Institut de Formation des professions de santé Centre hospitalier régional universitaire - Besançon Formation cadre de santé Le management bientraitant du cadre de santé : un levier pour la cohésion d’équipe Mémoire présenté en vue de l’obtention du Diplôme de Cadre de Santé Option Infirmière Séverine Stankovic – promotion 2012/2013 Sous la Direction de Patricia Girerd - psychologue -1- Remerciements : Mon mémoire de recherche est le résultat d’un long travail parsemé d’enthousiasme et de doutes mais aussi de nuit courtes et de soirée d’entraide entre collègues. Je tiens ainsi à remercier celles et ceux qui m’ont toujours soutenue et redonné l’énergie dont j’avais besoin durant ces quelques mois. Ma famille, mon entourage mais surtout mon mari et mes enfants, patients à tout moment Mme Patricia Girerd, ma Directrice de mémoire, qui m’a guidé, permis de mener à bien mes recherches et qui a su me remotiver aux bons moments Mes collègues de promotion, qui m’ont soumis de précieux conseils dans mon cheminement Les professionnels du terrain qui ont accepté de me recevoir et de prendre le temps de parler de leur quotidien. « Il s’élève, il descend, va, vient, plus haut, s’élance, retombe, remonte en cadence. » Florian – site internet cours-mémoire -2- Sommaire Introduction :..............................................................................- 6 1- Cadre contextuel....................................................................- 9 1-1 Le constat de départ ......................................................................... - 9 1-2 Problématique et hypothèse ........................................................... - 11 - 2- Cadre conceptuel.................................................................- 13 2-1 Du groupe à l’équipe soignante ...................................................... - 13 2-1-1- La notion de groupe ............................................................ - 13 2-1-2 La notion d’équipe ................................................................ - 16 2-2 Le cadre de santé, cadre de proximité............................................ - 22 2-2-1 Le cadre législatif.................................................................. - 22 2-2-2 Le cadre de proximité ........................................................... - 23 2-3 Un management bientraitant........................................................... - 27 2-3-1 Définitions............................................................................. - 27 2-3-2 Les méthodes existantes...................................................... - 30 - 3- Méthode de recherche :.......................................................- 37 3-1 Les entretiens exploratoires............................................................ - 37 3-2 Les entretiens de recherche ........................................................... - 37 3-2-1 Quoi ?................................................................................... - 38 3-2-2 Qui ?..................................................................................... - 38 3-2-2 Pourquoi et pour quoi ? ........................................................ - 38 3-2-3 Où ?...................................................................................... - 39 3-2-4 Quand ?................................................................................ - 40 3-2-5 Comment ? ........................................................................... - 40 3-3 Les déterminants sociaux ............................................................... - 42 3-3-1 Les variables socioprofessionnelles ..................................... - 43 3-3-2 L’âge..................................................................................... - 43 3-3-3 L’expérience professionnelle ................................................ - 43 3-3-4 Les secteurs d’activité .......................................................... - 44 - 4- Analyse.................................................................................- 46 4-1 L’équipe : une nécessaire cohésion................................................ - 46 - -3- 4-1-1 L’équipe selon les soignants ................................................ - 46 4-2-2 La composition des équipes ................................................. - 49 4-2-3 Cohésion d’équipe : synonyme de « bonne équipe » ........... - 50 4-2-4 Comment pérenniser cet état d’esprit ?................................ - 53 4-2-5 Le cadre de santé................................................................. - 56 4-2 Le management bientraitant du cadre de santé pour le bien-être de son équipe ................................................................................................... - 61 4-2-1 Le bien-être selon les soignants ........................................... - 61 4-2-2 Les attentes des équipes...................................................... - 67 - 5 – Confrontation avec l’hypothèse de départ.......................- 81 5-1 La cohésion d’équipe ...................................................................... - 81 5-2 La place du cadre de santé............................................................. - 82 5-3 Un cadre de santé idéal .................................................................. - 82 - 6- Les enseignements tirés .....................................................- 86 6-1 D’un point de vue méthodologique ................................................. - 86 6-2 D’un point de vue de la fonction cadre de santé ............................. - 87 - 7- Conclusion ...........................................................................- 90 Bibliographie............................................................................- 93 Annexe 1 : extrait des valeurs professionnelles ...................- 98 Annexe 2 : ma trame d’entretien...........................................- 102 - -4- Introduction « Manager des hommes ne peut se faire sans estime et bienveillance pour les hommes » Sophie Becu – Directeur des Soins – août 2012 -5- Introduction : Les modules d’analyse des pratiques et d’initiation à la recherche, et d’approfondissement des fonctions d’encadrement et de formation des professionnels se concrétisent par l’élaboration d’un mémoire. Sa soutenance valide le diplôme de cadre de santé. Dans un contexte hospitalier en constante évolution, la gestion d’un hôpital peut se comparer aujourd’hui à celle d’une entreprise : tarification à l’activité, durée moyenne de séjour en baisse, restriction budgétaire nécessaire au rééquilibrage des budgets sont le quotidien de tous. Les soignants se plaignent d’avoir moins de temps auprès du patient, les démarches administratives sont nombreuses et chronophages et la polyvalence est de mise afin de mutualiser les ressources humaines. Le cadre de santé, acteur à part entière dans l’organisation hospitalière et représentant d’une (et parfois même plusieurs) unité, est confronté à ces bouleversements. Pivot entre la Direction de son établissement, les médecins et les soignants de son unité, il est également garant de la qualité et de la sécurité des soins. Il doit alors maintenir motivation, dynamisme et cohésion de son équipe pour atteindre cet objectif commun : le bien-être et la satisfaction du patient. Et il ne peut faire fi de cet environnement changeant et des conditions de travail parfois difficiles dans lesquelles les soignants exercent leur métier. Comment mener alors à bien cette périlleuse mission ? Je choisis ainsi d’axer mon travail de recherche sur le rôle du cadre dans la cohésion de l’équipe soignante. Grâce à mes diverses recherches associées à mon observation sur le terrain, je découvre et comprends ce que les professionnels attendent du cadre de santé et quelle est sa place dans une équipe. Mon expérience antérieure de faisant fonction de cadre de santé va me permettre de poser une problématique et d’émettre une hypothèse, par le biais -6- d’éléments factuels. Cette hypothèse de départ est le fil conducteur de toutes mes recherches. Tout d’abord mes différentes lectures et ma réflexion posent le cadre conceptuel. Je développe alors différents thèmes : le groupe et l’équipe soignante, le cadre de santé et le management bientraitant. Cette étape me permet de prendre du recul face à ma pratique et de découvrir divers auteurs abordant ces thématiques. Puis, une fois les concepts finalisés, l’analyse croisée de mes entretiens met en exergue 2 grandes notions : la cohésion de l’équipe soignante et le management bientraitant du cadre de santé. Des thèmes développés en amont qui sont évoqués en définitive par les soignants interviewés. Cette analyse est confrontée ensuite à mon hypothèse de départ afin d’être confirmée totalement ou partiellement, voire infirmée. Mon travail, réalisé tout au long des 10 mois de formation, me permet une réflexion et un cheminement professionnel et personnel. A l’issue de mes recherches je développe diverses compétences. J’aborde ainsi les enseignements tirés dans une dernière partie. -7- Cadre contextuel La bientraitance c’est « un puissant levier qui donne du sens à l’engagement du soignant touchant le cœur de son métier » Valérie Bliez – Directeur des soins – août 2012 -8- 1- Cadre contextuel 1-1 Le constat de départ Durant mes années d’expériences professionnelles en tant qu’infirmière, j’ai côtoyé diverses équipes, composées de différents professionnels. Des équipes structurées d’hommes, de femmes, avec des soignants ayant une longue expérience professionnelle mais aussi de jeunes diplômés. Une diversité qui enrichit finalement une équipe. Les différentes réformes de l’hôpital et plus récemment la loi de 2009 « Hôpital, Patient, Santé, Territoire » incite entre autre les établissements à mutualiser leurs moyens. Il faut prendre en charge les patients avec souvent moins de personnel. Pour moi, il est d’autant plus important de conserver ma motivation au travail malgré nos difficultés d’effectifs. De plus, et pour le bien du patient, il me semble évident de devoir travailler ensemble et avec les mêmes objectifs : soigner en respectant le bien-être du patient. Pendant mes années d’exercice professionnel en tant qu’infirmière, l’harmonie de l’équipe m’a toujours semblée essentielle pour une qualité de travail. Mes collègues étaient également pour moi des soignants sur lesquels je pouvais compter au quotidien. Notre cadre de santé attachait beaucoup d’importance à notre équilibre et était spontanément disponible et à l’écoute pour tout soignant en cas de besoin. Il savait nous motiver dans notre quotidien afin de maintenir au mieux notre dynamique de groupe. Il faisait également partie intégrante de notre équipe mais en sachant garder son statut de cadre de santé et en préservant ainsi notre intimité aux bons moments. En prenant mon poste d’infirmière faisant fonction de cadre de santé, j’ai rapidement attaché beaucoup d’importance à l’équipe, à ses attentes, ses revendications et ses remarques. -9- Au fil des semaines, je suis parvenue à obtenir l’adhésion de quasi toute l’équipe dans mes souhaits de projets et de réorganisation dans le service. Il me semble que les soignants m’ont fait confiance, et cet état d’esprit est à mon sens indispensable pour le bien-être de l’équipe et au final des patients. En quittant mon poste pour intégrer l’Institut de Formation des Cadres de Santé, plusieurs soignants m’ont dit « on a envie de faire parce que vous nous donnez envie de faire ». Je me suis alors posée diverses questions et le choix de ce thème pour mon mémoire s’est fait naturellement : Pour quelles raisons l’équipe a-t-elle fait cette remarque ? Quels ont été mes propos qui auraient pu les pousser à me dire cela ? Dans mon quotidien, qu’ai-je fait pour les motiver ainsi ? Je pensais que le lien entre leurs propos et moi était uniquement la reconnaissance. En effet, j’ai toujours apprécié, de la part de mon ancien cadre, ses propos pour légitimer notre travail tels « merci pour votre travail » ou encore « vous avez trouvé la bonne solution pour éviter que la situation ne se dégrade ». Il s’agissait de phrases courtes mais suffisantes pour toute l’équipe et qui redonnaient un peu d’énergie pour terminer la journée de travail. Il me semble avoir su dire les choses concrètement également aux équipes que j’avais en charge. Suite aux entretiens exploratoires, la reconnaissance n’a pas été le seul terme apporté par les soignants interrogés. En effet, tous citent également l’écoute, l’équité et la transparence, en plus de la reconnaissance. Il s’agit de termes que je vais développer par la suite. Il est donc important que le cadre de santé sache se donner les moyens de maintenir l’équilibre de son équipe, sa cohésion et motive chacun des soignants. - 10 - 1-2 Problématique et hypothèse Mintzberg cite : « dans son rôle de leader, le cadre définit l’atmosphère dans laquelle l’organisation travaillera [1, p.71]. » Mais il est primordial également que l’équipe soignante adhère à cette organisation. Même si le cadre de santé, en tant que leader, détient l’autorité, il doit développer des compétences lui permettant d’obtenir rapidement l’adhésion de son équipe à ses valeurs. Puisque sans équipe, il n’y a pas de travail ! Après mes différentes expériences professionnelles et suite à mes entretiens exploratoires, je peux me poser alors la question suivante : En quoi le cadre de santé peut-il faciliter la cohésion de l’équipe ? En réfléchissant aux propos dont certains soignants m’avaient fait part et en analysant ma pratique, je me suis donc rendue compte que diverses raisons auraient pu leur faire dire que je « leur donne envie de faire ». Je me situe comme un cadre de proximité, ayant été à l’écoute et prenant du temps avec les soignants. Une manière de leur témoigner une reconnaissance et de valoriser leur travail. Ma réflexion et mes entretiens exploratoires me font poser l’hypothèse de recherche suivante : Le cadre de santé facilite la cohésion d’équipe par le biais d’un management bientraitant. « Manager des hommes, c’est les entraîner et les mobiliser vers un but à atteindre […] Manager des hommes ne peut se faire sans estime et bienveillance pour les hommes » [2, p.15] - 11 - Cadre conceptuel « La bientraitance est une culture issue d’une recherche collective vers le mieux » Citation ANESM – Recommandations de bonnes pratiques professionnelles - 12 - 2- Cadre conceptuel Je commence par définir le groupe ainsi que l’équipe soignante, au cœur même de mon métier de cadre de santé. Ensuite, j’explique le rôle et la place du cadre de santé puis je termine par développer le management bientraitant. 2-1 Du groupe à l’équipe soignante Je définis tout d’abord le groupe et les notions qui s’y rapportent puis j’aborde l’équipe et plus spécifiquement l’équipe soignante. 2-1-1- La notion de groupe 2-1-1-1 Définition Différents auteurs définissent ce terme dans divers ouvrages. Il s’agit là de comprendre son sens puisque des liens seront faits avec la notion d’équipe dans la suite de mon travail. Le groupe est « un ensemble d’individus liés par un objet ou un projet commun et ayant entre eux des relations sociales de dépendance explicites et réciproques. Le groupe est régit par des règles du jeu. Pour Jacques LACAN, le groupe est « le plus un », il n’est jamais la somme des individus qui le composent. Le groupe est l’ensemble des individus, plus un. [3]». Mais aussi, « un agrégat de personnes n’est groupe que si des liens de face à face se nouent entre les personnes, mettant de l’unité dans leur « être là - 13 - ensemble ». Le groupe est une réalité dans la mesure où il y a interaction entre les personnes, une vie affective commune, et une participation de tous (…) [3]». La notion de groupe apporte une réelle plus-value à toute action. Réfléchir et agir ensemble, discuter, se mettre d’accord ou encore être en désaccord, tel est le quotidien dans un groupe, que ce soit au travail ou dans la vie courante. Il est important également, pour que le groupe puisse exister, de pouvoir trouver un but, un objectif commun : travailler ensemble pour l’atteindre. Le groupe peut être décliné en groupe d’appartenance mais aussi en groupe de référence. 2-1-1-2 Le groupe d’appartenance «On appelle groupe d’appartenance, le groupe dans lequel l’individu a des relations directes (…) et dont il fait partie effectivement et physiquement, à tel moment de sa vie [4, p.47]». V. Aebischer et D. Oberlé rappellent que la conformisation est une étape inéluctable pour s’intégrer à un groupe psycho social [5, p.65-67]. 3 formes de conformismes émergent, en fonction des individus : Le conformisme de complaisance : l’individu se conforme au groupe pour y être accepté, Le conformisme d’identification : l’individu attache de l’intérêt aux bonnes relations avec le groupe, Le conformisme d’intériorisation : l’individu va s’adapter aux normes et idées du groupe. Finalement, l’individu s’intègre toujours à tout groupe en adaptant son comportement face aux situations qu’il peut rencontrer. En parallèle à ces définitions, il me semble important de repréciser celle de l’appartenance. - 14 - L’appartenance : «Sentir le groupe et se sentir de ce groupe (…) incline à un ensemble d’attitudes et de sentiments que l’on désigne habituellement par appartenance [6, p.51] ». Ces comportements peuvent être divers et variés mais toujours en lien avec le groupe. Mucchielli rappelle ici la différence entre le groupe d’appartenance développé auparavant et l’appartenance au groupe. Il ne s’agit pas uniquement de faire partie du groupe mais également de se donner les moyens pour le faire vivre. Chacun, de manière singulière, a sa place dans le groupe et il existe un lien entre tous. 2-1-1-3 Le groupe de référence A. Blanchet et A. Trognon les définissent comme des « groupes auxquels l’individu se rattache personnellement en tant que membre actuel ou auxquels il aspire à se rattacher psychologiquement ; ou en d’autres termes ceux auxquels il s’identifie ou désire s’identifier [7, p. 29]». L’individu ne fait pas partie physiquement du groupe mais va se servir des valeurs et normes de ce dernier, qu’il juge intéressantes, pour peut-être un jour l’intégrer tout de même. Il s’agit là d’un moyen de se comparer aux autres et qui peut conforter l’individu à rester dans son groupe d’appartenance ou, au contraire, de le quitter pour intégrer le groupe de référence. Ce dernier peut alors à son tour devenir groupe d’appartenance. Tout groupe nécessite, pour son organisation, une personne de référence. L’autorité permettant de coordonner au mieux les membres des différents groupes est ainsi attribuée très souvent à une personne, le leader. - 15 - 2-1-1-4 L’autorité dans le groupe Elle est indispensable dans toute organisation d’un groupe. A. Blanchet et A. Trognon attribuent cette autorité au leader. « Conduire un groupe implique que l’on adopte une position particulière dans le groupe, position dite de leader [7, p.102]» L’autorité d’un leader lui est conférée par le groupe lui-même. Il me semble bien pouvoir comparer le cadre de santé au leader, qui doit créer un climat de confiance entre son groupe (c’est-à-dire son équipe) et lui. L’élément essentiel qu’il me paraît important de retenir serait le lien existant entre les membres d’un groupe : atteindre un objectif. Chacun doit apporter sa pierre à l’édifice, de façon singulière. Voyons de quelle manière cette notion de groupe peut être comparée à une équipe. 