissantes et d’algorithmes
ingénieux qui aident dans les calculs. Parmi les plus brillants de la période récente sur cette
recherche, on peut citer : C. Pomerance, P. Hagis, M. Kishore, G. L. Cohen, W. L. McDaniel,
D. E. Iannucci et bien d’autres.
II
Les fonctions arithmétiques d et σ
En Mathématiques, une fonction arithmétique est simplement une fonction f : N∗ → R.
Certaines de ces fonctions ont des propriétés très riches, ce qui permet -en les utilisant- de
résoudre certains problèmes d’arithmétiques et de la théorie des nombres. Parmi les fonctions
arithmétiques les plus utiles, nous citons :
1. La fonction “nombres de diviseurs”, notée d. Cette fonction associe à tout n ∈ N∗ , le
nombre des diviseurs de n.
On a par exemple d(12) = 6 puisque le nombre 12 possède 6 diviseurs qui sont :
1, 2, 3, 4, 6 et 12.
2. La fonction “somme des diviseurs”, notée σ. Cette fonction associe à tout n ∈ N∗ , la
somme de tous les diviseurs de n.
On a par exemple σ(12) = 28 puisque la somme de tous les diviseurs de 12 donne 28.
3. La fonction “nombre de facteurs premiers distincts”, notée ω. Cette fonction associe
à tout n ∈ N∗ , le nombre naturel ω(n), défini par :
ω(n) := Card {p premier, p divise n} .
En particulier, on a ω(1) = 0.
4. La fonction “nombre de facteurs premiers, comptés avec leurs multiplicités”, notée Ω.
Cette fonction associe à tout n ∈ N∗ , dont la décomposition en produit de facteurs
premiers s’écrit n = pα1 1 · · · pαk k (avec k, α1 , . . . , αk ∈ N et p1 , . . . , pk des nombres
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premiers tous distincts 3 ), le nombre Ω(n) défini par :
Ω(n) := α1 p1 + · · · + αk pk .
En particulier, on a Ω(1) = 0.
5. La fonction “indicatrice d’Euler”, notée φ. Cette fonction associe à tout n ∈ N∗ , le
nombre des entiers strictement positifs qui sont ≤ n et premiers avec n.
On a par exemple φ(12) = 4 car les entiers strictement positifs qui sont ≤ 12 et
premiers avec 12 sont : 1, 5, 7 et 11 et leur nombre est 4.
6. La fonction “de Möbius”, notée µ. Cette fonction associe à tout n ∈ N∗ , le nombre
µ(n) ∈ {−1, 0, 1},


1



µ(n) := 0



(−1)k
défini par :
si n = 1
si n est multiple d’un carré parfait, autre 1
.
si n est un produit de k nombres premiers, deux à deux distincts
En ce qui nous concerne, nous nous intéressons uniquement aux fonctions d et σ. En fait, c’est
précisément la fonction σ qui intervient dans l’étude des nombres parfaits. Nous allons d’abord
déterminer des formules explicites pour d(n) et σ(n) (n ∈ N∗ ) en fonction de n. On a la :
Proposition 1. Soit n ∈ N∗ et soit pα1 1 pα2 2 · · · pαk k sa décomposition en produit de nombres
premiers (où k, α1 , . . . , αk ∈ N et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à deux distincts). Alors,
on a :
d(n) = (α1 + 1)(α2 + 1) · · · (αk + 1)
et
σ(n) =
pα1 1 +1 − 1 pα2 2 +1 − 1
pαk +1 − 1
×
× ··· × k
.
p1 − 1
p2 − 1
pk − 1
Démonstration.
• Montrons d’abord la formule concernant la fonction d. Étant donné n = pα1 1 pα2 2 · · · pαk k ∈ N∗
(avec k, α1 , . . . , αk ∈ N et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à deux distincts), un entier
strictement positif est un diviseur de n si et seulement si sa décomposition en produit de
nombres premiers s’écrit sous la forme pβ1 1 pβ2 2 · · · pβkk , avec 0 ≤ βi ≤ αi pour tout i ∈ {1, . . . , k}.
Le nombre d(n) de tous les diviseurs de n est donc égale au nombre de k-uplets (β1 , . . . , βk ) ∈ Nk
tels que 0 ≤ βi ≤ αi pour tout i ∈ {1, . . . , k}. Si l’on doit choisir un tel k-uplet, chaque βi
(1 ≤ i ≤ k) possède (αi + 1) choix, ce qui fait que le nombre de tels k-uplets est égale à
∏k
i=1 (αi + 1) = (α1 + 1)(α2 + 1) · · · (αk + 1). D’où d(n) = (α1 + 1)(α2 + 1) · · · (αk + 1), comme
il fallait le prouver.
3. Remarquer que même si les nombres premiers p1 , . . . , pk ne sont pas tous distincts, la formule définissant
Ω(n) reste la même !
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• Montrons maintenant la formule concernant la fonction σ. Étant donné n = p1α1 pα2 2 · · · pαk k ∈ N∗
(avec k, α1 , . . . , αk ∈ N et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à deux distincts), les diviseurs
de n sont les entiers strictement positifs pβ1 1 pβ2 2 · · · pβkk , avec β1 , . . . , βk ∈ N et 0 ≤ βi ≤ αi pour
tout i ∈ {1, . . . , k}. On a donc :
σ(n) :=
∑
∑
d =
pβ1 1 pβ2 2 · · · pβkk
0≤β1 ≤α1
d/n
..
.
0≤βk ≤αk
∑
=
pβ1 1 ·
0≤β1 ≤α1
=
∑
0≤β2 ≤α2
pβ2 2 · · ·
∑
pβkk
0≤βk ≤αk
pαk +1 − 1
pα1 1 +1 − 1 pα2 2 +1 − 1
·
··· k
,
p1 − 1
p2 − 1
pk − 1
comme il fallait le prouver. La proposition est démontrée.
Remarque :
En utilisant la fonction arithmétique σ, les nombres parfaits se définissent comme étant les
entiers strictement positifs n, vérifiant :
σ(n) = 2n.
De même, un couple de nombres amicaux se définit comme étant un couple (x, y) ∈ N∗2 tel
que :
σ(x) = σ(y) = x + y.
Fonctions multiplicatives
Définition 5. Une fonction arithmétique f : N∗ → R est dite multiplicative si pour tout
(n, m) ∈ N∗2 , avec n premier avec m, on a :
f (nm) = f (n)f (m)
(1)
— Elle est dite complètement multiplicative si (1) est vérifiée pour tout (n, m) ∈ N∗2 (sans
la condition “n premier avec m”).
Un exemple facile : Pour tout α ∈ R, la fonction arithmétique n 7→ nα est clairement
complètement multiplicative.
Remarques :
• Il est facile de voir que toute fonction multiplicative non identiquement nulle f vérifie
f (1) = 1.
• Pour définir une fonction complètement multiplicative (non identiquement nulle), il suffit de
la définir sur l’ensemble des nombres premiers et pour définir une fonction multiplicative (non
identiquement nulle), il suffit de la définir sur l’ensemble des puissances des nombres premiers.
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Exemple : La fonction définie sur l’ensemble des puissances des nombres premiers et qui associe à toute puissance pα (α ∈ N∗ ) d’un nombre premier p, le nombre (pα − 1) se prolonge de
façon unique en une fonction multiplicative fe. Ce prolongement fe est défini par : fe(1) = 1 et
pour tout n = pα1 1 pα2 2 · · · pαk k (avec k, α1 , . . . , αk ∈ N∗ et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à
deux distincts) :
fe(n) = fe(pα1 1 pα2 2 · · · pαk k ) = fe(pα1 1 )fe(pα2 2 ) · · · fe(pαk k ) = f (pα1 1 )f (pα2 2 ) · · · f (pαk k )
= (pα1 1 − 1)(pα2 2 − 1) · · · (pαk k − 1).
Nous allons voir maintenant que les fonctions qui nous intéressent dans ce papier, à savoir d et
σ, sont multiplicatives. Ceci est en fait un corollaire immédiat de la proposition 1.
Corollaire 2. Les fonctions d et σ sont multiplicatives.
