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11ème journée d’éthique Maurice RAPIN
16 novembre 2001
Aspects nouveaux de l’information et de sa preuve
Pierre SARGOS ,président de chambre à la Cour de cassation
---------------------1.Les nombreux commentaires qui ont suivi l’arrêt
Hédreul , concernant la charge de la preuve de l’information , rendu le 25 février
1997 par la première chambre civile de la Cour de cassation (( Bull.civ I n° 75- Rapp.
Annuel C. Cass . 1997 p 271) ont donné l ‘impression d’une extraordinaire
nouveauté en matière d’information due par un médecin à son patient . Et un arrêt
encore plus récent du 9 octobre 2001 (Arrêt Franck Y... Bull civ I n° 249) a aussi
parfois été commenté comme apportant encore une nouveauté en imposant un
caractère rétroactif à l ‘obligation d’information .
De tels commentaires sont erronés - comme on le verra
par la suite mais ils sont néanmoins intéressants dans la mesure où ils illustrent une
constante de l’esprit humain : l ‘oubli - conscient ou inconscient , sélectif ou non - qui
fait qualifier de nouveau ce qui n’est en réalité que la redécouverte de principes
oubliés
2.Le
thème
afférent
aux
aspects
nouveaux
de
l’information en matière médicale ne saurait donc se résumer à glaner ici ou là les
dernières évolutions jurisprudentielles , doctrinales , administratives , législatives ou
réglementaires concernant l’information , encore qu’il existe une véritable nouveauté
, à savoir le projet de loi “ relatif aux droits des malades et à la qualité du système de
santé “, en cours de discussion devant le parlement et qui contient de nombreuses
dispositions relatives à l’information . Le texte adopté en première lecture par l’
Assemblée nationale le 4 octobre 2001 comporte notamment un nouvel article L
1111-1 du code de la santé publique ainsi rédigé “ Toute personne a le droit d’être
informée sur son état de santé . Cette information porte sur les différentes
1
investigations ,traitements ou actions de prévention qui sont proposés , leur utilité
,leur urgence éventuelle , leurs conséquences , les risques fréquents ou graves
normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions
possibles et sur leurs
conséquences prévisibles en cas de refus .Lorsque
,postérieurement à l’exécution des investigations ,traitements ou actions de
prévention , des risques nouveaux sont identifiés ,la personne concernée doit en
être informée , sauf en cas d’impossibilité de la retrouver .
Cette information
incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le
respect des règles professionnelles qui lui sont applicables . Seule l’urgence ou
l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser . Cette information est délivrée au
cours d’un entretien individuel . La volonté d’une personne d’être tenue dans
l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée , sauf lorsque des
tiers sont exposés à un risque de transmission . Les droits des mineurs ou des
majeurs sous tutelle mentionnés au présent article sont exercés ,selon les cas , par
les titulaires de l’autorité parentale ou par le tuteur .Ceux-ci reçoivent l’information
prévue par le présent article , sous réserve des dispositions de l’article L 1111-4. Les
intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la
prise de décision les concernant , d’une manière adaptée soit à leur degré de
maturité s’agissant des mineurs , soit à leurs facultés de discernement s’agissant
des majeurs sous tutelles . Des recommandations de bonnes pratiques sur la
délivrance de l’information sont établies par l’Agence nationale d’accréditation et
d’évaluation en santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé . En
cas de litige ,il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter
la preuve que l’information a été délivrée dans les conditions prévues au présent
article .Cette preuve peut être apportée par tout moyen “ .On peut raisonnablement
penser que ce texte ne devrait pas connaître de profondes modifications à l’occasion
de son examen par le Sénat et qu’il devrait être définitivement adopté en février
2002
3. Au delà de l ‘authentique nouveauté que sera la loi sur
les droits des malades - et en particulier l’article susvisé - si , comme on peut
raisonnablement le penser ,elle est au début de l’an prochaindéfinitivement adoptée
2
,on peut considérer que l’approche des aspects nouveaux de l’information et de sa
preuve peut se faire à travers , d’une part , la redécouverte de principes de base
temporairement occultés (I) , d’autre part , la découverte de nouvelles données (II)
I.
LA
REDÉCOUVERTE
DE
PRINCIPES
DE
BASE
TEMPORAIREMENT
OCCULTES
4.Cette redécouverte porte sur trois points essentiels : la
redécouverte de la norme fondamentale du respect de la personne humaine (A) ,la
redécouverte
que l’information sur les risques n’est pas tout (B) , enfin , la
redécouverte que la charge de la preuve ne preuve ne peut peser que sur le
médecin et que cette preuve est en principe libre (C)
A. La redécouverte de la norme fondamentale du
respect de la personne humaine .
5. Le devoir d'information du médecin vis-à-vis de son
patient a toujours été au coeur de l'éthique de tout praticien quelle que soit sa
spécialité. Ce devoir est d'autant plus fort qu’il s’agit d’un médecin
qui, tel
un
chirurgien, est appelé à porter atteinte, parfois très gravement (amputation), à
l'intégrité physique d'autrui, ce qui ne peut être justifié que par un impératif
thérapeutique et le consentement éclairé par l’information du patient.