2-1-2 La notion d’équipe 2-1-2-1 Définition Le dictionnaire Larousse définit l’équipe de la manière suivante [8] : «Ensemble de personnes travaillant à une même tâche ». «Ensemble des ouvriers se succédant sur un même poste de travail ». Le terme « équipe viendrait du vieux français esquif, qui désignait à l'origine une suite de chalands attachés les uns aux autres et tirés par des hommes ou des chevaux, en attendant l’époque des remorqueurs. Est-ce l’image des bateliers tirant sur la même corde ou celle des bateaux attachés ensemble...Toujours est-il qu’on a parlé un jour d’équipe de travailleurs pour réaliser une oeuvre commune (...) [9]». - 16 - Tout comme le groupe, l’objectif d’une équipe est bien une tâche similaire à accomplir. L’idée de complémentarité est également mise en avant, chacun ayant un rôle bien spécifique dans l’action en cours. Dans son ouvrage « Le travail en équipe », R. Mucchielli définit l’équipe comme un groupe primaire [6, p. 11-14]. Le « groupe primaire est un groupe où les relations sont directes (…) et où règne une unité d’esprit et d’action ». Il précise que dans le groupe primaire tous se connaissent et peuvent discuter entre eux « sans intermédiaire ». Effectivement, je pense que l’équipe peut être comparée à un groupe primaire. Il me semble même qu’il s’agit d’un état d’esprit indispensable à son bon fonctionnement, tout comme le groupe : atteindre nos objectifs mais ensemble, avec une réflexion commune. Dans ce livre, R. Mucchielli développe 7 caractéristiques de l’équipe : Le petit nombre : plus elle est petite, plus elle est efficace. La qualité du lien interpersonnel : chacun appartient au groupe et adhère à la culture de ce dernier. L’engagement personnel : chacun apporte sa compétence personnelle pour le bénéfice de toute l’équipe et est engagé dans ses actions. Une unité particulière en découle : l’équipe forme un tout et chaque membre dépend de l’autre. Une intentionnalité commune vers un but collectif accepté et voulu : l’équipe avance vers un but commun. C’est ce but qui créé « l’unité d’esprit ». Des contraintes en découlent pour les membres : travailler en équipe sous-entend devoir faire des concessions. Une organisation existe donc : la répartition des tâches se fait de manière cohérente et organisée et toujours en lien avec les objectifs posés en amont. Différentes conditions sont nécessaires pour la réussite d’une équipe [10, p.44] : « Une communication facile entre chaque membre, sans discrimination et sans à priori - 17 - Le respect de la parole et la libre expression des désaccords et des tensions La non mise en question de la participation affective du groupe L’entraide entre tous les membres La volonté d’aider un membre défaillant La connaissance des aptitudes et des limites de chacun La division du travail par le choix commun d’objectifs librement acceptés (…) ». Il est donc important que chaque membre d’une équipe prenne conscience de son rôle dans le groupe. Il est indispensable d’agir de manière cohérente. Chacun doit avoir connaissance des compétences des autres mais aussi de ses limites. En équipe, les moyens dont le groupe dispose sont mis en commun pour atteindre le plus aisément possible les objectifs déterminés ensemble. Des termes similaires sont retrouvés dans les définitions du groupe et de l’équipe. Le but commun, l’adhésion à la culture de l’équipe, le respect et la singularité de chacun dans une équipe me semblent les critères les plus importants retrouvés dans divers ouvrages. « Les performances d’une équipe sont fonction, non seulement des qualités intrinsèques de chacun de ses membres pris individuellement, mais surtout de leur capacité à créer des synergies en travaillant ensemble et en partageant leurs compétences et leurs expériences. C’est ce qui en fait sa richesse [11, p.6] ». Ainsi, l’idée du groupe et de l’équipe comme par exemple un « plus un », qui atteint les mêmes objectifs en mettant en commun les compétences singulières de chacun, est pour moi une association de représentations en lien avec la définition de l’équipe soignante. - 18 - 2-1-2-2 L’équipe soignante Il me semble important de préciser ce que le soin sous-entend. Divers auteurs, comme W. Hesbeen ou Y. Gineste l’abordent sous différents angles. « Soigner… - se situe au carrefour de ce qui fait vivre et mourir - c’est communiquer de la vie - c’est permettre d’exister - c’est développer ce qui permet de vivre… - c’est compenser ce qui fait obstacle à la vie… - c’est accompagner les grands passages de la vie… les moments difficiles…la maladie… - c’est mobiliser les capacités de vie existantes et/ou restantes… - c’est aider à naître… et renaître… - c’est accompagner la mort - c’est créer au quotidien [12]». L’équipe soignante est également « un petit groupe coopératif, motivé pour une tâche commune, solidaire, caractérisé par l’unité de cohésion et l’esprit d’équipe [10, p.46] ». Ces caractéristiques développées là décrivent bien le quotidien du soignant : communiquer, aider et accompagner des patients, hommes et femmes, dans la maladie. Différents types d’équipes soignantes existent [13, p.26-27] : L’équipe fonctionnelle : elle est composée de tous les agents qui constituent l’effectif de l’unité de soins c’est-à-dire infirmier, aide-soignant et agent de service hospitalier, placés sous l’autorité du cadre de santé. L’organisation permet une continuité des soins 24h/24h pour répondre aux besoins des patients. L’équipe opérationnelle : elle est constituée des agents présents durant une période limitée. Elle constitue l’effectif nécessaire à la prise en - 19 - charge des patients. Les autres personnes sont en repos hebdomadaire ou en congés annuels. L’équipe élargie : elle comprend l’équipe opérationnelle ainsi que les professionnels intervenant ponctuellement au sein de l’unité de soins (kinésithérapeutes, diététiciens, assistantes sociales, psychologues…) L’équipe pluridisciplinaire : elle inclut toutes les personnes de catégories professionnelles diverses et variées qui collaborent dans le parcours de soins du patient (personnels de bloc opératoire, du service de radiologie, d’endoscopie…). Chaque personne intervient dans son secteur d’activité et c’est le patient qui se déplace. L’équipe fonctionnelle est pour moi la plus significative. Elle est celle que le cadre de santé côtoie au quotidien. Dans une équipe soignante, travailler ensemble est indispensable : soigner seul n’est pas concevable. Toutes les catégories professionnelles ont leur rôle dans la prise en charge du patient. De plus, afin d’atteindre ses buts, l’équipe doit pouvoir travailler de manière cohérente. 2-1-2-3 La cohésion d’équipe Les termes cohésion et coopération me paraissent complémentaires. Je les définis rapidement : « La cohésion (…) représente la totalité des forces qui poussent les membres à rester dans le groupe… ; elle augmente avec la valence du groupe pour ses membres (c’est-à-dire la valeur attractive pour ses membres) [6, p.41]». « Co-opérer c’est travailler ensemble, à une oeuvre commune. La coopération implique dépendance et solidarité vis-à-vis d’un groupe. La coopération est donc le fait, pour une personne, de s’adonner consciemment à une activité complémentaire de celle d’autres personnes dans le cadre d’une finalité commune, dans un groupe donné [14] ». Pour une coopération efficace, la cohésion est indispensable. En effet, dans une équipe soignante comme dans tout autre groupe ou équipe, travailler ensemble pour atteindre ses objectifs est facilitateur. - 20 - Chaque membre de cette équipe joue un rôle dans la cohésion de son groupe. Comme cité ci-dessus, chacun dépend de l’autre mais aussi chacun apporte ses qualités et compétences singulières. Il me semble alors important, afin de maintenir cohésion et coopération dans une équipe, de pouvoir rester motivé dans sa tâche quotidienne. 2-1-2-4 La motivation de l’équipe « La motivation est une attitude, un état d’esprit, une manière d’être, fondée sur l’intérêt que l’on porte à ce que l’on fait [15, p. V] ». « Un individu est donc motivé quand une perspective ou une possibilité s’offre à lui dans le présent, de satisfaire une tendance latente, ce qui oriente et dynamise sa conduite dans le sens de la satisfaction de cette tendance [6, p.64] ». Soigner est un métier parfois difficile, où les professionnels côtoient la maladie, la souffrance, le deuil mais également la colère, la violence et l’agressivité. Il est alors indispensable de trouver une source de motivation permettant de continuer à travailler. Mais chacun la trouve en fonction de ses valeurs et convictions. Il est parfois difficile alors d’aider chacun à trouver sa motivation. Il est cependant possible d’éviter la démotivation. Les facteurs de démotivation sont au nombre de 5 [15, p. V] : Facteur administratif : cohérence des structures d’organisation Facteur hiérarchique : valeurs et compétences de l’encadrement Facteur organisationnel : temps, espace, équipement Facteur économique : salaires, primes Facteur relationnel : relation entre l’individu et la tâche. Je pense retrouver ici les différents critères que chacun d’entre nous analyse dans son quotidien et qui sont, effectivement, sources de démotivation lorsque non satisfaits. A l’opposé, je pense qu’ils sont synonymes de motivation lorsqu’ils sont assouvis. Mais chaque personne va définir de manière - 21 - personnelle ces critères. Les attentes et limites diffèrent d’une personne à l’autre (par exemple, les attentes salariales entre 2 personnes). Les définitions du groupe et de l’équipe soignante sont proches, avec chaque fois la notion de « but commun » mis en avant. Ce qui importe également, afin que la coopération soit efficace, est que la cohésion soit maintenue, en évitant la démotivation de chacun des membres. Le cadre de santé joue là un rôle primordial dans le management d’une équipe soignante. 2-2 Le cadre de santé, cadre de proximité Après avoir resitué le cadre législatif, je développe le rôle du cadre de proximité à l’hôpital ainsi que les enjeux et objectifs de son quotidien. 2-2-1 Le cadre législatif Le cadre de santé fait partie intégrante de l’équipe de soins à l’hôpital. Le décret n° 95-926 du 18 août 1995 portant création d'un diplôme de cadre de santé, permet à ses titulaires d’exercer les fonctions d’encadrement ou de formation dans les établissements de santé. Le rapport de la Mission Cadres Hospitaliers présenté par Chantal de Singly en septembre 2009 à la demande de Roselyne Bachelot-Narquin, alors Ministre de la Santé, retient une définition dégageant 4 missions principales du cadre hospitalier [16] : « - une mission de management d’équipes et d’organisations ; - une mission transversale ou de responsabilité de projet ; - une mission d’expert ; - une mission de formation ». - 22 - « Le cadre de santé se voit confier des fonctions d'organisation des activités de soins, de management des ressources humaines et de gestion économique, de formation et de recherche. Il exerce au sein d'une unité fonctionnelle de soins ou auprès d'un groupe de professionnels. Il a comme principale mission l'organisation et l'évaluation de la bonne dispensation des soins infirmiers, en lien avec des objectifs d'établissement ou un projet médical. Il collabore étroitement avec l'équipe dont il est responsable et dont il assure l'animation, sous la responsabilité du directeur de la structure de soins [17] ». Le cadre de santé représente pour moi un maillon essentiel dans l’organisation hospitalière. Il est le lien entre les soignants, les différents intervenants médicaux et la hiérarchie mais également entre l’équipe pluridisciplinaire et les patients (ainsi que leur famille). Afin de comprendre au mieux les besoins des équipes, il me semble important qu’il soit proche de chacun. Il est définit alors comme un cadre de proximité. 2-2-2 Le cadre de proximité 2-2-2-1 Définition « Les activités de ces cadres de proximité (…) se répartissent dans six domaines d'activités : Supervision des soins réalisés par l'équipe en charge : évaluation des pratiques, qualité, suppléance éventuelle, Administration et gestion relatives à l'activité en charge au sein de l'unité fonctionnelle, Gestion des relations extérieures, amont, aval, prestataires, Gestion du budget (délégué) de services Relation, information, éducation avec les patients, les familles et les autres professionnels, Participation à l'amélioration des pratiques et de l'organisation du travail, Veille professionnelle sur les évolutions [18]». - 23 - Il fait partie intégrante de l’équipe soignante. Cette proximité est nécessaire afin de mener à bien ses missions quotidiennes. 2-2-2-2 Son rôle et sa place dans l’équipe Dans son ouvrage « Le manager au quotidien », H. Mintzberg développe les 10 rôles du cadre. Je les intègre au rôle du cadre de proximité. Il est alors [1, p.69-104] : Un symbole : je le compare également à un atome, les professionnels représentant alors les électrons. Pour les soignants, il symbolise également l’autorité. Un leader : le cadre de santé représente pour moi celui qui mobilise l’équipe dans son quotidien. Les soignants doivent avoir confiance en lui. Il doit ainsi pouvoir motiver le groupe dans une dynamique d’équipe cohérente garantissant au final la qualité des soins prodigués. Il est également un soutien pour les différents membres de l’équipe et doit savoir être à leur écoute. Un agent de liaison : il est effectivement le lien entre les différents interlocuteurs intervenant au sein même de l’unité (infirmière, médecin, patient…) mais également entre le service et la hiérarchie (cadre de pôle, Direction des Soins, service de formation continue…) Un observateur actif : il s’agit d’une compétence indispensable. Le cadre de proximité doit être capable d’observer de manière élargie le service et les professionnels. Il doit comprendre rapidement l’organisation de l’unité pour proposer d’éventuels axes d’amélioration. Un diffuseur et un porte-parole : il communique avec tous les membres de son équipe mais tout autre interlocuteur extérieur envisageable (famille, prestataire, structure extrahospitalière…) Un entrepreneur : il doit savoir mobiliser l’équipe dans la construction de projets communs. Il anime en général les groupes de travail qui en découlent. Un régulateur : le cadre de proximité intervient pour gérer des situations difficiles ou conflictuelles (agressivité d’un patient ou d’une famille, - 24 - comportement inadapté d’un soignant…). Il doit se positionner afin de corriger ces comportements. Un répartiteur de ressources : l’exemple de la gestion des plannings est le plus adapté à ce rôle. La gestion des formations en fait également partie. Un négociateur : le cadre de proximité négocie dans l’élaboration des plannings par exemple. Il peut également, annuellement, négocier l’achat de matériel. Les demandes émanent la plupart du temps des équipes. Le cadre représente alors son service et négocie pour son service. Le cadre de proximité possède des compétences à la fois de gestion des ressources humaines mais également d’organisation. Il doit savoir s’adapter aisément aux situations mais surtout à ses interlocuteurs. De son management découlent divers enjeux et objectifs. 