Démonstration. La multiplicativité des fonctions d et σ se démontrent de la même façon en
se servant de la proposition 1. Montrons juste la multiplicativité de d. Comme d(1) = 1, il
suffit de montrer que l’on a d(nm) = d(n)d(m) pour tout couple (n, m) d’entiers strictement
plus grands que 1 et premiers entre eux. Soit (n, m) un tel couple et soient pα1 1 pα2 2 · · · pαk k (avec
k, α1 , . . . , αk ∈ N∗ et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à deux distincts) la décomposition
de n en produit de nombres premiers et q1β1 q2β2 · · · qℓβℓ (avec ℓ, β1 , . . . , βℓ ∈ N∗ et q1 , . . . , qℓ des
nombres premiers deux à deux distincts) la décomposition de m en produit de nombres premiers.
Comme n et m sont supposés premiers entre eux alors ils n’ont pas de facteur premier commun,
c’est-à-dire que l’on a pi ̸= qj pour tout i ∈ {1, . . . , k} et tout j ∈ {1, . . . , ℓ}. Il s’ensuit que les
nombres premiers p1 , . . . , pk , q1 , . . . , qℓ sont tous deux à deux distincts. Il en résulte en vertu de
la proposition 1 que l’on a :
d(nm) = d(pα1 1 pα2 2 · · · pαk k q1β1 q2β2 · · · qℓβℓ )
= (α1 + 1)(α2 + 1) · · · (αk + 1)(β1 + 1)(β2 + 1) · · · (βℓ + 1)
= d(n)d(m),
comme il fallait le prouver.
Remarques :
• Les fonctions d et σ ne sont pas complètement multiplicatives. En effet, on a par exemple
d(4) ̸= d(2)d(2) et σ(4) ̸= σ(2)σ(2).
• On peut montrer que la fonction indicatrice φ d’Euler et la fonction µ de Möbius sont
multiplicatives mais elles ne sont pas complètement multiplicatives.
III
Les nombres parfaits pairs
La structure des nombres parfaits pairs est entièrement connue. Elle a été découverte
partiellement par Euclide et puis totalement par Euler.
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Théorème 3 (Euclide). Soit n un entier strictement positif. Si le nombre p = 2n − 1 est
premier alors le nombre N = 2n−1 p est parfait.
Démonstration. Soit n ∈ N∗ et supposons que le nombre p = 2n − 1 est premier. L’ensemble
des diviseurs du nombre N = 2n−1 p est :
D =
}
{
1, 2, 22 , . . . , 2n−1 , p, 2p, 22 p, . . . , 2n−1 p .
On a par conséquent :
σ(N ) =
∑
d/N
d =
∑
d =
(
) (
)
1 + 2 + 22 + · · · + 2n−1 + p + 2p + 22 p + · · · + 2n−1 p
d∈D
= (2n − 1) + p (2n − 1)
= (2n − 1) (p + 1)
= 2n (2n − 1)
(car p = 2n − 1)
= 2n p
= 2N,
ce qui montre bien que N est parfait. Le théorème est démontré.
On pense que la réciproque du théorème d’Euclide est aussi vraie (c’est à dire que tout
nombre parfait est de la forme N = 2n−1 p, avec n ∈ N∗ et p = 2n − 1 premier) mais ceci n’a
pas encore été démontré. Néanmoins, Euler a réussi à montrer que tout nombre parfait pair est
de la forme donnée par Euclide dans son théorème.
Théorème 4 (Euler). Tout nombre parfait pair s’écrit sous la forme :
N = 2n−1 p,
avec n ∈ N∗ et p = 2n − 1 premier.
Démonstration. Soit N ∈ N∗ un nombre parfait pair. On peut écrire N sous la forme :
N = 2k ℓ,
avec k, ℓ ∈ N∗ et ℓ impair.
Comme la fonction σ est multiplicative et pgcd(2k , ℓ) = 1 (puisque ℓ est impair), on a σ(N ) =
σ(2k ℓ) = σ(2k )σ(ℓ). Mais, d’après la proposition 1, on a σ(2k ) =
σ(N ) =
(
)
2k+1 − 1 σ(ℓ).
D’autre part, comme N est parfait, on a :
σ(N ) = 2N = 2(2k ℓ) = 2k+1 ℓ.
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9
2k+1 −1
2−1
= 2k+1 − 1. D’où :
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En comparant les deux formules obtenues pour σ(N ), on en déduit que l’on a :
(
)
2k+1 − 1 σ(ℓ) = 2k+1 ℓ
(⋆)
Cette identité montre que le nombre 2k+1 divise le nombre (2k+1 − 1)σ(ℓ), et puisque 2k+1 est
premier avec (2k+1 − 1) alors 2k+1 divise σ(ℓ) (en vertu du lemme de Gauss). Il existe donc
r ∈ N∗ tel que :
σ(ℓ) = 2k+1 r.
En substituant ceci dans (⋆), il vient que :
ℓ =
(
)
2k+1 − 1 r.
La somme des diviseurs propres de ℓ est donc égale à :
(
)
σ(ℓ) − ℓ = 2k+1 r − 2k+1 − 1 r = r.
Mais comme r est lui même un diviseur propre de ℓ (puisque ℓ = (2k+1 − 1)r et k ≥ 1), on
en déduit que ℓ possède un unique diviseur propre, qui est r. Ce qui n’est possible que si ℓ est
premier et r = 1. D’où ℓ = 2k+1 − 1 premier et N = 2k ℓ. Il ne reste qu’à prendre n = k + 1
pour avoir N = 2n−1 (2n − 1), avec (2n − 1) premier. Ce qui démontre le théorème.
Avec les deux théorèmes d’Euclide et d’Euler, on voit que les nombres parfaits pairs sont
ultimement liés aux nombres premiers s’écrivant sous la forme (2n −1), avec n ∈ N. Ces derniers
nombres premiers sont connus sous le nom de nombres premiers de Mersenne.
Définition 6. On appelle nombre premier de Mersenne tout nombre premier s’écrivant
sous la forme (2n − 1), avec n ∈ N.
Les premiers nombres premiers de Mersenne sont :
22 − 1 = 3 , 23 − 1 = 7 , 25 − 1 = 31 , 27 − 1 = 127 , . . . etc.
La proposition suivante précise que dans la forme (2n − 1) d’un nombre premier de Mersenne,
l’entier positif n est nécessairement premier.
Proposition 5. Soit n ∈ N. Si le nombre (2n − 1) est premier alors n est lui même premier.
(
Démonstration. Montrons la contraposée de la proposition, qui est : n n’est pas premier ⇒
)
(2n − 1) n’est pas premier . Supposons donc que n n’est pas premier et montrons que (2n − 1)
n’est pas premier. Lorsque n = 0 ou 1, ce résultat est visiblement vrai. Supposons donc que
n ≥ 2. Comme n est supposé non premier alors n possède un diviseur a tel que a ̸∈ {1, n}.
Écrivons n = ab (b ∈ N). Considérons la congruence triviale :
2a ≡ 1 (mod (2a − 1)).
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Les nombres parfaits
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En élevant les deux membres de celle-ci à la puissance b, on obtient :
2ab ≡ 1 (mod (2a − 1)).
C’est à dire :
2n − 1 ≡ 0 (mod (2a − 1)).
Ce qui montre que le nombre (2n − 1) est multiple du nombre (2a − 1) et puisque (2a − 1) ̸∈
{1, 2n − 1} (car a ̸∈ {1, n}), alors (2n − 1) n’est pas premier, comme il fallait le prouver. Ceci
complète la preuve de la proposition.
La proposition 5 permet de préciser la forme d’un nombre premier de Mersenne ainsi que
la forme d’un nombre parfait pair.
Corollaire 6. Un nombre premier de Mersenne est un nombre premier s’écrivant sous la forme
(2p − 1), avec p premier.
Théorème 7 (Euler). Un nombre N ∈ N∗ est un nombre parfait pair si et seulement s’il est
de la forme :
N = 2p−1 (2p − 1) ,
avec p est un nombre premier et (2p − 1) est premier.
Définition 7. On appelle nombre de Mersenne tout nombre naturel s’écrivant sous la forme
(2p − 1), avec p premier.
Remarque : On a cru à une certaine époque que la réciproque de la proposition 5 est aussi
vraie (c’est à dire que tout nombre de Mersenne est premier). Mais ceci s’est avéré inexacte
puisque le nombre de Mersenne (211 − 1) = 23 × 89 n’est pas premier.
Euler a découvert un résultat utile qui aide à montrer la non primalité de certains nombres
de Mersenne. On a le
Théorème 8 (Euler). Soit p un nombre premier impair. Alors tout diviseur premier du nombre
de Mersenne (2p − 1) est de la forme (2kp + 1) (k ∈ N∗ ).
