Décembre 2013 - Mutualité chrétienne

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MC-Informations
Analyses et points de vue
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Périodique trimestriel de l’Alliance nationale des Mutualités chrétiennes
décembre 2013
A l’occasion des 50 ans de l’assurance maladie-invalidité obligatoire, la MC a voulu faire le point.
Depuis sa création en 1963, l’assurance maladie-invalidité (AMI) a
beaucoup évolué: elle s’est progressivement étendue à toutes
les tranches de la population, a dû
faire face à différentes crises qui
ont remis son fonctionnement en
cause mais elle n'a jamais perdu
de vue son objectif : offrir des soins
de santé accessibles et de qualité
au plus grand nombre d'assurés
possible.
Financement des prestations de soins en Belgique
Ambulatoire
COÛT DE LA PROCÉDURE
Honoraires médicaux
FORFAIT/ALL IN
BUDGET
Personnel
Frais d'hébergement
Infrastructure
Frais infirmiers
Matériel médical
Médicaments
Matériel à usage unique
Nomenclature
Evolution du nombre de lits pour 100 000
habitants 2000-2011 (OCDE)
BMF
Hospitalisation
10,00
9,00
8,00
7,00
6,00
Belgique
France
5,00
Norvège
4,00
Danemark
3,00
Allemagne
2,00
Royaume-Uni
1,00
OCDE
0,00
MUTU
ALITE
CHRE
TIENN
E
La solidarité, c’est bon pour la santé.
Éditorial
Dans le cadre de notre série d'articles consacrés aux 50 ans
de l'AMI, nous nous penchons dans ce numéro sur le passé,
le présent et l'avenir de l'assurance soins de santé obligatoire,
et plus spécifiquement sur la nomenclature des prestations
médicales, l'un de ses fondements. En raison de l'augmentation
croissante des coûts induite par le vieillissement de la
population, la recrudescence des maladies chroniques (un
Belge sur quatre aujourd'hui !), l’innovation technologique et
l'utilisation de techniques et de médications plus onéreuses, le
développement de la médecine prédictive et la multiplication
de campagnes de prévention coûteuses, les coûts du personnel
croissants ou les (trop ?) grandes attentes du public, il existe
plus que jamais une nécessité de se doter d'une assurance
obligatoire financièrement avantageuse et solidaire.
Cette augmentation des dépenses peut être partiellement
compensée par une meilleure rationalisation. Nous avons en
effet aujourd'hui encore trop d'hôpitaux et une concentration
des soins insuffisante, un trop grand nombre de lits, une
consommation trop élevée de médicaments et de certains
examens techniques (coûteux), des différences de revenu
trop importantes entre les médecins, un financement des
prestations trop élevé et des soins pas toujours effectués au
niveau le plus approprié. De nouvelles réformes, aussi bien au
niveau de la nomenclature, des prescriptions de médicaments,
du financement des hôpitaux, de l'organisation de la première
ligne et des soins des seniors seront notamment nécessaires
afin de pouvoir garantir l'accessibilité et la qualité de notre
assurance soins de santé.
La fiche-info aborde la réforme de l’intervention majorée à partir
du 1.1.2014 afin d'améliorer l'accessibilité des soins aux groupes
les plus vulnérables. Comme il y a 50 ans, nous devrons rester
attentifs afin de ne pas voir apparaitre une médecine à deux
vitesses. Même si un rapport de l'OCDE estime la contribution
personnelle du patient en Belgique à environ 25 %, ce qui
constituerait une menace à l'accessibilité, nous ne disposons
pas de chiffres précis dans ce domaine. La MC a donc réalisé
2
une étude afin de connaître l’importance des suppléments que
paie un patient auprès d'un médecin spécialiste conventionné
et non conventionné. Il ressort d'une autre étude que nous avons
menée préalablement que le patient en Belgique est certes
satisfait de la qualité des soins de santé qui lui sont offerts,
mais qu'il n'a pas connaissance de ce qu'il doit payer à un
spécialiste ou à un dentiste et qu'il trouve parfois ces montants
trop élevés. 10 % des personnes interrogées disent s'être déjà
privées de soins de santé pour raisons financières. L'étude que
nous vous présentons aujourd'hui nous apprend que la plupart
des médecins respectent les tarifs conventionnés et que même
une petite moitié des spécialistes non conventionnés s'y tient
également pour la facturation de leurs consultations. Hélas, il
y a également des spécialistes conventionnés qui demandent
en moyenne 9 EUR de supplément. Tous les patients ont un
intérêt à ce que le plus grand nombre possible de médecins
(et de préférence tous) soient conventionnés et à ce qu'ils
respectent les tarifs convenus. Pour les non-conventionnés, les
suppléments s'élèvent en moyenne à 13,5 EUR, mais avec de
grandes disparités entre les spécialistes. Afin d'enfin connaître
avec exactitude ce que doivent personnellement débourser le
patient et les mutualités en Belgique pour chaque consultation,
et pouvoir prendre ainsi les mesures éventuelles qui s'imposent,
il existe un besoin manifeste d'une plus grande transparence.
Les auteurs de l'étude concluent qu'en 50 ans, l'AMI et le
modèle de concertation ont apporté bien des éléments positifs.
Nous entendons poursuivre dans cette voie en continuant la
négociation d'accords afin d'améliorer ce qui doit l'être et
garantir ainsi la continuité de soins de santé de qualité pour
les patients. Pour y parvenir, il serait appréciable qu'au terme
de la réforme de l'État, les mêmes parties prenantes dirigent de
façon analogue la politique des soins de santé dans les entités
fédérés et ce, dans l'intérêt des patients.
Michiel Callens
Directeur R&D
MC-Informations 254 • décembre 2013
50 ans AMI
Passé, présent et futur de l’assurance maladieinvalidité obligatoire
Naïma Regueras, Recherche et Développement
Résumé
A l’occasion des 50 ans de l’assurance maladie-invalidité obligatoire, la MC a voulu faire le point. Depuis sa
création en 1963, l’assurance maladie-invalidité (AMI) a beaucoup évolué: elle s’est progressivement étendue
à toutes les tranches de la population, a dû faire face à différentes crises qui ont remis son fonctionnement
en cause mais elle n'a jamais perdu de vue son objectif : offrir des soins de santé accessibles et de qualité
au plus grand nombre d'assurés possible.
Aujourd'hui encore, le contexte économique et politique de notre pays met notre système de Sécurité
Sociale à mal. Si nous savons depuis longtemps déjà que nous devrons trouver des solutions pour assurer
le financement à long terme de ce système, la 6ème réforme de l'Etat amène aussi avec elle son lot de défis.
Dans cet article nous retraçons l'histoire de l'assurance maladie-invalidité et exposons les défis auxquels
elle fait face actuellement. Finalement, nous avons aussi voulu formuler des propositions quant à l'avenir
de l'assurance obligatoire car les défis seront nombreux : assurer un financement à long terme de notre
système de soins, pouvoir offrir des soins abordables, accessibles et de qualité en veillant particulièrement
à la situation des plus vulnérables et adapter notre offre de soins aux besoins de personnes nécessitant de
plus en plus des soins de longue durée.
1.Introduction
L’assurance maladie-invalidité obligatoire fête cette année ces
50 ans d’existence. A l’instar des couples qui fêtent leur noces
d’or, l’heure du bilan est arrivée. Nous avons aujourd’hui vécu
assez longtemps avec elle pour pouvoir l’analyser avec recul et
apprendre aussi tant de nos erreurs que de ce que nous avons
accompli avec succès. Cependant, l’objet de cet article n’est
pas seulement de retracer l’histoire de l’assurance obligatoire
mais également de nous tourner vers l’avenir car, dans un
contexte qui est loin d’être rose, il est fondamental de pouvoir
offrir une perspective solide pour le futur de cette assurance.
2. Petit rappel historique
Bien que nous fêtions aujourd’hui les 50 ans de l’assurance
maladie obligatoire dans notre pays, l’histoire de sa création
ne commence pas au 9 août 1963. Si en Belgique, les débuts du
mouvement mutualiste et l’apparition des premières caisses de
secours mutuels datent de la fin du 19ème siècle, c’est à la fin de
la deuxième guerre mondiale que sera officiellement créée la
Sécurité Sociale belge.
En effet, c’est le 28 décembre 1944 que le Sécurité Sociale voit
le jour et avec elle le Fonds National d’Assurance MaladieInvalidité ancêtre de l’actuel Institut National de l’Assurance
Maladie-Invalidité (INAMI). Historiquement, la Belgique, au
même titre que la France et les Pays-Bas, a construit son
système de protection sociale sur base du modèle bismarckien,
d’influence allemande, qui diffère du modèle beveridgien
d’influence britannique.
Quels sont les grands principes qui distinguent les deux
systèmes ? Dans les système d’influence bismarckienne, le
financement se fait largement par des cotisations sociales (des
employeurs et des travailleurs) proportionnelles au salaire.
De même, les allocations octroyées (allocation de chômage,
d’invalidité, etc.) sont proportionnelles à la rémunération
perdue. On induit ainsi une solidarité forte entre actifs et
inactifs, malades et bien-portants (tout un chacun participe
au financement en fonction de ses moyens et reçoit une
indemnisation en fonction de sa perte). Concernant la gestion de
ce modèle, la logique adoptée est la suivante : puisque ce sont
les employeurs et les travailleurs qui financent le système de
MC-Informations 254 • décembre 2013
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protection sociale, ce sont eux-mêmes qui devront en assurer
la gestion. En Belgique, la Sécurité Sociale est donc co-gérée
par les employeurs (représenté par les syndicats d’employeurs)
et les salariés eux-mêmes (représentés par les syndicats des
travailleurs) dans un système de gestion paritaire. De la même
façon, les différentes branches de la Sécurité Sociale sont cogérées par tous les acteurs impliqués.
obligatoire. Concernant le secteurs des indemnités, la priorité
était de garantir un revenu de remplacement aux travailleurs
salariés mis en incapacité pour cause de maladie ou d’accident.
C’est aussi dans le cadre de cette loi que sera instauré le statut
VIPO (veufs, invalides, pensionnés, orphelins) garantissant
une protection contre les risque de santé à ces tranches plus
vulnérables de la population.
Au contraire, les systèmes d’influence beveridgienne sont
quant à eux universels et se donnent pour mission d’assurer
une même protection minimale à tous les citoyens (tous le
monde reçoit la même chose). Ils prévoient des allocations
forfaitaires identiques pour tous. Le financement se fait par
l’impôt, et le système est principalement et directement géré
par l’Etat (puisque c’est l’Etat qui finance, c’est l’Etat qui gère).
La loi de 1963 introduisit également le système de négociations
d’accords entre les mutualités et les prestataires de soins
(accords médico-mutualistes). Tous les deux ans, les
représentants des mutualités (garantes de l’équilibre financier
de l’assurance maladie) et des prestataires de soins se
réunissent pour fixer le niveau des tarifs (ou honoraires) que
les prestataires de soins sont invités à pratiquer pour les deux
années qui suivent, le but étant de garantir la sécurité tarifaire
du patient et de pouvoir garder le budget de l’assurance
soins de santé sous contrôle. En effet, sans ces accords, les
prestataires de soins seraient entièrement libres de fixer leurs
tarifs, ces derniers pouvant donc fluctuer très fortement d’un
prestataire à l’autre ou d’une année à l’autre. De plus, l’accord
médico-mutualiste fixe également le niveau des avantages
perçus par les prestataires si ceux-ci décident d’adhérer à
l’accord. Les tarifs fixés par les dentistes sont fixés dans un
autre accord mais suivant le même principe (accord dentomutualiste).
La Belgique s’étant construite autour de ce modèle de gestion
paritaire d’inspiration bismarckienne, c’est tout naturellement
que la gestion de l’Assurance Maladie-Invalidité fut confié
aux organismes assureurs ainsi qu’aux syndicats (travailleurs
et employeurs) et aux représentant des prestataires de soins
plutôt qu’à l’Etat. Dans ce contexte, de nombreux acteurs
considéraient qu’il convenait de confier l’organisation et la
gestion de cette nouvelle assurance aux mutualités qui avaient
le mérite de disposer d’un réseau bien distribué sur l’ensemble
du pays et d’une expérience non-négligeable dans le domaine.
Dans ce modèle, les besoins sociaux ne sont donc pas fixés
‘aveuglément’ par le marché (libéralisme) ou par un appareil
d’état extensif (socialisme), mais il s’exprime sous forme de
dialogue au sein de la concertation sociale.
L’avantage d’un tel système est également qu’il permet
d’assurer une certaine continuité dans le temps. En effet,
dans les pays où le système de santé est intégralement géré
par l’Etat, l’orientation de la politique de santé peut basculer
rapidement au gré des changements dans la composition de
l’appareil dirigeant (gouvernement plus à droite ou à gauche)
sans que les acteurs de terrain aient leur mot à dire. Au
contraire, notre système a permis de maintenir une grande
stabilité en impliquant les partenaires de terrain durant les 65
ans d’existence de l’assurance maladie. Bien que les temps
aient changé et que la médecine ait évolué, les défis restent
les mêmes : comment pouvons-nous, en relation étroite avec
la population et ses besoins, garantir l’accès pour tous à des
soins de santé de qualité ?
Mais pourquoi fêtons-nous alors les 50 ans de l’assurance
maladie-invalidité ?
A sa création en 1944, l’AMI couvrait les risques de maladie
et d’invalidité des travailleurs salariés et de leur famille
uniquement. C’est la loi du 9 août 1963 (loi Leburton) qui
va scinder l’AMI en deux secteurs distincts : les soins de
santé et les indemnités, le tout chapeauté par un organisme
parastatal : l’Institut National de l’Assurance Maladie-Invalidité
et permettre d’élargir l’assurance soins de santé à toute la
population instaurant ainsi un système d’assurance maladie
4
3. Les grandes évolutions depuis 50 ans
3.1 Les années 60 et l’élargissement de la couverture de
l’assurance maladie-invalidité
Chronologiquement, le champ d’application de l’assurance
soins de santé fut d’abord élargi aux indépendants, uniquement
pour les ‘gros risques’ en 1964 et pour les ‘petits risques’ en
2008 seulement ! En effet, ce n’est qu’en janvier 2008 que
l’assurance libre ‘petits risques’, couvrant les consultations
médicales, les soins dentaires, les soins paramédicaux et
les médicaments ambulatoires, a été intégrée au sein de
l’assurance maladie obligatoire. A ce moment-là, 80 % d’entre
eux étaient déjà couverts pour les petits risques grâce à une
souscription à une assurance facultative auprès de leur
mutualité. Cette intégration a permis à tous les indépendants
et leurs personnes à charge d’être couvert de sorte qu’il n’y
a plus de différence entre salariés et indépendants quant aux
soins de santé remboursés par l’assurance maladie obligatoire.
Les cotisations sociales que versent les indépendants à leur
caisse d’assurance sociale ont été adaptées pour intégrer ces
nouveaux droits.
Elle fut ensuite élargie successivement aux fonctionnaires
(1965), aux handicapés physiques (1967), aux handicapés
mentaux (1968), aux travailleurs domestiques (1969) et aux
membres du clergé et communautés religieuses (1969). Par son
extension aux « personnes non encore protégées » en 1969,
l’assurance soins de santé couvrit enfin une très large partie
MC-Informations 254 • décembre 2013
de la population. L’assurance indemnités d’incapacité de travail
obligatoire pour les indépendants verra elle le jour en 1971.
3.2 L’introduction de la quote-part personnelle en 1972
Dans les années 1970, l’impact des deux crises pétrolières
et la montée du chômage ont fait entrer le pays dans une
période d’austérité. Dans le secteur des soins de santé, il
fallait maximiser l’accès aux soins de qualité sous contrainte
de ressources budgétaires. C’est dans ce contexte qu’ont été
introduits les premiers tickets modérateurs ou quotes-parts
personnelles dans le coût des soins.
Le ticket modérateur est la différence entre le tarif ou l’honoraire
prévu par les conventions et ce qui est remboursé par la
mutualité pour les prestations chez le médecins, à l’hôpital,
pour les médicaments, etc. Le ticket modérateur peut varier
fortement d’une prestation à l’autre, entre les secteurs et selon
qu’une personne bénéficie ou non d’une intervention majorée
de l’assurance maladie. Il s’agit donc d’une intervention
financière directement à charge des patients.
L’objectif du ticket modérateur consiste à responsabiliser le
patient par rapport à sa consommation de soins et à éviter
qu’il « abuse du système ». Bien que différents système de
protection tels que l’intervention majorée et le maximum
à facturer aient été mis en place pour garantir un meilleur
accès aux soins de santé aux populations plus vulnérables,
on observe malheureusement que l’existence de tickets
modérateurs constitue un frein à l’accès aux soins pour toute
une série de personnes. Selon la dernière enquête réalisée par
la MC à l’occasion des 50 ans de l’assurance soins de santé,
11 % des Belges doivent reporter des soins pour des raisons
financières. Cela concerne principalement les personnes en
invalidité (31 %), au chômage (28 %) et des isolés avec enfants
(23 %).
En conclusion, bien que l’intervention financière du patient
permette de conscientiser celui-ci au coût des soins de santé,
elle ne peut avoir pour conséquence que certains groupes de
patients reportent des soins. Le système de santé doit donc
encore être amélioré en tenant compte de cette problématique.
3.3 Renforcement de l’accessibilité financière en 1997
En Belgique, à partir de la fin des années 90, des mesures
ont progressivement été introduites pour pallier au fait que
l’assurance soins de santé ne couvre que partiellement les
coûts en matière de santé (en moyenne 25 % des frais de soins
de santé restent à charge du patient), ce qui constitue une réel
problème pour les populations plus vulnérables, tant sur le plan
financier que sur celui de la santé.
médicaux, médicaments...) a-t-il été élargi en 1997 à de nouvelles
catégories de bénéficiaires. Rebaptisé BIM (bénéficiaire de
l’intervention majorée), ce statut a été complété, en 2007, par
Omnio, un statut permettant aux ménages à revenus modestes
de bénéficier aussi des remboursements préférentiels. Dans la
même optique, le tiers payant (qui permet au patient de ne pas
devoir avancer les frais de santé à l’hôpital ou en pharmacie
et de payer uniquement sa quote-part) a été étendu aux
consultations et visites chez le médecin pour les patients à
faibles revenus (c’est le tiers payant social).
Par ailleurs, pour les malades chroniques et les ménages qui
accumulent des dépenses de soins de santé élevées, des
dispositifs ont également été mis sur pied tels que le maximum
à facturer et les interventions spécifiques pour les malades
chroniques (forfait de soins, forfait d’incontinence...).
En outre, d’autres dispositifs prévoyant des avantages financiers
pour le patient ont été mis en place tels que le dossier médical
global et les maisons médicales au forfait. On peut encore
citer les mesures prises dans le but de diminuer le prix des
médicaments, implants et prothèses tout comme celles visant
à limiter les suppléments facturés aux patients hospitalisés.
Enfin, des mécanismes ont également été développés pour les
personnes qui ne bénéficient pas de l’assurance soins de santé
telle que l’aide médicale urgente.