La jurisprudence ,tant civile que criminelle , a toujours mis
en exergue la nécessité d’une justification thérapeutique pour légitimer l’atteinte
portée à la personne du patient. Pour nous limiter à une période récente ,on citera à
titre d’exemple un arrêt de la chambre criminelle du 30 mai 1991 (Bull. Crim n° 232)
retenant la responsabilité pénale pour coups et blessures volontaires d'un chirurgien
qui avait procédé à l'ablation de l'appareil génital externe masculin d'un homme , sur
la demande de ce dernier qui avait le sentiment d'appartenir au sexe féminin ; l
'absence d'objectif thérapeutique de l'intervention chirurgicale - qui seul peut justifier
une mutilation - expliquant la grave qualification pénale retenue . De son côté la
3
première chambre civile , dans un arrêt du 27 mai 1998 (Bull. Civ I. n° 187 ) a admis
la
responsabilité civile d’un praticien ayant sa patiente à un danger “sans
justification thérapeutique
6.Mais il ne suffit pas qu ‘un acte médical ait une
justification thérapeutique . Il faut encore que - sous des réserves qui seront étudiées
infra - le patient y ait donné son consentement qui ,pour être valable , doit être
éclairé par l’information . Le rapprochement de l’information et du consentement est
fondamental car la première est la condition de la validité du second .C’est la
jurisprudence de la Cour de cassation qui a la première mis l’accent sur cette norme
fondamentale de l’art médical par l’arrêt Teyssier du 28 janvier 1942 ( D.1942 .
Jurisprudence , p 63 - Gaz. pal , Jurisprudence , 1942-1 - 177 ) en énonçant qu’un
chirurgien “ est tenu , sauf cas de force majeure , d’obtenir le consentement du
malade avant de pratiquer une opération dont il apprécie , en pleine indépendance ,
sous sa responsabilité , l’utilité,
la nature et les risques ;qu’en violant cette
obligation , imposée par le respect de la personne humaine ,il commet une
atteinte grave aux droits du malade “.Puis
l’arrêt précise que la responsabilité du praticien est engagée dés lors que son
patient” n’avait été averti ni de la nature exacte de l’opération qu’il allait subir,
et de ses conséquences possibles , ni du choix qu’il avait entre ces deux
méthodes curatives “ ..Ce que l’on appelle aujourd’hui le devoir d’information est d
‘autant plus fortement affirmé que le verbe employé , avertir ,a une connotation plus
forte que le verbe informer.
7. Et l ‘arrêt déjà cité Franck Y ... du 9 octobre 2001 (
Bull.Civ. I .n° 249 ) s’est situé dans la ligne directe de l’arrêt Teyssier en énonçant ,
par une formule qui tient compte de l’évolution des normes dégagées par le Conseil
constitutionnel , que “ le devoir d’information du médecin vis-à-vis de son patient
trouve son fondement dans l’exigence du respect du principe constitutionnel de
sauvegarde de la dignité de la personne humaine “.Ce même arrêt enfin souligne
qu’un ” médecin engage sa responsabilité pour manquement à son devoir
d’information alors même qu’à l ‘époque des faits la jurisprudence admettait qu’il ne
4
commettait pas de faute s’il ne révélait pas à son patient des risques exceptionnels ;
en effet , l’interprétation jurisprudentielle d’une même norme à un moment donné ne
peut être différente selon l’époque des faits considérés et nul ne peut se prévaloir
d’un droit acquis à une jurisprudence figée “. Cette décision trouve son fondement
dans l’article 5 du code civil qui interdit au juge de se prononcer par voie de
disposition générale et réglementaire ,ce à quoi aboutirait une décision limitant à
l’avenir un revirement de jurisprudence .
B. La redécouverte que l’information sur les
risques n’est pas tout
8. les décisions judiciaires en matière d’information
concernent presque toutes l ‘ information sur les risques inhérents à des actes
médicaux . Les procès sont en effet presque toujours le fait de patients , ou de leurs
ayants - droit , qui reprochent à leur médecin de ne pas les avoir avertis d’un risque
inhérent à un acte médical et qui s’est réalisé .On peut dés lors avoir le sentiment
que l’objet de l’information est exclusivement lié à la question des risques et qu’elle
aurait un aspect en quelque sorte “défensif ” pour le médecin .Rien n’est plus faux en
réalité car information et consentement forment un agrégat indissociable , l’envers et
le revers d’une même médaille , la finalité de l’information étant de permettre au
patient d’exprimer sa volonté en toute connaissance de cause , c’est-à-dire
d’accepter ou de refuser les soins
proposés .Suivant une formule éclairante
employée par l’arrêt Baud du 19 avril 1988 ( Bull.civ I n° 107) l’information est
destinée à permettre au patient “ de prendre sa décision après avoir comparé les
avantages et les risques encourus “
L’ information doit donc avoir une dimension globale ,
dont les risques ne sont en dernière analyse qu’un élément parmi d’autres , même
s’il est évidemment très important . Mais pour un patient l’information sur la durée
prévisible de sa convalescence peut être aussi déterminante de son consentement à
subir une opération à un moment donné que celle sur les risques .