Démonstration. Soit p un nombre premier impair et q un diviseur premier du nombre (2p − 1).
On a donc :
2p ≡ 1 (mod q).
Cette congruence montre que l’ordre e de 2 modulo q divise p. Mais puisque e ̸= 1 (car 21 ̸≡
1 (mod q)) alors e = p. Par suite, comme on a 2q−1 ≡ 1 (mod q) (en vertu du petit théorème
de Fermat), alors le nombre (q − 1) est multiple de e = p. Par ailleurs, (q − 1) est un multiple
de 2 (car q est impair, en tant que diviseur du nombre impair (2p − 1)). Il en résulte que (q − 1)
est multiple de ppcm(2, p) = 2p. Il existe donc k ∈ N∗ tel que q − 1 = 2kp ; soit q = 2kp + 1,
comme il fallait le prouver. Le théorème est démontré.
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11
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Application : Utilisons le théorème 8 pour montrer la non primalité de chacun des deux
nombres de Mersenne (211 − 1) et (223 − 1).
— D’après le théorème 8, les diviseurs premiers du nombre (211 − 1) sont de la forme (22k + 1)
(k ∈ N∗ ). La première valeur même de k (k = 1) donne le nombre premier 23 et on vérifie
aisément que 23 divise effectivement (211 − 1). D’où (211 − 1) n’est pas premier.
— De même, d’après le théorème 8, les diviseurs premiers du nombre (223 − 1) sont de la forme
(46k + 1) (k ∈ N∗ ). La première valeur même de k (k = 1) donne le nombre premier 47 et on
vérifie aisément que 47 divise effectivement (223 − 1). D’où (223 − 1) n’est pas premier.
Les deux exemples qu’on vient de voir, et qui concernent la non primalité de certains
nombres de Mersenne, constituent un cas particulier d’un théorème plus général dû à E. Lucas.
Théorème 9 (Lucas). Soit p > 3 un nombre premier vérifiant p ≡ 3 (mod 4). Si le nombre
(2p + 1) est lui aussi premier, alors le nombre de Mersenne (2p − 1) est composé et (2p + 1) est
l’un de ses facteurs premiers.
Démonstration. Posons q = 2p + 1. Comme q est supposé premier alors d’après le petit
théorème de Fermat, on a 2q−1 ≡ 1 (mod q), c’est à dire 22p ≡ 1 (mod q), ce qui s’écrit
encore (2p − 1)(2p + 1) ≡ 0 (mod q). On a donc :
ou bien
2p ≡ 1 (mod q)
(2)
ou bien
2p ≡ −1 (mod q)
(3)
Montrons que la seconde alternative est impossible. Procédons par l’absurde en supposons que
2p ≡ −1 (mod q). Ceci équivaut à 2p ≡ 2p (mod q). En divisant sur 2 les deux membres de cette
dernière congruence (ce qui est autorisé puisque pgcd(2, q) = 1), on obtient 2p−1 ≡ p (mod q).
Mais comme 2p−1 est un carré parfait (car (p − 1) est pair), il en résulte que p est un résidu
quadratique modulo q.
D’un autre côté, on a d’après la loi de la réciprocité quadratique :
( )( )
p−1 q−1
p
q
= (−1) 2 2
(4)
q
p
( ) (
) ( )
q
2p+1
q−1
Mais comme p =
= p1 = 1 et p−1
= p−1
p est impair (car p ≡ 3 (mod 4)), la
p
2
2
2
relation (4) entraı̂ne :
( )
p
= −1.
q
Ce qui montre que p n’est pas un résidu quadratique modulo q. Ces deux résultats contradictoires concernant le caractère quadratique de p modulo q montrent que l’alternative (3) est
impossible. C’est donc l’alternative (2) qui a lieu, c’est à dire que l’on a 2p ≡ 1 (mod q). Ce qui
entraı̂ne (2p − 1) ≡ 0 (mod q) et montre que le nombre (2p − 1) est un multiple de q. Enfin,
puisque (2p − 1) > 2p + 1 = q (car p > 3), il en découle que le nombre de Mersenne (2p − 1) est
composé. Le théorème est démontré.
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12
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Remarques :
1. La non primalité des deux nombres de Mersenne (211 − 1) et (223 − 1) (montrée
précédemment en se servant du théorème d’Euler) s’obtient immédiatement par le
théorème de Lucas en prenant dans celui-ci p = 11 puis p = 23.
2. Les nombres premiers p tels que (2p + 1) soit aussi premier sont connus sous le nom
de nombres premiers de Sophie Germain. On pense qu’il existe une infinité de
nombres premiers de Sophie Germain mais ceci reste pour le moment une conjecture.
Des hypothèses (conjectures) plus générales sur les nombres premiers, proposées par
A. Schinzel, montrent qu’il existe même une infinité de nombres premiers p tels que
p ≡ 3 (mod 4) et (2p + 1) soit premier. On en déduit donc du théorème précédent
de Lucas que, sous les hypothèses de Schinzel, il existe une infinité de nombres de
Mersenne composés. On pense aussi qu’il existe une infinité de nombres de Mersenne
premiers, et d’ailleurs on ne cesse d’en découvrir de nouveaux, mais ceci est loin d’être
démontrable par les outils mathématiques dont nous disposons aujourd’hui.
Après avoir étudié le lien capital entre les nombres parfaits pairs et les nombres premiers
de Mersenne, nous nous penchons maintenant sur quelques propriétés relativement simples des
nombres parfaits pairs.
Quelques propriétés simples des nombres parfaits pairs
On a remarqué depuis très longtemps que les nombres parfaits pairs se terminent toujours
(dans leur représentation décimale) par le chiffre 6 ou par les deux chiffres 2 et 8 dans cet ordre.
Il est facile de confirmer cette remarque par des techniques usuelles de congruences. On a la
Proposition 10. La représentation décimale de tout nombre parfait pair se termine ou bien
par 6, ou bien par 28. Plus précisément, pour tout nombre parfait pair N , on a :
ou bien
N ≡ 6 (mod 10)
ou bien
N ≡ 28 (mod 100).
Démonstration. Soit N un nombre parfait pair. D’après le théorème 7 d’Euler, N s’écrit sous
la forme N = 2p−1 (2p − 1), avec p est un nombre premier et (2p − 1) est premier. Si p = 2, on
obtient N = 6 qui vérifie bien N ≡ 6 (mod 10). Supposons pour la suite que le nombre premier
p est impair. On a donc : ou bien p ≡ 1 (mod 4), ou bien p ≡ 3 (mod 4).
1er cas : (si p ≡ 1 (mod 4)).
Dans ce cas, il existe k ∈ N tel que p = 4k+1. Par suite, on a N = 2p−1 (2p −1) = 24k (24k+1 −1) =
16k (2 · 16k − 1). Comme 16 ≡ 1 (mod 5), il en résulte que N ≡ 1 (mod 5). Enfin, les deux
congruences N ≡ 0 (mod 2) et N ≡ 1 (mod 5) entraı̂nent que l’entier (N − 6) est à la fois un
multiple de 2 et de 5 et il est par conséquent un multiple de ppcm(2, 5) = 10. Ce qui montre
que N ≡ 6 (mod 10).
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13
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
2nd cas : (si p ≡ 3 (mod 4)).
Dans ce cas, p s’écrit p = 4k + 3 (k ∈ N). D’où N = 2p−1 (2p − 1) = 24k+2 (24k+3 − 1). En posant
n = 24k+2 , il vient que N = n(2n − 1). Mais puisque n = 24k+2 = 4 · 16k ≡ 4 (mod 5), on peut
écrire n = 5ℓ + 4 pour un certain ℓ ∈ N. D’où :
N = n(2n − 1) = (5ℓ + 4)(10ℓ + 7)
= 50ℓ2 + 75ℓ + 28
≡ 28 (mod 25).
Ceci montre que l’entier (N − 28) est un multiple de 25. Mais puisque (N − 28) est aussi
un multiple de 4 (car N est visiblement un multiple de 4) alors (N − 28) est un multiple de
ppcm(4, 25) = 100. D’où N ≡ 28 (mod 100).
La preuve de la proposition est complète.