Malgré toutes ces mesures, de nombreuses études mettent
en évidence les difficultés rencontrées par certains ménages
à assumer financièrement des soins de santé. L’accessibilité
financière du système reste donc un défi important. Trois
mesures en cours d’élaboration entrent dans ce cadre : la
simplification de la réglementation relative à l’intervention
majorée (avec la création d’un statut unique pour début 2014),
l’instauration d’un statut de malades chroniques ouvrant
automatiquement au bénéfice de certains droits spécifiques
et l’élargissement du droit au tiers payant social, facilitant son
accès.
3.4 L’élargissement de l’AMI à tous les résidents en 1998
Dans tous les pays qui ont adopté le modèle bismarckien, la
sécurité sociale s’est peu à peu généralisée par l’extension
à des catégories de population initialement non protégées
(étudiants, travailleurs indépendants, personnes handicapées,
etc.). En Belgique, depuis le 1er janvier 1998, tous les résidents
ont accès au système d’assurance soins de santé. Aujourd’hui,
près de 99 % de la population est assurée. Les personnes non
assurées sont essentiellement les sans-papiers, les diplomates
ou encore les parlementaires européens.
Ainsi, le statut VIPO permettant d’être mieux remboursé pour
la plupart des soins médicaux (hospitalisation, honoraires
MC-Informations 254 • décembre 2013
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4. Etat des lieux de notre système de santé
4.1 Comment est gérée l’assurance obligatoire ?
L’assurance maladie-invalidité est gérée en Belgique par
l’INAMI, placé sous la tutelle du SPF Sécurité Sociale. Tous les
partenaires des soins de santé siègent au sein de ses différents
organes : les pouvoirs publics, les mutualités, les prestataires de
soins (médecins, dentistes, paramédicaux…) et les partenaires
sociaux (syndicats, employeurs, organisations de classes
moyennes). L’INAMI a pour mission de redistribuer le budget de
l’assurance maladie-invalidité entre les organismes assureurs
(soit les différentes unions nationales de mutualités, la caisse
auxiliaire et la caisse de la SNCB). Aussi bien l’élaboration que
le contrôle du budget ont lieu au sein des différents organes
de l’INAMI. Le budget global est divisé par secteurs de soins
(hôpitaux, médicaments, honoraires médicaux, maison de repos,
personnel infirmier…) représentés au sein de leur commission
de conventions respectives. En dehors de cette gestion globale
des moyens, l’institut a également pour mission :
• de gérer la nomenclature des soins de santé et de fixer les
tarifs de remboursement ;
• de conclure des accords entre les médecins et les mutualités
(conventions) ;
• de reconnaître l’invalidité ;
• de contrôler le fonctionnement des mutualités ;
• de gérer le système de responsabilité financière des mutualités.
Toutes ces missions sont exécutées au sein des différents
organes de l’INAMI dans le cadre d’une gestion paritaire. En
Belgique, les mutualités ne sont pas de simples organismes
payeurs uniquement chargés de rembourser les soins de
santé et de verser les allocations d’invalidité. Elle jouent un
rôle actif dans la détermination de la politique de santé du
pays tout comme tous les autres acteurs impliqués dans la
gestion de l’AMI (syndicats de travailleurs et employeurs,
représentant des prestataires et des institutions de soins…).
Les syndicats de travailleurs et employeurs, les représentants
des prestataires et des institutions de soins, les mutualités sont
des organisations qui défendent les intérêts de leurs membres.
Le modèle de gestion paritaire permet donc de dessiner la
politique de santé en tenant compte des informations et des
signaux émanant directement du terrain (des médecins, des
patients, des institutions de soins, des fournisseurs de matériel
de soins …).
4.1.1 Le Comité général de gestion
Le Comité général de gestion se compose paritairement
(1/4 des voix chacun) de représentants des employeurs, des
indépendants, des syndicats et des organismes assureurs. Cet
organe a dans ses compétences l’approbation du budget de
6
l’assurance soins de santé et indemnités et des comptes des
services de l’INAMI. Il octroi également les recettes organiques
(celles reçues de l’ONSS) aux services des soins de santé et
indemnités de l’INAMI.
4.1.2 Le Conseil général de l’assurance soins de santé
Il se compose paritairement de représentants des pouvoirs
publics, des travailleurs, des employeurs, des organismes
assureurs (1/4 des voix chacun). Les représentants des
prestataires/hôpitaux y ont une voix consultatives. Il a pour
mission d’élaborer la politique globale de soins de santé,
de fixer l’objectif budgétaire global annuel et de s’assurer
de la concordance entre les conventions signées avec les
prestataires et le budget global.
4.1.3 Le Comité de l’assurance soins de santé
Le Comité de l’assurance se compose paritairement des
représentants des prestataires de soins et des organismes
assureurs (1/2 des voix chacun). Les représentants des
employeurs et des travailleurs y ont une voix consultative. Les
missions de ce Comité sont de fixer les objectifs budgétaires
annuels partiels par secteur (médicaments, maisons de repos,
hôpitaux…), d’approuver les accords et les conventions
signées entre les prestataires de soins et l’INAMI, prendre
des décisions quant aux modifications de la nomenclature, de
rédiger les règlements concernant les conditions en matière
de droits aux prestations et de conclure des accords avec les
établissement de rééducation fonctionnelle.
4.1.4 Les Commissions d’accords et de conventions
Ces commissions se composent comme le Comité de
l’assurance (1/2 pour les OA et 1/2 pour les prestataires), les
représentants des travailleurs et employeurs en moins. C’est
au sein de ces commissions que se négocient les accords et
les conventions entre les prestataires et l’INAMI. C’est dans
ces accords que sont fixés les tarifs qui seront pratiqués
par les prestataires adhérant à la convention et la valeur
des remboursements qui seront accordés par les mutualités
pour les prestations relevant de l’assurance obligatoire, la
Commission la plus connue étant le fameuse Médico-mut où
se négocient les accords tarifaires entre le médecins et les
mutualités. On peut également citer la Dento-Mut (dentistesmutualités) ou les Commissions de maisons de repos, des
infirmières… A noter que ces commissions peuvent également
proposer des adaptations de la nomenclature. Aussi bien les
accords que ces adaptations de nomenclature devront ensuite
être validés successivement par le Conseil et le Comité général
de l’assurance soins de santé.
MC-Informations 254 • décembre 2013
4.1.5 La Commission de contrôle budgétaire
Parallèlement, la Commission de contrôle budgétaire est
chargée de diverses missions de surveillance sur les organes
précités (en particulier les Commissions d’accords et de
conventions et le Comité de l’assurance soins de santé). Dans
ce cadre, elle se doit de faire rapport, chaque trimestre, des
recettes et dépenses en soins de santé, elle est impliquée dans
l’élaboration des accords et conventions et exerce diverses
tâches de contrôle dans le cadre de ses compétences.
Au-delà, les Commissions d’accords et de conventions et le
Comité de l’assurance soins de santé sont également soutenus
par divers Conseils et Comités techniques spécialisés (médical,
dentaire, pharmaceutique, soins infirmiers…) et par un Conseil
scientifique dans les missions sont de contrôler l’aspect
scientifique et la qualité des soins. Ce Conseil scientifique est
également chargé de remettre des avis au Ministre en fonction.
Figure 1 : Organes de décisions de l’assurance soins de santé
COMITÉ GÉNÉRAL DE GESTION DE L'INAMI
Composition
Compétences
11/4 Organismes assureurs
Approbation du budget et des comptes des
services de l'INAMI
1/4 Pouvoirs publics
1/4 Rep. Employeurs
Octroi des recettes organiques aux services
soins de santé et indemnités
1/4 Rep. Travailleurs
CONSEIL GÉNÉRAL DE L'ASSURANCE SOINS DE SANTÉ
Composition
Compétences
1/4 Organismes assureurs
Elaborer politique globale soins de santé
1/4 Rep. Travailleurs
Fixation budget global
1/4 Rep. Employeurs
1/4 Pouvoirs publics
Voix consultative : Prestataires
COMITÉ DE L'ASSURANCE SOINS DE SANTÉ
Composition
Compétences
1/2 Organismes assureurs
Fixation budgets partiels
1/2 Prestataires
Approbation accords et conventions
Voix consultative : travailleurs et employeurs
Modifications nomenclature
Conditions droit aux prestations
COMMISSION DE CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
Composition
Compétences
Rep. Employeurs
Rapport trimestriel des recettes et dépenses
Rep. Travailleurs
Contrôle budgétaire accords/conventions
Organismes assureurs
/modifications nomenclature
Prestataires de soins
Pouvoirs publics
COMMISSIONS D'ACCORDS ET DE CONVENTIONS
Composition
Compétences
1/2 Organismes assureurs
Négocier les accords et conventions
1/2 Prestataires
Proposer adaptations nomenclature
MC-Informations 254 • décembre 2013
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4.2 L’INAMI seul à bord ?
4.3 Quelques caractéristiques de notre système de santé1
1
L’INAMI n’est pas le seul acteur actif dans le domaine des soins
de santé. En effet, d’autres organes interviennent dans les
domaines relatifs à l’assurance obligatoire et à l’organisation
des soins en Belgique.
Le SPF Santé Publique est notamment compétent pour
l’organisation et la planification des professions de la santé. Ces
missions tournent essentiellement autour de la programmation
pour les institutions de soins (répartition de l’offre de soins sur
le territoire) tels que les hôpitaux, les hôpitaux psychiatriques,
les maisons de repos et de soins…. Le SPF est également
compétent pour la fixation des normes d’agrément de ces
mêmes établissements (critères de qualité).
D’autre part, les Communautés et Régions sont également
compétentes dans une série de domaines relatifs à la santé.
Les Régions sont essentiellement compétentes pour la mise
en œuvre de la programmation, l’octroi d’agréments aux
institutions de soins et le subventionnement d’établissements
ou de structures de soins (hôpitaux, maisons de repos, services
intégrés de soins à domicile) dont les règles sont dictées par
le fédéral. Les Communautés sont, quant à elle, compétentes
dans les domaines de l’éducation sanitaire (médecine scolaire)
et la médecine préventive (vaccins, dépistages …).
4.3.1 Les dépenses de santé
En 2011, la Belgique aura consacré 10,5 % de son PIB (plus de 38
milliards d’euros) à la santé, ce qui est légèrement supérieur à
la moyenne européenne. Les dépenses de santé se répartissent
entre dépenses publiques (essentiellement l’assurance
maladie) et dépenses privées (tickets modérateurs, prestations
et médicaments non remboursés et assurances privées) dans
une proportion 75-25. Les patients belges supportent donc
25 % des dépenses totales de santé, ce qui est élevé par rapport
aux pays voisins. Il ne s’agit pas ici d’un phénomène transitoire
puisque cette répartition 75/25 s’observe depuis le début des
années 2000 et constitue donc une caractéristique stable de
notre système.
Les dépenses de santé se divisent ensuite en différents postes
donc les plus importants sont : les soins curatifs (aigus) et de
revalidation qui représentent 52,1% des dépenses totales, les
soins de longue durée (20,6 % des dépenses totales) et les biens
médicaux (essentiellement les dépenses pharmaceutiques)
qui comptent pour 17,1 %. Les dépenses gestion du système
de santé et de l’assurance maladie représentaient quant à
elles 5,2 % des dépenses totales. Par rapport à ses voisins, la
Figure 2 : Dépenses de soins de santé en % du PIB, répartition privé-public (source : OCDE 2011)
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
Dépenses privées
Dépenses publiques
1 Tous les chiffres repris dans cette section sont issus de la base de données Santé de l’OCDE
8
MC-Informations 254 • décembre 2013
Belgique se situe en dessous de la France (6,7 %), au même
niveau que l’Allemagne (5,3 %) et au dessus des Pays-Bas
(3,9 %) en termes de dépenses de gestion du système de santé.
4.3.2 L’offre de soins
Il y avait en 2011, 2,91 médecins en exercice pour 1.000
habitants en Belgique ce qui est inférieur à la moyenne des
pays de l’OCDE. En Europe, la plupart des pays compte une
densité de médecins plus importante qu’en Belgique. Les
médecins généralistes représentent 38,2 % de l’ensemble des
médecins en exercice ce qui est supérieur au résultats affichés
par l’Allemagne (18 %) et les Pays-Bas (24,6 %) mais inférieur
à la France (48,9 %). Les médecins spécialistes représentent
en Belgique le reste de l’effectif. Dans un avenir plus ou moins
proche, l’âge moyen du personnel médical actuel constituera
la principale menace concernant une éventuelle pénurie de
médecins dans plusieurs pays de l’OCDE. En Belgique, 28 % des
médecins étaient âgés entre 55 et 64 ans en 2011.
Concernant la personnel infirmier, la question de la pénurie de
personnel déjà dans notre pays causée notamment par des
nombreux départs en retraite (âge moyen du personnel infirmier
élevé), le vieillissement de la population, l’augmentation de
l’offre de soins en dehors de l’hôpital (infirmières à domicile) et
des conditions de travail parfois peu attractives.
La Belgique se caractérise également par une offre de lits
hospitaliers importante. Bien que le nombre de lits ait diminué
de manière constante entre 1997 et 2011, la densité pour 1.000
habitants reste élevée par rapport à d’autres pays européens
avec 6,4 lits pour 1.000 habitants en 2011. Cependant, la
diminution du nombre de lits s’est accompagné dans la plupart
des pays, y compris en Belgique, par une diminution de la durée
de séjour à l’hôpital.
Le nombre de CT2-scans et d’appareillages IRM3 a augmenté
rapidement dans la plupart des pays européens ces vingt
dernières années. Le nombre d’unités d’IRM par million
d’habitants a plus que doublé en moyenne dans les pays de
l’OCDE entre 2000 et 2009, atteignant 12,4 appareils en 2009,
contre 6 en 2000. Le nombre de scanners CT est passé quant à
lui de 19 par million d’habitants en 2000 à 22,6 en 2009. Tant pour
les scanners IRM que CT, le nombre d’examens a également fort
augmenté sur cette même période. Malgré l’impact positif que
cela peut avoir sur le diagnostic et le traitement des patients,
l’usage intensif de ces technologies médicales a également un
impact important sur les dépenses de soins de santé.
Figure 3 : Evolution du nombre de lits pour 100 000 habitants 2000-2011 (OCDE)
10,00
9,00
8,00
Belgique
7,00
France
6,00
5,00
Norvège
4,00
Danemark
3,00
Allemagne
2,00
Royaume-Uni
1,00
OCDE
0,00
2 Computed tomography
3 Imagerie par résonance magnétique
MC-Informations 254 • décembre 2013
9
Figure 4 : Nombre d’examens par CT et IRM (OCDE, 2009)
350
300
250
Nombre d'examens par scanners
CT pour 1000 hab (2009)
200
150
100
Nombre d'examens IRM pour
1000 hab (2009)
50
0
La Belgique se situe en tête de liste du nombre de scanners CT
effectués par millier d’habitants. Le nombre d’examens par IRM
y est aussi plus élevé que la moyenne des pays pour lesquels
les données sont disponibles.
chez certains spécialistes. Le prix d’une consultation ou d’une
visite à domicile chez le généraliste par contre est bien connu.
Pour certains, les honoraires à payer chez les dentistes et les
psychiatres sont parfois trop élevés. En outre, les résultats
de l’enquête révèlent aussi qu’il est parfois difficile d’obtenir
rapidement un rendez-vous auprès de certains spécialistes.
4.3.3 Les belges sont-ils satisfaits de leur système de santé ?
Différents indicateurs internationaux nous apprennent que, de
manière globale, la Belgique dispose d’un système de soins
de santé satisfaisant, plutôt performant et accessible aussi
bien géographiquement que financièrement (Eurobaromètre
de la Commission Européenne, Euro Health Consumer Index,
OCDE…).
Un Belge sur dix doit reporter des soins nécessaires en raison
de problèmes financiers. Les personnes qui doivent vivre d’une
indemnité suite à une maladie (de longue durée) ou au chômage
ainsi que les familles monoparentales sont particulièrement
vulnérables. En outre, il subsiste encore toujours des inégalités
sociales concernant l’état de santé et la consommation de
soins.
Afin d’approfondir et de nuancer ces résultats, la MC a mené
une enquête en ligne sur la satisfaction des belges par rapport
aux soins de santé à l’occasion des 50 ans de l’assurance
maladie. Au cours de cette enquête, 21.900 personnes de plus
de 18 ans ont exprimé leur avis concernant les soins de santé
en Belgique constituant ainsi un échantillon représentatif de la
population belge.
Si le Belge est très satisfait de son généraliste, dentiste et
spécialiste, l’enquête a toutefois révélé quelques points
négatifs. Ainsi, les répondants ne sont pas suffisamment
informés quant à ce qu’ils doivent payer chez le dentiste et
10
MC-Informations 254 • décembre 2013
5. Quel avenir pour l’assurance obligatoire ?
5.1.2 Une 6ème réforme de l’Etat
5.1 Un contexte économique et politique difficile
L’accord institutionnel pour la sixième réforme de l’Etat prévoit
le transfert d’un pan important de la sécurité sociale vers les
entités fédérées. Pour le secteur de la santé, ce n’est pas
moins de 16 % du budget de l’assurance maladie (soit plus
de 4,2 milliards sur les 24 milliards d’euros du budget soins de
santé en 2011) qui sera communautarisé notamment dans les
domaines des soins aux personnes âgées, de la première ligne,
de la santé mentale, des hôpitaux et de la prévention. En effet,
des compétences qui relèvent aujourd’hui de l’INAMI et du
SPF Santé Publique seront transférés aux entités fédérées qui
devront les accueillir dans un nouveau modèle de gestion. S’il
ne s’agit que de quelques pages dans l’accord institutionnel,
les changements seront néanmoins considérables.
5.1.1 Un financement sous tension
La Sécurité Sociale, et par extension l’assurance maladieinvalidité, est financée par 3 sources principales de recettes4 :
• les cotisations sociales des travailleurs et des employeurs
pour 60 % (2011) ;
• le financement alternatif (partie de la TVA et des accises)
pour 21,5 % (2011) ;
• des subventions directes de l’Etat pour 11,5 % (2011).
Les recettes de la Sécurité Sociale ont augmenté en moyenne
de 5,1 % en moyenne entre 2000 et 2011 tandis que les dépenses
de soins de santé ont augmenté de 6 % en moyenne par an sur
la même période. Les besoins de financement de ce secteur
ont donc augmenté plus rapidement que la croissance des
recettes. Si la gestion globale des moyens permet en partie de
répondre à ce genre de difficultés en transférant des moyens
d’un secteur de la Sécurité Sociale à l’autre, cela pose tout de
même certains problèmes de financement à long terme.