5
9.Et à cet égard on a sans doute trop oublié la formulation
particulièrement éclairante de l’arrêt Teyssier déjà cité relevant , pour retenir la
responsabilité d’ un chirurgien , qu’il n’avait averti le blessé ni de la nature exacte
de l’opération qu’il allait subir et de ses conséquences possibles , ni du choix qu’il
avait entre ces deux méthodes curatives “ .Cet arrêt pose donc clairement trois
éléments , toujours d’actualité , sur lesquels le médecin doit faire porter l’information
pour recueillir un consentement éclairé:- la nature exacte des soins proposés ( ou
des investigations) - les conséquences de ces soins ( ainsi ,par
l’ablation d’un rein
qu’entraîne sa perte )
exemple , si
est réalisée , le patient doit être informé des conséquences
-
l’existence
d’alternatives
thérapeutiques
entre
lesquelles le malade pourrait avoir un choix .
10 .Et la pérennité de ces éléments de l’information
médicale dégagés par l’arrêt Teyssier se retrouve non seulement dans l’article 35
du code de déontologie médicale de 1995 , mais aussi , dans les Recommandations
destinées aux médecins diffusées en mars 2000 par l’Agence Nationale
d’Accréditation et d’Evaluation en santé
( ANAES ). Ces
recommandations
précisent , au terme d’une étude pluridisciplinaire fondées sur les textes et les règles
de bonne pratique médicale , que l’information concerne l’état du patient et les soins
, qu’il s’agisse d’actes isolés ou s’inscrivant dans la durée , qu’ elle doit être
actualisée au fil du temps , prendre en compte la situation propre à chaque
personne, et qu’elle doit porter , outre les réponses aux questions posées par le
patient , sur des éléments généraux et des éléments spécifiques .L’information est
donc relative à :- l’état du patient et son évolution prévisible , ce qui nécessite des
explications sur la maladie ou l’état pathologique , et sur son évolution habituelle
avec et sans traitement -
la description et le déroulement des examens , des
investigations, des soins , des thérapeutiques , des interventions envisagées et de
leurs alternatives - leur objectif , leur utilité et les bénéfices escomptés - leurs
conséquences et leurs inconvénients - leurs complications et leurs risques éventuels
, y compris exceptionnels - les précautions générales et particulières recommandés
aux patients.
6
Et les Recommandations soulignent aussi
que
l’information , qu’elle soit faite oralement ou à l’aide d’un document écrit , doit
répondre aux mêmes critères de qualité :
- être hiérarchisée et reposer sur des données
validées
- présenter les bénéfices attendus des soins
envisagés avants leurs inconvénients et risques éventuels , et préciser les risques
graves , y compris exceptionnels , c’est-à-dire ceux qui mettent en jeu le pronostic
vital ou altèrent une fonction vitale
-être compréhensible , le médecin devant s’assurer
que la patient a compris l’information et indiquer la solution qu’il préconise en
expliquant les raisons de sa proposition
11. S’agissant de l’information sur les alternatives
thérapeutiques ,on citera notamment un arrêt prononcé le
3 mars 1998 par la
première chambre civile de la Cour de cassation ( Arrêt n° 430 ,pourvoi n°
Y9611054) à propos d’une pathologie dont le traitement pouvait consister soit en la
pose d’une prothèse , soit en une ablation ( en l’espèce la responsabilité du praticien
n’a pas été retenue car il avait bien donné cette information).On signalera aussi un
important arrêt du 18 janvier 2000 ( Bull. civ I n°13 - Rapp C. Cass 2000 p 377 )
concernant
une opération de la cataracte qui nécessitait
une anesthésie loco
régionale ou générale . Le médecin avait proposé à sa patiente cette dernière forme
, mais celle-ci avait refusé et demandé une anesthésie loco régionale réalisée par
injection d’un produit anesthésiant dans la région du globe oculaire , qui avait éclaté
sous la pression . Pour retenir la responsabilité du médecin - dont il n’était pas
contesté qu’il avait informé sa patiente du risque d’une telle anesthésie locorégionale - la cour d’appel avait estimé qu’il avait commis une faute en ne là
convainquant pas des dangers présentés par un tel acte .L’arrêt de la cour d’appel a
été cassé car une telle exigence revenait à imposer au médecin une quasi obligation
de résultat en un domaine où le malade a une liberté de choix. Il convient toutefois
de souligner que le médecin , en présence d’alternatives thérapeutiques ,doit faire
connaître à son patient le choix qui lui parait le plus adapté en lui en expliquant les
raisons ; et les recommandations de l’ANAES vont dans le même sens . Mais si le
7
praticien ne réussit pas à convaincre son patient d’avoir recours au choix qu’il
préconise - ce qui en soi n’est pas une faute comme le souligne l’arrêt du 18 janvier
2000 - , il lui appartient d’apprécier si ce choix ne l’expose pas à un risque excessif ,
auquel cas le praticien devra refuser d’accomplir l’acte, sauf à engager sa
responsabilité
C. La redécouverte que la charge de la preuve ne
peut
peser que sur le médecin et la liberté de la preuve
12.Eu égard au fondement du devoir d’information ,
préalable au recueil du consentement éclairé, qui est le respect de la dignité de la
personne humaine et son droit à l’intégrité de son corps , il fût longtemps admis
comme une évidence, et cela dès la fin du 19° siècle , que le médecin avait la
charge de la preuve que son patient avait consenti à une intervention et qu’il lui avait
fourni l’information adéquate.