La proposition qui suit est immédiate mais elle révèle un lien important entre les nombres
parfaits et les nombres triangulaires. Rappelons d’abord la définition d’un nombre triangulaire :
Définition 8. Un nombre naturel est dit triangulaire s’il est la somme des entiers naturels
depuis 0 jusqu’à un certain nombre. Plus précisément, N ∈ N est triangulaire s’il existe
n ∈ N tel que :
N = 0 + 1 + 2 + ··· + n =
n(n + 1)
.
2
Les premiers nombres triangulaires sont : 0, 1, 3, 6, 10, 15, 21, 28, . . .etc.
Proposition 11. Tout nombre parfait pair est triangulaire.
Démonstration. Soit N un nombre parfait pair. D’après le théorème 7 d’Euler, N s’écrit N =
2p−1 (2p − 1), avec p et (2p − 1) sont des nombres premiers. En posant n = 2p − 1, il vient que
N=
n(n+1)
,
2
ce qui montre que N est triangulaire. La proposition est démontrée.
Nous poursuivons avec une proposition également élémentaire mais remarquable que certains attribuent à l’historien des Mathématiques T. L. Heath (1861-1940).
Proposition 12 (T. L. Heath). Tout nombre parfait pair, strictement plus grand que 6, s’écrit
comme une somme de cubes des nombres impairs consécutifs depuis 1 jusqu’à un certain
nombre. Plus précisément, tout nombre parfait pair N s’écrit sous la forme :
N = 13 + 33 + 53 + · · · + (2n − 1)3 ,
pour un certain n ∈ N∗ .
Démonstration. La preuve est basée sur la formule suivante qu’on démontre aisément par
récurrence :
(
)
13 + 33 + 53 + · · · + (2n − 1)3 = n2 2n2 − 1
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14
(∀n ∈ N∗ )
(5)
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Étant donné maintenant un nombre parfait pair N > 6, en vertu du théorème 7 d’Euler, N
s’écrit N = 2p−1 (2p − 1), avec p et (2p − 1) sont des nombres premiers. Comme par hypothèse
N > 6, alors p ̸= 2 et donc p est un nombre premier impair. En posant n = 2
p−1
2
∈ N∗ , il vient
que N = n2 (2n2 − 1). Grâce à (5), on a enfin N = 13 + 33 + · · · + (2n − 1)3 , qui est bien l’écriture
recherchée de N . La proposition est démontrée.
En liaison avec la proposition 12, on peut aussi se poser la question de savoir si tout
nombre parfait pair (> 6) peut s’écrire comme une somme d’un nombre bien déterminé de cubes
d’entiers naturels (une somme de 3 cubes par exemple). Dans cette direction, j’ai démontré en
2007, le théorème suivant :
Théorème 13 (B. Farhi[3]). Tout nombre parfait pair, strictement plus grand que 6, s’écrit
comme une somme de 5 cubes d’entiers naturels.
Démonstration. Cette preuve est basée sur l’identité suivante :
(
)3 (
)3
2n6 − 2 = n2 + n − 1 + n2 − n − 1
(6)
(∀n ∈ N), qu’on vérifie aisément.
Maintenant, soit N un nombre parfait pair, strictement plus grand que 6. D’après le théorème
7, N s’écrit N = 2p−1 (2p − 1), avec p et (2p − 1) sont des nombres premiers. Comme par
hypothèse N > 6, on a p > 2. Pour p = 3, on obtient N = 28 = 13 + 33 , qui est une somme
de deux cubes d’entiers naturels et est à fortiori une somme de 5 cubes d’entiers naturels (en
complétant par des zéros). Pour p = 5, on trouve N = 496 = 43 + 63 + 63 , qui est une somme
de trois cubes d’entiers naturels et est à fortiori une somme de 5 cubes d’entiers naturels (en
complétant par des zéros). Supposons pour la suite que p > 5. Donc p s’écrit sous l’une des
deux formes : p = 6k + 1 ou p = 6k + 5 (k ∈ N∗ ).
1er cas : (p = 6k + 1, k ∈ N∗ )
Dans ce cas, on a N = 2p−1 (2p − 1) = 26k (26k+1 − 1). Mais en prenant n = 2k dans (6), on
obtient 26k+1 − 2 = a3 + b3 , avec a = n2 + n − 1 et b = n2 − n − 1. D’où :
)
(
)3 (
)3 ( )3
(
(
)
N = 26k 26k+1 − 1 = 26k a3 + b3 + 1 = 22k a + 22k b + 22k ,
qui est une somme de 3 cubes d’entiers naturels et est à fortiori une somme de 5 cubes d’entiers
naturels (en complétant par des zéros).
2nd cas : (p = 6k + 5, k ∈ N∗ )
Dans ce cas, on a :
(
)
(
)
(
)
N = 2p−1 (2p − 1) = 26k+4 26k+5 − 1 = 26k+3 26k+6 − 2 = 26k+3 64 · 26k − 2 .
En remarquant que 64 = 33 + 33 + 23 + 2, il vient que :
(
)
3
3
3
6k
6k+3
(3 + 3 + 2 + 2)2 − 2
N = 2
(
)
= (22k+1 )3 (3 · 22k )3 + (3 · 22k )3 + (2 · 22k )3 + (2 · 26k − 2)
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15
(7)
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Mais en prenant n = 2k dans (6), on obtient 2 · 26k − 2 = a3 + b3 (avec a = n2 + n − 1 et
b = n2 − n − 1), laquelle reportée dans (7) aboutit à :
(
)
2k+1 3
2k 3
2k 3
2k 3
3
3
N = (2
) (3 · 2 ) + (3 · 2 ) + (2 · 2 ) + a + b
= (3 · 24k+1 )3 + (3 · 24k+1 )3 + (2 · 24k+1 )3 + (22k+1 a)3 + (22k+1 b)3 ,
qui est bien une somme de 5 cubes d’entiers naturels. Ceci achève la preuve du théorème.
Remarque : Il est probable que le théorème précédent puisse s’améliorer pour donner la
proposition :
≪
Tout nombre parfait, strictement plus grand que 6, s’écrit comme somme de 3
cubes d’entiers naturels ≫. On constate en effet que les premiers nombres parfaits (> 6) satisfont
cette proposition :
28 = 22 (23 − 1)
= 03 + 1 3 + 3 3
496 = 24 (25 − 1)
= 43 + 6 3 + 6 3
8128 = 26 (27 − 1)
= 43 + 43 + 203
33550336 = 212 (213 − 1) = 163 + 1763 + 3043
8589869056 = 216 (217 − 1) = 7203 + 13363 + 18003
..
.
etc.
IV
Les nombres parfaits impairs
On présentera dans cette section les résultats connus sur la structure et les propriétés des
nombres parfaits impairs. Comme c’est déjà dit dans l’introduction, aucun des nombres parfaits
impairs n’est rencontré jusqu’à présent et on a de fortes raisons de croire à leur inexistence.
Néanmoins, c’est l’étude de leurs propriétés (en supposant leur existence) qui pourrait un jour
réfuter leur existence si l’on réussit à en établir deux en contradiction.
Pour commencer, faisons remarquer qu’un nombre parfait impair (s’il existe) n’est jamais
une puissance d’un nombre premier. En effet, pour tout nombre premier impair p et tout α ∈ N∗ ,
on a σ(pα ) =
p
p−1
≤
3
2
pα+1 −1
p−1
p
pα . Mais
p−1
α
α
<
comme p ≥ 3 (car p est un nombre premier impair), on a
< 2. D’où σ(p ) < 2p . Ce qui montre que pα est déficient et il n’est donc pas parfait.
Un nombre parfait impair (s’il existe) possède donc au moins 2 facteurs premiers distincts. Plus
loin, on améliorera ce résultat (presque trivial) en montrant que tout nombre parfait impair
possède au moins 4 facteurs premiers distincts (voir le théorème 20), comme on donnera (sans
démonstration) le meilleur résultat obtenu, à ce jour, dans cette direction.
Le premier résultat non trivial concernant la structure des nombres parfaits impairs est
démontré par l’inévitable Euler, mais pressenti par plusieurs mathématiciens avant lui.
Théorème 14 (Euler). Tout nombre parfait impair N est de la forme :
N = pα S 2 ,
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16
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
avec p est un nombre premier vérifiant p ≡ 1 (mod 4), α est un entier naturel vérifiant α ≡
1 (mod 4) et S est un entier naturel impair ≥ 3 et premier avec p.