En effet, au fur et à mesure de son évolution, l’assurance
maladie obligatoire, initialement destinée aux travailleurs, s’est
étendue à de nouvelles catégorie de bénéficiaires (chômeurs,
résidents…) couvrant ainsi la quasi-totalité de la population
belge. Cependant, la source principale de financement est
constituée par les cotisations sociales que seuls les travailleurs
et leurs employeurs paient. Si des efforts ont été réalisés ces
dernières années pour modifier les sources de financement
(la part du financement alternatif est passée de 8 % en 2000
à 21,5 % en 2011 tandis que la part des cotisations sociales
est passée de 71 % à 60 %), l’Etat doit encore trop souvent
intervenir pour combler d’éventuels déficits. A noter également
que cette diminution de la part des cotisations sociales est
essentiellement le résultat d’une volonté politique de soutenir
le marché de l’emploi en diminuant les cotisations patronales,
plutôt que d’élargir les sources de financement de la Sécurité
Sociale. De nouvelles sources de financement doivent donc
être trouvées afin de protéger le financement du système des
mouvements et crises sur le marché de l’emploi et du cycle
économique. Nous en faisons d’ailleurs actuellement les frais.
Le climat économique défavorable de ces dernières années a
eu un impact direct sur le financement de la Sécurité Sociale
et de nombreuses mesures d’économies ont dû être mises en
œuvre dans le secteurs des soins de santé en 2013 et pour 2014.
Lors des discussions concernant le nouveau modèle de gestion
pour les compétences transférées, la MC a activement plaidé
pour la sauvegarde des grands principes qui ont fait le succès
de notre système de soins :
• les partenaires sociaux, acteurs de terrain, sont impliqués de
manière active dans la gestion et la définition de la politique
de santé ;
• l’organisation et la gestion du système est centralisée, et
permet dès lors d’adapter rapidement l’offre de soins aux
besoins ;
• les sources de financement (principalement les cotisations
sociales) sont garanties et permettent une réelle solidarité
entre tous les bénéficiaires du système de santé ;
• la gestion globale permet un arbitrage des politiques menées
et des glissements entre branches de la sécurité sociale
selon les besoins.
En septembre 2013, les quatre partis francophones ont fait une
proposition commune quant au futur modèle de gestion des compétences transférées en Wallonie et à Bruxelles. Il en ressort
que la plupart de ces grands principes seront préservés (gestion
globale et paritaire avec implications des partenaires sociaux et
des acteurs de terrain) et que le nouveau modèle devrait garantir
une coordination forte en la Wallonie et Bruxelles.
Du côté néerlandophone, aucune proposition concrète n’a
encore été formulée par les partis politiques. Cependant, un
livre ‘vert’ a été élaboré par l’administration flamande, tenant
compte de tous les avis qu’elle a reçus, décrivant les différents
modèles possibles. Ceux-ci vont d’un modèle où la privatisation
est envisagée (donc, où au moins une partie de la couverture
serait confiée aux assureurs privés, tandis que l’autorité
publique concentrerait son action sur une assurance de base,
pour des soins difficilement assurables ou à l’égard de ceux qui
4 Données 2000-2002 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 1999-2005
Données 2004-2006 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 2003-2010
Données 2007-2013 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 2007-2013
MC-Informations 254 • décembre 2013
11
n’auraient pas accès à la couverture privée) jusqu’à un modèle
où l’administration aurait tout en main. Le Parlement flamand
devra en débattre en fin d’année. Le débat sera probablement
tranché après les prochaines élections.
De manière générale, le nouveau modèle de gestion devra
également veiller à ce que les soins gérés par les entités fédérées restent accessibles financièrement et géographiquement tout en garantissant un niveau de qualité élevé. En
effet, le transfert de compétences présente un risque pour le
portefeuille des patients (si les budgets transférés s’avèrent
insuffisants, ce seront les patients qui devront financer
directement) mais aussi risque de concurrence entre entités
fédérées (ce serait le cas si, par exemple, il devenait plus
intéressant pour les infirmières de travailler en Wallonie plutôt
qu’à Bruxelles ou inversement). Cependant, la création d’un
organe de concertation entre les différentes entités devrait
limiter ce dernier phénomène.
5.2 Des défis de taille
5.2.1 Le vieillissement de la population
Le vieillissement de la population aura certainement un
impact important sur les dépenses de soins de santé et sur
l’organisation de notre système de soins. Car si les dépenses
liées au soins de longue durée ont déjà fortement augmenté ces
dernières années (elles représentaient 16,3 % des dépenses
totales en 2003 contre 20,6 % en 20115), il ne faut pas oublier
que le véritable boom démographique aura lieu après 2025,
lorsque la génération du baby-boom atteindra les 80 ans. Il
nous reste donc encore 10 ans pour nous y préparer et adapter
notre système de soins de santé aux nouveaux besoins de cette
population.
Dans ce domaine, et depuis longtemps déjà, la MC articule
ses revendications autour de deux axes. Le premier concerne
le développement des soins et des aides à domicile ainsi que
d’infrastructures intermédiaires de soins telles que les centres
de courts séjours, les centres de soins de jour, les centres de
revalidation afin de créer un réel continuum de soins centré
sur les besoins de la personne et permettre ainsi à chacun
de rester le plus longtemps chez soi. Mais une telle politique
ne pourra voir le jour que si le financement (déjà largement
insuffisant) du secteur des soins à domicile est complètement
revu. Il faut, de plus, veiller à ce que toutes ces formes de soins
soient financièrement abordables pour les membres.
D’autre part, l’institutionnalisation restera la réponse la plus
adaptée aux besoins de certaines personnes en grande
perte d’autonomie et nécessitant des soins lourds. Il est donc
impératif de prévoir également une offre de qualité et un
financement suffisant du secteur des maisons de repos.
5.2.2 La progression des maladies chroniques
Si nous vivons aujourd’hui plus longtemps que par le passé
grâce, notamment, au progrès de la médecine, il est vrai aussi
que nous vivons plus souvent avec une ou plusieurs maladies
chroniques. En effet, les nombreux progrès de la médecine
ont eu également pour effet que certaines maladies mortelles
auparavant se sont chronicisées (sida, cancers,…). D’après la
dernière enquête de santé (2008), plus d’un belge sur quatre
serait atteint d’une maladie chronique. Si cela entraine
certainement une pression à la hausse sur les dépenses de
santé, ces personnes représentent un groupe de patients
particulièrement vulnérables dont les dépenses de soins
peuvent être particulièrement élevées.
De nombreux efforts ont été consentis depuis la création
de l’assurance obligatoire afin d’améliorer l’accessibilité
financière des soins de santé. Si certaines mesures sont
spécifiquement conçues pour aider les malades chroniques (création du statut malade chronique, du maximum à
facturer spécifique pour les malades chroniques,…); parfois,
des mesures générales ont également joué un rôle crucial pour
ce groupe spécifique (élargissement de l’assurance maladie
à de nouveaux types de bénéficiaires, l’intervention majorée).
Malgré ces évolutions positives, l’accessibilité des soins reste
un problème pour ce groupe de patients. À l’avenir, il faudra
continuer à déployer des efforts pour améliorer l’accessibilité
financière des soins de santé en général et plus particulièrement
pour les malades chroniques. La MC a fait œuvre de pionnier
dans le domaine des enquêtes sur la situation financière des
malades chroniques et a joué un rôle moteur dans des mesures
importantes. C’est un rôle que la MC va continuer à remplir à
l’avenir.
5.3 Pistes de réflexion pour assurer l’avenir de notre
système de santé
5.3.1 Assurer l’avenir financier de notre système
Afin d’assurer la pérennité de notre système d’assurance,
deux options complémentaires s’offrent à nous : continuer à
diversifier et à élargir la base de financement de la Sécurité
Sociale et donc de l’assurance maladie (augmenter les
recettes) et augmenter l’efficience de notre système (faire plus
ou mieux à niveau de dépenses donné).
5 Source : Statistiques de Santé, OCDE
12
MC-Informations 254 • décembre 2013
Comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, les sources de
revenus « classiques » telles que les cotisations sociales, le
financement alternatif et les subventions de l’Etat, ne seront
plus à l’avenir suffisantes pour répondre aux besoins des
assurés belges. Dans ce cadre, différentes pistes de réflexion
peuvent être évoquées. Premièrement, une partie plus
importante de la TVA pourrait financer l’assurance maladie,
en particulier la TVA sur les produits tels que les boissons
sucrées, l’alcool, le tabac ou l’essence. Une autre idée déjà
largement évoquée serait l’introduction d’une cotisation
sociale généralisée (CSG) que tous les bénéficiaires de la
Sécurité Sociale devraient verser et non pas seulement
les travailleurs et les employeurs. Cette option permettrait
d’élargir la base de financement de la Sécurité Sociale et de
le rendre plus indépendant de la conjoncture sur le marché du
travail. De manière plus globale, c’est l’ensemble du système
fiscal belge qui devrait être réajusté afin de mettre en place
une taxation plus équilibrée entre les revenus du travail et
ceux du capital. En effet, le patrimoine accumulé par les
ménages (foncier ou financier) pourrait devenir une source
de perception de cotisation supplémentaire élargissant ainsi
l’assiette de financement de la Sécurité Sociale.
D’autre part, il est également nécessaire de revoir le fonctionnement actuel de notre système de santé et d’augmenter
son efficience. Ici aussi de nombreuses pistes de réflexion
peuvent être évoquées :
• Une réforme approfondie du système de financement des
hôpitaux sera tôt au tard nécessaire. Le système actuel de
financement est inflationniste. En effet, la plus grosse partie
des recettes hospitalières est encore liée au nombre de
prestations effectuées : soit directement via les honoraires
des médecins exerçant dans l’hôpital, soit indirectement
via l’enveloppe fermée qu’est le Budget des Moyens
Financiers (BMF) des hôpitaux. Actuellement, pour obtenir
un financement plus important un hôpital doit conserver
ses lits « justifiés » ce qui implique de devoir prester chaque
année de plus en plus pour conserver sa part dans le budget
total des hôpitaux. Le financement à la prestation devrait être
progressivement remplacé par un financement forfaitaire par
pathologie également appelé financement all-in6. Ce type de
financement prévoit un montant fixe par type de patient et/
ou de pathologie et implique que nous ne prenions plus en
compte les efforts réels déployés dans le cadre d’un épisode
de maladie mais que nous procédions à une estimation
de l’effort « moyen » (justifié), celui-ci devant être rétribué
de manière équitable. Le défi consiste donc à évoluer
correctement les besoins en termes d’actes de diagnostics et
thérapeutiques et à leur attribuer une rémunération réaliste
et équilibrée.
• Un domaine dans lequel nous devrons également rationaliser
nos dépenses est celui des médicaments. Ces 20 dernières
années (1990-2010), les dépenses pharmaceutiques ont
augmenté de 6,8 % par an en moyenne. Cette hausse a été
supérieure à celle des dépenses totales en soins de santé,
qui ont connu une augmentation de annuelle 6,0 % sur la
même période7. Afin de garder le contrôle sur cette hausse
des dépenses, les pouvoirs publics ont mis en place depuis
2001 une série de mesures visant à promouvoir la délivrance
de médicaments moins chers (remboursement de référence,
prescription en DCI, imposition d’un quota de prescriptions
de médicaments moins chers, substitution générique). Si
ces mesures ont largement permis d’augmenter la part de
médicaments bons marché, d’autre initiatives concrètes
pourraient encore être mises en place afin de promouvoir les
médicaments moins chers8. En effet, cette dernière décennie,
nous aurions pu nous attendre à voir les dépenses pour les
médicaments diminuer suite à l’introduction de toutes les
mesures mentionnées ci-dessus. Ces économies auraient
pu être utilisées pour financer de nouveaux médicaments,
souvent onéreux, à haute valeur ajoutée thérapeutique.
Cependant, sur cette même période nous constatons une
augmentation nette de 4 % des dépenses pour les médicaments
remboursés. Ceci s’explique en partie par l’introduction dans
le système de remboursement de nouvelles spécialités très
onéreuses, mais surtout par la croissance très importante
(+20 % entre 2008 et 2012) des volumes consommés. Des
mesures concrètes devront donc être prises pour contrôler le
volumes de médicaments prescrits, notamment en analysant
les comportements de prescription des prestataires et en
les responsabilisant davantage. Cependant, les prestataires
ne sont pas les seuls responsables de la surconsommation
de médicaments dans notre pays. Nous devons poursuivre
nos efforts en termes d’éducation du patient et souligner
l’importance d’une consommation plus « appropriée » des
médicaments. Un exemple concret est la campagne menée
pour une consommation plus adaptée des antibiotiques.
• Accroître l’informatisation de notre système et continuer à
favoriser l’échange d’information sera essentiel à l’avenir
si nous voulons augmenter l’efficience de notre système.
Nous devrons réaliser le dossier médical et pharmaceutique
électronique de sorte que tous les partenaires impliqués
dans les soins de santé (prestataires de soins, organismes
assureurs,…) puissent avoir accès à l’information de manière
simplifiée, l’échanger et l’utiliser afin d’organiser les soins de
manière optimale autour du patient.
6 Pour plus d’informations sur ce sujet, voir bibliographie (Crommelynck A., Degraeve K., Lefèbvre D.)
7 Lambert M et al. (2011) L’AMI en chiffres 2011, page 19, Publication MC 2011
8 Pour plus d’informations sur ce sujet voir bibliographie (Koen Cornélis)
MC-Informations 254 • décembre 2013
13
• Si l’innovation dans le secteur médical nous a permis
d’améliorer considérablement la santé de la population et
d’augmenter l’espérance de vie, nous devons à l’avenir nous
baser d’avantage sur l’Evidence Based Medecine (EBM) et les
analyses coûts-bénéfices pour choisir de manière rationnelle
les nouveaux traitements, appareillages, médicaments pour
lesquels l’assurance maladie souhaite investir. D’autre
part, il faudra d’avantage mettre en place des contrats de
type « prix-volume » pour favoriser les économies d’échelle
notamment dans le secteurs du matériel médical.
• Il est également nécessaire de poursuivre l’examen et
la modernisation de la nomenclature afin que celle-ci
corresponde d’avantage à la réalité de terrain sans pour
autant diminuer la masse totale d’honoraires médicaux.
• Les mutualités ont également un rôle à jouer dans ce
domaine. En effet, en leurs donnant les outils nécessaires
pour organiser les soins (notamment en augmentant la
responsabilité financière des organismes assureurs), elles
pourraient elles aussi contribuer à l’efficience du système.
Les organismes assureurs pourraient par exemple conclure
des accords avec certains prestataires de soins qui garantiraient la mise en place de soins accessibles et de qualité
pour leurs membres.
• Il faudra également donner une place plus importante
à la prévention qui pour l’instant ne représente que 3 %
des dépenses totales de santé. Cela est particulièrement
important du fait que l’espérance de vie et l’état de santé
sont essentiellement déterminés par les comportements
individuels et moins par les caractéristiques du système
de soins. Ici aussi les mutualités ont un rôle à jouer et
s’impliquent d’ailleurs déjà dans ce domaine.
5.3.2 Garantir des soins accessibles, de qualité et lutter
contre les inégalités sociales de santé
Tout en veillant à garantir la soutenabilité de notre système
d’assurance maladie dans un contexte d’économies, nous
devrons toujours garantir des soins et des services accessibles
financièrement, de qualité et répartis de manière efficiente sur
l’ensemble du territoire. Dans ce cadre, nous devons porter une
attention particulières aux questions suivantes :
• Nous devons éviter une privatisation trop importante du
secteur des soins de santé. Elle engendre deux risques
majeurs en fonction du type de privatisation que nous
considérons. Le premier type de privatisation concerne les
assureurs. On distingue en Belgique deux types d’assureurs :
les mutualités (sans but lucratif) et les compagnies
d’assurances commerciales. Le système mutualiste belge
est basé sur différentes valeurs telles que la solidarité, la
non discrimination et la non exclusion. Au sein d’une même
mutualité, tous les membres paient la même cotisation
et bénéficient des mêmes services. Toute personne peut
venir s’affilier à une mutualité quel que soit son état de
santé et n’en sera jamais exclue parce qu’il tombe malade
14
et qu’il coûte cher. Au contraire, pour être couvert par une
assurance commerciale, l’assuré doit répondre à une série
de critères. Il paiera des primes différentes suivant le risque
qu’il représente et si jamais son état de santé s’aggrave
considérablement sa compagnie d’assurances peut décider
de ne plus le couvrir. Dans ce type de modèle, les « bons »
risques sont favorisés par rapport aux « mauvais » risques en
payant des primes plus faibles.
Le deuxième type de privatisation concerne directement les
prestataires de soins (maisons de repos ou cliniques privées
par exemple). Ces cliniques privées attirent de nombreux
médecins réputés qui y pratiquent des tarifs que seule une
partie limitée de la population peut se permettre. De même,
les prix d’hébergement dans les maisons de repos privées
varient considérablement et ne sont pas accessibles à tous.
Toutes ces évolutions contribuent au développement d’une
médecine à deux vitesses dans laquelle seuls ceux qui ont
les moyens peuvent se payer des soins de qualité. C’est
principalement contre ce phénomène que les mutualités
luttent.
• En Belgique, la part des dépenses de soins de santé qui
reste à charge des patients est encore élevée (25 %)
et, pour de nombreuses personnes, il existe encore une
barrière financière importante, en particulier pour les soins
spécialisés, les soins dentaires et les médicaments. Ces
dépenses à charge se décomposent en tickets modérateurs et
suppléments pour les prestations et médicaments remboursés
par l’assurance maladie, le coût complet des prestations
et des médicaments non remboursés ainsi que les primes
d’assurances facultatives hospitalisation (les courvertures
complémentaires souscrites auprès des mutualités ou des
compagnies d’assurances commerciales). Afin de réduire
cette part à charge du patient, le caractère assurantiel de
l’AMI doit être renforcé. Nous devons souligner l’importance
du système de concertation sociale et de conventionnement qui ont pour objectif de garantir une protection
financière aux patients. Il est nécessaire de créer d’avantage
d’incitants au conventionnement et de penser à l’abolition
du système de conventionnement partiel. Les différences
de remboursement entre les médecins conventionnés et les
autres devraient également être réexaminés. Une autre piste
pour protéger les patients serait de plafonner les admissions
en chambre double à 250 euros à charge du patient. Cette
tâche et sa surveillance pourrait être effectuée par les
mutualités.
• L’amélioration de la situation financière des invalides doit
également être poursuivies, en particulier celle des chefs de
ménage. Le pécule de vacances et les allocations familiales
complémentaires pour les invalides doivent également être
réexaminés (augmenter le pécule de vacances et majorer
les allocations familiales pour les chefs de famille). La mise
en place d’une politique de réactivation des personnes en
invalidité méritent également toute notre attention. Dans la
mesure où cela bénéficie au travailleur et à l’employeur, il
faudrait clairement le communiquer. Dans ce domaine, les
mutualités devraient pouvoir soutenir leurs membres aussi
MC-Informations 254 • décembre 2013
bien sur le plan de la santé que sur le plan administratif.
• Afin de réduire les inégalités sociales de santé, nous
devons mettre en place des politiques transversales qui
agissent sur les différents déterminants de la santé :
niveau de revenus, d’éducation, chômage, logement… tout
en continuant à promouvoir des mécanismes tels que le
maximum à facturer, le statut BIM/OMINIO ou le tiers-payant
social qui ont pour objectif d’augmenter l’accessibilité
financière au soins de santé. D’autre part, nous constatons
que les personnes plus vulnérables ne consomment pas
seulement moins de soins (report de soins plus fréquents,
moins de visites chez le dentiste et le spécialiste) mais ils
les consomment aussi différemment (plus de visites aux
urgences par exemple). Dans ce contexte, nous devons
également soutenir le développement des maisons médicales
car celles-ci sont souvent bien intégrées dans les quartiers
où vivent des populations plus fragilisées.