Mais la Cour de cassation ,par un arrêt du 29 mai 1951 (
Bull.Civ I n° 162 ) , était revenu sur ce principe et avait jugé qu’il appartenait au
patient de rapporter la preuve que son médecin avait manqué à son obligation
contractuelle en ne l’informant pas de la véritable nature de l’opération qui se
préparait et en ne sollicitant pas son consentement à cette opération . Ce revirement
de jurisprudence fut d’ailleurs fraîchement accueilli par la plupart des commentateurs
Par l’arrêt Hédreul déjà cité du 25 février 1997 ( Cf supra
n° 1) la Cour de cassation est revenu à l’orthodoxie d’avant 1951 en décidant que
celui qui est légalement ou contractuellement
tenu d’une obligation particulière
d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation et qu’il
incombe dés lors au médecin de rapporter la preuve qu’il a exécuté cette obligation .
Depuis la jurisprudence judiciaire est constante( par ex
.Civ I, 9 octobre 2001 ,pourvoi n° C0011525 à propos d’un risque d’algodystrophie
rendant nécessaire l’amputation d’un doigts) . Devant le juge administratif, la solution
est voisine ,même si les questions relatives à la charge de la preuve se posent de
8
façon moins tranchée . Dans ses conclusions concernant l’arrêt consorts T... du 5
janvier 2000 ( Rec p 5) , le commissaire du gouvernement , M Chauvaux , faisait
d’ailleurs une observation dans ce sens en relevant que l’affirmation de la cour
d’appel de Paris suivant laquelle la charge de la preuve incombait à l’hôpital n’était
pas erronée et que “ l’information du patient est une formalité incombant aux
praticiens qui doivent pouvoir justifier qu’ils s’en sont acquittés “
13. L’ information peut être faite par tous moyens ,hormis
les cas où une disposition particulière impose qu’une information soit faite selon des
modalités particulières, ( par ex .art . L 1122-1 du code de la santé publique suivant
lequel en matière
recherche biomédicale sur une personne “ les informations
communiquées sont résumés dans un document écrit remis à la personne dont le
consentement est sollicité “ ).Ce principe de la liberté du mode d’information a été
clairement rappelé par un arrêt du 14 octobre1997 (Bull.civ I n° 278) et rejoint ainsi
le principe civiliste de la liberté de la preuve (toujours sauf disposition contraire ).A
cet égard ,l’article 1316 du code civil distingue cinq modes de preuve : la preuve
littérale (écrit ) , la preuve testimoniale , les présomptions , l’aveu et le serment .
L’aveu et le serment sont d’une importance pratique
mineure , encore que des modalités contestées d’un aveu puissent étayer la preuve
par témoignage ou par présomptions . On évoquera donc essentiellement l’écrit , les
témoignages et les présomptions
14 .Sans aller jusqu‘à dire que l’écrit est la reine des
preuves , on doit convenir que , malgré les possibilités de contestation dont il peut
faire l’objet , notamment quant au contenu de l’information , il présente l’avantage
considérable de laisser une trace et de permettre de déterminer avec plus de
précision ce sur quoi l’information a porté . On constate d’ailleurs une tendance nette
du législateur ou des autorités réglementaires à imposer l’écrit en matière
d’information .Mais hormis ces cas , comme l’a jugé un arrêt de la Cour de cassation
toujours d’actualité du 29 mai 1984 ( Bull.civ I ;n° 179) “ il ne peut être exigé d’un
médecin qu’il remplisse par écrit son devoir de conseil .
9
De nombreuses sociétés savantes , comme par exemple
la société française d’anesthésie , ont élaboré des fiches d’informations destinées à
être remises aux patients et L’ ANAES réalise aussi de telles fiches, par exemple
en matière de sismothérapie.Si rien ne s’oppose à ce que de telles fiches soit
remises par le praticien à son patient , il convient de noter qu’il conserve toujours la
faculté de ne pas les remettre, ou de les adapter , et , en tout cas, de les compléter .
Et il doit toujours les expliciter oralement à son patient
15. Le témoignage est la déclaration orale ou écrite
d’une personne sur des faits dont elle a eu personnellement connaissance .Il serait
donc parfaitement possible à un médecin d’invoquer le témoignage , par exemple ,
d’un confrère , d’un infirmier ou infirmière , d’une sage femme , d’un membre de son
secrétariat , pour faire la preuve du fait qu’il avait effectivement informé son patient
.Ce témoignage pourra être fait oralement devant le juge , qui fera établir une procès
verbal des déclarations , ou - ce qui est le plus fréquent - par attestation écrite ,
datée et signée de la main du témoin . On doit cependant souligner que la sincérité
et l’objectivité des témoignages , qu’ils soient recueillis par le juge ou relatés dans
une attestation , pourra faire l’objet de contestations par le patient lorsque le témoin
sera le subordonné du médecin , ou en communauté d ‘intérêts avec lui .