2-2-2-3 Les enjeux et objectifs Le cadre de proximité est garant de l’équilibre de l’équipe soignante. Cohésion, motivation et travail en équipe sont ainsi essentiels pour les soignants. Les enjeux de cet équilibre sont divers : Le bien-être au travail : il est en lien avec la motivation. En effet, il me semble qu’en se sentant bien au travail, la motivation est plus évidente. Les soignants passent pour la plupart une grande partie de la journée sur leur lieu de travail. Il parait donc incontestable de pouvoir exercer son métier avec plaisir et motivation. Le cadre de proximité, par son management, tend à instaurer ce climat et cet état d’esprit, essentiels pour maintenir motivation et ainsi dynamique et cohésion d’équipe. Prévenir les risques psychosociaux : Le rapport Lachmann-LarosePenicaud de février 2010 fait suite à une demande du premier ministre. Il décrit les divers motifs du stress au travail mais surtout propose 10 solutions pour améliorer la santé psychologique au travail, dans le secteur privé [19]. Cependant, il me semble que certaines propositions sont totalement applicables à l’organisation du cadre de proximité en unité de soins : - 25 - « La santé des salariés est d’abord l’affaire des managers, elle ne s’externalise pas : les managers de proximité sont les premiers acteurs de santé. » : le cadre de proximité est effectivement en contact direct avec l’équipe soignante. Il doit être capable de repérer au plus vite toute difficulté naissante dans un groupe. « Ne pas réduire le collectif de travail à une addition d’individus : valoriser la performance collective pour rendre les organisations de travail plus motivantes et plus efficientes. » : tout comme développé précédemment, le travail en groupe est une valeur ajoutée pour tous. Il est important pour le cadre de santé de promouvoir ce type de travaux et d’inciter les professionnels à y participer. Le cadre de proximité, en connaissant plus personnellement chacun des membres de l’équipe doit être capable d’anticiper au mieux certaines situations telles l’épuisement professionnel, le stress ou encore des conflits au sein même de l’équipe. Comme cité auparavant, dans une équipe, chacun joue un rôle en apportant ses compétences individuelles. Tous doivent pouvoir travailler ensemble avec les mêmes objectifs et la même motivation. Éviter un turn-over : la génération actuelle de professionnels ne souhaite plus faire carrière sur un seul et même service. Cependant, un turnover trop important peut démotiver l’équipe en place. Il ne permet pas non plus la réalisation de grands projets dans l’unité. Si les mouvements des soignants sont trop fréquents, aucun projet ne peut être mis en œuvre. Finalement, de ces différents enjeux découle la qualité des soins. La qualité des soins : une équipe soignante motivée, cohérente, travaillant en commun pour atteindre ses objectifs entraîne, je pense, une prise en charge optimale du patient durant son hospitalisation. Les missions du cadre de santé sont diverses mais le travail essentiel reste bien le management des hommes. Une tâche souvent difficile qui demande au cadre de s’adapter au quotidien mais aussi de bien connaître les soignants de son équipe. En étant réellement un cadre de proximité, il arrive à créer un climat de confiance propice au maintien de la dynamique du groupe, de sa - 26 - cohésion et de sa motivation : conserver le bien-être au travail par un management bientraitant. 2-3 Un management bientraitant Je débute par la définition des termes « management » et « bientraitance ». J’expose ensuite les différentes méthodes pouvant être associées au management bientraitant. 2-3-1 Définitions 2-3-1-1 Le management Le management désigne « l’ensemble des techniques de direction, d’organisation et de gestion de l’entreprise [20] ». Sophie Becu, dans son mémoire Master 2è année, associe le verbe manager au mot ménager, qui signifie « veiller et non pas seulement surveiller. Ménager c’est aussi une écologie des relations humaines et des richesses humaines, c’est préserver le capital humain ». Il me parait important d’intégrer dans le management la notion de « relations humaines ». Il est finalement une interaction entre individus, où chacun possède sa propre identité professionnelle. Sophie Becu, dans son article, le définit également de cette manière : « Manager des hommes, c’est les entraîner et les mobiliser vers un but à atteindre (…). Manager des hommes ne peut se faire sans estime et bienveillance pour les hommes [2]». Cependant, les réformes hospitalières récentes déstabilisent les soignants. - 27 - Souvent, ils se plaignent du manque de temps, ne leur permettant pas d’être au lit du patient comme ils le souhaiteraient. Dans une conjoncture économique où le rendement prime, il est indispensable de soutenir les soignants au quotidien. Le rapport Lachmann-Larose-Penicaud précise bien que « si les hommes constituent la ressource stratégique majeure, il faut que les dirigeants s’en préoccupent au même titre que les enjeux économiques : ce sont les salariés qui font la performance de l’entreprise [19] ». Inclure les soignants dans le management signifie être à leur écoute et surtout porter une attention à leurs actes, comportements et propos. Le cadre de santé doit alors être « authentique, fiable et constructif [2] » : Authenticité : les objectifs à atteindre doivent être connus et le cadre se donne les moyens pour y arriver. Fiabilité : le cadre doit tenir ses engagements. Il «dit ce qu’il fait et fait ce qu’il dit ». Constructivisme : le cadre de santé tient compte des avis de tous et accepte de se remettre en question pour avancer dans les projets. Il s’agit ainsi de continuer à motiver les équipes soignantes malgré les bouleversements organisationnels de l’hôpital. Le management bientraitant est une notion de plus en plus utilisée dans les discours des cadres. 2-3-1-2 La bientraitance managériale Durant ma formation, j’ai eu l’opportunité de rencontrer Mme Sophie Becu, Directeur des Soins à l’hôpital René Muret. Elle a beaucoup travaillé sur le management bientraitant et m’a fait part de ses différents écrits. Nos échanges ont également été très riches. J’utilise certains de ses propos (avec son accord) dans la suite de mon travail. La bientraitance est une notion associée aux soins prodigués envers les soignés. Prendre soin des patients est bien entendu le quotidien des - 28 - professionnels. Il s’agit d’un terme de plus en plus utilisé et souvent comparé à la maltraitance. W. Hesbeen note que « prendre soin est un art (…), celui qui réussit à combiner des éléments de connaissance, d’habileté, de savoir-être, d’intuition qui vont permettre de venir en aide à quelqu’un, dans sa situation singulière [21, p. 35] ». De plus en plus, cette notion de bientraitance est associée au management. La bientraitance managériale peut ainsi se définir comme un encadrement qui soit : - « cohérent - respectueux des équipes - permettant à chacun d’être acteur à part entière - soutenant les initiatives - évitant toutes les formes d’organisation déresponsabilisante [22] ». Dans son article « La bientraitance managériale du cadre de santé », S. Harrouet développe plusieurs critères qui me paraissent définir en pratique le management bientraitant [23] : Respecter la personne dans ce qu’elle est : le respect de l’autre reste pour ma part une valeur essentielle dans toute équipe soignante. Il va de soi que le cadre respecte ainsi les professionnels avec lesquels il travaille. Connaître les personnes de son équipe : le cadre de santé doit savoir ajuster son management à la singularité de chacun et répondre à leurs attentes de manière adaptée. Inciter et fédérer l’équipe autour d’un projet de soins : il s’agit d’une tâche essentielle pour le cadre de santé. Il est important de pouvoir motiver chaque professionnel concerné, en fixant des objectifs clairs et réalisables et en expliquant la plus-value du projet dans l’organisation générale par exemple. Créer un environnement propice à la valorisation du soignant : le cadre de santé doit repérer les compétences de chacun et les utiliser à bon escient. C’est reconnaître les qualités individuelles et les mettre en avant. Une source de motivation pour les professionnels. - 29 - Il s’agit bien de manager humainement les équipes soignantes. En tenant compte de leurs propos et en les incluant dans les projets de services, tout en respectant les différentes valeurs professionnels exigées (telle le respect), la cohésion de l’équipe peut être pérennisée. Les cours donnés par M. Vuillemenot [24] décrivent le management participatif comme un management conjuguant un intérêt élevé à la fois pour les résultats et les personnes ; le manager peut obtenir de bons résultats à condition de faire participer le personnel aux processus de décisions. Ce management, dit participatif, est tout à fait applicable au cadre de santé. Il dispose alors de différents outils managériaux. 2-3-2 Les méthodes existantes En débutant mon travail de recherche, je souhaitais l’axer sur la reconnaissance du cadre de santé envers l’équipe soignante. Elle reste un élément important. Cependant, lors de mes entretiens exploratoires, d’autres termes sont cités par les interviewés et que je développe maintenant. 2-3-2-1 L’écoute et l’écoute active « Écouter, c’est accueillir l’autre avec reconnaissance tel qu’il se définit luimême sans se substituer à lui pour lui dire ce qu’il dit être [21, p.167]». Dans le soin, l’écoute est un outil utilisé par tous, tant les soignants que le cadre de santé. Il s’agit d’une qualité essentielle nécessitant d’être disponible. Les soignants doivent avoir confiance en leur cadre de santé. Être présent et écouter les soignants permet de les connaître et de comprendre certaines situations voire même parfois de les anticiper. L’équipe soignante est demandeuse et attend parfois du cadre de santé une action, un réinvestissement par la suite. Il ne s’agit là pas uniquement d’écouter mais également d’entendre les propos rapportés. En donnant leur avis sur un matériel, les soignants attendent du cadre de santé qu’il fasse remonter l’information au fournisseur par exemple. - 30 - Cette écoute peut également permettre au cadre de santé de gérer une situation ou même de faire progresser un projet. En effet, entendre les idées et conseils des autres permet de se remettre en question et peut-être d’être finalement plus efficace dans ses actions. Les professionnels sont sur le terrain et possèdent parfois un regard plus pragmatique que le cadre de santé. Il est ainsi important de savoir tenir compte des remarques faites pour progresser. Il s’agit là également d’un levier favorisant la coopération de l’équipe. L’écoute active, différente de la « simple » écoute, peut permettre à notre interlocuteur de trouver seul des solutions à son problème. Elle est constituée de 3 phases [25] : « L’Écoute silencieuse : Pendant que la personne en difficulté parle, l’accueillant du message l’écoute sans rien dire, sans l’interrompre, en portant de l’intérêt à ce qu’il dit. La Reformulation : Quand la personne a terminé, l’écoutant lui reformule ce qu’il a compris, sans faire de commentaire, sans jugement, (la personne écoutée peut ainsi se rendre compte que son message a été bien compris ; l’écoutant contrôle qu’il a bien compris le message). Le Reflet du Sentiment : L’écoutant exprime le sentiment qu’il perçoit chez la personne (la personne en difficulté peut ainsi se rendre compte qu’elle a été entendu dans ses émotions, c’est-à-dire toute sa personne). » Le cadre de santé doit donner aux soignants les possibilités de comprendre pourquoi ils se plaignent, pourquoi ils sont fatigués, pourquoi il y a des difficultés avec un patient…Il doit leur permettre d’analyser la situation en tenant compte de tous les éléments dont ils ont connaissance. L’écoute active donne une place importante aux professionnels à un moment donné. Ils sont inclus dans la réflexion. Elle nécessite de prendre du temps avec l’équipe au bon moment c’est-à-dire à leur demande. Cette méthode permet également de résoudre parfois des conflits. Sophie Becu l’a utilisée dans les unités qu’elle a gérées et soutient qu’il s’agit d’une méthode efficace, permettant aux professionnels de se remettre en question et de dénouer des situations complexes. - 31 - 2-3-2-2 La transparence de l’information «La transparence peut être définie comme la libre circulation d’une information publiquement disponible, précise et cohérente, et, permettant d’effectuer des comparaisons entre entités [26] ». La transmission des informations n’est pas toujours aisée à l’hôpital. Les interlocuteurs sont nombreux et jamais tous regroupés au même moment. Il est donc important pour le cadre de santé d’assurer au mieux la transparence dans une information à diffuser, afin que chacun des soignants en prenne connaissance de la même manière. Cette méthode évite les interprétations parfois néfastes d’une donnée. Il peut alors communiquer des renseignements lors d’une réunion d’équipe, touchant par conséquent un maximum de professionnels. Il peut également participer aux transmissions orales sur plusieurs jours, côtoyant ainsi les soignants des deux équipes. Il peut finalement utiliser différents outils, à adapter aux propos à transmettre. En effet, certaines informations à diffuser nécessitent une trace écrite (un nouveau protocole dont il faut prendre connaissance par exemple) permettant au cadre de santé de s’assurer que tous ont lu des nouvelles données par exemple. Dans d’autres situations, l’échange oral est suffisant. Le cadre de proximité ajuste ses choix en fonction de l’information à diffuser. La transparence exige également de se justifier auprès des équipes : expliquer pourquoi le cadre de santé a fait ce choix, pourquoi il n’a pas pu accorder une formation à certaines personnes ou encore pourquoi ce matériel ne pourra pas être acheté par exemple. Les soignants doivent pouvoir comprendre les décisions et actes du cadre de santé. 2-3-2-3 La reconnaissance et la valorisation Il s’agit de deux concepts étroitement liés. - 32 - Dans leur travail, J.P. Brun et N. Dugas définissent la reconnaissance comme telle : « Elle constitue d’abord une réaction constructive et authentique, de préférence personnalisée, spécifique, cohérente et à court terme. Elle s’exprime dans les rapports humains. Elle est fondée sur la reconnaissance de la personne comme un être unique, libre, égal, qui mérite respect, qui connaît des besoins, mais qui possède également une expérience utile [27] ». Le dictionnaire Larousse définit la valorisation comme une « action de donner de la valeur, plus de valeur à quelque chose ou à quelqu’un ; fait d’être valorisé [28] ». La reconnaissance du travail se fait par la valorisation. Elle permet aux soignants de se sentir soutenus, écoutés et de ce fait reconnus. Elle est elle aussi source de motivation. Selon J.P. Brun, il existe 4 formes de reconnaissance : la reconnaissance existentielle, la reconnaissance de la pratique, la reconnaissance de l’investissement et la reconnaissance des résultats [29] : La reconnaissance existentielle : au quotidien, il me semble que cette reconnaissance débute simplement par le fait de saluer son équipe en arrivant ou de les consulter en cas de besoin. Les soignants doivent se sentir respectés. La reconnaissance de la pratique : le cadre de santé met en avant les compétences professionnelles des soignants, en les sollicitant pour des groupes de travail ou en les nommant comme référent par exemple. Il s’agit là aussi d’une marque de confiance, essentielle pour la construction de l’identité professionnelle du soignant. Alors que notre culture nous fait facilement exprimer ce qui ne fonctionne pas, la reconnaissance exige, à l’opposé, de mettre en avant le travail bien fait. La reconnaissance de l’investissement : le cadre de santé doit également penser à valoriser l’investissement de chacun voire même féliciter les soignants impliqués dans un projet. Cette reconnaissance peut être à la fois individuelle mais également collective, en fonction des situations. Ainsi, le cadre de santé valorisera un agent ayant su gérer une situation d’urgence ; il pourra - 33 - aussi mettre en avant et valoriser le travail d’un groupe sur l’élaboration d’une procédure. La reconnaissance des résultats : à l’hôpital, je la compare à l’évaluation annuelle. Il s’agit d’un échange entre le cadre de proximité et les soignants, de manière individuelle, et permettant de faire le bilan de l’année écoulée, de l’évaluation des objectifs fixés l’an passé et de ceux à définir pour l’année à venir. Mais il s’agit aussi de mettre en avant les qualités et compétences de chacun. Le travail de l’autre prend alors toute sa valeur. Être reconnu pour ce qui a été fait engendre finalement une certaine satisfaction du soignant concerné et peut être source de motivation. A l’opposé, ne pas se sentir valorisé et reconnu n’incitera aucunement un professionnel à faire des efforts futurs. « La reconnaissance au travail est un élément essentiel pour préserver et construire l’identité des individus, donner un sens à leur travail, favoriser leur développement et contribuer à leur santé et à leur bien-être [29] ». 2-3-2-4 L’équité C’est une « qualité consistant à attribuer à chacun ce qui lui est dû par référence aux principes de la justice naturelle [30] ». Je considère l’équité comme une valeur nécessaire pour un manager et essentielle dans la cohésion d’équipe. Il est indispensable d’avoir les mêmes règles pour tous, de les argumenter, de prendre une décision et de s’y tenir à long terme, de la même manière pour chacun des soignants. L’équité c’est aussi donner la même chose à tout le monde, en utilisant des règles connues et identiques pour tous. Prendre en compte l’humain est là aussi important. Cependant, même s’il n’est pas possible de supprimer totalement l’affectif dans le management, le cadre de santé doit « juger autrui avec objectivité en luttant contre la tendance à préférer ceux qui pensent comme lui, le séduisent - 34 - ou le manipulent1 ». D’où l’importance voire même la nécessité de poser un cadre, des règles au sein d’une équipe soignante et qui soient connues de tous. Le cadre de santé peut ainsi utiliser diverses méthodes de management. L’objectif du management bientraitant est de pérenniser la motivation des agents, indispensable pour maintenir la cohésion de l’équipe. Il est essentiel de tenir compte de la singularité de chaque soignant afin que ce dernier se sente valorisé et reconnu au sein même d’une équipe. L’analyse des entretiens me permettra de mettre éventuellement d’autres méthodes en avant, qui permettront de confirmer ou non mon hypothèse de départ. 1 Voir annexe n°1 – extrait « Les 12 valeurs professionnelles hiérarchisées des cadres paramédicaux à l’Hôpital .R. Muret», pp. 98-101 - 35 - Méthode de recherche Le management bientraitant c’est « une manière d’être, d’agir et de dire, soucieuse de l’autre, réactive à ses besoins et à ses demandes » Citation ANESM – Recommandations de bonnes pratiques professionnelles - 36 - 3- Méthode de recherche : La méthode de recherche par entretien semi-directif est déterminée par l’Institut de Formation des Cadres de Santé. Avant de débuter mes recherches agrémentant mon cadre conceptuel, j’effectue 3 entretiens exploratoires. Puis, en vue de mon analyse, j’interviewe 8 soignants. 