Il faudra à l’avenir veiller à offrir non seulement des soins
accessibles et abordables mais également de qualité. En
Belgique, comme dans la plupart des pays, la qualité des soins
est considérée depuis toujours comme la responsabilité quasi
exclusive des professionnels de la santé. Or, de nombreux autres
acteurs ont également un rôle à jouer dans ce domaine. Que ce
soit les autorités publiques, les mutualités ou les chercheurs,
tous ont leur contribution à apporter à l’édifice9. Dans ce
domaine, plusieurs initiatives peuvent être mentionnées :
• Poursuivre la mise en place, en collaboration avec les entités
fédérées, d’indicateurs de qualité permettant aux hôpitaux et
autres institutions et prestataires de soins de mesurer leur
performance et leur qualité mais aussi de travailler sur leurs
points faibles.
• Mettre en œuvre un système de rémunération lié à la
bonne application de ces critères de qualité et favoriser le
remboursement des traitements qui ont lieu dans des institutions/lieux réputés pour leur expertise concernant le
traitement en question.
• Développer des indicateurs de qualité qui ne mettent pas
uniquement l’accent sur la vérification des ressources
(normes de personnel, matériel nécessaire, superficie règlementaire…), ce qui est le cas aujourd’hui via les inspections
des hôpitaux et des institutions de soins, mais également sur
la qualité des processus (comment sont faites les choses)
et des résultats. A terme, if faudra favoriser le passage d’un
système d’agrément des institutions de soins (qui se base
uniquement sur des critères de qualité et de suffisance des
ressources) vers un système d’accréditation des institutions
de soins qui se baserait sur des critères de ressources, de
processus et de résultats.
• Favoriser une plus grande transparence dans ce domaine
via l’analyse et la publication des évaluations de qualité et
des différences de pratique. Dans ce domaine, l’Evidence
Based Medecine et la formation continue seront des outils
incontournables.
• Les mutualités ont, ici, également un rôle à jouer. En évoluant
vers un système de responsabilité forte des organismes
assureurs et des prestataires de soins basé sur des
indicateurs de qualité, la tâche de contrôle d’application de
ces critères pourrait revenir aux mutualités.
5.3.3 Adapter notre offre de soins aux besoins futurs :
adopter une approche intégrée de soins autour du
patient
En raison du vieillissement de la population et de la progression
des maladies chroniques, les besoins des patients se modifient,
notamment en termes de soins de longue durée. A l’avenir, il
faudra partir de ceux-ci et non plus des structures fédérales,
régionales ou communautaires pour construire une politique de
santé plus intégrée en termes de financement et d’organisation.
Ceci implique de :
• Renforcer la première ligne : le rôle du médecin généraliste
comme voie d’entrée dans le système de santé doit être
réaffirmé et se traduire en une collaboration saine et coordination avec les autres acteurs de la première ligne et de la
deuxième.
• Favoriser les soins dans l’environnement du patient et le
maintien à domicile. La réforme en santé mentale (‘Psy 107’)
est un excellent exemple de ce type d’initiatives. Dans ce
cadre, il faut :
-Financer davantage et de manière adéquate les soins
infirmiers à domicile ;
- Opérer un transfert / un glissement de financement entre
le secteur hospitalier et ambulatoire. Il faudra à l’avenir
financer en fonction des besoins et non en fonction des
prestataires. Dans ce cadre, il faut mettre la priorité sur la
reconversion des moyens destinés aux soins aigus vers la
revalidation et la convalescence.
9 Pour plus d’informations sur ce sujet, voir bibliographie (de Béthune X.)
MC-Informations 254 • décembre 2013
15
6.Conclusions
En 50 ans, l’assurance maladie obligatoire est passée par des
nombreux changements et offre aujourd’hui une protection
large à plus de 99 % de la population belge contre les risques
de santé. Par le passé, elle a déjà dû faire face à des crises
économiques et politiques mais elle en est toujours sortie
grandie. Aujourd'hui encore, l'avenir de l'assurance maladieinvalidité est compromis et plus que jamais nous devons trouver
des solutions pour garantir la soutenabilité à long terme de
notre système. De plus, pour la première fois depuis sa création
un pan entier de la Sécurité Sociale sera transféré aux entités
fédérées. Dans cette bataille, nous ne devons oublier ni nos
principes fondateurs: solidarité et implication des différents
acteurs de terrain (prestataires de soins, représentants des
travailleurs et employeurs, mutuelles, associations...) ni nos
objectifs : offrir des soins de santé accessibles et de qualité qui
répondent aux besoins de tous.
Bibliographie
Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes (1991) : La mutualité aujourd’hui et demain. Editions Duculot (1991).
Cornelis K. (2013) : La politique en matière de médicaments
moins chers en Belgique. Alliance Nationale des Mutualités
Chrétiennes, MC-Info n°253 (Septembre 2013). Crommelynck A., Degraeve K., Lefèbvre D. (2013): L’organisation
et le financement des hôpitaux. Alliance Nationale des
Mutualités Chrétiennes, MC-Informations n°253 (Fiche Info,
septembre 2013).
Daloze C., Delvaux J., Gillis O., Tecchiato C. (2013): 50 ans de
protection solidaire. Journal En Marche n°1499 (20 juin 2013).
de Béthune X. (2013) : La qualité des soins en milieu hospitalier,
un monde bouillonnant de changements. Alliance Nationale des
Mutualités Chrétiennes, MC- Informations n°251 (mars 2013).
Gillis O. (2008) : La mutualité Chrétienne et l’Assurance MaladieInvalidité. Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes. 2008
Kesenne J. (2010) : L’avenir de notre système de soins de
santé. Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes - MCinformations n°240 (juin 2010).
Regueras N. (2012) : Analyse des données OCDE 2011 : Mise
en perspective des soins de santé belges au regard de
l’Europe. Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes - MCinformations n°247 (mars 2012).
Vancorenland S. (2013) : L’évolution de la politique en faveur
des malades chroniques. Alliance Nationale des Mutualités
Chrétiennes, CM- Informations n°252 (Juin 2013).
Vancorenland S., Peters B., Avalosse H., Gillis O. (2013): Les
Belges sont-ils satisfaits des soins de santé ? Présentation
de l’enquête « 50 ans de l’assurance maladie ». Alliance
Nationale des Mutualités Chrétiennes, CM- Informations n°253
(Septembre 2013). 16
MC-Informations 254 • décembre 2013
50 ans AMI
La nomenclature des prestations de santé : instrument
de répartition du budget fédéral entre les prestataires
de soins de 1963 à 2013
Rob Van Den Oever, Crista Volckaert – Cellule politique de santé
1.Introduction
Tout le monde s’accorde à dire qu’en raison des inégalités face
à la maladie et de l’incertitude quant à l’influence des soins
médicaux sur l’état de santé de la population, un régime de libre
marché, régi par l’offre et la demande, conduit inexorablement
à une utilisation inefficace et à une répartition inégale des
soins. L'accès aux soins de santé pour les patients est en
grande partie déterminé par leur accessibilité financière. C'est
précisément ce postulat qui fonde l'assurance soins de santé
obligatoire : chaque citoyen a droit à des prestations de soins
de qualité et il convient d'éviter autant que possible l'apparition
d'une médecine à deux vitesses, où la qualité et l’accès est
tributaire des moyens financiers du patient.
En guise d'alternative au libre marché et afin de préserver
l'équilibre financier du système de sécurité sociale financé
par la collectivité, l'État a décidé, de par la loi Leburton de
1963, de mettre sur pied un modèle de concertation sociale. Le
système de santé en Belgique est un système où les pouvoirs
publics formulent les objectifs généraux de la politique de
santé et fixent chaque année le budget nécessaire pour les
atteindre, mais où sa mise en œuvre est en principe laissée
aux partenaires sociaux traditionnels (employeurs-employés)
et aux premiers concernés : les organismes assureurs et les
prestataires de soins. L'accessibilité financière et à l’offre de
soins pour le patient, de même que l'équilibre financier du
budget, doivent être réalisés par la conclusion d'accords et de
conventions tous les deux ans entre les organismes assureurs
et les prestataires de soins. Dans ce cadre, le montant des
honoraires et le niveau de remboursement des prestations
de santé sont fixés et les règles d'application sont convenues
collectivement.
Le contrôle des dépenses de l'assurance soins de santé peutil être garanti dans un modèle de consensus impliquant les
mutualités et les prestataires de soins ? N'est-il pas temps
que le contenu et la mise en œuvre de l'assurance soins de
santé obligatoire soient déterminés de façon exclusive par les
pouvoirs publics ?
Les dépenses totales, aussi bien publiques que privées, des soins
de santé augmentent chaque année dans les pays occidentaux
industrialisés où les systèmes de sécurité sociale sont fort
développés. Avec une proportion légèrement supérieure à 10 %
de son PIB accordé aux soins de santé, la Belgique se situe
dans la moyenne des pays d'Europe occidentale.
L’origine de cette augmentation des dépenses (au-delà de la
croissance du PIB) est connue et identique dans la plupart
des pays : augmentation de la demande en soins de santé
pour raisons démographiques (vieillissement de la population),
avènement de nouvelles technologies, augmentation des coûts
du personnel et empowerment du patient (par l'éducation et les
soins auto-administrés).
Le vieillissement de notre population entraine en effet un besoin
croissant en soins de santé, surtout en soins chroniques, et la
prise en charge d'un nombre croissant de maladies d'usure
(dégénérescences), dont le traitement est moins curatif que
symptomatique.
On constate par ailleurs une plus grande demande en soins
de santé de la part de la population, surtout plus âgée, qui
résulte d'une plus grande accessibilité des soins spécialisés.
L'augmentation progressive des consultations auprès des
spécialistes et la médicalisation accrue d'une série de
désagréments et de petits maux du quotidien, pour lesquels
une solution est recherchée à tort dans la médecine, illustrent
cet état de fait.
De même, la croissance exponentielle des technologies médicales, qui offrent sans cesse plus de possibilités, essentiellement
diagnostiques, et l'apparition d'appareils et de prothèses
toujours plus sophistiqués, en association à des médications
particulièrement onéreuses, surtout les médicaments antitumoraux, mais pas toujours accompagnés d'un investissement
thérapeutique efficace et responsable, contribuent aussi à
l’augmentation globale des coûts des soins de santé.
L'augmentation des coûts du personnel dans un secteur des
soins de santé qui requiert énormément de main-d'œuvre (loi
de Baumol), la multiplication des initiatives coûteuses en soins
préventifs et l'utilisation croissante de matériel médical à usage
unique, toujours plus cher, forment d'autres facteurs expliquant
la croissance des dépenses.
MC-Informations 254 • décembre 2013
17
Figure 1 : Dépenses totales en soins de santé en pourcentage du PIB en 2010 (Source : OCDE, 2012)
2 0 ,0
1 8 ,0
1 6 ,0
1 4 ,0
% GDP
1 2 ,0
1 0 ,5 1 3 9
1 0 ,0
8 ,0
6 ,0
4 ,0
2 ,0
Figure 2 : Nombre de consultations/visites de médecins généralistes et de médecins spécialistes
60.000.000
50.000.000
40.000.000
30.000.000
20.000.000
10.000.000
Médecins généralistes
Médecins spécialistes
0
1995
2000
2005
*Petits risques pour indépendants à partir du 01/01/2008
18
MC-Informations 254 • décembre 2013
2010*
H ongrie
S l o v aq u i e
S l o v én i e
I r l an d e
Auu str al i e
F i n l an d e
I sl an d e
G r èc e
I tal i e
N o r v èg e
E sp ag n e
Roo y au m e - U n i
S u èd e
Jap o n
P o r tu g al
N o u v el l e- Z él an d e
Beel g i q u e
A u tr i c h e
D an em ar k
S u i sse
C an ad a
A l l em ag n e
F r an c e
P ay s- B as
Éttats- U n i s
0 ,0
Enfin, l'empowerment du patient (influencé ou non par les
médias et l'Internet) joue un rôle sans cesse croissant dans la
création d'attentes souvent déraisonnablement élevées chez les
patients et leurs familles vis-à-vis de la médecine moderne et de
ses moyens (limités) lors de la prise en charge et du traitement
d'affections complexes et/ou potentiellement mortelles.
Les dépenses totales en soins de santé dans un pays donné
ne sont toutefois pas directement liées à la quantité totale de
soins prestés et à la santé de sa population, si cette dernière
est mesurée à l'aune de paramètres tels que l'espérance de vie
à la naissance et la mortalité périnatale. Plus de dépenses en
prestations de santé ne signifient donc pas automatiquement
une amélioration de la santé publique. Les pays occidentaux
se posent aujourd'hui légitimement la question de savoir quel
montant doit et peut être consacré exactement aux soins de
santé en termes de pourcentage du PIB (Savedoff, 2007).
Ajoutons enfin que le choix de la meilleure façon de payer les
prestataires de soins en utilisant les meilleurs systèmes de financement et de rémunération (et les plus complémentaires) afin
de stimuler la dynamique et la motivation des médecins et des
institutions à prodiguer des soins de qualité, est au moins aussi
important que le budget total à accorder aux soins de santé.
La nomenclature des prestations de santé constitue l'instrument
de travail par excellence pour pouvoir répartir le budget public
des soins de santé entre les différents prestataires de soins
par l'intermédiaire d'accords et de conventions. Elle constitue
également un paramètre de mesure de l'usage des prestations
de soins (épidémiologie clinique) et, indirectement, des besoins.
Après 50 années d'utilisation de la nomenclature dans le cadre
d'un paiement à la prestation du prestataire de soins, les
critiques du modèle actuel de l'assurance soins de santé, et de
sa nomenclature en tant qu'instrument de travail, s'intensifient.
La question est aujourd'hui de savoir si la nomenclature
caractérisée par un financement à la prestation doit être
entièrement repensée et remplacée par l'une ou l'autre forme
forfaitaire de financement des soins.
2. La nomenclature belge des prestations de santé
2.1 La conclusion d’accords sur les honoraires et les tarifs de
remboursement
Bien avant l’introduction de l’assurance soins de santé
obligatoire en 1963, il existait déjà certains accords tarifaires
avec les prestataires de soins. Les mutualités locales et les
fédérations de mutualités essayaient en effet de conclure des
« accords » avec les médecins et les pharmaciens de leur région
afin de fixer les honoraires facturés à leurs affiliés. De 1920 à
1944, nous avons connu un système d’honoraires maximums
pour les consultations, applicable aux remboursements (afin
d’éviter que les médecins ne demandent des honoraires
trop élevés) et aux tickets modérateurs (afin d’éviter la
surconsommation par le patient).
Dans le sillage du modèle allemand de Bismarck, il existait en
Belgique un intérêt grandissant pour la mise sur pied d’une
assurance soins de santé obligatoire. Il fallut finalement
attendre le terme de la Deuxième Guerre mondiale pour que
l’arrêté-loi du 24 décembre 1944 instaure une assurance soins
de santé et invalidité obligatoire pour les travailleurs salariés.
Cette forme d’assurance soins de santé ne constituait toutefois
qu’une simple garantie de tarif de remboursement fixe et
non une couverture des frais réels de la prestation de soins.
Pendant des années, les interventions n’ont pas été adaptées
et n’étaient aucunement en lien avec les honoraires réellement demandés et payés. Les honoraires pour un même
acte et pour une même discipline médicale pouvaient ainsi
connaître de très grandes disparités en fonction d’une série
d’impondérables, en grande partie déterminés par le médecin
lui-même. Le tarif de remboursement était donc bien établi,
mais pas encore la contribution personnelle du patient.
De façon paradoxale, l’assurance soins de santé obligatoire
de 1945 impliqua une réduction du degré de protection de
nombreux assurés comparativement à la situation précédente.
En effet, la protection sociale obligatoire déjà généralisée a été
à l’origine d’une augmentation des honoraires pratiqués. Ainsi,
le ticket modérateur, qui existait préalablement sous la forme
d'une contribution personnelle limitée aux coûts des soins
médicaux (dans le but de limiter la surconsommation), devint
un seuil financier insurmontable pour de nombreux assurés
sociaux. Il n'existait donc d'une part aucune base légale
permettant la conclusion de véritables accords tarifaires, mais
il y avait d'autre part de nombreux groupes de la population
(indépendants, religieux, étudiants, handicapés) non couverts
par l'assurance soins de santé existante.
Enfin, l'arrêté-loi de 1944 tenait insuffisamment compte de la
répartition des risques et appliquait un système de partage
des moyens entre mutualités sur la base des contributions
(revenus), de telle sorte que la solidarité nationale s'effrita
rapidement en raison d'un déficit de financement global et
structurel sans cesse plus marqué.
La solution vint finalement de la loi du 9 août 1963 régissant la
mise sur pied des instances et des procédures nécessaires
à la fixation d'honoraires négociés collectivement, que les
prestataires de soins individuels devaient s'engager à appliquer
et qui formeraient la base du remboursement par l'assurance
soins de santé. L'assurance soins de santé et invalidité
obligatoire fut divisée en deux branches, avec les assurances
des soins médicaux (frais médicaux) d'une part et l'assurance
invalidité (revenu de remplacement) d'autre part. Il fut ainsi
possible d'élargir les avantages de l'assurance soins de santé
aux autres groupes professionnels (et plus uniquement aux
travailleurs) afin de garantir un degré de couverture total à la
population.
MC-Informations 254 • décembre 2013
19
Dans le but de fixer des tarifs raisonnables, basés sur les
coûts réels et acceptables par les médecins et des autres
prestataires de service, et pour offrir aux assurés davantage
de certitudes quant au coût de certains soins médicaux dont
ils devront s'acquitter, une concertation paritaire visant à
fixer les droits et les obligations des deux parties, organismes
assureurs et prestataires de soins, s'avérait essentielle. Ce
n'est que par le biais de cette concertation qu'il fut possible
d'éviter toute concurrence déloyale des prestations de soins
et que des moyens de financement fixés par la loi et suffisants
pouvaient garantir un bon équilibre entre les honoraires et les
remboursements.
Par crainte de ne pas disposer de suffisamment de moyens et
d'une distorsion de concurrence induite par des tarifs différenciés
entre les médecins conventionnés et non conventionnés, le corps
médical refusa ce modèle de concertation. La croissance des
dépenses prévues et les déficits budgétaires auraient pu avoir des
conséquences négatives sur le financement des soins de santé et
donc sur l'exercice de la médecine. Au sein de l'opinion publique,
les médecins traduisirent cette objection, et avec succès, sous la
forme de trois arguments : atteinte au secret médical (attestation
et une facturation détaillées de la prestation aux mutualités),
perte de la liberté thérapeutique (fixation d'honoraires clairement
définis) et perte de la liberté de choix pour le patient (fixation
de règles de remboursement plus favorables pour les soins
prodigués par des médecins conventionnés).