16 .La notion de présomption recouvre des faits ,
circonstances et éléments divers , graves , précis et concordants de nature à établir
en justice que l’information avait été donnée au patient .
L'arrêt
précité
du
14octobre 1997 est d'ailleurs intervenu dans un cas où la preuve du fait que la
patiente avait été informée du risque grave d'embolie gazeuse inhérent à une
coelioscopie - et
dont elle était décédée - résultait de présomptions tenant au
nombre de consultations, au délai de réflexion avant l'intervention, à l'attitude et au
comportement de la patiente et aux connaissances particulières qu'elle avait du fait
de son activité professionnelle . Tous ces éléments sont d’ailleurs souverainement
appréciés par les juges du fond , la Cour de cassation n’exerçant aucun contrôle sur
leur appréciation , sous réserve du cas ils auraient dénaturé le sens clair et précis
d’un écrit
10
On signalera aussi un
arrêt du 3 mars 1998 de la
première chambre civile de la Cour de cassation ( arrêt n° 429 D ) illustrant un cas
où la preuve du consentement de parents à une intervention réalisée sur leur enfant
mineur résultait de leur demande de prise en charge , préalable à l’opération, par
leur régime d’assurance maladie
Compte tenu de l’extrême variabilité des éléments
pouvant concourir à la preuve par présomptions , il est exclu d’en donner une liste
exhaustive .
Il sera ainsi possible de tenir compte , par exemple, du
nombre de consultations, du délai entre celles-ci et la réalisation de l'acte médical
ayant eu des conséquences dommageables, de l'attitude et de propos du patient ou
de tiers , de notes transcrites dans le dossier médical ou de comptes rendus , de la
pratique habituelle du médecin mis en cause , de lettres du malade ou adressées à
celui-ci par le médecin . On ne saurait d’ailleurs trop recommander aux médecins et
aux établissements de santé , qu’ils soient publics ou privés ,de tenir de la façon la
plus complète possible les dossiers individuels des patients qui , en cas de litige,
seront examinés par les experts judiciaires commis
II . LA DÉCOUVERTE DE NOUVELLES DONNÉES
17.Ces
nouvelles
données,
apparues
essentiellement entre 1997 et 2001 , concernent la question des risques graves et
exceptionnels (A) , la limitation de l’information (B) et le préjudice réparable ( C)
A. La question des risques graves et exceptionnels
18.Ce qui importe à la plupart des patients en
matière d’information sur les risques c’est de connaître ceux qui peuvent avoir un
retentissement vital ou invalidant . Quelques décision judiciaires isolées avaient à
cet égard fait apparaître la notion de risque grave , comme , par exemple , un arrêt
de la Cour de cassation du 17 novembre 1969 (Bull .civ I. n° 347 ) ou de la cour
11
d’appel de Paris du 17 novembre1983 (DS 1985 p 368 - JCP G 1985 II 20046 ,note
Dornster-Dolivet )
Ce concept de risque grave a été délibérément
consacré comme étant le critère de base de l’ information par trois arrêts rendus en
1998 , respectivement le 17 février (Bull .Civ I n° 67 ) , 27 mai ( Bull.civ I n° 187 ) et
7 octobre 1998 ( Bull.civ I n° 291 ) . Et le Rapport annuel de la Cour de 1998, p 273,
souligne que ces décisions mettent l’accent sur la notion de risques graves pouvant
se définir comme étant ceux qui sont
de nature à avoir des conséquences
mortelles,invalidantes, ( perte d’un membre , d’un sens , du contrôle d’une fonction
naturelle ...) ou encore esthétiques sévères , et qu’il ne s’agit donc pas de délivrer
aux patients une liste plus ou moins compréhensible de ces risques , mais d’attirer
leur attention
sur le fait que , malgré toutes les précautions prises , la réalisation
des soins ou des investigation peut entraîner les conséquences précitées . Suivant la
formulation de ces arrêts , et de plusieurs rendus depuis , “ Le médecin est tenu de
donner à son patient une information loyale,claire et appropriée sur les risques
graves afférents aux investigations et soins proposés “ ou que le patient demande .
Un arrêt du 29 juin 1999 ( Bull civ I n° 220. JCP 1999 G II 10138, rapp.P.Sargos )
concerne ainsi l’information sur le risque d’infection nosocomiale inhérent à la pose
d’une prothèse du genou et qui peut avoir de graves conséquences invalidantes.Et
un arrêt du 9 octobre 2001 ( Civ I Bull n° 252)concerne un cas où le risque grave
consistait en une nécrose de la peau aux suites sévères sur le plan esthétique .
La jurisprudence administrative n’emploie pas la
terminologie de “risque grave” , mais rejoint cette notion puisqu’elle évoque le “
risque connu de décès ou d’invalidité “ ( C.E. Consorts T . 5 /1/ 2000, Rec p 5,
conclusions Chauvaux )
Il convient toutefois de préciser
que le patient serait en droit de demander une information beaucoup plus large que
celle concernant les risques graves et que le médecin devrait alors satisfaite cette
demande , sous réserve de l ‘hypothèse
de limitation
thérapeutique de l’
information.
