Imagerie des métastases osseuses.

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C. Proust, J. Proust, A. Maubon
Imagerie des métastases osseuses.
C. Proust*, J. Proust**, A. Maubon*
*Département de radiologie et d’imagerie médicale
**Département d’Orthopédie traumatologie
Hôpital Universitaire Dupuytren - Limoges
Résumé
Les métastases sont les tumeurs osseuses les plus fréquentes. Elles correspondent à la
dissémination de cellules tumorales à distance de la tumeur initiale. Il existe des métastases
ostéolytiques, ostéocondensantes et mixtes. Les auteurs rappellent les caractéristiques radiologiques de ces dernières ainsi que leur étude en imagerie par résonance magnétique. La différence
entre un tassement ostéoporotique bénin et tumoral malin est également évoquée constituant un
problème diagnostique quotidien.
La radiologie standard étant parfois insuffisante le scanner et l’imagerie par résonance
magnétique permettent une meilleure approche diagnostique.
Os / Métastase / TDM / IRM
INTRODUCTION
!Les métastases sont les tumeurs osseuses les plus fréquentes (70 % des
tumeurs malignes), elles correspondent à la dissémination de cellules
tumorales à distance de la lésion tumorale primitive. L’os constitue le
site privilégié des métastases, alors
qu’il ne reçoit que 5 % du flux sanguin. Sa contamination se fait essen-
tiellement par voie hématogène. Plus
rarement, l’atteinte osseuse se fait par
contiguïté ou extension à partir d’un
site secondaire. Toutes les tumeurs
malignes peuvent métastaser au squelette. Les métastases osseuses sont
révélatrices d’un cancer dans 20 à 25
% des cas. Elles siègent essentiellement là où il existe de la moelle hématopoïétique.Ainsi plus de 80 % des
métastases sont situées au niveau du
squelette axial et lorsqu’elles sont
révélatrices, elles sont rachidiennes
dans 80 % des cas. N’importe quelle
partie des os longs peut être également touchée avec néanmoins une
atteinte métaphysaire ou au niveau du
tiers moyen de la diaphyse prépondérante et le plus souvent bilatérale.
Les atteintes des extrémités ou acrométastases sont plus rares (incidence
estimée à 0,1 %). L’imagerie des métastases se décline selon des techniques différentes et complémentaires dont la radiographie, la tomodensitométrie (TDM), l’imagerie par résonance magnétique (IRM).
Correspondance : Carole Proust
Département de radiologie et d’imagerie médicale - Hôpital Universitaire Dupuytren
2 avenue Martin Luther King - 87042 Limoges cedex
Médecine Nucléaire -
Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2006 - vol.30 - n°3
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Imagerie des métastases osseuses
RADIOGRAPHIE ET
TOMODENSITOMETRIE
!Les métastases osseuses peuvent
être ostéolytiques, condensantes ou
mixtes.
Les métastases ostéolytiques
(Figure
1)
Figure 1
!Elles sont les plus fréquentes (75%)
parce qu’elles affectent l’os trabéculaire. Elles doivent avoir au moins
une taille centimétrique et s’accompagner d’une perte d’au moins 50 %
du contenu minéral osseux pour pouvoir être détectées en radiographie
[1,2]. Elles surviennent fréquemment
en cas de cancer du poumon, du sein,
du rein, de la thyroïde [3].
Figure 1 - Lésion ostéolytique de la
diaphyse fémorale
Osteolysis femur's diaphysis
fracturaire au fémur lorsque 50 % de
la circonférence corticale est lysée
[5,6]. L’augmentation du volume de
l’ostéolyse provoque une érosion
puis une rupture corticale (fracture
pathologique) avec éventuellement
envahissement des parties molles.
En règle générale, ces fractures pathologiques consolident mal. L’aspect
rencontré diffère selon la localisation [4] :
- os longs : atteinte fréquente des espaces médullaires centraux ; géodes
diaphysaires, uniques ou multiples,
fracture pathologique fréquente,
- rachis : atteinte corporéale et/ou de
l’arc postérieur, tassement corporéal,
- sacrum : disparition des trous sacrés,
- bassin : ostéolyse des branches ilio
et ischio-pubiennes, du fond du cotyle,
- crâne : lacune de la voûte
La survenue d’un tassement vertébral
non traumatique a fortiori chez un patient cancéreux pose le problème de
diagnostic différentiel entre une origine bénigne ou maligne. Le contexte
clinique, biologique donne une première orientation. Les critères radioTableau II) permettent le
logiques (T
plus souvent une présomption suffisante. Si le doute persiste et en cas
de signes neurologiques (le tassement est alors presque toujours malin), un complément TDM et surtout
Tableau II
l’IRM (T
II) sont indiqués.