3-1 Les entretiens exploratoires Les entretiens exploratoires peuvent se définir comme « une collecte d’informations initiale et recherche permettant de définir les techniques, outils et méthodes d’investigation les plus adéquates pour répondre à la problématique posée [31]». Je réalise 3 entretiens exploratoires auprès de différents professionnels. Grâce à leur analyse, j’élargie ma recherche à d’autres concepts. Je ne reste ainsi pas figée uniquement sur la reconnaissance du cadre de santé envers son équipe, comme souhaité au départ. 3-2 Les entretiens de recherche Ils vont permettre de confronter mes concepts à la réalité du terrain, en allant interroger les professionnels dans les unités de soins. - 37 - 3-2-1 Quoi ? L’entretien semi-directif est « une méthode d’étude qualitative basée sur la réalisation d’entretiens individuels ou collectifs durant lesquels l’animateur dicte uniquement les différents thèmes devant être abordés sans pour autant pratiquer un questionnement précis [32] ». La conception de ma trame d’entretien fait suite à mon cadre conceptuel2. Suite à mes diverses recherches, j’axe mes questions sur les thèmes développés et en lien avec mon hypothèse. 3-2-2 Qui ? Je choisis de rencontrer des infirmières et des aides-soignantes. Je ne prends volontairement rendez-vous avec aucun cadre de santé, souhaitant réellement découvrir les représentations des soignants ainsi que leurs attentes du cadre de santé. Le temps imparti pour ma recherche ne me permet pas de contacter d’autres acteurs tels les agents de service hospitalier. J’interviewe 4 professionnels dans chaque catégorie, pouvant ainsi comparer un échantillon plus significatif. Je souhaite également, dans chacune des catégories soignantes interviewées, pouvoir rencontrer un professionnel nouvellement diplômé et, en parallèle, un professionnel ayant plus de 5 années d’expérience au moins. 3-2-2 Pourquoi et pour quoi ? Ce choix de méthodologie est proposé par l’Institut de Formation des Cadres de Santé de Besançon. 2 Voir annexe n° 2 – Ma trame d’entretien, p. 102 - 38 - Les entretiens semi-directifs permettent, par le biais de questions ouvertes plutôt évasives, de laisser les interviewés aborder une thématique sans les diriger vers une réponse « type ». Par le biais de mes entretiens, je cherche à connaître entre autre ce que les soignants attendent du cadre de santé et comment ils le situent dans l’équipe. J’aborde 3 thématiques : L’équipe soignante : sa conception par les soignants et les conditions d’une cohésion d’équipe Le cadre de santé : sa place dans l’équipe et ce que les professionnels en attendent ; son rôle dans la cohésion d’équipe. Le management bientraitant : comment le cadre de santé peut-il être bientraitant avec son équipe, pour le bien-être des soignants. Leur analyse me permet de confronter mon hypothèse de départ aux résultats obtenus et de déterminer si elle est confirmée (en totalité ou en partie) ou non. En définitive, l’objectif de mon travail de recherche est de découvrir sur le terrain ce que les professionnels attendent réellement et concrètement du cadre de santé. L’analyse et la synthèse des entretiens sont des pistes de réflexion pour ma pratique future. 3-2-3 Où ? Je réalise mes entretiens dans un Centre Hospitalier Universitaire dont la capacité d’accueil est approximativement similaire au Centre Hospitalier où j’exerce mes fonctions. Je rencontre 4 soignants de médecine et 4 soignants de chirurgie, dans leur service de soins. - 39 - 3-2-4 Quand ? Tous mes entretiens ont lieu en février 2013. J’interviens en médecine puis en chirurgie sur 2 après-midi consécutives, rencontrant 2 professionnels par jour. 3-2-5 Comment ? 3-2-5-1 Avant et pendant les rencontres Ma trame d’entretien est validée par ma Directrice de mémoire. Sous ses conseils et afin de m’assurer qu’elle corresponde réellement à mes attentes et surtout qu’elle soit claire et comprise par les professionnels que je rencontre, je décide de la tester en amont auprès d’une professionnelle de mon établissement. Elle est ensuite envoyée à la Direction des Soins de l’établissement concerné, puis approuvée me permettant par conséquent de contacter les cadres de santé des unités choisies afin de convenir de rendez-vous avec des membres des équipes. En médecine, les rendez-vous sont fixés d’avance, par le cadre de santé. Les rencontres en services de chirurgie se sont avérées plus longues à organiser. En effet, le cadre de santé d’un premier service me donne un avis favorable pour réaliser les entretiens avec des membres de son équipe mais ne peut me donner des rendez-vous fixes ; la charge de travail est très variable d’un jour à l’autre et elle me demande de la contacter au jour le jour. Malheureusement, elle ne répond par la suite à aucun de mes appels téléphoniques ou mails de relance. Je décide alors de contacter un autre service. J’obtiens ainsi rapidement des rendez-vous. J’enregistre les différentes rencontres, favorisant ainsi la liberté dans mes échanges, et évitant la contrainte de l’écrit qui « parasite » à mon sens la - 40 - qualité des conversations. Cette méthode me permet également de conserver les entretiens afin de retranscrire dans leur intégralité les propos recueillis. 3-2-5-2 Après les rencontres Les entretiens : ils durent entre 20 minutes et 50 minutes. Ils débutent tous par une question ouverte et sont rapidement des échanges très riches, où les soignants semblent être en confiance et répondent spontanément à mes interrogations. La retranscription écrite : je réalise les retranscriptions le jour même des entretiens, me permettant de me rappeler au mieux des échanges. L’enregistrement me permet d’écouter aussi souvent que nécessaire les propos recueillis afin de n’omettre aucun élément important. La durée totale des retranscriptions est d’environ 11 heures. Les limites : en médecine, les rendez-vous sont donc organisés avec le cadre de santé de l’unité. Je connais en amont les prénoms des soignants que je rencontre. Cependant, lors de ma 1ère journée, ils ne sont pas prévenus et je les interromps dans leur travail. Je me suis sentie mal à l’aise au départ mais rapidement l’entretien se fait plus naturellement. En chirurgie, l’activité est fluctuante d’un jour à l’autre et même si les rendezvous ont finalement été programmés, je patiente environ 45 minutes pour chaque 1er entretien. De plus, lors de la 1ère journée, nous sommes dans une pièce où il y a beaucoup de passage, empêchant le bon déroulement de l’interview. Le lendemain, nous sommes dans leur salle de pause, plus calme mais où nous sommes tout de même dérangés à 3 reprises. Malgré des échanges compliqués parfois, les différents professionnels ont été volontaires et nos échanges m’apportent beaucoup d’éléments que j’analyse maintenant, en regard de mon hypothèse de départ. - 41 - 3-3 Les déterminants sociaux Sexe Age IDE IDE IDE IDE 1 2 3 4 F F F F F F F F 31 22 22 32 61 21 31 26 AS 1 AS 2 AS 3 AS 4 Année d’obtention 2005 2011 2011 2003 1971 2012 2004 2008 du diplôme Ancienneté dans le 5 18 18 5 12 7 9 5 service ans mois mois ans ans mois ans ans M M C C M M C C 25 25 22 22 25 25 22 22 Spécialité du service Nombre d’agents Dans le service Légende : IDE = infirmière diplômée d’état AS = aide-soignant F = féminin M = médecine C = chirurgie - 42 - 3-3-1 Les variables socioprofessionnelles Lors de mes 8 entretiens, je rencontre uniquement des femmes. A priori, aucun homme ne fait partie des équipes que j’interviewe. Cet état de fait ne change en rien, à mon avis, les réponses que j’obtiens. 3-3-2 L’âge L’âge des professionnels questionnés se situe entre 21 ans et 61 ans. La moyenne est de 30 ans. Je rencontre uniquement une aide-soignante proche de la retraite. 3-3-3 L’expérience professionnelle Je souhaite pouvoir rencontrer des soignants ayant une expérience professionnelle inférieure à 5 années d’une part et proche de 10 années d’autre part. Les soignants ayant une carrière plus longue auront éventuellement une vision différente de ceux débutants dans la fonction. Cet écart me permettra de comparer, si disparités il y a, leurs discours. Cependant, la mobilité actuelle des soignants dans les unités entraîne un turn-over relativement important. De ce fait, peu de professionnels restent audelà de 5 années d’exercice dans le même service. Je m’adapte finalement aux rendez-vous proposés par les cadres de santé des unités, et en définitive, comme indiqué dans le tableau des déterminants sociaux, je rencontre des professionnels à la fois peu expérimentés et d’autres ayant au moins 5 années d’exercice professionnel. - 43 - 3-3-4 Les secteurs d’activité Souhaitant obtenir les idées de différentes spécialités, je choisis ainsi de prendre rendez-vous dans un service de médecine ainsi que dans un service de chirurgie. Je me restreins à 2 services, me permettant d’avoir un échantillon de 4 professionnels dans chacune des unités. Je présente à présent les résultats de mon analyse, que je confronte à mon hypothèse de départ : « Le cadre de santé facilite la cohésion d’équipe par le biais d’un management bientraitant » - 44 - Analyse « La bienveillance en management invite à être avec l’autre dans un échange, sans chercher un accord, à convaincre ou à justifier » Jean-Michel Pirra – chef de service – août 2012 - 45 - 4- Analyse La méthodologie utilisée est l’analyse thématique. Je présente ses résultats en 2 grands concepts : L’équipe vue par les soignants Cette 1ère partie permet de poser une définition générale donnée par les professionnels et de développer leur perception de la cohésion d’équipe d’une manière générale. Le management bientraitant du cadre de santé pour le bien-être des équipes Après avoir abordé les conditions nécessaires au bien-être des soignants, j’explique dans cette 2ème partie ce qu’ils attendent de leur cadre de santé, grâce à une analyse transversale des entretiens. 4-1 L’équipe : une nécessaire cohésion Après l’analyse élargie de la définition de l’équipe, je développe également la notion de cohésion d’équipe, indispensable aux yeux des professionnels. 4-1-1 L’équipe selon les soignants Chaque professionnel définit à sa manière cette notion mais des propos sont récurrents et trois thématiques ressortent : une équipe pour le patient, avec des objectifs communs et un travail en binôme. Aucun soignant ne cite la notion de groupe, cependant leurs propos rejoignent au final ce concept. - 46 - 4-1-1-1 Une équipe pour le patient : Cette notion est relativement mise en avant par les soignants de chirurgie. IDE3 3 : « c’est toutes les personnes qui font partie (…), qui gravitent autour d’un patient et qui peuvent rentrer dans sa prise en charge et l’aider ». AS 3 : « on travaille que avec des gens, avec des patients, des personnes, on est confronté aux gens, à la colère, aux malheurs (…) » AS 4 : « (…) un bon soin au patient (…) ». Comme le cite S. Bal dans son article, « l’équipe de soins (…), ce groupe restreint de soignants poursuit un objectif collectif : prendre soin des patients hospitalisés [10, p.43] ». Le patient est à mon sens la personne située au coeur d’un service de soins. Le travail de toute l’équipe paramédicale et médicale doit être axé sur ce dernier, sur sa prise en charge globale et son écoute. Il est primordial que chacun puisse travailler avec cet objectif : soigner l’autre. 4-1-1-2 Une équipe avec des objectifs communs Tous ne mentionnent pas clairement la prise en charge du patient tel un objectif d’équipe mais ils parlent plutôt de buts communs. AS 1 : « on est tous là pour travailler dans le même sens » AS 3 : « c’est travailler avec des collègues de travail et aller dans le même sens » IDE 4 : « c’est tout le personnel qui travaille au sein d’un service (…) ; on doit travailler tous ensemble, dans la même direction ». 3 Lire partout : ASH = Agent de Service Hospitalier – AS = Aide-soignant – IDE = Infirmier Diplômé d’État - 47 - Les termes « sens » et « direction » démontrent bien l’importance pour les professionnels d’avoir ce but commun dans leur quotidien. En définissant le mot équipe, R. Mucchielli dit également dans son ouvrage « Le travail en équipe », qu’ « il y a donc dans ce mot un lien, un but commun, une organisation, un double dynamisme venant aussi bien de la tête que de l’ensemble, une victoire à gagner ensemble [6, p. 12] ». Une des missions du cadre de santé est de rappeler - si nécessaire - aux membres d’une équipe soignante les objectifs de leur quotidien. Une manière de remotiver les professionnels parfois mais également de leur faire comprendre la nécessité de travailler ensemble. Comme abordé dans mon cadre conceptuel, la notion de but commun est réellement exprimée par tous dans la définition de l’équipe. Il me semble qu’il s’agit bien d’un élément essentiel à l’hôpital afin d’optimiser la prise en charge du patient au final. Travailler ensemble afin de simplifier le quotidien des soignants. Certains abordent d’ailleurs le travail à 2. 4-1-1-3 Une coopération en binôme L’esprit d’équipe se ressent dans tous mes entretiens. Cependant, plusieurs insistent sur le fait de travailler en binôme. IDE 1 : « on essaie de faire un maximum de binôme » IDE 3 : « on travaille en binôme, par secteur » AS 4 : « l’équipe c’est plusieurs personnes par rapport à son métier qui apportent (…) du travail en binôme, que ce soit de l’ASH, de l’AS ou de l’IDE» - 48 - Les soignants travaillent en binôme IDE et AS dans les 2 unités. Chacun complète le travail de l’autre, toujours dans un esprit d’entraide. Il s’agit d’une organisation retrouvée dans la plupart des unités de soins à l’hôpital. Elle permet une prise en charge globale du patient, chacun des professionnels exécutant ses soins en adéquation avec son binôme. Ces différentes représentations mettent en exergue l’importance de travailler ensemble, avec un objectif commun. Il me semble ainsi bien retrouver dans le discours des professionnels les éléments principaux décrits dans mon cadre conceptuel et nécessaires pour faire vivre une équipe. Il me parait important maintenant de découvrir qui est inclus dans les équipes. 4-2-2 La composition des équipes Je demande aux soignants qui ils incluent dans l’équipe. Les réponses me paraissent parfois surprenantes, puisqu’elles ne correspondent pas à ma propre définition. Cependant, tous considèrent que l’équipe soignante est représentée par les professionnels qui gravitent autour du patient. Ainsi IDE 3 dit « la grande équipe autour du médecin qui travaille pour le patient » ou encore IDE 4 cite « c’est tout le personnel qui travaille au sein d’un service ». D’une part, les IDE, AS et ASH sont citées en 1er lieu par tous les soignants que je rencontre. - 49 - D’autre part, certains rajouteront la diététicienne, les kinésithérapeutes, le brancardier ou encore les psychologues. Enfin, seuls 4 soignants inclus les médecins et les internes. L’élément interpellant pour ma part est la place attribuée au cadre de santé. Je souhaite préciser que IDE 3 et IDE 4 sont les 2 seuls professionnels qui ont cité spontanément le cadre de santé dans la composition de l’équipe. Mais une partie de mon analyse évoque ultérieurement et plus en détails cet élément. Je peux supposer, d’après les réponses que j’analyse, que les soignants incluent spontanément dans la composition de l’équipe les professionnels qui sont quotidiennement proches du malade. Même si les médecins sont au centre de la prise en charge, ils ne côtoient pas le patient autant que les AS ou encore les IDE. Ils ne sont ainsi pas englobés dans l’équipe par tous. Après avoir défini plus précisément l’équipe même, je dégage ensuite les idées que les soignants développent dans l’organisation de leurs équipes. 4-2-3 Cohésion d’équipe : synonyme de « bonne équipe » Lors de mes entretiens, je cherche à savoir ce que représentent pour les soignants la cohésion d’équipe et l’expression « je travaille dans une bonne équipe ». Je me rends compte, lors de mon analyse, que la plupart des idées se rejoignent. Je retrouve alors 2 grandes thématiques. - 50 - 4-2-3-1 Travailler ensemble, pour le patient Les mots utilisés sont variés mais tous les soignants insistent sur l’importance de travailler ensemble et surtout pour le patient. IDE 1 : «tout le monde est là pour le même but, le bien-être du patient et puis voilà » - « une équipe qui s’entraide, qui se mélange, qui est soudée. Mais toujours pour le bien du patient en premier » AS 2 : « l’objectif final c’est de faire au mieux ; s’entraider c’est aussi passer le relais si on a des difficultés à faire quelque chose (…) » IDE 4 : « la cohésion c’est une bonne collaboration entre chaque catégorie, chaque personnel (…), que tout le monde travaille ensemble pour prendre une bonne prise en charge du malade, toujours pour le malade » AS 4 : « la bonne équipe (…) c’est la même envie de travailler, qu’on aie envie de faire la même chose, le même objectif ». D’autres termes sont également utilisés tels « l’entraide », « la solidarité » et « être soudé ». La plupart des ces éléments sont retrouvés en amont, dans la définition de l’équipe. Ce qui peut traduire l’importance pour les professionnels de travailler ensemble, de manière soudée et de se soutenir au quotidien, toujours en vue d’assurer une prise en charge optimale du patient. Comme le cite R. Mucchielli « l’équipe (…) n’est pas une addition d’êtres, mais une totalité, un groupe psychosocial vivant et évolutif, une interdépendance consentie, où chacun apporte sa science, sa compétence, sa technique mais aussi sa personne [6, p. 13]». Même si l’idée de complémentarité n’est pas citée explicitement, je pense qu’elle est sous-entendue par leur propos. L’importance de travailler ensemble, de s’entraider et de « passer le relais » signifie bien, à mon sens, la singularité que chacun apporte au final à l’équipe entière. Et chaque soignant est présent pour suppléer son collègue si besoin. - 51 - 4-2-3-2 L’importance de bien s’entendre Les AS autant que les IDE soulignent unanimement la place de la bonne ambiance et de l’entente au sein de l’équipe. Elles semblent indispensables au bon fonctionnement du groupe. De la sorte, AS 2 cite une « bonne entente, l’ambiance », IDE 3 précise « pour moi (…), je suis jeune faut que ça rigole ! Rigoler sans forcément que ce soit la foire (…), faut que ce soit bon enfant » ou encore AS 4 mentionne la « bonne humeur ». Je retrouve des expressions similaires dans les 8 entretiens, tous reprenant bien les termes « bonne ambiance » et « bonne entente ». Lors de mes différentes expériences professionnelles en tant qu’infirmière, j’attachais moi-même énormément d’importance aux relations entre collègues. Et comme le dit parfaitement AS 2, « on est un peu la famille du travail ». A la lecture de ces conversations, il me semble qu’un état d’esprit « bon enfant » anime les équipes. Chaque personne interviewée me mentionne naturellement et avec enthousiasme la bonne ambiance qui règne au sein de son équipe respective. « En fait, bonne ou mauvaise, l'ambiance est toujours là, variable de jour en jour au gré des personnes et de la conjoncture : elle est une teinte particulière dans les échanges, une manière de se parler, de communiquer, de travailler et de vivre ensemble [33]». Au travers de ces entretiens ressort l’importance de l’humanité dans les relations professionnelles, permettant ainsi un travail commun, pour le patient. - 52 - Il me semble que l’ambiance bienveillante au sein d’une équipe soignante permet d’assurer une cohésion d’équipe, qui reste, pour tous les personnels soignants, indispensable dans une unité de soins. En définitive et de manière unanime, AS et IDE travaillent ensemble dans la bonne humeur, pour le bien-être du patient. Voyons dans la partie suivante quels procédés les professionnels utilisent pour perpétuer ce fonctionnement. 