Il va de soi enfin que les risques graves dont le
patient doit être averti sont ceux qui étaient connus à la date des soins ou des
investigations. Ainsi un arrêt du 7 juillet 1998 ( Civ I; arrêt n° 1273 , pourvoi n°
12
T9619927) écarte tout manquement d’un médecin à son devoir d’information d’un
médecin dés lors qu’à la date où il avait réalisé l’opération le risque qui s’était réalisé
n’était pas encore connu . Mais il ne suffirait pas à un praticien d’affirmer qu’il ignorait
l’existence d’un risque ; il est en effet tenu de soigner en fonction des données
acquises de la science dont fait partie la connaissance des risques . Par ailleurs ,
conformément à l’article 11 du code de déontologie médicale , “ tout médecin doit
entretenir et perfectionner ses connaissances “ .Le risque grave connu que le
médecin doit révéler à son patient est celui qui fait partie des données acquises de
la science , telles qu’elles peuvent être révélées , par exemple , dans une revue
médicale de référence dont le médecin ne pourrait alléguer la méconnaissance pour
échapper à sa responsabilité .
19. Le fait que le médecin pouvait , sans
commettre de faute , ne pas révéler à son patient des risques exceptionnels était
présenté par beaucoup d’auteurs comme une sorte d’évidence. Pareille affirmation
était certes excessive au regard de certains arrêts ,mais il est vrai que
la
jurisprudence admettait que les médecins n’étaient pas tenus de signaler à leur
malade des risques qui ne se réalisaient qu’exceptionnellement ( par exemple 20
mars 1984 . Bull .civ I n° 107 ou 3 janvier 1991 .Bull .civ I n° 5)
Mais le bien fondé de cette exception était très
contestable eu égard à la fiabilité souvent très relative des statistiques sur les
risques de telle ou telle opération .En outre , et surtout, un critère exclusivement
quantitatif présentait le défaut majeur de ne pas permettre de tenir compte des
particularités du patient, tant en ce qui concerne la nature et la gravité de son
affection, que son age et sa situation familiale ou professionnelle. Il est ainsi évident
qu'un malade jeune ayant des charges de famille et dont l'affection ne met pas en
jeu le pronostic vital hésitera à s'exposer à un risque mortel même très faible et qu'il
doit en être informé.
Ce sont deux arrêts du 7 octobre 1998 ( Bull .civ I
n° 287 et 291 - Rapport annuel de la Cour de cassation ,page 274) qui ont procédé
à un revirement majeur en décidant qu ‘un médecin n’est pas dispensé de son devoir
13
d’information sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés
par le seul fait que ce risques ne se réalisent qu’exceptionnellement .
Et par son arrêt déjà cité du 5 janvier 2000 (
consorts T .rec p 5) le Conseil d’Etat a statué dans le même sens en énonçant que “
la seule circonstance que les
risques ne se réalisent qu’exceptionnellement ne
dispense pas les praticiens de leurs obligations “ .Enfin un arrêt du arrêt du 18 juillet
2000 ( Bull.civ I .n° 227 . Rapp. Annuel C. Cass .p379) précise que le médecin ne
peut être dispensé de son devoir d’information quant à la gravité du risque inhérent à
une intervention par le seul fait que celle-ci serait médicalement nécessaire .En
décider autrement reviendrait d’ailleurs à supprimer purement et simplement
l’obligation d’information dans la mesure où tout acte médical de nature à porter
atteinte à l’intégrité de la personne repose sur la condition sine qua non d’une
nécessité médicale c’est-à-dire d’ une justification thérapeutique ( sous réserve du
cas particulier des actes médicaux ou chirurgicaux à visée esthétique ).Il serait
également porté atteinte au droit inaliénable du patient de refuser des soins même
nécessaires
B. La limitation de l’information
20. L’urgence et l’impossibilité - prévus par l’article
41 du C. Déont.méd - justifient l’absence d’information , comme l’a jugé la Cour de
cassation dans son arrêt du 7 octobre 1998 (Bull.civ I. n° 291) et le Conseil d’Etat a
la même position ( Consorts T.. 5 janvier 2000.Rec p 5 ).
Le refus du patient d’être informé légitime aussi
l’absence ou la limitation de l’information . La faculté de refuser l’information a été
expressément consacrée par la Cour de cassation dans son arrêt déjà cité du 7
octobre 1998 ( Bull .Civ I .n° 291 )qui , parmi les cas légitimant l’absence
d’information , cite le “refus du patient d’être informé “. Et le Conseil d’Etat , par
l’arrêt consorts T... du 5 janvier 2000 ( Rec.2000 p 5) a aussi consacré ce droit au
refus .