(
Démonstration. Soit N un nombre parfait impair et soit pα1 1 pα2 2 · · · pαk k avec k, α1 , . . . , αk ∈ N∗
)
et p1 , . . . , pk des nombres premiers impairs deux à deux distincts sa décomposition en produit
de nombres premiers. Comme N ne peut être une puissance d’un nombre premier (d’après ce
qu’on remarqué ci-dessus), on a obligatoirement k ≥ 2. L’hypothèse ≪ N est parfait ≫ équivaut
à σ(N ) = 2N , et puisque la fonction σ est multiplicative (voir le corollaire 2), ceci équivaut à :
σ(pα1 1 )σ(pα2 2 ) · · · σ(pαk k ) = 2N
(8)
Cette identité montre que le produit σ(pα1 1 )σ(pα2 2 ) · · · σ(pαk k ) est pair mais il n’est pas multiple
de 4. Mais ceci n’est possible que lorsque un et un seul des nombres σ(pαi i ) (1 ≤ i ≤ k) est
pair sans être un multiple de 4 et tous les autres sont impairs. Quitte à réordonner les nombres
premiers p1 , . . . , pk , on peut supposer que σ(pα1 1 ) est pair sans être un multiple de 4 (ce qui
équivaut à σ(pα1 1 ) ≡ 2 (mod 4)) et que tous les nombres σ(pαi i ) (2 ≤ i ≤ k) sont impairs.
Maintenant, comme p1 est impair, on a p1 ≡ ±1 (mod 4). Mais en supposant p1 ≡ −1 (mod 4),
on aura :
σ(pα1 1 ) = 1 + p1 + p21 + · · · + pα1 1
≡ 1 − 1 + 1 − · · · + (−1)α (mod 4)
≡ 0 ou 1 (mod 4),
qui est en contradiction avec σ(pα1 1 ) ≡ 2 (mod 4). On a donc forcément p1 ≡ 1 (mod 4). En
utilisant cette dernière congruence, on a :
σ(pα1 1 ) = 1 + p1 + p21 + · · · + pα1 1
≡ 1 + 1 + 1 + · · · + 1 (mod 4)
≡ (α1 + 1) (mod 4).
Ce qui entraı̂ne (puisque σ(pα1 1 ) ≡ 2 (mod 4)) que α1 + 1 ≡ 2 (mod 4) ; d’où α1 ≡ 1 (mod 4).
Enfin, pour tout i ∈ {2, . . . , k}, on a :
σ(pαi i ) = 1 + pi + p2i + · · · + pαi i
≡ 1 + 1 + · · · + 1 (mod 2)
(car pi est impair)
≡ αi + 1 (mod 2),
et puisque σ(pαi i ) ≡ 1 (mod 2), il en découle que αi ≡ 0 (mod 2). En récapitulant, on a
p1 ≡ α1 ≡ 1 (mod 4) et αi ≡ 0 (mod 2) pour tout i ∈ {2, . . . , k}. Il ne reste qu’à poser p = p1 ,
α /2
α /2
α = α1 et S = p2 2 · · · pk k
pour obtenir la forme recherchée N = pα S 2 avec les propriétés
requises. Le théorème est démontré.
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17
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Appellations : Lorsque N est un nombre parfait impair, l’écriture N = pα S 2 (avec les propriétés requises du théorème 14 sur p, α et S) s’appelle la structure d’Euler de N et le
nombre premier p (qui est le seul facteur premier de N d’exposant impair) s’appelle le facteur
premier isolé de N .
Remarque : Le théorème 14 entraı̂ne immédiatement que tout nombre parfait impair est de
la forme 4k + 1 (k ∈ N).
La structure des nombres parfaits impairs, donnée au théorème 14, permet d’en tirer une
propriété assez curieuse sur ces nombres, lesquels sont apparemment inexistants !
Corollaire 15. Tout nombre parfait impair N peut s’écrire comme une somme de deux carrés
d’entiers naturels, c’est à dire sous la forme N = a2 + b2 (a, b ∈ N).
Démonstration. Notons provisoirement par R l’ensemble des entiers naturels qui peuvent s’écrire
comme une somme de deux carrés d’entiers naturels ; soit
R :=
{
}
a2 + b2 , avec a, b ∈ N .
La structure et les propriétés de cet ensemble R sont étudiées par plusieurs mathématiciens et
on sait entre autres que :
(i) L’ensemble R est stable par multiplication, c’est à dire que l’on a :
∀n, m ∈ R : nm ∈ R.
(ii) (Un théorème d’Euler). Un nombre premier impair p appartient à R si et seulement
s’il est de la forme : p = 4k + 1 (k ∈ N).
Maintenant, soit N un nombre parfait impair. D’après le théorème 14, N s’écrit N = pα S 2 , avec
p premier, α ∈ N∗ , S un entier ≥ 3 et p ≡ α ≡ 1 (mod 4). D’après la propriété (ii) ci-dessus
de l’ensemble R, on a p ∈ R. Par ailleurs, on a clairement S 2 ∈ R (puisque S 2 = S 2 + 02 ). Il
s’ensuit, d’après la propriété (i) de la stabilité par multiplication de l’ensemble R, que l’on a
pα S 2 ∈ R ; c’est à dire N ∈ R. Ce qui démontre le corollaire.
Un corollaire également important et remarquable du théorème 14 d’Euler est dû à Sylvester et c’est le suivant :
Corollaire 16 (Sylvester - 1888). Un nombre parfait impair (s’il existe) ne peut être un multiple
du nombre 105.
Démonstration. Procédons par l’absurde en supposons qu’il existe un nombre parfait impair N
qui soit un multiple du nombre 105 = 3 × 5 × 7. La décomposition de N en produit de facteurs
premiers s’écrit alors :
N = 3α 5β 7γ n,
avec α, β, γ ∈ N∗ et n est un entier naturel impair et premier avec chacun des nombres 3, 5 et
7. Comme les nombres premiers 3 et 7 sont congrus à 3 modulo 4 alors aucun d’eux ne peut
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18
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
être le facteur premier isolé de N relativement à sa structure d’Euler. Il s’ensuit (en vertu du
théorème 14) que les exposants α et γ de ces facteurs premiers 3 et 7 de N sont forcément
pairs. À fortiori, on a α ≥ 2 et γ ≥ 2. Maintenant, comme la fonction arithmétique k →
σ(k)
k
(k ∈ N∗ ) est multiplicative (car σ est multiplicative), on a :
σ(3α ) σ(5β ) σ(7γ ) σ(n)
σ(N )
=
· β · γ ·
N
3α
5
7
n
1 + 3 + 32 + · · · + 3α 1 + 5 + 52 + · · · + 5β 1 + 7 + 72 + · · · + 7γ σ(n)
·
·
·
3α
5β
7γ
n
(
)(
)(
)
1
1
1
1
1
1
1
1
1 σ(n)
=
1 + + 2 + ··· + α
1 + + 2 + ··· + β
1 + + 2 + ··· + γ
3 3
3
5 5
5
7 7
7
n
(
)(
)(
)
1
1
1
1
1
≥
1+ + 2
1+
1+ + 2
(car α ≥ 2, β ≥ 1, γ ≥ 2 et σ(n) ≥ n)
3 3
5
7 7
=
=
494
245
> 2.
D’où :
σ(N ) > 2N,
ce qui contredit le fait que N est parfait. Cette contradiction conclut qu’il n’existe aucun nombre
parfait impair qui soit un multiple du nombre 105. Le corollaire est démontré.
Remarque : Comme nous avons vu au tout début de ce papier que tout multiple d’un nombre
abondant est abondant, le corollaire 16 aurait été évident si le nombre 105 était abondant.
Mais ceci n’est justement pas le cas puisque le nombre 105 est déficient (en effet, on a σ(105) =
192 < 210 = 2 × 105).
Nous nous intéressons maintenant aux nombre minimum de facteurs premiers distincts
que pourrait avoir un nombre parfait impair. Le théorème qui suit est relativement simple et
son idée de démonstration est d’ailleurs déjà présentée auparavant quand on a fait remarqué
qu’un nombre parfait impair n’est jamais une puissance d’un nombre premier (voir le début de
la section IV).
Théorème 17. Tout nombre parfait impair possède au moins 3 facteurs premiers distincts.
Nous démontrons ce théorème en utilisant le lemme suivant qui est fondamental dans la recherche sur les nombres parfaits impairs.