Ta bleau I Critères radiologiques en faveur de l’origine bénigne (ostéoporotique) ou maligne
(tumorale) d’un tassement vertébral [7]
[7]..
Radiologic aspects of benign (osteoporotic) and malignant features of spinal compression fractures
Ta bleau II Critères IRM en faveur de l’origine bénigne (ostéoporotique) ou maligne (tumorale)
d’un tassement vertébral [7]
[7]..
MRI aspects of benign (osteoporotic) and malignant features of spinal compression
fractures
Elles correspondent à des géodes radio transparentes, arrondies, ovalaires,
sans sclérose périphérique ni réaction
périostée ou alors à des lésions à limites floues (lésions perméatives).
Elles sont homogènes ou peuvent
contenir des septas. Elles peuvent être
de petite taille avec un aspect vermoulu ou plus volumineuses comme
on peut le voir dans les cancers du
rein et de la thyroïde [4]. On estime
classiquement qu’il existe un risque
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L’analyse des clichés radiologiques se
focalise sur l’environnement rachidien du tassement, la limitation ou
non des anomalies à l’environnement
immédiat du plateau vertébral tassé
et les anomalies éventuelles des tissus mous adjacents.Aucun critère n’a
de fiabilité absolue mais la convergence de plusieurs arguments radiologiques augmente le degré de présomption quant à l’origine du tassement.
L’examen TDM permet une meilleure
analyse de l’environnement fracturaire : perturbation architecturale et
fragmentation corticale sans disparition d’éléments osseux dans le tassement bénin, ostéolyse au sein du
plateau tassé dans le tassement malin, petite réaction circonférentielle au
sein des tissus mous péri-vertébraux
dans le tassement bénin, tuméfaction
franche ou asymétrique dans le tassement malin. La présence d’anomalies osseuses à distance du plateau
tassé ou dans l’arc postérieur est observée dans le tassement malin.
Lorsque les lésions sont multiples,
elles possèdent alors typiquement
une taille différente et une distribution non symétrique à la différence
du myélome. En effet, le myélome
pose un problème de diagnostic différentiel que ce soit en radiographie
ou en IRM (lésion ostéolytique arrondie ovalaire de taille sensiblement
identique et de contours nets rarement entourés d’un liseré d’ostéocondensation et parfois responsable
d’érosion endostée de la corticale
adjacente) [7].
rondies ovalaires, de contours bien
limités ou étendues en plage aux
contours plus flous. L’étendue peut
affecter tout ou partie d’une pièce
osseuse et donner un aspect dense
du squelette de façon uniforme ou
non. Au rachis, elle peut donner l’aspect de vertèbre ivoire (métastase es-
sentiellement d’origine prostatique).
Au niveau du rachis et du bassin, elle
ne s’accompagne pas d’épaississement de la corticale à la différence de
la maladie de Paget. La transformation
d’une plage de condensation en une
zone d’ostéolyse traduit la reprise évolutive du processus tumoral.
Figure 2 - Métastase vertébrale ostéocondensante : vertèbre ivoire
Blastic metastasis of vertebrae
Les métastases
ostéoblastiques
(Figures
3)
Figures 2 et 3
! Elles s’observent fréquemment
dans le cancer de la prostate des tumeurs carcinoïdes et moins souvent
au niveau du sein, de la vessie, du
poumon (petites cellules et adénocarcinomes) de la thyroïde (carcinome
médullaire) entre autres.
Les métastases ostéocondensantes
représentent 15 % des métastases osseuses. Elles peuvent être focales ar-
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Figur
er
tébr
ale
iguree 3 - Aspect TDM d’une lésion secondair
secondairee ostéocondensante v
ver
ertébr
tébrale
CT appearance of blastic metastasis of vertebrae
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Imagerie des métastases osseuses
Les métastases mixtes
!Elles représentent 10 % des métastases. Elles associent des images
d’ostéolyse et d’ostéocondensation.
Elles sont présentent fréquemment au
niveau du poumon, du sein, du col
utérin et moins fréquemment au niveau de l’ovaire, des testicules et du
tube digestif. Elles n’ont pas de caractère spécifique mais leurs limites
sont souvent imprécises [4].
Elles sont visibles le plus souvent
lorsqu’il y a une atteinte squelettique
diffuse et sont ostéolytiques avec fréquemment une masse dans les parties molles.
· Métastase articulaire [3].
Elles sont inhabituelles mais graves
sur le plan fonctionnel lorsqu’elles
affectent une articulation importante.
Il peut s’y associer une infiltration tumorale de la synoviale.