Cela conduisit en mars-avril 1964 à une grève des médecins
et des dentistes sans précédent, au cours de laquelle il
fallut même recourir aux services des médecins de l'armée.
Grâce à des modifications de la loi du 09-08-1963, un terrain
d'entente fut finalement trouvé le 25-06-1964 entre les
médecins et les mutualités (les fameux accords de la SaintJean). Les médecins renoncèrent alors à leur responsabilité
de gestion et ne siégeaient au sein du Comité de gestion de
l'Institut national d'assurance maladie-invalidité (INAMI)
qu'à titre consultatif, tandis qu'ils acquirent un plus grand
nombre de sièges au conseil technique médical (CTM). Enfin,
il fut également convenu que les conditions de remboursement
s'appliqueraient aux prestations de soins des médecins et
des dentistes conventionnés et non conventionnés. Dans ce
cadre, pour tous les autres prestataires de services, tels que
les infirmiers et le personnel paramédical, seulement 75 %
des tarifs de remboursement sont d'application pour les nonsignataires de l'accord.
De même, le principe de convention « partielle », qui tient
compte des exigences spécifiques de l'assuré et du plafond de
revenu en rapport à l'application de tarifs libres, a également
été pris en compte.
2.2 Assurance soins de santé obligatoire : accessibilité,
sécurité tarifaire et contrôle des dépenses
La loi du 09-08-1963 pose les fondations d’une véritable
assurance soins de santé nationale, qui garantit aussi bien
l’accessibilité aux soins que leurs tarifs pour les patients, et qui
permet simultanément un contrôle des dépenses.
L’accessibilité de la prestation de soins est concrétisée en
élargissant de façon progressive la base des ayants droits à
l'assurance soins de santé obligatoire à la quasi-totalité de la
population et en soumettant tous les prestataires de soins aux
mêmes accords tarifaires.
Le contenu de l'accord entre les prestataires de soins et les
mutualités est préparé par les conseils techniques (conseil
technique médical, conseil technique dentaire, etc.), une
structure de concertation tripartite composée de représentants
des organisations professionnelles, des prestataires de soins,
des universités et des organismes assureurs. Les conseils
techniques sont chargés de la réalisation et de la modification
de la liste détaillée des prestations de soins (la nomenclature)
couvertes par les accords nationaux (médecins et dentistes)
ou les conventions nationales (autres prestataires de soins) et
ayant fait l'objet d'un consensus entre les prestataires et les
mutualités. Dans ce cadre, l'objectif est de créer la liste la plus
large possible de prestations, en tenant compte de l'évolution
de soins de santé modernes et de haute qualité, des besoins
réels de la population et des nouvelles technologies. Les
conseils techniques forment une plate-forme de concertation
et un organe de consensus et d'évaluation des procédures
médicales et des technologies.
Les nouvelles technologies médicales sont donc évaluées et
proposées en vue d'une intégration à la liste des prestations
couvertes. De façon analogue, les procédures jugées obsolètes
peuvent, sur la base d'un consensus, être supprimées de
la liste. Les propositions du conseil technique sont toujours
reprises en l'état et approuvées (ou non) par la commission
d’accords et de conventions, qui ne décide que de la mise en
pratique effective et du tarif définitif de la (nouvelle) prestation.
Au travers des incitants financiers et une méthodologie
de financement variable (par prestations et/ou paiement
forfaitaire), la prestation de services peut faire l'objet de
modifications annexes.
La sécurité tarifaire pour le patient est réalisée par la fixation
des honoraires, qui peuvent être facturés par le prestataire
de services pour une prestation reprise dans la nomenclature
et à travers la limitation de la contribution personnelle (ticket
modérateur) à un pourcentage fixe de ce tarif convenu et en
fonction des moyens financiers de l'assuré (titulaire du régime
préférentiel, maximum à facturer).
À l’exception des prix des médicaments (Ministère des Affaires
économiques) et des frais infirmiers et d'hébergement lors
de l'admission à l'hôpital via le budget des moyens financiers
20
MC-Informations 254 • décembre 2013
(Ministère de la Santé publique), ce régime de convention
permet en principe également d'exercer une forme effective
de contrôle des coûts via les responsabilités collectives des
partenaires et des objectifs budgétaires établis. Néanmoins, les
évolutions sociales et technologiques, ainsi qu'un manque de
responsabilité (politique), ont fait que ce système de paiement
à la prestation n'a pas toujours permis de réaliser le contrôle
des coûts espéré.
2.3 La nomenclature des prestations de santé
Toutes les prestations de santé (préventives et curatives) pour
lesquelles l’assurance soins de santé prévoit un remboursement sont résumées à l’article 34 de la loi du 9 août 1963 relative
à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités coordonnée par arrêté royal du 14 juillet 1994. L’ensemble de ces
prestations médicales s’accompagne d’une description précise, de règles d’application et de modalités de remboursement
spécifiques. Les modalités de remboursement ont évolué d’un
payement à l’acte vers des paiements forfaitaires (biologie clinique, imagerie médicale, matériel endoscopique, honoraires
de permanence et de disponibilité en cas d’urgence). Les prestations remboursées de cette manière sont rassemblées dans
un registre intitulé « nomenclature des prestations de santé »,
établie par l’arrêté royal du 14 septembre 1984. Cette nomenclature énumère les prestations selon les catégories suivantes,
reprises à l’article 34, 1° à 4° :
1° Aide médicale simple comprenant :
• les consultations et visites de médecins ;
• les soins dispensés par les praticiens de l'art infirmier, le
personnel soignant et les garde-malades ;
• les soins de kinésithérapie ;
• les prestations technico-diagnostiques et thérapeutiques
n'exigeant pas la compétence d'un médecin spécialiste ;
• les soins dentaires.
2° Accouchements ;
3° Prestations exigeant une compétence spécifique d'un
médecin spécialiste, d'un pharmacien ou d'un licencié en
sciences (dont biologique clinique) ;
4° Prestations effectuées dans le cadre de prothèses oculaires,
de lunettes, d'appareils auditifs, d'implants, de matériel
orthopédique et d'orthèses ;
Certaines prestations de santé sont explicitement exclues de
tout remboursement, telles que les interventions esthétiques,
ou ne sont pas couvertes par l'assurance soins de santé
nationale, mais sont remboursées par les entités fédérées,
comme certaines prestations de prévention (vaccination).
La nomenclature a donc évolué et se présente aujourd'hui sous
la forme d'un volumineux registre de 36 articles, dans lequel
sont répertoriées et classées près de 10.000 prestations (même
s'il ne couvre pas l'ensemble des soins médicaux), et dont il ne
reste que peu de traces de la structure originelle de 1963.
Prestations de santé effectuées par des médecins et des
obstétriciens :
1. les actes (purement) intellectuels, dont les consultations,
les visites et les conseils, la psychiatrie, les honoraires
de surveillance des patients hospitalisés et les honoraires
d'urgence (art. 1, 2, 25 et 26) ;
2. les prestations techniques « conventionnelles » facturables
par tous les médecins (art. 3) ;
3. les prestations d'obstétrique, dont les prestations spécifiquement réservées aux accoucheurs (art. 9) ;
4. les prestations techniques « spéciales générales » facturables par tous les médecins spécialistes (art. 11) ;
5. les prestations chirurgicales appartenant aux spécialités
des disciplines « externes », dont la chirurgie (art. 14, 15 et
16), l’anesthésie (art. 12) et la réanimation (art. 13) ;
6. les prestations appartenant aux disciplines « internes », la
médecine interne (art. 20) ;
7. les spécialités techniques, dont l'imagerie médicale (art. 17,
17bis, 17ter et 17quater), la médecine nucléaire (art. 18 et 19),
la biologie clinique (art. 24), l'anatomie pathologique (art. 32)
et les examens diagnostiques génétiques et moléculaires
(art. 33 et 33bis) ;
8. les prestations multidisciplinaires, telles que les prestations
interventionnelles percutanées par imagerie médicale
(art. 34) ;
9. les prestations de spécialistes spécifiques, dans la dermatologie (art. 21) et la physiothérapie (art. 22 et 23).
Les prestations effectuées par :
1. Dentistes (art. 5 et 6)
7°bis Prestations de logopédie.
2. Kinésithérapeutes (art. 7)
La nomenclature ne constitue qu'une liste limitée de prestations intellectuelles et technico-médicales faisant l'objet
d'un remboursement à la prestation. D'autres prestations
remboursées par l'assurance soins de santé invalidité
sont régies par des arrêtés royaux distincts (dialyse rénale
chronique, laboratoire FIV, nomenclature de revalidation,
etc.) ou par des projets financés par l'article 56 de la loi AMI
(monitoring à distance de défaillances cardiaques chroniques).
3. Infirmiers (art. 8)
4. Bandagistes (art. 27)
5. Orthopédistes et prothésistes (art. 29)
6. Opticiens (art. 30, 30bis et 30ter)
7. Audioprothésistes (art. 31)
8. Fournisseurs d’implants (art. 35 et 35bis)
9. Logopèdes (art. 36)
MC-Informations 254 • décembre 2013
21
Exemple 1 : Prestation diagnostique de l'électromyographie
558552
558563
Électromyographie
K
63
Numéro d'ordre
Ambulatoire
Numérod'ordre
Hospitalisation
Libellé
Lettre-clé
Nombre-coefficient
Chaque prestation de la nomenclature des prestations de
santé se caractérise par un numéro d’ordre, un « libellé », une
lettre-clé et un nombre-coefficient. La nomenclature indique
également la compétence exigée du prestataire pour l’exécution
de la prestation, de même que les règles de recours. À titre
d’exemple, nous reprenons ici la prestation diagnostique de
l’électromyographie afin d’analyser de plus près les différentes
sections de la nomenclature (voir Exemple 1).
extrêmement complète et détaillée, comme par exemple la
prestation de l’hémodialyse aiguë (470455 - 470466).
Lettre-clé
La lettre-clé suit le libellé et se trouve avant le nombrecoefficient. Actuellement, une vingtaine de lettres-clés sont en
vigueur (article 1) :
• N
pour les conseils, visites et consultations d’un
médecin ou d’un dentiste et pour certaines prestations
techniques de médecins ;
• D
pour la disponibilité ;
• E
pour les frais de déplacement des médecins
généralistes ;
Numéro d’ordre
Le numéro d’ordre applicable (code de nomenclature, numéro
de prestation) est un code unique à six chiffres. Depuis le 0104-1985, la plupart des prestations sont réparties soit sous un
code ambulatoire, dont le cinquième chiffre est toujours impair,
soit sous un code d'hospitalisation, dont le cinquième chiffre
est toujours pair, selon que le patient est traité en ambulatoire
ou hospitalisé.
Il suffit d'ajouter 11 au code ambulatoire pour obtenir le numéro
d'ordre correspondant pour l'hospitalisation, sauf lorsque le
dernier chiffre du code ambulatoire est six, auquel cas il ne faut
ajouter que 4. Étant donné que tous les numéros d’ordre sont
classés par ordre croissant, les premières positions indiquent
déjà la nature de la prestation :
• 22xxxx
chirurgie générale ;
• 23xxxx
neurochirurgie ;
• 24xxxx
chirurgie abdominale ;
• 30xxxx
chirurgie dentaire ;
• 42xxxx
soins infirmiers ;
• 45xxxx
radiologie ;
• 47xxxx
médecine interne ;
• 56xxxx (+ 639xxx) kinésithérapie ;
• 589xxx
prestations interventionnelles percutanées.
Chaque numéro d’ordre s’accompagne également d’une
formule arithmétique permettant le contrôle de validité
automatique lors de l’enregistrement et du traitement des
codes de nomenclature.
Libellé
Le « libellé » décrit la nature de la prestation remboursable
avec même, dans certains cas, l’indication, les circonstances,
les conditions, les délais, etc. Cette description est parfois
22
• B et F pour la biologie clinique et la médecine nucléaire « in
vitro » ;
• K
pour les autres prestations techniques de médecins ;
• A et C pour les honoraires de surveillance ;
• I
pour les prestations interventionnelles percutanées ;
• L
pour les prestations techniques de dentistes ;
• V
pour les prestations techniques d'accoucheurs ;
• M
pour les prestations de kinésithérapeutes ;
• W
pour les prestations des infirmiers et du personnel
soignant ;
• Z
pour les prestations des opticiens ;
• S
pour les prestations des audioprothésistes ;
• Y
pour les prestations des bandagistes ;
• T
pour les prestations des orthopédistes ;
• Q
pour le supplément lié à l’accréditation ;
• U
pour les implants et les produits à usage unique ;
• R
pour les prestations des logopèdes.
L’ensemble de ces lettres-clés a une valeur intrinsèque (en EUR),
appelée valeur de la lettre-clé. Cette valeur est non seulement
différente pour chaque lettre, mais peut également changer
au sein du même groupe de lettres par type de prestation. Ces
différences ont été volontairement introduites afin de permettre
la (ré)évaluation spécifique ou l’indexation de certaines
prestations au sein d’un même article de la nomenclature.
MC-Informations 254 • décembre 2013
Les valeurs des lettres-clés sont déterminées par les commissions d’accords et de conventions et doivent en outre être
soumises à l’approbation du comité de l’assurance de l’INAMI
sur conseil de la commission de contrôle budgétaire et enfin à
l'accord du (de la) Ministre des Affaires sociales et de la Santé
publique.
Une circulaire de l’INAMI à l’organisme assureur suffit à titre
de communication. Cette procédure de modification de la
valeur de la lettre-clé permet de prendre des mesures bien
plus rapidement que dans le cas d'une modification de la
nomenclature, qui doit toujours s'effectuer par arrêté royal.
Nombre-coefficient
Enfin, le nombre-coefficient indique la valeur de la prestation
concernée et établit l’honoraire de convention. Pour reprendre
l’exemple de l’électromyographie (EMG), la valeur K au 01-012013 s’élevait à 1,1598 EUR. Le coefficient 63 détermine donc
que l’honoraire de l’EMG à 63 x 1,1598 EUR= 73,07 EUR.
C’est sur cette base que sont déterminés les montants du
remboursement et du ticket modérateur. Le ticket modérateur
pour les prestations ambulatoires délivrées aux ayants droits
sans règlement préférentiel s’élève à 15 %, avec un maximum
de 8,68 EUR (A.R. 11-12-2001). Le remboursement de cette même
prestation chez un ayant droit hospitalisé peut donc différer de
celui d’une personne ayant bénéficié de cette même prestation
en ambulatoire.
Application, interprétation et modification de la nomenclature
Pour pouvoir entrer en considération en vue d’un remboursement, chaque attestation de soins donnés (ASD) doit
mentionner la prestation effectuée ainsi que le numéro de
nomenclature s’y rapportant.
La nomenclature mentionne également les différentes règles
d’application se rapportant à une, à plusieurs, ou à un groupe
de prestations. Les règles d'application sont reprises dans la
description elle-même ou à sa suite, voire dans un paragraphe
séparé.
Ces règles d'application se rapportent aux éléments suivants :
• les exigences de compétence du prestataire ou du
prescripteur ;
• les conditions dans lesquelles la prestation doit être
effectuée ;
• l'infrastructure et/ou la reconnaissance du lieu, de
l'institution ou du service ;
• le caractère cumulable avec d'autres prestations ;
• l'obligation de rédiger un protocole d'examen ou un rapport ;
• les délais de renouvellement ;
• les modalités relatives à la prescription ;
• les procédures de demande de remboursement (médecinconseil, collège de médecins directeurs) ;
• les conditions associées aux patients (indication) ;
• l'inclusion ou non du matériel de consommation ou
d'utilisation (honoraires nets/bruts) ;
• les conditions de fabrication (produits : fauteuils roulants,
chaussures orthopédiques) ;
• les délais de conservation de documents (prescriptions,
radiographies).
Il peut arriver que le « libellé » ou que la règle d’application
soit soumise à l'interprétation ou que la prestation change en
raison de l'évolution technologique (procédure peu invasive,
automatisation). Le conseil technique médical fait office
d'instance compétente dans la formulation d'interprétations
officielles (groupe de travail Interprétation). Dans la mesure
où cette règle d'interprétation peut avoir un intérêt d'ordre
général, celle-ci est entérinée par le comité d'assurance et
après approbation du ministre compétent, publié sous forme
d'arrêté royal, par lequel elle devient officiellement applicable
est opposable en tant que règle distincte.
2.4 La relation entre les honoraires et le coût réel de la
prestation de soins
Dans le cadre de la mise en application des accords et des
conventions entre les prestataires de soins et les organismes
assureurs, la nomenclature des prestations de santé constitue
un instrument essentiel.
L’usage d’une nomenclature extrêmement détaillée dans un
système de remboursement à la prestation forme également
une source inestimable d’informations sur l’utilisation et la
prescription de prestations de soins. Cet usage a conduit au
développement d’une série d’instruments de gestion et de mécanismes de financements, tels que les profils des prestataires
de soins et des hôpitaux, les montants de référence, le budget des moyens financières (sous-partie B2) et le financement
forfaitaire des laboratoires de biologie clinique et des services
d’imagerie médicale.
Le soin et les coûts inhérents à sa prestation ont servi de base
à la fixation des honoraires. Ces coûts ont été déterminés à
partir d’une estimation de la durée nécessaire à l’exécution de
l’acte en question et de sa complexité. D’autres éléments, tels
que la qualité du processus ou les risques pour la santé, n’ont
pratiquement joué aucun rôle dans la fixation des honoraires.
Une fois la valeur des honoraires déterminée pour un nombre
limité de prestations de base, les tarifs des procédures
diagnostiques et thérapeutiques connexes étaient toujours
établis par le biais d'une comparaison. Par exemple, si
l'appendicectomie était la prestation de base dans la
nomenclature de la chirurgie abdominale, des opérations plus
MC-Informations 254 • décembre 2013
23
Tableau 1 : Honoraires des interventions chirurgicales de durée et de complexité différentes (INAMI 2013)
Lettre-clé
Nombrecoefficient
Duodenopancreatectomie
N
900
1.240,08
480
Gastrectomie
N
650
895,61
385
Cholécystectomie
N
350
385,80
180
Appendicectomie
N
200
231,48
110
complexes et plus longues telles que la cholécystectomie, la
gastrectomie ou la duodenopancreatectomie sont associées
à des honoraires qui sont de 2, 3 ou x fois supérieurs à ceux
de l'appendicectomie. En faisant varier la valeur de la lettreclé (p.ex. la valeur N des prestations N200 est inférieure à la
valeur N des prestations N650) au sein d'une même discipline
parallèlement aux nombreux coefficients (nombre K ou N),
les honoraires peuvent varier en fonction de la durée et de la
complexité de la prestation (tableau 1).
Au fil des ans, cette méthode de fixation des honoraires par
comparaison avec une série de prestations de base s’est
toutefois avérée obsolète. Par conséquent, les honoraires
de nombreuses prestations ne sont plus en mesure de
couvrir le coût réel des prestations concernées (prestations
intellectuelles telles que les consultations, honoraires de
surveillance) ou les dépassent largement (certaines analyses
en laboratoire et imagerie médicale).