4-2-4 Comment pérenniser cet état d’esprit ? Je demande à chacun des soignants comment ils font pour que leurs bonnes relations perdurent dans le temps. Il en ressort 2 grandes thématiques axées sur le côté humain des relations interprofessionnelles : se connaître et se respecter. 4-2-4-1 Connaître l’autre Chez les soignants interrogés, 3 AS estiment important de se connaître, non seulement professionnellement mais également personnellement. L’intégration et l’adaptation sont des termes cités à plusieurs reprises. Ainsi, elles disent : AS 1 : « des liens qui dépassent la personne mais qui sont pro » AS 2 : « faut savoir bien s’intégrer (…), en tant que nouvelle, on essaie toujours de rentrer dans les discussions, on fait toujours notre travail (…) donc on travaille en lien, donc ça se créé tout doucement (…). Trouver sa place en restant à sa place. Trouver sa place sans aller trop loin » - « on s’adapte, on s’adapte les unes entre les autres ; de toute façon on est dans un métier où l’adaptation est déjà importante (…) » - 53 - AS 3 : « on est beaucoup donc faut savoir s’adapter » - « au fur et à mesure de travailler avec les gens on arrive à les connaître. On partage des temps (…), on parle de notre vie extérieure » - « j’ai un roulement (…) donc globalement on travaille avec tout le monde mais y’a toujours un noyau ». Il me parait important, dans une équipe de soins, que les professionnels comprennent de quelle manière leurs collègues fonctionnent. Les équipes que je rencontre travaillent en binôme. Il est donc indispensable de savoir quand l’infirmière fait ses pansements ou à quel moment l’aide-soignante a du temps pour aider à lever un patient par exemple. Les soignants s’adaptent à une organisation générale mise en place dans une unité, mais sur 8 heures de travail, chacun aménage son temps de travail à sa manière. Par exemple, une infirmière fait le tour de toutes les chambres avant de commencer sa tournée, une autre prépare les traitements avant de mettre à jour les dossiers de soins ou encore une aide-soignante commence à lever les patients autonomes, puis ceux dépendants alors qu’une autre fonctionne à l’inverse. Chacun et chacune travaille pour le même objectif (le patient), et à chacun et chacune de s’adapter à l’autre afin de travailler de manière optimale. En parallèle, connaître l’autre d’un point de vue plus personnel me semble important également. Il peut permettre de comprendre certaines situations telles une fatigue importante ou encore une absence prolongée. Comme cité auparavant, l’hôpital c’est la « famille du travail ». Pouvoir se confier à ses collègues permet, je pense, de créer des liens et de diminuer les risques de conflit ou leur gravité. Dans les 2 cas, il s’agit pour ma part de la confiance que chacun a envers l’autre. Elle est effectivement utile à la fois pour le travail mais également dans les relations humaines plus personnelles : avoir confiance en ma collègue et pouvoir lui déléguer ainsi une tâche bien précise (et parce que je sais qu’elle a cette compétence pour le faire) ; avoir confiance en ma collègue, lui exprimer mes soucis personnels et espérer qu’elle me comprenne et m’aide. Des liens se créent dans l’équipe, plus ou moins forts selon les affinités de chacun. - 54 - R. Mucchielli dit très simplement « le fait de connaître et même de voir les partenaires est déjà en soi générateur de confiance [6, p.42] ». L’idée de connaître l’autre n’est explicitée que par 3 soignants sur 8. Cependant, je juge important de le mettre en avant et de le citer en premier, puisque la connaissance de l’autre est, selon moi, essentielle à la vie d’un groupe et donc d’une équipe. Je pense qu’aucun soignant ne peut faire fi de ce qu’est l’autre. Il s’agit probablement d’un levier pour le travail en équipe : bien se connaître pour mieux travailler, c’est se faire confiance. 4-2-4-2 Se respecter mutuellement et s’accepter Tous les soignants évoquent le respect dans l’équipe, le respect entre collègues de travail. Certains utilisent clairement ce terme. D’autres affinent leurs idées et expliquent plus en détails ce que signifie pour eux cette notion. IDE 1 : « le caractère de chacun et chacune font que ça se passe bien » AS 1 : « arriver avec le sourire ; éviter les clans parce qu’on doit travailler ensemble donc il faut se respecter (…) c’est éviter les cancans. Mais c’est humain. » IDE 3 : « (…) accepter les erreurs des autres…ça arrive d’oublier quelque chose » IDE 4 : « une équipe ou y’a pas trop de commérages » AS 4 : « ça vient de chacun, chacun apporte un p’tit truc différent…que ça puisse durer… » A l’hôpital, le respect est une valeur commune aux soignants. Il est important de travailler en tenant compte du patient et de ses souhaits, mais le respect entre professionnels est également en première ligne. Il - 55 - est nécessaire – probablement - avant même la prise en charge des patients. Cette idée révèle, je pense, qu’il s’agit pour les soignants d’une valeur essentielle au bon fonctionnement de l’équipe et qui doit s’associer à l’idée que chacun apporte quelque chose à l’équipe, à sa manière. « Le respect est une valeur qui permet à l’homme de pouvoir reconnaître, accepter, apprécier et mettre en valeur les qualités d’autrui et de ses droits [34] ». Les 2 idées mises en avant dans cette partie sont finalement complémentaires. En effet, respecter l’autre sous-entend le découvrir et le connaître, dans la mesure du possible. Bien entendu, tous ne souhaitent pas dévoiler une partie de leur vie sur leur lieu de travail mais là encore, il s’agit à chacun de respecter ce choix. « Respecter l’autre ce n’est pas seulement avoir de la considération, de l’estime pour lui et son humanité, respecter l’autre c’est chercher à mettre en valeur sa singularité et dès lors essayer d’identifier, dans une situation donnée, ce qui est important pour lui et tenter, autant que faire ce peut, de prendre en compte cette singularité dans sa relation d’humain à humain [35, p. 54]». Dans la partie ci-dessous, j’aborde la place donnée au cadre de santé par les équipes. 4-2-5 Le cadre de santé Comme expliqué ci-dessus, le cadre de santé est cité spontanément dans l’équipe soignante par 2 soignants sur 8, et plus précisément par les infirmières du service de chirurgie. A ma question « qui incluez-vous dans l’équipe ? », il est listé. - 56 - IDE 3 : « l’équipe qui travaille ici donc le cadre (…) » IDE 4 : « le personnel qui travaille au sein d’un service donc de l’ASH au cadre de santé » Pour les autres soignants, j’obtiens des réponses en cherchant à savoir où ils situent le cadre de santé. Les 6 soignants le nomment comme un supérieur hiérarchique souvent extérieur à l’équipe. IDE 1 : « déjà c’est notre supérieur hiérarchique » AS 1 : « une place de coordination (…) au niveau de la hiérarchie » IDE 2 : « pas complètement à l’extérieur parce que c’est quand même elle qui gère notre équipe donc elle en fait partie mais euh… » AS 3 : « c’est notre supérieur au 1er niveau (…) pour le service » AS 4 : « c’est le meneur, c’est celui qui conduit le bateau et nous on est tous dedans » - « notre cadre elle est jamais venue à un repas de service et j’trouve que c’est pas sa place (…) ». Le cadre de santé est, pour 5 des professionnels, un supérieur hiérarchique. Il semble représenter le service et l’équipe. Certaines réponses données m’ont également interpellées. Ayant eu un poste de faisant fonction de cadre de santé, je pensais être considérée comme membre de l’équipe, au même titre que l’aide-soignante et le médecin. Parfois des soignants hésitent telle IDE 2, qui ne peut me préciser si le cadre de santé fait partie de l’équipe où est extérieure à celle-ci. D’autres sont plus formels et affirment que le cadre de santé n’a pas sa place dans l’équipe. Cette réticence est, il me semble, un moyen de garder une juste distance avec son cadre de santé, afin qu’il ne puisse pas porter de jugement sur ce qui pourrait se dire ou se faire à l’extérieur. AS 4 rajoute que si son cadre venait aux repas de service, « elle pourrait pas garder cette neutralité ; elle a pas de jugement, elle est vraiment neutre ». - 57 - AS 4 pense, il me semble, qu’une trop grande proximité peut altérer les qualités professionnelles que le cadre de santé doit avoir : gérer les situations humaines avec objectivité. Les IDE intégrant le cadre de santé dans l’équipe font partie de la même équipe. Lors des entretiens, je ressens des relations cadre et soignants différentes d’une unité à l’autre. Je peux penser alors que les réponses obtenues sont peut-être en lien : une cadre de santé communiquant peu ou mal peut être mal intégrée à l’équipe de soins. Mais à l’opposé, je peux également formuler une autre hypothèse : la non intégration du cadre de santé dans l’équipe soignante entraîne des difficultés de communication entre les deux. Malgré ces réponses parfois confuses, en leur demandant s’il est important d’avoir de bonnes relations avec son cadre de santé, tous me répondent oui, pour diverses raisons. IDE 1 : « il faut que l’équipe aie l’impression d’être entendue et soutenue » AS 1 : « faut pas avoir peur, c’est une personne comme les autres ! » IDE 2 : « si on est distant, elle sera pas à l’écoute (…) et puis je pense que c’est bien d’avoir des bonnes relations au travail » AS 2 : « ça viendra au fait qu’on se sente bien au travail » IDE 3 : « le jour où on a des problèmes, ben elle nous connaît, elle nous défend » AS 3 : « on a pas envie de bosser si le chef nous plait pas trop ! C’est vrai que c’est mieux si on s’entend bien ! » IDE 4 : « pour bien travailler faut travailler dans de bonnes conditions ! (…). C’est important (…) pour la prise en charge du patient ; il y aura des répercussions sur la prise en charge du malade » AS 4 : « si on arrive au travail parce qu’on a peur de sa cadre ben ça se ressent sur le travail ». Les réponses données sont à la fois en lien avec l’équilibre personnel, mais également pour le bien du patient. - 58 - Les discours retrouvés sont parfois complètement opposés. Le cadre de santé peut être considéré comme membre de l’équipe tout comme il doit rester à l’extérieur, pour le bien des soignants. Diverses raisons peuvent expliquer ce ressenti : la catégorie professionnelle, la spécialité, les représentations de chacun et chacune ou encore les relations équipe/cadre de santé. Malgré cette place qui semble instable au sein d’une équipe, les soignants estiment tous, à l’unanimité, qu’il est essentiel d’avoir de bonnes relations avec le cadre de santé de son unité. - 59 - Synthèse Tout d’abord, il ressort de cette partie d’analyse que chacun des soignants a sa propre représentation et conception de l’équipe. Les entretiens mettent cependant en avant des idées générales similaires, retrouvées dans la plupart des ouvrages qui définissent le terme équipe : le travail en commun, avec des objectifs communs. Ensuite, afin d’optimiser le travail en équipe, il est nécessaire qu’une cohésion existe entre ses membres. La bonne ambiance et l’esprit bon enfant décrits paraissent importants aux yeux de tous. Ils permettent, même dans les moments difficiles liés à la charge de travail par exemple, de garder l’énergie suffisante pour accomplir ses tâches. L’objectif final est, pour l’ensemble des soignants, la qualité du travail fournit pour le patient. De plus, assurer la continuité de cette cohésion reste vitale au bon équilibre de l’équipe. Certains expriment bien le risque de conflit naissant si l’équipe ne s’entend pas et, de ce fait, les difficultés à travailler ensemble dans cette situation là. Le respect, la connaissance de l’autre et son acceptation en tant que tel sont des valeurs citées. Il s’agit de travailler ensemble mais avec bienveillance (et toujours pour le bien du patient). Enfin, pour la plupart des soignants, seuls les professionnels proches du patient et intervenants directement dans le soin font partie intégrante de l’équipe. Ainsi, IDE, AS, ASH voire même le médecin sont cités par tous. Toutefois, le cadre de santé n’est pas considéré comme membre de l’équipe en tant que tel. Le discours semble parfois ambigu et les professionnels ont du mal à se positionner. Le cadre de santé est présent sur l’unité mais doit savoir garder ses distances. Il est important de bien s’entendre avec lui mais il ne doit pas être trop proche non plus. La place du cadre de santé n’est finalement pas clairement posée par les professionnels. Je peux ainsi me demander maintenant ce que les soignants attendent concrètement de leur cadre de santé ? - 60 - 4-2 Le management bientraitant du cadre de santé pour le bien-être de son équipe J’aborde dans un premier temps les représentations du bien-être pour les soignants. Dans un second temps, je développe ce que les professionnels attendent du cadre de santé de leur unité pouvant contribuer au final à leur bien-être. 4-2-1 Le bien-être selon les soignants Je dégage dans cette partie de mon analyse non pas une définition précise du bien-être pour les soignants mais plus précisément les conditions à réunir afin d’y contribuer. Elles correspondent à leurs représentations du bien-être. Il est ainsi en lien avec les conditions de travail, la satisfaction au travail, la bonne entente, aimer son travail et la reconnaissance du patient. « Le bien-être est, en général, l’état d’une personne permettant le bon fonctionnement de son activité psychique et somatique. À ce titre, il est dit que la santé mentale est un état de bien-être permettant à chacun de réaliser son potentiel et de faire de son mieux au travail, en famille et en société [36] ». 4-2-3-1 Les conditions de travail Sur les 8 soignants, 6 estiment que les conditions de travail influent sur leur bien-être. Il est plus confortable de travailler sans stress et d’avoir le temps de prendre soin des patients. Ainsi les soignants citent par exemple : IDE 1 : « c’est se dire qu’on a bien travaillé, dans de bonnes conditions (…), qu’on aie tout le matériel adéquate, qu’on aie pas à courir à droite à gauche pour chercher du matériel » - 61 - AS 1 : « si on travaille à la pièce en disant on aura bouclé la boucle, il y aura souffrance » AS 3 : « avoir le temps de faire les choses ; et prendre le temps pour les patients ; pas avoir tout fini en 4ème vitesse » IDE 4 : « travailler sans tension, réussir à communiquer avec tout le monde sans stress, pas avoir une surcharge de travail importante ; les jours où il y a plus de travail on est plus stressé » Les conditions environnementales sont pour moi importantes également. Il s’agit de l’ambiance générale mais également de l’équipe avec laquelle nous travaillons. En effet, une journée de travail est d’autant plus simple à organiser si les chambres des admissions prévues sont prêtes à accueillir le patient, si la commande spécifique a bien été faite et que l’infirmière dispose du traitement en temps voulu ou si le stock d’un matériel est bien rempli. Cela évite un stress supplémentaire aux quotidiens des soignants, qui travaillent souvent dans la précipitation. Cette atmosphère « détendue » ou à l’inverse stressée est de plus ressentie par le patient. Ce qui ajoute parfois une difficulté lorsqu’un patient s’impatiente si l’aide-soignante ne répond pas rapidement à son appel par exemple. Les membres de l’équipe influent également sur les conditions d’exercice. En effet, travailler avec une collègue en entretenant des relations sereines voire amicales simplifie le quotidien. La collaboration pluridisciplinaire est indispensable à l’hôpital. Une IDE ne peut ainsi faire fi de sa collègue AS. Un conflit entre deux professionnels peut alors altérer les conditions de travail. L’ambiance peut alors être plus tendue. Lors de l’analyse des entretiens, il résulte que l’environnement joue un rôle essentiel dans le bien-être des soignants. Les moyens matériels mais également la qualité des relations professionnels avec son binôme influent cette sérénité. Elle est probablement également en lien avec la satisfaction du travail : en travaillant dans de bonnes conditions, le travail accompli les satisfait. - 62 - 4-2-3-2 La satisfaction au travail Elle est indispensable pour 5 soignants. Le patient est mis en avant et passe bien en 1ère ligne dans le quotidien des professionnels : se sentir bien quand le travail est bien fait. Les soignants disent alors : IDE 1 : « pour moi bien se sentir c’est se dire qu’on a bien travaillé (…) et que la prise en charge du patient va être au mieux de ce qu’elle peut être (…) pour moi c’est une bonne prise en charge du patient » AS 1 : « je suis bien si mon travail est bien fait » AS 3 : « repartir le soir en se disant ma journée est finie et je suis contente de ce que j’ai fait » IDE 4 : « moi personnellement j’me sens bien et satisfaite quand je rentre chez moi et j’ai l’impression d’avoir fait un travail correct (…) de pas avoir négligé quoique ce soit » Il me semble que dans tout poste occupé, il est primordial de retrouver une satisfaction personnelle dans ce que l’on fait. Cette satisfaction, est, je pense, un moteur pour la motivation des soignants. Elle est variable d’un jour à l’autre et en lien avec l’environnement général. Elle nécessite cependant d’autres éléments et ne suffit pas au bien-être des soignants. Comme le dit parfaitement le proverbe : « Les jours se suivent et ne se ressemblent pas ». Suite aux entretiens, il s’avère que les soignants attachent beaucoup d’importance au travail bien fait. Le patient se situe, pour la plupart, au 1er plan. Le sentiment de bien-être est associé à la qualité du travail fourni et représente un facteur de satisfaction au travail. - 63 - 4-2-1-3 Une bonne entente Il s’agit d’un concept développé auparavant et en lien avec la cohésion d’équipe. Il est cité par la moitié des personnes interviewées. IDE 1 : « le bien-être au travail c’est quand l’équipe s’entend bien ; qu’on peut se soutenir dans l’équipe paramédicale et médicale » AS 2 : « le bien-être c’est l’entente » AS 3 : « je suis contente (…) de retrouver mes collègues du roulement parce qu’on travaille beaucoup ensemble » IDE 4 : « bien m’entendre avec toutes les personnes avec qui je travaille » La bonne entente fait partie de l’environnement au travail. Comme cité cidessus, il est évidemment plus aisé de travailler ensemble lorsque l’ambiance est sereine, qu’il n’y a pas de gros conflits d’équipe et qu’il existe ainsi cette cohésion au sein du groupe. Même si tous les soignants n’abordent pas le thème de l’ambiance et de la bonne entente dans leur conception du bien-être, tous le citent à un moment de l’entretien. Il traduit encore une fois, il me semble, l’importance de la qualité des relations humaines professionnelles à l’hôpital. 