Lemme 18 (Le lemme fondamental). Soit N un nombre parfait et soient p1 , . . . , pk (k ∈ N∗ )
ses diviseurs premiers deux à deux distincts. Alors, on a :
k
∏
i=1
c Bakir FARHI
⃝
pi
> 2.
pi − 1
19
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Preuve du lemme 18. Le nombre parfait N s’écrit N = pα1 1 · · · pαk k (avec α1 , . . . , αk ∈ N∗ ). En
vertu de la proposition 1, on a :
pα1 +1 − 1
pαk +1 − 1
pα1 +1
pαk +1
σ(N ) = 1
× ··· × k
< 1
× ··· × k
=
p1 − 1
pk − 1
p1 − 1
pk − 1
=
( k
∏
i=1
pi
pi − 1
i=1
pi
pi − 1
( k
∏
)
pα1 1 · · · pαk k
)
N.
Mais d’un autre côté, comme N est parfait, on a σ(N ) = 2N . D’où l’on déduit que :
( k
)
∏ pi
2N <
N,
p −1
i=1 i
ce qui entraı̂ne l’inégalité recherchée :
k
∏
i=1
pi
> 2.
pi − 1
Le lemme est démontré.
Démonstration du théorème 17. Procédons par l’absurde en supposant qu’il existe un nombre
parfait impair N possédant moins de 3 facteurs premiers distincts, c’est à dire possédant aux
plus 2 facteurs premiers distincts. Comme N ̸= 1 et N ne peut être une puissance d’un nombre
premier (voir la remarque faite au début de la section IV), alors N possède exactement 2
facteurs premiers distincts. Le nombre N s’écrit donc :
N = pα q β ,
avec α, β ∈ N∗ et p et q deux nombres premiers impairs distincts. Quitte à permuter p et q,
on peut supposer p < q. D’où p ≥ 3 et q ≥ 5. Il s’ensuit de ce fait que
q
q−1
≤
5
5−1
=
5
4
p
p−1
≤
3
3−1
=
3
2
et
et puis que :
q
3 5
15
p
×
≤
×
=
< 2,
p−1 q−1
2 4
8
qui est en contradiction avec le lemme 18. Cette absurdité confirme le résultat du théorème et
achève cette démonstration.
Remarque : Le lemme fondamental 18 seul ne permet pas d’améliorer le résultat du théorème
17 (c’est à dire de montrer par exemple que tout nombre parfait impair possède aux moins
4 facteurs premiers distincts). Nous allons obtenir cette amélioration au théorème 20 dont la
démonstration associe au lemme fondamental 18 d’autres techniques assez judicieuses.
Nous enchaı̂nons maintenant avec le théorème suivant qui nous informe d’une propriété
importante des nombres parfaits impairs lorsqu’ils sont mis sous leurs structures d’Euler.
c Bakir FARHI
⃝
20
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Théorème 19. Soit N = pα S 2 un nombre parfait impair mis sous sa structure d’Euler (p
premier, α ∈ N∗ , S ≥ 3 un entier impair premier avec p et p ≡ α ≡ 1 (mod 4)).
Alors le nombre
p+1
2
divise S 2 . En particulier, le nombre S possède au moins un diviseur premier
strictement inférieur à p.
Démonstration. Comme N est parfait, on a σ(N ) = 2N , c’est à dire σ(pα )σ(S 2 ) = 2pα S 2 , ou
encore
pα+1 − 1
σ(S 2 ) = 2pα S 2
p−1
(9)
Maintenant, comme (α + 1) est pair (car α est impair) alors (p + 1) divise (pα+1 − 1) =
( p p−1−1 )(p − 1), et puisque (p + 1) est premier avec (p − 1) (car p est impair) alors (p + 1) divise
α+1
pα+1 −1
p−1
(en vertu du lemme de Gauss). Il s’ensuit, en vertu de (9), que (p + 1) divise 2pα S 2 . Mais
puisque (p + 1) est premier avec pα (car il est premier avec p), il en résulte en vertu du lemme
de Gauss que (p + 1) divise 2S 2 . Ce qui équivaut à dire que
p+1
2
divise S 2 , comme il fallait le
prouver.
Il découle du fait qu’on vient de prouver que tout diviseur premier q de
donc S et on a q ≤
p+1
2
p+1
2
divise S 2 et divise
< p. Ceci complète la preuve du théorème.
Nous améliorons maintenant le résultat du théorème 17 en montrant que tout nombre
parfait impair possède aux moins 4 facteurs premiers distincts. Ce résultat est obtenu indépendamment par plusieurs mathématiciens du 19ème siècle, à chacun sa façon. Parmi ces mathématiciens figurent V. A. Lebesgue, E. Lucas, A. Desboves et J. J. Sylvester.
Théorème 20. Tout nombre parfait impair possède aux moins 4 facteurs premiers distincts.
Démonstration. Nous procédons par l’absurde en supposant qu’il existe un nombre parfait
impair N qui possède moins de 4 facteurs premiers distincts. Comme, d’après le théorème
17, N possède au moins 3 facteurs premiers distincts, alors N possède exactement 3 facteurs
premiers distincts. Donc N s’écrit N = pα q β rγ , avec α, β, γ ∈ N∗ et p, q, r des nombres premiers
tels que p < q < r.
Nous partageons cette démonstration en 4 étapes :
1ère étape : Dans cette étape, nous allons montrer que l’on a :
p = 3 , q = 5 et r ∈ {7, 11, 13}.
• Montrons d’abord que p = 3. Pour ce faire, nous allons procéder par l’absurde en supposant
p ̸= 3. On a donc p ≥ 5 et par suite q ≥ 7 et r ≥ 11 (puisque r > q > p). D’où l’on déduit que :
q
r
5
7
11
385
p
·
·
≤
×
×
=
< 2,
p−1 q−1 r−1
5 − 1 7 − 1 11 − 1
240
qui est en contradiction avec le résultat du lemme fondamental 18. D’où p = 3.
• Le fait p = 3 étant établi, montrons maintenant que q = 5. Pour ce faire, nous procédons
c Bakir FARHI
⃝
21
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
comme précédemment par l’absurde en supposant q ̸= 5. On a donc q ≥ 7 et par suite r ≥ 11
(puisque r > q). D’où l’on déduit que :
p
q
r
3
7
11
231
·
·
≤
×
×
=
< 2,
p−1 q−1 r−1
3 − 1 7 − 1 11 − 1
120
qui est en contradiction avec le résultat du lemme fondamental 18. D’où q = 5.
• Les faits p = 3 et q = 5 étant établis, montrons enfin que r ∈ {7, 11, 13}. D’après le lemme
fondamental 18, on a :
p
q
r
·
·
> 2.
p−1 q−1 r−1
Ce qui entraı̂ne que :
r
p−1 q−1
3−1 5−1
16
> 2·
·
= 2×
×
=
.
r−1
p
q
3
5
15
Ce qui donne :
r < 16.
Mais comme r est premier et r > q = 5, il en découle que r ∈ {7, 11, 13}, comme il fallait le
prouver.
2ème étape : Dans cette étape, nous allons montrer que le facteur premier isolé de N , relatif à sa
structure d’Euler (c’est à dire l’unique facteur premier de N figurant avec un exposant impair)
est q = 5 et que par conséquent α et γ sont pairs et β ≡ 1 (mod 4).
Comme le facteur premier isolé de N est congru à 1 modulo 4 alors il est soit égale à q = 5
ou bien égale à r et dans ce dernier cas, on a obligatoirement r = 13 (puisque les deux autres
valeurs possibles pour r, à savoir 7 et 11, ne sont pas congrues à 1 modulo 4). Mais si l’on
suppose que le facteur premier isolé de N est égale à r = 13, on aura (en vertu du théorème
19) :
r+1
2
= 7 divise 3α 5β , ce qui est visiblement faux. Le facteur premier isolé de N ne peut
donc être égale qu’à q = 5, comme nous l’avons prétendu.
Il s’ensuit de cela que l’exposant de q (à savoir β) est congru à 1 modulo 4 et les exposants des
autres facteurs premiers de N (à savoir α et γ) sont pairs, comme prétendu.
3ème étape : Nous allons montrer que α ̸= 2 et que β ̸= 1
• Montrons d’abord que α ̸= 2. Procédons par l’absurde en supposant que α = 2. Comme N
est parfait, on a σ(N ) = 2N . Ce qui équivaut (en vertu de la proposition 1) à :
33 − 1 5β+1 − 1 rγ+1 − 1
·
·
= 2 · 32 5β rγ .