Cependant, si un médecin doit respecter le refus
de son patient d’être informé , il devra attirer son attention sur les conséquences d’un
tel refus en ce qui concerne la perte de la possibilité de refuser des soins ou des
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investigations présentant certains risques . Le praticien devra aussi être
particulièrement circonspect quant au choix - s’il en existe - d’ une alternative
thérapeutique et choisir celle qui , à efficacité thérapeutique comparable, présente un
risque moindre . Enfin dans ce cas particulier on ne peut que recommander au
médecin de mentionner dans un écrit signé par le patient qu’il a offert de l’informer
mais que ce dernier , éclairé des conséquences de sa position , a maintenu son
refus . Dans certains cas - par exemple doute sur la lucidité du malade - , le médecin
devrait même , dans la mesure du possible évidemment , en référer à un proche .
Enfin la Cour de cassation , par un arrêt du 23 mai
2000 ( Bull .Civ I. n° 159 ) a également admis qu’il pouvait exister une limitation
thérapeutique de l’ information .Il s’agissait d’ un patient atteint de troubles
psychiatriques auquel son médecin
n’avait pas révélé le pronostic pessimiste
attaché à ces troubles . Le malade avait engagé un procès contre ce médecin en lui
reprochant de lui avoir dissimulé le pronostic de son affection et de lui avoir ainsi fait
perdre la possibilité de faire valoir des droits auprès d’organismes sociaux ou
d’assurances . La Cour de cassation , se fondant sur l’article 42 du code de
déontologie médicale du 28 juin 1979 - dont les dispositions sont reprises par l’article
35 du code de déontologie du 6 septembre 1995 - a énoncé que le médecin pouvait
limiter l’ information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave ,une
telle limitation devant être fondée ” sur des raisons légitimes et dans l’intérêt du
patient , cet intérêt devant être apprécié en fonction de la nature de la pathologie ,
de son évolution prévisible et de la personnalité du malade “.
C. Le préjudice réparable
21. la Cour de cassation était très rigoureuse à
l’origine .L’ arrêt Teyssier déjà cité avait ainsi décidé que le médecin qui avait failli à
son devoir d’ information et de recueil du consentement éclairé de son patient devait
être condamné à réparer l’intégralité du préjudice du patient . Mais une évolution
s’est produite en ce sens qu’il est apparu que le préjudice résultant d’un défaut
d’information ne pouvait
être systématiquement assimilé à l’intégralité des
dommages subis par le patient du fait du risque qui s’est réalisé.
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Un arrêt du 7 février 1990 (Bull. Civ I n° 39), a ainsi
estimé que le praticien “ qui manque à son obligation d’éclairer son patient sur les
conséquences éventuelles du choix de celui-ci d’accepter l’opération qu’il lui
propose, prive seulement l’intéressé d’une chance d’échapper, par une décision
peut-être plus judicieuse, au risque qui s’est finalement réalisé, perte qui constitue un
préjudice distinct des atteintes corporelles résultant de ladite opération “ .Il s’agit de
ce qu’il est convenue d’appeler une perte de chance. Deux arrêts du 8 juillet 1997
(Civ I bull n° 238 et 239) ont nettement confirmé que la réparation d’une perte de
chance ne pouvait représenter qu’une fraction des différents dommages afférents à
son intégrité physique subis par le patient.
22.L’arrêt déjà cité du 7 octobre 1998 ( Bull.civ I.
n° 287) a introduit un nouvel élément . Il s’agissait d’un patient souffrant d’une
sévère gonarthrose évolutive d’un genou,qui présentait une désaxation de 10% ,
dont il avait été opéré, mais sans être informé d’un risque de syndrome de loge , qui
s’était réalisé, afférent à cette intervention. La Cour d’appel avait décidé que ce
risque étant de 1% n’avait pas à être révélé eu égard à son caractère exceptionnel .
La cour de cassation a condamné cette appréciation puisque, désormais, le seul fait
qu’un risque ne se réalise qu’exceptionnellement n’est pas de nature à décharger un
praticien de son devoir d’information. Néanmoins le médecin n’a pas été condamné
à payer des dommages intérêts à ce patient . Il ressortait en effet
des rapports
d’expertise , d’une part , qu’eu égard au caractère de l’affection dont il était atteint
l’intervention qu’il avait subie était indispensable et seule de nature à améliorer son
état et qu’elle avait abouti à l’amélioration escomptée, d’autre part , que les troubles
qu’il subissait du fait du risque qui s’était réalisé étaient moindres que ceux découlant
de la non réalisation de l’intervention.La cour de cassation a donc approuvé la cour
d’appel d’ avoir décidé que dans un tel cas il n’était justifié d’aucun préjudice
résultant de la faculté qu’aurait eu le patient, s’il avait été informé, de refuser
l’intervention . Mais ,bien évidemment , il faut qu’il soit clairement établi, d’une part,
que l’intervention était indispensable et que ,sans elle, l’état du patient aurait été plus
mauvais que l’état dans lequel il se trouve à la suite de la réalisation du risque non
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révélé, d’autre part, que le praticien n’a commis aucune faute ayant concouru à la
réalisation de ce risque.