4-2-1-4 Aimer son travail Aimer son travail et s’y sentir bien est essentiel pour 4 soignants. IDE 2 : « pour moi le bien-être au travail c’est se sentir bien » IDE 3 : « ne pas venir à reculons. De se dire c’est cool on va bosser (…) – je me voyais pas travailler toute ma vie dans un truc qui me plaît pas » AS 3 : « moi déjà je suis contente de venir au travail » - 64 - AS 4 : « y aller avec le sourire, pleine d’entrain, motivée pour attaquer la journée » Comme cité en amont, trouver une satisfaction dans son métier est essentielle, encore faut-il aimer ce que l’on fait. Se sentir bien au travail est également synonyme, je pense, de motivation. Et IDE 3 le dit bien, « ne pas venir à reculons » mais avec enthousiasme et envie. Pour ma part, aimer le métier de soignant est d’autant plus important puisque l’on travaille avec des êtres humains. Être souriant, courtois, poli, disponible, sont des qualités fondamentales dans notre métier et surtout pour le patient. Les entretiens mettent en exergue l’estime que les soignants ont de leur travail. Pour eux le bien-être est tout simplement synonyme d’être bien dans sa peau, bien avec ce que l’on fait et aimer son travail. 4-2-1-5 La reconnaissance du patient Elle est exprimée implicitement par 2 soignants, pour lesquels les retours des patients, les propos qu’ils peuvent tenir à l’égard de leur travail sont importants. IDE 1 : « un retour positif des patients, c’est important je trouve – un sourire s’il ne peut pas parler, une main (…), votre sourire est important, vous êtes toutes gentilles…Des mots comme ça qui font oublier les galères du matin » AS 2 : « quand j’entends un patient dire merci, ben c’est pas tout le monde qui dit ça mais ça fait du bien » Cette reconnaissance est une source de motivation pour les soignants également. Et, lorsque certaines journées sont difficiles, chargées en soins, en coups de téléphone ou en admission, les soignants disent souvent « heureusement que M. X nous remonte le moral et a toujours un mot gentil pour nous ». - 65 - La nature humaine fait que les personnes disent aisément ce qui ne va pas mais ne mettent jamais en avant ce qui est positif. Nous vivons dans une société où tout le monde veut tout et tout de suite. Les mots encourageants des patients et de leur entourage sont une manière de gagner un peu d’énergie pour continuer à travailler. En tant qu’infirmière, il s’agissait pour moi d’une source de motivation : je travaille avant tout pour le bien du patient. Il est évidemment toujours plus agréable d’avoir des retours positifs de leur part. L’idée de reconnaissance de la part du patient n’est citée que par 2 soignants. Ce concept peu développé est éventuellement lié au fait que les personnes soignées expriment peu et rarement leur satisfaction. Mais peut-être également qu’elle ne rentre simplement pas en ligne de compte dans les conditions nécessaires au bien-être des soignants. Les idées retrouvées dans les discours sont très diverses. Cependant je retiens une idée essentielle : le bien-être au travail est lié à la motivation et à l’envie de venir exercer son métier. Différents éléments sont alors indispensables à cet équilibre tels l’absence de stress, une bonne ambiance dans l’équipe ou encore la satisfaction de ce que l’on fait au quotidien : bien travailler ensemble et dans de bonnes conditions. Je retrouve finalement des éléments développés dans mon cadre conceptuel. Et comme le cite le rapport Lachmann – Larose – Penicaud [19], « la santé des salariés est une source incontestable d’efficacité dans le travail (…). Travail et santé entretiennent même une double relation : d’une part la santé est la condition d’un travail de qualité. D’autre part, le travail effectué dans des conditions adéquates, est facteur de santé et de réalisation personnelle ». - 66 - Dans une ère où la prévention des risques psychosociaux est le quotidien des managers, qu’attendent les soignants de leur cadre de santé pour contribuer à ce bien-être au travail ? 4-2-2 Les attentes des équipes Le cadre de santé peut contribuer au bien-être des soignants. Suite à l’analyse des 8 entretiens, il ressort diverses attentes de la part des IDE et des AS. Je les classe en 5 thèmes : Un savoir-faire Un savoir-être Un savoir Un moteur pour l’équipe Un « pilier » 4-2-2-1 Un savoir-faire Il représente essentiellement le savoir-faire organisationnel dans la gestion du quotidien au sein du service. Une organisation générale mais également en lien avec les soignants. En effet, 5 soignants placent la gestion du planning en 1ère position dans le travail du cadre. IDE 1 : « faire au mieux nos plannings pour que ça aille à peu prêt à tout le monde même si c’est compliqué – elle doit gérer les réunions afférentes à son pool et pôle » AS 2 : « c’est quelqu’un qui doit gérer tout le service quand même, tant le personnel que les patients (…) donc y’a gérer les plannings, les effectifs au niveau du personnel » IDE 3 : « c’est une gestion de l’équipe, du service, de l’organisation, des médecins » - 67 - AS 4 : « moi je pense qu’elle doit faire de bons plannings, c’est important pour notre vie privée » Le savoir-faire du cadre reste, il me semble, sa mission 1ère au quotidien. Même si d’autres rôles lui sont attribués, l’organisation du service incombe au cadre de santé. Durant mon expérience professionnelle de faisant fonction de cadre de santé, les 1ères doléances des soignants à mon arrivée le matin étaient la plupart du temps soit un problème de planning à régler (ex : un arrêt maladie, un souhait d’échange d’horaire ou un desiderata pour le mois suivant) soit un problème matériel (ex : un pousse-seringue cassé, un matelas thérapeutique à récupérer ou un stock de bon radiologique vide). Les soignants attendent de leur cadre de santé une efficacité dans ses actions afin que leur rythme de travail n’en soit pas ou peu perturbé. La gestion des ressources humaines remplit, je pense, environ 40% de notre temps de travail. A l’hôpital, nous travaillons avec des patients, soignés par des êtres humains. Il est ainsi essentiel que cette gestion des ressources humaines soit optimale pour l’équilibre du groupe et au final, pour le patient. Mintzberg cite dans son ouvrage « Le Manager au quotidien » : « La répartition des ressources est au centre du système qui élabore la stratégie de l’organisation [1, p. 95] ». Ce qui traduit simplement l’importance de la qualité de la gestion des ressources humaines, à commencer donc, à l’hôpital, par la gestion du planning. La notion d’équité n’a jamais été citée clairement mais sous le terme « bon planning », je pense pouvoir réellement y associer entre autre cette notion d’équité. Lors d’un cours sur l’élaboration des plannings durant notre formation, Mme Corinne Ryser reprenait une définition de la revue Soins Cadres qui caractérise parfaitement le planning : « Le planning est un élément inévitable et incontournable, un outil primordial avec des enjeux autres que professionnels, c’est alors une première mesure possible de l’équité du cadre de santé, et donc de la justesse dans son élaboration [37] ». - 68 - Le planning, même s’il n’est pas cité spontanément chez tous, est très rapidement évoqué par la plupart des soignants au cours de nos échanges. Je peux penser qu’il s’agit d’un élément important à leurs yeux, puisqu’il permet en effet l’organisation de leur propre vie en aval. Aujourd’hui, dans notre société, les travailleurs placent la vie personnelle avant la vie professionnelle. Il est donc important que le cadre de santé prenne le temps nécessaire pour élaborer le planning des soignants, même s’il peut s’agir d’un travail chronophage parfois, afin de satisfaire au mieux leurs besoins. Même si la vie personnelle ne devrait pas empiéter sur le lieu d’exercice professionnel, cet équilibre professionnel dépend bien de leur équilibre personnel. 4-2-2-2 Un savoir-être Le savoir-être est un terme complexe à définir. Le site « Savoiretrepro » donne cependant une définition qui correspond parfaitement aux propos recueillis lors de mes entretiens : « Le savoir être est un savoir-faire relationnel, façon de savoir comment se comporter, trouver la conduite appropriée à l’emploi considéré, c’est-à-dire adopter les comportements et attitudes attendus dans une situation donnée. [38] ». Je peux ainsi associer différents termes tels l’écoute ou la disponibilité au savoir-être du cadre de santé. Il s’agit là des attitudes que le cadre de santé doit adopter au quotidien dans son management. Je pense qu’elles correspondent aux valeurs des soignants. Ils estiment que le cadre de santé doit posséder ces qualités dans son management. Ainsi, tous les soignants évoquent l’écoute lorsque je leur demande ce qu’ils attendent de leur cadre de santé. - 69 - Par exemple, AS 2 dit « pour moi, la cadre, il faut que ce soit quelqu’un à qui on puisse parler et qui nous entende ; peut-être pas comprendre parce que c’est pas toujours, c’est souvent difficile de comprendre mais qu’il soit, oui, à notre écoute (…) qu’on puisse lui poser des questions » IDE 2 cite « en nous écoutant…cette notion d’écoute revient souvent mais si notre cadre peut pas nous écouter, on peut pas exprimer forcément nos craintes ou nos angoisses » IDE 4 déclare « ce que j’attends peut-être personnellement de lui c’est peutêtre une écoute si besoin est ». L’écoute est un concept que j’ai développé auparavant et il est concrètement exprimé par chacun des soignants interviewés. Même si tous n’attendent pas forcément une réponse à leur questionnement, leurs problèmes personnels ou encore leurs difficultés dans le service par exemple, il est important que le cadre de santé soit présent afin d’entendre les doléances de chacun. L’écoute active est donc importante dans la gestion des ressources humaines. Sur le terrain et afin de privilégier ces moments d’échanges entre les soignants et le cadre de santé, il semble nécessaire que le bureau de ce dernier soit ouvert. IDE 1 : « le bureau doit toujours rester ouvert pour recevoir l’agent. Que ce soit pour des raisons personnelles ou professionnelles. L’agent peut avoir des soucis persos qui nécessitent d’en parler avec la cadre ». En tant qu’IDE, j’ai toujours attaché énormément d’importance à cette valeur, l’écoute. Elle est importante pour le patient et son entourage et permet de rassurer les personnes dans un contexte de soins difficile. L’écoute permet également de connaître les ressentis du patient mais également son histoire de vie par exemple. Cette prise en charge met le patient en confiance et facilite très souvent les soins par la suite. Ainsi, une ponction lombaire peut se pratiquer plus sereinement si l’IDE prend le temps de répondre aux questions du patient en amont et ainsi de le rassurer. - 70 - Dans mon quotidien de faisant fonction de cadre de santé, l’écoute a été un outil important dans la gestion des équipes soignantes. Il s’agit d’une manière de reconnaître les professionnels et de manifester l’intérêt que je leur porte. Le cadre de santé ne peut avoir solution à tous les questionnements, tous les problèmes, mais de permettre aux soignants de s’exprimer peut, je pense, dénouer certaines situations. L. et Y. Prat rajoutent : « Plus le manager se montre disponible et à l’écoute de son collaborateur, plus ce dernier est enclin à échanger avec lui. (…) En se montrant disponible, les informations dont il a besoin lui sont communiquées sans qu’il ait systématiquement à les demander explicitement. [11, p.32] ». En parallèle, certains soignants souhaitent travailler avec un cadre « souriant, agréable, respectueux et faisant preuve d’humanité ». Là encore, je considère qu’il s’agit bien de certaines des valeurs propres à la culture soignante. Les professionnels attendent du cadre de santé ce qu’on attend d’eux dans leur relation et leur travail avec les patients. En définitive, les soignants semblent souhaiter travailler avec un cadre de santé agréable, accessible et surtout à l’écoute à la fois des soucis d’ordre professionnel mais également personnel. Même s’ils n’attendent pas forcément de sa part des réponses immédiates et adaptées, son écoute et sa disponibilité sont des atouts majeurs à l’équilibre de l’équipe. 4-2-2-3 Un savoir Le cadre de santé a été un professionnel du terrain, maîtrisant soins techniques, relationnels avec le patient et sa famille ou encore les démarches administratives de son établissement. Les unités où je réalise mes entretiens ont un cadre de la filière IDE. Certains soignants le placent alors comme une aide possible dans la réalisation des soins infirmiers, si nécessaire. - 71 - IDE 1 « si la cadre de santé voit la charge de travail, elle propose son aide si on court partout » AS 2 « ça serait bien que ce soit le cadre qui nous aide (…) en fin en restant dans son rôle mais que on puisse quand même compter sur elle et qu’on la voit pas vraiment comme une chef mais vraiment comme une collègue, comme une IDE » AS 3 « elle gère aussi l’administratif que ça soulage un peu les IDE quand même (…). C’est vrai que ça soulage les IDE ». Même si cette image du « cadre-aidant » n’est citée que par 3 soignants sur 8, je souhaite l’intégrer dans cette partie, considérant qu’elle complète les notions des savoirs. Le cadre est avant tout un professionnel. Je pense que l’associer à une aide est probablement synonyme de reconnaissance : le cadre de santé constate une charge de travail à cet instant et, afin de soulager les soignants présents, il propose son aide. En tant que faisant fonction de cadre de santé, il m’est arrivé de répondre à un appel téléphonique lorsque l’IDE était occupé, de donner des documents administratifs à une famille ou encore de ranger une commande de pharmacie afin d’avancer l’IDE ou l’AS. Il est en effet important pour moi de montrer à l’équipe soignante que je suis disponible si nécessaire. Même si ma démarche reste exceptionnelle, elle soulage le professionnel sur le moment mais surtout elle permet aux soignants d’être reconnus dans leur travail. De plus, la maîtrise voire même l’expertise dans une spécialité est un atout permettant de comprendre plus aisément l’organisation d’un service. En effet, durant mes années d’exercice professionnel, j’ai exercé uniquement en services de médecine. Ainsi, en prenant mon poste de faisant fonction de cadre de santé, j’ai rapidement assimilé le fonctionnement de l’unité, en partie similaire aux services que j’ai côtoyés. Je ne développe pas la notion du savoir dans mes concepts. Malgré tout, l’expertise d’un cadre de santé dans son métier peut être un atout pour les soignants non seulement en vue d’une aide sur le terrain mais - 72 - également dans le questionnement quotidien d’un soin et dans une organisation. Elle peut faciliter l’intégration du cadre dans l’unité et lui permet probablement de gagner du temps, en comprenant rapidement l’organisation de l’unité par exemple. Même si, en tant que faisant fonction de cadre de santé, j’ai occasionnellement aidé les équipes, il me semble qu’il ne s’agit pas d’une mission première pour le cadre de santé. D’autant plus qu’actuellement, il doit de plus en plus souvent gérer plusieurs unités d’un même pôle et parfois même sur des sites différents. 