En raison d'une révision insuffisante de la nomenclature en
fonction de l'évolution de la science médicale, les valeurs
des honoraires de certaines prestations ont ainsi acquis un
caractère historique et ne correspondent aujourd'hui plus du
tout aux coûts réels.
Il n'est ainsi pas suffisamment tenu compte de la charge
de travail réelle, des coûts du personnel paramédical, de
l'infrastructure et du matériel, de l'évolution des techniques
opératoires (peu invasives), des techniques d'anesthésie
(locorégionale ou topique), de l'automatisation et des durées
de procédure (imageries médicales, examens CT, IRM ou PET
plus rapides). Il n’est également pas suffisamment tenu compte
del'importance de la qualité et de l'efficacité des prestations
de soins, ou pour le dire autrement, de l'importance du résultat
atteint ou de l'approche multidisciplinaire et pratique.
À la suite du développement exponentiel des technologies
médicales, surtout en milieu hospitalier, il est ces dernières
décennies devenu de plus en plus difficile d'atteindre un niveau
d'honoraires qui couvre totalement les coûts de la prestation.
Dans la nomenclature des prestations de santé, il est même
parfois explicitement stipulé que les honoraires ne couvrent
pas les coûts du personnel, de l'infrastructure et du matériel
24
Honoraires
01/01/13
Durée standard
accept. (min)
médical. Ainsi, si le chirurgien et l'anesthésiste bénéficient
généralement d'honoraires « nets », le médecin interne doit
couvrir avec ses honoraires les frais du personnel et le coût
du matériel.
Cette situation est à la source d'un financement mixte de
l'activité hospitalière, à la fois via la rétrocession par les
médecins d’une partie de leurs honoraires et par le biais du
budget des moyens financiers (BMF). En cas de difficultés
financières, les gestionnaires des hôpitaux se voient contraints
de retenir une part sans cesse plus importante des honoraires
pour couvrir les frais généraux liés aux infrastructures,
au personnel, au matériel et à toute une série de services
connexes (perception centrale). Bien que le principe de base
défini en 1963 était parfaitement approprié, cette répartition en
honoraires nets et bruts relève aujourd'hui de l'anachronisme
et les compensations sur le terrain peuvent parfois être
difficilement applicables. Par exemple, les honoraires pour
une endoscopie effectuée dans le local de fonction du gastroentérologue doivent couvrir les frais du personnel et de
matériel, tandis que si cette même endoscopie est effectuée
par un chirurgien abdominal au bloc opératoire, les honoraires
sont considérés comme nets. Les représentations variables au
sein du conseil technique médical, et donc une différence des
possibilités de lobbying sur les éventuelles modifications de la
nomenclature par discipline de spécialisation, font que certains
chapitres de la nomenclature sont pourvus de prestations
mieux remboursées (souvent techniques).
Avec l'obsolescence progressive de la nomenclature (le
conseil technique médical ne peut pour l'instant pratiquement
pas réaliser les extensions et modifications de la nomenclature
nécessaires et souhaitées en raison de la croissance
exponentielle de la technologie médicale et des formes
toujours plus contraignantes de contrôle budgétaire), cette
représentation inéquitable conduit à une forme croissante
d'inégalité des revenus entre les différentes spécialités
médicales. Un système à la prestation continue ainsi de
surévaluer les prestations techniques diagnostiques et
thérapeutiques et à sous-évaluer les prestations intellectuelles
(consultations, surveillance, compte-rendu, discussions
d'équipe, coaching, explication aux patients et à la famille). Si
MC-Informations 254 • décembre 2013
une telle inégalité est constatée en cas de durée de formation
et de charge de travail équivalentes, elle peut rapidement
prendre la forme d'une injustice, qui conduit à une frustration,
à un désintérêt pour les spécialités moins valorisées, à une «
fuite » des hôpitaux vers le privé et à l'apparition de lacunes
progressives dans l'offre de soins.
La compensation d'une baisse de revenu à la suite de
déductions plus importantes et de tarifs conventionnés réduits
s'opère par l'ajout d'honoraires supplémentaires (déplacement
du coût vers le patient) et/ou la multiplication des prestations
techniques. La possibilité de prendre en compte des honoraires
supplémentaires (patients privés, chambre individuelle) est
toutefois très variable en fonction de la spécialité et conduit
notamment à ce que les « procéduralistes » (chirurgien,
cardiologue, gastro-entérologue, radiologue, anesthésiste)
gagnent toujours plus que les « non-procéduralistes » (médecin
généraliste, cancérologue, pédiatre, gériatre, psychiatre,
rhumatologue) (Schoenman et al. 2001).
Cette inégalité de revenu ne pouvant pas être justifiée par une
différence de charge de travail ou de coût est à l'origine d'une
tension croissante entre les différentes spécialités médicales
au sein de l'hôpital, ce qui conduit à un déséquilibre lors du
choix des spécialités, avec trop de « procéduralistes » et pas
assez de « non-procéduralistes » en formation, ce qui constitue
un frein irrémédiable à la collaboration multidisciplinaire,
élément pourtant nécessaire à une approche des soins de
santé moderne, efficace et placée au service du patient.
La pratique a démontré que le système de remboursement à
la prestation peut facilement conduire à une augmentation
débridée du volume des prestations. En Belgique,
respectivement en 1986 et 1992, le paiement forfaitaire partiel
a été introduit pour la biologie clinique et l'imagerie médicale
pour les prestations effectuées aux patients hospitalisés et en
ambulatoire. Cela n'a conduit que provisoirement au contrôle
des dépenses visé, car le paiement forfaitaire restait en réalité
associé à la prestation (nombre d'hospitalisations, nombre
d'admissions de jour, nombre de prescriptions) et que cette
activité médicale, qu'elle soit basée ou non sur des besoins
médicaux réellement croissants, a continué d'augmenter de
façon constante.
Comme dans de nombreux pays, l'augmentation des dépenses
constantes en biologie clinique, en imagerie médicale, en
prestations diagnostiques de routine et en hémodialyse a
conduit à des diminutions automatiques des honoraires
ou à leur non-indexation à répétition en compensation des
dépassements budgétaires. La nomenclature a ainsi évolué et
est devenue un instrument de contrôle des coûts par excellence
en lieu et place d'un instrument de répartition correcte des
budgets des prestations de soins.
Au travers de cette approche purement financière, les travaux
préparatoires effectués au sein des différents conseils
techniques et les négociations menées au sein des organes de
concertation (commission des accords et des conventions) sont
sans cesse plus difficiles. Cela rend également l'harmonisation
des revenus souhaitée, ou la revalorisation de la nomenclature
au profit des spécialités « sous-évaluées », quasiment
impossible au sein d'un modèle de consensus. La recherche
d'une solution à ce problème d'inégalité des revenus est
prioritaire afin de pouvoir garantir à l'avenir un équilibre et une
offre de soins complémentaire et équitable entre les différents
prestataires de services au sein et en dehors de l'hôpital.
2.5 Vers un autre financement de la prestation de soins ou
une révision fondamentale de la nomenclature
La nomenclature belge des prestations de santé en tant qu’outil
de financement des prestations de soins fait l’objet de critiques
depuis plusieurs décennies. Citons tout d’abord l'aléa moral
dans le chef du médecin et du patient, car ces deux acteurs
du système ne disposent pas d’une perception suffisante des
coûts, en raison du fait qu’une troisième instance (l’assurance
soins de santé en l’occurrence) paie l’addition. En outre, un
système à la prestation basé sur une demande induite par
le prestataire et régi par la volonté de ce même prestataire
d'obtenir un revenu convenable conduit à l'augmentation de
volume et à l'impossibilité de maîtriser les coûts. Le système
à la prestation conduit aussi à de grandes inégalités de revenu
entre le « procéduraliste » (chirurgien, cardiologue, radiologue,
gastro-entérologue, anesthésiste, biologiste clinique) et
le « non-procéduraliste », dont les revenus proviennent
essentiellement de prestations intellectuelles (médecin
généraliste, cancérologue, pédiatre, gériatre, neurologue,
psychiatre, rhumatologue). Ajoutons encore la critique légitime
selon laquelle la nomenclature ne tient que très peu compte
des critères de qualité, mais uniquement de la quantité des
prestations, de même que la quasi-absence de critères
de reconnaissance dans la nomenclature et le fait que les
imprécisions sur les honoraires nets et bruts (hôpital de jour,
polyclinique, cabinet) conduit à d'interminables discussions
entre les gestionnaires des hôpitaux, les médecins et les
mutualités, jusqu'à ce que cela aboutisse en définitive à un
déplacement du coût vers le patient. Enfin, la nomenclature
étant devenu extrêmement complexe, elle conduit à de
nombreuses questions et interprétations, nécessite l'utilisation
d'un logiciel de tarification sophistiqué, se caractérise par un
cadre conceptuel quelque peu obsolète (règle des champs,
sanglant/non sanglant) et offre insuffisamment d'espace aux
innovations temporaires et à la mise en place de nouvelles
techniques et procédures (médecine peu invasive, médecine à
distance, pluridisciplinarité).
D'autre part, il convient de souligner que l'utilisation de la
nomenclature en tant qu'instrument de répartition du budget
de soins de santé et qu'instrument de travail de la concertation
permanente entre prestataires de soins et mutualités est
indiscutablement à l'origine d'une série d'avantages. Tout
d'abord, la nomenclature, en tant que système de paiement
à la prestation, permet une forme de prestation de soins plus
MC-Informations 254 • décembre 2013
25
individualisée et mieux adaptée au patient. Elle offre aussi aux
médecins la rémunération qu'ils méritent (plus de consultations
et d'interventions impliquent un revenu plus élevé). Par ailleurs,
la nomenclature constitue une base de données extrêmement
détaillée, qui permet parfaitement l'évaluation de la politique
de santé, le contrôle des coûts et du recours aux soins, mais
également des études de type clinico-épidémiologique.
le prévoit la nomenclature belge actuelle, notamment pour
la biologie clinique, l'imagerie médicale, les soins infirmiers
ambulatoires ou le matériel à usage unique dans le cas de la
chirurgie endoscopique. Les différences entre médecins et/ou
patients dans l'administration ou l'utilisation de soins pour des
pathologies identiques sont ici gommées, mais la relation avec
la prestation de soins effective demeure.
Enfin, la nomenclature reste un instrument de financement
mis au point et adapté par les acteurs de terrain (prestataires
de soins et mutualités) au sein des conseils techniques et fait
partie intégrante d'un modèle de concertation non imposé
par une instance publique. Face aux faiblesses d'un modèle
de financement à la prestation, d'autres modèles ont été mis
sur pied et appliqués. Néanmoins, il ne semble pas exister
de système optimal, dans la mesure où chacun d'entre eux
présente ses avantages et ses inconvénients (voir Tableau 2)
En revanche, les inconvénients du financement par capitation
(forfait, abonnements, salaires) ne sont pas minimes : l'avantage
limité d'une meilleure gestion des dépenses est contrebalancé
par la réduction du niveau de service (apparition de listes
d'attente, risque de sous-traitement, tendance au renvoi
trop rapide vers d’autres prestataires). Il existe également
un manque d'incitants en lien avec la charge de travail. De
même, les informations relatives aux soins prestés en tant
qu'instrument politique essentiel sont disponibles de façon
beaucoup moins détaillée, ce qui constitue un inconvénient,
par ailleurs également applicable au système de financement
case-mix ou au financement par pathologie.
La nomenclature en tant que système de paiement à l’acte
présente l’avantage d’une disponibilité et d’une implication
maximale du médecin, ainsi qu'une prestation de service
rapide et efficace. Elle s'accompagne cependant d'une série
d'inconvénients liés à l’aléas moral et à l'augmentation de
volume.
Le financement forfaitaire, par capitation ou basé sur un salaire
permet, à l'instar d'un modèle de financement case-mix, une
meilleure gestion des coûts. Le financement par capitation, dans
sa forme la plus évoluée, est basé sur des honoraires attribués
par (périodes de) maladie ou par patient, indépendamment des
différences éventuelles de prestations de service effectives
(nature et/ou volume) pour des affections ou des patients
comparables. Une forme moins évoluée de financement par
capitation se rapporte aux honoraires forfaitaires, tels que
Le financement par pathologie fait usage d'un montant
forfaitaire pour la prise en charge et le traitement d'une
pathologie donnée. La relation avec le patient individuel est
préservée, mais le remboursement total pour le traitement
ne peut plus être divisé en composantes de soins en fonction
des interventions diagnostiques ou thérapeutiques des
différents spécialistes, infirmiers ou membres du personnel
paramédical. La prise en charge de la pathologie à rembourser
est généralement standardisée dans des entités médicodiagnostiques comparables (Diagnosis Related Groups,
Groupes Homogènes de Malades (GHM)) et le financement est
ensuite adapté en tenant compte des éléments influençant les
coûts (âge, comorbidités).
Tableau 2 : Avantages et inconvénients des différents modèles de financement des soins de santé
FINANCEMENT
AVANTAGES
A LA PRESTATION
•
•
•
•
FORFAITAIRES
(forfait, capitation, salaire)
A LA PATHOLOGIE
(DRG, GHM)
26
performance
niveau de service
instrument de contrôle
soins personnalisés
• gestion des coûts
• harmonisation des revenus
• planification des ressources
humaines
• gestion des coûts
• financement équitable
• basé sur le travail fourni
MC-Informations 254 • décembre 2013
INCONVÉNIENTS
• aléa moral
• augmentation volume/coûts
• obsolescence
• absence de pluridisciplinarité
• perte d'informations
• sous-utilisation
• références excessives
• listes d'attente
• « DRG-creep »/sélection
• sur/sous-codage
• cas isolés
• listes d'attente
• disponibilité réduite
Tableau 3 : Financement des prestations de soins en Belgique
Ambulatoire
COÛT DE LA PROCÉDURE
Honoraires médicaux
FORFAIT/ALL IN
BUDGET
Personnel
Frais d'hébergement
Infrastructure
Frais infirmiers
Matériel médical
Médicaments
Matériel à usage unique
Nomenclature
BMF
Hospitalisation
Dans la plupart des pays d'Europe occidentale, on est passé
progressivement d'un financement à la prestation à un
financement budgétaire sur base de la pathologie(Okamura
et al. 2005). Les inconvénients de ce type de financement par
pathologie sont également connus : risque de sur-codage
afin d'obtenir la valeur DRG la plus grande possible et donc
un remboursement DRG plus élevé (le fameux DRG-creep),
manque d'affinage des différentes catégories de patients dont
les coûts de soins sont très diversifiés et élevés (Flohe et al.
2007) et possibilités d'un remboursement correct en fonction de
la charge de travail de tous les médecins impliqués, dans le cas
où le (coûteux) modèle basé sur le salaire n'a pas été choisi.
Dans l'éventualité où l'on souhaite conserver les avantages d'un
paiement à la prestation (nomenclature), une révision profonde
est toutefois indiquée, avec une attention plus marquée pour
l'harmonisation des revenus, l'innovation, les honoraires nets
et bruts, le double financement des soins hospitaliers, le calcul
des coûts réels, le remboursement des coûts des soins prestés
et évidemment, une maîtrise responsable des volumes et des
dépenses. Une des modifications souhaitables se rapporte à la
couverture des coûts, par laquelle les honoraires du personnel,
les coûts de l'infrastructure et du matériel sont remboursés
en fonction du lieu d'exécution des soins (bloc opératoire,
hôpital de jour, polyclinique, cabinet privé), permettant ainsi
la mise sur pied d'un double financement au sein de l'hôpital
et la possibilité d'une rémunération différente pour une même
prestation.
En Belgique, le budget des moyens financiers (BMF)
prévoit depuis 2002 le financement des frais infirmiers et
d'hébergement sur la base de la pathologie traitée (nombre
de jours d'hospitalisation), tandis que le médecin est encore
rémunéré via un système à la prestation (Tableau 3).
Pratiquement la moitié des moyens de fonctionnement de
l’hôpital provient des retenues sur les honoraires. Cela peut
expliquer l’intérêt du gestionnaire de l’hôpital et du médecin
à voir augmenter les volumes ainsi que la tendance qu'ont de
nombreux spécialistes à travailler en dehors de l’hôpital dans
leur propre cabinet privé.
Lorsque les avantages du maintien d'un financement à la
prestation (partiel) contrebalancent les inconvénients et
lorsqu'il existe une certaine unanimité sur les carences
actuelles de la nomenclature, se pose inévitablement la
question de savoir comment les modifications souhaitées
peuvent être mises en œuvre au sein du modèle de convention
existant. Malgré la mise sur pied d'une commission officielle et
la création de mandats (à l'exception du mandat de président),
une révision fondamentale de la nomenclature n'a à ce jour
toujours pas été mise en œuvre.
La résistance à l'harmonisation des revenus est surtout liée
à une crainte de perte de revenus du fait d'une redistribution.
La profession médicale craint également que l'instauration
de rémunérations forfaitaires implique un « gommage » des
différences de charge de travail. C'est la raison pour laquelle
une modification de la nomenclature et la fixation de nouveaux
tarifs d'honoraires doivent tenir compte de l'effort fourni par le
médecin et des coûts réels du soin presté. En dépit de cette
résistance, une revalorisation a quand même pu être mise en
pratique, au moyen de petites interventions ciblées, pour les
psychiatres, les pédiatres, les gériatres, les généralistes, les
cancérologues, les rhumatologues et les néonatologues.
Aux États-Unis, William HSIAO (Hsiao 1988) a réalisé un travail
révolutionnaire pour le compte de Medicare et Medicaid en
mettant sur pied un modèle (Resource Based Relative Value
MC-Informations 254 • décembre 2013
27
Tableau 4 : Composantes des honoraires d’une prestation de soins
Complexité de l'acte
Effort physique
Gravité et lourdeur de
l'affection
Compétences techniques
Durée
MÉDECIN
Effort mental
Incertitude diagnostique et
thérapeutique et traitement
Exigences d'évaluation
Risques de dommage iatrogène
COÛTS
Stress
• Personnel infirmier
(niveau de formation, délégation, nombre)
• Infrastructure
(amortissement, entretien)
• Matériel
(usage unique, implants)
• Coûts indirects
(temps de préparation, temps d'attente,
disponibilité, interprétation, compte-rendu,
assurance)
(Resource Based Relative Value Scale) (Hsiao, 1988)
Scale) qui évalue la prestation du médecin en fonction de la
durée, de l'effort intellectuel, des compétences techniques
exigées, de la capacité d'évaluation, du stress relatif à la
lourdeur de l'intervention et aux conséquences possibles de
cette dernière, et de l'investissement éventuel en formation
complémentaire. Ce module d'évaluation complexe du travail
fourni par le médecin est agrémenté des différents coûts
générés par l'exécution de la prestation : personnel infirmier,
infrastructure (pro rata), matériel médical et frais indirects
(Tableau 4).
Si une telle évaluation des composantes des honoraires
d’une prestation de soins est utilisée dans le cadre d’une
revalorisation de notre nomenclature, il convient de prendre
d’emblée sérieusement conscience de l’ampleur de la tâche.