23. Le deuxième arrêt Hédreul du 20 juin 2000 ( Bull.civ
I. n° 193) a apporté un autre élément nouveau . A la suite de la première cassation
intervenue le 25 février 1997 (cf supra n°1), l’affaire avait été renvoyée devant la
cour d’appel d’Angers .La Cour de renvoi n’a pas remis en cause la charge de la
preuve , mais, analysant la situation de fait , elle a estimé que même s’il avait été
informé du risque inhérent à l’intervention subie (coloscopie avec ablation d’un
polype impliquant un risque de perforation de l’intestin , qui s’était réalis) le patient
aurait nécessairement accepté l’intervention , de sorte qu’il ne justifiait pas d’un
préjudice résultant de la réalisation du risque . La Cour de cassation a rejeté le
pourvoi en énonçant que” le praticien qui manque à son obligation d’ informer son
patient des risques graves inhérents à un acte médical d’investigations ou de soins
prive ce dernier de la possibilité de donner un consentement ou un refus éclairé à cet
acte ; qu’il est dés lors de l’office du juge de rechercher , en prenant en considération
l’ état de santé du patient ainsi que son évolution prévisible , sa personnalité , les
raisons pour lesquelles des investigations ou des soins à risques lui sont proposés
,ainsi que les caractéristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques ,
les effets qu ‘aurait pu avoir une telle information quant à son consentement ou à son
refus ; qu’à cet égard l’arrêt attaqué a relevé que M.Hédreul , dont le père était mort
d’un cancer du côlon , souhaitait se débarrasser de troubles intestinaux pénibles et
de craintes pour l’avenir , que la recto-colite dont il était atteint favorisait la survenue
d’un cancer , que le polype découvert devait être enlevé compte tenu du risque de
dégénérescence en cancer ; que c’est pas une appréciation souveraine tirée de ces
constatations que la cour d’appel a estimé qu’informé du risque de perforation M.
Hédreul n’aurait refusé ni l’examen ni l’exérèse du polype de sorte qu’il ne justifiait
d’aucun préjudice indemnisable.
24 .Trois cas de figure sont donc désormais
possibles en matière de réparation du préjudice né d’un défaut d’information :
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1°- soit le juge du fond estime qu’il était certain que
le patient aurait refusé l ‘acte médical . En ce cas la réparation du préjudice né de la
réalisation du risque sera totale.
2°- soit , au contraire , le juge du fond considère
comme établi que le patient informé aurait accepté de subir l’acte . En ce cas la
réparation du préjudice afférent à la réalisation du risque sera exclue .Mais on
pourrait envisager la réparation d’un préjudice spécifique lié au fait que l’absence
d’information n’a pas permis d’envisager ,voire de se préparer au risque, ce qui
n’était pas demandé dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 juin 2000)
3°-soit le juge estime qu’il y avait une probabilité
que la patient refuse , en ce cas le préjudice sera déterminé en proportion de cette
perte de chance d’échapper à l’ atteinte à son intégrité physique
Dans les hypothèses 1 et 3 il pourrait
y avoir
exclusion ou réduction de la réparation s’il est établi que du fait du risque réalisé
dont il n’avait pas été informé le patient souffre de troubles moindres que ceux
résultant de la non réalisation de l’intervention , mais un préjudice spécifique
évoqué dans le cas n° 2 pourrait être alloué .
D’autres préjudices pourraient aussi être invoqués
en dehors de la question de la réalisation d’un risque grave . Ainsi ,par exemple , un
patient qui aurait accepté qu’une intervention chirurgicale le concernant se fasse à
une période donnée, compte tenu de ses obligations professionnelles, pourrait faire
grief au médecin de ne pas l’avoir informé du risque que sa convalescence soit
beaucoup plus longue et demander la réparation du préjudice économique qu’il subit
du fait de la prolongation de son indisponibilité
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25.Tels
nous
paraissent
être
les
principaux
éléments nouveaux en matière d’information du patient , tant en ce qui concerne ce
qui relève d’une redécouverte , que de ce qui constitue une véritable nouveauté.
La prochaine loi sur les droits des malades devrait
pour l’essentiel confirmer cette doctrine jurisprudentielle .
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Mais on doit souligner une difficulté , qui n’est pas
totalement résolue , en ce qui concerne le conflit pouvant naître
entre l’intérêt
thérapeutique du patient , qui peut justifier une limitation , voire une exclusion , de
l’information et son intérêt patrimonial qui peut l’imposer .Il est en effet de nombreux
cas où une personne , pour obtenir des prestations attachées à son état de santé ,
doit être informée de cet état ( droit à une pension , au bénéfice d’une assurance
incapacité ou invalidité par exemple ).L’ article 50 du code de déontologie médicale
impose d’ailleurs au médecin de faciliter l’obtention par le patient des avantages
sociaux auxquels son état lui donne droit et prévoit une communication directe du
médecin traitant avec le médecin conseil de l’organisme de sécurité sociale. Mais
cette disposition ne règle pas tous les autres cas, et notamment en matière
d’assurance . Par ailleurs des patients auxquels la vérité sur leur pathologie n’aura
pas été révélée dans leur intérêt thérapeutique pourront être exposés à des
difficultés lorsqu’ils contractent une assurance leur imposant de répondre
exactement à un questionnaire médical ou excluant de la garantie des suites de
certaines pathologies.
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