4-2-2-4 Un moteur pour l’équipe Les soignants évoquent également lors de nos échanges leurs attentes qui permettent, je pense, de maintenir la motivation de l’équipe. La connaissance de l’équipe : il parait important pour les soignants que le cadre de santé connaisse son équipe d’un point de vue personnel. IDE 2 cite « c’est vrai qu’à force, elle nous connaît donc elle voit quand ça va et quand ça va pas » AS 4 dit « elle s’intéresse à nous que ce soit au niveau professionnel ou même personnel (…) ». Le cadre de santé doit alors se donner les moyens de discerner les personnalités de chacun. Comme je l’évoque dans mon cadre conceptuel, la force et la plus-value d’un groupe est en lien avec la singularité de chacun. Toute personne est un « plus » pour l’équipe. Il est important alors que le cadre connaisse les qualités et compétences de chacun afin de les utiliser à bon escient pour le fonctionnement de l’unité. Mais la connaissance plus personnelle des soignants permet alors d’anticiper au mieux les réactions de chacun mais surtout de percevoir le mal-être de son équipe et de « remonter le moral des troupes », comme le cite AS 2. Elle dit précisément « il faut qu’elle - 73 - soit là pour remonter le moral. C’est vrai que c’est pas toujours rose (…), si on a pas quelqu’un pour nous remotiver un peu, ça, c’est pas possible. Et ça c’est au rôle du cadre de le faire (…). » De ce fait, une relation de confiance doit s’instaurer. La relation de confiance : l’importance de la confiance entre le cadre de santé et son équipe est également mise en exergue. IDE 2 : « il y a aussi une relation de confiance avec notre cadre. Y’a des choses qui se disent dans le bureau qui doivent pas sortir du bureau ». IDE 3 : « (…) C’est sûr que pour être cadre, le jour où il y a un problème dans l’équipe c’est le cadre et l’IDE qui prend. Il faut avoir confiance en son équipe ». En effet, il me parait important et indispensable que l’équipe soignante ait confiance en son cadre de santé autant que ce dernier ait confiance en son équipe. Sans cette qualité relationnelle, les soignants ne se livrent pas à leur cadre. Même s’il n’est pas considéré comme un confident, les soignants doivent pouvoir compter sur leur cadre de santé, le supérieur hiérarchique direct d’une équipe soignante. Connaître certaines informations permet là aussi au cadre de comprendre des situations et de réajuster son management si nécessaire. Par exemple, le cadre de santé peut arranger le planning d’une IDE dont un parent est gravement malade et demandant des horaires aménagées sur une période. Mais tous les professionnels ne souhaitent pas expliquer leur situation à leur cadre, n’ayant peut-être pas confiance en lui ou ne souhaitant simplement pas aborder leur vie personnelle sur leur lieu de travail. De plus, le cadre de santé doit pouvoir faire confiance aux membres de son équipe, afin de travailler sereinement en déléguant certaines tâches par exemple. La reconnaissance : cette notion est citée explicitement par AS 1 qui dit par exemple « on veut être reconnu dans notre travail ». AS 3 mentionne « c’est se préoccuper de nous », AS 4 « s’intéresser à notre travail ». - 74 - Les professionnels attendent bien une reconnaissance en retour de leur travail. Il est évoqué par peu de personnes et parfois même, le contraire est mis en avant. IDE 3 dit ainsi « c’est pas toujours nous dire quand ça va mal. Ici elle nous fait pas trop confiance. Elle dit toujours vous avez pas fait ceci ou cela. ». Comme je l’explique dans mes concepts, notre culture incite à dire ce qui ne va pas plutôt que de mettre en avant ce qui est bien fait. Il est nécessaire, afin de maintenir la motivation de tout acteur dans toute tâche, de mettre en avant les qualités, les compétences et les points positifs de chacun. Il s’agit pour ma part d’un discours relativement paradoxal puisque le cadre de santé n’est pas cité en tant que tel dans l’équipe mais il doit pourtant connaître ses membres à la fois professionnellement et personnellement et instaurer un climat de confiance entre son équipe et lui. Il doit alors trouver sa place au sein du groupe tout en gardant cette « juste distance » afin de préserver l’intimité de chacun. Lors de mon stage d’encadrement, je fais part de mon étonnement à mon tuteur de stage, cadre de santé dans l’unité. Son positionnement dans l’équipe est proche de chacun et il tutoie tout le personnel. Malgré cela, il ne se considère pas réellement comme membre de l’équipe à part entière. Il me dit « je fais partie de l’équipe mais sans y être ». Et AS 4 cite également « il doit pouvoir être neutre tout en sachant ce qui se passe (…) et notre cadre est jamais venue à un repas de service. Et j’trouve que c’est pas sa place (…) j’pense qu’elle pourrait pas garder sa neutralité. ». Les soignants ont réellement besoin de pouvoir se confier au cadre de santé. Ainsi, une relation de confiance doit s’établir en eux. Connaître son équipe d’un point de vue personnel peut alors faciliter ces échanges. Encore faut-il que les soignants veuillent bien laisser cette liberté à leur cadre. Le comportement général et la disponibilité du cadre vont permettre à chacun d’exprimer ses difficultés et ses remarques. Il est alors important que le cadre de santé trouve sa place dans l’équipe afin d’instaurer cette - 75 - relation de confiance avec les professionnels du terrain. Ces échanges lui permettent de comprendre les personnalités de chacun et d’adapter ensuite son management aux situations. Il est également important de reconnaître les qualités, compétences voire simplement le travail de chacun, afin de maintenir la cohésion et au final la motivation de l’équipe au travail. 4-2-5 Un « pilier » Les soignants estiment également que le cadre de santé joue un rôle dans la cohésion de leur équipe. Il est représenté comme un pivot qui doit savoir se positionner et défendre son équipe. Ainsi, AS 1 dit « son travail ça part de tout le monde, du Directeur au brancardier ».IDE 3 et 4 rajoutent « c’est le pont entre les médecins et nous », « un lien avec les médecins ou la hiérarchie ». Je pense que le cadre de santé représente effectivement le lien entre son équipe soignante et tout intervenant gravitant autour du soin. Il est par exemple l’interlocuteur privilégié entre l’équipe et les médecins, le cadre supérieur ou encore les familles ou la Direction. Cependant, les professionnels n’attendent pas uniquement que leur cadre passent des informations diverses mais ils souhaitent aussi un positionnement ferme afin de les défendre si nécessaire. Par exemple, IDE 1 dit « elle doit prendre notre défense du moins (…) soutenir son équipe – ce que j’attends d’un cadre c’est qu’elle soutienne son équipe – il faut que l’équipe aie l’impression d’être entendue et soutenue – elle sait défendre nos idées – quelques fois il y a des soucis (…) et dans ces cas-là, monter au créneau pour son équipe » IDE 2 rajoute « qu’elle sache prendre des décisions, se positionner » et IDE 3 cite « des fois on a du mal et c’est eux qui mettent les points sur les i – et puis trancher sur certaines décisions ». - 76 - Néanmoins cette idée n’est développée que par 3 IDE. Les AS n’abordent pas cette thématique. Elles citent essentiellement la gestion des plannings et l’écoute dans leurs attentes du cadre. Je peux penser que dans les unités où je m’entretiens avec les professionnels, l’IDE est peut-être le lien entre l’équipe et le cadre de santé ? En tant qu’IDE, durant mes années d’exercices, certains AS signalaient des difficultés aux IDE, qui en faisaient part au cadre de santé. Néanmoins, la plupart des AS rencontrent leur cadre autant que l’IDE. Lors de nos échanges, les IDE abordent souvent la place des médecins. Étant en lien direct avec ces derniers, elles peuvent alors attendre de leur cadre de santé ce positionnement face au corps médical ? L’autorité semble en tout cas être nécessaire pour les IDE interviewées mais dans un but précis, défendre l’équipe. Le cadre de santé, qui représente bien le supérieur hiérarchique, est perçu comme un pivot dans l’équipe, devant savoir prendre position au nom de celle-ci et à bon escient. Il s’agit d’une manière de reconnaître le travail des soignants mais également de pérenniser une cohésion d’équipe existante, en se donnant les moyens de s’affirmer pour maintenir la dynamique du groupe. Les soignants ont au final beaucoup d’attentes venant de leur cadre de santé. Ses capacités organisationnelles sont certes citées mais les soignants semblent surtout souhaiter travailler avec un cadre agréable, disponible et à l’écoute de leurs doléances. Il doit être d’une certaine manière le représentant de l’équipe soignante et je le compare alors au capitaine d’un bateau. Il doit savoir guider les soignants et prendre les bonnes décisions aux bons moments afin de « garder le cap » dans la bonne direction et maintenir un esprit de groupe ou tout le monde travaille ensemble et dans cette même direction. - 77 - W. Hesbeen cite également « Le cadre de proximité dans sa fonction managériale va ainsi, de la place qui est la sienne et en tâtonnant, veiller mais également œuvrer à ce que les personnes de son service soient bien ensemble pour ensemble aller loin. C’est un art de vivre ensemble dont il est question, et qui concerne tant les lieux que les personnes ainsi que les relations qu’elles entretiennent [35, p.116] ». - 78 - Synthèse Avant de découvrir réellement ce que les professionnels soignants attendent concrètement de leur cadre de santé, il me semble important de comprendre en amont ce que le bien-être au travail représente pour chacun d’entre eux. Là encore, les idées sont diverses mais se regroupent au final. Elles sont en lien à la fois avec le travail lui-même (et les conditions de travail) mais également avec le ressenti de chacun (et la satisfaction de ce que l’on fait). Ainsi, se sentir bien à l’hôpital c’est travailler sans stress afin d’avoir le temps avec les patients en vue d’obtenir leur reconnaissance, mais également de travailler avec ses collègues dans une bonne ambiance où l’entraide prime. Des situations de travail idéales qui peuvent sembler utopiques, à l’heure où la rentabilité fait de plus en plus partie des discours, et où la durée moyenne de séjour doit être de plus en plus courte. Malgré tout, les soignants que je rencontre paraissent être satisfaits de leurs conditions de travail. L’esprit d’équipe, la bonne entente et l’ambiance bonneenfant ressentis peuvent être des atouts dans le fonctionnement des services. Se serrer les coudes quoiqu’il arrive afin de continuer à soigner les patients dans les meilleures conditions, telle semble être leur devise ! Le cadre de santé joue un rôle important dans cet équilibre professionnel. Les attentes sont ainsi variées et le cadre doit être un excellent gestionnaire, un organisateur sachant prendre position pour son équipe et la défendre aux bons moments. Mais surtout il doit se montrer disponible et à l’écoute. Les soignants le placent comme une sorte de « confident » qui doit essayer de comprendre les situations d’ordre plus personnel parfois mais tout en gardant une certaine distance. - 79 - Confrontation avec mon hypothèse « Maintenir une équipe en santé managériale sera donc un des objectifs du cadre de santé » Stéphane Chevalier – cadre de santé – février 2013 - 80 - 5 – Confrontation avec l’hypothèse de départ Mon hypothèse de départ est basée sur une situation vécue lors de mon exercice professionnel en tant que faisant fonction de cadre de santé. En me questionnant sur mes pratiques, je suppose que : Le cadre de santé facilite la cohésion d’équipe par le biais d’un management bientraitant. Mes lectures m’ont permis de conceptualiser ma thématique dans un premier temps. Puis les entretiens mettent en avant de quelles manières les soignants perçoivent l’équipe et son fonctionnement mais également ce qu’ils attendent concrètement de leur cadre de santé. Je peux ainsi confronter mon hypothèse de départ et l’analyse réalisée des divers entretiens : le cadre de santé facilite en effet la cohésion d’équipe par le biais d’un management bientraitant. 5-1 La cohésion d’équipe Les soignants souhaitent une cohésion du groupe dans un objectif : travailler ensemble pour le bien du patient. Leurs propres relations au travail permettent de maintenir cette cohésion d’équipe, vitale pour leur équilibre. Cet état d’esprit est réellement mis en avant et il est indispensable pour les professionnels de santé de travailler dans une bonne ambiance et d’avoir des rapports au travail conviviaux. La communication au sein de l’équipe prime avant tout. Les relations doivent être à la fois amicales autant que professionnelles et tout en se respectant. Les soignants que je rencontre semblent effectivement avoir leur place dans l’équipe et le travail en collaboration avec tous parait alors évident. Cependant, dans la réalité du terrain, je pense que cet état d’esprit n’est pas dans la culture - 81 - de chacun des soignants. Et il n’est pas exceptionnel d’entendre parler de conflits dans les équipes, de catégories qui ne se mélangent pas dans leur quotidien ou encore de professionnels refusant parfois même de travailler avec certains de leurs collègues. Le cadre de santé peut alors intervenir. 5-2 La place du cadre de santé Il n’est finalement cité comme membre reconnu de l’équipe que par très peu de soignants. Ce qui démontre, il me semble, que même s’il fait partie de l’organisation d’une unité de soins et gère ainsi les ressources humaines, en plus des autres tâches qui lui sont confiées, il doit garder une place extérieure. Cette posture lui permet alors de préserver une neutralité et de prendre ses décisions de manière le plus objective possible. Cependant, les attentes des professionnels sont relativement nombreuses. 5-3 Un cadre de santé idéal Je développe dans mon cadre conceptuel différentes méthodes de management bientraitant. Lors de mes entretiens et de leur analyse, je retrouve des propos similaires expliqués par les soignants. Des attitudes permettant aux soignants de rester motivés dans leur travail et de ce fait maintenir leur cohésion. Ainsi, le cadre de santé « idéal » doit être : Un gestionnaire sachant organiser de manière optimale les équipes et le fonctionnement de son unité Un interlocuteur doté d’humanité sachant se montrer disponible et à l’écoute tout en faisant confiance à son équipe Un expert sachant répondre aux attentes des soignants dans leur cœur de métier - 82 - Un protagoniste sachant maintenir la dynamique de l’équipe Un pivot au centre des relations sachant se positionner pour son équipe. La réalité du terrain, effective pour les soignants, existe également pour le cadre de santé. Réunions diverses, groupes de travail, gestion de projets dans l’unité sont entre autres des tâches confiées au cadre de santé. Sa présence physique ne peut être assurée à temps plein sur l’unité et pour l’équipe. Néanmoins, les missions du cadre sont la plupart du temps en lien avec l’organisation de l’unité. En définitive, les résultats de mon analyse permettent de confirmer mon hypothèse de départ. Toutefois elle est incomplète. Il me parait important de rajouter que même si le cadre de santé influe sur la cohésion d’équipe par le biais de son management bientraitant, l’équipe elle-même joue un rôle crucial dans cette culture. En effet, les relations au sein de l’équipe et entre les soignants ne dépendent pas uniquement du cadre de santé. En définitive, le cadre de santé apporte une plus-value dans la cohésion d’équipe. Chacun doit pouvoir s’entendre avec son collaborateur non seulement dans un esprit de « bonne équipe » mais essentiellement pour un travail de qualité toujours pour ce même objectif, le patient. Certains de mes collègues cadre de santé me disent « il ne leur est pas demandé de s’aimer mais de travailler ensemble et de manière professionnelle ». Je peux également m’interroger sur cet écart constaté entre la place du cadre de santé accordée par les soignants et leurs attentes considérables envers celui-ci. L’ambiguïté ressentie lors des échanges démontre bien la difficulté pour les soignants pour le situer. Le cadre de santé fait-il partie intégrante de l’équipe ? Peut-il y être inclus comme le soignant ou le médecin ? Une place que le cadre de santé doit trouver dans son unité. Lors de mon choix de population pour mes entretiens, j’ai souhaité pouvoir interviewer des professionnels à la fois peu expérimentés et d’autres ayant au moins 5 années d’ancienneté. Je réalise que quelque soit leur catégorie et leur - 83 - ancienneté, ils expriment des idées plus ou moins similaires. Je ne retrouve aucun discours opposés. En définitive, tout soignant a les mêmes attendus de la part de son cadre de santé. - 84 - Les enseignements tirés « La place du cadre de santé (…) s’est caractérisée comme une présence, une attention, une proximité, un équilibre entre des fonctions managériales et d’encadrement, un « prendre soin, une rencontre parfois aussi… » Jean-Marie Revillot – extrait de « Pour une visée éthique du métier de cadre de santé » - 2010 - 85 - 6- Les enseignements tirés Ce travail de recherche m’a permis de tirer divers enseignements, à la fois dans la méthodologie de la recherche mais également en lien avec ma future fonction de cadre de santé. 6-1 D’un point de vue méthodologique La méthode de recherche nous est proposée par l’Institut de Formation des Cadres de Santé. Même si j’ai élaboré un mémoire de fin d’étude lors de ma formation en Institut de Formation des Soins Infirmiers, je découvre cette approche. Le choix de ma thématique est en lien avec ma pratique sur le terrain et en tant que faisant fonction de cadre de santé. Cette année de formation a donc été le moment de répondre à mes questionnements par le biais de ce travail de recherche. Dans un premier temps, mes différentes lectures m’ont permis de m’ouvrir sur des concepts en lien avec ma thématique. Cependant, étant donné le temps imparti relativement court pour l’élaboration de notre travail, j’ai dû faire des choix dans les idées des auteurs et cibler ce qui pour moi paraissait essentiel et indispensable dans mon travail. Ensuite, lors des entretiens, je me suis également rendue compte à quel point il est compliqué pour les soignants de prendre de leur temps avec moi. Même s’ils ont tous répondu volontiers à mes questions, je pense avoir trop ciblé mes interrogations parfois. En effet, lorsque je pensais qu’ils avaient du mal à trouver des réponses et afin de leur faire « gagner du temps », je pointais de manière plus restreinte ma question, entraînant probablement un manque de spontanéité dans leur discours. - 86 - Enfin, lors de l’analyse de mes entretiens, j’ai compris l’intérêt de mettre en parallèle mes concepts développés en amont et les propos recueillis. Cette étape m’a permis de faire des liens entre la théorie traitée par divers auteurs et la réalité du terrain. Une manière de comprendre concrètement comment doit se placer le cadre de santé. Je reste cependant consciente qu’il s’agit bien d’une initiation au travail de recherche. Les divers outils proposés lors de l’enseignement de la méthodologie ont été une aide précieuse pour mon travail de recherche. 