3−1
5−1
r−1
C’est à dire :
5β+1 − 1 rγ+1 − 1
·
= 2 · 32 5β rγ
(10)
4
r−1
Cette égalité montre que son membre de droite 2 · 32 5β rγ est un multiple de 13, mais ceci n’est
13 ·
possible que si r = 13. Le fait r = 13 étant établi, l’égalité (10) montre aussi que son membre
de gauche 13 ·
5β+1 −1
4
5β+1 −1
4
·
rγ+1 −1
r−1
est un multiple de 5. Mais puisque chacun des deux entiers 13 et
est premier avec 5, il en découle du lemme de Gauss que le nombre
c Bakir FARHI
⃝
22
rγ+1 −1
r−1
=
13γ+1 −1
12
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
est un multiple de 5. Ce qui entraı̂ne que 13γ+1 ≡ 1 (mod 5). Comme 13 ≡ 3 (mod 5), on en
déduit que 3γ+1 ≡ 1 (mod 5). Mais l’étude des restes de 3n (n ∈ N) modulo 5 montre que cette
dernière congruence n’est possible que si γ + 1 ≡ 0 (mod 4), c’est à dire γ ≡ 3 (mod 4). Ce
qui est en contradiction avec le fait
montre que la supposition
≪
≪
γ est pair ≫ (établi à la 2ème étape). Cette contradiction
α = 2 ≫ est fausse. D’où α ̸= 2, comme prétendu.
• Montrons maintenant que β ̸= 1. Procédons par l’absurde en supposant que β = 1. Comme
N est parfait, on a σ(N ) = 2N . Ce qui équivaut (en vertu de la proposition 1) à :
3α+1 − 1 52 − 1 rγ+1 − 1
·
·
= 2 · 3α 5rγ .
3−1
5−1
r−1
C’est à dire :
3α+1 − 1 rγ+1 − 1
·
= 3α−1 5rγ
(11)
2
r−1
Comme α − 1 ≥ 1 (car α ∈ N∗ est pair), cette égalité (11) montre que son membre de gauche
3α+1 −1
2
·
rγ+1 −1
r−1
3α+1 −1
n’est ni un
2
rγ+1 −1
nombre r−1 qui est
rγ+1 −1
est un multiple
r−1
n
n
est multiple de 3 et de 5 à la fois. Mais comme le nombre
multiple de 3 (évident) ni un multiple de 5 (car α est pair) alors c’est le
un multiple de 3 et de 5 à la fois. Ce qui revient à dire que ce nombre
de 15. D’où l’on déduit que rγ+1 ≡ 1 (mod 15). Mais d’autre part, l’étude des restes de 7 , 11
et 13n (n ∈ N) sur 15 montre que l’on a pour tout n ∈ N :
7n ≡ 1 (mod 15) ⇐⇒ n ≡ 0 (mod 4)
11n ≡ 1 (mod 15) ⇐⇒ n ≡ 0 (mod 2)
13n ≡ 1 (mod 15) ⇐⇒ n ≡ 0 (mod 4).
On voit ainsi que pour toute valeur possible de r (r = 7, 11 ou 13), la congruence rγ+1 ≡
1 (mod 15) entraı̂ne que (γ + 1) est pair et donc que γ est impair. Ce qui contredit bien le fait
établi à la 2ème étape, à savoir que γ est pair. Notre supposition β = 1 est donc impossible.
D’où β ̸= 1, comme prétendu.
4ème étape : Nous conclurons en établissant une contradiction.
D’une part, comme N est parfait, on a σ(N ) = 2N , c’est à dire σ(3α 5β rγ ) = 2 · 3α 5β rγ . Ce qui
équivaut (en vertu de la proposition 1) à :
3α+1 − 1 5β+1 − 1 rγ+1 − 1
·
·
= 2 · 3α 5β rγ .
3−1
5−1
r−1
En multipliant les deux membres de cette dernière par
(
1−
1
)(
3α+1
D’où :
1−
)(
1
5β+1
(
1−
1
3α+1
1−
)
1
rγ+1
)(
1−
1
5β+1
=
(3 − 1)(5 − 1)(r − 1)
, on aboutit à :
3α+1 5β+1 rγ+1
16 r − 1
16 13 − 1
·
≤
×
15
r
15
13
)(
1−
1
rγ+1
)
≤
192
= 0, 984 . . .
195
D’autre part, d’après les résultats de la 2ème et de la 3ème étape, on a :
c Bakir FARHI
⃝
23
(car r ≤ 13).
(12)
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
(i) α ∈ N∗ est pair et α ̸= 2, ce qui entraı̂ne que α ≥ 4.
(ii) β ≡ 1 (mod 4) et β ̸= 1, ce qui entraı̂ne que β ≥ 5.
(iii) γ ∈ N∗ est pair, ce qui entraı̂ne que γ ≥ 2.
En utilisant ces minorations des exposants α, β et γ et la minoration r ≥ 7, on a :
(
)(
)(
)
(
)(
)(
)
1
1
1
1
1
1
1 − α+1
1 − β+1
1 − γ+1 ≥ 1 − 5
1− 6
1 − 3 = 0, 992 . . . (13)
3
5
r
3
5
7
Ce qui est en apparente contradiction avec (12). Cette contradiction confirme le résultat du
théorème et achève cette démonstration.
Remarque : Vous l’avez certainement remarqué que pour une petite amélioration (établir
qu’un nombre parfait impair possède aux moins 4 facteurs premiers distincts au lieu de 3),
on est amené à introduire des techniques encombrantes et assez judicieuses de congruences et
de majoration et minoration, au point où l’on pourrait croire que notre preuve est tirée des
cheveux ! Il est à savoir qu’à chaque pas d’amélioration d’un résultat de ce genre (c’est à dire
d’un résultat du type
≪
Tout nombre parfait impair possède aux moins k facteurs premiers
distincts ≫), un travail supplémentaire plus technique et plus encombrant s’impose. C’est la
raison pour laquelle, on a passé plus d’un siècle pour améliorer le résultat de Sylvester affirmant
que ≪ Tout nombre parfait impair possède aux moins 5 facteurs premiers distincts ≫ (publié en
1888) et obtenir aujourd’hui le résultat affirmant que ≪ Tout nombre parfait impair possède aux
moins 10 facteurs premiers distincts ≫, qui est du à P. Nielsen (2015). Si une telle amélioration
nous a pris tant de temps, on se doute bien que la conjecture des nombres parfaits impairs va
traı̂ner encore pour très longtemps et, sans être pessimiste, il est même probable qu’on ne saura
jamais la démontrer ! D’ailleurs, le mathématicien J. J. Sylvester, qui s’est donné beaucoup de
peine sur cette conjecture, la qualifiée d’impossible à démontrer en la comparant au problème
de la quadrature du cercle 4 .
Un aperçu historique :
Dans sa note au CRAS (Compte Rendu de l’Académie des Sciences de Paris) de 1888, J.
J. Sylvester a montré qu’un nombre parfait impair (s’il existe) possède aux moins 5 facteurs
premiers distincts et s’il est de plus un multiple de 3, alors il doit posséder aux moins 7 facteurs
premiers distincts. Il a montré aussi qu’un nombre parfait impair n’est jamais un multiple de
105 = 3 × 5 × 7. À la fin de sa note, il mentionne qu’il a réussi à prouver qu’un nombre
parfait impair possède aux moins 6 facteurs premiers distincts mais que sa démonstration est
trop longue pour être insérée dans la même note ! Ce dernier résultat a été démontré plus
tard par plusieurs mathématiciens mais il semble que c’est le russe I. S. Gradstein qui est le
premier à le démontrer en 1925. Les preuves du fait qu’un nombre parfait impair possède aux
4. Le problème de la quadrature du cercle s’interroge sur la possibilité de construire un segment de droite
(resp. un carré) de longueur (resp. de surface) exactement π (unité de mesure ou de surface), et ce en se
servant uniquement d’une règle et d’un compas. Ce très vieux problème grec n’a été résolu qu’en 1882 par le
mathématicien allemand Lindemann en montrant l’impossibilité de cette construction.
c Bakir FARHI
⃝
24
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
moins 7 facteurs premiers distincts ont été établies indépendamment par C. Pomerance et N.