Cas particulier
· Métastase corticale [3] :
Les origines principales des tumeurs
corticales sont le poumon (45%), le
sein (14%), le rein (14%) et plus rarement, le pancréas, le larynx et l’utérus.
La métastase corticale peut se traduire par une ostéolyse intra-corticale
focale, excentrée ou complète. Elle
s’observe le plus souvent au niveau
des os longs, et ont un risque fracturaire supérieur.
ométastase [8] (F
Figur
· Acr
Acrométastase
iguree 4
4).
Les origines principales à la main sont
par ordre de fréquence décroissante
les carcinomes bronchiques, le sein
et le rein. Plus rarement, nous retrouvons le cancer de l’œsophage, du colon, du rectum, de la prostate, de l’utérus et de l’ostéosarcome. Au niveau
du pied, le colon, le rein et la vessie
sont des étiologies plus fréquentes
que le carcinome bronchique.
IMAGERIE PAR RÉSONANCE
MAGNÉTIQUE
!L’infiltration tumorale de la moelle
osseuse peut être détectée en IRM
avant la détection scintigraphique de
la réaction ostéoblastique associée
aux métastases [9, 10]. Plusieurs séquences peuvent être utilisées.
La séquence pondérée T1 permet habituellement une bonne détection
Figure
des localisations secondaires (Figure
5 ). Elle peut être associée à une séFigur
quence pondérée T2 (F
iguree 6
6) avec
ou sans saturation du signal de la
graisse et une séquence pondérée T1
après injection de Gadolinium pour
leur détection. Certains utilisent des
séquences en opposition de phase
[11] ou en diffusion [12, 13].
Les métastases ostéolytiques se manifestent en hyposignal T1, hyper-signal T2 et se rehaussent après injection de Gadolinium.
Les métastases ostéocondensantes se
manifestent en hyposignal T1, hyposignal T2 hétérogène. Elles ne se rehaussent que peu ou pas après injection de Gadolinium [7].
Cas particulier : les métastases contenant de la mélanine tel le mélanome
ou le cancer du rein peuvent se manifester en hypersignal T1. La présence de structures punctiformes ou
tubulées vides de signal en rapport
avec des éléments vasculaires est visible dans les métastases d’origine
rénale [14]. Des métastases comportant des niveaux liquide-liquide ont
été rapportées dans les carcinomes
neuro-endocrines urinaires [15].
L’IRM apporte des renseignements à
la fois sur l’os et les structures enviFigure 7
ronnantes (Figure
7). Elle permet également la détection d’anomalies éventuellement infra-radiologiques et la
répercussion des tassements vertébraux sur le canal rachidien en cas
de tassement vertébral. Le diagnostic
différentiel entre un tassement vertébral bénin récent et un tassement tumoral requièrent une analyse fine de
la déformation du corps vertébral, et
des tissus mous paraspinaux et épiduraux [7].
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL [3]
· D’une lésion unique : tumeur primitive maligne, plasmocytome granulome éosinophile chez le jeune,
énostose
· D’une vertèbre ivoire : maladie de
Paget, lymphome
· D’une lésion multiple : myélome,
lymphome, ostéopoécilie.
CONCLUSION
!Les métastases sont les tumeurs osseuses les plus fréquentes. Il en existe
différents types : métastases ostéolytiques, ostéoblastiques et mixtes. La
radiologie standard peut être insuffisante pour un diagnostic précoce. La
TDM et L’IRM permettent une approche diagnostique plus fine. L’IRM permet de plus une meilleure analyse des
structures avoisinantes, notamment
au niveau du rachis pour la recherche d’épidurite métastatique
Figur
ométastase ostéol
ytique
iguree 4 - Acr
Acrométastase
ostéolytique
Lytic acrometastasis
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Figure 5 - Localisation secondaire
pr
ostatique en pondér
ation T1
prostatique
pondération
MRI T1 weighted: metastasis of prostate
Figure 6 - Localisation secondaire
pr
ostatique en pondér
ation T2
prostatique
pondération
MRI T2 weighted: metastasis of prostate
Figure 7 - Epidurite métastatique
Metastatic epiduritis
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Imagerie des métastases osseuses
Radiologic aspects of metastastic bone disease
In the human body, metastases are the most frequently found bone tumors.We can
distinguish between lytic, blastic and mixed formes.
The authors recall the radiologic aspects of these last ones, and describe even so the
imagery with magnetic resonance. They also recall that major differences between a compressive
benign osteoporotic tumor and a malignant one remains an every day diagnostic problem.
Finally, magnetic resonance is proven to be a better diagnostic tool in comparison with the
radiologic standard examination.
Bone / Metastasis / CT scan / MRI
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