6-2 D’un point de vue de la fonction cadre de santé Tout d’abord, la méthodologie elle-même me permet de développer des compétences transférables sur le terrain, en unité de soins. Ce travail de recherche se concrétise tout au long de notre formation. Il s’agit d’un travail intense, mobilisant du temps et de l’énergie. De plus, d’autres travaux écrits sont nécessaires à la validation de notre cursus ; il faut alors être capable de mener conjointement différents travaux et diverses méthodes. Il est nécessaire alors, tout comme le cadre de santé, d’être organisé, de se fixer des objectifs en posant des échéances, de savoir prendre du recul si nécessaire mais également de trouver de l’aide aux bons moments. Des compétences essentielles dans l’exercice de mon futur exercice professionnel. D’autre part, le sujet traité est en lien avec mes pratiques en tant que faisant fonction de cadre. J’ai conscience d’avoir exercé ma fonction dans l’esprit du management bientraitant développé dans mon travail. Cependant, je réalise que les soignants sont relativement exigeants. De plus, malgré ce désir venant des professionnels de créer d’une certaine manière un lien avec le cadre de santé de son unité, celui-ci reste tout de même extérieur à son équipe. - 87 - Je pense qu’il est alors important, lors de ma prise de fonction, que je puisse trouver ma place dans l’équipe en tant que cadre de proximité : en sachant me positionner comme celle qui représente son équipe au sein de l’institution en sachant être disponible et à l’écoute aux bons moments en sachant reconnaître et valoriser le travail de chacun mais tout en sachant garder une juste distance. Même si les relations interprofessionnelles entre soignants jouent un rôle majeur dans la cohésion d’équipe, je pense que le management bientraitant du cadre de santé préserve également l’équipe soignante et maintien sa motivation au quotidien et, de ce fait, l’esprit d’équipe et le travail en cohésion. - 88 - Conclusion La fonction du manager c’est «œuvrer à être bien ensemble pour ensemble aller loin » Walter Hesbeen – extrait de « Cadre de proximité » - 2011 - 89 - 7- Conclusion Le choix de ma thématique s’est fait naturellement et en relation avec mon expérience antérieure de faisant fonction de cadre de santé. Il s’agit pour moi d’une recherche essentielle, en lien avec mes valeurs professionnelles et surtout avec des actions transférables sur le terrain. Ce travail, étalé sur les 10 mois de formation, m’a permis de me questionner sur mes pratiques en prenant le recul nécessaire afin d’être le plus objective possible dans mes recherches et mon analyse. Mon expérience en tant qu’infirmière mais également en tant que faisant fonction de cadre de santé a cependant été essentielle dans mon cheminement. J’ai ainsi pu confronter mes pratiques aux résultats de ma recherche. Afin d’approfondir ma recherche, je pars de l’hypothèse suivante : Le cadre de santé facilite la cohésion d’équipe par le biais d’un management bientraitant. Je réalise huit entretiens semi-directifs me permettant de découvrir sur le terrain les attentes des professionnels de santé. Leur analyse, en lien avec mes concepts développés en amont, m’a permis de comprendre à nouveau l’importance pour les soignants de la proximité de leur cadre de santé. Il doit pouvoir répondre aux attentes voire aux exigences des équipes en étant à l’écoute et disponible, mais il est également un représentant de ses membres, capable de se positionner et de défendre les soignants à bon escient. Il en va de la cohésion du groupe, indispensable afin de travailler en synergie, pour le bien du patient. Les missions du cadre de santé sont essentielles pour les professionnels, dans un contexte socio-économique difficile qui touche également l’hôpital. - 90 - En effet le cadre de santé doit également, dans son quotidien, tenir compte des exigences de l’établissement : tarification à l’activité, mutualisation des ressources humaines, durée moyenne de séjour raccourcie…Des contraintes réelles que le cadre de santé ne peut négliger. De plus et dans cette logique de mutualisation des moyens, il peut être amené à gérer plusieurs unités, parfois même sur plusieurs sites. Malgré ces difficultés il doit pouvoir assurer un management permettant aux soignants de travailler dans de bonnes conditions dans un seul et même objectif : garantir au patient des soins de qualité. Il se situe alors entre la Direction imposant ses directives et son équipe soignante, ayant besoin de lui. C’est dans ce contexte en perpétuel changement et parfois fragile que le cadre de santé doit se donner les moyens de maintenir l’équilibre de son équipe, sa dynamique, sa cohésion et sa motivation. Il n’existe certes pas de bon ou mauvais management. Cependant, le « management bientraitant » semble présenter de manière élargie et complète les outils que le cadre de santé peut alors utiliser dans son quotidien, afin de sauvegarder cet état d’esprit au sein d’une équipe soignante. Pourtant sa place n’est pas clairement définie par tous. Les soignants aspirent à un cadre de proximité mais il le situe à l’extérieur de l’équipe. Les exigences qu’ont les professionnels sont-elles toutes applicables si le cadre de santé n’a pas sa place dans l’équipe ? Comment peut-il apprendre à connaître les soignants tout en respectant une certaine distance ? Où et comment doit-il se situer réellement dans son unité ? Je peux alors me poser cette autre question : quelle légitimité les soignants accordent-ils au cadre de santé afin que ce dernier puisse assurer un management bientraitant, exigé par les équipes ? - 91 - Bibliographie - 92 - Bibliographie [1] MINTZBERG Henry. Le manager au quotidien – les 10 rôles du cadre. Paris : Éditions d’Organisation, 2011, 283 p. [2] BECU Sophie. Bientraitance managériale ou comment manager autrement à l’hôpital. Soins cadres n°83, août 2012, pp14-16. [3] MOTTA Jean-Michel. La dynamique des groupes. Cadres de santé.com. 23 juin 2003 [en ligne]. Disponible sur : http://cadredesante.com/spip/profession/management/La-dynamique-desgroupes.html (consulté le 20/11/12) [4] MUCCHIELLI Roger. La dynamique de groupes – Processus d’influence et de changement dans la vie affective des groupes. Paris : ESF Éditeur, 2012, 234 p. [5] AEBISCHER Verena et OBERLE Dominique. Le groupe en psychologie sociale. Paris : Dunond, 2012, 245 p. [6] MUCCHIELLI Roger. Le travail en équipe. 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Disponible sur http://www.google.fr/search?q=photo+coh%C3%A9sion+d'%C3%A9quipe&hl=fr &tbm=isch&tbo=u&source=univ&sa=X&ei=CfFiUd_KIoiHPa3sgLgL&ved=0CDo QsAQ&biw=1688&bih=849 (consultée le 08/04/13) - 96 - Annexes - 97 - Annexe 1 : extrait des valeurs professionnelles Hôpital René Muret Groupe cadre Direction des soins 2011 LES 12 VALEURS PROFESSIONNELLES HIERARCHISEES DES CADRES PARAMEDICAUX A RMB Pour J.-D. Reynaud « les valeurs s’imposent bien aux individus, mais elles ne sont pas transcendantes et indépendantes de leurs relations .Elles sont l’objet même de ces relations, elles sont construites par elles. Une action collective, en imposant des règles, invente un sens. Les valeurs sont l’horizon de ce sens, l’orientation de l’action collective. ».4 L’HAS nous invite à les définir car, « les valeurs sont des références communes fondant la conduite professionnelle de chacun, identifiées de façon collective, et diffusées auprès de tous les acteurs internes et externes. Dans le contexte des établissements de santé, caractérisé par la présence de groupes porteurs de visions différentes et pourtant toutes légitimes, elles constituent un cadre de référence utile. Les établissements sont invités à mener une démarche autour de la définition de valeurs en évitant les écueils du formalisme ou du détournement ».5 RESPECT ECOUTE (être à l’écoute) EQUITE DISPONIBILITE RIGUEUR COMPETENCES PROFESSIONNELLES (professionnalisme) ESPRIT D’EQUIPE (solidarité) IMPLICATION ORGANISATION PROXIMITE RESPONSABILITE TRANSPARENCE Les Définitions du groupe cadre Le respect Chacun a son importance dans le travail, prendre en compte le travail de chacun, respect du travail et dans le travail Chaque professionnel est reconnu (respect de l’individu) C’est savoir écouter l’autre, ne rien dire c’est aussi respecter l’autre Se manifeste dans l’attitude envers l’autre C’est se respecter soi même 4 5 SCHWEYER F-X. / éd., Normes et valeurs dans le champ de la santé, p6. Manuel de certification des établissements de santé V2010, Haute Autorité de Santé Juin 2009. - 98 - Respect des valeurs de chacun, culture, croyances tant pour le patient que pour le soignant L’écoute, être à l’écoute Savoir se taire pour écouter l’autre Savoir se rendre disponible On ne peut pas écouter sans entendre (il faut en faire quelque chose après, le réinvestir, mener une action) En matière d’écoute ce n’est pas la durée qui compte mais la qualité de l’écoute (la disponibilité) L’équité Nécessite de : Avoir les mêmes règles de fonctionnement pour tous Ne pas utiliser l’affectif Argumenter les règles, le pour et le contre Prendre une décision et s’y tenir à long terme Donner la même chose a tout le monde Que les règles soient connues de tous La rigueur Nécessite de : Faire équivalent a ce que l’on exige D’être exigeant envers soi même (exemplarité) Rigueur différent de rigidité Quelques définitions (la littérature) Le respect Selon LE ROBERT 2005, la définition est : fait de prendre en considération. Si nous voulons approfondir, «l’exigence de respect pour autrui semble reposer sur 2 éléments qui entretiennent des rapports complexes: un certain sentiment d’empathie, la reconnaissance en l’autre d’un semblable […] la demande de respect prend souvent la forme d’une revendication identitaire, d’un désir de reconnaissance et de valorisation […] il faut signifier le respect d’une manière qui puisse être entendue par les autres: des codes de respect, clairs et réciproques […]. Le respect impose une distance à l’autre, par laquelle lui est reconnue une autonomie, et une réciprocité est possible ».6 L’équité Selon LE ROBERT 2005 : notion de justice naturelle dans l’appréciation de ce qui est dû à chacun, vertu qui consiste à régler sa conduite sur le sentiment naturel du juste et de l’injuste. Pour John Rawls7 : « l’équité est le principe modérateur du droit objectif (lois, règlements administratifs) selon lequel chacun peut prétendre à un traitement juste, égalitaire et raisonnable ». 6 7 DEL.M., 2005, Le respect, dictionnaire culturel en langue française, LE ROBERT, pp.228-229. RAWLS.J, Théorie de la justice, Paris, Seuil, 1987 - 99 - L’affectivité apparait comme un écueil. Il faut donc éclairer cette notion, Ahmed al Motamassik, sociologue d’entreprise, précise « Il est certain que nous ne pouvons pas supprimer l’affectif dans nos relations de travail car nous ne pouvons travailler dans un milieu déshumanisé. Gérer l’affectivité dans les relations de travail ne doit pas aboutir à transformer les individus en robots uniquement préoccupés par les résultats. Un manager doit savoir utiliser son intelligence émotionnelle. Cela doit notamment l’inciter à juger autrui avec objectivité en luttant contre la tendance à préférer ceux qui pensent comme lui, le séduisent ou le manipulent. Bien évidemment, des règles claires et affichées sont importantes. C’est pourquoi on utilise de plus en plus les réunions d’expression, les échanges d’expériences, la mise en place des chartes de valeurs pour le renforcement des liens entre collègues et la cohésion des équipes ».8 L’ECOUTE9 Véritable éthique de la relation, l'écoute managériale fait partie de l'art de gouverner les individus et les groupes « Même si, comme dit le Tao, « la perfection d’une écoute est d’être imparfaite »il convient de circonscrire le champ de l’écoute : le rôle du manager n’est pas d’écouter tous les états d’âme et les péripéties de la vie privée de ses équipiers, ni de tenter de les aider dans celle-ci. Ecouter ses collaborateurs, c’est accepté d’être surpris, c’est accéder à leurs représentations de la réalité. De grâce, ne pas terminer leurs phrases à leur place ! Après tout, eux aussi doivent faire l’effort de se faire comprendre. Ecouter suppose d’être « modifié » par l’autre, en étant à la fois solide et souple, car accueillir son point de vue permet de se renouveler et d’infléchir les changements peut-être autrement que prévu mais plus efficacement : l’écoute favorise l’acceptation. Certes le manager écoute avec sa subjectivité mais y réfléchir, le reconnaître, c’est déjà se situer plus clairement dans la relation. En cela l’écoute active, concept développé par le psychologue humaniste Carl Rogers, avec la reformulation, permet de rester dans la juste distance où peuvent se conjuguer, selon lui, les trois conditions d’un dialogue authentique : être soi-même (la congruence), la considération positive inconditionnelle de l’autre, l’empathie réelle. L'écoute managériale revêt ainsi une importance capitale pour atteindre des objectifs, dépasser des contraintes préjudiciables à l'organisation ou à la conduite positive du changement® : il importe que les vraies forces en présence apparaissent avant une décision, que les véritables enjeux émergent à l’occasion d’une délibération ou d’un conflit. C’est pourquoi les managers peuvent s’interroger sur leur propre pratique de l'écoute, les conditions favorables à celle-ci, l'usage pratique de l'écoute active, son rôle dans la résolution des conflits, l'accompagnement des collaborateurs par l'écoute, l'écoute comme outil de créativité et de négociation. Il ne s’agit pas tant pour le manager de se mettre en position d’écoutant comme le serait un coach externe à l’entreprise. Il s’agit d’aménager progressivement une atmosphère propice à la coopération et à des consensus porteurs dans la durée. Selon la tradition socratique, « savoir qu’on ne sait pas », c’est chaque fois savoir apprendre, c’est savoir rencontrer et se laisser rencontrer, se laisser dire… et respecter l’autre. 8 www.lavieeco.com/.../4291-laffectivite-gere-90-de-notre-vie-sociale-et-professionnelle.html, 2010. 9 www.institut-leadership-bpi.com/lecoute-au-coeur-du-management-durable - 100 - Ecoutez vos collaborateurs, c’est intéressant ! Ils deviendront sans doute des coopérateurs… » La responsabilité 10 « Renvoie très clairement à l’éthique de responsabilité de Max Weber : le fait d’avoir conscience des conséquences de ses actes sur son entourage. C’est elle qui doit dicter nos comportements vis-à-vis de nos collaborateurs. Commençons par reconnaître que nous sommes tous, managers et managés, individuellement responsable de l’exécution de bonne foi du contrat de travail, que c’est en grande partie sur chacun de nous que reposent les conditions de travail respectueuses de la dignité et des droits fondamentaux de tous. En tant que manager, nous avons davantage à faire encore. Il nous faut d’abord développer une vraie loyauté vis-à-vis de notre entreprise, loyauté ne voulant pas dire soumission. Il s’agit d’avoir l’intention contributive, de situer nos actes dans le cadre de la stratégie bien comprise de l’entreprise. Nous devons enfin nous « pré occuper » de l’avenir professionnels de nos collaborateurs et nous sentir responsable de leurs conditions de vie et d’emploi, conditions actuelles bien sûr mais aussi futures. » 10 www.blog.theatragogie. - 101 - Annexe 2 : ma trame d’entretien Trame entretien : Population choisie : 4 infirmières dans 2 services différents (soit 2X2 dont 1 jeune diplômée et une ancienne diplômée dans chaque service) 4 aides-soignantes (répartition idem) L’équipe : pouvez-vous me parler de votre équipe et de vos relations avec elle ? Comment définissez-vous une équipe de soins ? Qui incluez-vous dans l’équipe ? Comment peut-on instaurer et maintenir des bonnes relations au sein de cette équipe ? Comment définissez-vous une « bonne » équipe (bonne entente, travail fluide, organisé…) ? Que représente pour vous la cohésion de votre équipe ? Est-ce important pour vous ? Le cadre de santé : pouvez-vous me dire quelles sont, selon vous, les missions du cadre ? Et son rôle envers son équipe ? Quelle place occupe-t-il dans une équipe ? Quel est, selon vous, son rôle et ses missions ? Qu’attendez-vous personnellement de lui ? Selon vous, qu’est-ce que l’équipe peut attendre de lui ? Est-ce important d’avoir de bonnes relations avec son cadre ? Pourquoi ? Comment fait-il pour organiser de manière optimale le service et la gestion de l’équipe ? Comment fait-il pour vous motiver dans votre quotidien ? La bientraitance managériale : pouvez-vous me dire, comment, selon vous, les soignants peuvent se sentir bien au travail ? Qu’est-ce pour vous le bien-être au travail ? Le cadre de santé participe-t-il à votre bien-être au travail ? Comment le cadre de santé peut-il être bientraitant selon vous ? (Demander définition des termes cités) Et vous, que faites-vous pour votre bien-être et celui de vos collègues ? Existe-t-il des situations que le cadre ne serait pas à même de gérer ? (ex : conflit personnel) Identité : Quel âge avez-vous ? Quelle est votre fonction ? Depuis combien de temps exercez-vous ce métier (année du diplôme) ? Depuis combien de temps travaillez-vous dans ce service ? Nombre d’agents dans l’unité ? (et à charge du cadre si sur plusieurs services ?) Avez-vous autre chose à rajouter ? - 102 -