Robbins vers 1972 et chacune d’elles fait partie d’une Thèse PhD. Par suite, J. E. Z. Chein
(dans sa Thèse PhD) et P. Hagis ont réussi à montrer indépendamment vers 1979 que tout
nombre parfait impair possède aux moins 8 facteurs premiers distincts. Enfin, très récemment
(en 2015), P. Nielsen a réussi à montrer que tout nombre parfait impair possède aux moins
10 facteurs premiers distincts 5 ; ce qui constitue le résultat record (sur ce sujet) jusqu’au jour
d’aujourd’hui.
Un schéma de démonstration d’un résultat du type
≪
Tout nombre
parfait impair possède aux moins k facteurs premiers distincts
Pour démontrer un résultat du type
≪
≫
Tout nombre parfait impair possède aux moins k
facteurs premiers distincts ≫ (avec k ∈ N∗ , fixé), le schéma global de démonstration est toujours
le même et peut se partager en deux étapes :
1ère étape : On procède par l’absurde en supposant qu’il existe un nombre parfait impair N
possédant moins de k facteurs premiers distincts. Si l’on suppose que le résultat ≪ Tout nombre
parfait impair possède aux moins (k − 1) facteurs premiers distincts ≫ est déjà acquis, on en
déduit aussitôt que notre nombre N possède exactement (k − 1) facteurs premiers distincts et
il s’écrit par conséquent :
N = pα1 1 · · · pαnn ,
avec n = k − 1, α1 , . . . , αn ∈ N∗ et p1 , . . . , pn des nombres premiers deux à deux distincts.
Le lemme fondamental 18 permet de limiter les choix des nombres premiers p1 , . . . , pn .
L’hypothèse
≪
N est parfait ≫ s’interprète par l’équation σ(N ) = 2N , qui se simplifie en :
(
)
(
)
1
pn − 1
1
p1 − 1
1 − α1 +1 · · · 1 − αn +1 = 2 ·
× ··· ×
(14)
pn
p1
pn
p1
Il est important de remarquer qu’en vertu du lemme fondamental 18, l’expression du membre
de droite de (14) est strictement inférieure à 1.
2nde étape : On montrera par des techniques judicieuses “créatives” (c’est là toute la difficulté)
que les exposants αi (1 ≤ i ≤ n) et certains des nombres( premiers)pi (1
) doivent
( ≤ i ≤ n)
1
1
être assez grands, ce qui permettra de minorer la quantité 1 − α1 +1 · · · 1 − pαn +1 par une
p1
n
constante C > 2 · p1p−1
× · · · × pnp−1
et contredira ainsi (14). L’existence de N est mise à défaut
n
1
et le résultat sera confirmé.
Nous poursuivons avec un résultat également remarquable, du à C. Servais.
Théorème 21 (C. Servais - 1888). Soient k un entier strictement positif et N un nombre
parfait possédant exactement k facteurs premiers distincts. Alors, le plus petit facteur premier
de N est ≤ k.
5. En 2006, le même auteur avait déjà montré que tout nombre parfait impair possède aux moins 9 facteurs
premiers distincts (il a battu ainsi son propre record !).
c Bakir FARHI
⃝
25
Les nombres parfaits
Bakir FARHI
Démonstration. La décomposition de N en produit de facteurs premiers s’écrit :
N = pα1 1 · · · pαk k ,
avec α1 , . . . , αk ∈ N∗ et p1 , . . . , pk des nombres premiers deux à deux distincts. Quitte à
réordonner p1 , . . . , pk , supposons que p1 < p2 < · · · < pk . Il s’agit donc de montrer que p1 ≤ k.
En utilisant p1 < p2 < · · · < pk , on montre aisément par récurrence que l’on a pour tout
i ∈ {1, . . . , k} : pi ≥ p1 + i − 1. D’où l’on déduit que l’on a pour tout i ∈ {1, . . . , k} :
pi
p1 + i − 1
≤
.
pi − 1
p1 + i − 2
Enfin, en multipliant membre à membre ces dernières inégalités (depuis i = 1 jusqu’à i = k),
on obtient :
p1+
2
p1
p2
pk
p1
p1+
1 p1 + k − 1
p1 + k − 1
×
··· ×
≤ ×
×
··· ×
.
=
p1 − 1 p2 − 1
pk − 1
p1 − 1
p1
p1+ 1
p1 − 1
p1+k − 2
Mais par ailleurs, en vertu du lemme fondamental 18, on a
l’on tire par comparaison que :
p1
p1 −1
×
p2
p2 −1
× ··· ×
pk
pk −1
> 2. D’où
p1 + k − 1
> 2.
p1 − 1
Ce qui donne p1 < k + 1. C’est à dire p1 ≤ k, comme il fallait le prouver. Le théorème est
démontré.
Remarque : Le théorème 21 ci-dessus a été amélioré de quelque peu depuis C. Servais. La
meilleure amélioration obtenue jusqu’à présent est due à Otto Grün qui a montré en 1952 que
le plus petit facteur premier d’un nombre parfait possédant exactement k facteurs premiers
distincts (où k ∈ N∗ ) est ≤ 23 k + 2.
D’autres résultats sans démonstration
Nous achevons ce papier en informant le lecteur de quelques résultats plus récents sur les
nombres parfaits impairs. Pour chaque résultat, nous contentons juste d’indiquer la référence
bibliographique qui en contient sa démonstration et d’éventuels détails le concernant.
1. Si un nombre parfait impair existe alors il est plus grand que 101500 (obtenu par
P. Ochem et M. Rao[8] en 2012).
2. Si un nombre parfait impair existe alors il contient au moins 10 facteurs premiers
distincts (obtenu par Pace P. Nielsen[7] en 2015).
3. Si un nombre parfait impair qui n’est pas un multiple de 3 existe alors il contient au
moins 12 facteur premiers distincts (obtenu par Pace P. Nielsen[6] en 2007).
4. Si un nombre parfait impair existe alors il contient au moins 101 facteurs premiers,
comptés avec leurs multiplicités (obtenu par P. Ochem et M. Rao[8] en 2012).
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Les nombres parfaits
Bakir FARHI
5. Si un nombre parfait impair existe alors son plus grand diviseur premier est supérieur
à 108 (obtenu par Takeshi Goto et Yasuo Ohno[14] en 2008).
6. Si un nombre parfait impair existe alors son deuxième plus grand diviseur premier
est supérieur à 104 et son troisième plus grand diviseur premier est supérieur à 100
(obtenu par D.E. Iannucci[4, 5] en 1999 et 2000).
Références
[1] L. E. Dickson. History of the theory of numbers, Vol I Washington : Carnegie Institute
of Washington. 1919–1923 ; reprint ed., Chelsea Publ. Co., New York (1952).
[2] — Finiteness of the odd perfect and primitive abundant numbers with n distinct prime
factors, Amer. J. Math, 35 (1913), p. 413-422.
[3] B. Farhi. On the representation of an even perfect number as the sum of five cubes, à
paraı̂tre dans Functiones et Approximatio Commentarii Mathematici.
[4] D.E. Iannucci. The second largest prime divisor of an odd perfect number exceeds ten
thousand, Math. Comp., 68 (1999), p. 1749-1760.
[5] — The third largest prime divisor of an odd perfect number exceeds one hundred, Math.
Comp., 69 (2000), p. 867-879.
[6] Pace P. Nielsen. Odd perfect numbers have at least nine different prime factors, Math.
Comp., 76 (2007), p. 2109-2126.
[7] — Odd perfect numbers, Diophantine equations, and upper bounds, Math. Comp., 84
(2015), p. 2549-2567.
[8] P. Ochem & M. Rao. Odd perfect numbers are greater than 101500 , Math. Comp., 81
(2012), p. 1869-1877.
[9] R. Rashed. Ibn al-Haytham et les nombres premiers, Historia Math., 16 (1989), p. 343-352.
[10] C. Servais. Sur les nombres parfaits, Mathesis, 8 (1888), p. 92-93.
[11] — Sur les nombres parfaits, Mathesis, 8 (1888), p. 135.
[12] J. J. Sylvester. Sur les nombres parfaits, C. R. Acad. Sci, 106 (1888), p. 403-405.
[13] — Sur l’impossibilité de l’existence d’un nombre parfait qui ne contient pas au moins 5
diviseurs premiers distincts, C. R. Acad. Sci, 106 (1888), p. 522-526.
[14] Takeshi Goto & Yasuo Ohno. Odd perfect numbers have a prime factor exceeding
108 , Math. Comp., 77 (2008), p. 1859-1868.
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