La nomenclature américaine (Healthcare Common Procedure
Coding System), qui contient à l’heure actuelle aux alentours
de 7.000 prestations, calcule les honoraires sur la base de trois
unités de valeur relative (RVU - relative value units) : la première
pour le travail du médecin (temps, effort, compétences, stress),
la seconde pour les coûts liés à la mise en œuvre(infrastructures,
personnel infirmier, matériel médical) et la troisième pour les
coûts de l'assurance liée à la responsabilité professionnelle. La
part de chaque unité est comme suit : 52,5 % (RVU ‘médecin’),
43% (RVU ‘mise en œuvre’) et 9,9% (RVU ‘responsabilité’).
28
La RVU ‘mise en œuvre’ diffère lorsque la prestation est réalisée
en cabinet privé ou à l'hôpital et corrige donc l'inégalité
présente dans la nomenclature belge (couverture des coûts
par les honoraires uniquement). En Belgique, les articles 139
bis et 140 de la loi sur les hôpitaux, de même que le caractère
extrêmement imprécis des composantes des honoraires bruts
de la nomenclature, sont à l'origine de débats, voire de conflits
interminables entre le conseil médical et le gestionnaire de
l'hôpital. Mais la levée de ces imprécisions est loin d'être
simple et exige non seulement une division de la nomenclature
entre les prestations effectuées au sein de l'hôpital (honoraires
nets) et en dehors (honoraires bruts), mais également le
déplacement d'une grande partie des honoraires nets des
prestations techniques vers le budget des moyens financiers.
Le choix d'un tel modèle basé sur des honoraires nets, qui ne
rétribue que la prestation intellectuelle et physique du médecin,
n'est pas si évident. Tout d'abord, les coûts du matériel médical,
de l'infrastructure et du personnel peuvent augmenter de façon
considérable et être parfois supérieurs à la rémunération offerte
par les honoraires existants, ce qui induit immédiatement un
surcoût important. Deuxièmement, il faut y ajouter que les effets
d'une telle modification des honoraires nets sont difficiles à
estimer. Le modèle de financement des soins de santé est en
effet étroitement lié aux dépenses totales du secteur, en ce
MC-Informations 254 • décembre 2013
compris la régulation par l'État, à l’évolution du système de
santé, à l'impact sur les assureurs privés et surtout au profil
de pratique du médecin et à la consommation de soins par les
patients. La sensibilisation du médecin à l'égard des coûts à
couvrir par les honoraires bruts (personnel, infrastructure,
matériel médical) risque d’entièrement disparaître par la
création d'honoraires nets et confronter le gestionnaire de
l'hôpital à d'importants coûts supplémentaires (pas toujours
couverts), un phénomène également présent dans un modèle
où les médecins sont salariés.
Quelles seront les conséquences d'une telle situation sur la
« serviabilité » du médecin vis-à-vis de sa patientèle, sur sa
disponibilité, sur la qualité de la prestation de ses soins et
surtout sur sa volonté de travailler en dehors de l'hôpital ? Pour
éviter d'obliger les prestataires à effectuer les prestations en
milieu hospitalier (plus coûteux), il convient en effet de prévoir
des honoraires différents (plus élevés afin de couvrir les coûts)
par rapport à cette même prestation en cabinet privé. Enfin,
dans le cadre de la révision souhaitée de la nomenclature et
de la revalorisation des honoraires, et indépendamment du fait
que nous évoluions ou pas vers un système d'honoraires nets,
il convient de porter une attention particulière à la couverture
des coûts non directement liés à l'exécution de la prestation de
soins, mais qui font néanmoins bel et bien partie d'une médecine
moderne et multidisciplinaire orientée vers le patient. Ces coûts
complémentaires se rapportent par exemple au leadership, aux
missions de gestion, au travail en dehors des heures normales
et à la qualité du soin presté.
Roex et Telgenkamp (1999) ont mis sur pied un modèle basé sur
un système d'honoraires plus individualisé (médecin en milieu
hospitalier). Ce système n'est pas lié aux prestations (tableau 5).
Dans la mesure où ce système de rémunération ne semble
pas faire l’unanimité aux Pays-Bas et où la nomenclature
belge actuelle et les couvertures complémentaires tiennent
déjà compte de certains de ces déterminants (suppléments
d’urgence, disponibilité, maîtrise de stages, primes d’attente et
de permanence), une amélioration du système existant semble
préférable.
De plus, la nécessité de devoir à terme rémunérer la
participation du médecin de l’hôpital à la politique hospitalière
lorsqu’il consent des investissements supplémentaires en
formation, en concertation et en management (chef de service,
comité de gestion médicale, conseil médical) sera inévitable.
En ce qui concerne la rémunération de la qualité du service
presté, des propositions ont été formulées et analysées par
une structure multipartite. L’objectif de cette démarche était
de mettre sur pied un système de bonus pour les hôpitaux
répondant à certains paramètres de qualité, à mettre en œuvre
par l’intermédiaire du budget des moyens financiers, mais ce
type d’incitant n’a pour l’instant pas encore été intégré à la
nomenclature.
Dans la mesure où nous traversons une période de récession
socio-économique de plusieurs années, qui nous prive d’une
grande partie, voire de la totalité, des moyens financiers
nécessaires à la mise en œuvre de modifications, d’une
revalorisation ou d’une extension de la nomenclature au service
d’une prestation de soins novatrice, les possibilités de révision
fondamentale de la nomenclature restent limitées. On constate
en outre chez les médecins et les autres prestataires de services
l’absence de disposition à collaborer à un renouvellement de
la nomenclature, qui est toujours utilisée comme un simple
instrument de compression des coûts. Les conseils techniques
Tableau 5 : Composantes de la rémunération de la prestation de soins par le médecin
(Roex et Telgenkamp, 1999)
FACTEUR
1) Niveau de fonction
2) Professionnel
3) Disponibilité
4) Prestation de soin
CRITÈRE
CARACTÉRISTIQUE
Impact
Mission/publications/
Connaissance
Formation
Résolution de problème
Simple/complexe
diagnostique/thérapeutique
Communication
Niveau de communication
Leadership
Equipe/service/direction
Risque de réclamation
Prime d'assurance
Risque de l'intervention
Mortalité, complications
Hors heures normales
Nuit/soirée/weekend
Qualité
Connaissances, compétences,
personnalité, motivation
Quantité
Norme de production
MC-Informations 254 • décembre 2013
29
et la commission d’accords et de conventions ont toutefois mis
sur pied une série de modifications favorables, où les principes
de revalorisation, d’augmentation de la rémunération forfaitaire
et de stimulation de la concertation multidisciplinaire ont été
instaurés. Cela s’est toutefois opéré à un rythme très lent et
de façon encore insuffisante (réévaluation des prestations
intellectuelles, prime de permanence, consultations oncologiques multidisciplinaires, trajets de soins).
La réalisation des modifications de la nomenclature souhaitée
sera axée sur l'harmonisation des revenus en fonction de soins
intégraux plus efficaces et plus orientés vers le patient. Cela
demandera nécessairement un investissement de plusieurs
années. La mise en œuvre de ces modifications peut s'effectuer
par le biais d'une commission spéciale, mais uniquement en
étroite collaboration avec le conseil technique concerné, qui
doit disposer d'un droit de parole bien établi.
La poursuite de l’application d’une méthode d’évaluation des
prestations et de calcul des coûts lors de la fixation de nouveaux
honoraires pour un grand nombre de prestations de base par
spécialité médicale dans la nomenclature, où les autres tarifs
peuvent être modifiés sur la base d’une comparaison, peut
permettre à court terme de corriger les tarifs de la nomenclature
devenus obsolètes du fait de l’automatisation, de l’évolution
technologique, de la délégation au personnel infirmier et de la
nouvelle structure des coûts.
Après 50 ans d'existence, la nomenclature des prestations
de santé a aujourd'hui clairement besoin d'être actualisée,
en accordant une attention prioritaire à sa revalorisation, à
la mise en place d'incitants à la qualité et aux résultats et en
tenant compte de l'avènement des nouvelles technologies. En
tant que moyen de répartition des budgets de soins de santé
et qu'instrument de travail du modèle de concertation entre
prestataires de soins et organismes assureurs, la nomenclature
ne doit certainement pas être abandonnée trop rapidement.
3. Conclusion
Bibliographie
Plusieurs enquêtes de satisfaction démontrent que les soins de
santé en Belgique sont toujours performants comparativement
à ceux des pays voisins. La vaste accessibilité, le niveau de
services et la qualité moyenne justifient l’implication actuelle
des fonds communautaires investis par la sécurité sociale.
Savedoff WD. 2007. What should a country spend on Health
Care ? Health Affairs. 26: 962-970.
Cette situation résulte en grande partie de l’utilisation depuis
un demi-siècle d’une nomenclature de prestations de santé
rémunérées à l’acte. Dans la mesure où il n’existe pas de
modèle de financement optimal des soins de santé et compte
tenu du fait que le remboursement des soins de santé, au sein de
l’hôpital et en ambulatoire, est étroitement lié au maintien d’un
système de soins de santé efficace et largement accessible,
une suppression totale du système de prestations actuelles
n’est pas indiquée.
Pour la stimulation des soins de santé préventifs, un système
de financement par capitation peut s’avérer utile (DRG). Pour
les prestations de soins plus rares, la mise en place d’un
système basé sur l’octroi d’un salaire au prestataire de soins
peut être envisagée, même si ces situations doivent rester
exceptionnelles.
Il conviendrait donc plutôt de privilégier le maintien du
financement à la prestation actuel, mais à condition de
procéder à une révision en profondeur de sa nomenclature.
Dans ce cadre, les formes de financement mixtes, impliquant à
la fois un paiement à la prestation (part associée au médecin) et
forfaitaire (part associée aux coûts), de même que la mise sur
pied de budgets pour la gestion des dépenses et le financement
de certains systèmes expérimentaux (financement DRG,
montant de référence avec bonus-malus, incitant pour des
soins sous-évalués et/ou spécialisés) devraient être permises.
30
Rijksinstituut voor Ziekte- en invaliditeitsverzekering. 2013.
Nomenclatuur van de geneeskundige verstrekkingen.
Schoenman J, Hayes KJ, Cheng CM. 2001. Medical Physician
Payment Changes: Impact on Physicians and Beneficiaries.
Health Affairs. 19: 263-273.
Okamura S, Kobayashi R, Sakamaki T. 2005. Case-mix payment
in Japanese medical care. Health Policy. 74: 282-6.
Flohe S, Buschmann C, Nabring J, Merguet P, Luetkes P, NastKolb D, Ruchholtz S. 2007. Definition of polytrauma in the
German DRG-system 2006: up to 30 % ‘incorrect classifications’.
Unfallchirurg. 110: 651-658.
Hsiao WC. , Braun P, Dunn D, Becker ER, DeNicola M, Ketcham
TR. 1988. Results and Policy Implications of the ResourceBased Relative Value Study. New England Med J. 319: 881-888.
Laxmaiah M , Singh V ea. 2012. Physician Payment Outlook for
2012. Pain physician 15:E27-E52
Roex AJM, Telgenkamp MLC. 1999. In: Honorering, werklast
en motivatie van medisch specialisten in balans, Berenschot
fundatie Elseviers Bedrijfsinformatie bv ’s Gravenhage.
MC-Informations 254 • décembre 2013
Enquête
« Combien payez-vous chez un médecin spécialiste ? »
Bram Peters, Katte Ackaert, Onderzoek en ontwikkeling
Avec nos remerciements à Birgit Gielen, Frank De Smet, Anja Crommelynck, Elise Henin et Michiel Callens.
Résumé
De septembre 2012 à juin 2013, la MC a réalisé une enquête en ligne afin de connaître le montant réel payé
par les patients à leurs médecins spécialistes. A cet effet, nous avons envoyé près de 700.000 mails à nos
membres qui ont consulté un spécialiste et nous avons reçu 154.505 réponses.
Cette enquête fait apparaître que dans 23,26% des consultations auprès de spécialistes conventionnés, en
moyenne, le patient a payé 9 euros de trop (arrondi à 0,5 euro toléré). Pourtant, les médecins conventionnés
ne peuvent pas réclamer de suppléments. En échange de leur engagement à la convention, un montant
(4.444 euros en 2013) est versé pour leur assurance pension, décès et invalidité.
D’autre part, les spécialistes non conventionnés ont respecté les tarifs de la convention dans 45,11% des
consultations (arrondi à 0,5 euro toléré). C’est assez surprenant puisqu’ils sont libres de demander des
suppléments. Les patients payent en moyenne 13,5 € de plus pour les consultations auprès de spécialistes
non conventionnés facturant des suppléments.
Les situations varient cependant fortement en fonction de la spécialisation du médecin. Parmi les spécialistes
conventionnés, ce sont les gynécologues (49%), les spécialistes en médecine physique et rééducation
fonctionnelle (35%) et les orthopédistes (35%) qui demandent le plus souvent des suppléments pour leurs
consultations. Par contre, toujours parmi les spécialistes conventionnés, les oncologues (5%), les spécialistes
en radiothérapie (11%) et les psychiatres (12%) sont ceux qui en réclament le moins souvent.
La MC a tiré trois leçons de cette enquête. Tout d’abord, il faut convenir d’une stratégie au niveau médicomutualiste concernant les médecins conventionnés qui ne respectent pas les tarifs. Ensuite, il s’avère
indispensable d’être plus transparents. La MC plaide pour des factures claires. Les patients connaitraient
ainsi précisément les montants qu’ils paient et la mutualité pourrait vérifier si la convention a bien été
respectée. Enfin, la MC souhaite encourager les spécialistes à signer – et respecter – la convention. Le taux
de conventionnement est en effet particulièrement bas chez les dermatologues, les ophtalmologues et les
gynécologues.
MC-Informations 254 • décembre 2013
31
1.Introduction
Tous les deux ans, mutualités et représentants des médecins
se réunissent pour conclure un accord fixant les tarifs et
conditions de remboursement de chaque prestation médicale.
Il s’agit plus précisément des honoraires officiels. La majeure
partie de ces honoraires sont à charge de l’assurance soins de
santé-invalidité (ASSI) et sont remboursés au patient par les
mutualités. Il revient au patient de s’acquitter personnellement
de la partie restante du tarif en vigueur, le ‘ticket modérateur’.
Les médecins qui adhèrent à l’accord sont tenus de respecter
les tarifs de la convention. En échange de quoi, ils perçoivent
une allocation annuelle et le statut social. Cette allocation
annuelle de 4.444 euros1 est investie dans une assurance pension ou invalidité.
Les médecins non-conventionnés ne sont pas tenus de suivre
les tarifs officiels. Ils sont libres d’attester des suppléments en
sus des tarifs de la convention. Le patient doit par conséquent
s’acquitter lui-même non seulement du ticket modérateur
officiel, mais également de ces suppléments.
cas, elle n’est pas complétée et/ou est détachée. D’autre part,
les attestations des SPRL ne comportent, quant à elles, pas de
souche fiscale.
La seule façon de connaître le montant effectivement payé
par les patients à leur médecin est de leur poser la question
individuellement.
En tant que mutualité, nous souhaitons veiller à ce que les
soins de santé restent financièrement accessibles et à ce que
la sécurité tarifaire soit garantie. L’accord entre médecins et
mutualités (point 9), prévoit que les deux parties s’engagent
à tout mettre en œuvre pour en faire respecter et appliquer
correctement les dispositions. Cette étude, sans précédent en
Belgique, cadre donc non seulement avec cette mission mais
également avec notre rôle de défenseur du patient. Aucune
instance ou organisation ne connaît le coût réel des soins de
santé pour le patient. D’où l’importance de cette enquête pour
objectiver la problématique des suppléments.
Les questions posées sont simples :
En Belgique, 83,1 % de tous les médecins sont (partiellement)
conventionnés, avec un taux de conventionnement fortement
dépendant de la spécialisation. Chez les médecins généralistes, le taux de conventionnement (partiel) atteint les 88 %.
Chez les spécialistes, il s’élève à 77%. Dans certains groupes
de spécialistes, moins de la moitié des médecins sont
(partiellement) conventionnés (ex. dermatologues, gynécologues, …).
• Les médecins conventionnés facturent-ils des suppléments
et combien ?
• Les médecins non-conventionnés facturent-ils des
suppléments et combien ?
• Dans quelle mesure nos membres sont-ils informés du statut
de conventionnement de leur spécialiste ?
Nos membres nous font régulièrement savoir que des médecins
conventionnés demandent tout de même des suppléments et
que les suppléments portés en compte par certains médecins
non-conventionnés sont parfois particulièrement élevés. Il
ressort en outre d’une étude précédente que nos membres
éprouvent des difficultés, surtout chez les spécialistes, à
estimer le coût de la consultation (50 ans de l’AMI, MC Info 253
pp. 3-13.)
Enfin, il est également frappant qu’un patient ne reçoive aucune
preuve de paiement pour une visite chez un médecin. Il reçoit
bien une ‘attestation de soins donnés’, mais celle-ci ne précise,
dans la plupart des cas, pas le montant payé par le patient.
Plutôt qu’un montant, le médecin se contente de mentionner
‘oui’ ou ‘non’ dans la case prévue à cet effet.2
En principe, le montant payé doit également apparaître sur la
souche fiscale (‘reçu’) attachée à l’attestation. Si le patient
paie comptant, cette souche (bien que détachable) ne peut
pas être détachée par le médecin. Pourtant, dans de nombreux
32
1
Montant pour 2013, soumis à l’indexation.
2
Ce ‘oui’ ou ‘non’ répond à la question de savoir si l’intégralité du ticket modérateur a été facturée. Nous avons besoin de ces informations, en tant que
mutualité, pour savoir si le compteur MAF doit être alimenté.
MC-Informations 254 • décembre 2013
2. Collecte de données
Entre le 25 septembre 2012 et le 26 juin 2013, une enquête e-mail
a été adressée aux titulaires MC ayant eux-mêmes consulté un
spécialiste en ambulatoire ou dont une personne à charge a
consulté un spécialiste. Pour entrer en considération dans le
cadre de l’enquête, l’attestation du membre devait parvenir à
la mutualité pour remboursement moins de deux mois après
la consultation chez le spécialiste. Les titulaires inscrits pour
recevoir un récapitulatif de leurs remboursements par e-mail
(ci-après : l’extrait de compte électronique ou M30) ont reçu, le
jour suivant réception de ce récapitulatif, un e-mail les invitant
à participer à l’enquête.
Il importe de noter que la population de l’étude se limitait aux
membres MC ayant reçu des soins ambulatoires. Aucune
enquête n’a été envoyée aux patients hospitalisés. Les données
concernent uniquement les consultations au cabinet privé du
spécialiste ou les consultations ambulatoires à l’hôpital. Elles
ne concernent donc pas les consultations chez les généralistes,
les kinésithérapeutes, les dentistes, etc.
La simplicité et la clarté de l’enquête avaient toute leur
importance pour obtenir des données fiables. L’enquête portait
de ce fait systématiquement sur une consultation chez un
spécialiste. Si plusieurs consultations ambulatoires chez un
spécialiste apparaissaient sur un même extrait de compte
électronique, seule une enquête était envoyée concernant le
contact le plus récent. Si un patient avait consulté plusieurs
spécialistes le même jour, un spécialiste était retenu au hasard.
2.1 Le formulaire d’enquête
Le deuxième volet posait la question « Quel montant avez-vous
réellement payé à votre médecin ? » avec trois possibilités de
réponses. La première réponse possible faisait référence aux
honoraires officiels ; le montant correct était déjà complété.
Dans la deuxième réponse, le membre avait la possibilité de
signaler qu’il avait payé un autre montant et d’en préciser la
valeur. Le répondant pouvait enfin également indiquer s’il ne se
souvenait plus du montant payé.
Le troisième volet de l’enquête avait pour but de vérifier
dans quelle mesure les répondants étaient au courant du
statut de conventionnement du spécialiste consulté. Les
répondants pouvaient indiquer si leur spécialiste était oui ou
non conventionné, s’ils n’en savaient rien ou s’ils ignoraient ce
qu’est un médecin « conventionné ».
2.2Réponses
686.899 e-mails ont été envoyés, invitant les membres à
participer à l’enquête, pour 154.505 réponses exploitables
pour l’étude des suppléments.
Lors de la vérification de la représentativité des réponses
exploitables, il s’est avéré que la plupart des spécialistes
non-conventionnés en Belgique étaient représentés dans
les résultats de l’enquête (Tableau 1). Le nombre d’enquêtes
complétées pour des consultations chez des spécialistes
conventionnés et partiellement conventionnés est moins élevé.
Quatre spécialistes (partiellement) conventionnés sur dix sont
présents dans les réponses. Ces résultats laissent supposer que
les membres qui estimaient avoir trop payé sont surreprésentés
dans les résultats de l’enquête.
L’enquête comportait trois volets (voir image ci-dessous). Le
premier volet était automatiquement complété et précisait le
nom du patient, le nom du médecin, la date de consultation, le
montant total (honoraires officiels), le montant remboursé par
la MC et la quote-part patient (tels que mentionnés sur l’extrait
de compte).
Tableau 1: Comparaison entre le nombre de spécialistes actifs en Belgique et dans les enquêtes selon le
statut de conventionnement
Statut de
conventionnement
Nombre total de
spécialistes actifs
Nombre de spécialistes
dans les enquêtes
% de spécialistes dans
l’enquête
Non-conventionné
4.684
4.347
93%
Conventionné
15.480
6.224
40%
Partiellement conventionné
3.269
1.280
39%
MC-Informations 254 • décembre 2013
33
3. Analyse
3.1. Respect des tarifs de la convention
Il ressort de l’enquête qu’aucun supplément n’est demandé
dans plus de la moitié des consultations. Lorsqu’un supplément
est porté en compte, il s’agit dans la plupart des cas de
suppléments inférieurs à un euro. Pour tenir compte des
arrondis des tarifs officiels, le pourcentage de consultations qui
ne dérogent pas aux tarifs officiels est calculé selon 3 niveaux
d’arrondis : pas d’arrondi, un arrondi vers le haut jusqu’à 0,5
euro et un arrondi vers le haut jusqu’à un euro.
Supposons que le tarif officiel d’une prestation soit de 21,63
euros et que le spécialiste demande 22 euros, 0,37 euros de
trop ont au final été demandés. Si l’on tient toutefois compte
d’un arrondi de €0,50 vers le haut, les 22 euros demandés seront
considérés comme corrects.
Attention, un arrondi d’un euro vers le haut ne signifie pas en soi
qu’un euro de plus est demandé.
Les personnes ayant l’impression d’avoir trop payé ont plus
tendance à répondre à ce type d’enquête. Dès lors, on peut
s’attendre à ce que les pourcentages mentionnés ci-dessous
soient en réalité moins importants.
Chez les spécialistes conventionnés
Tableau 2: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes conventionnés où
le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par type d’arrondi
Type d’arrondi (euro)
Respect du tarif de la convention
Supplément porté en compte
Tarif officiel
72,97%
27,03%
Arrondi de max. 0,5
76,74%
23,26%
Arrondi de max. 1
78,15%
21,85%
Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes conventionnés, 23,26 % ont été surfacturées (arrondi de 0,5 euro
toléré) . À l’inverse, parmi les spécialistes conventionnés, dans 76,74 % des consultations, aucun supplément de plus de 0,5 euro
n’a été porté en compte.
34
MC-Informations 254 • décembre 2013
5
Chez les spécialistes non-conventionnés
Tableau 3: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes non-conventionnés
où le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par type d’arrondi
Type d’arrondi (euro)
Respect du tarif de la convention
Supplément porté en compte
Tarif officiel
44,34%
55,66%
Arrondi de max. 0,5
45,11%
54,89%
Arrondi de max. 1
45,70%
54,30%
Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes non-conventionnés, 54,89 % ont été surfacturées de plus de 0,5
euro. À l’inverse, dans 45,11 % des consultations de l’enquête, aucun supplément de plus de 0,5 euro n’a été demandé. Ce dernier
constat est plutôt frappant sachant que les spécialistes non-conventionnés sont libres de facturer des suppléments.
Chez les spécialistes partiellement conventionnés
Les médecins partiellement conventionnés sont tenu de communiquer à l’INAMI les heures durant lesquelles ils sont ou ne sont
pas conventionnés. Le statut de conventionnement du médecin dépendra par conséquent du moment de la consultation. Sachant
que nous ne disposons pas de ces informations, nous considèrerons ce groupe « à part ».
Tableau 4: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes partiellement conventionnés où le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par
type d’arrondi
Type d’arrondi (euro)
Respect du tarif de la convention
Supplément porté en compte
Tarif officiel
54,55%
45,45%
Arrondi de max. 0,5
56,53%
43,47%
Arrondi de max. 1
57,56%
42,44%
Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes partiellement conventionnés, 43,47 % ont attesté plus qu’un
arrondi de 0,5 euro. Inversement, aucun supplément de plus de 0,5 euro n’a été demandé dans 56,53 % des consultations de
l’enquête chez des spécialistes partiellement conventionnés.
6
MC-Informations 254 • décembre 2013
35
3.2. Montant des suppléments
Dans cette partie, nous considérons comme supplément tout dépassement du tarif. Étant donné que nous allons considérer des
médecins de différentes spécialisations et qu’à chaque spécialisation est associé un nombre conséquent de prestations, ellesmêmes assorties de tarifs différents, il importe – en plus de la moyenne des suppléments – de considérer également leur répartition.
Tableau 5: Moyenne et répartition des suppléments, selon le statut de conventionnement (en euros)
Enquêtes concernant
Nombre de
consultations
Moyenne
P5
P25
Médiane
P75
P95
tous les spécialistes
154.505
5,6
0,0
0,0
0,0
7,8
24,7
spécialistes nonconventionnés
91.391
7,4
0,0
0,0
2,9
10,9
26,4
spécialistes
conventionnés
49.888
2,3
0,0
0,0
0,0
0,3
15,0
spécialistes
partiellement
conventionnés
13.225
5,8
0,0
0,0
0,0
7,8
26,3
Dans plus de la moitié des consultations de l’enquête, aucun supplément n’est demandé, qu’importe le statut de conventionnement
du spécialiste (la médiane est nulle dans la première ligne du Tableau 5). La médiane est uniquement supérieure à 0 pour les
spécialistes non-conventionnés. Le Tableau 6 suit la même tendance, mais uniquement pour les consultations où des suppléments
ont été portés en compte.
Tableau 6: Moyenne et répartition des suppléments, si des suppléments ont été portés en compte, selon
le statut de conventionnement
Enquêtes concernant
Nombre de
consultations
Moyenne
P5
P25
Médiane
P75
P95
tous les spécialistes
70.361
12,6
0,7
4,7
8,9
15,9
34,8
spécialistes nonconventionnés
50.866
13,5
1,4
5,9
9,8
16,3
35,5
spécialistes
conventionnés
13.484
9,0
0,1
1,3
5,5
11,3
29,7
spécialistes
partiellement
conventionnés
6.011
12,8
0,7
4,4
8,8
16,3
39,3
Si des suppléments sont portés en compte, leurs montants varient selon le statut de conventionnement (Tableau 6). Les spécialistes
non-conventionnés facturent - comme escompté - les suppléments les plus élevés, les suppléments les moins élevés sont réclamés
par les spécialistes conventionnés. Dans la moitié des enquêtes où des suppléments ont été portés en compte par des spécialistes
non-conventionnés, le supplément est d’au moins 9,8 euros. Chez les spécialistes conventionnés, il s’élève à 5,5 euros. Les
spécialistes partiellement conventionnés se situent comme toujours entre les deux.
36
MC-Informations 254 • décembre 2013
Tableau 7: Résumé par spécialisation
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Nombre d’enquêtes relatives à des
consultations
% de consultations où la
convention n’a pas été respectée
(sans arrondi)
% de consultations où la
convention n’a pas été respectée
(arrondi jusque €0,5)
Supplément moyen en €
Supplément médian en €
Nombre d’enquêtes relatives à des
consultations
Supplément moyen en €
Supplément médian en €
Spécialistes non conventionnés
Taux de convention-nement en
Belgique
Spécialistes conventionnés
Psychiatrie
79%
5.510
17,51%
11,78%
0,53
0
1.717
6,55
0
Pédiatrie
80%
4.470
19,75%
13,65%
0,72
0
1.181
3,46
0
Cardiologie
67%
4.447
38,05%
34,99%
3,33
0
2.971
7,74
0
Ophtalmologie
31%
4.250
25,18%
18,21%
1,26
0
20.295
5,59
1,13
Chirurgie orthopédique
42%
3.627
32,95%
31,54%
3,4
0
12.532
7,71
5,85
Médecine interne
87%
3.483
15,71%
12,03%
1,7
0
944
5,84
0
Otorhinolaryngologie
45%
2.983
35,00%
31,78%
2,3
0
4.845
5,68
3,33
Gastro-entérologie
67%
2.512
29,42%
28,03%
3,3
0
1.719
6,82
0
Gynécologie et obstétrique
31%
2.488
49,84%
48,83%
5,21
0
18.276
10,38
8,33
Chirurgie
69%
2.223
27,71%
25,06%
1,94
0
3.322
8,69
0
Neurologie
76%
2.206
18,72%
14,42%
1,36
0
746
4,03
0
Pneumologie
82%
1.966
22,43%
19,58%
2,82
0
460
7,57
2,55
Médecine physique et
revalidation
61%
1.754
38,83%
35,29%
3,95
0
3.609
9,4
4
Dermatovénérologie
20%
1.371
25,60%
19,48%
2,21
0
15.221
5,82
1,93
Urologie
47%
1.345
32,27%
31,23%
2,86
0
3.250
8,47
5,85
Rhumatologie
53%
1.285
22,41%
18,21%
1,86
0
1.776
5,54
0
Anesthésie-réanimation
86%
696
20,12%
18,53%
2,28
0
319
11,06
0
Oncologie médicale
82%
615
10,41%
5,37%
0,47
0
167
4,37
0
Neurochirurgie
56%
548
30,84%
29,38%
3,65
0
1.354
6,92
0
Stomatologie
48%
430
25,12%
24,42%
6,29
0
1.205
8,91
0
Radiodiagnostic
60%
401
33,42%
30,18%
5,45
0
6.449
8,71
4,54
Neuropsychiatrie
77%
338
20,12%
12,43%
0,8
0
459
6,96
0
Radiothérapie
84%
288
11,81%
11,11%
0,85
0
68
3,47
0
Médecine nucléaire
89%
286
31,82%
30,77%
6,07
0
120
18,99
3,33
Gériatrie
96%
133
20,30%
19,55%
1,34
0
11
1,5
0
Chirurgie plastique
28%
92
16,30%
15,22%
3,48
0
1.163
9,67
0
Biologie clinique
92%
87
26,44%
25,29%
4,3
0
435
6,32
0
Spécialisation
MC-Informations 254 • décembre 2013
37
3.3. Suppléments par spécialisation
Sur base du tableau 7, nous pouvons analyser la situation
de chaque spécialisation sur base individuelle. Une brève
description de la signification des principales colonnes du
tableau s’avère nécessaire pour une interprétation correcte.
Le taux de conventionnement reflète dans quelle mesure les
médecins qui exercent cette spécialisation sont conventionnés.
Le nombre de consultations chez des spécialistes conventionnés ou non-conventionnés dans l’enquête permet de voir
dans quelle mesure les colonnes à droite de cette colonne
sont étayées par suffisamment d’observations. La colonne « %
de consultations où la convention n’est pas respectée (sans
arrondi) » donne le pourcentage de consultations qui ont été
surfacturées par des médecins conventionnés qui n’ont donc
pas respecté les tarifs de la convention, chaque centime
d’euro étant considéré comme supplément. La colonne « % de
consultations où la convention n’est pas respectée (arrondi à
0,5 euro) » présente la même chose, mais pour à un supplément
supérieur à 0,5 euro. Il s’agit en l’occurrence du nombre de
consultations où la convention n’a pas été respectée et non
pas du pourcentage de médecins qui ne respectent pas les
tarifs de la convention. Les colonnes « supplément moyen »
et « supplément médian » donnent un aperçu du supplément
moyen et de la médiane pour toutes les consultations
de l’enquête chez des médecins conventionnés et nonconventionnés de différentes spécialisations. Il est évident
que si tous les médecins conventionnés d’une spécialisation
donnée facturaient les tarifs officiels, un zéro apparaîtrait dans
les colonnes « supplément moyen » et « supplément médian ».
Quatre groupes peuvent être identifiés à partir du tableau 7.
Gynécologues :
Le taux de conventionnement (31%) est aussi bas que le taux
de consultations chez des gynécologues conventionnés
respectant le tarif de la convention (51%). En outre, c’est chez
les gynécologues que les suppléments moyens sont les plus
élevés. Cette spécialisation présente un profil particulier.
Cardiologues, orthopédistes, ORL, urologues et spécialistes en
médecine physique et revalidation :
Le taux de conventionnement de ces spécialisations pourrait
être meilleur. En outre, 31 % des consultations chez des
médecins conventionnés de ces spécialisations ont été
facturées à un tarif supérieur au tarif de la convention.
Les autres spécialisations ont des profils moins spécifiques.
3.4. Connaissances à propos de la convention
La deuxième question de l’enquête portait sur le statut de
conventionnement du spécialiste traitant. Chaque répondant
pouvait compléter jusqu’à 4 fois l’enquête. Nous avons décidé
de ne retenir pour ce volet de l’analyse que la première
enquête complétée de chaque répondant. Il est en effet
possible qu’un répondant, après avoir complété l’enquête,
s’informe et en sache par conséquent davantage sur le statut
de conventionnement de son spécialiste lors de l’enquête
suivante. Les enquêtes précédemment laissées de côté parce
que le montant effectivement payé n’était pas complété ont été
réintégrées dans ce volet de l’analyse.
62,33 % des répondants ont indiqué ne pas savoir si leur
spécialiste était conventionné. Et 18,39 % ont en outre précisé
qu’ils ne savaient pas ce que ‘conventionné’ signifie.
En comparant le nombre de répondants pensant que leur
spécialiste est conventionné avec le statut de conventionnement
réel de leur spécialiste, nous pouvons calculer dans quelle
mesure les répondants, qui pensaient connaître le statut
de conventionnement de leur spécialiste, sont dans le bon.
Nous avons ainsi pu constater que 34,32 % des répondants
qui pensaient que leur spécialiste était conventionné se sont
trompés.
Ophtalmologues et dermatologues :
Le taux de conventionnement de ces spécialisations est
particulièrement bas (respectivement 31 % et 20 %), tandis
que la convention est bien respectée (respectivement 75 % et
74 %). Le principal problème réside donc dans le faible taux de
conventionnement.
Psychiatres, pédiatres, spécialistes en médecine interne,
pneumologues et neurologues :
Ces spécialistes sont majoritairement conventionnés. Sur
toutes les consultations chez ces spécialistes conventionnés,
le tarif de la convention a été suivi dans au moins 81 % des
cas. Sur base des résultats de notre enquête, nous pouvons
conclure que le patient qui consulte ces spécialistes a le moins
de chance de payer des suppléments.
38
MC-Informations 254 • décembre 2013
4.Conclusion
4.1 Que ressort-il de l’étude ?
Il ressort de cette étude que 77 % des consultations chez des
spécialistes conventionnés sont facturées suivant les tarifs de
la convention et que ce chiffre atteint tout de même 45 % chez
les spécialistes non-conventionnés. Cette étude a toutefois
révélé l’existence de certains problèmes. Des suppléments
ont en effet été demandés dans 23 % des consultations chez
des spécialistes conventionnés et 55 % des consultations
chez des spécialistes non-conventionnés de notre enquête. En
outre, le taux de conventionnement de certaines spécialités est
particulièrement faible et il s’avère donc très compliqué pour le
patient de trouver un médecin conventionné.
• Transparence : Les patients et leurs mutualités doivent être
informés du prix réel des soins de santé pour le patient, ce qui
signifie que la facture doit préciser les honoraires officiels de
chaque prestation, qu’importe le statut de conventionnement
du médecin traitant et le montant effectivement payé par le
patient. Cela permettrait, d’une part, aux patients de savoir
pour quoi ils paient et d’autre part, à la mutualité de vérifier
le respect de la convention. Parallèlement à la mutualité,
le médecin a lui aussi pour tâche d’informer ses patients à
propos de son statut de conventionnement et de ses tarifs. Il
le fait malheureusement trop rarement.
Il ressort de l’analyse des suppléments payés qu’un patient paie
en moyenne 5 euros de moins lorsqu’il consulte un spécialiste
conventionné. L’enquête révèle également que la plupart des
répondants ne savent pas si leur spécialiste est conventionné,
voire même - pour certains - ce que ‘conventionné’ veut dire.
• Améliorer le taux de conventionnement : Le conventionnement doit être rendu plus attrayant par l’instauration
d’incitants. Le patient n’a pratiquement pas le choix chez
certains spécialistes comme les dermatologues, les
ophtalmologues et les gynécologues.
Quatre groupes sont clairement distinguables parmi les spécialisations:
• Haut niveau de conventionnement et respect élevé de la
convention: psychiatres, pédiatres, spécialistes en médecine
interne, pneumologues et neurologues
• Faible niveau de conventionnement et respect élevé de la
convention: ophtalmologues et dermatologues
• Taux de conventionnement relativement faible et respect
relativement faible de la convention: cardiologues, orthopédistes, ORL, urologues et spécialistes en médecine
physique et revalidation
• Très faible taux de conventionnement et très faible respect
de la convention: gynécologues
Les autres spécialisations ont des profils moins spécifiques.
4.2 Quelles solutions la MC propose-t-elle ?
Il est de notre devoir, en tant que mutualité, de garantir
l’accessibilité des soins. Il nous revient par conséquent
également, en tant que cosignataire de l’Accord, de vérifier si
ce dernier est bel et bien respecté. D’où notre volonté d’avancer
les trois objectifs prioritaires suivants, étroitement liés :
• Approche des médecins conventionnés qui attestent des
suppléments : La MC souhaite soumettre le problème des
spécialistes conventionnés qui demandent des suppléments
aux associations de médecins et définir une approche dans
le cadre de la concertation médico-mutualiste.
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